WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le droit de veto au conseil de sécurité des nations-unies entre gage juridique d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits.

( Télécharger le fichier original )
par Xavier MUHUNGA KAFAND
Université catholique du Congo (UCC) - Licence en droit  2015
  

sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

INTRODUCTION

Nous nous appesantirons ici sur la circonscription de la thématique auscultée (1), les motivations étayant l'option de ce travail (2), son présupposé ou énoncé de départ (3), les procédés utilisés en vue d'atteindre le résultat scientifique qu'il propose (4) et la description sommaire des parties qui le constituent (5).

1. Problématique

Le 11 février 1945 eut lieu une conférence à Yalta qui décida de l'armistice, mieux de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cependant, contrairement à l'entendement régulier de tout accord de cessez-le-feu qui est censé regrouper toutes les parties en conflit, cette conférence eut la particularité de ne réunir que les Puissances Alliées1(*) ; l'Allemagne nazie et les pays de l'Axe étant exclus de ces assises. Cette dimension unipolaire préfigurait déjà la part du lion qu'allaient s'arroger les Etats victorieux de la Seconde Guerre mondiale dans le cours de la politique internationale. Et la Charte des Nations Unies qui sera signée le 26 juin 1945 à San Francisco pour compenser les imperfections de la Société des Nations loge des dispositions2(*) très révélatrices de ce régime de faveur dont jouissent les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale et leurs alliés. Tel est le cas de l'article 23 de la Charte qui leur confère le statut de membres permanents au Conseil de Sécurité3(*) et de l'article 27 de la même Charte qui soumet l'adoption des décisions du Conseil de Sécurité sur toutes questions autres que celles de procédure à un vote affirmatif de neuf de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents, étant entendu qu'une partie à un différend s'abstient de voter, et ce, sous la férule des amendements dont a été l'objet la Charte de l'ONU4(*). En d'autres termes, le vote négatif5(*) de l'un des cinq membres permanents parmi les 15 membres du Conseil de Sécurité suffit pour bloquer l'adoption d'une décision ou une résolution sur des questions de paix et de sécurité et, partant, empiéter la résolution d'un conflit dans le cadre d'une action des Nations Unies. C'est cela le droit de veto au Conseil de Sécurité qui trouve encrage en l'article 27 alinéa 2 de la Charte. Celui-ci s'entend, en droit international public, du privilège de chacun des cinq Etats membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU de paralyser les décisions de cet organe portant sur des questions autres que des questions de procédure6(*). Ce privilège découle de la règle selon laquelle la majorité requise pour ces décisions - 9 voix sur 15 - doit comprendre les voix de tous les membres permanents du Conseil7(*).

Le système du veto8(*) a été établi pour protéger les intérêts des membres fondateurs des Nations Unies qui étaient sortis victorieux de la Seconde Guerre mondiale. A la conférence de Dumbarton Oaks en octobre 1944 qui a prévalu à la création de l'ONU, il a été décidé que les représentants de la République de Chine, des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France seraient membres permanents et, donc, titulaires du droit de veto. La France, même battue et occupée par l'Allemagne nazie, avait joué un rôle primordial en tant que l'une des figures de proue de la Société des Nations. En sus, elle était une puissance coloniale de première importance et les activités des Forces françaises libres aux côtés des Alliés leur ont permis de s'asseoir à la même table que les Quatre Grands.

Ainsi moulé, le droit de veto fut instauré, du point de vue formel, pour assurer la paix et la sécurité internationales, gage de développement, et préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l'espace d'une vie humaine a infligé à l'humanité d'indicibles souffrances9(*). Les rédacteurs de la Charte des Nations Unies ont voulu que cinq pays - la Chine, les Etats-Unis d'Amérique, la France, le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (à laquelle a succédé la Fédération de Russie en 1990) - continuent de jouer un rôle de premier plan dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, en leur accordant des sièges permanents au Conseil de Sécurité avec droit de veto, fort de la part essentielle qu'ils avaient prise à la création de l'ONU. Ce qui se veut à tous égards un objectif noble aux vertus indéniables.

Seulement voilà, la praxis de cette prérogative ou l'emploi du veto par les membres permanents du Conseil de Sécurité soulève des problèmes et contraintes pratiques dont la récurrence et l'ampleur dans la complexification des conflits qui surgissent sur la table des Nations Unies préoccupent au plus haut point les réflexions doctrinales, en droit international public, auxquelles s'affilie, non sans originalité, le présent mémoire.

Hubert VEDRINE constate qu'au fil des ans, l'identité principielle du droit de veto s'est foncièrement métamorphosée au point de relativiser les abus de l'usage de ce dernier tant du côté de ses utilisateurs que de celui de l'opinion publique internationale.10(*) Pour lui, le renforcement de l'efficacité de ce droit aujourd'hui passerait par la définition des restrictions à son exercice. Et Bruno TERTRAIS voit en l'usage de ce droit une arme de guerre occulte, entre les grandes puissances qui le détiennent, dont font les frais les Etats faibles11(*). Ainsi, préconise-t-il une réforme de ce droit dans le sens de l'élargissement du nombre de ses titulaires pour sortir de ce gouffre.12(*) Et Bernard EMIE de prévenir qu'un tel passage, tout en demeurant irréaliste, risquerait d'ouvrir fatalement la voie d'une « Troisième Guerre mondiale »13(*).

Notre dissertation juridique a la particularité de relever une autre dimension liée à ces problèmes et contraintes inhérents au droit de veto aujourd'hui. Il s'agit de celle s'identifiant principalement au dualisme du veto onusien qui s'apparente tantôt à un garde-fou contre des guerres incessantes en vue de garantir « une paix et une sécurité internationales d'exclusion »14(*), tantôt à un instrument au service du diktat impérialiste des Etats membres permanents du Conseil de Sécurité et devenant un blocage des règlements des conflits internationaux que ceux-ci sont pourtant chargés de gérer de manière à les enrayer15(*) . Dans ce dernier volet, l'usage du veto revêt aujourd'hui un visage utilitariste moderne. Il paraît tantôt comme un outil de positionnement géostratégique des membres permanents, tantôt comme une arme au service de leurs intérêts économiques, tantôt enfin telle une balance d'affirmation de leur puissance internationale.

Ce cliché nous pousse à situer le droit de veto au Conseil de Sécurité entre gage juridique16(*) d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits internationaux. Gage d'une paix internationale d'exclusion, le droit de veto exercé entraine comme conséquence fréquemment manifeste la prévention de la propension des affres de la crise sécuritaire et de la rupture d'une paix quelque internationale, laquelle esquive s'accompagne généralement de l'isolement de facto, de l'aire d'Etats jouissant des bienfaits de ladite paix, de l'Etat ou des Etats directement en conflit ou engagés aux hostilités qui se voient comme mis en quarantaine au regard du bénéfice de la « paix » qui serait instaurée. Ceci voudrait dire en d'autres termes que les avantages de la paix défendue par l'exercice du veto ne profitent, in concreto, dans une large mesure qu'à l'Etat qui en fait usage au Conseil de Sécurité ainsi qu'aux Etats tiers ; l'Etat où se déroulent les hostilités demeurant en conflit. Le veto serait ici un outil qui protège moins la paix internationale que les intérêts et la sécurité des Etats titulaires de son droit17(*).

Ce droit de veto, asservi par les ambitions démesurées d'affirmation compétitive des tendances hégémoniques de ses titulaires-toujours en confrontation latente teintée des rapports hypocrites-, endosse le masque du blocage politique du règlement des conflits menaçant de briser la paix et la sécurité internationales en fondant son emploi moins sur le souci de faire le contrepoids des manoeuvres d'entrée en guerre arbitraires sous l'égide d'une action militaire des Nations Unies que sur la préservation des intérêts économiques et géostratégiques de ses utilisateurs, la capitalisation de leur crédit de développement ainsi que l'ardeur d'engraisser leur puissance dans le jeu des rapports des forces internationaux. C'est ce vacillement du droit de veto, toujours d'actualité, qui motive l'analyse de certains auteurs et la position de certains Etats dans le sens tantôt d'en opérer une réforme taillée, tantôt d'aller vers son abolition, tantôt encore de substituer une majorité qualifiée des voix des membres permanents à la règle, quelque peu discriminatoire, rigide et désuète, de l'unanimité des voix des membres permanents qui en est le socle18(*), tantôt enfin de revisiter la structure de la représentativité du Conseil de Sécurité19(*). La France chapeaute aujourd'hui un bloc d'Etats qui bataillent en faveur, à défaut d'une suppression totale du veto que la conjoncture politique internationale rend utopique, de l'adoption d'un « code de conduite » qui obligerait les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité à renoncer par avance à faire usage de leur veto en face des « crimes de masse »20(*).

Par ailleurs, cette vapeur sombre qui plane sur la substance du veto oblige ses utilisateurs à rendre des comptes à l'opinion publique internationale sur le mode de fonctionnement du Conseil de Sécurité, sur le fondement juridique du veto et la légitimité de son exercice, postule Pierre Edouard DELDIQUE21(*).

Au rebond de cette approche, Géraldine LHOMMEAU estime que « le droit de veto n'est pas un privilège, mais une responsabilité »22(*).

A côté de la ventilation de toutes ces considérations attachées au droit de veto, notre dissertation juridique entend forger une analyse qui participe de sa perception telle une prérogative bipolaire, aux diapasons non moins ambigus. Cette approche, qui n'est rien de moins que la courroie de transmission de nos réflexions dans les arcanes de ce travail, cerne le droit de veto à la fois tel un garde-fou aux guerres arbitraires23(*) sous la bannière onusienne, mieux le gage juridique d'une paix et d'une sécurité internationales d' « exclusion »24(*) (Chapitre 1) et tel un verrou des voies de résolution des conflits armés qui se mesure en termes d'obstacle à la paix et à la sécurité internationales (Chapitre 2) et qui exige aujourd'hui d'être franchi (Chapitre 3).

Au demeurant, ce cliché soulève une ribambelle d'interrogations dont l'arrière-fond des réponses concourt à une meilleure appréhension des mécanismes fonctionnels et de l'originalité procédurale du droit de veto au Conseil de Sécurité des Nations Unies : Quelle est la ratio legis de ce droit - absent du Pacte de la Société des Nations - dans la Charte des Nations Unies ? Les membres permanents l'exercent-ils toujours au nom de la paix et la sécurité internationales, à des fins humanitaires par philanthropie et humanisme pour les populations civiles devant être préservées des affres des guerres ou bien en considération des pesanteurs beaucoup plus latentes ? Le fondement de ce privilège est-il démocratique ? Quel pourrait être le taux de son efficacité à résorber les crises internationales qui font l'objet de son usage ? Faut-il l'abolir aujourd'hui ?

Le présent travail s'assigne comme objectif notamment d'apporter lucidement, au terme d'une démarche qui ne fait pas lire mais fait penser, des éléments de réponse à ce questionnement. Ceci étant, l'intérêt du sujet examiné n'est certes pas moins avéré d'autant que son champ spatio-temporel ne s'en trouve pas moins déterminé.

* 1 En l'occurrence les Etats Unis d'Amérique, l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques et le Royaume Uni.

* 2 L'esprit et la lettre mêmes de ces dispositions de la Charte de l'ONU heurtent le principe de l'égalité souveraine des Etats membres indispensable pour assurer la coopération internationale, principe pourtant proclamé par la Charte.

* 3 Article 23, alinéa 1er de la Charte des Nations Unies. Cet article énumère les cinq pays membres permanents du Conseil de Sécurité. Il s'agit de principales Puissances Alliées : La République de

Chine, la France, l'Union des Républiques socialistes soviétiques, le Royaume-Uni de Grande-

Bretagne et d'Irlande du Nord et les Etats-Unis d'Amérique.

* 4 En effet, l'architecture formelle actuelle des articles 23 et 27, qui nous intéressent ici, est la résultante des amendements adoptés par l'Assemblée générale le 17 décembre 1963 et entrés en vigueur le 31 août 1965. L'amendement à l'article 23 a porté de onze à quinze le nombre des membres du Conseil de Sécurité. L'amendement à l'article 27 dispose que les décisions du Conseil de Sécurité sur des questions de procédure sont prises par un vote affirmatif de neuf membres (précédemment sept) et que ses décisions sur toutes autres questions sont prises par un vote affirmatif de neuf de ses membres (précédemment sept) dans lequel sont comprises les voix des cinq membres permanents du Conseil. Pour plus de détails, lire utilement la Note Liminaire de la Charte des Nations Unies.

* 5 Distinct de l'abstention qui, elle, n'empêche pas forcément l'adoption du projet de décision considéré.

* 6 DEBARD T. et GUINCHARD S., Lexique des Termes Juridiques, 19ème édition, Paris, Dalloz, 2012, p. 886.

* 7 PELLET, A., Les Nations Unies-Textes fondamentaux, Paris, PUF, 1995, pp. 57-59.

* 8 Le veto peut se référer également à la prérogative par laquelle une autorité, généralement dotée du pouvoir exécutif, peut s'opposer à un texte voté par le pouvoir législatif. Historiquement, le veto était la formule employée par les tribuns, représentant le peuple, pour s'opposer à un décret du Sénat romain. Aujourd'hui, le veto est l'un des attributs de l'exécutif dans les régimes présidentiels, tel celui des États-Unis, où le président peut opposer son veto à une loi votée par le Congrès, lequel peut toutefois passer outre en votant l'annulation à la majorité des deux tiers. L'utilisation du veto par le président reflète souvent un désaccord avec un Congrès dont la majorité est de couleur politique différente.

* 9 Lire à ce propos le Préambule de la Charte des Nations Unies.

* 10 VEDRINE, H., « Réflexions sur la réforme de l'ONU », in Pouvoirs n°109, 2004, pp. 4-6.

* 11 TERTRAIS, B., La guerre sans fin : l'Amérique dans l'engrenage, Paris, l'Harmattan, 2004, p. 32.

* 12 TERTRAIS, B., « Vers une réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU ? », http://www.jolpres.com//droit, page consultée le 29/09/2014 à 07h 19'.

* 13 EMIE, B. « Le droit de veto à l'ONU », http//www.voltairenet.org, page consultée le 24 juin 2014.

* 14 Une paix dont la mesure est parfois minime et le bénéfice restrictif telle que va tenter de le démontrer la monture de la présente réflexion qui considère la paix et la sécurité internationales comme deux gamètes univitellins d'une même cellule et, partant, indissociables.

* 15 DUPUY, P.-M., Droit International Public, Paris, Presse Ancienne, 1993, p. 42.

* 16 Le costume juridique imputé à la paix qu'est destiné à garantir le droit de veto réside dans sa consécration normative par la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 tel qu'amendé à ce jour.

* 17 COT, J.-P. et PELLET, A., La Charte des Nations Unies (commentaire article par article), Paris, Economica, 1ère Edition, 1985, p. 214.

* 18 CHEMAIN, R., La Charte des Nations Unies, Constitution mondiale ?, Paris, Pedone, 2006, pp. 123-125.

* 19 DE FROUVILLE, O., « Droit de veto à l'ONU : vers l'abolition d'un privilège », http://www.lemonde.fr, page consultée le 15 septembre 2013 à 14h35'.

* 20 Cette position réformiste de la République française a été réaffirmée par le Président François Hollande à la tribune de l'Assemblée générale des Nations Unies au sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement en septembre 2014.

* 21 DELDIQUE, P.E., Faut-il supprimer l'ONU ?, Paris, Hachette Littératures, 2003, p. 41.

* 22 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, Paris, L'Harmattan, 2005, pp. 154-163.

* 23 Versant qui tend à préserver une certaine paix internationale mais qui paraît limitée tant elle ne profite pas équitablement à tous les Etats.

* 24 En ce sens que les avantages de la paix et de la sécurité défendues par l'exercice du veto ne profitent, in concreto, dans une large mesure qu'à l'Etat qui en fait usage au Conseil de Sécurité ainsi qu'aux Etats tiers ; l'Etat sur le territoire duquel se déroulent les hostilités demeurant en conflit. Le veto serait ici un outil qui protège moins la paix internationale que les intérêts et la sécurité des Etats titulaires de son droit. C'est une considération que nous entendons développer et élucider dans le cadre du présent mémoire.

sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon