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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement.

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par Anne-Sophie LE GALL
Université de Strasbourg - Master 2 Droit de là¢â‚¬â„¢environnement, des territoires et des risques 2016
  

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Le bien--fondé d'une

juridiction internationale

spécialisée en droit de

l'environnement

Master 2 Droit de

l'environnement, des

territoires et des risques

Anne--Sophie LE GALL

sous la direction de Jochen SOHNLE

Université de Strasbourg

Faculté de Droit, Septembre 2016 Droit international de l'environnement

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

1

« Il faut toujours viser la lune, car même en cas d'échec,

on atterrit dans les étoiles »

Oscar WILDE

2

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Remerciements

Jochen SOHNLE

Marie-Pierre CAMPROUX DUFFRENE Loïc BARNIER

3

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Sommaire

Titre préliminaire : Introduction p 5

L'absence de définition juridique consensuelle de l'environnement p 5

L'obligation juridique des Etats de protéger l'environnement p 10

Problématique et annonce de plan p 16

Partie Ière : Le bien-fondé de l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit

de l'environnement p 21

Titre Ier : Les institutions internationales de protection de l'environnement p 21

Titre II: La réciprocité avec les règles du droit international économique p 25

Titre III : Les juridictions nationales p 31

Partie II : Le bien-fondé de l'extension de la compétence de juridictions internationales

existantes p 35

Titre Ier : La Cour Internationale de Justice (CIJ) p 35

Titre II: La Cour Pénale Internationale (CPI) p 41

Titre III: Le Tribunal international du droit de la mer p 45

Partie III : Le bien-fondé de la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en

droit de l'environnement p 48

Titre Ier : Initiatives et propositions politiques ou doctrinales p 48

Titre II: Sources d'inspiration de la nouvelle juridiction p52

Titre III: Les avantages et inconvénients de la création de cette juridiction p57

Conclusion p 61

4

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Liste des abréviations et des signes conventionnels

AG : Assemblée Générale (des Nations Unies)

CDB : Convention sur la Diversité Biologique

CICR : Comité International de la Croix Rouge

CIJ : Cour Internationale de Justice

CITES: Convention on International Trade in Endangered Species of Wild Fauna and Flora

CoE : Counsel of Europe

COP : Conference of Parties

CPI : Cour Pénale Internationale

CS : Conseil de Sécurité (des Nations Unies)

FAO: Food and Agriculture Organisation

FMI : Fonds Monétaire International

GATT : General Agreement on Tariffs and Trade

LEC: Land and Environment Court

UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses ressources

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

OMS: Organisation Mondiale de la Santé

ONU : Organisation des Nations Unies

OI: Organisation Internationale

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ORD : Organe de Règlement des Différends

PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement

UE : Union Européenne

UNESCO : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization

UNFCCC : United Nations Framework Convention on Climate Change

WWF : World Wildlife Fund

ZEE : Zone Economique Exclusive

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Titre préliminaire : Introduction

L'absence de définition juridique consensuelle de l'environnement

Où trouver une définition juridique de l'environnement? L'article 38 du statut de la Cour International de Justice (CIJ), considéré comme reflétant la coutume internationale, énumère les différentes sources du droit international. Parmi ces dernières se trouvent les sources primaires d'une part, à savoir les conventions internationales, la coutume internationale et les principes généraux du droit, et les sources secondaires d'autre part, c'est-à-dire les décisions judiciaires et la doctrine. Nous étudierons donc chacune de ces sources, dans l'ordre énoncé précédemment, afin de définir juridiquement l'environnement de la manière la plus complète possible.

Dans les conventions internationales

Si le recours à la notion d'environnement a été de plus en plus fréquent dans les conventions internationales environnementales générales sectorielles à partir de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) de 1992, force est de constater que sa définition ne figure dans aucun texte international contraignant.

En effet, la Convention de Ramsar, adoptée en 1971, reconnaît dans son préambule l'interdépendance de l'homme et de son environnement, sans toutefois définir la notion d'environnement. La Convention de l'UNESCO de 1972 ne mentionne même pas l'environnement.

La CITES de 1973, comme la Convention de Ramsar, cite l'environnement sans définir cette notion. En effet, elle fait référence au transport, dans un Etat, de spécimens d'espèces qui ont été pris dans l'environnement marin n'étant pas sous la juridiction d'un Etat, pour définir l'introduction d'espèces dans un Etat en provenance de la mer1. La Convention de Bonn de 1979, comme la Convention de l'UNESCO, ne fait pas référence à l'environnement.

La Convention de Montego Bay de 1982 prévoit que l'Etat côtier peut adopter des lois et règlements relatifs au passage inoffensif des navires d'autres Etats dans sa mer territoriale, qui peuvent porter sur la préservation de son environnement2. Toutefois, la Convention ne définit pas la notion d'environnement, qui n'est que très peu utilisée. Dans le texte français, la notion de `milieu' ou le terme `écologique' est en effet préféré au terme « environment» utilisé dans le texte anglais.

Le préambule de la Convention sur la diversité biologique de 1992 affirme la valeur intrinsèque de la diversité biologique et la valeur de la diversité et de ses éléments constitutifs sur le plan environnemental. Il reconnaît les nombreux avantages sur le plan environnemental des investissements importants nécessaires pour assurer la conservation de la diversité biologique.

1 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, Article I.

5

2 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 21.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La CDB a recours à la notion d'environnement non vivant pour définir un écosystème. En outre, la Convention définit un écosystème comme un complexe dynamique formé de communautés de plantes, d'animaux et de micro-organismes et de leur environnement non vivant qui par leur interaction, forment une unité fonctionnelle3. Par ailleurs, elle consacre plusieurs obligations des Etats en utilisant la notion d'environnement.

Ainsi, bien qu'on puisse noter une utilisation importante du terme « environnement» dans la CDB, la Convention ne définit pas cette notion. L'UNFCCC de 1992 fait aussi de nombreuses fois référence à l'environnement.

En particulier, son préambule souligne le fait que les mesures permettant de comprendre les changements climatiques et d'y faire face auront une efficacité pour l'environnement maximale si elles se fondent sur les considérations scientifiques, techniques et économiques appropriées et si elles sont constamment réévaluées à la lumière des nouveaux progrès réalisés dans ce domaine. Enfin, il note que diverses mesures prises pour faire face aux changements climatiques peuvent contribuer à résoudre d'autres problèmes d'environnement.

De plus, la Convention définit les effets néfastes des changements climatiques comme les modifications de l'environnement physique ou des biotes dues à des changements climatiques et qui exercent des effets nocifs significatifs sur la composition, la résistance ou la productivité des écosystèmes naturels et aménagés, sur le fonctionnement des systèmes socio-économiques ou sur la santé et le bien-être de l'homme4.

Comme pour la CDB, l'UNFCCC a de nombreuses fois recours à la notion d'environnement, dans son préambule ou dans sa convention, pour définir d'autres notions ou pour consacrer les obligations des Etats, sans toutefois définir l'environnement. Il faut par conséquent chercher une définition de l'environnement dans d'autres sources du droit international.

Dans la coutume internationale

La coutume internationale est, selon l'article 38 de la CIJ, « une pratique générale acceptée comme étant le droit ». Existe-t-il une définition coutumière de l'environnement? Plusieurs instruments de soft law font référence à l'environnement.

En particulier, le préambule de la Déclaration de Stockholm de 1972 note la nécessité d'adopter une conception commune et des principes communs qui inspireront et guideront les efforts des peuples du monde en vue de préserver et d'améliorer l'environnement. Elle proclame que « l'Homme est à la fois créature et créateur de son environnement, qui assure la subsistance physique de l'Homme et lui offre la possibilité d'un développement intellectuel, moral, social et spirituel ». Selon la Déclaration, il existe deux éléments de l'environnement de l'Homme, à savoir l'élément naturel et celui que l'Homme a lui-même créé. Les deux sont indispensables au bien-être humain et à la pleine jouissance de ses droits fondamentaux, y compris le droit à la vie même.

3 Convention sur la diversité biologique, Article 2.

6

4 Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, Article premier.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Ainsi, la Déclaration de Stockholm de 1972 adopte une vision très anthropocentrée de l'environnement. Elle semble indiquer qu'il existe `d'autres' environnements, qui s'ajoutent à l'environnement de l'être humain.

L'UNFCCC fait référence à la Résolution 44/228 de l'Assemblée Générale des Nations Unies de 1989. Par cette résolution, l'Assemblée Générale des Nations Unies décide de convoquer la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement qui durera deux semaines5 et se tiendra au Brésil.

Elle détermine les objectifs de la Conférence de Rio, notamment celui de promouvoir le développement du droit international de l'environnement, compte tenu de la Déclaration de Stockholm, ainsi que des besoins et préoccupations des pays en développement, et examiner dans ce contexte la possibilité et l'opportunité de définir les droits et devoirs généraux des Etats dans le domaine de l'environnement, compte tenu des instruments de droit international qui existent déjà en la matière6. Un autre objectif de la Conférence de Rio est d'évaluer les moyens dont dispose le système des Nations Unies pour aider à prévenir et à résoudre les différends dans le domaine de l'environnement et recommander des mesures à cet égard, tout en respectant les accords bilatéraux et internationaux existants qui prévoient le règlement de différends de cette nature7.

La Résolution 44/228 de l'Assemblée Générale des Nations Unies de 1989, bien que prévoyant l'organisation d'une conférence internationale portant sur l'environnement, ne définit pas cette notion.

La Déclaration de Rio de 1992 oeuvre en vue d'accords internationaux qui respectent les intérêts de tous et protègent l'intégrité du système mondial de l'environnement et du développement. Elle établit 27 principes.

Elle énonce en particulier le principe selon lequel le droit au développement doit être réalisé de façon à satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l'environnement des générations présentes et futures8.

La Déclaration de Rio utilise la notion d'environnement pour définir le développement durable, sans toutefois définir cette notion, tout comme la Résolution 44/228 de l'AG.

5 Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, partie I, paragraphe 1.

6 Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, partie I, paragraphe 15 (d).

7 Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, partie I, paragraphe 15 (w).

7

8 Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, Principe 3.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Les juridictions internationales ont pu admettre la valeur coutumière de certaines dispositions issues de la soft law, en particulier des Déclarations de Stockholm et de Rio, telles que le principe de non dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international, le principe de prévention et plus récemment le principe de précaution (voir plus loin, La nécessité de protéger l'environnement en droit dans la jurisprudence internationale).

La définition de l'environnement posée par la Déclaration de Stockholm de 1972 fait partie du préambule de la Déclaration et non des principes qu'elle énonce. Sa force juridique est donc moindre que les dispositions du corps de la Déclaration.

De nombreux textes postérieurs à la Déclaration de Stockholm font référence à cette dernière. Ainsi, la Résolution 44/228 de l'Assemblée Générale des Nations Unies de 1989 rappelle la Déclaration de Stockholm. De plus, la Déclaration de Rio de 1992 réaffirme la Déclaration de Stockholm, et cherche à en assurer le prolongement. Enfin, le préambule de l'UNFCCC de 1992 rappelle à la fois les dispositions pertinentes de la Déclaration de Stockholm et de la Résolution 44/228 de l'AG.

Cependant, la définition de l'environnement de la Déclaration de Stockholm n'est reprise expressément ni par la Résolution 44/228 de l'AG, ni par la Déclaration de Rio, ni par l'UNFCCC. Ainsi, il semble difficile d'affirmer qu'il existe une pratique générale consistant à définir l'environnement, acceptée comme étant le droit. Il ne semble donc pas exister de définition coutumière de l'environnement.

Dans les principes généraux du droit international

Les Constitutions allemande, américaine, australienne, canadienne et néo-- zélandaise ne font pas de référence expresse à l'environnement. Les Constitutions de la Chine9, de l'Espagne10, du Kenya11, du Maroc12, de la Suisse13 et du Vietnam14 font référence à l'environnement, sans toutefois définir cette notion.

La Constitution indienne de 1950 fait référence aux forêts, rivières et animaux sauvages comme composantes de l'environnement naturel, sans toutefois définir cette notion15. La Constitution de la Bolivie de 2009 fait référence à des actes qui portent atteinte à la faune, la flore, l'eau et l'environnement, ce qui suggère que ces trois éléments sont distincts de la notion d'environnement16.

9 Constitution de la République populaire de Chine, Article 26.

10 Constitution de l'Espagne, Articles 45, 148 et 149.

11 Constitution du Kenya, Article 42 et Articles 69 à 72.

12 Constitution du Maroc, Articles 31 et 71.

13 Constitution fédérale de la Confédération suisse, Sections 65, 73-80, 86, 104, 120, 197.

14 Constitution de la République socialiste du Vietnam, Articles 29 et 112.

15 Constitution de l'Inde, partie IV A, Article 51 A (g).

8

16 Constitution de la République de Bolivie, Article 189.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

En ce qui concerne la France, la Charte de l'environnement de 2004 définit l'environnement dans son préambule comme « le patrimoine commun des êtres humains », tandis que la Constitution du Brésil de 1988 définit l'environnement comme un « bien à l'usage commun du peuple et essentiel à une saine qualité de vie »17.

Il en résulte que les rares Constitutions nationales qui définissent l'environnement paraissent le définir comme un bien commun. Cependant, ces définitions ne semblent pas assez fréquentes pour que le juge puisse en tirer un principe général du droit.

Dans la jurisprudence internationale

Les affaires de la fonderie de Trail (Tribunal arbitral), du détroit de Corfou (CIJ), et du lac Lanoux (Tribunal arbitral) ne font pas directement référence à la notion d'environnement.

Il faut attendre l'avis de la CIJ sur la licéité de la menace et de l'emploi des armes nucléaires de 1996, pour que la CIJ utilise la notion d'environnement. Dans cet avis, la CIJ a défini l'environnement comme n'étant « pas une abstraction, mais bien l'espace où vivent les êtres humains et dont dépendent la qualité de leur vie et leur santé, y compris pour les générations à venir »18. Cette définition de l'environnement est, tout comme celle de la Déclaration de Stockholm, anthropocentrée. Dans les deux définitions de l'avis de la CIJ et de la Déclaration de Stockholm se retrouve la dépendance de l'Homme pour sa survie vis-à-vis de son environnement.

Il est intéressant de souligner que l'apparition du terme 'environnement' dans le vocabulaire utilisé par la CIJ (1996) coïncide avec l'apparition du terme dans la Convention sur la Diversité Biologique de 1992. Il semble que le juge international ait tenté de pallier l'absence de définition prévue par le droit primaire.

Dans l'affaire relative au projet Gabèikovo--Nagymaros19, la CIJ réaffirme sa définition de l'environnement, telle que formulée dans son avis sur la licéité de la menace et de l'emploi des armes nucléaires.

Dans l'affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, le Tribunal arbitral note que dans le domaine du droit international de l'environnement, les règles et principes, la soft law et le droit coutumier font tous référence à l'environnement de façon générale comme incluant l'air, l'eau, les sols, la faune et la flore, les écosystèmes et sites naturels, la santé et sécurité humaine et le climat20.

17 Constitution de la République fédérative du Brésil, Article 225.

18 CIJ, Licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, p 19 et 20, paragraphe 29.

19 CIJ, Affaire relative au projet Gabèikovo-Nagymaros, arrêt du 25 septembre 1997, Slovaquie/Hongrie, p 38, paragraphe 53.

9

20 Tribunal arbitral, Affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, sentence du 24 mai 2005, Belgique/Pays-Bas, p 28, paragraphe 58.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

L'avis consultatif de la chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins du Tribunal international du droit de la mer sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone fait de nombreuses fois référence à la notion d'environnement, sans la définir. L'affaire de la CIJ de la chasse à la baleine dans l'Antarctique ne définit pas non plus cette notion, bien qu'elle y fasse bien moins référence.

Par conséquent, la définition de l'environnement varie selon les juridictions internationales (CIJ ou Tribunal arbitral).

Dans la doctrine internationale

Le Conseil de l'Europe, dans son Manuel sur les droits de l'Homme et l'environnement de 2012, note qu'il n'existe pas à ce jour de définition juridique de l'environnement acceptée par tous21.

Ainsi, il semble qu'il n'existe pas de définition juridique consensuelle de l'environnement, que cela soit dans les sources primaires ou secondaires du droit international. Pour autant, cela n'empêche pas les sources du droit international de consacrer l'obligation des Etats de protéger l'environnement.

L'obligation juridique des Etats de protéger l'environnement

Parce que l'environnement ne connaît pas de frontière, il existe de nombreux exemples historiques et récents d'atteintes à l'environnement à l'échelle internationale, ce qui a amené le droit international à évoluer dans ce domaine. Différentes sources du droit international, à valeur plus ou moins contraignante, consacrent l'obligation juridique des Etats de protéger l'environnement.

Dans les conventions internationales

En particulier, des conventions internationales environnementales générales sectorielles font apparaitre que la nécessité de protéger l'environnement en droit international est une contrepartie de la souveraineté des Etats sur leurs ressources.

En premier lieu, la Convention de Montego Bay de 1982 affirme le droit souverain des Etats d'exploiter leurs ressources naturelles selon leur politique en matière d'environnement22. Cependant, elle dispose aussi que les Etats prennent toutes les mesures nécessaires pour que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle le soient de manière à ne pas causer de préjudice par pollution à leur environnement23.

21 Conseil de l'Europe, Manuel sur les droits de l'Homme et l'environnement, 2012, p 15.

22 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 193.

10

23 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 194.

11

24 Convention sur la diversité biologique, Article 3.

25 Déclaration de Stockholm, Principe 21.

26 Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, partie I, paragraphe 7.

27 Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, partie I, paragraphe 8.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

De plus, la Convention sur la diversité biologique de 1992 rappelle le droit souverain de chaque Etat d'exploiter ses propres ressources selon sa politique d'environnement, mais aussi son devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de sa juridiction ou sous son contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres Etats24.

Enfin, le préambule de l'UNFCCC de 1992 rappelle le droit souverain des Etats d'exploiter leurs propres ressources selon leur propre politique d'environnement et de développement et le devoir des Etats de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale.

Dans la coutume internationale

En plus des conventions internationales citées précédemment, plusieurs instruments de soft law font référence au droit souverain des Etats d'exploiter leurs ressources, tout en rappelant leur l'obligation de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international.

Tout d'abord, selon la Déclaration de Stockholm de 1972, conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, les Etats ont le droit souverain d'exploiter leurs propres ressources selon leur politique d'environnement et ils ont le devoir de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale25.

Par ailleurs, dans sa Résolution 44/228 de 1989, l'AG réaffirme, en vertu de la Charte des Nations Unies et des principes applicables en droit international, le droit souverain des Etats d'exploiter leurs propres ressources conformément à leur politique écologique. Elle réaffirme également qu'il incombe aux Etats de veiller à ce que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement d'autres Etats ou de zones situées au-delà des limites de leur propre juridiction nationale et qu'ils doivent jouer le rôle qui leur revient en préservant et protégeant l'environnement mondial et régional dans la mesure de leurs moyens et de leurs responsabilités propres26. Elle affirme aussi la responsabilité des Etats, touchant les dommages causés à l'environnement et aux ressources naturelles par des activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle, du fait d'interférences transfrontières27.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Enfin, la Déclaration de Rio de 1992 rappelle, conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, le droit souverain des Etats d'exploiter leurs propres ressources selon leur politique d'environnement et de développement, et le devoir des Etats de faire en sorte que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommages à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des zones ne relevant d'aucune juridiction nationale28.

De ce fait, il est possible de conclure que le principe de non dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international est un principe à valeur coutumière. C'est d'ailleurs l'interprétation qu'en fait la jurisprudence.

Dans les principes généraux du droit international

Pour des raisons pratiques et de place, nous ne pouvons étudier les systèmes juridiques de tous les Etats, même si, à première vue, il semble possible d'affirmer que la plupart des systèmes juridiques des Etats consacrent l'obligation des personnes physiques ou morales exerçant des activités dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle de ne pas causer de dommage à l'environnement.

C'est ainsi que le Code pénal de la Fédération de Russie punit expressément d'une peine de réclusion criminelle de 12 à 20 ans l'écocide, qu'il définit comme la destruction massive de la faune ou de la flore, la contamination de l'atmosphère ou des ressources en eau, ou la commission d'autres actes capables de causer une catastrophe écologique29.

Dans la jurisprudence internationale

La jurisprudence a tout d'abord consacré l'obligation des Etats de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international, avant de préciser le fondement de cette obligation et ses conséquences pratiques.

Dans l'affaire de la fonderie de Trail de 1941, le Tribunal arbitral a jugé qu'en vertu des principes du droit international, aucun Etat n'a le droit, d'utiliser ou de permettre l'utilisation de son territoire, de manière à causer des dommages dus à des fumées dans ou au territoire d'un autre Etat ou aux propriétés ou personnes dans ce dernier, lorsque les conséquences sont sérieuses et que le dommage est établi par des preuves claires et convaincantes.

Dans l'affaire du détroit de Corfou, la CIJ a jugé que l'obligation, pour tout Etat, de ne pas laisser utiliser son territoire aux fins d'actes contraires aux droits d'autres Etats, fait partie des principes généraux et bien reconnus30.

28 Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, Principe 2.

29 Code pénal de la Fédération de Russie, Article 358.

12

30 CIJ, Affaire du détroit de Corfou, arrêt du 9 avril 1949, Grande-Bretagne/Albanie, p 22.

13

31 CIJ, Licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, p 19 et 20, paragraphe 29.

32 CIJ, Affaire relative au projet Gabèikovo-Nagymaros, arrêt du 25 septembre 1997, Slovaquie/Hongrie, p 38, paragraphe 53.

33 Tribunal arbitral, Affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, sentence du 24 mai 2005, Belgique/Pays-Bas, p 29, paragraphe 59.

34 Tribunal arbitral, Affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, sentence du 24 mai 2005, Belgique/Pays-Bas, p 90, paragraphe 222.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Dans l'affaire du détroit de Corfou, la CIJ consacre la valeur coutumière du principe de non-dommage au territoire d'un autre Etat.

D'après l'avis de la CIJ sur la licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, l'obligation générale qu'ont les Etats de veiller à ce que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle respectent l'environnement dans d'autres Etats ou dans des zones ne relevant d'aucune juridiction nationale fait maintenant partie du corps de règles du droit international de l'environnement31.

Dans son l'avis sur la licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, la CIJ consacre la valeur coutumière du principe de non dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international, à savoir l'obligation générale qu'ont les Etats de veiller à ce que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle respectent l'environnement dans d'autres Etats ou dans des zones ne relevant d'aucune juridiction nationale.

Dans l'affaire relative au projet Gabèikovo--Nagymaros, la CIJ rappelle toute l'importance que le respect de l'environnement revêt, non seulement pour les Etats mais aussi pour l'ensemble du genre humain, en réaffirmant la valeur coutumière du principe de non dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international, tel que formulé dans son avis sur la licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires32.

Dans l'affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, le Tribunal arbitral estime que lorsque le développement est susceptible de causer un dommage à l'environnement, il y a une obligation de prévenir ou du moins atténuer un tel dommage. Cette obligation est devenue un principe du droit international général selon le Tribunal arbitral33.

Le Tribunal arbitral consacre dans l'affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer la valeur coutumière du principe de prévention.

Le Tribunal arbitral note qu'en 2005, en droit international de l'environnement, une accentuation grandissante est mise sur l'obligation de prévention34. Une grande part du droit international de l'environnement a été formulée par référence à l'impact que des activités dans un territoire peuvent avoir sur un autre territoire. Le Tribunal arbitral fait alors référence au paragraphe 29 de l'avis de la CIJ sur la licéité de l'emploi ou de la menace des armes nucléaires, en vertu duquel le principe de non dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international fait maintenant partie du corps de règles du droit international de l'environnement.

14

35 CIJ, Affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, arrêt du 20 avril 2010, Argentine/Uruguay, p 45, paragraphe 101.

36 Ibid. et CIJ, Affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, arrêt du 20 avril 2010, Argentine/Uruguay, p 68, paragraphe 193.

37 CIJ, Affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, arrêt du 20 avril 2010, Argentine/Uruguay, p 73, paragraphe 204.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Dans l'affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay35, la CIJ observe que le principe de prévention, en tant que règle coutumière, trouve son origine dans la diligence requise (« due diligence ») de l'Etat sur son territoire. Selon la Cour, il s'agit de « l'obligation, pour tout Etat, de ne pas laisser utiliser son territoire aux fins d'actes contraires aux droits d'autres Etats ». La Cour fait ici référence à la définition qu'elle avait posée dans l'affaire du détroit de Corfou. Elle estime que l'Etat est tenu de mettre en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour éviter que les activités qui se déroulent sur son territoire, ou sur tout espace relevant de sa juridiction, ne causent un préjudice sensible à l'environnement d'un autre Etat. Par deux fois, elle cite son avis sur la licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires et réaffirme que cette obligation fait maintenant partie du corps de règles du droit international de l'environnement36.

La CIJ, dans l'affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay rappelle la valeur coutumière du principe de prévention, affirmée précédemment dans l'affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer.

Selon la Cour, l'obligation de protéger et de préserver l'environnement doit être interprétée conformément à une pratique acceptée si largement par les Etats ces dernières années que l'on peut désormais considérer qu'il existe, en droit international général, une obligation de procéder à une évaluation de l'impact sur l'environnement lorsque l'activité industrielle projetée risque d'avoir un impact préjudiciable important dans un cadre transfrontière, et en particulier sur une ressource partagée. De plus, on ne pourrait considérer qu'une partie s'est acquittée de son obligation de diligence, et du devoir de vigilance et de prévention que cette obligation implique, dès lors que, prévoyant de réaliser un ouvrage suffisamment important pour affecter le régime du fleuve ou la qualité de ses eaux, elle n'aurait pas procédé à une évaluation de l'impact sur l'environnement permettant d'apprécier les effets éventuels de son projet37.

Dans l'affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, la CIJ définit également la valeur coutumière de l'obligation de procéder à une évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir un impact préjudiciable transfrontalier important sur l'environnement.

Par une lecture combinée de toutes ces jurisprudences, il semble que, selon le juge international, l'obligation de réaliser une étude environnementale découle en droit international de l'obligation de ne pas causer de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international, qui elle découle du principe de prévention, lui-même issu de l'obligation de diligence des Etats.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Le Tribunal cite l'article 194 de la Convention de Montego Bay (cité plus haut), en vertu duquel les Etats ont l'obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle soient menées de manière à ne pas causer de préjudice par pollution à d'autres Etats et à leur environnement. D'après le Tribunal, l'obligation de « veiller à » en faisant preuve de la « diligence requise » impose à l'Etat qui patronne de prendre des mesures au sein de son ordre juridique et que ces mesures doivent être « raisonnablement appropriées »38.

D'après l'avis consultatif du Tribunal international du droit de la mer sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, l'obligation juridique des Etats de protéger l'environnement consiste en une obligation positive de « veiller à », de « faire en sorte », à savoir de prendre les mesures nécessaires et appropriées pour s'assurer que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle ne causent pas un dommage au territoire d'un autre Etat.

La Chambre note que l'approche de précaution a été incorporée dans un nombre croissant de traités et autres instruments internationaux, dont beaucoup reflètent la formulation du Principe 15 de la Déclaration de Rio. De l'avis de la Chambre, ceci a créé un mouvement qui tend à incorporer cette approche dans le droit international coutumier39.

Ainsi, selon l'avis consultatif du Tribunal international du droit de la mer sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, le principe de précaution fait partie de la coutume internationale.

D'après le Tribunal international du droit de la mer, l'obligation de procéder à une évaluation de l'impact potentiel sur l'environnement constitue une obligation directe en vertu de la Convention de Montego Bay et une obligation générale en vertu du droit international coutumier40. Le Tribunal cite à ce titre le paragraphe 204 de l'affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay de la CIJ (cité plus haut).

38 Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, Tribunal international du droit de la mer, avis consultatif du 1er févr. 2011 sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, p 41, paragraphe 120.

39 Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, Tribunal international du droit de la mer, avis consultatif du 1er févr. 2011 sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, p 45, paragraphe 135.

40 Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, Tribunal international du droit de la mer, avis consultatif du 1er févr. 2011 sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, p 49, paragraphe 145.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Par conséquent, le Tribunal international du droit de la mer, dans son avis consultatif sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone, confirme la jurisprudence de la CIJ dans l'affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, en vertu de laquelle l'obligation de procéder à une évaluation environnementale fait partie de la coutume internationale.

Dans la doctrine internationale

Selon la doctrine, il existe une réelle volonté des Etats, en apparence, de protéger l'environnement, dans la mesure où cinq cents traités multilatéraux, pour l'essentiel régionaux, ont été adoptés dans le domaine de l'environnement, dont plus de trois cents ont été négociés après 197241.

Problématique et annonce de plan

Il résulte des développements qui précèdent qu'il existe une obligation juridique, qui pèse sur les Etats, de protéger l'environnement à l'échelle internationale. Pourtant, le nombre d'atteintes à l'environnement à l'échelle internationale est en hausse. En outre, le crime environnemental est devenu la quatrième source de revenus du crime organisé, derrière la drogue, le trafic d'êtres humains et d'armes42. En particulier le crime international environnemental organisé, à savoir l'exploitation illégale du bois; le braconnage et le commerce illégal d'espèces animales ou végétales; la pêche illégale ; l'activité minière illégale ; et le déversement illégal de déchets toxiques, rapporterait entre 70 et 123 milliards de dollars annuels43.

Les revenus issus de ces crimes peuvent ensuite servir à financer des milices et des groupes terroristes, comme c'est le cas en République Démocratique du Congo et en Somalie44. Des séparatistes locaux bangladais et d'autres milices indiennes affiliées à Al Qaeda ont été impliqués dans le commerce illégal d'ivoire, de peaux de tigre et de cornes de rhinocéros en Asie du sud-est45. Le commerce de charbon de bois pourrait aussi être une source possible de revenus pour Boko Haram, même si cela reste incertain pour le moment46.

41 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 12.

42 Valéry Laramée de Tannenberg, Peut--on réprimer le crime environnemental?, Journal de l'environnement, 16 mars 2016.

43 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 7.

44 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 4 et 8.

45 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 48.

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46 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 81.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Se pose alors la question de savoir comment mieux s'assurer de l'exécution par les Etats de leur obligation juridique de protéger l'environnement à l'échelle internationale, à savoir comment permettre une meilleure protection de l'environnement par le biais du droit international. En particulier, quels sont les moyens existants de protection de l'environnement en droit international ? Sont-ils suffisants ? Comment les améliorer?

Le droit international est le droit qui s'applique entre des sujets de droit international. Ces sujets du droit international sont en premier lieu les Etats. Il en existe 194, dont 50 en Europe, 47 au Conseil de l'Europe et 28 dans l'UE. Les sujets du droit international sont en second lieu les Organisations Internationales (OI) : ce sont des associations, groupements d'Etats qui peuvent être générales ou spécialisées (lorsque leur action se limite à un domaine), à compétence internationale ou régionale (lorsque leur action se limite à une région).

Les Etats sont des sujets de droit international souverains et égaux. Par conséquent, il n'existe pas, en principe, d'entité supérieure à l'Etat dans l'ordre juridique international chargée de créer le droit, de l'exécuter, ni de contrôler sa bonne application.

La création du droit international repose sur le principe du consensualisme, en vertu duquel il n'existe pas de droit en dehors de la volonté des Etats. La validité des normes internationales n'a d'autre fondement ultime que la volonté ou l'acceptation des Etats pour qui elles font droit47. Ainsi, la principale source du droit international est les traités internationaux48. Dans l'ordre juridique international, le droit synallagmatique, à savoir le mode conventionnel de production des normes, prime.

L'exécution de leurs obligations par les Etats repose sur le principe de réciprocité, selon lequel l'obligation de chaque Etat trouve sa cause juridique dans les obligations des autres Etats49.

Concernant le contrôle de l'application du droit, il existe des mécanismes juridictionnels en droit international, mais l'aptitude légale des juridictions internationales à connaître d'une affaire contentieuse dépend du consentement des deux parties (à l'avance ou non)50. Les juridictions internationales ayant un caractère facultatif, les Etats ont, sous certaines conditions, le droit de se faire justice eux-mêmes. En particulier, ils peuvent faire usage du mécanisme de contre-mesures pour s'assurer du respect du droit international. D'après ce mécanisme, un Etat estimant ses droits atteints par le comportement illicite d'un autre, a le droit de rétorquer par un comportement lui-même intrinsèquement illicite, mais que sa qualité de réplique légitime au regard du droit international51.

47 Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, p 25.

48 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 38.

49 Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, p 28.

50 Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, p 27.

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51 Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, p 28.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Cependant, les contre-mesures ne sont admises en droit international que dans la mesure où le retour à la légalité ne peut être obtenu par les procédures de règlement pacifique des différends52. En outre, en vertu du droit international, les Etats doivent respecter le principe de règlement pacifique des différends. Ils ont cependant le choix des moyens de règlement de leurs différends. Ces divers modes de règlements comprennent des moyens de règlement diplomatiques d'une part, tels que les négociations, la médiation, et la conciliation; et des moyens de règlement juridictionnels d'autre part, tels que l'arbitrage ou la soumission du différend à une juridiction internationale.

Le droit international de l'environnement n'échappe pas à la faiblesse structurelle du droit international relative au caractère consensuel du droit international53. Or, il existe un problème d'absence de réciprocité en droit international de l'environnement : l'exécution des obligations environnementale de chaque Etat ne trouve pas sa cause juridique dans les obligations des autres Etats. Ainsi, le mécanisme de contre-mesures ne peut être utilisé en matière de droit de l'environnement, ce qui le rend faible. La doctrine parle souvent de droit `mou'.

Dans la mesure où les contre-mesures sont inutilisables en droit de l'environnement, le respect du droit dans ce domaine repose principalement sur les procédures de règlement pacifique des différends, et donc sur les mécanismes juridictionnels.

Une juridiction est un organe doté du pouvoir de dire le droit. Ses décisions sont revêtues de l'autorité de la chose jugée. Elle se distingue d'un tribunal arbitral, dans la mesure où l'institution, la composition et le mode de fonctionnement d'une juridiction échappent à la maitrise des parties54.

Une juridiction internationale est une juridiction ayant compétence sur au moins deux Etats. Parmi les juridictions internationales se distinguent les juridictions internationales permanentes des juridictions ad hoc. Les secondes sont apparues à la suite d'un conflit spécifique et n'ont vocation à juger, pendant une période déterminée, que des faits qui y sont liés55. C'est le cas par exemple des tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda. Dans le cas présent, nous ne nous intéresserons pas aux juridictions ad hoc, dans la mesure où celles-ci ne permettent pas une protection optimale de l'environnement puisqu'elles ne sont pas permanentes.

52 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 567.

53 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 12.

54 Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, p 575.

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55 Site internet du Ministère de la Justice français, Les juridictions internationales.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Parmi les juridictions permanentes, plusieurs distinctions peuvent être opérées, notamment entre celles qui traitent du contentieux interétatique et celles qui traitent du contentieux transétatique, opposant un Etat à une autre partie non étatique (OI ou sujet de droit national). Une distinction peut également être faite entre les juridictions traitant d'un contentieux spécialisé ou général. Enfin, une distinction peut être opérée entre les juridictions traitant d'un contentieux régional ou universel. Là encore, nous ne nous intéresserons pas aux juridictions traitant d'un contentieux régional, dans la mesure où elles ne permettent pas une protection optimale de l'environnement à l'échelle mondiale.

Il n'existe que trois juridictions internationales universelles permanentes56.

La première est la Cour Internationale de Justice (CIJ), compétente en droit international. La seconde est la Cour Pénale Internationale (CPI), compétente en droit international pénal. En outre, elle est compétente en matière de quatre crimes internationaux. Enfin, la troisième est le Tribunal international du droit de la mer, compétent en droit maritime.

Il en résulte qu'il n'existe pas de juridiction internationale permanente et universelle compétente uniquement en droit de l'environnement, à savoir de juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement.

Or, contrairement à la matière des droits humains, pour laquelle ont été créées des cours spécialisées qui peuvent condamner unilatéralement l'Etat qui viole les droits humains, il n'existe pas non plus de juridiction internationale traitant d'un contentieux régional de l'environnement. La protection de l'environnement, pour beaucoup, ne semble pas avoir la même importance que la protection des droits humains. De plus, il se trouve que ces trois juridictions internationales se prononcent rarement en matière d'environnement, en dehors des cas précités. En effet, il n'y a que vingt affaires de la CIJ qui traitent du droit international de l'environnement.

En d'autres termes, il n'existe aucune organisation spécifique qui garantit l'effectivité du droit international de l'environnement57. Il en résulte que l'absence de réciprocité en ce qui concerne la branche particulière du droit international de l'environnement n'est pas compensée par l'existence d'institutions susceptibles d'infléchir la volonté des Etats58.

Dès lors, il est possible de se demander si la création d'une juridiction internationale nouvelle spécialisée en droit de l'environnement serait nécessaire afin de mieux protéger l'environnement. Ce n'est qu'au regard de cet objectif de protection et d'assurer l'effectivité de l'obligation des Etats de protéger l'environnement, que la création de cette juridiction serait bien fondée.

56 Site internet de Légifrance, Juridictions internationales.

57 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 13.

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58 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 12.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Au regard de cet objectif se pose la question du bien-fondé de l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement (Partie I). Si cette existence est bien fondée, se pose alors la question de la forme que doit prendre cette juridiction. En particulier, l'extension de la compétence de juridictions existantes serait-elle efficace au regard de cet objectif de protection (Partie II) ? Ou bien la création d'une nouvelle juridiction serait-elle à favoriser (Partie III) ?

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Partie Ière : Le bien--fondé de l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement

De nombreux arguments peuvent être opposés à l'existence même d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement.

Titre Ier : Les institutions internationales de protection de l'environnement

Il est en outre possible d'argumenter qu'il serait plus efficace, pour protéger l'environnement à l'échelle internationale, d'adopter une politique préventive plutôt que répressive. En d'autres termes, cela reviendrait à renforcer le pouvoir des institutions internationales existantes spécialisées en droit de l'environnement, plutôt que d'étendre la compétence de juridictions existantes en matière environnementale ou de créer une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement. Cet argument s'inscrit dans la nature consensuelle du droit international, qui respecte la souveraineté des Etats et préfère une logique coopérative de conseil aux Etats à une logique de sanction en cas de non-respect de normes préétablies.

Il existe en outre déjà de nombreux instruments juridiques de protection de l'environnement à l'échelle internationale. Les principales institutions internationales intervenant dans le domaine du droit international de l'environnement sont le PNUE, le fonds pour l'environnement mondial, les COP et l'UICN. Cependant, si l'on poursuit un réel objectif de protection de l'environnement à l'échelle internationale, le renforcement des pouvoirs de ces institutions n'empêche en rien l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement.

Chapitre Ier : Les Organisations Internationales (OI)

Certaines OI à compétence internationale (le PNUE, la FAO, l'UNESCO, l'Autorité des grands fonds marins, l'OMS, l'OMC, le FMI...) ou régionale (le Conseil de l'Europe, l'UE...) peuvent en effet agir dans le domaine de l'environnement.

Le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE)

En particulier, les fonctions et responsabilités du PNUE sont détaillées dans la Résolution 2997 de l'Assemblée Générale des Nations Unies de 1972, relative aux dispositions institutionnelles et financières concernant la coopération internationale dans le domaine de l'environnement, qui crée cette OI.

Par la suite, certaines conventions internationales, telles que la CITES et la Convention de Bonn, ont donné compétence au PNUE pour assurer le secrétariat de la Convention.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La CITES prévoit que le secrétariat de la Convention est assuré par le Directeur exécutif du PNUE. Dans la mesure où il le juge opportun, ce dernier peut bénéficier du concours d'organismes internationaux ou nationaux appropriés, gouvernementaux et non gouvernementaux, compétents en matière de protection, de conservation et de gestion de la faune et de la flore sauvages. La Convention définit les attributions de ce secrétariat59.

La Convention de Bonn prévoit aussi que le secrétariat de la Convention est assuré par le Directeur exécutif du PNUE. Dans les limites et d'une manière qu'il jugera adéquates, ce dernier peut bénéficier du concours d'organisations et d'institutions internationales ou nationales appropriées, intergouvernementales ou non gouvernementales, techniquement compétentes dans le domaine de la protection, de la conservation et de la gestion de la faune sauvage. La Convention définit les fonctions de ce secrétariat60.

La Convention de Montego Bay précise la compétence du PNUE pour dresser la liste d'experts que chaque Etat Partie peut désigner dans le cadre d'un différend relatif à l'interprétation ou à l'application des articles de la Convention concernant la protection et la préservation du milieu marin61. Jusqu'à la première réunion de la COP, le secrétariat de la CDB a été assuré par le PNUE62. Enfin, le préambule de l'UNFCCC souligne l'importance des contributions apportées par le PNUE à l'échange des résultats de la recherche scientifique et à la coordination de la recherche.

Ainsi, le PNUE, dont la mise en place a été présidée par la Conférence de Stockholm de 1972, ne dispose pas de moyens de contrainte63.

Le fonds mondial pour l'environnement

Le fonds mondial pour l'environnement a été créé en 1991. Le Programme des Nations Unies pour le développement, le PNUE et la Banque internationale sont les trois partenaires initiaux de ce fonds appliquant les projets du fonds64.

Il est prévu par la CDB que la COP décide lors de sa première réunion d'une structure institutionnelle qui assurerait un mécanisme de financement pour fournir des ressources financières aux Parties qui sont des pays en développement, aux fins de la Convention, sous forme de dons ou à des conditions de faveur. Le Fonds pour l'environnement mondial du Programme des Nations Unies pour le développement, du PNUE et de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement est provisoirement cette structure institutionnelle, jusqu'à la première réunion de la COP65.

59 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, Article XII.

60 Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, Article IX.

61 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Annexe VIII, Article 2.

62 Convention sur la diversité biologique, Article 40.

63 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 12.

64 Site internet du PNUE, Division de la Coordination du Fonds mondial pour l'environnement.

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65 Convention sur la diversité biologique, Article 39.

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66 Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, Article 21 (3).

67 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 12.

68 Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats de la sauvagine 1971, Article 6.

69 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, Article XI.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

L'UNFCCC prévoit, comme la CBD, un système de financement similaire à celui prévu par la CDB. Le Fonds pour l'environnement mondial du Programme des Nations Unies pour le développement, du PNUE et de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement a été l'entité internationale chargée d'assurer à titre provisoire le fonctionnement de ce mécanisme financier66.

Au fonds mondial pour l'environnement et au PNUE s'ajoute la Commission du développement durable, créée par le Conseil économique et social à la suite de la Conférence de Rio, qui ne que pour mission d'assurer un suivi efficace de la Conférence des Nations Unies pour l'environnement et le développement67.

Chapitre II: Les Conférences des Parties (COP)

Les Conférences des Parties sont des institutions permanentes créées par des conventions internationales, qui n'ont pas la personnalité juridique, mais qui surveillent l'application des traités et font évoluer les conventions en y ajoutant des protocoles.

La Convention de Ramsar prévoit que quand la nécessité s'en fera sentir, les Parties contractantes organiseront des conférences sur la conservation des zones humides et de la sauvagine. Ces conférences ont un caractère consultatif et elles ont notamment compétence pour discuter de l'application de la Convention, pour discuter d'additions et de modifications à apporter à la liste des zones humides d'importance internationale, pour examiner les informations sur les modifications des conditions écologiques des zones humides inscrites dans la liste, pour faire des recommandations, aux Parties contractantes, au sujet de la conservation, de la gestion et de l'exploitation rationnelle des zones humides, de leur flore et de leur faune, et pour demander aux organismes internationaux compétents d'établir des rapports et des statistiques sur les sujets de nature essentiellement internationale concernant les zones humides68.

La CITES prévoit que le secrétariat de la Convention convoquera une session de la Conférence des Parties au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de la Convention69. Par la suite, le secrétariat convoque des sessions ordinaires de la Conférence au moins une fois tous les deux ans. Lors des sessions de cette Conférence, les Parties procèdent à un examen d'ensemble de l'application de la Convention.

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70 Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, Article VII.

71 Convention sur la diversité biologique, Article 23.

72 Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, Article 7 (2) (e).

73 Site internet de l'UICN, A propos, L'union.

74 Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats de la sauvagine 1971, Article 8.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La Conférence des Parties constitue l'organe de décision de la Convention de Bonn. Comme pour la CITES, le secrétariat convoque une session de la Conférence des Parties deux ans au plus tard après l'entrée en vigueur de la Convention. En revanche, contrairement à la CITES, par la suite, le Secrétariat convoque à trois ans d'intervalle au plus, une session ordinaire de la Conférence des Parties. La Conférence des Parties établit le règlement financier de la Convention qu'elle soumet à un examen régulier, et elle adopte le budget pour l'exercice suivant. Enfin, elle procède à un examen de l'application de la Convention70.

La CDB institue une COP, dont la première réunion est convoquée par le directeur exécutif du PNUE, un an au plus tard après l'entrée en vigueur de la Convention71. Par la suite, les réunions ordinaires de la COP ont lieu régulièrement, selon la fréquence déterminée par la Conférence à sa première réunion. La COP arrête et adopte son propre règlement intérieur et celui de tout organe subsidiaire qu'elle pourra créer, ainsi que le règlement financier régissant le financement du secrétariat. A chaque réunion ordinaire, elle adopte le budget de l'exercice financier courant jusqu'à la session ordinaire suivante. Enfin, elle examine l'application de la Convention.

Une COP est aussi créée par l'UNFCCC. Elle est chargée d'évaluer l'application de la Convention par les Parties, les effets d'ensemble des mesures prises en application de la Convention, notamment les effets environnementaux, et leurs incidences cumulées, et les progrès réalisés vers l'objectif de la Convention72.

Chapitre III : Les Organisations Non Gouvernementales (ONG)

Les ONG telles que l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), World Wildlife Fund (WWF) ou Greenpeace jouent aussi un rôle important dans la protection de l'environnement, en vertu des conventions internationales. En particulier, l'UICN a été créée en 1948 et a la particularité de se composer à la fois de gouvernements et d'organisations de la société civile73.

D'après la Convention de Ramsar, l'UICN assurera les fonctions du bureau permanent, jusqu'au moment où une autre organisation ou un gouvernement sera désigné par une majorité des deux tiers de toutes les Parties contractantes74. Ce bureau permanent aide à convoquer et à organiser les conférences des parties, tient la Liste des zones humides d'importance internationale, et reçoit des Parties contractantes les informations sur toutes additions, extensions, suppressions ou diminutions, relatives aux zones humides inscrites sur la liste, reçoit des Parties contractantes les informations sur toutes modifications des conditions écologiques des zones humides inscrites sur la liste, notifie à toutes les Parties contractantes toute modification de la liste, ou tout changement dans les caractéristiques des zones humides inscrites, et prendre les dispositions pour que ces questions soient discutées à la prochaine conférence, et donne connaissance à la Partie contractante intéressée des recommandations des conférences en ce qui concerne ces modifications à la liste ou ces changements dans les caractéristiques des zones humides inscrites.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La Convention de l'UNESCO institue auprès de l'ONU pour l'éducation, la science et la culture, un Comité intergouvernemental de la protection du patrimoine culturel et naturel de valeur universelle exceptionnelle dénommé « le Comité du patrimoine mondial ». Assistent aux séances du Comité avec voix consultative, notamment, un représentant de l'UICN, auxquels peuvent s'ajouter, à la demande des Etats parties réunis en assemblée générale au cours des sessions ordinaires de la Conférence générale de l'ONU pour l'éducation, la science et la culture, des représentants d'autres organisations intergouvernementales ou non gouvernementales ayant des objectifs similaires75.

Le Comité du patrimoine mondial reçoit et étudie les demandes d'assistance internationale formulées par les Etats parties à la Convention en ce qui concerne les biens du patrimoine culturel et naturel situés sur leur territoire, qui figurent ou sont susceptibles de figurer sur la liste du patrimoine mondial et la liste du patrimoine mondial en péril. Ce Comité coopère avec les organisations internationales et nationales, gouvernementales et non gouvernementales, ayant des objectifs similaires à ceux de la Convention pour la mise en oeuvre de ses programmes et l'exécution de ses projets. Il peut faire appel à ces organisations, en particulier à l'UICN, ainsi qu'à d'autres organismes publics ou privés et à des personnes privées76.

Enfin, le Directeur général de l'ONU pour l'éducation, la science et la culture nomme un secrétariat qui assiste le Comité du patrimoine mondial. Il prépare la documentation du Comité du patrimoine mondial, l'ordre du jour de ses réunions et assure l'exécution de ses décisions. Ce faisait, le Directeur général de l'ONU pour l'éducation, la science et la culture utilise le plus possible, en autres, les services de l'UICN, dans les domaines de ses compétences et de ses possibilités respectives77.

Ainsi l'UICN a un rôle majeur dans l'application de la Convention de l'UNESCO. Comme les COP, les ONG n'ont pas la personnalité juridique en droit international.

Le renforcement du pouvoir des institutions internationales (OI, COP, ONG) ne fait pas pour autant obstacle à une approche combinée, à savoir une approche qui lie prévention et répression.

Titre II: La réciprocité avec les règles du droit international économique

Il est par ailleurs possible d'argumenter que l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement ne serait pas justifiée en raison de la réciprocité possible des règles du droit international de l'environnement avec d'autres obligations, telles que les obligations économiques. Selon cet argument, cette réciprocité pourrait être utilisée comme moyen d'assurer le respect des obligations environnementales, comme en matière de droits humains.

75 Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, Article 8.

76 Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, Article 13.

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77 Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel, Article 14.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Cependant, cette réciprocité n'est pour le moment que théorique, en partie à cause d'un détournement des règles du droit international économique par les Etats développés. Or ce détournement des règles est problématique, dans la mesure où l'Organe de règlement des différends (ORD) de l'OMC ne dispose pas à ce jour des pouvoirs de sanction nécessaires pour y remédier.

Chapitre I : Le détournement des règles du droit international économique

Les règles du droit international économique prévoient en théorie la possibilité d'une réciprocité avec les règles du droit international de l'environnement.

Le commerce international est extrêmement important pour une utilisation efficiente des ressources naturelles, mais aussi pour une circulation plus large des produits et des services à faible empreinte environnementale78. Les règles en matière de commerce international ont depuis longue date envisagé ces interactions, mais les questions environnementales ont été intégrées d'une manière plus claire au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Un groupe de travail sur les mesures environnementales et le commerce international, créé par les Etats parties à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1947, a par exemple servi de matrice pour la création du Comité du commerce et de l'environnement de l'OMC.

En particulier, l'article XX du GATT de 1947 prévoit des exceptions générales aux règles de l'accord de l'OMC en matière environnementale. Cet article énonce que sous réserve que ces mesures ne soient pas appliquées de façon à constituer soit un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent, soit une restriction déguisée au commerce international, rien dans l'accord ne sera interprété comme empêchant l'adoption ou l'application par toute partie contractante des mesures :

b) nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux;

g) se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables, si de telles mesures sont appliquées conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales.

Cette possibilité de réciprocité a aussi été consacrée par l'Organe de règlement des différends (ORD) de l'OMC.

En outre, dans l'affaire des crevettes--tortues, Inde etc./Etats-Unis, de l'Organe d'appel de l'ORD de 1998, l'ORD a clairement dit qu'au titre des règles de l'OMC, les pays ont le droit de prendre des mesures commerciales pour protéger l'environnement (en particulier la santé des personnes, des animaux ou la préservation des végétaux) ainsi que les espèces en voie d'extinction et les ressources épuisables79. Il a donc admis la possibilité théorique de faire des entorses à la concurrence en vertu de motifs environnementaux80.

78 Pierre-Marie Dupuy et Jorge E. Viñuales, Introduction au droit international de l'environnement, p 443.

79 Site internet de l'OMC, Inde etc./Etats-Unis : l'affaire «crevettes--tortues».

80 Pierre-Marie Dupuy et Jorge E. Viñuales, Introduction au droit international de l'environnement, p 449.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Ainsi, en théorie, il est possible de déroger aux règles du droit international économique en vertu de l'objectif de protection de l'environnement. Pourtant, jusqu'à présent, cette possibilité n'a jamais été admise in concreto sous l'angle de l'article XX81. Le fait que cette possibilité ne reste que théorique peut s'expliquer par plusieurs facteurs, notamment le détournement des règles économiques par les Etats.

En pratique, nombre d'Etats en voie de développement perçoivent l'attitude environnementale de certains Etats développés comme une tentative de recherche d'avantages concurrentiels sur leurs produits et leurs investissements, sous couvert du drapeau de la protection environnementale82. En effet, certains Etats invoquent la protection de l'environnement comme justification de leur législation nationale, alors même que leur objectif réel est de permettre une atteinte au principe de non-discrimination en matière commerciale.

Ce fut notamment le cas des Etats-Unis dans l'affaire des crevettes--tortues précitée. L'ORD a considéré que cette justification était possible, mais que, dans les circonstances de l'espèce, les conditions n'étaient pas remplies, en particulier du fait des exigences du « chapeau » de l'article XX. Le chapeau de l'article XX prévoit en outre que les mesures ne doivent pas être appliquées de façon à constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions existent.

Dans cette affaire, les Etats-Unis ont interdit l'importation de crevettes et de produits à base de crevettes, sous couvert de la protection des tortues marines. Cependant, ils accordaient aux pays de l'hémisphère occidental - essentiellement dans les Caraïbes - une assistance technique et financière et des délais de transition plus longs pour que leurs pêcheurs de crevettes se mettent à utiliser des dispositifs d'exclusion des tortues, tandis qu'ils n'accordaient pas les mêmes avantages aux quatre pays d'Asie (Inde, Malaisie, Pakistan et Thaïlande)83.

Cela peut aussi s'expliquer par l'interprétation que fait l'ORD de l'article XX.

En effet, dans le cas de la justification par l'article XX (b), l'ORD fait en outre une application très stricte du critère de nécessité, comme le prouve l'affaire des conditions d'octroi de préférences tarifaires aux pays en développement, Inde etc./Communautés européennes, de l'Organe d'appel de l'ORD de 200484. L'ORD fait aussi une interprétation stricte du critère de rapport de la justification par l'article XX (g), comme le montre l'affaire essence, Venezuela et Brésil/Etats-Unis, de l'Organe d'appel de l'ORD de 199685.

Ainsi, la réciprocité des obligations économiques avec les obligations environnementales apparaît pour le moment plus virtuelle que réelle.

81 Pierre-Marie Dupuy et Jorge E. Viñuales, Introduction au droit international de l'environnement, p 449.

82 Pierre-Marie Dupuy et Jorge E. Viñuales, Introduction au droit international de l'environnement, p 435.

83 Site internet de l'OMC, Inde etc./Etats-Unis : l'affaire «crevettes--tortues».

84 Site internet de l'OMC, WTO Analytical Index on GATT Article XX, paragraphe 895.

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85 Site internet de l'OMC, WTO Analytical Index on GATT Article XX, paragraphe 938.

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86 Site internet de l'OMC, Portail des textes juridiques.

87 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 1er, paragraphe 1.

88 Site internet de l'OMC, Portail des textes juridiques.

89 Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994, Paragraphe 1.

90 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 2, paragraphe 1.

91 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 4.

92 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 5.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Chapitre II: L'absence de pouvoir de sanction propre de l'ORD

La réciprocité des règles du droit international économique avec les règles du droit international de l'environnement n'est d'ailleurs pas nécessairement souhaitable, dans la mesure où l'ORD ne dispose pas actuellement des pouvoirs nécessaires de sanction des Etats détournant les règles à leur profit.

Les pouvoirs de l'ORD sont définis dans l'annexe 2 de l'Accord instituant l'OMC

que constitue le Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends86.

Le Mémorandum d'accord établit un système intégré permettant aux Membres de l'OMC de fonder leurs revendications sur n'importe lequel des accords commerciaux multilatéraux inclus dans les annexes de l'Accord instituant l'OMC87. Le GATT de 1994 constitue l'annexe 1 de l'Accord instituant l'OMC88. Il comprend, entre autres, le GATT de 1947 tel qu'il a été rectifié, amendé ou modifié par les dispositions des instruments juridiques qui sont entrés en vigueur avant la date d'entrée en vigueur de l'Accord sur l'OMC89. Un Organe de Règlement des Différends (ORD) est créé par le Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends90.

Ainsi, l'article XX du GATT de 1947 peut être invoqué par les Etats devant l'ORD. Le Mémorandum d'accord consacre des principes de règlement des différends existants sous l'ancien système, avant la création de l'OMC en 1994, tout en juridicisant le processus de règlement des différends.

Le règlement des différends dans le cadre de l'OMC repose d'abord sur la consultation, à savoir des négociations bilatérales. En outre, les Membres de l'OMC affirment leur résolution de renforcer et d'améliorer l'efficacité des procédures de consultation91. Cependant, les Etats peuvent aussi recourir à des procédures impliquant des tiers, tels que les bons offices, la conciliation et la médiation92.

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93 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 6.

94 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 7.

95 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 8.

96 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 16, paragraphe 4.

97 Site internet de l'OMC, Présentation technique du Mémorandum d'accord relatif aux règles et procédures régissant le règlement des différends, paragraphe 6.

98 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 17.

99 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 21.

100 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 23.

101 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 24.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Lorsqu'un différend n'est pas réglé par voie de consultations, le Mémorandum d'accord prévoit l'établissement d'un groupe spécial, si la partie plaignante le demande93. Ce groupe spécial a pour mandat d'examiner la question portée devant l'ORD par une partie au différend, et de faire des constatations propres à aider l'ORD à formuler des recommandations ou à statuer sur la question94. Il est composé de trois personnes ayant des compétences et une expérience appropriées et venant de pays dont le gouvernement n'est pas partie au différend95. Les rapports des groupes spéciaux sont adoptés par l'ORD, sauf si une partie décide de faire appel ou si l'ORD décide par consensus de ne pas l'adopter96.

Le concept d'examen en appel est un élément nouveau important du Mémorandum d'accord97.

Un Organe d'appel, composé de sept membres, dont trois siégeant pour une affaire donnée, est institué par la Mémorandum98. L'appel est limité aux questions de droit couvertes par le rapport du groupe spécial et aux interprétations de droit données par celui-ci. Les rapports de l'organe d'appel sont quant à eux adoptés par l'ORD, sauf si l'ORD décide par consensus de ne pas l'adopter. Le fait qu'un consensus soit nécessaire rend l'adoption des rapports quasi automatiques.

Les Etats doivent en principe donner suite dans les moindres délais aux recommandations ou décisions de l'ORD99.

L'une des dispositions essentielles du Mémorandum d'accord est que les Membres de l'OMC ne doivent pas eux-mêmes déterminer qu'il y a eu violation, ni suspendre des concessions, mais doivent appliquer les règles et procédures de règlement des différends du Mémorandum d'accord100. De plus, le Mémorandum d'accord contient un certain nombre de dispositions qui tiennent compte des intérêts spécifiques des pays en développement et des pays les moins avancés101.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Cependant, ces dispositions ne font pas de l'ORD une juridiction internationale, dans la mesure où il ne peut pas sanctionner directement les Etats en cas de non-respect de ses rapports. L'ORD ne peut qu'autoriser une partie à un différend à prendre des mesures de sanction.

Dans le cas où les recommandations adoptées par l'ORD ne sont pas mises en oeuvre par le Membre de l'OMC dans un délai raisonnable, les parties peuvent recourir, de façon temporaire, à la compensation et la suspension de concessions ou d'autres obligations102.

Ce n'est que dans le cas où les négociations en vue de se mettre d'accord sur une compensation mutuellement acceptable ont échoué qu'une partie au différend pourra demander à l'ORD l'autorisation de suspendre l'application de concessions ou d'autres obligations à l'égard de l'autre partie concernée103.

En principe, les concessions devraient être suspendues dans le même secteur que celui qui est en cause dans l'affaire examinée par le groupe spécial. Si cela n'est pas matériellement possible ou efficace, la suspension pourra intervenir dans un secteur différent au titre du même accord. Si, là encore, cela n'est pas matériellement possible ou efficace et si les circonstances sont suffisamment graves, la suspension de concessions pourra intervenir au titre d'un autre accord104.

L'ORD accorde, sur demande, l'autorisation de suspendre des concessions ou d'autres obligations à moins qu'il ne décide par consensus de rejeter la demande. Si le Membre concerné conteste le niveau de la suspension proposée, ou affirme que les principes et procédures énoncés précédemment n'ont pas été suivis, la question est soumise à arbitrage105.

Ainsi, un Etat économiquement fort peut se permettre de ne pas abroger une législation contraire aux règles de la concurrence qu'il justifie faussement par la protection de l'environnement. A l'inverse un Etat économiquement fort peut imposer des sanctions économiques sans obtenir l'accord de l'ORD. Ce fut notamment le cas des Etats-Unis dans l'affaire du boeuf aux hormones, Etats-Unis etc./ Communautés européennes, de l'Organe d'appel de l'ORD de 1998106.

Cela pose en outre un problème d'égalité puisque les Etats puissants économiquement pourraient faire pression sur les petits Etats pour qu'ils respectent leurs obligations environnementales, sans que l'inverse soit avéré, alors même que les Etats développés peuvent être très pollueurs.

102 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 22, paragraphe 1.

103 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 22, paragraphe 2.

104 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 22, paragraphe 3.

105 Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends, Article 22, paragraphe 6.

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106 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 292.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Ainsi, la réciprocité des règles du droit de l'environnement avec celles du droit économique n'est pas souhaitable du point de vue d'un objectif de protection de l'environnement en raison de l'insuffisance des pouvoirs de sanction de l'ORD.

Titre III : Les juridictions nationales

Les détracteurs de l'existence d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement pourront enfin avancer l'argument selon lequel les juridictions nationales sont mieux placées pour juger des affaires environnementales.

Pourtant, les Etats ne s'assurent pas toujours, via leurs juridictions nationales, que les activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international.

Chapitre Ier : Les dommages à un territoire régi par le droit international

Le droit international pose peu de limites à l'exercice de la compétence civile d'un Etat. En effet, un Etat peut exercer sa compétence civile sur un litige, dès lors qu'il existe un lien de nationalité entre une des personnes (physique ou morale) au litige et l'Etat.

En revanche, la compétence pénale d'un Etat doit être justifiée par un des cinq fondements de compétence reconnus par le droit international. En vertu du principe de territorialité, l'Etat peut exercer sa compétence pénale sur les personnes privées ayant commis une infraction sur son territoire. Lorsque l'infraction est commise sur un territoire régi par le droit international, c'est l'Etat de nationalité qui est compétent, en vertu du principe de nationalité active. Dans la mesure où le dommage est causé à un territoire régi par le droit international, l'Etat compétent ne subit pas le dommage. Il n'a donc aucun intérêt à exercer sa compétence pénale à l'encontre de ses nationaux.

Les territoires régis par le droit international, encore appelés espaces internationalisés, comprennent la haute mer, la Zone, l'Antarctique et l'espace extra-atmosphérique. La haute mer recouvre les parties de la mer qui ne sont comprises ni dans la zone économique exclusive, la mer territoriale ou les eaux intérieures d'un Etat, ni dans les eaux archipélagiques d'un Etat archipel107. La Zone désigne les fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale108. Enfin, l'espace extra-atmosphérique comprend l'espace proprement dit et l'ensemble des corps célestes109.

107 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 86.

108 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article premier.

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109 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 848.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Certaines entreprises exercent des activités sur le territoire d'un Etat ou dans ces espaces internationalisés qui causent un dommage à ces territoires non régis par le droit international. Ce dommage peut être volontaire ou involontaire. Il peut également être dû à une faute de l'entreprise (de négligence ou d'imprudence).

Lorsque le dommage est causé à un territoire régi par le droit international, le dommage ne touchant pas le territoire de l'Etat de nationalité de l'entreprise, celui-ci ne va pas rechercher la responsabilité de l'entreprise. Par ailleurs, même si le droit international prévoit une obligation coutumière de ne pas causer de dommage à un territoire régi par le droit international, les autres Etats n'engagent pas la responsabilité de l'Etat de nationalité de l'entreprise pour ne pas avoir respecté son obligation de protéger l'environnement. Ainsi, aucune action ne sera menée.

7ème

C'est le cas par exemple du rejet de déchets en haute mer, qui a causé la formation du « continent ». Environ 80 % des déchets provient des sources terrestres, tandis que le reste provient de bateaux110. Ce n'est que par le concours de la société civile qu'il est remédié dans ce cas à la pollution. En outre, le néerlandais Boyan Slat mène un projet d'élimination de ces déchets appelé Ocean Cleanup.

Un exemple contraire peut être trouvé dans l'affaire de la CIJ de la chasse à la baleine dans l'Antarctique, de 2014, opposant l'Australie au Japon.

Chapitre II: Les dommages au territoire d'un autre Etat

Certaines entreprises exercent des activités sur le territoire d'un autre Etat que leur Etat de nationalité : ce sont des multinationales. Pourtant, ces multinationales peuvent mener des activités par le biais de leurs filiales qui causent un dommage au territoire de l'Etat sur lequel elles se trouvent, voire même sur le territoire d'un Etat tiers.

C'est le cas par exemple de la multinationale américaine Union Carbide, qui avait une filiale en Inde qui produisait des pesticides. Or une de ses usines à Bhopal en Inde a explosé en 1984, causant un nuage toxique qui a fait 30 000 morts.

Ces multinationales ne relèvent pas en principe de la juridiction civile de l'Etat sur le territoire duquel elles ont une filiale, mais plutôt de celle de l'Etat sur le territoire duquel se trouve leur siège social. En vertu du droit international, elles relèvent en revanche de la juridiction pénale de l'Etat sur lequel se trouve la filiale qui a causé le dommage.

110 Audrey Garric, Le 7e continent de plastique : ces tourbillons de déchets dans les océans, Le Monde, 9 mai 2012.

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111 Vidéo du juge Antonino Abrami entendu le 10 juillet 2010 par la Commission Environnement du Parlement Européen.

112 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Articles 55 et 57.

113 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 56.

114 Marie-Pierre Camproux Duffrène, Véronique Jaworski et Jochen Sohnle, La loi française versus le droit maritime international dans l'arrêt Erika : la victoire du droit de

l'environnement, 1er

Environnement magazine, décembre 2012.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Dans le cas de la catastrophe de Bhopal en Inde111, aucune poursuite pénale n'a été engagée à l'encontre de la multinationale à raison des dégâts qu'elle a causés à l'environnement. En outre, il y a eu des réparations pour les parents des victimes de l'ordre de 150 euros et les responsabilités ont été déterminées en 2010, 26 ans après les faits. Mais il n'y a eu aucune évaluation des dégâts sur l'environnement. Il y a eu en substance une irresponsabilité pénale des personnes responsables de cette atteinte à l'environnement. Le crime commis par la multinationale est donc resté impuni. Dans le cas d'espèce, l'Inde n'a pas exercé sa compétence à l'égard des dommages environnementaux causés par l'entreprise, alors que cette dernière était sous sa juridiction pénale.

Ainsi, un Etat n'exerce pas toujours sa compétence pénale en matière environnementale à l'égard des activités relevant de sa juridiction ou de son contrôle, même en cas de dommage au territoire d'un Etat. En particulier lorsqu'il s'agit de multinationales, parce qu'elles sont puissantes économiquement.

Chapitre III : Les dommages aux autres espaces

Certains espaces, sans pour autant être des espaces internationalisés, ne font pas partie du territoire d'un Etat. C'est le cas de la Zone économique exclusive (ZEE), à savoir la zone située au-delà de la mer territoriale et adjacente à celle-ci, qui ne s'étend pas au-delà de 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale112.

Dans la ZEE, l'Etat côtier a des droits souverains et juridiction en ce qui concerne la mise en place et l'utilisation d'îles artificielles, d'installations et d'ouvrages, la recherche scientifique marine, et la protection et la préservation du milieu marin113. Il arrive que des personnes privées exercent des activités dans la ZEE, qui peuvent causer un dommage à la ZEE, voire au territoire de l'Etat côtier.

C'est le cas de la multinationale britannique BP, qui louait une plate-forme pétrolière pour forer dans la Zone Economique Exclusive (ZEE) des Etats-Unis. Cette plate-forme a explosé en 2010, déversant ainsi une énorme quantité d'hydrocarbure dans le Golfe du Mexique et tuant 11 personnes.

C'est aussi le cas du pétrolier maltais Erika, qui a fait naufrage en 1999 au large des côtes Bretonnes, déversant un peu moins de 20 000 tonnes de pétrole, polluant ainsi environ 400 km de côtes114.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Lorsqu'un dommage est causé au territoire d'un autre Etat par une activité exercée dans la ZEE, ces personnes privées ne relèvent pas de la juridiction ni du contrôle de l'Etat sur le territoire duquel elles causent un dommage. En revanche, elles relèvent de la juridiction pénale de leur Etat de nationalité. Or certains Etats ont des réglementations environnementales très souples et se refusent à exercer leur juridiction à l'encontre de ces entreprises. Ce sont les Etats de complaisance. Là encore, le dommage pourra ne pas être sanctionné.

Dans le cas de l'explosion Deepwater Horizon, la compagnie pétrolière a pu être condamnée sur le plan civil, à payer plus de 20 billions de dollars115. Cependant, elle n'a pas été condamnée sur le plan pénal pour les atteintes qu'elle a portées à l'environnement. En outre, seul le décès des 11 salariés causé par l'explosion a fait l'objet d'une incrimination pénale.

Dans le cas de l'affaire de l'Erika, l'Etat lésé, en l'occurrence la France, a préféré rechercher directement la responsabilité de l'entreprise qui a causé le dommage, plutôt que de mettre en cause la responsabilité de l'Etat qui n'a pas respecté son obligation de s'assurer que les activités sous sa juridiction ou son contrôle n'ont pas causé de dommage au territoire d'un autre Etat.

Dans ces deux cas, un dommage a été causé à la ZEE mais aussi à l'Etat côtier. Dans la première affaire, l'Etat côtier n'a pas exercé sa compétence pénale, mais uniquement sa compétence civile. Cela est conforme au droit international puisque la compétence pénale revient en principe à l'Etat de nationalité de l'auteur du dommage, qui n'a pas non plus exercé sa compétence pénale. En revanche, dans la seconde affaire, l'Etat côtier a exercé sa compétence pénale, alors même qu'il n'était pas compétent en vertu du droit international.

Dans le cas où un dommage est causé uniquement à la ZEE et pas à l'Etat côtier, comme pour les dommages causés à des territoires régis par le droit international, aucune action ne sera menée.

Il résulte de ce qui précède que pour les dommages au territoire d'un autre Etat, l'Etat compétent n'exerce parfois pas sa compétence pénale, tandis que pour les dommages à un territoire régi par le droit international, aucune compétence (civile ou pénale) n'est parfois exercée. Dans toutes ces hypothèses d'absence d'exercice de la juridiction d'un Etat, le dommage causé à l'environnement par ces personnes restera impuni. D'où la nécessité d'une juridiction internationale compétente en droit de l'environnement, pour pallier ce défaut des Etats.

115 Jana Kasperkevic, BP oil spill: judge grants final approval for $20bn settlement, The Guardian, 4 avril 2016.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Partie II: Le bien--fondé de l'extension de la compétence de juridictions internationales existantes

Une juridiction internationale compétente en environnement pourrait prendre deux formes. Il est en effet possible d'argumenter qu'il est préférable de renforcer le pouvoir des juridictions internationales existantes pour qu'elles acquièrent une compétence en matière environnementale, plutôt que de créer une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement.

L'extension de la compétence d'une juridiction internationale permanente et universelle existante, telle que la Cour Internationale de Justice, la Cour Pénale Internationale et le Tribunal international du droit de la mer serait-elle plus efficace que la création d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement, afin de protéger l'environnement?

Une importance fondamentale est à noter ici entre la CIJ et le Tribunal international du droit de la mer d'une part, et la CPI d'autre part. En effet, l'extension de la compétence de la CIJ et du Tribunal international du droit de la mer implique la rédaction d'une nouvelle convention internationale environnementale générale qui donnerait compétence à ces juridictions en cas de différends relatifs à la convention. En revanche, l'extension de la compétence de la CPI implique une modification de son statut.

Titre Ier : La Cour Internationale de Justice (CIJ)

La CIJ a été instituée par le chapitre VIX de la Charte des Nations Unies. C'est l'organe judiciaire principal des Nations Unies116. Le statut de la CIJ est fondé sur le statut de la Cour Permanente Internationale de Justice et fait partie intégrante de la Charte des Nations Unies. Il définit la constitution et le fonctionnement de la Cour117. A noter que tous les membres des Nations Unies sont ipso facto parties au statut de la CIJ, même si des Etats non membres des Nations Unies peuvent devenir parties au statut de la CIJ118. De plus, cela n'empêche pas les Etats membres des Nations Unies de pouvoir soumettre leurs différends à d'autres juridictions internationales que la CIJ119. Les Etats membres des Nations Unies s'engagent à respecter les arrêts de la CIJ rendus sur des affaires auxquelles ils sont parties120. A défaut, les autres Etats peuvent avoir recours au Conseil de Sécurité.

116 Charte des Nations Unies, Article 92.

117 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 1.

118 Charte des Nations Unies, Article 93.

119 Charte des Nations Unies, Article 95.

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120 Charte des Nations Unies, Article 94.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Il n'y a que peu d'affaires de la Cour Internationale de Justice (CIJ) qui traitent du droit international de l'environnement. L'extension de la compétence de la CIJ en matière environnementale permettrait de juger des Etats en cas de non-respect de leur obligation de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international. Cependant, l'extension de la compétence de la CIJ en matière environnementale comporte aussi des inconvénients.

Chapitre Ier : La compétence actuelle de la CIJ

En vertu du statut de la CIJ, seuls les Etats ont qualité pour se présenter devant la Cour121.

Cela signifie qu'en principe les personnes privées, telles que les personnes physiques (les individus) ou les personnes morales de droit privé (entreprises, ONG), ne sont pas justiciables devant la Cour. Mais cela signifie également que les autres personnes morales de droit public (organisation internationale, collectivités territoriales), en principe, ne relèvent pas non plus de la compétence de la Cour.

Pourtant, la Cour peut demander aux organisations internationales publiques des renseignements relatifs aux affaires portées devant elle, et recevra également lesdits renseignements qui lui seraient présentés par ces organisations de leur propre initiative122. Par ailleurs, l'interprétation de l'acte constitutif d'une organisation internationale publique ou celle d'une convention internationale adoptée en vertu de cet acte peut être mise en question dans une affaire soumise à la Cour123.

En vertu du statut de la CIJ, la Cour est ouverte aux Etats parties au statut de la CIJ124.

La compétence de la Cour s'étend à toutes les affaires que les parties lui soumettent, ainsi qu'à tous les cas spécialement prévus dans la Charte des Nations Unies ou dans les traités et conventions en vigueur125. Les Etats parties au statut peuvent, même après la naissance d'un litige, déclarer reconnaître comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, à l'égard de tout autre Etat acceptant la même obligation, la juridiction de la Cour sur tous les différends d'ordre juridique ayant pour objet:

a. l'interprétation d'un traité;

b. tout point de droit international;

c. la réalité de tout fait qui, s'il était établi, constituerait la violation d'un engagement international;

d. la nature ou l'étendue de la réparation due pour la rupture d'un engagement international.

En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.

121 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 34 paragraphe 1.

122 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 34 paragraphe 2.

123 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 34 paragraphe 3.

124 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 35.

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125 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 36.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Dans sa jurisprudence, la Cour a reconnu que sa compétence en matière contentieuse se fonde sur le consentement des Etats auxquels elle est ouverte126. Ce consentement peut prendre différentes formes.

Premièrement, il peut prendre la forme d'un compromis, en vertu duquel les deux parties au litige reconnaissent la compétence de la Cour pour l'affaire en question. Deuxièmement, il peut prendre la forme des cas prévus dans les traités et conventions. Troisièmement, il peut prendre la forme d'une Déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour. Quatrièmement, il peut prendre la forme d'une acceptation tacite de la compétence de la Cour (forum prorogatum), en cas d'absence d'objection de l'Etat défendeur de la saisie de la Cour par l'Etat demandeur. Enfin, la Cour peut se prononcer sur sa propre compétence.

Les cas dans lesquels la Cour peut décider de sa compétence sont limités dans des conditions définies par le règlement qui prévoit les attributions et la procédure de la CIJ, mentionné à l'article 30 du statut de la CIJ127.

Ainsi, sauf à ce que les Etats aient ratifié une convention internationale qui prévoit spécialement la compétence de la Cour ou fassent une déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour, la CIJ n'est en principe compétente qu'avec l'accord des deux parties au litige.

Parmi les conventions internationales environnementales générales sectorielles, seules l'UNFCCC128 et la CDB129 toutes deux de 1992, prévoient

exclusivement la soumission d'un différend à la CIJ.

En outre, les Conventions de Ramsar et de l'UNESCO ne prévoient aucune disposition relative aux différends internationaux. La CITES et la Convention de Bonn font quant à elles référence à la Cour Permanente d'Arbitrage130. Enfin, la Convention de Montego Bay prévoit qu'un Etat est libre de choisir pour le règlement des différends relatifs à l'interprétation ou à l'application de la Convention, le Tribunal international du droit de la mer, la Cour internationale de Justice, ou un tribunal arbitral131.

En revanche, de nombreuses conventions internationales environnementales spécifiques prévoient la compétence de la CIJ.

126 Site internet de la CIJ, Fondements de la compétence de la Cour.

127 Site internet de la CIJ, Fondements de la Compétence de la Cour.

128 Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, Article 14.

129 Convention sur la diversité biologique, Article 27.

130 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction, Article XIII.

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131 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 287.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Ces conventions sont par exemple la Convention internationale pour la prévention de la pollution des eaux de la mer par les hydrocarbures, le Traité sur l'Antarctique, la Convention révisée de 1868 pour la navigation du Rhin, la Convention de Vienne pour la protection de la couche d'ozone, la Convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte trans-frontière, la Convention sur la protection et l'utilisation des cours d'eau transfrontières et des lacs internationaux et la Convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement132.

A noter que le règlement d'un différend concernant l'interprétation ou l'application du statut de la Cour Pénale Internationale peut être renvoyé à la CIJ133.

L'agenda 21 énonce que les Etats doivent soumettre leurs différends relatifs au développement durable à la CIJ. Cependant, ce plan d'action est considéré comme du droit mou, de sorte qu'il n'a pas de force contraignante, sauf à faire partie de la coutume internationale.

L'agenda 21134 adopté lors de la Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement de Rio de 1992 prévoit en effet que les Etats devraient étudier et examiner plus avant des méthodes permettant d'élargir l'éventail des mécanismes de prévention et de règlement des différends actuellement disponibles et d'accroître leur efficacité. Ce peut être des moyens pacifiques efficaces de règlement des différends conformément à la Charte des Nations Unies, y compris le cas échéant le recours à la Cour internationale de Justice et leur inclusion dans les traités ayant trait au développement durable.

Par ailleurs, moins de la moitié des Etats membres des Nations Unies (72/193)135 ont fait une déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la CIJ136. La France n'en fait pas partie.

Il en résulte qu'il n'y a que peu d'affaires de la Cour Internationale de Justice (CIJ) qui traitent du droit international de l'environnement. Les principales affaires de la CIJ en matière environnementale sont:

1) C.I.J, Affaire du détroit de Corfou, arrêt du 9 avril 1949, Grande-Bretagne/Albanie

2) C.I.J., Licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996

3) C.I.J., Affaire relative au projet Gabèikovo--Nagymaros, arrêt du 25 septembre 1997, Slovaquie/Hongrie

4) C.I.J., Affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, arrêt du 20 avril 2010, Argentine/Uruguay

5) C.I.J., Affaire de la chasse à la baleine dans l'Antarctique, arrêt du 31 mars 2014, Australie/Japon

132 Site internet de la CIJ, Traités.

133 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 119 paragraphe 2.

134 Agenda 21, Chapitre 39, Instruments et mécanismes juridiques internationaux, paragraphe 10.

135 Site internet des NU, Progression du nombre des Etats membres de 1945 à nos jours.

38

136 Site internet de la CIJ, Déclarations d'acceptation de la juridiction obligatoire.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

En outre, la CIJ a tenté d'instaurer une chambre spécialisée en droit de l'environnement, mais cette tentative s'est soldée par un échec.

En principe, la Cour exerce ses attributions en séance plénière137. Par exception, elle peut exercer ses attributions en chambre restreinte, permanente ou temporaire. Il existe trois types de chambres à la Cour. La Cour peut tout d'abord constituer une ou plusieurs chambres, composées de trois juges au moins, pour connaître de catégories déterminées d'affaires138. Ensuite, elle peut constituer une chambre, dont le nombre de juges est fixé par la Cour avec l'assentiment des parties, pour connaître d'une affaire déterminée139. Enfin, la Cour compose annuellement une chambre de cinq juges, appelés à statuer en procédure sommaire lorsque les parties le demandent en vue de la prompte expédition des affaires140. Tout arrêt rendu par l'une de ces chambres est considéré comme rendu par la Cour141. De plus, ces chambres peuvent, avec le consentement des parties, siéger et exercer leurs fonctions ailleurs qu'à La Haye142.

La CIJ a ainsi institué en 1993 une chambre pour connaître des affaires environnementales, en vertu de l'article 26 § 1 de son statut143. Cette chambre était composée de sept juges144. Elle a été régulièrement reconstituée jusqu'en 2006. Au cours de ses treize années d'existence, aucun Etat n'a toutefois demandé à ce qu'une affaire soit portée devant cette chambre. La Cour a en conséquence décidé en 2006 de ne pas tenir d'élections pour renouveler la composition de ladite chambre. Des affaires n'ont à ce jour été portées que devant des chambres constituées en vertu de l'article 26 § 2 du statut de la CIJ.

Chapitre II: L'extension possible de la compétence de la CIJ

Des différentes formes que peut prendre le consentement des Etats à la compétence contentieuse de la CIJ, la forme la plus protectrice de l'environnement serait la conclusion d'une nouvelle convention internationale. Cela est dû d'une part au fait que cette acceptation serait multilatérale, contrairement à la déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour, qui est unilatérale. D'autre part, cela est dû au fait que cette acceptation se fait par avance, elle est donc moins casuistique que le compromis.

137 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 25.

138 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 26, paragraphe 1.

139 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 26, paragraphe 2.

140 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 29.

141 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 27.

142 Statut de la Cour Internationale de Justice, Article 28.

143 Site internet de la Cour Internationale de Justice, Chambres et comités.

39

144 Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, p 14.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Pour étendre la compétence de la CIJ en matière environnementale, il faudrait donc conclure une nouvelle convention internationale générale en droit de l'environnement, qui rend la CIJ compétente pour connaitre des différends relatifs à la Convention. Cette Convention pourrait consacrer l'obligation générale des Etats de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international. Elle pourrait aussi définir l'environnement, ainsi que les grands principes environnementaux.

L'extension de la compétence de la CIJ en matière environnementale est intéressante dans la mesure où elle est simple, puisqu'elle utilise des instruments institutionnels connus et existants. De plus, elle permet d'éviter la création d'une nouvelle juridiction qui favoriserait l'apparition de conflits de juridiction. Enfin, elle permettrait de contourner l'inconvénient de la nature consensuelle de la compétence de la CIJ, dans la mesure où les Etats auraient consenti par avance à la compétence de la Cour. Mais surtout, elle permettrait d'envoyer un message politique fort des Etats, à savoir que les atteintes à l'environnement doivent être réprimées par le droit international.

Cependant, cette extension de compétence aurait des effets limités quant à la protection de l'environnement.

D'une part, cette extension ne remettrait pas en cause le fait que certaines conventions internationales environnementales existantes ne font pas référence à la CIJ, à savoir les conventions internationales environnementales générales sectorielles précitées. La compétence de la CIJ ne s'appliquerait que par défaut de disposition conventionnelle prévoyant la compétence d'une juridiction internationale.

D'autre part, elle requiert une volonté des Etats qui semble pour le moment inexistante. En effet, la CIJ a déjà consacré de façon coutumière l'obligation des Etats de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international (cf Introduction).

Comme vu précédemment (Partie I), certains Etats ne s'assurent pas toujours, via leurs juridictions nationales, du respect de leur obligation de protéger l'environnement, en particulier lorsqu'aucun dommage n'est causé à leur territoire ou bien s'en assurent partiellement, sans faire usage de leur compétence pénale.

Il semble donc peu probable que ces Etats acceptent par avance la compétence de la CIJ pour connaître du non-respect de leur obligation de s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage au territoire d'autres Etats ou à des territoires régis par le droit international. Partant, les Etats qui accepteront cette compétence seront ceux qui respectent déjà cette obligation et non les Etats défaillants.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Comme vu en introduction, le nombre d'atteintes à l'environnement à l'échelle internationale est en hausse145. Or les législations nationales sur le crime environnemental sont peu développées dans de nombreux Etats146. Ces derniers n'exercent pas leur compétence pénale à l'égard des activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle.

Or, l'extension de la compétence de la CIJ ne remédie pas nécessairement au fait que les Etats n'engagent pas toujours la responsabilité d'un Etat qui n'a pas respecté son obligation de ne pas causer de dommage au territoire d'autres Etats ou à un territoire régi par le droit international. Il résulte de cette inaction des autres Etats que l'atteinte à l'environnement restera impunie dans le cas où l'Etat compétent ne fait pas usage de sa juridiction. En ce sens, l'extension de la compétence de la CIJ ne permettrait pas une meilleure efficacité du droit international de l'environnement et donc ne serait pas `bien fondée'.

Ainsi, il apparaît peu efficace de créer une nouvelle convention internationale réaffirmant l'obligation des Etats de protéger l'environnement, au terme d'un objectif de protection de l'environnement, dans la mesure où cette obligation existe déjà en droit coutumier. Par conséquent, l'extension de la compétence de la CIJ en matière environnementale ne serait que d'un intérêt limité du point de vue de la protection de l'environnement.

Titre II: La Cour Pénale Internationale (CPI)

La CPI est une institution permanente qui exerce sa compétence à l'égard des personnes pour les crimes les plus graves ayant une portée internationale. Elle est complémentaire des juridictions pénales nationales147. Elle est reliée au système des Nations Unies par un accord148. La Cour a son siège à La Haye, aux Pays-Bas149. La Cour a la personnalité juridique internationale. Elle a aussi la capacité juridique qui lui est nécessaire pour exercer ses fonctions et accomplir sa mission. La Cour peut exercer ses fonctions et ses pouvoirs sur le territoire de tout État Partie à son statut150.

La CPI n'est à l'heure actuelle compétente en matière environnementale que dans le cadre d'un conflit armé. L'extension de la compétence de la CPI permettrait de juger des personnes physiques en cas de commission d'un crime international environnemental. Cependant, cette extension comporte, comme l'extension de la compétence de la CIJ, certaines limites.

145 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 7.

146 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 17.

147 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 1.

148 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 2.

149 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 3.

41

150 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 4.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement Chapitre Ier : La compétence actuelle de la CPI

La CPI a compétence à l'égard de quatre crimes internationaux, à savoir, le crime de génocide ; les crimes contre l'humanité; les crimes de guerre et le crime d'agression151. Le statut de la CPI définit les trois premiers crimes, tandis que le crime d'agression est défini par la Résolution 3314 de l'Assemblée Générale des Nations Unies de 1974152.

CPI153

En particulier, le crime de guerre est défini par l'article 8 du statut de la comme les

infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, mais aussi comme les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi du droit international. Parmi ces dernières, se trouve en particulier le fait de diriger intentionnellement une attaque en sachant qu'elle causera incidemment, notamment, des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu.

Actuellement, l'environnement ne fait l'objet d'une protection par la Cour Pénale Internationale (CPI) qu'à travers la répression des crimes de guerre. Or les conditions de la qualification pénale de crime de guerre sont très strictes.

Le statut de la CPI prévoit que sept ans après l'entrée en vigueur du statut, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies convoquera une conférence de révision pour examiner tout amendement au statut154. L'examen pourra porter notamment, mais pas exclusivement, sur la liste des crimes figurant à l'article 5, à savoir les 4 crimes internationaux à l'égard desquels la CPI est compétente.

Cette conférence de révision du statut de la CPI s'est tenue du 31 mai au 11 juin

2010 à Kampala en Ouganda. Elle a abouti à l'adoption en 2010 des amendements à l'article 8, et à l'ajout des articles 8bis, 15bis et 15ter155.

En outre, sont maintenant considérés comme des crimes de guerre le fait d'employer du poison ou des armes empoisonnées ; le fait d'employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues ; et le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d'entailles. De plus, le crime d'agression est maintenant défini par le statut de la CPI.

En 2010, l'avocate britannique Polly Higgins a soumis aux Nations Unies une proposition d'amendement au statut de la CPI visant à inclure l'écocide parmi les crimes internationaux contre la paix156. Cependant, certains Etats se sont opposés à cette proposition, parmi lesquels figurent les Pays-Bas.

151 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 5.

152 Résolution 3314 de l'Assemblée Générale des Nations Unies, 14 décembre 1974, relative à la Définition de l'agression, Annexe, Article premier.

153 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 8 2. (b) (iv).

154 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 123.

155 Site internet du CICR, Statut de Rome de la Cour pénale internationale, 17 juillet 1998.

42

156 Site internet de Polly Higgins, Press.

43

157 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 25 paragraphe 1.

158 Site internet du CICR, La responsabilité pénale individuelle pour violation du droit international humanitaire applicable en situation de conflit armé non international.

159 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 25 paragraphe 4.

160 Valéry Laramée de Tannenberg, Peut--on réprimer le crime environnemental?, Journal de l'environnement, 16 mars 2016.

161 Marine Jobert, Ecocide : criminaliser et juger les atteintes à la nature, Journal de l'environnement, 13 mars 2013.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La CPI est compétente à l'égard des personnes physiques en vertu de son statut157. En revanche, elle n'est pas compétente à l'égard des personnes morales.

Cette compétence ratione personae de la CPI est concordante avec l'affirmation du Tribunal militaire international de Nuremberg, en vertu de laquelle « ce sont des hommes, et non des entités abstraites, qui commettent les crimes dont la répression s'impose, comme sanction du Droit international »158.

Aucune disposition du statut relative à la responsabilité pénale des individus n'affecte la responsabilité des Etats en droit international159.

Ainsi, l'extension de la compétence de la CPI n'est pas incompatible avec une extension de la compétence de la CIJ.

Chapitre II: L'extension possible de la compétence de la CPI

L'extension de la juridiction de la CPI serait justifiée par l'augmentation des crimes environnementaux160. Le crime environnemental, encore appelé écocide, deviendrait un crime international. Cela permettrait de juger des personnes physiques, contrairement à l'extension de la compétence de la CIJ. De plus, cette extension de compétence aurait pour avantage, comme l'extension de la compétence de la CIJ la simplicité, puisqu'elle permettrait d'utiliser les structures de la CPI.

Polly Higgins, l'avocate britannique, propose de créer un cinquième crime international au sein de l'article 5 du statut de la CPI. Cette approche impliquerait la difficile définition du crime d'écocide. Polly Higgins propose comme définition : « La destruction, la détérioration ou la perte substantielle d'un ou plusieurs écosystèmes d'un territoire donné, que la cause en soit humaine ou autre, d'une telle ampleur que la jouissance paisible des habitants dudit territoire en est sévèrement diminuée »161. Dans cette définition, le critère déterminant du crime n'est pas tant dans l'intention de son auteur que la gravité des conséquences de l'acte pour l'environnement et l'être humain.

Le PNUE et Interpol sont clairement en faveur d'une telle extension de la compétence de la CPI.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

En effet, selon ces deux Organisations Internationales, pour inverser la courbe des crimes environnementaux, les réponses doivent inclure une série de mesures légales, telles que l'exécution, la législation, la réglementation, et la gestion de l'environnement162. Le PNUE et Interpol recommandent de soutenir internationalement la chaine entière d'exécution, ce qui inclut le pouvoir judiciaire, en particulier la référence au crime environnemental163. D'après eux, il est nécessaire de définir urgemment et définitivement le crime environnemental pour assurer une compréhension commune de la terminologie164.

Cette approche nécessiterait la constitution d'une commission formée d'experts qui étudierait comment passer à cette réforme. Cette commission mettrait en place la documentation nécessaire et pourrait définir la nouvelle compétence de la CPI.

Les conditions et modalités d'adoption d'un amendement au statut de la CPI dépendent des dispositions que l'amendement a pour but de modifier. En outre, des règles différentes s'appliquent amendement aux articles 5, 6, 7 et 8 du statut, aux amendements aux dispositions du statut de caractère exclusivement institutionnel ou aux amendements aux autres dispositions du statut.

En ce qui concerne les amendements à l'article 5 du statut, les règles sont posées par l'article 121 du statut de la CPI :

- Tout Etat Partie au statut peut proposer cet amendement.

- Le texte de la proposition d'amendement devra être soumis au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, qui le communiquera sans retard à tous les Etats Parties.

- Trois mois au plus tôt après la date de cette communication, l'Assemblée des Etats Parties, à la réunion suivante, décide, à la majorité de ses membres présents et votants, de se saisir ou non de la proposition. L'Assemblée peut traiter cette proposition elle-même ou convoquer une conférence de révision si la question soulevée le justifie.

- L'adoption de l'amendement lors d'une réunion de l'Assemblée des Etats Parties ou d'une conférence de révision requerra, s'il n'est pas possible de parvenir à un consensus, la majorité des deux tiers des Etats Parties.

- L'amendement entrera en vigueur à l'égard des Etats Parties qui l'ont accepté un an après le dépôt de leurs instruments de ratification ou d'acceptation.

- La CPI n'exercera pas sa compétence à l'égard d'un crime faisant l'objet de cet amendement lorsque ce crime a été commis par un ressortissant d'un Etat Partie qui n'a pas accepté l'amendement ou sur le territoire de cet Etat.

- Le Secrétaire général de l'ONU communiquera à tous les Etats Parties l'amendement adopté lors d'une réunion de l'Assemblée des Etats Parties ou d'une conférence de révision.

Il résulte de ces dispositions que le concours d'un seul Etat est nécessaire pour proposer l'amendement, mais qu'en revanche, 83 des 124 parties au statut de la CPI devront voter en faveur de l'adoption de l'amendement.

162 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 14.

163 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 11.

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164 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 17.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

L'extension de la compétence de la CPI comporte bien moins d'inconvénients que l'extension de la compétence de la CIJ, dans la mesure où cette extension serait plus efficace du point de vue de la protection de l'environnement. En outre, elle permettrait de remédier au fait que certains Etats n'exercent pas leur compétence pénale à l'égard des activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle. Dans la mesure où certains Etats n'exercent pas leur compétence sur les personnes privées (physiques ou morales) relevant de leur juridiction ou contrôle et causant des dommages à l'environnement, et que les autres Etats engagent rarement la responsabilité de l'Etat qui n'a pas exercé sa compétence, il paraît en effet efficace d'engager directement la responsabilité de ces personnes privées, d'un point de vue de protection environnementale.

Le défaut des Etats d'exercice de leur compétence pénale à l'égard des activités relevant de leur juridiction ou de leur contrôle n'est pas nécessairement uniquement volontaire. Selon le PNUE et Interpol, beaucoup d'Etats et organisations ne sont pas dans la capacité de combattre seuls les crimes environnementaux. Cela est dû à l'augmentation fulgurante, au degré de sophistication et au caractère global des atteintes à l'environnement165.

Cependant, la création du crime d'écocide ne permettrait pas pour autant à la CPI de juger des personnes morales, même de droit privé, en cas de commission d'un crime international environnemental. En outre, comme vu précédemment, les personnes morales ne sont pour le moment pas susceptibles de faire l'objet d'une condamnation pénale en vertu du droit international pénal.

Titre III : Le Tribunal international du droit de la mer

Une troisième possibilité est d'étendre la compétence du Tribunal international du droit de la mer pour en faire une juridiction spécialisée en droit de l'environnement et pas qu'en droit de la mer.

Le Tribunal international du droit de la mer est un organe judiciaire indépendant créé par l'article 287 de la Convention de Montego Bay, pour connaître des différends auxquels pourraient donner lieu l'interprétation et l'application de la Convention166. Son statut est constitué par l'annexe VI à la Convention de Montego Bay. La soumission d'un différend au Tribunal est régie par les parties XI et XV de la Convention de Montego Bay167, à savoir les parties sur la Zone et le règlement des différends.

165 Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014, p 10.

166 Site internet du Tribunal international du droit de la mer, le Tribunal.

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167 Statut du Tribunal international du droit de la mer, Article premier.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement Chapitre Ier : La compétence actuelle du Tribunal

Le Tribunal international du droit de la mer est compétent pour tous les différends et toutes les demandes qui lui sont soumis conformément à la Convention de Montego Bay et toutes les fois que cela est expressément prévu dans tout autre traité international conférant compétence au Tribunal168. Les parties XI et XV de la Convention de Montego Bay confèrent deux types de compétence au Tribunal.

D'une part, au sein du Tribunal international du droit de la mer est créée une Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins169. Cette chambre est compétente pour connaître des différends portant sur des activités menées dans la Zone170, à savoir les fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale. Elle est compétente pour connaître des litiges entre des Etats, l'Autorité internationale des fonds marins (l'Autorité), l'Entreprise, des entreprises d'Etats, et des personnes physiques ou morales possédant la nationalité d'Etats Parties ou effectivement contrôlées par eux ou leurs ressortissants, lorsqu'elles sont patronnées par ces Etats ou par tout groupe des catégories précitées conformément aux procédures et critères de qualification énoncés dans les règles, règlements et procédures de l'Autorité171.

L'Autorité est l'organisation par l'intermédiaire de laquelle les Etats parties à la Convention de Montego Bay organisent et contrôlent les activités menées dans la Zone, notamment aux fins de l'administration des ressources de celle-ci172. L'Entreprise est l'organe de l'Autorité qui mène des activités dans la Zone, telles que l'exploration et l'exploitation de la Zone, ainsi que le transport, le traitement, et la commercialisation de minéraux173.

Les différends entre Etats relatifs à l'interprétation de la partie de la Convention de Montego Bay portant sur des activités menées dans la Zone peuvent être soumis à une chambre spéciale du Tribunal international du droit de la mer ou encore à une chambre ad hoc de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins174. Les différends entre parties à un contrat relatif à des activités menées dans la Zone peuvent être soumis à un arbitrage commercial obligatoire.

Ainsi, contrairement à la CIJ, le Tribunal international du droit de la mer n'est pas compétent pour juger des Etats uniquement en ce qui concerne les activités menées dans la Zone.

D'autre part, le Tribunal international du droit de la mer peut être compétent pour le règlement des autres différends relatifs à l'interprétation ou à l'application de la Convention de Montego Bay, lorsque les deux Etats parties au conflit ont accepté par voie de déclaration écrite la compétence du Tribunal175.

168 Statut du Tribunal international du droit de la mer, Article 21.

169 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 186.

170 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 187.

171 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 153, paragraphe 2 lettre b).

172 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 157.

173 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 170.

174 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 188.

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175 Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, Article 287.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement Chapitre II: L'extension possible de la compétence du Tribunal

Il est possible de conclure une nouvelle convention internationale générale qui donne compétence au Tribunal international du droit de la mer pour tout différend lié à l'application de la convention. Cependant, la juridiction étendue du Tribunal ne concerne que les activités menées dans les grands fonds marins. Il en résulte que dans les autres domaines, et donc en droit international environnemental général, le Tribunal dispose de la même compétence ratione personae que la CIJ. Dans la mesure où le Tribunal est moins reconnu que la CIJ, l'extension de la compétence du Tribunal semble moins pertinente que celle de la CIJ.

Il résulte de tout ce qu'il précède que si l'extension de la compétence de juridictions existantes est choisie, celle-ci devra concerner à la fois la CIJ et la CPI, dans la mesure où les deux juridictions ont une compétence ratione personae complémentaire. En revanche, l'extension de la compétence de ces deux juridictions est problématique dans la mesure où elle ne permet pas la répression des atteintes à l'environnement commises par des personnes morales de droit privé. Par ailleurs, elle ne permet pas l'engagement de la responsabilité civile de personnes privées (physiques ou morales), dans le cas où l'Etat compétent fait défaut. Dans cette optique, la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement peut être intéressante.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Partie III : Le bien--fondé de la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Plusieurs initiatives et propositions politiques ou doctrinales de juridictions internationales spécialisées en droit de l'environnement ont été faites. Celles-ci, tout comme les juridictions nationales spécialisées en droit de l'environnement, peuvent servir d'inspiration à ce à quoi ressemblerait une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement.

La création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement a pour principal avantage de permettre à un groupe d'experts en droit international de l'environnement de juger des personnes ayant commis des dommages à l'environnement. Cependant, elle risque de poser un problème de délimitation de compétence par rapport aux juridictions internationales existantes, et donc de créer un conflit de juridictions.

La création d'une nouvelle juridiction internationale implique en principe la rédaction d'un nouveau statut, qui devra définir l'organisation, la compétence et les règles de procédures de cette juridiction. Ce statut peut, entre autres, s'inspirer du statut de tribunaux moraux internationaux spécialisés en environnement ou encore de juridictions nationales spécialisées en droit de l'environnement, et plus généralement des statuts de juridictions internationales existantes.

Titre Ier : Initiatives et propositions politiques ou doctrinales

Plusieurs initiatives et propositions politiques ou doctrinales de juridictions internationales spécialisées en droit de l'environnement ont été faites, en particulier en matière pénale et de changement climatique. Aucune n'a abouti à la création d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement, cependant, elles sont liées à la création d'un tribunal moral international compétent en environnement.

Chapitre Ier : De juridictions internationales compétentes en droit de l'environnement

Suite à l'échec du sommet de Copenhague de 2009 sur le climat, le Président de la Bolivie propose, lors d'une conférence de presse sur les changements climatiques au Siège des Nations Unies à New York, la mise en place la mise en place d'un organe permanent, composé d'un Tribunal sur les changements climatiques et d'une équipe d'enquête176. Cette équipe d'enquête serait dotée des moyens de déterminer la responsabilité d'Etats ou de sociétés multinationales en matière de changements climatiques.

176 Site internet des Nations Unies, Conférence de presse du Président bolivien, M. Evo Morales Ayma, sur les changements climatiques, 22 septembre 2009.

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Si cette initiative est intéressante, il faut cependant déplorer le fait qu'elle ne concerne que les responsabilités en matière de changement climatique et non d'environnement en général.

Suite à cette proposition, la Conférence mondiale des peuples contre le changement climatique s'est tenue en avril 2010 à Cochabamba (Bolivie)177. Cette conférence a notamment appelé à la création d'un tribunal international de justice climatique et environnementale. Ce tribunal n'a pas vu le jour, mais la conférence a donné naissance à la Global Alliance for the Rights of Nature, qui a créé le tribunal international des droits de la nature, un tribunal moral compétent pour connaître de toute violation sérieuse à la Déclaration universelle des droits de la Terre-Mère adoptée lors de la conférence commise par une personne publique ou privée, physique ou morale178.

Parallèlement, en 2010, le juge Antonino Abrami, vice-président de l'Académie internationale des Sciences de l'Environnement, promeut devant le Parlement européen la création d'une Cour pénale de l'environnement, à savoir une cour pénale internationale spécialisée en droit l'environnement qui serait la jumelle de la CPI existante179. Il propose pour cela de modifier l'article 7 du statut de la CPI qui définit les crimes contre l'humanité, pour considérer les atteintes à l'environnement à l'échelle internationale comme faisant partie de cette catégorie. Il s'agirait en d'autres termes d'ajouter une autre disposition pour intégrer dans la définition des crimes contre l'humanité le crime international environnemental.

Cette approche a plusieurs inconvénients majeurs relatifs à l'objectif d'une protection efficace de l'environnement.

Premièrement, le statut de la CPI définit un crime contre l'humanité comme un certain type d'acte commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette attaque180. Or, les crimes environnementaux ne sont pas tous commis en temps de guerre. Qui des actes qui ne sont pas commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile?

Deuxièmement, il semble paradoxal de justifier la création d'une nouvelle juridiction, par l'extension de la compétence d'une juridiction existante.

Troisièmement, cette approche ne permet pas de juger des personnes morales pour la commission de crimes contre l'environnement, ni de déterminer la responsabilité civile de personnes physiques.

177 Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature, Préambule.

178 Statut du Tribunal international des droits de la nature, Article 3.

179 Vidéo du juge Antonino Abrami entendu le 10 juillet 2010 par la Commission Environnement du Parlement Européen.

49

180 Statut de la Cour Pénale Internationale, Article 7.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Dans la lignée du juge Antonino Abrami s'inscrit la Charte de Bruxelles, signée le 30 janvier 2014181. En outre, la Charte de Bruxelles promeut l'idée d'une cour pénale internationale de l'environnement et de la santé182. Elle propose une révision des statuts de la Cour Pénale Internationale pour introduire la catastrophe environnementale comme l'une des incriminations des crimes contre l'humanité permettant de poursuivre les responsables ayant agi de façon intentionnelle.

Ainsi, les mêmes critiques qui ont été faites à la proposition du juge s'appliquent à la Charte de Bruxelles.

Cette Charte a notamment été signée par l'Académie internationale des Sciences de l'Environnement et le Tribunal de la Nature. Toutes les organisations signataires de cette Charte soutiennent les initiatives déjà existantes ou en préparation permettant à la société civile de s'emparer et de juger au moins sur le plan moral les responsables des crimes et délits environnementaux mettant en péril les ressources planétaires et la santé humaine, telles que le Tribunal de la Nature183. Les parties signataires, également, suivent avec intérêt et certaines soutiennent la création d'un nouveau crime dit d' « écocide » comme cinquième crime contre la paix.

Chapitre II: De tribunaux moraux internationaux compétents en droit de l'environnement

Le Tribunal de la Nature est un tribunal moral chargé de juger les crimes contre l'avenir de l'humanité au nom du droit des générations futures184. Il est le fruit d'un processus de discussion de l'après Rio+20, qui a débuté lors de la conférence internationale « Quelles sont les voies d'action pour une planète vivable ? » qui s'est tenue à Quito en 2012. Plusieurs personnalités issues de l'univers juridique, politique et/ou médiatique soutiennent cette initiative dont, entre autres, Boutros Boutros Ghali

(ancien secrétaire général des Nations Unies), Eva Joly, Michel Prieur, Nicolas Hulot et Corinne Lepage185.

Il a de multiples autres noms (Tribunal de conscience des crimes contre la nature, Tribunal international de conscience des crimes contre la nature et l'environnement, Tribunal international de conscience de la nature, Tribunal pour les crimes contre la nature et le futur de l'humanité ou encore Tribunal international de la nature).

181 Sophie Fabrégat, Un collectif plaide pour une cour pénale internationale de l'environnement et de la santé, Actu environnement, 30 janvier 2014.

182 Charte de Bruxelles, p 2.

183 Charte de Bruxelles, p 1.

184 Site internet du Tribunal de la Nature, La démarche.

50

185 Site internet du Tribunal de la Nature, Soutiens dans le monde.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Il a fait l'objet d'une présentation au Conseil économique, social et environnemental le 7 décembre 2012186. Michel Prieur a rédigé en 2013 un projet de statut de ce Tribunal187. L'initiative du Tribunal devait être mise en oeuvre en 2014188. Il est signataire de la Charte de Bruxelles189.

Le Tribunal a pris l'initiative de lancer une pétition le 5 juin 2014 demandant que soient inscrites à l'agenda de la réunion du sommet des chefs d'Etat de septembre 2014 à New York les questions environnementales et climatiques190. Cependant, cette démarche ne semble pas avoir abouti.

En revanche 2014 a été créé le Tribunal international des droits de la nature191. Ce projet est porté par la Global Alliance for Rights of Nature, en partenariat avec End Ecocide on Earth, NatureRights et Attac. Ce Tribunal, tout comme le Tribunal de la Nature aurait dû, n'applique pas uniquement le droit international de l'environnement.

La première édition du Tribunal s'est tenue en janvier 2014 à Quito (Equateur) et la seconde en décembre 2014 à Lima (Pérou)192. La troisième édition du Tribunal international des droits de la nature s'est tenue en parallèle de la COP 21, en décembre 2015 à Paris.

Cette troisième édition a été l'occasion pour un panel de juristes et de personnalités internationalement reconnus sur le thème de la justice planétaire de recommander la modification du statut de la CPI de sorte que celui-ci rende possible la poursuite des responsables de crimes d'écocide193. Elle a aussi été l'occasion pour le Tribunal d'enjoindre les communautés et organisations qui partagent sa vision à devenir parties à la Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature194.

Enfin, le Tribunal Monsanto est un autre tribunal moral qui se réunira à La Haye du 12 au 16 octobre 2016195.

186 Site internet de Waternunc, Tribunal international de la nature.

187 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature.

188 Présentation du Tribunal pour les crimes contre la nature et le futur de l'humanité.

189 Site internet du Tribunal de la Nature, Charte de Bruxelles.

190 Site internet du Tribunal de la Nature, Pétition internationale.

191 Site internet de NatureRights, Tribunal international des droits de la nature.

192 Site internet du la Global Alliance for the Rights of Nature, A Tribunal for Earth: why it matters.

193 Site internet de Valérie Cabanes, Le Tribunal international des droits de la nature.

Valérie Cabanes est membre de End Ecocide on Earth et fait partie des personnes qui ont présenté le Tribunal de la Nature au Conseil économique et social en 2012.

194 Global Alliance for the Rights of Nature, Communiqué de presse, 7 décembre 2015.

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195 Coralie Schaub, Monsanto : pour que justice germe, Libération, 2 décembre 2015.

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Un des objectifs de ce Tribunal sera d'examiner l'opportunité de réformer le statut de la CPI afin d'y inclure le crime d'écocide et de permettre la poursuite des personnes physiques et morales soupçonnées d'avoir commis ce crime196. En amont de l'événement, des groupes de travail seront chargés d'étudier les impacts des activités de Monsanto au regard des 6 axes suivants : droit à un environnement sain ; droit à la santé ; droit à l'alimentation ; liberté d'expression et liberté de recherche académique; complicité de crimes de guerre; crime d'écocide. La cour rendra son avis en décembre 2016. Le projet a été initié par un groupe de personnalités de la société civile venant de différents horizons professionnels, qui disposent toutes d'une expertise en relation avec les thèmes et enjeux qui seront traités par le Tribunal Monsanto.

Le Tribunal de la Nature et le Tribunal international des droits de la nature paraissent être les deux projets généraux de tribunaux moraux les plus aboutis, en particulier parce qu'ils disposent d'un projet de statut pour le premier, et d'un statut pour le second, qui méritent d'être étudiés.

Titre II: Sources d'inspiration de la nouvelle juridiction

Dans la mesure où la création d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement est susceptible de s'inspirer des tribunaux moraux, il est intéressant d'étudier à la fois le projet de statut du Tribunal de la Nature de Michel Prieur, et le fonctionnement actuel du Tribunal international des droits de la nature. Cette nouvelle juridiction pourrait aussi s'inspirer de juridictions nationales spécialisées en droit de l'environnement, telles que la Land and Environment Court australienne.

Chapitre Ier : Le projet de statut du Tribunal de la Nature

Le Tribunal de la Nature présente de nombreux avantages. Cependant, il reste un tribunal moral, sans réel pouvoir de sanction.

Il a pour premier avantage d'être composé d'une Commission et d'une Cour qui sont toutes deux composées d'experts en environnement international.

En outre, les réclamations sont examinées par une Commission composée de 10 experts ou personnalités reconnus dans le domaine de l'environnement au plan national et international devant représenter les différentes régions du monde et assurer un équilibre homme femme197. La Commission désigne en son sein deux rapporteurs qui proposent à la Commission soit un rejet motivé soit l'admission de la réclamation198.

196 Site internet du Tribunal Monsanto, Comment?

197 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Articles 3 et 4.

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198 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 4.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

La Commission désigne les membres de la Cour, dans une liste d'experts et de personnalités d'au moins 10 noms ayant une autorité internationale de par les fonctions qu'ils ont exercées et/ou du fait de leurs travaux scientifiques et/ou juridiques concernant l'environnement199. Les personnes ou entités mises en cause par une réclamation peuvent désigner un membre supplémentaire de la Cour, lorsque la Cour ne compte aucun membre de leur nationalité200.

De plus, le Tribunal de la Nature a une compétence large, puisqu'il reçoit toutes les réclamations dénonçant une grave atteinte à l'environnement sur le territoire terrestre, maritime ou aérien d'un Etat et/ou dans un espace ne relevant d'aucune juridiction nationale, commise par une personne physique ou morale, publique ou privée, y compris dans le cas d'atteintes commises à l'étranger201.

Cependant, pour être susceptibles d'une réclamation devant le Tribunal, les dommages à l'environnement doivent revêtir une certaine gravité et constituer une atteinte, soit aux droits des générations futures, soit à des biens communs non appropriés202.

Ainsi, le Tribunal de la Nature a une compétence large en matière de personnes publiques et privées, physiques et morales, et en matière civile, administrative et pénale.

Par ailleurs, le projet de statut propose une définition des éléments de l'environnement, à savoir l'eau, l'air, les espèces, le patrimoine génétique, les habitats naturels, les écosystèmes et processus écologiques, la continuité des corridors écologiques, le sol et sous-sol et les ressources et milieux naturels203.

Cependant, le Tribunal de la Nature présente aussi des inconvénients. En outre, il reste un tribunal de conscience ou d'opinion204.

Ce tribunal n'a en effet pas pour objet de sanctionner ou stigmatiser les pollueurs mais d'alerter et d'informer la population. Pourtant, le projet de statut note dans son préambule les carences du système juridictionnel existant, tant à l'échelle nationale qu'internationale. Il constate que l'accès effectif aux recours judiciaires n'est pas réalisé de façon satisfaisante au plan international et que de nombreuses atteintes à l'environnement restent encore inconnues et/ou impunies. Le but du tribunal est d'oeuvrer à la prévention de nouveaux crimes contre l'environnement en condamnant publiquement et moralement ceux qui échappent, de droit ou de fait, à la justice nationale et internationale.

199 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Articles 5 et 7.

200 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 8.

201 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 12.

202 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 15 (3).

203 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 15 (1).

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204 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Objectifs généraux.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Les dommages à l'environnement sont passibles d'une condamnation morale même si leur(s) auteur(s) a agi par négligence ou sans intention de nuire et que son comportement soit licite ou illicite en vertu du droit national205. Le Tribunal apprécie les responsabilités du ou des auteurs en cause en tenant compte du fait que les Etats ont des responsabilités communes mais différenciées.

Dans la mesure du possible, la Cour se réunit sur le territoire de l'Etat dans lequel une réclamation a été formulée, afin de donner le maximum de visibilité et transparence à la situation jugée206.

La Cour prononce une condamnation morale selon la gravité des faits et le niveau de dommage, de menaces et/ou de détérioration de l'environnement. Dans tous les cas, elle préconise des solutions alternatives et/ou des actions réparatrices et tire les leçons que suggère l'affaire, examinée dans la perspective d'une éducation pour tous à l'environnement207.

Le projet de statut définit les condamnations morales que la Cour peut prononcer, le cas échéant cumulativement, à savoir, de la plus légère à la plus grave : une mise en garde; un blâme; la reconnaissance publique d'une violation des droits humains, la reconnaissance d'un crime contre les générations futures, la reconnaissance d'un crime contre le patrimoine culturel mondial ou encore la reconnaissance d'un crime d'écocide208.

Ainsi, si cette initiative est louable au regard d'un objectif de protection de l'environnement à l'échelle internationale, elle est clairement insuffisante dans la mesure où elle ne permet pas la réparation des préjudices subis par les victimes d'atteinte à l'environnement, ni la sanction financière des pollueurs.

Par ailleurs, le projet de statut fait référence aux grands principes du droit de l'environnement, sans les définir.

En effet, le projet de statut précise le droit matériel que doit appliquer la Cour, à savoir les principes généraux du droit, la coutume ou encore les conventions internationales. En particulier, il fait référence aux principes généraux du droit de l'environnement tels que le principe de prévention, le principe pollueur-payeur, le principe de précaution, le principe de participation du public aux décisions environnementales, le principe d'accès à la justice en matière d'environnement, le principe de non-régression du droit de l'environnement. Cependant il ne définit aucun de ces principes209.

Enfin, le Tribunal de la Nature étant un tribunal moral, il tient aussi compte de sources non juridiques que ne pourrait appliquer une juridiction internationale.

En effet, la Cour tient compte aussi du consensus émergeant de la société civile, traduisant une communauté de vues ou d'expériences sur l'indispensable réaction collective en vue de stopper la dégradation continue de la planète terre210.

205 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 16.

206 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 20.

207 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 26.

208 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 27.

209 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 14.

54

210 Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature, Article 14.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Chapitre II: Le Tribunal international des droits de la nature

La Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des

droits de la nature reconnaît l'existence du Tribunal international des droits de la nature à compter du 4 décembre 2015211. Si cette Convention vient renforcer la

légitimité du Tribunal, elle aurait dû cependant précéder la création du Tribunal pour fonder juridiquement son existence.

La Convention précise les objectifs du Tribunal212 et énonce que le fonctionnement du Tribunal doit respecter les statuts et règles de procédures adoptés par les parties ou le Tribunal213. Peuvent être parties à la Convention les représentants d'une nation, une tribu ou un peuple indigène, d'une organisation qui souhaite promouvoir l'implantation effective des droits et devoirs de la Déclaration universelle des droits de la Terre-Mère ou d'une population locale. D'après la Convention, la Global Alliance for the Rights of Nature assure le secrétariat intérimaire de la Convention, jusqu'à ce que les premiers membres du Tribunal, qui sont désignés par la Global Alliance for the Rights of Nature, désignent le premier secrétaire général214.

La Global Alliance for the Rights of Nature a désigné les premiers membres du Tribunal qui ont exercé leurs fonctions le 4 et 5 décembre 2015215, et assure

présentement de secrétariat de la Convention216. Le Tribunal s'est doté d'un statut le 4 décembre 2015217.

En vertu de son statut, le Tribunal international des droits de la nature est une « institution judiciaire autonome218 ». Ainsi le Tribunal ne se prétend pas être un tribunal moral comme le Tribunal de la Nature, bien qu'il le soit dans les faits. Tout comme le Tribunal de la Nature, ce Tribunal n'applique pas que le droit international. Il doit en effet appliquer les « lois de la Nature », à savoir les connaissances acquises par les sociétés humaines sur le fonctionnement de la Terre-Mère219. Le Tribunal est doté d'un Défenseur de la Terre-Mère qui assume les fonctions de procureur220. Enfin, il peut conclure des contrats de coopération avec d'autres institutions dans le but de renforcer et promouvoir la Déclaration de la Terre-Mère et la Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature221.

211 Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature, Article 1er.

212 Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature, Article 2.

213 Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature, Article 3.

214 Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature, Article 14.

215 Site internet de Valérie Cabanes, Le Tribunal international des droits de la nature.

216 Site internet de Global Alliance for the Rights of Nature, Tribunal international des droits de la nature - Paris.

217 Statut du Tribunal international des droits de la nature.

218 Statut du Tribunal international des droits de la nature, Article 1.

219 Statut du Tribunal international des droits de la nature, Articles 3 et 27.

220 Statut du Tribunal international des droits de la nature, Article 10.

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221 Statut du Tribunal international des droits de la nature, Article 24.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Chapitre III : Le modèle de la Land and Environment Court

Une juridiction spécialisée en droit de l'environnement uniquement aurait une expertise précieuse nécessaire à la réalisation de l'objectif de protection de l'environnement. C'est l'approche retenue lors de la création de la Land and Environment Court de l'Etat de Nouvelle-Galles-du-Sud en Australie.

La Land and Environment Court (LEC) de l'état de Nouvelle-Galles-du-Sud222 a

1er

été créée le septembre 1980 par une loi nommée « Land and Environment Court

Act 1979223 » (ci-après nommée loi de création de la LEC). Le but était de créer une juridiction spécialisée en droit de l'environnement, selon une approche anglo-saxonne appelée « one stop shop ». Cette approche consiste à permettre au justiciable d'avoir accès à plusieurs services en un même lieu. Dans le cas présent, ces services concernent le droit de l'environnement, le droit de l'urbanisme et le droit foncier.

En effet, avant la création de la LEC, différents tribunaux224 étant compétents dans le domaine de l'urbanisme et le droit de l'environnement n'existait pas en tant que tel. Le Parlement de la Nouvelle-Galles-du-Sud a donné à la LEC la compétence pour traiter de tous les sujets qui relevaient auparavant de la compétence de ces différents tribunaux. Une large juridiction a été conférée à la LEC en matière environnementale, d'urbanisme et foncière. Cette juridiction est exclusive, dans la mesure où aucun autre tribunal ne peut empiéter sur la juridiction conférée à la LEC.

La LEC est compétente dans tous les domaines définis par la loi de création de la LEC ou une autre loi225. Elle est aussi compétente pour toutes les affaires qui ne font pas expressément partie de son champ de compétence mais qui sont rattachées à un de ses domaines de compétence226. En vertu de la loi de création de la LEC, elle est compétente dans huit domaines227 à savoir:

- les appels en matière de planification et de protection environnementales

- les appels en matière de droit des collectivités et autres

- la propriété foncière, l'évaluation foncière, l'estimation foncière et les compensations financières

- les mesures d'exécution civile de planification et protection environnementales et des contrats de

développement

222 La Nouvelle-Galles-du-Sud est un des six Etats fédérés qui composent l'Australie, avec l'état de Victoria, de Queensland, de Tasmanie, de l'Australie méridionale et de l'Australie occidentale. A cela s'ajoutent deux territoires : le Territoire du Nord et le Territoire de la capitale australienne.

223 Site internet de la LEC, History.

224 à savoir la Land and Valuation Court, le Valuation Boards of Review, le Local Government Appeals Tribunal, la Local Court and la District Court of New South Wales et la Supreme Court of New South Wales.

225 Land and Environment Court Act 1979, article 16 (1)

226 Land and Environment Court Act 1979, article 16 (2)

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227 Land and Environment Court Act 1979, article 16 (3)

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

- les mesures sommaires d'exécution de la planification et la protection environnementales - les appels des condamnations à des infractions environnementales

- les autres appels relatifs à des infractions environnementales

- les affaires minières.

En vertu de la loi de création de la LEC, la LEC est compétente en droit administratif de l'environnement en première instance et en appel228. Elle est

compétente en droit civil de l'environnement en première instance, appel et cassation229. Enfin, elle est compétente en droit pénal de l'environnement en appel230.

Ainsi, la LEC a une compétence large, qui couvre aussi bien le droit administratif, le droit civil que le droit pénal de l'environnement. La liste des matières dans lesquelles la LEC est compétente est très détaillée et de ce fait longue.

En s'inspirant de la LEC, il est possible de concevoir une juridiction internationale avec une compétence large pour déterminer la responsabilité civile ou pénale de personnes physiques ou morales, publiques ou privées, ayant commis un dommage volontaire ou involontaire à l'environnement.

Cependant, il est peu probable que les Etats acceptent une telle soumission à une juridiction internationale, en raison de la restriction à leur souveraineté nationale que cela entraine. En revanche, il est plus probable qu'ils acceptent la création d'une juridiction internationale compétente uniquement pour connaître de la responsabilité pénale des personnes privées (physiques ou morales) ayant commis des dommages graves à l'environnement.

Titre III : Les avantages et inconvénients de la création de cette juridiction Chapitre Ier : Le risque de conflit de juridictions

La création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement comporte un inconvénient juridique : elle risque de causer un conflit de juridictions.

Il existe en outre une multiplication des juridictions internationales, non plus seulement au niveau régional mais aussi universel231, parmi lesquelles se trouvent la CPI, le Tribunal international du droit de la mer et l'ORD de l'OMC.

228 Land and Environment Court Act 1979, article 17 et 18.

229 Land and Environment Court Act 1979, article 19, 20 et 21.

230 Land and Environment Court Act 1979, article 21 A et 21 B.

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231 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 21.

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

En effet, l'aspiration à soumettre les manquements des Etats aux droits allégués au jugement d'une autorité tierce a connu un développement certain au cours des dernières décennies, notamment à l'échelon régional232. Dans le cadre des Organisations Internationales à vocation universelle de la famille des Nations Unies, des juridictions administratives destinées à régler des différends survenus entre les OI, concernant leur fonctionnement ou leurs agents, sont apparues. C'est aussi le cas du Tribunal international du droit de la mer et de la Cour Pénale Internationale vus précédemment, ainsi que des juridictions ad hoc, telles que le Tribunal Pénal International pour le Rwanda et celui pour l'ex-Yougoslavie.

Par conséquent, la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement risque de conflit de juridictions, notamment avec la CIJ, la CPI, le Tribunal international du droit de la mer, et les quasi-juridictions en matière de droits humains ou l'ORD de l'OMC.

Cette multiplication des juridictions internationales permanentes pourrait à terme, poser certains problèmes, de caractère institutionnel mais aussi substantiel233. Cela pose en théorie la question de la garantie d'une suffisante unité d'interprétation des normes internationales appliquées par ces diverses juridictions, à savoir le droit international général mais aussi les conventions internationales faisant l'objet d'un examen judiciaire.

Cependant, en pratique les juridictions internationales hésitent de moins en moins à se référer les unes aux autres. Elles veillent à une sorte d'harmonisation d'ensemble de leurs jurisprudences respectives sur des sujets identiques ou voisins.

A titre d'exemple, dans l'affaire du boeuf aux hormones précitée, l'Organe d'appel de l'ORD de l'OMC n'a pas hésité à se référer à l'arrêt de la CIJ dans l'affaire relative au projet Gabèikovo-- Nagymaros (aussi précitée), pour constater que la CIJ s'était abstenue de se prononcer sur le caractère d'ores et déjà coutumier du principe de précaution en droit international de l'environnement.

Ainsi, en pratique, l'expérience des dernières années manifeste que les alarmes

relatives à la fragmentation du droit international du fait de jurisprudences discordantes ne sont pas confirmées de façon déterminante234.

La doctrine propose par ailleurs d'instituer un mécanisme de question préjudicielle au profit de la CIJ sur la détermination, l'interprétation ou l'application d'une règle conventionnelle ou coutumière de droit international public dont l'élucidation est nécessaire à une juridiction pour rendre son jugement235. Cependant, cette solution se heurterait en pratique à de sérieux obstacles, d'ordre technique, psychologique et politique. En revanche, des solutions plus souples et moins formalisées sont concevables, telles que la rencontre entre juges de différentes juridictions, pour veiller à l'interprétation des normes intéressées.

232 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 633.

233 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 635.

234 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 636.

58

235 Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, p 637.

59

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement Chapitre II: Une chance de combler les lacunes du droit international de l'environnement

Cependant, la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement offre de nombreux avantages. En outre, la rédaction de son statut serait l'occasion de :

- définir la notion d'environnement en vertu du droit international

- définir les grands principes et les termes utilisés en droit international de l'environnement (devoir de diligence, principe de précaution, principe de prévention, principe pollueur-payeur, principe de participation du public aux décisions environnementales, principe d'accès à la justice en matière d'environnement, principe de non-régression du droit de l'environnement, notion de développement durable et de générations futures, évaluation environnementale...)

- rappeler l'obligation des Etats de protéger l'environnement en droit international en vertu de leur devoir de diligence, dont découle l'obligation coutumière des Etats de prendre des mesures nécessaires et proportionnées, destinées à s'assurer que les activités exercées dans les limites de leur juridiction ou sous leur contrôle ne causent pas de dommage à l'environnement dans d'autres Etats ou dans des régions ne relevant d'aucune juridiction nationale

- rappeler l'obligation coutumière des Etats de réaliser une évaluation environnementale pour tous les grands projets susceptibles d'avoir un impact transfrontalier majeur sur l'environnement et définir son contenu pour les projets communs à plusieurs Etats

- rappeler la nécessité pour les Etats de coopérer entre eux afin de protéger l'environnement, en particulier l'obligation des Etats développés de coopérer avec les Etats en voie de développement pour assurer la répression des atteintes à l'environnement

- renforcer les moyens et les pouvoirs des institutions environnementales existantes

- créer une juridiction internationale à compétence large, à savoir une juridiction composée d'experts en droit international de l'environnement, compétente pour engager la responsabilité civile ou pénale de personnes publiques ou privées, physiques ou morales, ayant commis un dommage volontaire ou involontaire à l'environnement.

Pour établir une nouvelle juridiction internationale, il faudrait définir:

- Sa composition/son organisation : Qui compose la juridiction ? Comment ces personnes sont-elles désignées ? Sont-elles nommées ou élues ? Par qui sont-elles désignées ? Sur quels critères ? Pour quelle rémunération ? Pour combien de temps ? Combien de juges composent la Cour? Où la Cour siège-t-elle? En quelles formations siège-t-elle? La Cour mette-elle en place une COP / une assemblée des parties? Dispose-t-elle d'un secrétariat / un greffe ? Qui préside la Cour et selon quelle procédure cette personne est-elle désignée? La Cour dispose-t-elle d'un Procureur chargé de mener l'enquête?

- Sa compétence : Dans quels domaines la Cour est-elle compétente? Est-elle compétente pour juger des Etats, des personnes physiques, des personnes morales autres que les Etats? Peut-elle juger de la responsabilité civile et/ou pénale de ces personnes? Une autre convention internationale autre que celle qui crée la Cour peut-elle attribuer une compétence à la Cour? La Cour est-elle compétente en première instance uniquement ou aussi en appel et cassation ? Qui gère la recevabilité des demandes? Sur quels critères les demandes sont-elles irrecevables? La Cour peut-elle rendre des avis consultatifs?

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Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

- Les procédures : Dans quelles langues la Cour rend-elle ses décisions ? De quelle manière la Cour exerce-t-elle sa compétence ? Quelles sont les règles relatives aux enquêtes et aux poursuites, au procès et aux peines applicables? La Cour peut-elle prendre des mesures conservatoires ? Quelle est la force juridique de ses décisions? Quels moyens de preuve sont admis?

- Les appels de ses décisions : Les décisions de la Cour sont-elles susceptibles d'appel ? Selon quelles règles? Dans quels délais?

- L'exécution de ses décisions : La Cour opère-t-elle une surveillance de l'application de ses décisions? Quelles sont les sanctions en cas de non-application des décisions de la Cour?

- Le financement : Par qui la Cour est-elle financée?

- Les modifications de son statut : Quelles sont les règles d'amendements de son statut ? Son statut peut-il être modifié par la Cour elle-même et/ou ses parties?

Le statut de cette nouvelle juridiction peut prendre plusieurs formes. En outre, les éléments de droit international de l'environnement matériel peuvent être inclus directement dans le statut de la juridiction, comme c'est le cas pour le statut de la CPI avec des éléments de droit international pénal matériel. Par ailleurs, le statut peut être une annexe à une convention internationale environnementale générale, comme c'est le cas du statut du Tribunal international du droit de la mer, annexé à la Convention de Montego Bay. Le PNUE pourrait être chargé du secrétariat de cette nouvelle juridiction.

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Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Conclusion

La création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement permettrait de pallier le défaut d'exercice des Etats de leur compétence civile ou pénale sur les personnes relevant de leur contrôle ou juridiction ayant commis un dommage à l'environnement. Si elle est dotée d'une compétence large, cette nouvelle juridiction serait plus efficace que l'extension de la compétence de juridictions internationales existantes, au regard d'un objectif de protection de l'environnement. Cependant, une telle juridiction, avec une compétence aussi générale, requiert une volonté au sein des Etats qui semble pour le moment inexistante.

A défaut, un objectif plus réaliste semble l'extension de de la compétence de la Cour Pénale Internationale en matière d'écocide, qui consisterait à élever le crime environnemental au rang de crime international. Cela permettrait a minima la répression des atteintes à l'environnement les plus graves. Il est cependant à déplorer que la CPI ne puisse connaître des crimes commis par des personnes morales de droit privé. Cela ne m'empêche pas de rêver à la création future d'une juridiction internationale environnementale à compétence plus large.

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Bibliographie

Conventions internationales

Conventions générales sectorielles en droit de l'environnement

Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (UNFCCC) : http://unfccc.int/files/essential background/convention/background/application/pdf/conve ntion text with annexes french for posting.pdf

Convention concernant la protection du patrimoine mondial culturel et naturel (Convention de l'UNESCO):

http://whc.unesco.org/archive/convention-fr.pdf

Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (Convention de Montego Bay) : http://www.un.org/depts/los/convention agreements/texts/unclos/unclos f.pdf

Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats de la sauvagine 1971 (Convention de Ramsar) : http://portal.unesco.org/fr/ev.php-

URL ID=15398&URL DO=DO TOPIC&URL SECTION=201.html

Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (Convention de Bonn):

http://www.cms.int/fr/page/texte-de-la-convention

Convention sur la diversité biologique (CDB) : https://www.cbd.int/doc/legal/cbd-fr.pdf

Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) :

https://cites.org/sites/default/files/fra/disc/CITES-Convention-FR.pdf

Statuts de juridictions internationales

Chapitre XIV de la Charte des Nations Unies:

http://www.un.org/en/sections/un-charter/chapter-xiv/index.html

Statut de la Cour Internationale de Justice:

http://www.icj-cij.org/documents/index.php?p1=4&p2=2&p3=0

Statut de la Cour Pénale Internationale:

https://www.icc-cpi.int/NR/rdonlyres/6A7E88C1-8A44-42F2-896F-D68BB3B2D54F/0/Rome Statute French.pdf

63

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Statut du Tribunal international du droit de la mer:

https://www.itlos.org/fileadmin/itlos/documents/basic texts/statute fr.pdf

Conventions en droit international économique

Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1947 : https://www.wto.org/french/docs f/legal f/gatt47.pdf

Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994 : https://www.wto.org/french/docs f/legal f/06--gatt.pdf

Mémorandum d'accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends: https://www.wto.org/french/docs f/legal f/28--dsu.pdf

Soft law

Agenda 21, Chapitre 39, Instruments et mécanismes juridiques internationaux: http://www.un.org/french/ga/special/sids/agenda21/action39.htm

Déclaration de Rio sur l'Environnement et le développement: http://www.un.org/french/events/rio92/rio--fp.htm

Déclaration finale de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement (Déclaration de Stockholm): http://www.unep.org/Documents.Multilingual/Default.asp?DocumentID=97&ArticleID=150 3&l=fr

Résolution 2997 de l'Assemblée Générales des Nations Unies, 15 décembre 1972, relative aux Dispositions institutionnelles et financières concernant la coopération internationale dans le domaine de l'environnement:

http://www.un.org/french/documents/view doc.asp?symbol=A/RES/2997(XXVII)&Lang=F

Résolution 3314 de l'Assemblée Générale des Nations Unies, 14 décembre 1974, relative à la Définition de l'agression :

http://www.un.org/french/documents/view doc.asp?symbol=A/RES/3314(XXIX)&Lang=F

Résolution 44/228 de l'Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 1989, relative à la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement: https://documents--dds-- ny.un.org/doc/RESOLUTION/GEN/NR0/552/28/IMG/NR055228.pdf?OpenElement

Principes généraux du droit Textes constitutionnels

64

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Charte de l'environnement de 2004 :

http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-constitution/la-constitution-du-4-octobre-1958/charte-de-l-environnement-de-2004.5078.html

Constitution du Canada :

http://laws-lois.justice.gc.ca/eng/const/FullText.html

Constitution de la Nouvelle-Zélande:

http://www.legislation.govt.nz/act/public/1986/0114/latest/whole.html#DLM94204

Constitution de la République de Bolivie:

http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/es/bo/bo024es.pdf

Constitution de la République fédérative du Brésil : http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/fr/br/br117fr.pdf

Constitution de la République populaire de Chine: http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/cn/cn147en.pdf

Constitution de la République socialiste du Vietnam : http://democratie.francophonie.org/IMG/pdf/Vietnam.pdf

Constitution de l'Australie :

http://www.aph.gov.au/About Parliament/Senate/Powers practice n procedures/Constitu tion

Constitution de l'Espagne:

http://mjp.univ-perp.fr/constit/es1978.htm

Constitution de l'Inde :

http://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/in/in023en.pdf

Constitution des Etats-Unis :

http://www.archives.gov/exhibits/charters/constitution transcript.html

Constitution du Kenya :

http://www.constitutionnet.org/files/final constitution of kenya 2010.pdf

Constitution du Maroc:

http://www.bladi.net/texte-integral-nouvelle-constitution-marocaine.html

Constitution fédérale de la Confédération suisse:

https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/19995395/index.html

Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 :

https://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Declaration-des-Droits-de-l-Homme-et-du-Citoyen-de-1789

65

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Loi fondamentale pour la République fédérale d'Allemagne:

https://www.bundestag.de/blob/189762/f0568757877611b2e434039d29a1a822/loi fonda mentale--data.pdf

Lois

Code pénal de la Fédération de Russie, Article 358 : http://www.wipo.int/wipolex/fr/text.jsp?file id=277023

Land and Environment Court Act 1979 :

http://www.legislation.nsw.gov.au/maintop/view/inforce/act+204+1979+cd+0+N

Décisions de justice

Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, Tribunal international du droit de la mer, avis consultatif du 1er févr. 2011 sur les responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et des entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone:

https://www.itlos.org/fileadmin/itlos/documents/cases/case no 17/adv op 010211 fr.pdf

CIJ, Affaire du détroit de Corfou, arrêt du 9 avril 1949, Grande--Bretagne/Albanie: http://www.icj-- cij.org/docket/files/1/1644.pdf

CIJ, Licéité de la menace et de l'emploi d'armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996 : http://www.icj-- cij.org/docket/files/95/7495.pdf

CIJ, Affaire relative au projet Gabèikovo-Nagymaros, arrêt du 25 septembre 1997, Slovaquie/Hongrie:

http://www.icj-- cij.org/docket/files/92/7374.pdf

CIJ, Affaire relative à des usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, arrêt du 20 avril 2010, Argentine/Uruguay:

http://www.icj-- cij.org/docket/files/135/15877.pdf

CIJ, Affaire de la chasse à la baleine dans l'Antarctique, arrêt du 31 mars 2014, Australie/Japon :

http://www.icj-- cij.org/docket/files/148/18136.pdf

Organe d'appel de règlement des différends, Affaire crevettes-tortues, rapport du 12 octobre 1998, Inde, Malaisie, Pakistan et Thaïlande/Etats--Unis : https://www.wto.org/french/tratop f/dispu f/58abr.pdf

Tribunal arbitral, Affaire de la fonderie de Trail, sentences des 6 avril 1938 et 11 mars 1941, Etats--Unis d'Amérique/Canada:

http://legal.un.org/riaa/cases/vol III/1905--1982.pdf

66

Marie Verney, Une charte pour la création d'une Cour Pénale Internationale de l'Environnement et de la Santé, Environnement magazine, 31 janvier 2014 : http://www.environnement-magazine.fr/article/40692-charte-pour-creation-d-une-cour-penale-internationale-de-l-environnement-et-de-sante/

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Tribunal arbitral, Affaire du lac Lanoux, sentence du 16 novembre 1957, Espagne/France: http://legal.un.org/riaa/cases/vol XII/281-317 Lanoux.pdf

Tribunal arbitral, Affaire relative la ligne ferroviaire du Rhin de fer, sentence du 24 mai 2005, Belgique/Pays-Bas:

http://archive.pca-cpa.org/BE-NL%20Award%20corrected%20200905a0f4.pdf?fil id=377

Doctrine Articles

Marie-Pierre Camproux Duffrène, Véronique Jaworski et Jochen Sohnle, La loi française versus le droit maritime international dans l'arrêt Erika : la victoire du droit de

l'environnement, 1er

Environnement magazine, décembre 2012.

Sophie Fabrégat, Un collectif plaide pour une cour pénale internationale de l'environnement et de la santé, Actu environnement, 30 janvier 2014 : http://www.actu-environnement.com/ae/news/cour-penale-internationale-environnement-sante-20591.php4

Audrey Garric, Le 7e continent de plastique : ces tourbillons de déchets dans les océans, Le Monde, 9 mai 2012 : http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/05/09/le-7e-continent-de-plastique-ces-tourbillons-de-dechets-dans-les-oceans 1696072 3244.html

Marine Jobert, Ecocide : criminaliser et juger les atteintes à la nature, Journal de l'environnement, 13 mars 2013 : http://www.journaldelenvironnement.net/article/ecocide-criminaliser-et-juger-les-atteintes-a-la-nature,33597

Jana Kasperkevic, BP oil spill: judge grants final approval for $20bn settlement, The Guardian, 4 avril 2016 : https://www.theguardian.com/environment/2016/apr/04/bp-oil-spill-judge-grants-final-approval-20-billion-dollar-settlement

Valéry Laramée de Tannenberg, Peut--on réprimer le crime environnemental?, Journal de l'environnement, 16 mars 2016 : http://www.journaldelenvironnement.net/article/peut-on-reprimer-le-crime-environnemental,68319?xtor=EPR-9

Coralie Schaub, Monsanto : pour que justice germe, Libération, 2 décembre 2015 : http://www.liberation.fr/planete/2015/12/02/monsanto-pour-que-justice-germe 1417833

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Ouvrages généraux

Jean Combacau et Serge Sur, Droit international public, LGDL édition, 11ème édition, 2014.

Pierre-Marie Dupuy et Yann Kerbrat, Droit international public, Dalloz édition, 12ème édition, 2014.

Ouvrages spéciaux

Pierre-Marie Dupuy et Jorge E. Viñuales, Introduction au droit international de l'environnement, Editions Bruylant, 2015.

Raphaël Romi, Droit international et européen de l'environnement, Montchrestien édition, 2ème édition, 2013.

Manuel

Conseil de l'Europe, Manuel sur les droits de l'Homme et l'environnement, 2012 : http://www.echr.coe.int/LibraryDocs/DH DEV Manual Environnement Fr.pdf

Autres

Sites internet

Comité International de la Croix Rouge, La responsabilité pénale individuelle pour violation du droit international humanitaire applicable en situation de conflit armé non international : https://www.icrc.org/fre/resources/documents/misc/5fzgbw.htm

Comité International de la Croix Rouge, Statut de Rome de la Cour pénale internationale, 17 juillet 1998 :

https://www.icrc.org/dih/INTRO/585

Cour Internationale de Justice, Chambres et comités:

http://www.icj-

cij.org/court/index.php?p1=1&p2=4&lang=fr&PHPSESSID=3d9d429f68ba29d158961548e7fd 855f

Cour Internationale de Justice, Déclarations d'acceptation de la juridiction obligatoire : http://www.icj-cij.org/jurisdiction/index.php?p1=5&p2=1&p3=3&PHPSESSID=&lang

Cour Internationale de Justice, Fondements de la Compétence de la Cour:

http://www.icj-

cij.org/jurisdiction/index.php?p1=5&p2=1&p3=2&lang=fr&PHPSESSID=edb0f56bdf05efced5 afbe63709453cc

Cour Internationale de Justice, Traités :

http://www.icj-cij.org/jurisdiction/index.php?p1=5&p2=1&p3=4

67

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Global Alliance for the Rights of Nature, A Tribunal for Earth: why it matters: http://therightsofnature.org/a--tribunal--for--earth--why--it--matters/

Global Alliance for the Rights of Nature, Communiqué de presse, 7 décembre 2015 : http://therightsofnature.org/wp--

content/uploads/PRESS RELEASE FINAL IRoN Tribunal Paris 7December2015.pdf

Global Alliance for the Rights of Nature, Convention des peuples pour l'établissement d'un Tribunal international des droits de la nature :

http://therightsofnature.org/convention--rights--of--nature--tribunal/

Global Alliance for the Rights of Nature, Statut du Tribunal international des droits de la nature:

http://therightsofnature.org/wp--content/uploads/Statute--of--the--International--Tribunal--of-- Mother--Earth--Rights4Dec2015.pdf

Global Alliance for the Rights of Nature, Tribunal international des droits de la nature -- Paris: http://therightsofnature.org/rights--of--nature--tribunal--paris/

Inter--Environnement Bruxelles, Charte de Bruxelles: http://www.ieb.be/IMG/pdf/sign20form209309.pdf

Land and Environment Court de Nouvelle--Galles du Sud, History: http://www.lec.justice.nsw.gov.au/Pages/about/history.aspx

Légifrance, Juridictions internationales:

https://www.legifrance.gouv.fr/Droit--international/Juridictions

Ministère de la Justice, Les juridictions internationales :

http://www.justice.gouv.fr/europe--et--international--10045/la--justice--internationale--10046/

Nations Unies, Conférence de presse du Président bolivien, M. Evo Morales Ayma, sur les changements climatiques, 22 septembre 2009 : http://www.un.org/press/fr/2009/Conf090922--MORALES.doc.htm

Nations Unies, Fonds, programmes, agences:

http://www.un.org/fr/sections/about--un/funds--programmes--specialized--agencies--and-- others/index.html

Nations Unies, Organes principaux:

http://www.un.org/fr/sections/about--un/main--organs/index.html

68

Nations Unies, Progression du nombre des Etats membres de 1945 à nos jours: http://www.un.org/fr/sections/member--states/growth--united--nations--membership--1945-- present/index.html

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

NatureRights, Tribunal international des droits de la nature: http://www.naturerights.com/blog/?p=1126

Organisation Mondiale du Commerce, Inde etc./Etats--Unis: l'affaire «crevettes--tortues» : https://www.wto.org/french/tratop f/envir f/edis08 f.htm

Organisation Mondiale du Commerce, Portail des textes juridiques: https://www.wto.org/french/docs f/legal f/legal f.htm#dispute

Organisation Mondiale du Commerce, Présentation technique du Mémorandum d'accord relatif aux règles et procédures régissant le règlement des différends: https://www.wto.org/french/docs f/legal f/ursum f.htm#Understanding

Organisation Mondiale du Commerce, WTO Analytical Index on GATT Article XX :

https://www.wto.org/english/res e/booksp e/analytic index e/gatt1994 07 e.htm#fnt13 37

Polly Higgins, Press:

http://pollyhiggins.com/press/

Programme des Nations Unies pour l'Environnement, Division de la Coordination du Fonds mondial pour l'environnement:

http://www.unep.org/dgef/AboutUNEPGEF/tabid/54444/Default.aspx

Tribunal de la Nature, Charte de Bruxelles:

http://www.tribunal-- nature.org/index.php/charte--de--bruxelles.html

Tribunal de la Nature, La démarche :

http://www.tribunal-- nature.org/index.php/presentation--de--la--demarche.html

Tribunal de la Nature, Pétition internationale:

http://www.tribunal-- nature.org/index.php/world--petition.html

Tribunal de la Nature, Soutiens dans le monde:

http://www.tribunal-- nature.org/index.php/soutiens--dans--le--monde.html

Tribunal international du droit de la mer, le Tribunal : https://www.itlos.org/fr/le--tribunal/

Tribunal Monsanto, Comment?

http://fr.monsantotribunal.org/Comment

Valérie Cabanes, Le Tribunal international des droits de la nature: http://valeriecabanes.eu/le--tribunal--international--des--droits--de--la--nature/

69

Union Internationale de la Conservation de la Nature, A propos, L'union : https://www.iucn.org/fr/secretariat/l--union

70

Le bien-fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Waternunc, Présentation du Tribunal pour les crimes contre la nature et le futur de l'humanité:

http://www.waternunc.com/assets/pdf/ pdf3/Tribunal Nature-Presentation fr-2.pdf

Waternunc, Projet de statut du Tribunal international de conscience de la nature: http://www.waternunc.com/assets/pdf/ pdf3/bases juridiques tribunal-2013-4.pdf

Waternunc, Tribunal international de la nature:

http://www.waternunc.com/fr2013/tribunal international nature interview Alfredo Pena Vega 2013.php

Vidéo

Juge Antonino Abrami entendu le 10 juillet 2010 par la Commission Environnement du Parlement Européen :

http://weblet.environnement.org/client/ DVLPT lettre forme.asp?ID=1860&Mode=dispatc h&USER ID=211

Rapport

Rapport de UNEP et Interpol, The environmental crime crisis, 2014 : http://www.unep.org/unea1/docs/RRAcrimecrisis.pdf

Dissertation

International criminal law & the protection of the environment, Loïc BARNIER

71

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Table des matières

Remerciements 2

Sommaire 3

Liste des abréviations et des signes conventionnels 4

Titre préliminaire: Introduction 5

L'absence de définition juridique consensuelle de l'environnement 5

Dans les conventions internationales 5

Dans la coutume internationale 6

Dans les principes généraux du droit international 8

Dans la jurisprudence internationale 9

Dans la doctrine internationale 10

L'obligation juridique des Etats de protéger l'environnement 10

Dans les conventions internationales 10

Dans la coutume internationale 11

Dans les principes généraux du droit international 12

Dans la jurisprudence internationale 12

Dans la doctrine internationale 16

Problématique et annonce de plan 16

Partie Ière : Le bien-fondé de l'existence d'une juridiction internationale compétente en

droit de l'environnement 21

Titre Ier : Les institutions internationales de protection de l'environnement 21

Chapitre Ier : Les Organisations Internationales (OI) 21

Chapitre II: Les Conférences des Parties (COP) 23

Chapitre III : Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) 24

Titre II : La réciprocité avec les règles du droit international économique 25

Chapitre I: Le détournement des règles du droit international économique 26

Chapitre II: L'absence de pouvoir de sanction propre de l'ORD 28

Titre III : Les juridictions nationales 31

Chapitre Ier : Les dommages à un territoire régi par le droit international 31

Chapitre II: Les dommages au territoire d'un autre Etat 32

Chapitre III : Les dommages aux autres espaces 33

Partie II : Le bien-fondé de l'extension de la compétence de juridictions internationales

existantes 35

Titre Ier : La Cour Internationale de Justice (CIJ) 35

Chapitre Ier : La compétence actuelle de la CIJ 36

Chapitre II: L'extension possible de la compétence de la CIJ 39

Titre II : La Cour Pénale Internationale (CPI) 41

Chapitre Ier : La compétence actuelle de la CPI 42

Chapitre II: L'extension possible de la compétence de la CPI 43

Titre III : Le Tribunal international du droit de la mer 45

Chapitre Ier : La compétence actuelle du Tribunal 46

Chapitre II: L'extension possible de la compétence du Tribunal 47

72

Le bien--fondé d'une juridiction internationale spécialisée en droit de l'environnement

Partie III: Le bien--fondé de la création d'une nouvelle juridiction internationale spécialisée

en droit de l'environnement 48

Titre Ier : Initiatives et propositions politiques ou doctrinales 48

Chapitre Ier : De juridictions internationales compétentes en droit de l'environnement 48

Chapitre II: De tribunaux moraux internationaux compétents en droit de l'environnement 50

Titre II : Sources d'inspiration de la nouvelle juridiction 52

Chapitre Ier : Le projet de statut du Tribunal de la Nature 52

Chapitre II: Le Tribunal international des droits de la nature 55

Chapitre III : Le modèle de la Land and Environment Court 56

Titre III : Les avantages et inconvénients de la création de cette juridiction 57

Chapitre Ier : Le risque de conflit de juridictions 57

Chapitre II: Une chance de combler les lacunes du droit international de l'environnement 59

Conclusion 61

Bibliographie 62

Conventions internationales 62

Conventions générales sectorielles en droit de l'environnement 62

Statuts de juridictions internationales 62

Conventions en droit international économique 63

Soft law 63

Principes généraux du droit 63

Textes constitutionnels 63

Lois 65

Décisions de justice 65

Doctrine 66

Articles 66

Ouvrages généraux 67

Ouvrages spéciaux 67

Manuel 67

Autres 67

Sites internet 67

Vidéo 70

Rapport 70

Dissertation 70

Table des matières 71






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