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Prise en charge et qualité de vie d'un patient schizophrène: vers une juste distance dans la relation de soins


par Chloé Desprez
Université de Caen  - Diplôme universitaire en soins infirmiers  2019
  

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5.3. Lieu et temps de l'enquête

Concernant l'environnement et le temps de chaque entretien, ma première rencontre a été réalisée chez la personne interrogée. Un endroit calme où nous avons échangé pendant vingt minutes et sans aucune interruption pendant cette discussion. Concernant mon deuxième entretien, il s'est déroulé sur le lieu d'exercice de la personne, dans un bureau calme, sans interruption. Cependant, la pièce étant près de la route, nous avons parfois rencontré des nuisances sonores mais cela n'a pas altéré la qualité de l'entretien qui a duré une trentaine de minutes. Ces différents lieux ont été choisis pour des raisons pratiques et organisationnelles et en accord avec chaque professionnel.

5.4. Les limites et les difficultés de l'enquête

Lors de l'enquête, il s'est parfois révélé compliqué de me faire comprendre par rapport à mes questions. Certaines subtilités dans le sens des mots choisis n'ont pas directement été perçues et ont demandé une explication ou une reformulation. De plus, le fait d'avoir des questions prédéfinies m'a parfois bloqué dans la dynamique du discours. En effet, à certains moments dans l'échange, j'ai eu l'impression de poser des questions plus que de discuter avec mon interlocuteur. J'écoutais attentivement les réponses très détaillées et authentiques des soignants mais il m'est parfois arrivé de ne pas rebondir dessus comme j'aurai souhaité le faire, car parfois je restais focalisée sur les questions rédigées au préalable.

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6) L'analyse

L'étude qui va suivre constitue la finalité de ce mémoire de fin d'études. En effet, cette analyse des entretiens menés auprès des professionnels a pour objectif de dégager des axes d'ouverture et des éléments permettant de comprendre davantage ma question de départ. Afin de m'aider dans cette analyse, j'ai donc réalisé un tableau reprenant les éléments du cadre théorique ainsi que les dires des infirmiers interrogés (Cf. Annexe 4)

1er thème : La schizophrénie

Par rapport à la schizophrénie, les deux infirmiers s'accordent sur un même mot pour la caractériser : la dissociation. Dans la théorie, ce terme est également présent pour la définir, on parle plus précisément de dissociation de la pensée et de la personnalité. L'IDE 1 explique que « c'est la déconne ion avec la réalité, on voit les choses différemment, on capte les choses différemment » et ajoute que « la réalité que nous, nous allons vivre chaque jour, cette réalité-là va être totalement vécue et vue d'un oeil différent par une personne dissociée. » et selon les recherches, être schizophrène c'est vivre la réalité d'une autre façon. L'IDE 1 nous précise que « son jugement de la réalité, ses sentiments par rapport à la réalité vont être altérés, ses pensées et sa perception vont l'être aussi » un aspect que l'on retrouve dans la définition de David H.Barlow et V. Mark Durand qui détermine la schizophrénie comme un trouble qui peut « affecter la perception, la pensée, le discours et les gestes ». D'autre part, l'IDE 2 parle de grandes difficultés et de grande souffrance, une idée similaire à la théorie qui dit que cette maladie est une source d'anxiété et de souffrance terrible qui affecte la vie de la personne. L'IDE 1 souligne également le caractère difficile de cette maladie. De plus, nous retrouvons une similitude entre le cadre conceptuel et les dires de l'IDE 1 par rapport au fait que la schizophrénie s'illustre avec l'idée d'un clivage du Moi. Enfin, l'IDE 1 insiste sur le fait qu'il ne faut pas confondre la dissociation avec les troubles dissociatifs de l'identité qui ne concernent que très peu d'individus. Une chose non abordée dans mon cadre théorique.

Sous thème : Une maladie chronique

En ce qui concerne la chronicité de la maladie, l'IDE 1 et l'IDE 2 semblent tous deux en accord avec le cadre conceptuel qui explique que la schizophrénie est une maladie chronique car elle ne se guérit pas. De plus, selon l'OMS, les maladies chroniques sont des « affections de longue durée », une chose que confirme l'IDE 2 en caractérisant la

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schizophrénie comme étant une maladie longue. Elle parle également d'une maladie qui peut se stabiliser suivant les rencontres thérapeutiques, ce qui rejoint l'idée de l'IDE 1 qui nous dit que les soignants sont là pour les aider à vivre leur vie dans le monde et dans la société c'est à dire à vivre correctement avec la maladie. De plus, la théorie semble se rapprocher de ce point de vue, car selon les recherches, les soignants sont là pour pouvoir aider le patient à vivre avec les symptômes de la maladie et l'aider à retrouver une vie sociale. Enfin, nous retrouvons dans les deux entretiens, un lien avec le handicap. En effet, l'IDE 2 semble voir la schizophrénie comme quelque chose qui « handicape le quotidien » tout comme l'IDE 1 qui pense que les schizophrènes sont des personnes handicapées. L'IDE 1 utilise même une métaphore simple pour expliquer son point de vue : « comme une personne en fauteuil roulant aurait besoin d'une rampe d'accès pour accéder à une porte et bah ces personnes-là ont besoin d'une rampe pour accéder à des activités qu'ils aiment, à du travail qu'ils aiment » deux idées similaires qui font donc écho au cadre théorique et plus précisément à la loi du 11 février 2005 relative à l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui intègre les conséquences des maladies chroniques dans la définition du handicap. Ainsi, il semblerait donc que la schizophrénie soit vue comme un handicap pour la personne.

2ème thème : La qualité de vie d'un patient schizophrène

Dans un premier temps, il semblerait que les deux infirmiers interrogés aient une vision différente de ce que peut être la qualité de vie malgré quelques similarités. En effet, pour l'IDE 1, la qualité de vie sous-entend de pouvoir être heureux avec ce que l'on a et ne pas forcément chercher plus, il ajoute que c'est « arriver à vivre avec notre passé, notre présent et l'idée qu'on peut se faire de l'avenir ». Pour l'IDE 2, il s'agit plutôt de vivre avec soi-même et avec ses difficultés, ce qui pourrait malgré tout se rattacher subtilement à la notion de vivre avec son passé, son présent et son futur décrit par l'IDE 1. Par rapport à la théorie, aucun des deux points de vue n'est réellement similaire aux recherches car pour B. Baertschi « une vie de qualité doit donc être une vie inscrite dans l'autonomie, dans l'intégrité et dans la dignité ». Des termes qui ne sont pas abordés par les deux infirmiers. Cependant, toutes ces visions divergentes peuvent confirmer ce qui est inscrit dans le cadre conceptuel. En effet, cette différence peut consolider le fait que la qualité de vie est un concept vague et propre à chacun et qu'elle relève de l'unicité de chaque personne, de ce qui est essentiel pour elle, ainsi qu'à sa manière de vivre.

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En ce qui concerne l'impact de la schizophrénie sur la qualité de vie, l'IDE 1, de par sa perception de la qualité de vie, nous explique que le patient schizophrène « n'a pas forcément de projection sur l'avenir parce que toutes ses pensées sont centrées vers le présent et ce qu'il ressent au jour le jour peut être très mauvais et très triste pour lui voir très terrifiant » Pour l'IDE 2, il semblerait que la maladie impacte la vie du patient lorsque les symptômes de la maladie commencent à handicaper le quotidien du patient et plus précisément « quand la personne ne peut plus rien faire, ne peut plus être avec l'autre, ne peut plus être avec lui-même ». L'IDE 1 nous parle plus précisément de ces symptômes et insiste notamment sur la dissociation. Pour lui, c'est ce qui perturbe la vie du patient car « ils ne vont pas voir la réalité de la même manière que nous ». Il nous dit qu'ils vont voir des choses qui les persécutent et qui les font souffrir. D'ailleurs, C. Tobin définit les hallucinations comme « des perceptions vraiment ressenties, mais sans support réel, qui n'e istent que dans la tête de celui qui les vit. » et caractérise les délires comme « des constructions mentales fausses, de fausses interprétations à partir d'observations vraies. ». De plus, d'après les recherches, le patient schizophrène peut avoir des doutes sur son appartenance, ce qui peut installer et créer un climat angoissant au quotidien, ce que l'IDE 1 semble confirmer en nous disant que les patients « vont avoir l'impression que leur vie n'a pas de sens, qu'il a des choses qui interrompent leur vie ». Par rapport à ces symptômes, l'IDE 2 nous parle également de l'isolement et de la rupture de lien avec l'entourage que peut entrainer la maladie et qui peut être difficile pour certains schizophrènes. Un aspect que l'on retrouve dans le cadre conceptuel qui nous dit que les symptômes affectent le comportement du patient chaque jour et entrainent un repli sur soi s'accompagnant d'une grande souffrance constante affectant donc sa qualité de vie. Il est dit également que les symptômes de la schizophrénie impactent sur les capacités sociales de la personne, notamment sur la reconnaissance des émotions et des sentiments ainsi qu'à la capacité à distinguer soi et autrui. Une notion qui renvoie à la rupture de lien social et à l'isolement cité par l'IDE 2. Ainsi, l'IDE 2 nous raconte que, selon elle, pour que le patient puisse avoir une qualité de vie satisfaisante « il faut pouvoir vivre avec les symptômes et pouvoir garder les liens avec la famille et les amis », une chose qui reste difficile chez les patients schizophrènes. Elle nous dit aussi qu'il faut qu'il « puisse avoir une vie harmonieuse même si elle peut ne pas l'être ». Par cette phrase, l'IDE 2 veut expliquer qu'une vie harmonieuse est subjective comme nous l'avons vu dans la théorie. En d'autres termes, ce qui sera harmonieux pour certains patients sera peut-être dysharmonieux pour nous soignants car nous aurons un regard différent. Mais ceci « est une partie de son équilibre psychique » qu'il faut savoir respecter.

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3ème thème: La relation de soin infirmier avec un patient schizophrène

Tout d'abord, d'après la théorie, il existerait deux origines dans la relation de soins. L'une pouvant être fonctionnelle c'est à dire « qui naît d'un soins à faire » et l'autre pouvant être selon, W. Hesbeen «une relation d'attention à la personne, une relation singulière, sensible et subtile et qui se veut de nature aidante». L'IDE 2 semble être consciente de ces deux natures et nous parle d'une relation de soins avec plusieurs significations. Elle explique par exemple qu'une relation peut découler d'un soin technique mais que celle-ci sera plus courte et différente que celle en psychiatrie.

Par rapport à la place de la relation de soin dans la prise en charge d'un patient schizophrène, l'IDE 1 et 2, semblent se rejoindre sur le fait que cette relation est une chose très importante et essentielle. L'IDE 2 la place au centre de la prise en charge ainsi que l'IDE 1 qui recherche cette relation en premier lieu pour établir un lien avec le patient. La construction de la relation de soin semble donc être indispensable dans la mise en place du procédé thérapeutique car c'est aussi ce que l'on retrouve dans la partie théorique. Pour l'IDE 1 la relation de soins sous-entend de gagner un lien de confiance, une chose importante pour avancer dans la prise en charge. La confiance entre soignant et patient permet donc de faire avancer ce dernier dans sa maladie et ainsi le faire avancer dans sa vie. En théorie, ce lien dépend également de la confiance que le patient a envers le soignant et c'est cette relation de confiance qui permet d'identifier avec lui ses besoins, ses peurs et ses envies. Dans le cadre conceptuel, on parle notamment d'alliance thérapeutique pour caractériser le lien permettant un cadre de soin. Un terme non cité par les deux professionnels.

Ensuite, de par mes recherches j'ai pu constater que les activités et les entretiens font partie prenante de la relation de soin et ont toutes les deux pour objectif d'accompagner le patient schizophrène dans l'acceptation de sa maladie et ainsi lui apprendre à vivre avec. L'IDE 1 comme l'IDE 2 font vivre cette relation par des médiations et des activités également. Mais contrairement à la théorie et à l'IDE 1, l'IDE 2 estime qu'il n'est pas toujours nécessaire de faire des entretiens cliniques. Elle dit plutôt favoriser le tiers pour être en lien et pas seulement la discussion, un lien d'ordre indirect quand le lien direct n'est pas possible. Mais elle explique que la relation dépendra aussi de chaque situation. Le plus important étant d'apporter quelque chose au patient, qui l'aide et qui lui donne envie de continuer la prise en charge. Pour finir, l'IDE 1 apporte deux nouveaux aspects qui n'ont pas été abordé lors de la partie conceptuelle. La première idée est qu'il semblerait que le patient puisse

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parfois associer le soignant à la réalité, une réalité à laquelle il peut se tenir et se fier, ce qui lui permettra d'avancer dans les périodes de crise et renforcera la relation de soins. De plus, selon l'IDE 1, l'hospitalisation favoriserait ce lien également, car le patient est présent dans une structure et demande de l'aide. Et même si le patient est dans le refus de soin et qu'il entraine une difficulté, le cadre hospitalier sous-entend malgré tout une rencontre et une prise en charge.

Sous thème : Les compétences relationnelles de l'IDE

Dans le cadre conceptuel, plusieurs compétences sont abordées. Tout d'abord, l'écoute fait partie de ces compétences, il est dit que prendre en compte la parole du patient, c'est tout d'abord le reconnaitre en tant que personne et ne pas seulement l'assimiler à sa maladie. L'IDE 1 et l'IDE 2 ne parle pas spécifiquement de cette notion mais l'IDE 1 s'accorde avec la théorie pour dire que le patient schizophrène a besoin d'être reconnu en tant que personne et non pas en tant que malade. Ensuite, le cadre nous parle d'empathie, une attitude qui apparaît comme un des concepts primordiaux dans la prise en charge de la schizophrénie. Une chose que l'IDE 2 confirme, en nous disant que le soignant doit être dans l'empathie. Par rapport à la communication et à la patience qui sont citées dans la théorie, aucun des deux infirmiers n'a utilisé ce terme. En ce qui concerne l'authenticité, l'IDE 2 est en accord avec le cadre pour dire que la subjectivité, l'authenticité et le fait d'être soi-même, favorise la relation. Il semblerait donc que l'infirmière doit être capable de reconnaître et accepter ses propres sentiments. Être authentique avec une attitude spontanée et naturelle. L'IDE 1 ne désigne aucune notion particulière pour parler des compétences relationnelles mais il nous parle de l'attitude aidante que le soignant doit adopter. L'IDE 1 explique que le soignant doit se montrer aidant envers les personnes dans le but de créer la relation de soin et le lien de confiance pour ensuite l'amener à réfléchir sur ses comportements, sur ses délires, ses sentiments. Une attitude qui peut sous-entendre de posséder les compétences abordées dans la théorie car ce sont elles qui permettent d'établir une relation et de la confiance avec le patient pour lui permettre d'avancer et de faire face à la maladie.

Enfin, l'IDE 2 nous parle de non jugement de la personne et de tolérance. Elle explique également que l'humilité est importante c'est-à-dire, qu'il faut « être convaincu de ce que l'on fait sans porter de médaille ». Trois notions qui ne sont pas citées dans la partie théorique mais qui semblent malgré tout importantes car dans le cadre, les compétences abordées ne sont pas les seules, les capacités relationnelles sont multiples.

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Sous thème: Les difficultés dans la relation de soins

En ce qui concerne les difficultés rencontrées dans la relation de soins, il semblerait que l'IDE 1 et 2 pensent la même chose. En effet, les deux professionnels s'accordent sur le fait qu'il existe une difficulté lorsqu'ils sont face à un patient très persécuté, délirant et non accessible. En s'appuyant sur le cadre conceptuel, il semblerait qu'il existe un obstacle dans la relation lorsque le patient est délirant et affirme n'avoir aucun problème. Il apparait donc plus compliqué de créer un lien avec une personne persécutée qui est dans le refus de soin. Dans la théorie, le contexte d'une hospitalisation sous contrainte est mentionnée. Cependant, nous pouvons préciser que l'IDE 1 et l'IDE 2 n'abordent pas spécifiquement cette notion lorsqu'ils parlent de cette difficulté. L'IDE 2 ajoute que : « des gens qui sont très en crise, qui sont très très très délirant ce n'est pas facile d'établir une relation ». De plus, la personne peut également penser que les soignants sont là pour lui faire du mal, ce que confirme l'IDE 1 : « Ils vont penser qu'on est là pour leur faire du mal, ils vont avoir éventuellement des voix qui vont leur dire qu'on est là pour faire du mal et c'est difficile pour eux. »

Face à ces difficultés, l'IDE 1 nous explique que quand ces patients sont mieux, il peut essayer de montrer au patient que les soignants sont là pour lui, pour l'aider. Il utilise les entretiens et les activités thérapeutiques pour vivre des moments avec eux et ainsi leur montrer sa bienveillance et établir un lien de confiance. Un fonctionnement différent de l'IDE 2 qui aborde le travail en équipe pour y faire face. Elle explique qu'elle transmet à ses collègues lorsqu'elle est confrontée à une situation difficile : « J'ai toujours bossé en individuel mais grâce au collectif (...) je fais toute seule j'ai ma pensée, j'ai mes idées mais par exemple quand je rencontre des difficultés avec un patient je me réfère à l'équipe ».

Sous thème : Le travail en équipe

Dans un premier temps, il semblerait que l'IDE 1 et l'IDE 2 soit d'accord avec le cadre pour dire que le travail en équipe est une chose très importante pour plusieurs raisons et qu'il est présent partout et à tout moment dans la prise en charge. Ils semblent tous deux penser également que les transmissions et la communication en équipe sont primordiales car les choses vécues par chaque soignant avec le patient seront transmises entre collègue dans le but de connaître le patient et d'établir une prise charge de qualité ainsi qu'une relation de confiance. L'IDE 1 nous dit même que : « Toutes les informations sont

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importantes donc le fait qu'il y ait une équipe pluridisciplinaire qui se transmet toutes les infos, ça aide à ce que tous ensemble on soit dans le sens du patient, qu'on soit là pour lui et son bien-être. » L `IDE 2 confirme ceci : « Je ramène l'information à l'équipe pluridisciplinaire pour partager, avancer et faire une bonne prise en charge ». Il semblerait donc que le travail en équipe va permettre de continuer, d'avancer avec le patient et que le fait de transmettre les informations entre professionnels permet une prise en charge adaptée. Dans la théorie, P. Cauvin définit le travail en équipe comme étant « le lieu où se développent les solidarités, où se renforcent les actions de chacun par le jeu des échanges, où s'unifie l'activité, où se crée un esprit commun » Une définition qui représente bien l'idée de l'IDE 1 et l'IDE 2 avec un but commun qui est ici de mettre en place en équipe une bonne prise en charge des patients schizophrènes. De plus, d'après le cadre, travailler ensemble permet de comprendre, à travers la disparité de ces membres, la complexité des conflits intérieurs d'un patient schizophrène.

Ensuite, l'IDE 2 nous dit aussi que l'équipe permet de « passer la main » quand on est en difficulté pour avancer dans la prise en charge et pour le bien du patient. L'IDE 1 semble d'accord avec ça et nous explique que « l'équipe pluridisciplinaire joue un rôle important parce que ce qu'on ne va pas réussir à faire en tant que soignant peut être qu'un médecin psychiatre du fait de son statut va réussir à le faire passer au soignant et inversement ce que le médecin ne va pas réussir à faire parce que peut-être il sera vu comme le persécuteur et bah nous soignant on peut travailler dessus. »

L'IDE 2 est d'accord avec le cadre conceptuel pour dire que chaque professionnel d'un service est une ressource et peut être amené à aider l'autre. Elle nous dit qu'une équipe se serre les coudes, que le fait d'être plusieurs a un côté rassurant. Il semblerait que l'IDE 1 pense la même chose.

Enfin, contrairement à l'IDE 1 et à la théorie, l'IDE 2 explique que l'équipe peut être bénéfique ou non pour le patient schizophrène suivant les situations. Elle nous dit que « Des fois c'est mieu que ce soit restreint c'est mieu qu'il y ait qu'une seule personne ». Cependant, l'IDE 2 rejoint le cadre et l'IDE 1 pour dire qu'il est parfois bénéfique d'être plusieurs pour qu'il y ait du relais parce que cela peut être lourd quand la communication est difficile. Dans les recherches théoriques, l'équipe peut permettre de contenir la pensée et l'émoi du patient, ce qui rend le caractère difficile de ses angoisses plus supportable car elles peuvent être partagées avec les différents soignants. Cela permet à la personne schizophrène de diriger ses émotions dans plusieurs directions, et donc d'en atténuer la force. L'IDE 2 souligne également qu'il n'y a « rien de défini mais des fois il y a des situations

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où c'est bien que ça se dilue pour la personne et la distance elle est là aussi c'est une façon de mettre une distance ». Une idée qui s'apparente à celle du cadre conceptuel.

4ème thème: La juste distance

Sur la question de la juste distance, l'IDE 1 et 2 font tous deux allusion au fait qu'il faut tout d'abord entrer en relation et créer un lien avec le patient, ce qui prend du temps. Une fois cette relation installée, la notion de juste distance prend place et c'est à l'infirmière d'évaluer s'il doit être proche ou distant ainsi que de poser des limites dans la relation. Dans le cadre conceptuel, la juste distance sous-entend une évaluation des circonstances et un travail progressif pour arriver à trouver l'équilibre idéal, ce qui reprend les dires des deux infirmiers. Il est dit également que les soignant doivent évaluer eux-même cette distance et adapter celle-ci pour une bonne prise en charge et pour que le patient se sente bien. L'IDE 2 est d'accord et ajoute que « Le but c'est que le patient se sente bien quelques soit cette distance qu'on a pu mettre avec la personne. »

D'après l'IDE 1 et 2, la juste distance sous-entend de ne pas être trop proche, ni trop distant, c'est-à-dire qu'il faut être là pour le patient mais savoir être distant quand cela est nécessaire. Ce que l'on retrouve dans le cadre conceptuel, car il est indiqué que la juste distance est une distance qui sépare tout en gardant une approche suffisante, un équilibre qui se traduit par une valse entre écartement et rapprochement. Ce n'est pas tant être distant avec le patient mais plutôt d'être là pour lui, pour l'accompagner tout au long de la prise en charge sans oublier que nous sommes soignants. De plus, l'IDE 2 comme dans la théorie, nous précise que cette distance fluctue en fonction de la personne et des situations. Il est dit que la juste distance thérapeutique n'est pas figée, qu'elle est mouvement constant. Elle bouge en fonction de l'évolution du patient schizophrène, de ses envies et de son projet de vie mais aussi en fonction des situations et de la relation. Ensuite, l'IDE 2 finit par préciser que « c'est une chose compliquée, l'être humain est compliqué 'a pas vraiment de recette.

»

Par rapport aux bénéfices de cette juste distance sur le patient schizophrène, l'IDE 2 nous dit que « Plus tu vas savoir quand il faut être distant avec le patient, plus ça va être bénéfique pour lui. Si tu arrives et que tu es proche alors qu'il faut que tu sois distante, ça va être enfermant pour le patient, tu ne seras pas en train de l'aider. » L'IDE 1 semble d'accord avec l'IDE 2 mais l'exprime différemment : « La juste distance thérapeutique est déterminante dans le prise en charge d'un patient schizophrène car il faut que le patient soit en confiance (...) et en même temps il faut aussi qu'on le confronte à la réalité (...) pour trouver des mo ens de contrer ses phases d'angoisses et ses phases de délire donc il faut

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qu'on soit à la fois soignant, aidant de leur côté et en même temps qu'on les confronte aussi un petit peu avec la réalité. ». La théorie parle également de la confiance et nous dit que plus la distance est juste dans la relation entre le patient et le soignant, plus la confiance s'installera et permettra une prise en charge de qualité. De plus, D. Friard nous explique que « penser la relation seulement à partir de la distance empêche de penser la proxémie. Qui ose la relation doit donc savoir la doser pour allier les deux. Doser la relation implique de considérer la distance comme un traitement en mesurant les bénéfices qu'elle aura sur le patient », une chose que confirme donc l'IDE 1 et l'IDE 2.

Dans la théorie, le soignant doit fixer des limites dans la relation de soins et les maintenir. Ainsi, l'IDE 1 et 2 sont d'accord et ont pour cela la même façon de faire. Pour les deux infirmiers, il faut recadrer le patient pour garder cette juste distance lorsque ceci est nécessaire. L'IDE 1 rappellera au patient qu'il n'est pas son ami et qu'il est là en tant que soignant, pour l'aider. L'IDE 2 procède de la même manière que l'IDE 1. Ce dernier nous explique également qu'il appelle les patients par leur prénom mais que pour garder la bonne distance, il garde le « vous ». Il nous explique que cela va permettre « à la fois de rentrer dans leur intimité (...) et en même temps de garder le vous qui fait qu'on garde ce statut professionnel. »

Par ailleurs dans la partie théorique, la distance apparait parfois comme nécessaire dans certaines situations dans le sens où le soignant ne doit pas être trop proche du patient pour ne pas entrer dans son délire et mettre en péril la prise en charge. L'IDE 1 et l'IDE 2 sembleraient penser la même chose. En effet, pour l'IDE 2, il y a des patients pour lesquels « il ne faut pas trop être proche parce qu'on rentre dans leur bulle et eux ils nous incorporent à leur délire ». L'IDE 1 nous explique une idée similaire : « Je suis dans la juste distance dans le sens où je suis du côté du patient, des fois j'accepte certains éléments délirants sans pour autant les confirmer, c'est à dire que j'acquiesce, mais je ne rentre pas dans son délire

De plus, selon l'IDE 2, par rapport à la notion de clivage chez le patient schizophrène, le soignant peut parfois devenir le mauvais objet et il faut l'accepter et respecter ça. Elle nous dit aussi « qu'il il faut savoir être là et ne pas être là aussi, déjà pour pas que le patient soit persécuté ». L'IDE 1 est en accord avec cette idée car selon lui, la juste distance c'est à la fois être là dans les bons moments mais aussi dans les mauvais : « quand ils font des choses qui sont en dehors de la réalité, des fois les confronter à ça, ça va peut-être nous positionner pendant un temps en tant que persécuteur ».

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Enfin, dans le cadre conceptuel, il faut être humble pour passer le relais dans les situations difficiles afin de se protéger et de protéger le patient et l'IDE 2 est en accord avec ceci. Elle nous explique que l'humilité est importante car il faut pouvoir passer la main quand ceci est nécessaire pour garder une juste distance.

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7) La problématique

A l'issue de cette analyse, j'ai donc pu relever plusieurs éléments de réponse et ainsi en déduire des hypothèses en lien avec ma question de départ qui est : « En psychiatrie, en quoi la juste distance dans la relation de soin IDE avec un patient schizophrène permet-elle d'améliorer sa qualité de vie ? ».

Globalement, nous pouvons constater que la juste distance peut apparaitre comme une chose bénéfique pour le patient schizophrène. En effet, il semblerait que plus la distance est adaptée à la relation de soins, plus cela permet d'avancer dans la prise en charge et donc d'aider le patient à progresser dans sa maladie et ainsi améliorer sa qualité de vie. Comme nous l'avons vu, la juste distance n'est pas une notion figée et évolue en fonction de la dynamique de la relation mais aussi en fonction des situations et de l'évolution du patient. Cet équilibre entre « trop proche » et « trop distant » semble donc découler de la relation et du lien de confiance entre le patient et le soignant. Une relation de soins qui est également une notion importante dans la prise en charge. Cependant, la confrontation entre la théorie et la pratique, nous permet de constater une difficulté dans la relation de soins avec le patient schizophrène délirant et non accessible. En effet, il apparait plus difficile d'établir un contact avec un patient persécuté qui est dans le déni de ses symptômes. Ainsi, étant donné que la relation de soin est primordiale dans la prise en charge de la personne schizophrène mais qu'il existe une difficulté lorsque le patient est en phase aigüe de sa maladie alors nous pouvons nous questionner sur les moyens qui permet une approche thérapeutique avec le patient délirant. Quels types de démarche de soins est-il possible de mettre en place ? Comment un patient délirant en état aigu pourrait-il envisager de collaborer en toute confiance avec les soignants ? De plus, étant donné que la juste distance semble bénéfique pour le patient mais qu'elle fluctue en fonction de la relation de soin et plus précisément en fonction des situations et de l'état de la personne malade alors nous pouvons également nous demander comment trouver la juste distance thérapeutique dans la relation lorsque nous sommes face à une phase aigüe ?

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8) La question de recherche

Face à ce constat et après plusieurs réflexions, une nouvelle question m'est donc apparue :

« En quoi, l'IDE peut-elle garder une juste distance dans une relation de soin fragilisée par l'état de crise aigüe d'un patient schizophrène ? »

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius