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La maternité dans la création contemporaine, de la révolution sexuelle à nos jours


par Jennifer FEVRIER
UFR des Sciences Historiques, Université de Strasbourg - Master 2 Histoire de l'Art 2012
  

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II. Maternité et féminisme en art

A. La seconde vague féministe

La première vague féministe de la fin du XIXe et du début du XXe siècle revendiquait des droits en fonction de la condition de mère des femmes. Ces demandes visaient à l'émancipation mais ne remettaient pas en question la maternité. A partir des années 1960, en lien direct avec les évènements sociaux qui soulevèrent les foules dans différents pays Ð mai 68 en France, contestation de la guerre du Vietnam aux Etats-Unis Ð, la seconde vague du féminisme fit son apparition sur les scènes sociales et culturelles.

1. Plus fortes ensembles

Cette seconde vague féministe se développa particulièrement dans les domaines culturels et intellectuels. Comme l'explique Fabienne Dumont22, il y eut de nombreuses femmes diplômées d'écoles d'arts après la seconde guerre mondiale. Cependant, à leur sortie, on leur refusait

22 Dumont, Fabienne, La rébellion du Deuxième Sexe. L'Histoire de l'art au crible des théories féministes anglo-américaines (1970-2000), Presses du Réel, 2011

Master 2 Histoire de l'Art et Architecture Sous la direction de M. Valérie Da Costa

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La représentation de la maternité dans la création contemporaine:
de la libération sexuelle à nos jours

l'accès à une carrière en galerie ou au professorat. Pour pouvoir être reconnue comme artiste, il fallait le plus souvent être l'épouse d'un artiste célèbre. Au sein des musées, la représentation des artistes femmes était également presque nulle23. Afin de témoigner et de lutter contre le sexisme du monde de l'art, les artistes vont se regrouper et former des collectifs. Par exemple en 1970, Lucy Lippard fondera l'Ad Hoc Committee of Women Artists qui aura pour but de critiquer l'absence de femmes au sein des expositions.

Pour contrer ce refus de l'accès des artistes femmes aux cimaises, les artistes vont ouvrir également des lieux spécifiques afin d'exposer leurs travaux. Judy Chicago ouvrira notamment la Womanhouse ainsi que le Los Angeles Woman's building ou la A.I.R Gallery24 (Artists in Residence).

En France, la prise de conscience de la domination masculine dans le domaine artistique fut plus longue et moins virulente qu'outre-Atlantique. On peut néanmoins citer différents groupes fondés pour l'auto-reconnaissance des artistes-femmes, comme le collectif Femmes/Art fondé en 1976, Feminie-Dialogue fondé en 1975, La Spirale fondée en 1972, mais également la parution en 1973 de La Création étouffée, de Jeanne Socquet et Suzanne Horer. Mais ces groupes s'apparentaient plus à des groupes de soutien. Il faudra attendre les années 1980 pour que soit créée la Fondation Camille, avec le soutien du Ministère des droits des femmes, mais également pour qu'émerge une réelle ambition politique afin de mettre en lumière la création au féminin25. Cependant, ces groupes permettaient aux artistes femmes de se rassembler, de débattre et d'exposer, afin de sensibiliser le public et d'être ensuite reconnues.

2. Nouvelle esthétique au féminin

23 Voire à ce sujet la thèse de Dumont, Fabienne, Femmes et art dans les années 70: "douze ans d'art contemporain" version plasticiennes : une face cachée de l'histoire de l'art, Paris, 1970-1982 ; sous la direction de Laurence Bertrand Dorléac, thèse, université de Picardie, Atelier national de reproduction des Thèses, Lille, 2006

24 Galerie collective de femmes artistes

25 Voir à ce sujet Dumont, Fabienne, Femmes et art dans les années 70: "douze ans d'art contemporain" version plasticiennes : une face cachée de l'histoire de l'art, Paris, 1970-1982 ; sous la direction de Laurence Bertrand Dorléac, thèse, université de Picardie, Atelier national de reproduction des Thèses, Lille, 2006

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Que les artistes de cette époque de libération sexuelle se revendiquent féministes, ou au contraire tendent à s'éloigner des tumultes engendrés par les luttes et les différents mouvements, les interrogations soulevées par l'art féministe se retrouvent très souvent au sein des démarches artistiques. En investissant le domaine artistique, les féministes désiraient mettre en lumière la domination masculine qui touchait également le monde de l'art. Elles souhaitaient aussi développer une pratique artistique différente. Dès le début, ce qui sera affirmé, c'est la validité de l'expérience des femmes, devenant sujet artistique. Le recours à l'autobiographie, l'utilisation de matériaux assimilés à l'artisanat féminin, comme la couture ou le tricot, mais aussi le recours à des figures historiques oubliées26, étaient perçus comme des alternatives à un système jugé autoritaire et patriarcale. Lucy Lippard s'exprimait alors sur les différences entre artistes masculins et artistes féminines « j'étais habituée à des artistes hommes affichant une confiance en soi, utilisant le jargon approprié pour exprimer les problèmes formels - en d'autres termes « sachant ce qu'ils faisaient ». J'ai constaté que certaines femmes étaient confuses, peu sûres d'elles-mêmes, beaucoup plus vulnérables, mais en même temps beaucoup plus disposées à s'ouvrir et à ouvrir leur travail aux lectures personnelles et associatives du spectateur, à partager leur art, leur expérience et leur vie27. » Ce nouveau sens du public évoqué par Lucy Lippard est développé par Judy Chicago « la notion d'art féministe dans son ensemble, tel que j'ai tenté de le formuler, repose sur l'idée que le code formel de l'art contemporain doit être brisé pour élargir le public [É]. Ce que je désirais depuis le début était une redéfinition du rôle de l'artiste, un réexamen de la relation entre l'art et la communauté, un élargissement des personnes qui contrôlent l'art et, en fait, un dialogue élargi sur l'art incluant de nouveaux participants plus diversifiés28. » Ces nouvelles formes artistiques ainsi que ce nouveau sens du public introduit par les artistes femmes se développent notamment grâce à la performance, qui sera un des médiums phare des années soixante-dix.

Léa Lublin, par sa présence au salon de Mai en 1968, avec sa performance Mon Fils, avait pour but de dénoncer la discrimination réservée aux femmes, liée à leur probable maternité qui était perçue comme un frein à leur carrière artistique (figure 1). Lors de cette performance, elle avait

26 Voire partie III.B., Déesses-mère et matriarcat

27 Lucy Lippard citée dans Dumont, Fabienne, La rébellion du Deuxième Sexe. L'Histoire de l'art au crible des théories féministes anglo-américaines (1970-2000), Presses du Réel, 2011, p.39

28 Broude, Norma, Garrard, Mary, « Conversation with Judy Chicago », The Power of Feminist Art, p.70-71, cité dans Dumont, Fabienne, La rébellion du Deuxième Sexe. L'Histoire de l'art au crible des théories féministes anglo-américaines (1970-2000), Presses du Réel, 2011, p.117

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recrée une chambre d'enfant dans laquelle elle pratiquait ses tâches quotidiennes de maman en présence de son propre fils, pendant les heures d'ouverture du salon. Elle fit de son expérience de femme le matériau de son intervention en vue de dénoncer la place des femmes au sein du monde artistique.

Si la volonté d'ouverture du monde de l'art est attesté, cela ne va pas empêcher les artistes de parvenir, grâce au recours à leur expérience féminine au sein de leur pratique artistique, à un recentrement, une redécouverte de leur subjectivité. Après des siècles d'oppression et de domination masculine, le domaine artistique allait devenir le théâtre de la reconstruction du moi féminin.

Figure 1: Léa Lublin, Mon Fils, 1968, Salon de Mai, photographie de sa performance

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