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Les interactions habitants et quartiers politique de la ville de l'agglomération mancelle: quels impacts ?


par Habib ADEBO
Université de Tours  - Master 2 Géographie, Aménagement, Développement et Environnement mention Management des territoires et Urbanisme  2019
  

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A. Le cadre général sur la Politique de la ville 1. La Politique de ville en France

Depuis plusieurs décennies, les grands ensembles souvent sont considérés dans l'opinion publique et les politiques comme des lieux de dysfonctionnement, de déficit et de problèmes avec la plus grande part de population défavorisée avec une multiplicité d'origines en situation de précarité. Kokoreff (2003) comme Avenel ( 2004) disent tous, que ces quartiers souvent parés de divers attributs, les « quartiers sensibles » ou les « quartiers en difficultés » évoquant des lieux qui concentreraient tous les problèmes sociaux, des territoires anomiques où règnerait l'anonymat, « des zones de non droit » où l'exaction serait devenue la norme (cités dans Authier (2008). Toutes ces représentations communes du quartier se sont imposées dans la société française à partir des années 1980.

A ces territoires sont associés de représentations négatives. Ils sont souvent vus comme des lieux de concentration de population d'origine étrangère, d'émeutes urbaines, d'habitat dégradé, où les situations de délinquance, d'insécurité ou de banditisme sont plus ou moins fréquentes. L'échec scolaire, la précarité de l'emploi, le chômage des jeunes sont aussi plus présents dans ces zones urbaines qu'ailleurs. En effet, le taux de chômage dans ces quartiers était de 24,7 % en 2017 contre 9 % à l'échelle nationale du territoire. Ce taux y demeure 2,7 fois plus élevé qu'ailleurs (cget, 2018).

La lutte contre l'exclusion urbaine et sociale passe par une action en faveur des quartiers en difficulté. Ainsi, des dispositifs spécifiques, qui privilégient le quartier comme niveau d'intervention d'une politique de discrimination positive, essayent d'apporter des réponses aux différents problèmes de ces quartiers sensibles des villes françaises. Depuis lors,

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différentes politiques se sont succédé. En effet, le besoin d'enrayer la dégradation physique et sociale des grands ensembles, s'est fait sentir à la fin des années 70. Les opérations "Habitat et vie sociale", directement pilotées par l'État sont mises en place. Il s'agit de réhabiliter les HLM avec l'aide financière de l'État. Aussi, au début des années 80, la Politique de la ville est mise en place en France. En effet, la Politique de la ville est une politique publique complémentaire d'exception, de cohésion urbaine et de solidarité envers les quartiers les plus défavorisés. Elle désigne une politique mise en place par les pouvoirs publics afin de revaloriser les zones urbaines en difficulté et de réduire les inégalités sociales et économiques entre les territoires. Elle agit sur tous les pans du droit commun en mettant en place des projets locaux pour l'amélioration du cadre de vie, de l'accès à la culture et à la santé, au niveau de l'emploi, de l'éducation. A travers cette politique, l'intervention publique est renforcée dans des quartiers urbains en difficultés pour la restauration de l'égalité républicaine et l'amélioration des conditions de vie des habitants. Elle est consacrée à la lutte contre les inégalités sociales et territoriales.

Le développement social des quartiers (années 1980), la mobilisation du droit commun par les contrats de ville (années 90) et la rénovation urbaine (années 2000) correspondent aux trois âges de la Politique de la ville en France. En effet, Epstein (2014), trouve que ces trois périodes correspondent à des orientations nationales successives. Il qualifie la première période « d'approche remontante des années 1980 » de démocratisation des institutions urbaines, la deuxième est vue comme étant « une approche transversale des années 1990 » où l'on a assisté à la territorialisation des politiques publiques et enfin dans les années 2000 où l'on voit s'installer la normalisation socio-urbaine de cette politique. Epstein (2014) qualifie cette approche de « descendante » avec la reprise en main de l'Etat avec la mise en place des agences comme l'Agence Nationale de Rénovation Urbaine (ANRU), chargée d'accompagner des projets globaux pour transformer en profondeur les quartiers. L'ANRU est créée par la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1er août 2003. L'Etat a mis en place aussi l'Agence de Cohésion Sociale et de l'Egalité des Chances (ACSE), qui quant à elle, créée par la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006, est chargée de renforcer la cohésion sociale de territoires de la Politique de la ville.

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Pendant ces trois périodes, des actions ont été menées en faveur des quartiers populaires et des grands ensembles. Mais plusieurs difficultés entravent l'atteinte des objectifs fixés et des critiques s'expriment. En effet, les élections présidentielles de 2012 se traduisent par l'élection de François Hollande grâce à un vote massif des habitants des quartiers populaires. Ce dernier avait critiqué dans son discours du 16 mars 2012 les limites et les incohérences de la politique issue des réformes radicales de la loi Borloo, loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine adoptée en 2003. Et il a souhaité de rompre symboliquement avec le gouvernement précédent dont il considère que les actions avaient abandonné et stigmatisé les quartiers populaires.

De même, en juillet 2012, un rapport conséquent intitulé La Politique de la ville : une décennie de réformes de la Cour des Comptes souligne que la plupart des objectifs de la Politique de la ville n'ont pas été atteints et y voit des problèmes de gouvernance. Dans ce rapport, la Cour estimait que « la géographie prioritaire retenue est trop complexe et la dilution des interventions trop importante, sur un trop grand nombre de zones ont pénalisé le dispositif ». Elle note également que cette politique « aborde très peu le volet social, souligne que très peu de moyens sont mis à disposition pour atteindre les objectifs et un manque de pilotage qui n'a pas contribué à la réduction des inégalités ».

D'autres critiques font état de ce que la Politique de la ville n'est pas parvenue à instaurer les démarches participatives des habitants et une dynamique sociale de cette politique peine à se mettre en oeuvre. Basée sur les enjeux de proximité, la participation des habitants dans les quartiers était souhaitée selon Boudeghdegh, Le Dû et Valbon (2012), « Dès les premières mesures Habitat et Vie Sociale en 1977 et il s'agit alors de les associer à la gestion de services nouveaux à titre expérimental, tels les régies de quartier, les haltes garderies, etc ». Elle n'est donc pas une question nouvelle dans la Politique de la ville et selon, Bacqué et Mechmache (2014), « Faire des habitants les acteurs du changement de la participation des habitants était l'approche préconisée dans le rapport Dubedout en 1983 ». Pour eux, « la Politique de la ville a constitué un lieu riche d'expérimentations participatives mais elle est restée une politique conduite et décidée par le haut ». Certes, la Politique de la ville a permis d'avoir des effets positifs en matière d'aménagements urbains ou de renforcement des services publics de proximité mais elle n'a pas permis de donner un nouveau souffle à la dynamique sociale attendue.

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Ainsi, en octobre 2012, les travaux de réforme pour une redéfinition de la Politique de ville ont été entamés par le ministère de la ville dans le cadre d'une concertation nationale. Ces travaux ont permis d'aboutir à des propositions relatives à la révision de la géographie prioritaire, qui selon Damon (2018) « s'étend et se rétracte comme un soufflet d'accordéon », à l'intégration des volets urbain et social de la Politique de la ville dans le nouveau cadre contractuel et à la mobilisation des politiques du droit commun en faveur des quartiers prioritaires.

En janvier 2013, le ministre délégué pour la ville, François Lamy missionne Marie-Hélène Bacqué, sociologue, enseignante - chercheure et Mohammed Mechmache, acteur associatif, fondateur et président d'honneur du collectif « Pas sans nous », pour formuler des propositions sur la participation citoyenne dans la nouvelle Politique de la ville. Cette commande est réalisée partant du constat que les acteurs de la Politique de la ville et les habitants ne seraient pas assez impliqués ou peu écoutés par les politiques publiques. Le 8 juillet 2018, le rapport Pour une réforme radicale de la Politique de la ville. Ça ne se fera pas sans nous. Citoyenneté et pouvoir d'agir dans les quartiers populaires, construit à partir des auditions, d'échanges avec plusieurs acteurs (les professionnels, des élus locaux, des responsables associatifs, des chercheurs), a été déposé au ministre Lamy. Les co-auteurs de ce rapport proposent une réforme radicale mettant en avant « un empowerment à la française » qui ferait des habitants le coeur d'une Politique de la ville co-élaborée. Ce « pouvoir d'agir » repose sur cinq enjeux majeurs. Il mettra les citoyens au coeur des services publics en prenant de mieux en compte leurs avis, en appuyant le développement du pouvoir d'agir, en changeant l'image des quartiers, en démocratisant la Politique de la ville et renversant la démarche de la formation tout en favorisant les démarches de co-formation et d'accompagnement des usagers.

Dans le rapport, les co-auteurs proposent six groupes de propositions concrètes. Ils proposent d'abord de financer la participation des habitants en donnant des moyens à l'interpellation citoyenne, ensuite de soutenir la création d'espaces citoyens en mettant en place des lieux de débat, d'échanges et de propositions aux échelles locale et nationale, tout en favorisant le développement associatif en rendant le financement des associations plus sécurisé, plus indépendant et transparent en évitant les logiques de clientélistes et partisanes. Bacqué et Mechmache proposent aussi que les instances de la Politique de la ville soient des lieux de co-élaboration et co-décision. Il s'agit donc d'associer les citoyens à la co-élaboration

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des projets de territoires et des contrats de ville dans toutes les phases. Enfin, dans les deux dernières propositions qui sont transversales, les auteurs suggèrent une série de mesures pour changer l'image des quartiers populaire et la mise en place d'une méthode de coproduction, de co-formation et d'évaluation qui consiste à transformer les pratiques des élus et des professionnels.

Les reformes de la Politique de la ville ont été traduites dans la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 (dite loi Lamy). Elles rénovent en profondeur les méthodes, la simplification des dispositifs tout en donnant une meilleure lisibilité à la Politique de la ville, concentrer les moyens vers les quartiers et optimiser les leviers d'actions publiques dans une démarche intégrée (économique, social et urbain). Cette loi inscrit le principe d'une co-construction de la Politique de la ville avec les habitants, ils participeront notamment à la réflexion autour des projets de renouvellement urbain. Elle favorise aussi l'association des habitants aux politiques qui les concernent, afin de combattre les discriminations dont ils sont victimes. En plus d'avoir défini une nouvelle géographie prioritaire (carroyage) qui s'appuie sur un indicateur unique du revenu médian, les reformes prônent le renforcement de la participation des habitants. Elles créent les conseils citoyens et les maisons du projet pour porter l'initiative citoyenne, garantir la place de l'habitant dans toutes les instances de pilotage en mettant en place un espace de propositions et d'initiatives à partir des besoins des habitants.

Ces nouvelles orientations visent donc à donner plus de place aux citoyens dans la Politique de la ville, mieux les intégrés. Il en découle l'intérêt de réfléchir à la place des citoyens dans la vie des quartiers, leur sentiment d'appartenance, leur attachement au quartier qui peuvent alors servir de leviers pour mieux les intégrer aux processus décisionnels ou , moins , mieux prendre en compte leur avis. Ainsi, cela répond d'une certaine manière aux recommandations du rapport Bacqué-Mechmache.

Par ailleurs, la loi Lamy attribue la Politique de la ville comme une nouvelle compétence pour l'intercommunalité et réaffirme le droit commun. Cela marque ainsi un nouveau départ pour la Politique de la ville. En France métropolitaine, 4,8 millions de personnes vivent dans les 1 300 quartiers de la Politique de la ville (insee, 2015). Dans l'agglomération mancelle, cinq quartiers prioritaires et plus 26 300 habitants bénéficient des moyens et d'actions spécifiques au titre de la Politique de la ville.

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2. La Politique de la ville active sur l'agglomération mancelle

Dans les années 1950 à 1970, de grands ensembles d'habitats collectifs se sont imposés dans l'agglomération mancelle dans les communes d'Allonnes, de Coulaines et de Le Mans. Cette situation est due à la croissance industrielle et à l'arrivée massive de nouvelles populations. Ces communes ont bénéficié des dispositifs liés à la Politique de la ville et au développement social relayés par le contrat de ville dès le début des années 1980 suite à des problèmes sociaux et urbains auxquels sont confrontés certains grands ensembles. Les dispositifs, liés au Développement Social et urbain et à la politique de ville, sont actifs sur l'agglomération depuis plusieurs années et ont permis de mieux intégrer les grands ensembles dans la ville avec pour intention d'améliorer les conditions de vie des habitants et de changer l'image des quartiers. En effet, l'agglomération mancelle a bénéficié des dispositifs liés à « l'habitat et Vie Sociale » à travers deux opérations réalisées dans les quartiers Glonnières (Le Mans) et Chaoué (Allonnes). Les quartiers Les Sablons (Le Mans) et Perrières (Allonnes) bénéficieront par la suite des opérations « Développement Social Urbain (DSU) et « Développement Social des Quartiers (DSQ) ».

Par ailleurs, dès 1994, les quartiers en zone franche urbaine ou en zone de redynamisation urbaine en grandes difficultés économiques, et sociales classés en Zones Urbaines Sensibles (ZUS), ont bénéficié d'un premier contrat de ville et d'autres dispositifs comme le Programme de Réussite Educative (PRE), le Contrat Urbain de Cohésion Sociale (CUCS) les Programmes de Rénovation Urbaine (PRU) liés à Politique de la ville jusqu'à 2015. Suivant les orientations de la loi Lamy, l'agglomération mancelle a adopté la compétence Politique de la ville et s'est attelée à la rendre effective dans les trois communes concernées (Le Mans, Coulaines et Allonnes).

Aujourd'hui, les quartiers Bellevue-Carnac, Chaoué-Perrières, L'Epine, Les Sablons - Bords - de l'Huisne et Ronceray - Vauguyon - Glonnières constituent les entités bénéficiaires des dispositifs du contrat de ville (2015-2020) au sein de la communauté urbaine Le Mans Métropole avec près 26 300 habitants. Ils représentent 12.8 % de la population de l'agglomération. C'est au Service Politique de la ville (SPV) mis en place en janvier 2016 que revient la mise en oeuvre de ce contrat, la coordination entre les acteurs concernés en lien avec l'Etat. La carte suivante, présente les cinq quartiers prioritaires de l'agglomération mancelle.

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Les 5 quartiers prioritaires de l'agglomération mancelle en 2019

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A l'approche de 2020, terme du contrat de ville en cours, le SPV se mobilise afin de proposer une réflexion et un état des lieux de la vie des quartiers. Cette réflexion s'inscrit dans une démarche de renouvellement de la Politique de la ville en 2020 et donc d'actualisation du diagnostic posé dans le contrat de ville.

Cette étude est née de la volonté du service dans le cadre de la révision du contrat de ville d'organiser d'abord, une journée sur le thème de la Politique de la ville en direction de ses acteurs, un « temps fort » pour mars 2019. Celle-ci qui visait notamment à mettre en lumière le travail mené par tous au sein des quartiers prioritaires, puis à réfléchir aux perspectives à donner localement.

Cette journée a trouvé des formes et des contenus variés construits avec les partenaires. L'un des volets a concerné l'actualisation du diagnostic qui avait été réalisé lors de la construction de l'actuel contrat de ville. L'enjeu était bien de chercher à identifier, collectivement, comment ont évolué les différents quartiers prioritaires dans toutes leurs dimensions, et à interroger les différents acteurs de la Politique de la ville. Tout ceci est en lien avec l'actualité politique consacrée à l'action publique en faveur des quartiers prioritaires de la Politique de la ville. En effet, le discours du Président de la République le 24 novembre 2017 à Tourcoing, a lancé la grande démarche de mobilisation de l'ensemble des parties prenantes de la Politique de la ville pour les habitants des quartiers afin de renforcer des dispositifs existants, mais aussi de déployer de nouvelles mesures.

Dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, les députés ont voté un amendement gouvernemental prévoyant de proroger de deux ans les contrats de ville en cours depuis 2014. Cette prorogation des contrats de ville à 2022, prend la forme d'un simple avenant en se référant la circulaire signée par le Premier ministre Edouard Philippe, le 22 janvier 2019. Ainsi les contrats de ville 2014-2020 doivent être révisés à mi-parcours soit à l'été 2019 et ne seront pas renouvelés. Cette révision des contrats de ville doit donner lieu à la définition d'un protocole d'engagements renforcés et réciproques entre l'Etat et les collectivités. Dans le processus de l'élaboration du protocole d'engagements renforcés et réciproques, le SPV décidé de réaliser un diagnostic.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle