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Effets de la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine sur le commerce du Burkina Faso


par Christian KABORE
Lund University - Master 2019
  

Disponible en mode multipage

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MEMOIRE DE MASTER EN POLITIQUE COMMERCIALE ET DROIT
COMMERCIAL INTERNATIONAL

Effets de la mise en oeuvre de la Zone de

Libre-Échange Continentale Africaine sur

le commerce du Burkina Faso

Christian KABORE

2019

Dédicace

À mes géniteurs, qu'ils reçoivent

le plus grand hommage à travers ce mémoire

II

III

Remerciements

Ce mémoire a été rendu possible grâce au soutien et au suivi de Docteur Ayissi Jacques DEGBELO, notre Directeur de mémoire; nous lui adresse nos sincères remerciements.

Nous remercions en second lieu notre famille qui nous a soutenus tout au long de cette formation. Nous adressons également nos remerciements :

· à l'Université de Lund ainsi qu'à toute l'administration du centre de formation sur les politiques commerciales en Afrique (Trade Policy Training Centre in Africa (TRAPCA)) pour les ressources mises à ma disposition durant cette formation ;

· aux différents responsables du Ministère du Commerce, de l'Industrie et de l'Artisanat du Burkina Faso pour avoir facilité ma participation à ce master ;

· au Professeur Yves Bourdet pour ses conseils et son assistance dans la rédaction de ce mémoire ;

· aux différents enseignants pour la qualité des cours qu'ils nous ont dispensés ;

· aux camarades de la classe francophone pour la fraternité et le partage de connaissance qui ont régné durant les étapes de cette formation ;

· à Madame Aude Lanois, de l'OMC, pour ses observations et ses conseils ;

· à Madame Rakiéta NABI, une ainée de TRAPCA, pour ses conseils ;

· aux Docteurs Françoise Okah Efogo et Tiertou Edwige SOME pour leurs précieuses assistances ;

· à Madame Awatif AIT EL HAJ pour ses contribuions ;

· à tous ceux qui m'ont permis d'obtenir les informations et les données dans le cadre de ce travail ;

· à mes collègues de la Direction générale du commerce.

Pour finir, nous remercions toute personne ayant contribué d'une manière quelconque à l'accomplissement de ce travail et merci à tous ceux qui s'intéressent à lire ce mémoire.

iv

Liste des acronymes et abréviations

ACR : Accord Commercial Régional

AGOA : African Growth and Opportunity Act

APE : Accord de Partenariat Economique

BAD : Banque Africaine de Développement

CEA : Commission Economique pour l'Afrique

CEEAC : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale

CEDEAO : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest

CEPII : Centre d'Etudes Prospectives et d'Informations Internationales

CER : Communauté Economique Régionale

EPC : Examen des Politiques Commerciales

EU : Etats-Unis

FCFA : Franc de la Coopération Financière en Afrique

OMC : Organisation Mondiale du Commerce

PIB : Produit Intérieur Brut

PMA : Pays Moins Avancés

SGP : Système Généralisé de Préférences

SLEC : Schéma de Libéralisation des Echanges Commerciaux

SNE : Stratégie Nationale d'Exportation

TRAPCA : Trade Policy Training Centre in Africa

UA : Union Africaine

UE : Union Européenne

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine

US : United States

WDI : World Development Indicators

WITS : World Integrated Trade Solution

ZLECAf : Zone de Libre-Echange Continentale Africaine

V

Table des matières

Dédicace ii

Remerciements iii

Liste des acronymes et abréviations iv

Table des matières v

Liste des tableaux vi

Résumé vii

Abstract viii

I- Introduction 1

1.1 Contexte 1

1.2 Problématique 4

1.3 Objectifs 5

1.4 Hypothèses et justification du choix du thème 5

II- Analyse théorique des effets d'un accord commercial 7

III- Revue de la littérature 10

IV. Bref aperçu de la ZLECAf 12

4.1 Processus de mise en place de la ZLECAf 12

4.2 Objectifs 12

4-3 Architecture de la ZLECAf 12

4-4 Intérêt de la ZLECAf 13

4-5 Offre d'accès du Burkina Faso à son marché 13

V. Méthodologie et Données 14

5.1. Modèle 14

5.2. Données 17

VI. Résultats et discussions 18

VII. Recommandations 24

VIII. Conclusion 26

Références bibliographiques 27

Annexe I

vi

Liste des tableaux

 

Tableau 1 : Exportation des cinq premiers produits du Burkina Faso en 2016

.4

Tableau 2 : Revue de littérature

.10

Tableau 3 : Définitions des variables et sources des données

17

Tableau 4 : Effets de la zone de libre-échange continentale africaine sur le commerce

burkinabè 22

Liste des graphiques

Graphique 1 : Evolution du taux de couverture des importations de biens par les exportations

burkinabè 4

VII

Résumé

La Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAf) a été négociée et signée le 21 mars 2018 et est entrée en vigueur le 30 mai 2019. Ce mémoire vise principalement à analyser les gains et les pertes potentielles du Burkina Faso du fait de sa participation à la ZLECAf. À cette fin, une méthodologie empirique basée sur le modèle de gravité est utilisée. Le modèle de gravité est estimé par le pseudo maximum de vraisemblance de Poisson. Les données couvrent la période 1962-2016 et proviennent des bases de données WITS, WDI et de la CNUCED. Trois principaux scénarios ont été examinés, à savoir les effets de la ZLECAf si elle avait été mise en oeuvre entre 2000 et 2016, les effets retardés de la ZLECAf et les effets futurs de la ZLECAf. Les résultats montrent que les variables du modèle expliquent près de 75% de la variance des exportations du Burkina Faso (0,72<R2<0,80). Globalement, les effets de la ZLECAf sur les exportations du Burkina Faso sont positifs après 12 années de mise en oeuvre de l'Accord. Les résultats montrent néanmoins que la prise en compte de l'ensemble des coûts commerciaux est cruciale pour que le Burkina Faso bénéficie des effets positifs de la ZLECAf.

Mots clés : ZLECAf ; effets ; modèle de gravité ; exportations ; Burkina Faso

VIII

Abstract

The African Continental Free Trade Agreement (AfCFTA) was negotiated and signed on 21 March 2018 and entered into force on 30 May 2019. The main purpose of this paper is to analyse Burkina Faso's potential gains and losses as a result of its participation in the AfCFTA. To this end, an empirical methodology based on the gravity model is used. The gravity model is estimated by the Poisson pseudo maximum likelihood. The data cover the period 1962-2016 and come from the WITS, WDI and UNCTAD databases. Three main scenarios were examined, namely the effects of the AfCFTA if it had been implemented between 2000 and 2016, the delayed effects of the AfCFTA and the future effects of the AfCFTA. The results show that the model variables explain nearly 75% of Burkina Faso's export variance (0.72<R2<0.80). Overall, the effects of the AfCFTA on Burkina Faso's exports are positive after 12 years of implementation of the Agreement. The results show, however, that taking into account all trade costs is crucial for Burkina Faso to benefit from the positive effects of the AfCFTA.

Key words : AfCFTA ; effects ; gravity model ; exports ; Burkina Faso

I- Introduction

1

1.1 Contexte

Le système commercial multilatéral connait, au fil des années, une multiplication des accords d'intégration régionale. En effet, avec 126 Accords Commerciaux Régionaux (ACR) en 1995, on en dénombre 481 notifications au 13 septembre 2019 soit un taux de croissance de 281,74%1. L'Afrique à elle seule, compte environ 14 blocs régionaux et la plupart des pays africains sont à la fois membres de plusieurs organisations régionales.

C'est dans ce contexte que l'accord instituant la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAf) a été signé2 par 44 pays et est entré en vigueur le 30 mai 2019. La ZLECAf est le premier accord du genre qui regroupe la plupart des pays africains. Sa mise en place vise l'intensification du commerce intra-africain par la création d'un marché unique pour les marchandises et les services afin d'approfondir l'intégration économique du continent africain et cela conformément à la vision panafricaine d'une « Afrique intégrée, prospère et pacifique tel qu'énoncé dans l'Agenda 2063 ».

La ZLECAf fera face à plusieurs défis à savoir le manque de capacité productive de plusieurs pays, le problème d'infrastructure, la réticence de certains pays à ouvrir leurs marchés, la crainte des petits pays d'être dominés par les grands, la faible diversification des économies africaines et les difficultés de gouvernance liées à l'incapacité des Etats à légiférer des textes et à les faire respecter.

Dans cette optique, les négociations visent un accord global et mutuellement bénéfique du commerce entre les États membres de l'Union africaine pour ainsi accroître significativement le commerce intra-africain en supprimant les barrières non tarifaires et tarifaires. Cet Accord permettrait d'aboutir à la mise en commun des ressources africaines pour améliorer la transformation structurelle et le développement des chaînes de valeur régionales et améliorer la compétitivité des biens mis sur le marché (CEA, 2017). Il ressort des simulations de la CEA que la ZLECAf accroîtrait le commerce intra-africain de 52,3 % et le commerce des produits industriels de 53,3 % en 2022.

En matière d'offre de marché des marchandises, la CEA a mené une analyse comparative, en 2018, suivant deux approches possibles. Le premier scénario, l'approche des lignes tarifaires, repose sur l'hypothèse que 90 % de toutes les lignes tarifaires doivent être pleinement libéralisées après l'entrée en vigueur de l'Accord, soit jusqu'en 2029 pour le Burkina Faso3. Les 10 % restants sont

1 http://rtais.wto.org, consulté le 13 septembre 2019

2 18ème session extraordinaire du sommet de l'Union Africaine qui s'est tenue à Kigali le 21 mars 2018

3 Période de libéralisation totale: 5 ans pour les non PMA, 10 ans pour les PMA et 13 ans pour le groupe des 7.

2

divisés, d'une part en produits sensibles4 (9 % de toutes les lignes tarifaires) devant être libéralisés au plus tard en 2042 pour le Burkina Faso et d'autre part en produits exclus de la libéralisation (soit 1 %).

Le deuxième scénario, l'approche double qualification, repose sur l'hypothèse que les produits non sensibles représentent au moins 90 % de toutes les lignes tarifaires et au moins 90 % de la valeur totale des importations, le reste se subdivisant en produits sensibles (7 %) et produits exclus (3 %).

Selon la CEA, l'approche de la double qualification devrait permettre une libéralisation conséquente des marchés et permettra à une grande partie des marchandises africaines de circuler sur le continent et pourrait rapporter des résultats plus importants et plus équilibrés pour les pays d'Afrique.

Quant à la libéralisation du commerce des services les secteurs suivants doivent être inscrits sur la liste d'engagement des pays: les services de communication, les services financiers, le tourisme, le transport et les services fournis aux entreprises.

Il est à noter, toutefois, que les effets d'un tel accord peuvent être diversement ressentis par les pays parties et pourraient être moins bénéfiques pour certains petits pays et surtout ceux sans littoral comme le Burkina Faso.

En effet, le Burkina Faso, Pays Moins Avancé (PMA) et sans littoral a signé l'accord sur la ZLECAf et compte sur son potentiel agricole et minier pour tirer profit de ce vaste marché africain. Toutefois, sa performance économique reste dépendante des aléas climatiques, des cours mondiaux de l'or, du coton et des hydrocarbures (principale source d'énergie). En outre, le pays connaît une aggravation de son déficit commercial (à 484 586 millions de FCFA5 en 2017), malgré la progression des exportations. La demande intérieure soutenue par les biens d'équipements, les produits pétroliers et les produits alimentaires a entraîné une augmentation des importations totales entre 2009 et 20136.

La politique commerciale du Burkina Faso consiste essentiellement en la mise en application des réglementations communautaires de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) dont tous les pays sont également membres de la Communauté économique des états de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO). Le Burkina Faso applique, en effet, depuis le 1er janvier 2015, le Tarif

4 Période de libéralisation des produits sensibles: 10 ans pour les non PMA, 13 ans pour les PMA et le groupe des 7

5 Rapport sur la balance commerciale et commerce extérieur Burkina Faso, Direction Générale du Commerce Burkina Faso, 2017

6 Rapport sur la situation économique et financière du Burkina Faso, Centre National de Politique Economique, Burkina Faso, 2017

3

extérieur commun (TEC) de la CEDEAO. Par ailleurs, en tant que PMA, le Burkina Faso bénéficie d'un accès aux marchés des pays développés grâce à des préférences non réciproques accordées notamment dans le cadre de l'initiative "Tout sauf les armes" de l'UE, de la loi des Etats-Unis sur la Croissance et les Opportunités en Afrique (African Growth and Opportunity Act (AGOA)) et du Système généralisé de préférences en général. En outre, ses produits devraient avoir un libre accès aux marchés des pays de la CEDEAO (article 3 du traité révisé de la CEDEAO).

En termes de performance commerciale, les exportations globales du Burkina Faso s'accroissent plus vite que les importations traduisant ainsi une amélioration de ses parts de marché au niveau international. Il en résulte une croissance du taux de couverture des importations par les exportations (graphique 1). En effet, le pays est de plus en plus présent sur le marché international par l'augmentation de ses exportations même si celles-ci sont peu diversifiées. On relève qu'en 2015, seulement 5 % des exportations burkinabè sont transformées contre 33,3 % de produits n'ayant subi aucune transformation et 61,7 % d'or non monétaire (OMC, EPC, 2017). Les 5 produits les mieux exportés, par ordre d'importance, par le Burkina Faso vers le monde sont l'or non monétaire, le coton non peigné, les graines de sésame, la noix de cajou et le zinc (tableau 1). En 2016, les pays qui ont le plus échangé avec le Burkina Faso ont été la Suisse, la Chine et la Côte d'Ivoire.

Dans la zone CEDEAO, les échanges du Burkina Faso vers les pays membres s'accroissent après les années 1990, début de la mise en place du Schéma de Libéralisation des Echanges Commerciaux (SLEC) et pourraient être mis à l'actif de la libéralisation du commerce entre les Etats membres de la région ouest africaine.

En vue de mieux participer aux échanges commerciaux avec le reste du monde en général et avec l'Afrique en particulier, le Burkina Faso entreprend des réformes considérables dans les secteurs de l'industrie, du commerce et de l'artisanat. C'est à ce titre que la Stratégie nationale d'exportation (SNE) a été relue pour prendre en compte les nouvelles exigences du marché international et améliorer la production, la transformation et la commercialisation des produits des filières dites porteuses.

4

Graphique 1 : Évolution du taux de couverture des importations de biens par les exportations burkinabè en pourcentage

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016

40% 39%

25% 24% 29%

29% 29% 25%

43%

96%

63%

63% 57%

74% 73% 75%

Source : Données tirées de WITS (SH 2002), consulté le 05 novembre 2018

Tableau 1: Exportations des cinq premiers produits du Burkina Faso en 2016, en millions de FCFA

Produits

valeurs

Part dans les exportations

Or non monétaire

920 380,7

61,8%

Coton, non cardé ni peigné

236 456,7

15,9%

Graines de sésame

67 415,3

4,5%

Noix de cajou

66 944,1

4,5%

Zinc sous forme brute

53 047,2

3,6%

Total

1 403 457,5

90,3%

Source : Données extraites de la balance commerciale du Burkina Faso, édition 2017 1.2 Problématique

Avec la mise en place de la ZLECAf, le Burkina Faso devient membre de 3 ACR en Afrique (CEDEAO, UEMOA, ZLECAf). La ZLECAf fait son apparition alors que la fusion réelle des institutions de politiques économiques de la CEDEAO et de l'UEMOA pour la mise en place d'un véritable marché commun tarde à venir.

Toutefois, depuis la récente création de la ZLECAf, très peu d'études se sont penchées sur ses effets sur le commerce des pays membres. Ce mémoire vise donc à apporter des éléments de réponses à la question principale suivante : quelles conséquences la ZLECAf peut-elle avoir sur les exportations du Burkina Faso? Ultimement, il importe de savoir si la ZLECAf va améliorer le commerce intra-africain du Burkina Faso par la création de commerce plutôt que par le détournement de commerce.

5

1.3 Objectifs

L'objectif principal de notre étude est d'analyser les gains et les pertes commerciales du Burkina Faso du fait de sa participation à la ZLECAf et de faire des suggestions. Dans cette perspective, deux (02) objectifs spécifiques sont définis, à savoir :

? analyser les gains commerciaux que pourraient engendrer la mise en oeuvre de la ZLECAf pour le Burkina Faso;

? analyser les coûts commerciaux qui seront supportés par le Burkina Faso dans la mise en oeuvre de ZLECAf.

1.4 Hypothèses et justification du choix du thème

Il est reconnu dans la théorie économique que l'existence d'une zone de libre-échange entre pays peut entraîner une création de commerce dans la zone mais aussi un détournement de commerce (Viner, 1950). Les travaux empiriques portant sur l'ouverture commerciale et ses effets ont généralement évalué l'importance de ces effets dont le résultat net (effet de bien-être) peut être positif ou négatif (Adam Smith). Dès lors, deux hypothèses sont émises :

- H1 : la ZLECAf a des gains potentiels pour le commerce du Burkina Faso;

- H2 : la ZLECAf engendre des coûts pour le commerce du Burkina Faso.

Le thème de notre recherche tire son importance du contexte actuel de l'évolution des échanges commerciaux entre nations. En effet, les pays membres de l'OMC contournent de plus en plus le cadre multilatéral de négociation pour engager des négociations par groupe. L'intégration régionale est perçue pour les parties prenantes comme un moyen de promouvoir leur commerce et atteindre les économies d'échelle. Les pays espèrent que les ACR peuvent servir d'étape dans le processus d'apprentissage et de test préalable à la prise d'engagements multilatéraux et peuvent leur offrir un pouvoir important de négociation vis-à-vis des autres groupements régionaux. En effet, les ACR constituent un cadre pour les pays membres d'uniformiser leurs positions afin d'avoir un poids significatif dans les négociations avec les tiers et dans le cadre multilatéral.

Notre étude a pour objectif majeur d'orienter les techniciens ainsi que les décideurs burkinabè et africains sur les décisions politiques et commerciales relatives à la mise en place de la ZLECAf. Une telle étude est particulièrement importante pour le Burkina Faso car elle pourrait lui permettre de prendre des mesures de politique commerciale susceptibles d'améliorer les gains et de réduire les pertes ou les effets négatifs. Ses résultats pourront donc être utiles pour les différents acteurs impliqués dans la mise en oeuvre de la ZLECAf, notamment l'Administration publique, le secteur privé et la société civile.

6

À cette fin, notre travail se présente en sept (08) chapitres. A la suite du chapitre introductif (chapitre 1), les chapitres suivants abordent successivement la revue de la littérature (chapitre 2), l'analyse théorique des effets d'un accord commercial (chapitre 3), aperçu de la Zone de Libre Echange Continentale Africaine ( chapitre 4), la méthodologie et les données (chapitre 5), la présentation et la discussion des résultats (chapitre 6), les recommandations (chapitre 7) et la conclusion ( chapitre 8).

7

II- Analyse théorique des effets d'un accord commercial

Dans ce chapitre, une analyse théorique des aspects de la libéralisation des échanges par la création d'un accord commercial est faite. Cette analyse fait ressortir les effets possibles d'un accord commercial élaborés par certains auteurs.

La libéralisation du commerce engendre deux effets : les effets statiques et les effets dynamiques. C'est Viner dans son livre «The customs Union issue (1950)» qui a développés les effets statiques traditionnels des zones de libre-échange. Il fait ressortir deux concepts que sont la création de commerce et le détournement de commerce.

La création du commerce est le volume supplémentaire issu de la suppression des barrières commerciales dans une zone de libre-échange (CEA et al. ,2017). Les pays membres peuvent ainsi faire valoir leurs avantages comparatifs à travers une meilleure allocation de leurs ressources et créé ainsi les échanges dans la zone. Selon Viner, il y a création de commerce lorsque la réduction ou la suppression des tarifs résultant de l'accord permet aux pays membres d'importer des produits moins chers. La création de commerce consiste pour tout membre de l'union de substituer la consommation des produits nationaux qui ont un coût de production trop élevé par des produits qui coûtent moins, en termes de production, provenant des autres membres. De ce fait, un accroissement de l'efficacité économique et une amélioration du bien-être du consommateur sont ressentis suite à la suppression ou la réduction des restrictions quantitatives et commerciales émanant de la concurrence née entre les producteurs de l'union.

Le détournement de commerce se manifeste lorsque les échanges entre les pays membres d'une zone de libre-échange se substituent aux échanges avec les pays tiers n'appartenant pas à la zone (CEA et al., 2017). Selon Viner, le détournement de commerce se pose lorsque l'augmentation des échanges entre les pays appartenant à une union se fait au détriment d'un pays tiers par des importations qui coûteraient plus cher en provenance des pays membres de cette union. Il s'agit ici pour les États membres de se détourner des sources d'approvisionnement externes au profit de celles internes à l'union à cause de la hausse des prix relatifs à l'érection des barrières tarifaires avec l'extérieur. Ce détournement de commerce confère aux parties prenantes à l'accord une efficacité qu'elles n'auraient pas eu en dehors du dudit accord. La hausse des droits de douane se fait donc au dépend d'un fournisseur étranger plus compétitif.

Il convient toutefois de noter que l'effet de détournement ne peut se réaliser que si le tarif douanier est suffisamment élevé pour accroitre les prix des marchandises importés hors de l'union malgré l'existence d'un fournisseur plus compétitif. Cette situation pourrait entrainer un renforcement du

8

commerce intra-union ainsi qu'une augmentation des prix des produits sur les différents marchés de l'union du fait de la hausse des coûts de production ou de la hausse des tarifs douaniers.

Certains auteurs ont émis des hypothèses de gains statiques concernant la ZLECAf (CEA et al., 2017). À ce titre, Amiti et Konings (2017) estiment que les producteurs africains auront accès à des intrants et à des produits intermédiaires bon marché en provenance des pays africains entrainant ainsi des gains immédiats. Broda et Weinstein (2004) estiment quant à eux que les consommateurs africains devraient bénéficier d'un accès à des produits moins coûteux et plus diversifiés venant des pays africains. Krueger et Bhagwati (1995) pense que la ZLECAf contribue à résoudre l'épineuse question du chevauchement des accords commerciaux en Afrique. Enfin, Maur et Shephered (2015) soutiennent qu'un meilleur accès à des intrants agricoles et à des équipements améliorés peut faciliter l'adaptation des producteurs aux changements climatiques.

Les ACR peuvent aussi avoir des effets dynamiques. Généralement ils constituent une excellente plateforme de coopération et de dialogue, notamment en matière de développement des infrastructures, de transfert de technologie, d'innovation, d'investissement, de résolution de conflits, de paix et de sécurité. En effet, les ACR peuvent conduire à la spécialisation de chaque Etat membre dans la production de certains produits. Ils peuvent par ailleurs entrainer des innovations dans le système de production de ces pays et améliorer la compétitivité de leurs produits. Tout ceci pourrait, à terme, mettre à la disposition des consommateurs des produits à prix bas et de meilleure qualité.

CEA et al. (2012) proposent des effets dynamiques que pourrait engendrer la ZLECAf. À ce titre, il est relevé qu'un marché aussi vaste que la ZLECAf encourage les investissements directs étrangers et les investissements transfrontaliers. Ce marché génère des gains dynamiques grâce à la concurrence entre entreprises africaines. Les entreprises peuvent aussi innover en utilisant de nouvelles variétés d'intrants. L'intégration africaine peut inciter des pôles de croissances régionaux susceptibles de créer des externalités pour les pays moins développés. Une telle intégration peut entraîner une diversification industrielle et faciliter une transformation structurelle.

La théorie de Viner constitue une rupture avec les théories qui soutenaient que les accords commerciaux engendraient toujours des gains. Dans ce sens, Sara LABRAR et Safaa TABIT (2019) révèlent que certains auteurs ont donné une meilleure explication aux effets de la mise en oeuvre d'un ACR. Ils citent alors Robinson et Thierfelder (2002) qui affirment que les accords commerciaux préférentiels entrainent une création de commerce toujours plus grande que le détournement de commerce. Krugman (1991) soutient ce fait en estimant que la formation d'un

9

accord préférentiel entre des partenaires naturels réduit le risque d'un détournement du commerce. En effet, si les parties sont proches avec des économies de grandes tailles et similaires il y aura une création du commerce au regard du faible coût de transport.

Krishna (2003) soutient toutefois, à travers un modèle d'équilibre général, que les effets de la proximité géographique et du volume d'échange n'améliorent pas le bien-être si ces deux potentialités ne sont pas suivies d'une suppression des coûts liés au commerce. Les avantages attendus des partenaires naturels sont annulés par des partenaires éloignés ayant des coûts de production faibles. À cet effet, Bhagwati et Panagariya (1996) soutiennent que la conclusion d'un accord commercial avec un partenaire éloigné est plus bénéfique qu'avec un pays similaire proche.

Les parties à un ACR sont généralement motivées par l'amélioration du bien-être de la société qu'engendrerait l'augmentation des flux commerciaux. Dans ce sens, Schiff et Winters (2003) affirment qu'un bloc commercial bien conçu peut améliorer l'efficacité et le bien-être des pays membres par l'accroissement de la concurrence entre les producteurs et l'élargissement des choix des consommateurs. Ce résultat est dû à l'augmentation de l'offre à un coût faible au regard de la réduction des mesures tarifaires et non tarifaires. Il est à souligner toutefois que l'augmentation des flux commerciaux n'entraine pas obligatoirement une amélioration du bien-être.

Il ressort de cette analyse que les accords commerciaux peuvent engendrer des gains ainsi que des pertes pour les parties prenantes. Ces effets seront positifs si les parties signataires réduisent ou suppriment les obstacles aux échanges commerciaux qui existent à l'entrée et sur leurs marchés respectifs. Il ressort aussi que plus les pays sont proches plus leurs échanges s'avèrent importants.

10

III- Revue de la littérature

Cette recherche s'inscrit à la suite d'autres travaux portant sur les effets des ACR, qui ont eu recours, ou non, au modèle de gravité. Le tableau 1 résume ladite littérature.

Tableau 2 : Revue de littérature

Auteurs

Thème

Méthode/
approche

Résultats

Armagan

(1971)

La théorie

traditionnelle de

l'intégration économique

internationale et ses

insuffisances au
niveau des pays en

voie de
développement.

Critiques à
l'endroit de
Jacob Viner

Armagan trouve trop simpliste les hypothèses de Viner et le fait qu'il n'ait tenu compte que de la consommation dans son analyse. En effet, selon Viner, l'union douanière engendre deux effets : un effet de création de commerce d'une part et un effet de détournement de commerce, d'autre part.

Trotignon

(2008)

L'impact des accords
de libre-échange entre
pays latino-américain :

les enseignements
d'un modèle de gravité en données de panel

modèle de gravité en données de panel

Selon cette étude, le Mercosur, la Communauté andine, le Groupe des 3, les Zones de libre-échange Bolivie-Mexique et Chili-Mexique génèrent tous des créations de commerce intra-zone.

Trotignon

(2009)

L'intégration

régionale favorise-t-

elle la

multilatéralisation des échanges ?

Modèle de gravité

L'auteur estime que l'intégration stimule le

commerce intra-zone des pays membres ainsi que leurs exportations et leurs importations extra-zone sauf pour l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) qui induit un détournement de commerce d'exportation.

CEA, UA, BAD

(2010)

Etat de l'intégration

régionale en Afrique IV

Modèle de gravité

Les résultats de cette étude montrent qu'il existe une corrélation positive entre l'ouverture commerciale et la croissance économique grâce à la transmission de l'innovation technologique et au renforcement de la capacité à faire face aux économies plus avancées sur le marché domestique et international.

11

 
 

Analyse par

Cette étude révèle que la mise en oeuvre effective de la ZLE pourrait entraîner un accroissement des échanges entre les Etats membres de la Communauté

 

Les effets de la zone de

les

Economique des Etats de l'Afrique Centrale.

 

libre-échange de la

indicateurs

Toutefois, cet accroissement peut être limité par la

Djemmo

 
 
 
 

CEEAC sur les

commerciau

non diversification des produits exportables, la

(2013)

 
 
 
 

échanges

x et le

similarité des produits et la faible demande intérieure

 

intracommunautaires

modèle de gravité

des produits exportables. En outre, il relève que les

échanges transfrontaliers à majorité informels

constituent un facteur limitatif du potentiel
commercial de la communauté.

 
 
 

Cette étude a montré que la ZLEC peut entrainer des

CEA, UA,

Etat de l'intégration

régionale en Afrique

Statistique

avantages à tous les pays africains si elle prend en

compte les intérêts de toutes les populations

BAD

(2017)

VIII : vers la création de la zone de libre-échange continentale

descriptive

vulnérables. En outre, les gouvernements africains devraient élaborer des stratégies et accroître le commerce intra-africain.

Source : construit par l'auteur

Il apparaît dans cette revue de littérature que, globalement, la création d'un ACR induit un accroissement des échanges commerciaux. Cependant, certains ACR peuvent aussi entraîner un détournement de commerce (cas de l'ALENA). Djemmo (2013) estime que l'accroissement des échanges au sein des ACR peut être limité par l'insuffisance de diversification des exportations, la similarité des produits échangés, la faible demande intérieure ainsi que le caractère informel des échanges transfrontaliers. La CEA et al. (2017) propose alors que compte soit tenu des intérêts des populations vulnérables dans les négociations si les Etats africains souhaitent une réussite de la ZLECAf.

On retient aussi de cette revue que peu d'études empiriques se sont réellement penchées sur les effets potentiels de la ZLECAf sur le commerce des pays africains. Cela pourrait s'expliquer par la complexité à évaluer un ACR qui n'est pas encore mis en oeuvre. Par ailleurs, à la différence des ACR analysés par ces auteurs, la ZLECAf couvre un nombre important de pays et plusieurs domaines (marchandises, services, investissements, concurrence et propriété intellectuelle). Du reste, cette revue ne fait pas une analyse exhaustive des travaux menés sur les ACR.

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IV. Bref aperçu de la ZLECAf

Cette partie de notre réflexion met en lumière le processus de la mise place de la ZLECAf. On évoquera en outre les objectifs de la ZLECAf, sa structure ainsi que son intérêt. Il s'agira enfin de présenter les concessions faites par le Burkina Faso relativement à l'accès de son marché.

4.1 Processus de mise en place de la ZLECAf

C'est en 1991 avec la signature du traité d'Abuja que la création d'une Communauté économique africaine avec la mise en place de huit Communautés Economiques Régionales (CER) devant aboutir à la mise en place d'une zone de libre-échange continentale a été faite. En 2012, se fut le lancement du programme « intensification du commerce intra-africain » et c'est en 2015 que les Chefs d'Etat et de Gouvernements lancèrent des négociations sur la mise en place de la ZLECAf à Johannesburg. Enfin, 44 pays africains signèrent le 21 mars 2018 l'accord-cadre de la ZLECAf. La mise en oeuvre de cet accord se fera lorsque vingt-deux pays signataires de l'accord l'auront ratifié.

4.2 Objectifs

La ZLECAf vise entre autres à créer un marché unique pour les marchandises et les services afin d'approfondir l'intégration économique du continent africain et cela conformément à la vision panafricaine d'une « Afrique intégrée, prospère et pacifique tel que énoncé dans l'Agenda 2063 ».

Elle vise aussi à créer un marché libéralisé pour les marchandises et services par des cycles successifs de négociations, à contribuer à la circulation des capitaux et des personnes physiques et à faciliter les investissements en s'appuyant sur les initiatives et les développements dans les parties et les CER.

Pour atteindre ses objectifs, toutes les parties prenantes veilleront à éliminer progressivement les barrières tarifaires et non tarifaires au commerce des marchandises et à libéraliser progressivement le commerce des services.

4-3 Architecture de la ZLECAf

La ZLECAf couvre le commerce des marchandises, le commerce des services, les investissements, les droits de propriété intellectuelle et la politique de concurrence.

L'accord comprend 30 articles et 3 protocoles. Ces derniers sont : le protocole sur les marchandises qui comprend 10 annexes (Règles d'Origine, SPS, OTC, Facilitation des échanges, Barrières Non

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Tarifaires, transit, etc.), le protocole sur les services qui comprend 3 annexes (liste d'engagement, exemption NPF, transport aérien) et le protocole sur le mécanisme de règlement des différends.

Le cadre institutionnel de la ZLECAf comprend la conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement, le Conseil des ministres africains du commerce, le Comité des hauts fonctionnaires, le Forum de Négociation.

L'Accord et ses 3 protocoles entrent en vigueur 30 jrs après le dépôt du 22ème instrument de ratification. Il s'appliquera aux pays ayant ratifiés l'accord.

4-4 Intérêt de la ZLECAf

La ZLECAf créera un marché plus large de 55 États africains avec plus de 1,2 milliards de consommateurs. Cela induira une augmentation des investissements, aboutira à la mise en commun des ressources africaines pour améliorer la transformation structurelle et le développement des chaînes de valeur régionales.

4-5 Offre d'accès du Burkina Faso à son marché

Le Burkina Faso, en tant que PMA, s'engage à libéraliser son marché à 90% sur une période dix (10) ans pour les marchandises. Les 10% restant à libéraliser sont repartis entre les produits sensibles et les produits à exclure de la libéralisation. Toutefois, les produits sensibles perdent leur distinction 13 ans après la mise en oeuvre de l'Accord par le Burkina Faso.

Pour le commerce des services les secteurs suivants sont inscrits sur la liste d'engagement. Il s'agit des services de Communication, des services financiers, du tourisme, du transport et des services fournis aux entreprises.

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V. Méthodologie et Données

Ce chapitre présente une analyse empirique visant à corroborer ou à infirmer les idées émises dans les chapitres précédents. L'analyse s'appuie sur un modèle de gravité dont le détail est ci-après. Les données utilisées à cet effet sont décrites à la section 2.

5.1. Modèle

Le modèle utilisé dans ce travail émane de celui développé par Tinbergen (1962) et H. Linnemann (1966), et inspiré de l'équation de gravité qui fait dépendre les flux de commerce bilatéraux (X) du produit des revenus (Y) de deux partenaires i et j divisé par la distance (D) les séparant. L'équation de gravité se présente comme suit :

??????=A

??2 ???? ??1????

??????? ?3

Où A, fi1, fi2, et fi3 sont des paramètres à estimer.

Sous une forme log-linéaire, qui permet d'interpréter les coefficients comme des élasticités de flux de commerce par rapport aux variables explicatives, nous obtenons :

Ln(??????)=ln(A) + ln(??????1) + ln(??????2)- ????(????????3)

Ln(??????)=a + ??1 ln(????) + ??2 ln(????) - ??3????(??????) , avec ln(A)=a

La spécification de notre modèle, inspiré d'une version "augmentée" du modèle de gravité utilisée par Ekanayake et al (2010), se présente comme suit:

Ln(FCijt)=á0+á1Ln(TMijt)+á2Ln(PIBit)+á3Ln(PIBjt)á4(TRSPijt)+á5Ln(POPit)

+ á6Ln(POPjt)+á7INTRAZLECAf+á8CEDEAO+á9(FCOMij)+ìitt+gijt (1)

Dans cette première spécification du modèle (1), le pays i est l'exportateur (Burkina Faso), le pays j est l'importateur (partenaire commercial) et t représente la dimension temporelle. FCijt représente l'exportation du Burkina Faso vers ses partenaires j en un temps t. TMit représente le tarif moyen appliqué par le partenaire aux exportations en provenance du Burkina Faso. En principe, un tarif élevé limite les importations de produits burkinabè par le pays qui impose une telle mesure. PIBit et PIBjt représentent respectivement le PIB du Burkina Faso et le PIB du partenaire. Conformément à la théorie (Krugman, 1995), le commerce bilatéral est proportionnel au PIB des partenaires. Ainsi, plus les PIB sont élevés, plus les exportations s'accroissent. TRSPijt Représente les coûts de transport des marchandises de Ouagadougou à la capitale du pays partenaire. Plus les coûts sont

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élevés moins les relations commerciales sont importantes. POPit et POPjt représentent respectivement le taux de croissance des populations du Burkina Faso et des pays partenaires. Cette variable mesure l'effet de la taille du marché c'est-à-dire de la demande d'importations. Ainsi, une population importante chez le partenaire pourrait favoriser une demande importante de produits d'origine burkinabè. Par contre, un accroissement de la population burkinabè, si elle ne s'accompagne pas d'une adaptation des structures de production, peut réduire la part de production disponible pour les exportations.

INTRAZLECAf est une variable muette qui prend la valeur 1 si le partenaire est membre de la ZLECAf et 0 sinon. Cette variable permet de capter l'effet de l'appartenance à la ZLECAf sur les exportations du Burkina Faso. Un effet positif indique que l'appartenance des deux pays à la ZLECAf accroît les échanges bilatéraux entre eux. Un effet négatif indique que l'appartenance des deux partenaires à la ZLECAf réduit les échanges bilatéraux. CEDEAO est une variable muette qui prend la valeur 1 si le partenaire est membre de la CEDEAO et 0 sinon. Elle permet de capter l'effet de l'appartenance à la CEDEAO sur les exportations du Burkina Faso. FCOMij est une variable muette qui prend la valeur 1 si le Burkina Faso partage une frontière commune avec le partenaire et 0 sinon. Cette variable capture l'effet de l'existence d'une frontière commune sur les exportations du Burkina Faso.

ìij et ät, åijt représentent respectivement les effets fixes spécifiques à une paire, les effets fixes temporels et le terme d'erreur. Les effets fixes permettent de capter l'effet des résistances multilatérales (Yotov et al, 2016). Les effets fixes d'une paire (Burkina Faso-pays i) sont captés par des variables muettes qui prennent la valeur 1 pour un partenaire i et 0 pour tout partenaire j différent de i.

Ces variables permettent de prendre en compte les éléments inobservables spécifiques à la relation commerciale avec le partenaire i qui ne sont pas prises en compte dans les variables explicatives (exemple la culture du pays, les relations diplomatiques, ...). Un effet positif indique alors qu'il existe des spécificités de ce pays qui contribuent à l'accroissement des exportations du Burkina Faso vers ce pays. Les effets fixes temporels, quant à eux, sont captés par des variables muettes qui prennent la valeur 1 pour une année t et 0 pour toute année différente de t.

Le rôle de ces variables c'est de prendre en compte les éléments inobservables spécifiques à l'année t et qui ne sont pas prises en compte dans les variables explicatives (la mise en place d'une politique spécifique durant l'année, la baisse d'un prix au cours de l'année, ...). Un effet positif indique alors qu'il y a eu au cours de l'année des éléments catalyseurs des exportations burkinabè.

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Le modèle ainsi construit a été critiqué sur un certain nombre de points (UNCTAD, 2016 ; Baldwin & Taglioni, 2006). En effet, les critiques mettent en évidence un certain nombre d'erreurs à ne pas commettre lors d'une analyse avec un modèle de gravité et que celui-ci n'a pu éviter. Il s'agit notamment de la déflation inappropriée des flux commerciaux (erreur de bronze), la considération d'un seul flux commercial (erreur d'argent) et la non prise en compte des résistances multilatérales (erreur d'or).

Les auteurs font des propositions pour corriger ces erreurs. Ainsi, pour corriger l'erreur de bronze il faut prendre les valeurs en termes réels (WTO & UNCTAD, 2012). Pour corriger l'erreur d'argent il est préférable d'utiliser un modèle de panel de sorte que chaque pays soit considéré comme étant importateur puis exportateur. Enfin, selon Olivero & Yotov (2012) ainsi que Feenstra (2016), pour prendre en compte les résistances multilatérales, il faudrait introduire dans le modèle les effets fixes temporels pour l'exportateur (uit) et pour l'importateur (ujt).

Etant donné que notre recherche ne s'intéresse qu'aux exportations du Burkina Faso, nous retenons le modèle en séries temporelles. Dans ce cas, il est recommandé d'utiliser les données sur le commerce intra-national, d'insérer les effets fixes individuels par année (importer-time fixed effects), d'introduire les variables traditionnelles d'un modèle de gravité (distance, contiguïté, langue commune, ...) plutôt que les effets fixes de pair, et d'estimer le modèle avec l'estimateur du pseudo maximum de vraisemblance de Poisson (Yotov et al, 2016). La spécification finale est donc la suivante :

Ln(EXPORTijt)=á0+á1Ln(TMijt)+á2Ln(PIBit)+á3Ln(PIBjt)+á4(TRSPijt)+

á5LANGUE +á6INTRAZLECAf+á7CEDEAO+á8(FCOMij)+ìittijt (2)

Dans une seconde spécification, les coûts commerciaux sont introduits à la place de certaines variables traditionnelles contenues dans la variable COÛTS, notamment le tarif moyen (TM), les coûts de transport (TRSP), et les coûts liés aux différences de langue (LANGUE).

Ln(EXPORTijt)=á0+??1Ln(COÛTS))+??2Ln(PIBit)+á3Ln(PIBjt) +á4INTRAZLECAf+á5CEDEAO á6(FCOMij)+ìit+ät+åijt (3)

La période d'analyse se situe entre 2000 et 2016. Les exportations sont mesurées aux prix f.o.b. L'analyse porte sur le Burkina Faso (pays i) et ses partenaires commerciaux (annexe1). Seul le commerce des marchandises est examiné. Tous les flux commerciaux ainsi que les données des variables économiques sont évalués en dollar courant des États-Unis d'Amérique ($US). Divers scénarios sont testés pour déterminer convenablement les effets potentiels de la ZLECAf.

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Les résultats obtenus de l'estimation de ce modèle sont présentés et discutés dans le chapitre suivant.

5.2. Données

Les données utilisées ici proviennent de diverses sources. Les données sur le PIB pour l'ensemble des pays, ainsi que le tarif moyen appliqué par les partenaires à leurs importations en provenance du Burkina Faso, approximé par le taux moyen appliqué par ces pays, sont extraites de la base de données de la Banque Mondiale (WDI, 2018). La langue parlée (LANGUE) ainsi que l'indicateur de frontière commune (FCOM), sont extraits de la base de données de la CEPII. Les tarifs appliqués par les partenaires à leurs importations en provenance du Burkina Faso sont approximés par le taux moyen appliqué par ces pays. La variable (CEDEAO) est construite à partir de la liste des pays membres de cette union douanière. La variable (INTRAZLECAf) est construite à partir de la liste des pays signataires de l'accord de la ZLECAf. En conformité avec notre analyse de départ, les variables distance, langue et tarif moyen ont été remplacées dans une deuxième estimation par la variable coûts commerciaux (COÛTSijt) issue de la base de données ESCAP-WB Trade Cost Database. Les coûts commerciaux sont calculés à l'aide du « cadre de gravité inverse » développé par Novy (2009). Cette variable englobe tous les coûts directs et indirects auxquels sont confrontés deux pays, notamment les coûts de transport et de logistique, les tarifs, ainsi que les coûts liés aux différences de langues, de devises, d'obstacles géographiques et de procédures d'importation et d'exportation. Elle est exprimée sous forme d'équivalent ad valorem.

Les données sont log-linéarisées à l'exception des variables muettes (FCOM, CEDEAO et INTRAZLECAf). Le tableau 3 ci-dessous indique les signes théoriquement attendus pour chaque variable incluse dans le modèle.

Tableau 3 : définitions des variables et sources de données

Variables

dénomination

Sources

Signes attendus

TMijt

Taux moyen appliqué

WDI

-

PIBit

PIB du Burkina Faso

WDI

+

PIBjt

PIB du pays partenaire

WDI

+

LANGUE

Communauté de langue entre les partenaires

CEPII

+

INTRAZLECAf

Appartenance à la ZLECAf

 

indéterminé

CEDEAO

Appartenance à la CEDEAO

 

indéterminé

FCOM

Frontière commune

CEPII

+

DISTij

Distance entre les capitales

CEPII

-

COÛTSijt

Coûts commerciaux

ESCAP-WB

-

Source : Construit par l'auteur

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VI. Résultats et discussions

Ce chapitre présente les résultats obtenus de l'estimation du modèle de gravité. Trois principaux scénarios sont examinés, à savoir (1) les effets de la ZLECAf si elle avait été mise en oeuvre entre 2000 et 2016 ; (2) les effets retardés de la ZLECAf ; (3) les effets futurs de la ZLECAf. Les résultats des différentes simulations effectuées sont inscrits dans le tableau 4 ci-dessous. Les cellules vides dans le tableau indiquent l'absence des variables concernées dans l'estimation correspondante.

Les résultats présentés au tableau 4, montrent que les variables du modèle expliquent près de 75% de la variance des exportations du Burkina Faso (0,72<R2<0,80). Globalement, les effets de la ZLECAf sur les exportations du Burkina Faso sont positifs à terme mais pas immédiatement. En effet, les résultats montrent que les effets positifs interviennent avec du retard, précisément au-delà de 8 ans. Les résultats montrent néanmoins que la prise en compte de l'ensemble des coûts commerciaux est cruciale pour que le Burkina Faso bénéficie des effets positifs de la ZLECAf.

6.1. Effets potentiels de la ZLECAf sur les exportations du Burkina Faso

Cette section porte sur les effets potentiels de la ZLECAf entre 2000 et 2016. Toutes les variables du modèle sont significatives. L'effet (en pourcentage) lié au changement dans une variable muette comme celle relative à la participation à une ZLE est calculé à partir de la formule suivante:

e f f etar1 = [ea - 1] x 100

Cette formule est tirée de Yotov et al. (2016), où var1 désigne la ZLE en question et â?? est son coefficient tel qu'estimé à partir du modèle de gravité. Comme l'indique la formule, l'effet est exprimé en pourcentage.

Pour les autres variables continues, la spécification logarithmique du modèle permet d'obtenir directement les coefficients mesurant les élasticités respectives de la variable expliquée par rapport à chacune des variables explicatives. L'effet est calculé avec la formule suivante et est exprimé en pourcentage :

e f f etarz = a1 x 100

Les variables incluses dans le modèle ont les signes attendus. L'accroissement du PIB du Burkina Faso ou du PIB du partenaire induit un accroissement des exportations. L'existence d'une frontière commune et d'une langue commune accroît les exportations du Burkina Faso. Les barrières tarifaires maintenues par les pays importateurs limitent les exportations du Burkina Faso. Il en est de même de la distance entre les partenaires. L'appartenance à la CEDEAO améliore les

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exportations du Burkina Faso. Précisément, entre 2000 et 2016, l'appartenance à la CEDEAO a amélioré les exportations du Burkina Faso de 57,75 % (estimation 2). En ce qui concerne la ZLECAf, la variable INTRAZLECAf présente un signe négatif (estimation 1). Cela traduit que la zone de libre-échange aurait eu un effet négatif sur les flux commerciaux burkinabè. Précisément, si la ZLECAf avait été mise en place entre 2000 et 2016, l'effet sur les exportations du Burkina Faso aurait été une baisse de 10,17 %.

Cet effet négatif peut être expliqué par divers arguments. Premièrement, une explication viendrait de la structure des partenaires commerciaux du Burkina Faso. En effet, sept des dix partenaires principaux du Burkina Faso sont hors du continent Africain. De ce fait, la mise en place de la ZLECAf, aurait eu un effet de détournement du commerce vers les pays africains donc assimilable à une baisse des flux commerciaux du Burkina Faso vers les partenaires non africains. De ce constat on pourrait voir en ce signe négatif une création de commerce pour les pays africains qui sont parties prenantes à la ZLECAf. En effet, selon Jacob Viner sur la question, certains pays africains pourraient se substituer aux pays non parties à la ZLECAf en matière de commerce avec le Burkina Faso. Cet état de fait pourrait contribuer à l'accroissement du commerce intra-africain.

Deuxièmement, l'effet négatif pourrait émaner des nombreux coûts commerciaux auxquels le Burkina Faso fait face pour promouvoir ses exportations intra-africaines. Il s'agit notamment des coûts liés aux infrastructures, à la logistique, à la qualité des services. Cela peut aussi traduire les difficultés qu'éprouverait le Burkina Faso pour faire face à des puissances économiques africaines comme les pays du Maghreb, l'Afrique du Sud, le Nigéria et certains pays à fortes potentialités commerciales. Dans ce sens, l'impact négatif de la ZLECAf se traduira par une baisse du volume des exportations du Burkina Faso. Cette situation pourrait entrainer une perte de recettes pour le pays ainsi qu'un anéantissement du tissu industriel qui peine à se développer. On note cependant que le consommateur burkinabè pourrait bénéficier des produits compétitifs sur le marché du fait de l'entrée des produits étrangers.

Afin d'en avoir le coeur net, la variable COÛTS est introduite dans le modèle (estimation 2). Il en ressort que la prise en compte des coûts commerciaux modifie l'effet de la ZLECAf. Plus simplement, sous l'hypothèse d'absence des coûts commerciaux, la ZLECAf aurait induit un accroissement des exportations de 29,01% entre 2000 et 2016. Ce résultat permet de suggérer aux pays africains la mise en oeuvre effective des conditions de facilitation des échanges afin que la zone de libre-échange continentale ait des effets de création des courants d'échanges.

20

6.2. Effets retardés de la ZLECAf sur les exportations du Burkina Faso

Cette seconde section s'intéresse aux effets non-linéaires de la ZLECAf. Plus simplement, elle s'intéresse à la possibilité que les effets de la ZLECAf se modifient d'une période à une autre. Pour cela les variables retardées (ZLECAft_4, ZLECAft_s et ZLECAft_12) sont incluses dans le modèle.

Les résultats obtenus (estimations 3 et 4) montrent que durant les 8 premières années, les effets de la ZLECAf sont statistiquement nuls. Par contre 12 ans après la mise en oeuvre de l'accord, la ZLECAf aurait eu des effets positifs. Précisément, 12 ans après, la mise en oeuvre de la ZLECAF induit un accroissement des exportations du Burkina Faso de 11,07 % (estimation 3). La prise en compte des coûts commerciaux ne modifie pas les effets retardés (estimation 4). Par contre, l'effet global de la ZLECAf est positif à hauteur de 9,75 %. L'effet de la ZLECAf n'est donc pas linéaire.

Dans les premières périodes de sa mise en oeuvre, la ZLECAf n'affecte pas les exportations du Burkina Faso. C'est certainement l'effet d'un faible approfondissement vertical de l'intégration des pays ; cet approfondissement vertical consiste en la mise en oeuvre effective des dispositions et autres mesures inclues dans les ACR, notamment par le biais d'actes administratifs et des textes légaux à l'échelle nationale (Cariolle et al, 2017).

Après 12 ans, l'intégration est suffisamment profonde pour porter des fruits. Ainsi, l'Accord de la ZLECAf étant entré en vigueur en 2019, les fruits positifs seront visibles dès 2031 si les coûts commerciaux sont significativement réduits dans la ZLE. Ce résultat est conforme à ceux des auteurs tels que Baier & Bergstrand (2007), Anderson & Yotov (2011).

6.3. Test d'exogénéité de la ZLECAf

Cette dernière section s'intéresse à l'exogénéité de la ZLECAF. Ce test d'exogénéité est proposé par Wooldridge (2010) ainsi que Baier & Bergstrand (2007). Il s'agit de savoir si la ZLECAf affecte les exportations ou si c'est l'accroissement du volume des exportations qui détermine l'avènement de la ZLECAf. Si les deux relations sont vérifiées, il y a un biais d'endogénéité dans l'estimation. Sinon le modèle est correctement estimé. Il n'y a pas de biais si les coefficients associés à ces variables ne sont pas significatifs (Yotov et al, 2016 : 52-53).

Pour répondre à ce questionnement, on introduit dans l'équation les variables futures (ZLECA ft+4, ZLECA ft+s et ZLECA ft+12). La ZLECAf est exogène aux exportations si les paramètres associés aux variables futures sont statistiquement significatifs. Or dans le tableau des résultats (estimations 5 et 6), les paramètres sont statistiquement nuls. Dès lors, il n'existe pas un effet réciproque entre

21

les exportations et la ZLECAf. Autrement dit, il n'y a pas de biais d'endogénéité lié à une causalité réciproque. La ZLECAf est donc exogène aux exportations du Burkina Faso.

22

Tableau 4 : Effets de la zone de libre-échange continentale africaine sur le commerce international burkinabè

Variables

1ère

estimation

2e estimation

3e estimation
backward

4e estimation
backward

5e estimation
forward

6e estimation
forward

Ln(tranport)

-0,0769558 (0,000)

***

 

-0, 0752711

(0,000) ***

 

-0,0754697

(0,000)***

 

Ln(tarif moyen)

-0,1288876

(0,000) ***

 

-0,1280171

(0,000)***

 

-0,1282159

(0,000)***

 

Ln(PIB du pays

importateurs) standardisé

0,0635542

(0,000) ***

0,2864461

(0,000)***

0,3210081

0,000**

0,2851718

(0,000)***

0,3201622

(0,000)***

0,2850585

(0,000)***

Ln(du PIB du BF) standardisé

0,3212556

(0,000) ***

0,0269189

(0,000)***

0,0484568

(0,000)***

-0,061555

(0,000)***

-0,0033026

(0,761)

0,0108493

(0,218)

Ln (couts commerciaux)

 

-0,3427063

(0,000)***

 

-0,3498957

(0,000)***

 

-0,3480233

(0,000)***

intraZLECAf

-0,216489

(0,000) ***

0,1017141

(0,004)***

-0,2309319

(0,000)***

0,0930731

(0,007)***

-0,1735097

(0,000)***

0,1936999

0,001***

Frontière commune

0,1354883

(0,000) ***

0,0081506

(0,654)

0,1360231

(0,008)***

0,000685

(0,974)

0,1369723

(0,009)***

0,0029827

(0,865)

Langue commune

0,1720864

(0,000) ***

 

0,17505

(0,000) ***

 

0,1757271

(0,000)***

 

CEDEAO

 

0,4558849

(0,000)***

0,3332822

0,000***

0,4579373

(0,000) ***

0,3325273

(0,000)***

0,4555474

(0,000)***

ZLECAf (t + 4)

 
 
 
 

-0,0134299

(0,886)

-0,0722512

(0,246)

ZLECAf (t + 8)

 
 
 
 

-0,0568999

(0,205)

-0,0359173

(0,454)

ZLECAf (t + 12)

 
 
 
 

0,0558006

(0,614)***

0,0047091

(0,897)

ZLECAf (t - 12)

 
 

0,1107045

(0,028)*

0,1272697

(0,005)***

 
 

ZLECAf (t - 8)

 
 

-0,0101504

(0,813)

-0,0290056

(0,436)

 
 

ZLECAf (t - 4)

 
 

-0,0024526

(0,961)

0,0037326

(0,924)

 
 

Constante

2,62403

(0,000) ***

3,499662

(0,000) ***

2.573483 (0,000)***

3,370004

(0,000)***

2,488287

(0,000)***

3,492852

(0,000)***

Nombre d'observations

722

550

722

550

722

550

R2

0,74103102

0,75262943

0,74076622

0,75403937

0,7420828

0,75364583

Note : les p(z) statistiques sont entre parenthèses, *** significatif à 1%, ** significatif à 5%, * significatif à 10%

Aux termes des trois scénarios utilisés pour estimer le modèle, les résultats économétriques laissent voir que les variables du modèle expliquent près de 75 % de la variance des exportations du Burkina Faso. La ZLECAf devrait avoir des effets positifs sur les exportations du Burkina Faso au-delà de la 12e année. Toutefois, sur la période 2000 à 2016, elle aurait eu un effet négatif sur les exportations du pays. Par ailleurs, la ZLECAf est exogène aux exportations du Burkina Faso.

23

24

VII. Recommandations

La création de la ZLECAf est une initiative qui vise en principe à engendrer des bénéfices pour les pays africains signataires. Sa mise en oeuvre peut, toutefois, être désavantageuse pour les pays qui ne se seraient pas préparés conséquemment. Il importe donc aux acteurs du commerce du Burkina Faso notamment, l'administration publique, le secteur privé, la société civile, les organisations des producteurs, les transformateurs, les commerçants et les consommateurs de se concerter afin de profiter au mieux de l'ouverture de ce vaste marché. Cette concertation doit avoir pour objectif que compte soit tenu les intérêts de chaque acteur dans les négociations nationales sur les questions telles que l'identification des produits sensibles et des produits à exclure, ainsi que sur les questions qui feront l'objet de futures négociations au niveau régional.

Au regard des résultats de la présente étude, nous formulons les recommandations spécifiques suivantes.

a) Gérer efficacement les coûts commerciaux

L'un des défis pour un accroissement des exportations du Burkina Faso reste la pénétration du marché mondial et surtout celui africain. La réduction des coûts commerciaux s'avère être un facteur important pour l'accroissement des exportations du pays. Cela revient à disposer d'infrastructures de transport et de logistique (construction de routes, amélioration de la flotte de la compagnie nationale aérienne et du parc automobile, construction de chemin de fer) qui facilitent le commerce entre le Burkina Faso et le reste de l'Afrique. En outre, une réduction considérable du coût de l'énergie à travers des investissements considérables et durables est obligatoire. Il s'agit aussi de réduire au maximum les procédures à l'exportation sous toutes ses formes (prélèvements ou taxes, licences, agréments,...).

Le pays devra, par ailleurs, prendre les dispositions nécessaires pour participer aux différents forums de négociation ainsi qu'aux rencontres des instances de la ZLECAf afin de contribuer aux démantèlements des éventuels obstacles aux échanges entre les Etats membres.

b) Renforcer la capacité productive du Burkina Faso

Il est primordial pour le Burkina Faso de diversifier ses produits à exporter et accroître leur valeur ajoutée par la transformation. Cette action consistera à explorer les filières non encore exploitées et à développer les filières porteuses définies dans la SNE. Dans ce sens, le pays doit développer le dispositif productif de sorte à satisfaire aussi bien le marché africain que le marché mondial.

c) 25

Améliorer l'environnement des affaires

Le pays devrait mettre en place de mesures incitatives en faveur des investisseurs, à travers un code d'investissement clair et un cadre juridique favorable de sorte à accroître l'attractivité des investisseurs étrangers ainsi que nationaux.

d) Projeter une meilleure insertion dans les chaînes de valeur régionales et mondiales

Le Burkina Faso devrait s'insérer dans les chaînes de valeurs régionales pour profiter au mieux de la ZLECAf. Pour ce faire les solutions aux difficultés d'accès à une énergie (électricité et hydrocarbure) disponible et à bon prix doivent etre trouvées. Par ailleurs, l'amélioration de l'accès aux technologies de l'information et de la communication doit etre accélérée. Il est aussi indéniable de renforcer les capacités des centres de recherches pour favoriser la recherche et le développement afin de mettre à la disposition des acteurs, des inputs qui soient nécessaires à l'amélioration de leur production. En outre, il est impérieux d'encourager et faciliter la coopération et la coordination entre les entreprises des différents maillons de la chaîne.

e) Mettre sur le marché des produits de qualité

Les acteurs de chaque maillon des filières devront s'impliquer rigoureusement et avec intégrité dans le développement de leurs activités. À cet effet, les producteurs et industriels doivent mettre sur le marché des produits compétitifs et en quantité suffisante qui tiennent compte des normes nationales, régionales et internationales. Quant aux commerçants, le respect des textes qui régissent le commerce national, régional et international doit être observé pour éviter de plomber la dynamique qui sera amorcée dans la conquête du marché africain. Le Gouvernement et l'administration publique doivent jouer leurs rôles de régulation et de conseil et sanctionner aussi positivement que négativement les acteurs qui se seront identifiés particulièrement dans leurs activités. L'amélioration de la qualité des marchandises et des services doit être un crédo constant et progressif si l'on veut conquérir ce vaste marché africain.

f) Mettre en place un dispositif pour d'éventuelles mesures correctives commerciales

Ce dispositif devrait permettre de proposer efficacement des mesures correctives commerciales appropriées qui permettront de gérer les éventuelles distorsions au commerce burkinabè.

g) Améliorer les conditions d'accès au financement au profit des acteurs

Il s'agira de mettre en place des systèmes de financement en dehors des circuits ordinaires (banques), avec des conditions de financement beaucoup plus flexibles et accessibles au plus grand nombre d'acteurs.

26

VIII. Conclusion

Ce travail de recherche a eu pour objectif d'analyser les gains et les pertes du Burkina Faso du fait de sa participation à la ZLECAf. Les données commerciales annuelles sont obtenues sur la période 19622016 et proviennent des bases de données WITS, CEPII, WDI et de la CNUCED. Le mémoire a eu recours à une méthodologie empirique appuyée sur le modèle de gravité ainsi qu'une analyse documentaire.

Le modèle de gravité est estimé par le pseudo maximum de vraisemblance de Poisson. Trois principaux scénarios ont été examinés, à savoir (1) les effets de la ZLECAf si elle avait été mise en oeuvre entre 2000 et 2016, (2) les effets retardés de la ZLECAf et (3) les effets futurs de la ZLECAf. Les résultats économétriques montrent que les variables du modèle expliquent près de 75 % de la variance des exportations du Burkina Faso. Globalement, la ZLECAf devrait avoir des effets positifs sur les exportations du Burkina Faso au-delà de la 12e année. Toutefois, sur la période 2000 à 2016, elle aurait eu un effet négatif sur les exportations du pays, signifiant un détournement de commerce vers les pays africains au détriment des partenaires hors Afrique. Néanmoins, le Burkina Faso tirera profit de la ZLECAf en s'insérant dans les chaines de valeurs régionales.

Il ressort de notre étude qu'il est important que le Burkina Faso tienne compte de certains facteurs en vue d'accroître ses exportations au sein de la ZLECAf. Il s'agit de la gestion des coûts commerciaux, de l'amélioration des infrastructures de commerce, et du développement d'une industrie conséquente qui lui permette de s'intégrer au mieux dans les chaînes de valeurs régionales.

En outre, un défi majeur pour le commerce burkinabè demeure la qualité des produits qui seront mis sur le marché africain. En effet, il est très souvent relevé que certains produits burkinabè ne sont pas conformes aux normes internationales et à certaines normes développées par des partenaires sur d'autres continents. Ces difficultés sont très souvent liées à des cas d'étiquetage et de présence d'éléments indésirables dans les produits comme le sésame, la noix de cajou et le beurre de karité. Les efforts fournis, sur le plan national et sous régional, pour accompagner les PME/PMI permettent actuellement d'améliorer la qualité des produits.

Au regard de ces différents défis, le Burkina Faso doit élaborer une meilleure stratégie commerciale pour conjuguer crises économique et sécuritaire et mise en oeuvre de la ZLECAf. Pour ce faire, les recommandations dans le chapitre précèdent devront faire l'objet d'une attention particulière.

Il est important de relever que le processus rédactionnel adopté dans ce memoire de recherche pourrait inspirer des travaux similaires dans lesquels les gains et les pertes de la ZLECAf sur d'autres pays africains pourraient être évalués en termes de valeur.

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WEBOGRAPHIE

· http://www.wdi.worldbank.org

· http://www.wits.worldbank.org

· http://www.wto.org/french

Annexe

Liste des pays partenaires du Burkina Faso

Afrique Sud

Algérie

Allemagne

Angola

Belgique

Benin

Cameroun

Cap Vert

Centrafrique

Chine

Côte d'Ivoire

Egypte

Erythrée

Espagne

Ethiopie

Soudan

France

Gabon

Gambie

Ghana

Congo

Guinée Bissau

Guinée Equatoriale

Guinée Conakry

Inde

Italie

Japon

Kenya

Liberia

II

Lybie

 

Madagascar

Malawi

Mali

Maroc

Mauritanie

Mozambique

Niger

Nigeria

Ouganda

Pays bas

République Démocratique du Congo

Russie

Rwanda

Sénégal

Sierra Leone

Singapour

Suisse

Tanzanie

Tchad

Thaïlande

Togo

Tunisie

Turquie

États-Unis

Zambie

Zimbabwe






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