AVERTISSEMENT
L'Université de Yaoundé II n'entend
donner ni approbation ni improbation aux opinions contenues dans ce
mémoire, qui doivent être considérées comme propres
à leur auteur.
DEDICACE
A mes défunts parents
A mon fils...
REMERCIEMENTS
Nous tenons sincèrement à remercier tous ceux et
celles qui de près ou de loin ont contribué à la
réalisation de ce modeste travail de recherche. Notre gratitude
s'adresse particulièrement :
Au Pr Ibrahim MOUICHE, pour la direction de ce travail, sa
patience, sa disponibilité et surtout ses conseils et remarques ô
combien édifiants ;
A l'université de Yaoundé 2, notamment aux
enseignants dont les cours et les conseils nous ont permis de grandir dans le
monde de la science, tout en développant nos qualités
humaines ;
SOMMAIRE
AVERTISSEMENT.............................................................................................................i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
SOMMAIRE
iv
RESUME
v
ABSTRACT
vi
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : TRAJECTOIRES DE DEPLOIEMENT DU
BIGMANISME ET MOBILISATION DU CAPITAL SOCIAL DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
29
CHAPITRE 1 : QUETE BIGMANIAQUE ET RECHERCHE DU CAPITAL
SOCIAL PAR LES ELITES URBAINES DE ZOETELE 31
SECTION I : Recherche du capital social par les
élites bureaucratiques 33
SECTION II : Recherche du capital social par les
entrepreneurs économiques
38
CHAPITRE 2 : RECHERCHE DE LEGITIMITE ET LUTTES
FACTIONNELLES
42
SECTION 1 : Recherche de
légitimité politique
44
SECTION 2 : Concurrence politique et luttes factionnelles
50
DEUXIEME PARTIE : IMPACT SOCIOPOLITIQUE ET ECONOMIQUE DE
LA RECHERCHE BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 58
CHAPITRE 3 : DE LA PORTEE POLITIQUE DE LA QUETE
BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 60
SECTION 1 : Un effet de consolidation de la domination
partisane 62
SECTION 2 : Portée politique de la quête
bigmaniaque sur les élites 64
SECTION 3: Impact politique de la quête bigmaniaque
sur les différentes factions..........................67
CHAPITRE 4 : IMPACT SOCIO-ECONOMIQUE DE LA QUETE
BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 72
SECTION 1 : Impact de la quête bigmaniaque sur le
développement de l'arrondissement de ZOETELE 74
SECTION 2 :Quête bigmaniaque: Le paradoxe d'un
facteur de développement source de son propre blocage.
73
CONCLUSION GENERALE 82
BIBLIOGRAPHIE 85
LISTE DES ANNEXES 93
TABLE DES MATIERES 100
RESUME
Le vent de la libéralisation qui a soufflé en
Afrique au début de la décennie 1990 a eu pour effet, entre
autres, de donner une nouvelle dynamique à la vie politique d'un certain
nombre de pays parmi lesquels le Cameroun. En effet, le retour au multipartisme
et, notamment le libre accès à la concurrence politique dans ce
pays a ouvert la voie à de nouveaux acteurs politiques. Ces acteurs,
constitués en majorité des élites urbaines et des big
men, ont investi le champ politique local avec l'ambition de s'y imposer.
Cette ambition constitue pour ces entrepreneurs politiques le socle d'une
multitude de démarches vouées à la quête de
légitimité politique. Parmi lesdites démarches se situe en
bonne place le bigmanisme qui est un phénomène
lié essentiellement à la redistribution, avec pour objectif
d'accroître la popularité de ceux des entrepreneurs politiques qui
s'y adonnent. Vu le caractère particulièrement concurrentiel de
l'espace politique, ce bigmanisme revêt davantage une apparence
compétitive et s'avère être ce qu'il est convenu d'appeler
la quête bigmaniaque, c'est-à-dire, une dérivation
hégémonique de la redistribution comme mode de
légitimation mettant les entrepreneurs politiques en
concurrence.
Etude ayant comme site d'observation l'arrondissement de
Zoétélé, il s'avère à l'analyse que le
phénomène de bigmanisme sous son prisme concurrentiel,
c'est-à-dire, la quête bigmaniaque est propre aux moeurs
politiques de cette localité. Les entrepreneurs politiques y recourent
incessamment soit pour rechercher la légitimité politique, soit
pour consolider leur position déja acquise. Cette quête
bigmaniaque a certes pour résultat de conduire ceux qui en ont
recours à leurs objectifs à savoir la légitimité
politique. Cependant cette stratégie n'est pas toujours porteuse des
résultats escomptés.
Cela étant, la recherche de légitimité
politique, à travers les multiples réalisations des élites
urbaines a pour effet d'influencer plus ou moins le développement de la
localité de Zoétélé.
MOTSCLES : Bigmanisme, Capital social,
Légitimation politique, Elites urbaines, Big men,
ABSTRACT
The wind of the liberalization that flew in Africa at the
beginning of the 90's brought a new dynamic in the political arenas of some
countries among which Cameroon. In fact, the return to the multipartism and,
especially the access to the political competition in that country opened a way
for some new political actors. These political actors, among whom the urban
elites, and the big men, inter alia, have reached the political arena
whit the aim to reach thear objectives. The ambition to win constituted for
those political entrepreneurs, a plinth for a multitude of strategies, set for
the quest of political legitimacy; among those strategies, there is
bigmanism, which is a phenomenon tied essentially on redistribution;
with the aim to grow the giver's popularity. Seen how competitive is the
political arena, that bigmanism appears as what is agreed to be called
the bigmaniac quest, that is to say, an hegemonic derivation of the
redistribution as a mode of legitimation putting the political entrepreneurs
into a competition.
This study was based on the subdivision of
Zoétélé's political arena. The analyses shown that the
bigmanism phenomenon, under its competitive prism is out there. The
political entrepreneurs, whose are overall the urban elites, resort it
incessantly. That bigmaniac quest leads certainly to the expected
result, bringing some of those who use it to their expected objectives, the
political legitimacy. However, the said bigmaniac quest doesn't always
lead to that political legitimacy.
The quest of the political legitimacy, through the multiple
realizations of the urban elites certainly influences the
Zoétélé subdivision's development.
KEY WORDS:Bigmanism, Capital social,
Political legitimation, Urban elites, Big men.
INTRODUCTION GENERALE
L'entrepreneuriat politique répond à un certain
nombre de réalités dont les plus marquantes sont d'ordre
socioculturel et confortées par des « logiques [dites] du
terroir »1(*)
en rapport avec la dynamique de la vie politique dans le contexte africain. Les
acteurs politiques sont ainsi amenés à construire leurs
carrières sur des bases objectives certes, mais aussi et surtout en
s'appuyant sur leurs localités d'origine. Ainsi, entreprendre une
carrière politique au Cameroun nécessite dans la plupart des cas,
d'avoir au préalable une base locale sur laquelle s'appuyer ;
«il faut être connu» pour emprunter l'expression
à Dogan Mattei.2(*)Il
s'agit, en plus de l'appartenance à un parti politique ou de sa
création par l'entrepreneur politique concerné, d'avoir une
certaine légitimité au sein de sa communauté
socioculturelle ; ladite légitimité permettant à ce
dernier d'assoir son influence en tant qu'élite politique.3(*)De plus, ce souci de
visibilité locale peut être porté par deux principales
motivations d'après Séverin Cécile ABEGA4(*) ; notamment le lien
affectif et la nécessité de garder sa place dans sa
communauté de départ, place que l'élite en question est
appelée à entretenir d'une manière ou d'une autre, sinon
elle se perd, ou devient floue.
La politique dans ce contexte est fortement liée
à la base qui cependant, sait mobiliser sa position pour profiter des
élites en quête de légitimité.5(*)Il s'agit des diverses formes de
pressions exercées par cette base là pour jouir des produits
matériels et symboliquesprocurés par l'aspirant; entre autres,
des multiples biens et services relevant du capital social
développé par ce dernier. Il en ressort que par le truchement de
cette forme de redistribution, les élites peuvent accéder
à la consécration politique escomptée. C'est dire que le
développement d'un capital social est un préalable
précieux quant à la quête de légitimité au
sein de la localité qui, faut-il le souligner, constitue un
théâtre de la vie politique ayant des répercussions
à l'échelle nationale dans la mesure où celui-ci est un
lieu de confrontation entre les élites politiques.6(*) Autrement dit, l'obtention de la
légitimité politique passe par la transformation par les
élites, de leur capital social en capital politique.7(*)Cependant, ces élites se
heurtent dans la majeure partie des cas, à l'adversité de leurs
semblables ayant les mêmes aspirations. Ce qui explique le
caractère compétitif et relativement hostile que revêt
ledit processus de légitimation politique. Cette
légitimité représente enfin le billet d'accès
à des postes électifs, entre autres. C'est en cela que tient le
phénomène de quête bigmaniaque8(*) quant à la recherche de
légitimité politique par les élites urbaines.
Le but de la présente étude, dont le titre
est : « Quête bigmaniaque et légitimation politique
locale des élites urbaines au Cameroun : le cas de l'arrondissement
de Zoétélé », est d'étudier à
partir de l'observation d'une localité, l'influence de l'activité
bigmaniaque et son impact non seulement sur le processus de
légitimation des élites urbaines mais aussi sur la
localité elle-même. Il s'agira d'analyser entre autres les
trajectoires de transformation du capital social et symbolique des
élites urbaines en capital politique àtravers les logiques dites
bigmaniaques, et ensuite d'en éprouver la portée quant
à ladite légitimation politique et son influence sur le
développement de la localité.
Comme tout travail scientifique s'appuie sur un objet bien
défini et analysé à travers une méthodologie bien
rigoureuse, nous voudrions au préalable, afin de ne pas déroger
à la règle, clarifier au préalable les concepts (I) ;
faire ensuite une revue de la littérature (II) dont le parcours des
travaux antérieurs sur la question permettra une meilleure situation de
notre objet d'étude et le lieu d'en éprouver la
spécificité. Puis s'en suivra la problématique (III) et
le bloc des hypothèses (IV) qui seront au coeur de notre
développement, la détermination du champ d'analyse (V) et enfin
les considérations méthodologiques (VI).
I - LA CLARIFICATION
CONCEPTUELLE
Emile Durkheim affirme que : « la
première démarche du sociologue doit être de définir
les choses dont il traite afin que l'on sache bien de quoi il est
question ».9(*)Madeleine Grawitz s'inscrit dans la même logique
en précisant que le concept « c'est une
représentation mentale universelle et abstraite, obtenue en retenant les
aspects essentiels de l'objet. La définition est la délimitation
par ses caractéristiques du domaine de la
recherche ».10(*)
Dans notre étude, les concepts : élite,
quête bigmaniaque et légitimation politique feront ici
l'objet d'une clarification.
A. Elite/ élites
N'ayant aucune prétention d'émettre une
définition universelle et unanime de la notion d'élite/
élites, nous parcourons, dans le cadre de la présente
étude les approches les plus pertinentes en la matière, vue la
polysémie dont peuvent faire l'objet certaines notions comme celle-ci en
science sociales.
La notion d'élite fut systématisée en
1916 par Pareto Vilfredo11(*)dont les travaux font partie de la théorie
classique (avec Mosca, Michels, Mills, entre autres). Cet auteur analysera ce
concept sous un double prisme mettant en valeur son aspect
général, tout en soulignant un autre, plus restreint.
Du point de vue global, « les
élites » renvoient à l'ensemble de ceux qui, dans
les diverses activités, se sont élevés en haut de la
hiérarchie et occupent des positions privilégiées que
consacre l'importance soit des revenus, soit du prestige.12(*)Il s'agit de ceux qui excellent
dans leurs divers secteurs d'activités et domaines socioprofessionnels.
Pareto définit « les élites » comme
des « catégories sociales composées d'individus
ayant la note la plus élevée dans leur branche
d'activité ».13(*) De ce point de vue, cet auteur parle des
« individus qui occupent les couches supérieures, dans la
figure qui représente la distribution du génie
mathématique ou poétique » voire de leur domaine
d'activité, et, qu'il conseille de distinguer avec « ceux qui
occupent les couches supérieures, dans la figure qui donne la
distribution de la richesse. ».14(*)De plus, Pareto appuie sa démarche sur des
indices de comparaison des niveaux de performance entre des individus
placés dans de différents champs d'activité quelconques au
sein de la société. Il parle ainsi de
« l'élite sportive », de
« l'élite militaire », de
« l'élite ouvrière » ou encore de
« l'élite intellectuelle», entre autres. De ce fait,
cette globalité indique la pluralité catégorielle des
élites plus que l'hétérogénéité
potentielle d'un groupe social.
Du point de vue restreint,
« l'élite » apparait comme un groupe dont
la définition même est fondée sur l'exercice du
pouvoir : « l'élite gouvernementale »
ou classes dirigeantes, qui détient effectivement le pouvoir, et
« « l'élite non gouvernementale » ou
classes dominantes, qui sans exercer le pouvoir soutient la
précédente et sert éventuellement d'intermédiaire
entrel'élite dirigeante et la masse »15(*)De ce point de vue,
l'élite renvoie à une minorité de personnes qui dirigent
ou influencent d'une manière ou d'une autre la vie sociopolitique. Mills
la désigne comme étant l'« élite du
pouvoir »,16(*) R. Aron de « classe
politique »16(*) et Bottomore d'élite dirigeante.16(*)
Gaetano Mosca parle lui de « classe politique
dirigeante »16(*)pour désigner la minorité
dominante, c'est-à-dire, celle qui détient le pouvoir dans une
société. D'après ce dernier, « dans
toutes les sociétés, depuis les moins développées
et civilisées jusqu'aux plus avancées et puissantes, apparaissent
deux classes de gens- une classe qui gouverne et une classe qui est
gouvernée. La première, toujours la moins nombreuse, assume
toutes fonctions politiques, monopolise le pouvoir et jouit des avantages qu'il
entraine ».16(*) Cette minorité organisée et consciente
constitue une classe sociale. De ce fait, elle est dotée d'une
communauté de pensée, d'intérêts, de culture, de
parenté et de puissance économique. Cette élite impose
à la majorité ses valeurs et ses principes de
légitimité. Enfin, elle est constituée d'un noyau central
dirigeant, c'est-à-dire, «les chefs
supérieurs », plus puissants que les autres, notamment
les «chefs secondaires». Le premier groupe assure la
cohésion et la force en même temps que le commandement de
l'ensemble.
L'élite pour Charles Wright Mills se compose de ces
hommes d'envergure «qui ont le plus de tout ce qu'il faut avoir,
c'est-à-dire généralement l'argent, le pouvoir, le
prestige et tous les styles de vie que ces choses permettent».17(*)
Robert Dahl lui, pense que dans les démocraties
pluralistes, le pouvoir des élites s'apparente à une polyarchie
en raison, notamment, de la multiplicité des ressources et de la
diversité des organisations. De ce fait, le pouvoir politique n'est pas
détenu par un seul groupe social homogène, mais par une
multiplicité d'élites économiques, administratives ou
culturelles quisont contraintes de s'allier selon les circonstances et de
former des compromis pour pouvoir diriger.17(*)
Dans la même lancée, Guy Rocher souligne que
l'élite renvoie aux personnes ou groupe de personnes qui par suite du
pouvoir qu'ils détiennent ou l'influence qu'ils exercent contribuent
à l'action historique d'une collectivité, soit par les
décisions qu'ils prennent, soit par les idées, les sentiments ou
les émotions qu'ils symbolisent.18(*)
Dans le même ordre d'idées, mais d'un point de vu
plus restreint, KengneFodouop souligne que l'élite représente des
personnes ayant réussi une carrière dans un domaine
quelconque (secteur économique, politique, administratif) et qui
contribuent de diverses manières au développement de leurs
localités, ceci pour des motivations personnelles, civiques ou encore
économiques.18(*)
Cette dernière approche est celle sur laquelle le
présent travail s'appuiera de façon globale. Le but étant
de démonter dans quelle mesure les élites urbaines se livrent (de
façon directe ou indirecte) une concurrence en confrontant entre autres
leurs influences ; influences liées à leurs capital social,
notamment leurs capacités de redistribution à travers diverses
actions dans le but de s'imposer dans le champ politique concerné ;
l'arrondissement de Zoétélé en l'occurrence.
Notons enfin que dans le cadre de notre étude, le
concept d'élites urbaines s'apparente à la conception d'Ibrahim
Mouiche19(*) qui
relève que les élites urbaines sont des composantes politiques,
économiques et intellectuelles qui, en fonction des ressources et
investissements qu'elles multiplient en direction de leur région
d'origine, y exercent une influence politique et y établissent des liens
de «dépendances» auprès de la population19(*).
B- Bigmanisme/ Quête
bigmaniaque
Définir la notion de quête
bigmaniaque19(*)
nécessite au préalable une compréhension de celle de
big man dont elle dérive. Notion conceptualisée en
anthropologie par Marshal Sahlins20(*) lors d'une étude comparative entre des
« grands hommes » de MELANESIE et de POLYNESIE, le
big man est « une personne que les gens suivent dans la
mesure où elle peut leur procurer des
bénéfices ».20(*) Il s'agît d'un meneur, qui, par ses efforts a
pu se distinguer de la masse et qui s'impose à un groupe par son
charisme, sa propre force ou habileté et non par héritage de sa
fonction d'un ascendant et jouit de ce fait d'une certaine influence. Yves
Faure et Jean François Medard20(*) adaptent brillamment ce modèle au contexte
africain pour mettre en exergue l'évolution de ses élites en
milieux politiques et économiques. En effet, la quête
bigmaniaque est ce processus perpétuel de quête de
visibilité et de légitimité en politique qui amène
les grands hommes en général, et les big men en
particulier, à chercher à s'ériger et à demeurer
des figures dominantes et indiscutées écrasant tout challenger en
vertu des capacités supérieures de redistribution.21(*)
Dans le cadre de cette étude, il sera question de
s'attarder sur cette capacité de redistribution des grands hommes,
c'est-à-dire, leurs différentes activités et actions
socioéconomiques et symboliques au sein de leur localité
contribuant de cette quête bigmaniaque. Aussi, il est important
de relever que tout grand homme n'est pas nécessairement un big
man du point de vue de Marshal Sahlins. En fait, le big man se
distingue du grand homme par la pratique de l'évergétisme,
c'est-à-dire, la forte capacité de redistribution pouvant lui
permettre de se distinguer. Face à ce constat, notons pour plus de
précision que toutes les élites politiques ne sont pas
nécessairement des big men et n'ont pas, à ce propos, toujours
eues recours à des logiques bigmaniaques pour se
légitimer politiquement. Dans le cadre de la présente
étude, l'aspect concurrentiel lié à cette quête
bigmaniaque retiendra particulièrement notre attention. Quant au
bigmanisme, il renvoie aux différentes actions menées
par le big man ; notamment l'ensemble des activités
économiques, politiques sociales, entre autres, permettant à ce
dernier d'influencer son environnement, généralement en sa
faveur, surtout du point de vu politique.
C- Légitimation
politique
En ce qui concerne la légitimationpolitique, elle est
le processus d'accession à la légitimité politique. Le
processus ici renvoyantdans un sens très large, à «une
évolution complexe, impliquant une coordination de causes et
d'effets».22(*)
La légitimité quant à elle, est du point de vue de D.
Gaxie «l'état de ce qui est justifié
d'exister»23(*)
et qui est admis comme tel. A partir de cette acception générale,
François Rangeons23(*) distingue deux types de
légitimité : d'abord une légitimité
liée à une activité qui serait considérée
soit comme «naturelle», soit comme « normale »
c'est-à-dire conforme aux normes sociales en vigueur, qu'elles soient ou
non codifiées par le droit.Ensuite, une légitimité
liée à un pouvoir qui serait a priori accepté, reconnu
comme valide par la plupart de ceux sur lesquels il s'exerce, quels que soient
par ailleurs les motifs de cette reconnaissance.
Par ailleurs, Max Weber distingue «trois fondements
de la légitimité»23(*) (1959 : 102). Notamment la
légitimité traditionnelle, la légitimité
charismatique et celle légale ou rationnelle. Cet auteur souligne
cependant que «dans la réalité, on ne rencontre que
très rarement ces trois types purs» de
légitimités, mais plutôt «des
variétés, des transitions et des combinaisons
embrouillées»23(*)de celles-ci. C'est dans cette optique que Karine
Gatelier24(*)
considère que la légitimité est diverse et de diverses
natures dont la légitimité électorale, la
légitimité traditionnelle, la légitimité
idéologique et celle circonstancielle, entre autres. Cependant,
précise cet auteur, dans un système démocratique, la
légitimité vient essentiellement des élections,
c'est-à-dire du type légal wébérien, bien que ce
modèle de démocratie représentative par le suffrage
universel doive cohabiter avec des pratiques de légitimation dites
traditionnelles ou locales. Cette approche est celle qui se rapproche le mieux
de la conception de la légitimation politique telle que retenue pour la
présente étude, à la seule différence que dans
notre contexte, la plupart des élites sont bureaucratiques et jouissent
davantage d'une notoriété liée à leurs
différentes réalisations dans la localité. Notons pour
mieux nous entendre que dans les périphéries ou les
localités, la légitimité est généralement
due dans un premier temps, à l'autorité ou à l'influence
charismatique propre à la conception wébérienne, ensuite
à l'élection ou à l'obtention de suffrages au profit des
partis politiques et candidats soutenus par ces élites. C'est dire que
dans ce contexte la légitimation politique passe dans la plupart des
cas par un double processus : le développement d'un charisme
à traversdans un premier temps la recherche par l'acteur d'un capital
social. Une fois acquis, ce dernier est converti en capital politique. A cet
effet, Karine Gateliersouligne que « les processus de
légitimité ne sont pas d'une seule nature mais la
légitimation a souvent plusieurs sources qu'elle concilie et plusieurs
modes ».25(*)
La clarification conceptuelle étant effectuée,
il importe à présent de parcourir de précédents
travaux scientifiques en rapport avec notre thème d'étude.
D'abord pour en évoquer les différentes approches et apports, et
ensuite pour en dégager la spécificité quant à
notre étude.
II- REVUE DE LA
LITTERATURE
Une recherche bien menée nécessite un parcours
préalable des travaux et publications liés à l'objet
étudié. A ce propos,« la revue de la
littérature est, comme » le dirait Dumez,
« le travail d'un nain qui doit réaliser que des géants
ont accumulé une montagne de savoir qu'il va falloir
escalader ».26(*) C'est dans cette perspective qu'un travail
théorique d'interrogation des processus de légitimation politique
locale des élites urbaines à travers la transformation de leur
capital social et symbolique en capital politique s'appuyant sur le
phénomène de quête bigmaniaque sera ici
effectué. Ce travail consistera pour l'essentiel, à observer les
différents apports d'auteurs sur le binôme quête
bigmaniaque (notamment la mise en exergue du capital social,
symbolique et économique), et légitimation politique. A cet
effet, on peut constater globalement une double tendance. La première
porte sur les approches mobilisationnistes et interactionnistes, la
manière avec laquelle les élites gagnent en
légitimité politique grâce à des logiques dites
bigmaniaques. La seconde thèse consolide la première
mais insiste davantage sur les limites, mieux, les dérives de ces
logiques.
Selon la première thèse, l'activité
bigmaniaque représente un atout dans la quête de
légitimité politique comme le démontre Ibrahim mouiche
dans son ouvrage « Démocratisation et intégration
sociopolitique des minorités ethniques au
Cameroun ». 27(*)Soulignant que la politique au Cameroun est aussi
basée sur le bigmanisme, cet auteur montre comment cette
activité constitue un élément de positionnement et de
valorisation de leur image par les élites ou les politiciens en
quête de légitimité. En effet, l'élite met en
exergue son capital social, symbolique et économique à travers
une diversité d'actions et de réalisations au profit d'une
communauté (sa localité d'origine dans la majeure partie des
cas). Toutes choses qui participent de l'amélioration de l'image de ce
dernier tout en augmentant son influence. Notamment son capital social qu'il
pourrait éventuellement convertir en capital politique,
c'est-à-dire en légitimité auprès de
l'électorat.
A ce propos, les élites mobilisent des ressources de
nature diverse pour atteindre leurs objectifs. C'est dans cette mesure
qu'Ibrahim Mouiche souligne que « [les] ressources sont aussi des
« biens », des « choses » rares,
assimilables à des valeurs échangeables ou plus
précisément à de l'argent ou de la monnaie [...] La
société est conçue comme un marché
économique où des biens sont changés et investis pour
produire du pouvoir ».28(*)De ce point de vue, les ressources sont des biens
propres aux élites, des richesses matérielles, entre autres,
mobilisées et redistribuées sous diverses formes, et constituant
les enjeux de domination ou d'actions.
Les élites mettent ainsi en valeur leur capital social
à travers diverses ressources pour se positionner dans l'espace
sociopolitique.
Dans la même perspective, et pour une autre
contribution, nous avons cet apport du même auteur qui s'attarde
davantage sur l'impact du bigmanisme dans le processus de légitimation
politique, surtout locale. En effet, dans son article intitulé
«Processus de démocratisation et rotation locale des
élites au Cameroun ».29(*)Ibrahim MOUICHE analyse la dynamique de
renouvellement des élites dans la sphère politique locale au
Cameroun dans le nouveau contexte de multipartisme démocratique de la
décennie 1990. Cet auteur démontre à travers quelques
études de cas, l'impact de la redistribution comme élément
important de développement du capital social et politique. Dans un
contexte sociopolitique qui quelques années plus tôt ne
connaissait pas de compétitions politiques ouvertes, et dans lequel
seule une certaine catégorie de personnes (plus ou moins
privilégiées par le système politique alors en vigueur)
prenait part aux activités politiques. Parmi lesdites personnes
privilégiées, il y avait les chefs traditionnels, notamment dans
les différents cas étudiés, sa Majesté
NgniéKamga Joseph dans la localité de Bandjoun et sa
Majesté Ibrahim MbomboNjoya dans la localité de Foumban. Le
nouveau contexte de libéralisation mentionné plus haut,
favorisera l'émergence de nouvelles élites dont (respectivement
opposées aux chefs traditionnels dans les deux cas cité plus
haut) l'industriel Fotso Victor et le haut fonctionnaire reconverti en
politique AdamouNdamNjoya. La notoriété de l'un consacrée
par la puissance économique, et celle l'autre par l'influence
charismatique, entre autres. C'est dans cette perspective que le présent
auteur montre, en s'appuyant sur ces deux cas étudiés dans la
région de l'ouest, comment cet avènement de nouveaux acteurs sur
la scène politique par le truchement du libéralisme a
généré un renouvellement, soit, une rotation de
l'élite, du point de vue politique. La fonction politique, dont celle
municipale en l'occurrence est au centre de cette analyse.
Cette contribution permet de voir le poids de la
notoriété et de la redistribution comme étant des
éléments de légitimation politique importants, ayant
permis de renverser (politiquement) même des chefs traditionnels,
autrefois « intouchables ».
A côté de cette contribution, on a celle d'Alexis
FERRAND qui parle du capital social comme étant en quintessence un
échange. En effet, dans un article intitulé
« capital social commeéchange social ».30(*) Cet auteur appuie son
analyse sur la définition de la notion de capital d'après Pierre
Bourdieu30(*) et J.
Coleman30(*). Il
démontre que seule la théorie de l'échange pourrait rendre
compte de la circulation des ressources. Se référant aux
études de Coleman, l'auteur se propose de définir le
crédit réputationnel comme l'équivalent universel
permettant (dans la majeure partie des cas) à des
« élites » de consolider leur position sur
l'échiquier social. A cet effet, il s'appuie sur P. Bourdieu pour
montrer que « l'étendue du capital social que
possède un agent particulier dépend de l'étendue du
réseau des liaisons qu'il peut effectivement mobiliser et du volume du
capital (économique, culturel ou symbolique) possédé en
propre par chacun de ceux auxquels il est lié ».31(*) De plus, cet auteur
affirme avec Radcliffe Brown qu'il s'agit là « [d'] un
complexe de relations sociales ».32(*)Autrement dit, « l'individu et ses
relations immédiates, qui l'insèrent dans le macro-réseau
d'une collectivité. Il est constitué par l'ensemble
-spécifique à chaque acteur- des ressources détenues par
les connaissances qui composent son réseau personnel. Ce réseau
ne serait pas un donné social, constitué une fois pour toutes
[...] mais le produit du travail d'instauration et d'entretien qui est
nécessaire pour produire des liaisons utiles et durables, propres
à procurer des profits matériels ou
symboliques ».32(*)
Pris dans notre contexte, cet apport permet de voir la
nécessité d'entretenir des relations d'échanges favorables
à l'entretien de leur capital social par les élites urbaines,
notamment au niveau du terroir.
Un autre apport non négligeable est celui
d'AlawadiZelao qui met en exergue la place du bigmanisme traditionnel
consacré par le pouvoir centro-étatique dans le contexte
monolithique autrefois en vigueur au Cameroun. En effet, dans son article
«élites traditionnelles et domination dans le champ politique
local : illustration à partir de l'arrondissement de
Tokombéré dans l'extrême nord Cameroun».32(*) L'auteur s'attarde
notamment sur la légitimation politique des chefs traditionnels,
notamment les lamidos, par l'Etat et leur « position quasi
hégémonique dans la société politique
locale »33(*). En effet, l'auteur précise que à
« Tokombéré, ce sont les chefs traditionnels qui
constituent l'essentiel des conseillers municipaux de la commune de cet
arrondissement. Le maire actuellement en poste, BoukarTikre, qui a
été élu aux élections municipales du 30 septembre
2013 est lamidodu canton de Makalingai à l'instar de ses homologues des
autres arrondissements du département du Mayo-Sava ; à
savoir le maire de Kolofata, SeiniBoukar Lamine, lamido de la même ville
et le maire de Mora, AbbaBoukar, Notable au sultanat de Mora. Au parlement
siègent également les chefs traditionnels. Le cas le plus
emblématique est celui de CavayeYéguié Djibril,
député de Tokombéré et président de
l'Assemblée nationale depuis 1992 »34(*). Cet auteur souligne
ainsi l'omniprésence des autorités traditionnelles à des
postes privilégiés. Il insiste sur le fait que, bien
qu'étant politiquement légitimés « par le
haut », cet état des faits se traduit par le poids
socioculturel dont jouissent préalablement ces autorités
traditionnelles. Cela justifierait l'émergence des chefs en tant que
figures dominantes et influentes de l'espace politique de leurs
localités. Zelao affirme à ce
propos : « la perspective bigmaniaque
développée par la sociologie politique africaniste met en relief
le rôle des acteurs de premier plan dans la modulation de la scène
sociopolitique dans l'environnement socioculturel»35(*).
Cette contribution montre l'aspect de la légitimation
politique des big men locaux et autres élites locales, non pas
par la redistribution mais par une simple conversion consacrée de leur
pouvoir traditionnel et charismatique en pouvoir politique ; une
configuration lamidale de la société politique locale
à Tokombéré.
Dans le cadre de notre étude, il sera question
d'éprouver la probabilité de ces hypothèses dans
l'arrondissement de Zoétélé. Analyser l'apport du
bigmanisme, et, notamment, son aspect concurrentiel en ce qui concerne
la course à la légitimité politique des élites
urbaines de cette localité.
La deuxième thèse quant à elle, sans
toutefois remettre en question la première, la consolide tout en
insistant sur les dérives liées à des logiques
bigmaniaques.
Dans un premier temps, nous avons les travaux de Jean
François Médard et Yves Faure36(*) qui mettent en exergue l'impact des logiques
bigmaniaques dans la consolidation des positions de domination des
élites. Ces auteurs analysent avec pertinence la manière avec
laquelle les élites en général, et les big men en
particulier, dont les élites politico-administratives mobilisent des
ressources de toutes natures pour entretenir leur légitimité, ou
pour accéder à cette dernière. Situant leurs analyses dans
le contexte africain, ces auteurs montrent l'entretien de factions par les
élites urbaines, notamment au sein de leurs terroirs.
Cependant Médard et Faure mettent en lumière le
caractère quelque peu douteux de l'origine des ressources
mobilisées par les élites urbaines dans leurs recherches
bigmaniaques. De ce point de vue, ils analysent la compétition
bigmaniaque, non pas comme un moyen d'obtenir de la
légitimité, mais plutôt sur les effets néfastes que
cause l'obsession qui la caractérise ; notamment en ce qui concerne
les méthodes d'accumulation des richesses et des ressources servant aux
big men et autres élites à entretenir leurs courtiers et
à assoir leur légitimité, de même que leur influence
à l'échelle locale ou nationale ; ceci en fonction de leurs
ambitions politiques. C'est ainsi qu'ils précisent que
« tel Etat (ivoirien) peut-il apparaitre « comme un
conglomérat de positions de pouvoir dont les occupants sont en mesure
à la fois de s'assurer à eux-mêmes de substantiels revenus
et de répandre autour d'eux places, prébendes, gratifications et
services »37(*). De plus, ces auteurs insistent sur l'aspect
néo-patrimonial, soulignant que « processus par lequel
à la fois le politique est réduit à l'économique
et, d'une certaine manière, l'économique au
politique »38(*). Ils poursuivent en soulignant
qu' « en régime patrimonial, pouvoir politique,
richesse et prestige sont largement confondus. Ils finissent par se coaguler
dans un processus complexe et cumulatif. Mais à l'origine, ce n'est pas
tant la richesse qui est source de pouvoir que le pouvoir qui est la source de
la richesse. Le pouvoir étant à l'origine des occasions
d'enrichissement il prend par là même une nature
économique »39(*)
S'inscrivant dans la même logique, Jean François
Bayart40(*) raisonne lui,
en termes de formation d'une classe dominante et de recherche
hégémonique. D'après ses analyses, les interactions
bigmaniaques entre les grands hommes et leurs factions ne
relèveraient que de l'échange de services, échanges dont
dépendrait la recherche bigmaniaque elle-même. De ce
point de vue, la légitimation politique ne tiendrait qu'aux dons et
services qu'offrent les dominants, c'est-à-dire, les big men ou
les élites urbaines aux clients que sont les populations locales. De
plus, ce dernier insiste sur les dérives patrimoniales auxquelles
conduit la quête bigmaniaque quant à la recherche de
légitimité par les élites urbaines. Notons à cet
effet que le patrimonialisme, selon Max Weber41(*)est un type idéal de domination traditionnelle
fondé sur l'absence de différenciation entre le public et le
privé.
On a en outre les travaux de Laurent Pierre Joseph41(*)qui mettent en exergue la
théorie de la « dépendance-obligation ». En
effet, en étudiant le cas des interactions entre un big man
local et sa communauté, cet auteur a démontré que les
membres de ladite communauté se comportaient comme des courtiers.
Toujours obsédés par l'idée de tirer avantage du big
man en lui extirpant à la moindre occasion, quelques biens de
toutes natures. De son côté, le big man en
réagissant favorablement à ces sollicitations entretient la
« soumission » et la collaboration de ces courtiers
à son égard. Ce dernier tiendrait donc son statut (entre autres,
légitimité politique, postes électifs) de sa
capacité à organiser une rente, dont une partie alimente les
réseaux (réseaux constitués de courtiers). Ces
différents réseaux possédant en commun, et pour diverses
raisons la capacité d'obliger le leader, c'est-à-dire le big
man, tout en se soumettant à lui. Bien qu'ayant centré ses
travaux sur l'aspect de la corruption comme impact de la quête
bigmaniaque, il n'en demeure pas moins que cette dernière est
clairement mise en exergue à travers le tandem obligation (corruption du
big man en l'obligeant) et dépendance (corruption des membres
du réseau en leur offrant).
Dans la même dynamique, nous avons une fois de plus
Ibrahim MOUICHE41(*) dont
les travaux s'attardent sur le caractère quelque peu biaisé de la
démocratie post libéralisation au Cameroun. Observant les
différentes échéances électorales depuis 1990, et,
s'appuyant sur le concept de «bigmanisme politique», il met
en exergue l'impact des référents identitaires sur la politique
camerounaise. En effet, depuis l'avènement du multipartisme ici, le
constat selon lequel la politique est basée plus sur les
personnalités que sur les projets et autres idéologies
proposés par les candidats est pertinent. S'attardant sur une
expérience de terrain42(*) cet auteur montre qu' « il s'agit
bien davantage d'une politique de rassemblement derrière quelqu'un en
vue. Les partis politiques vont surtout placer en tête de liste des
candidats à l'aura certaine qui se sont déjà
illustrés par leurs actions au village. Ces élites rassembleront
plus les électeurs sur leurs noms que sur leur programme
[...] ».43(*) Les électeurs votent ainsi pour les
élites qui redistribuent au village. Le concept de
« bigmanisme politique » permet ici de voir les
dérives néo-patrimoniales liées à la
personnalisation du pouvoir, le clientélisme et la corruption. La
politique d'après cette analyse est mue par les « pressions
ethniques » ; la redistribution garantissant le soutien du
terroir aux élites urbaines et aux big men.
Ces deux différentes postures théoriques seront
mobilisées dans le cadre de notre étude. Il sera question
d'observer, à la lumière de ces différentes contributions
théoriques, l'impact, et éventuellement les dysfonctionnements
liés au phénomène de quête bigmaniaque
dans l'arrondissement de Zoétélé.
III-LA PROBLEMATIQUE DE
L'ETUDE
La problématique d'après Bernard Dionne est
«la mise en perspective de l'ensemble des liens qui existent entre les
faits, les acteurs et les composantes d'un problème
donné».44(*) La construction de notre problématique suivra
cette démarche
Depuis la libéralisation politique des années
1990 au Cameroun, on constate que la compétition politique est une
réalité. Cette compétition, à bien des
égards, est encore plus relevée au niveau des localités de
par les paramètres socioculturels propres à ces arènes
politiques périphériques et le nombre de places, mieux de
positions de pouvoir limitées auxquelles ont accès les
candidats ; candidats qui pour la plupart sont des fils du terroir ayant
fait fortune ailleurs (dans la haute administration ou dans les affaires, entre
autres). Ces derniers se livrent une concurrence quasi incessante à
travers divers domaines, donnant ainsi jour au phénomène de
quête bigmaniaque. C'est à cet effet qu'on observe des
grands hommes ou fils du terroir transformer leur capital social,
économique et symbolique en capital politique. A titre d'exemple, citons
le cas de l'entrepreneur Victor Fotso. Ce dernier, grâce à son
évergétisme, notamment les différentes réalisations
sociales et économiques contribuant au développement du terroir
qu'il a faites, s'est imposé comme figure dominante dans la
localité de Bandjoun, accédant par là même à
la légitimité politique se matérialisant par son
élection au poste de Maire de la commune de Bandjoun.45(*)
Dans le cas de l'arrondissement de
Zoétélé, on observe de part et d'autres un certain nombre
d'investissements sociaux réalisés par des fils du terroir tels
que la construction de centres de santé, des marchés et des
salles de classe, entre autres. En contribuant ainsi au développement de
la localité, ces fils du terroir gagnent en popularité ;
popularité qu'ils mobilisent généralement dans le champ
politique.
Du point de vue compétitif, on observe entre les
prétendants à l'élite politique locale ici, une
concurrence très relevée dans la mesure où cet
arrondissement se situe dans une aire socioculturelle particulière. En
effet, il s'agit de la région du Sud Cameroun, constituée dans sa
quasi-totalité de sociétés de type lignagère,
c'est-à-dire, sans chef et sans une forme d'autorité centrale
structurée et organisée de façon complexe. Ainsi,
l'accès à l'autorité et à son exercice dans ces
sociétés à fonction politique diffuse à l'origine
se mérite entre autres par la démonstration de capacités
« supérieures » ou particulières, notamment,
un talent suscitant le respect et l'admiration de l'ensemble de la
communauté et profitant éventuellement à cette
dernière. Autrefois ce talent pouvait être celui de chasseur, de
guérisseur ou de guerrier. De nos jours il s'agit de ceux-là
ayant mobilisé une forte capacité de redistribution en terme de
biens matériels et symboliques, en plus de diverses réalisations,
tel que mentionné plus haut. Dans le cadre de notre étude, nous
nous attarderons sur des entrepreneurs économiques tels que
MengueNkili ; Bikié Rose; d'élites politico-administratives
à l'instar de Rémy ZeMeka ; Jean Jacques Ndoudoumou ;
Belinga Eboutou ; Polycarpe Abah ; Edgar Alain MebeNgo'o ; entre
autres.
Par ailleurs, Ces élites affirment leur appartenance
à la communauté à travers leurs différentes
réalisations et leur participation au développement de la
localité. Cependant, ladite communauté exerce une certaine
pression sur ses élites. Le digne fils du terroir est donc
celui-là qui redistribue et dont on peut « palper »
les fruits de la réussite. Peter Geschiere souligne à cet effet
que « les villageois voient « leurs »
élites urbaines comme des défenseurs attitrés de leurs
intérêts à l'extérieur »46(*). De ce fait, les
rapports élite-village deviennent des rapports clés, minés
d'ambiguités mais d'une signification profonde pour les deux parties.
L'observation des précédents cas de figures nous
conduisent au questionnement suivant :
Comment se manifeste le phénomène de quête
bigmaniaque dans l'arrondissement de
Zoétélé ?
A cette question principale s'ajoutent d'autres, à
savoir :
Comment la quête bigmaniaque contribuet'elle
à légitimer politiquement les élites urbaines dans
l'arrondissement de Zoétélé ?
La recherche bigmaniaque, au-delà du jeu
politique, a-t-elle une influence sur le développement de cette
localité?
La quête bigmaniaque est-elle toujours
bénéfique pour cet arrondissement, ou plutôt porteuse de
dysfonctionnements ?
IV- HYPOTHESES DE
L'ETUDE
L'hypothèse d'après Raymond Trembley et Yvan
Perrier47(*), est une
supposition qui est faite en réponse à une question de recherche.
Dans cette perspective, notre étude s'articule autour d'une
hypothèse principale, suivie de quelques hypothèses secondaires.
L'hypothèse principale est la suivante :
La quête bigmaniaque se déploie dans
l'arrondissement de Zoétélé à travers la mise en
exergue de leur capital social, économique et symbolique par les
élites urbaines. Il s'agit d'une mobilisation de leur influence et de
leurs ressources matérielles, financières et économiques
au service de la communauté à travers diverses
réalisations et apports en vue de gagner davantage en capital social.
Hypothèses secondaires :
La quête bigmaniaque est un facteur important,
quasi indispensable dans le champ politique de l'arrondissement de
Zoétélé au regard de la place qu'elle occupe dans le
processus de légitimation des élites urbaines.
Les élites urbaines contribuent au développement
de l'arrondissement de Zoétélé à travers
l'activité bigmaniaque à laquelle elles se livrent pour
la plupart, notamment pour les candidats qu'elles soutiennent, lorsqu'elles ne
sont pas elles-mêmes candidates auxdits postes électifs.
Les élites urbaines s'investissent politiquement en
soutenant d'autres acteurs politiques dans l'espoir de tirer profit de la
réussite desdits acteurs, ou pour conforter leurs propres positions.
Enfin, bien qu'étant un élément capital
dans le processus de légitimation politique au sein de l'arrondissement
de Zoétélé, la recherche bigmaniaque n'est pas
toujours porteuse d'attendus positifs au regard des dysfonctionnements auxquels
elle peut aboutir, dont le sous-développement, des luttes factionnelles,
cause de nombreuses frustrations, etc.
V- LA DETERMINATION DU
CHAMP DE L'ETUDE
Zoétélé (en langue fong :
Eléphant debout) se situe dans la région du Sud Cameroun, dans le
département du Dja et Lobo. La ville est le chef-lieu de
l'arrondissement qui porte le même nom. Créée, du point de
vue historique en 1954, le village d'OyonoEyamo, grand chef du peuple fong que
l'on avait surnommé « Zoétélé »
c'est-à-dire l'éléphant debout, à cause de sa
grande stature et de son charisme, a en effet été
érigé en poste administratif le 08 juillet 1954, puis en
district en 1958 et enfin en arrondissement en 1962.Cet arrondissement compte
de nos jours une population d'environ 50000 habitants dont 13000 dans le centre
urbain.48(*)
L'arrondissement de Zoétélé est un
terroir fong, sous-groupe ethnique béti. Les fong sont en effet une
société lignagère par excellence et factionnelle,
l'autorité coutumière chez les fong est
généralement détenue et exercée par les patriarches
qui en maîtrisent les contours. Ce sont en effet les gardiens et les
héritiers de la tradition. Le peuple fong est composé de
différents clans et groupements (quelquefois en compétitions pour
des raisons socioculturelles et/ou politiques) parmi lesquels :
- le groupement MvogMezang;
- le groupement MvogZomo;
- le groupement Mvog Ella;
- le groupement MvogZang;
- le groupement Esse;
- le groupement Yemfeck.
La scolarisation dans cet arrondissement connait quelques
difficultés à cause du déficit infrastructurel, surtout en
zone rurale. Notons néanmoins qu'on y compte quarante-huit (48)
écoles primaires dont trois (03) privées et quarante-cinq (45)
publiques, huit (08) écoles maternelles. Le centre urbain abrite quatre
(04) écoles publiques dont deux privées et trois (03)
écoles maternelles. L'enseignement secondaire compte trois (03)
collèges d'enseignement secondaire (CES), un lycée d'enseignement
général, un (01) lycée d'enseignement technique.
L'activité socio-économique ici est diverse bien
que n'étant pas très développée, elle est souvent
exercée à l'échelle familiale. On y exerce
l'agriculture,la pêche, la chasse (légalement encadrée),
l'élevage. D'autres activités plus lucratives s'y exercent aussi.
Il s'agit de l'agro foresterie, la foresterie, la micro finance regroupant
plusieurs associations dont des tontines et des groupements d'initiatives
communes (GIC), entre autres ; enfin le commerce et l'artisanat.
Du point de vue politique, Zoétélé est
une arène politique très active, surtout en période
électorale. Le RDPC49(*), parti au pouvoir y est fortement installé et
compte dans ses rangs la plupart des grands hommes et des membres de
l'élite politico-administrative, économique et traditionnelle de
l'arrondissement, entre autres. Ces différentes catégories
d'acteurs se livrent une concurrence farouche soit pour la conquête des
positions de pouvoir, soit pour de l'influence. A côté de ce
parti, on compte des partis dont l'influence est relative, tels que le
SDF50(*) et
l'UNDP51(*), entre
autres.
Zoétélé est un arrondissement qui
rencontre de nombreuses difficultés infrastructurelles et
économiques qui souvent, deviennent de grands enjeux quant à la
légitimation politique locale des élites urbaines dont les
populations attendent souvent des réalisations, qu'elles soulagent leurs
difficultés ; c'est le cas notamment en ce qui concerne les
infrastructures routières, scolaires, les besoins en eau, en
électricité, etc. C'est donc dire que la redistribution ici est
un élément important quant à ce processus de
légitimation.
VI- CONSIDERATIONS
METHODOLOGIQUES
A- Les méthodes
d'analyse : l'ethnométhodologie et la méthode
interactionniste
D'après Madeleine GRAWITZ52(*), la méthode est
l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline
cherche à atteindre les vérités quelle poursuit, les
démontre, les vérifie.Dans le même ordre d'idées,
Mucchielli lui, la définit comme étant une
« procédure de réflexion [...] qui mène
à une meilleure connaissance d'un
phénomène »53(*). Dans notre cas, elle permettra, à
travers l'agencement de « certaines techniques d'investigation
propres à larecherche »54(*), une meilleure appréhension du
phénomène étudié, notamment la légitimation
politique locale des élites urbaines dans l'arrondissement de
Zoétélé.
1-L'ethnométhodologie
L'ethnométhodologie, dont les principaux
précurseurs sont Talcott Parsons et Alfred Schutz, a été
développée par Garfinkel dans les années 1960 aux Etats
unis. Ce dernier met en exergue le concept des ethno méthodes,
c'est-à-dire, des procédures qui constituent ce qu'il appelle
« le raisonnement sociologique pratique » des
acteurs sociaux eux-mêmes. A propos des recherches en
ethnométhodologie, Garfinkel les définit et les situe
ainsi : « celles-ci analysent les activités de la vie
quotidienne en tant que méthodes des membres pour rendre ces mêmes
activités visiblement rationnelles et rapportables à toutes fins
pratiques, c'est-à-dire « descriptibles »
(accountable) comme organisations des activités ordinaires de tous les
jours ».55(*) En
effet, l'ethnométhodologie s'institue sur la reconnaissance de la
capacité réflexive et interprétative propre à tout
acteur social ; autrement dit, sur la « connaissance
pratique »56(*). Elle substitue le concept de modèles à
celui de processus. Garfinkel pense à cet effet que là où
d'autres voient des données, des faits, des choses,
l'ethnométhodologie voit un processus à travers lequel les traits
de l'apparente stabilité de l'organisation sociale sont continuellement
créés. Ainsi, l'une des principales quêtes de
l'ethnométhodologie est l'observation attentive et l'analyse des
processus dans les actions et interactions des acteurs sociaux qui permettent
de décoder les procédures d'interprétation de la
réalité sociale. Ellese concentre sur le sens que des personnes
donnent à leurs actes, même s'ils sont parfois en contradiction
avec ce que leur entourage pourrait penser ou déduire ; Garfinkel
parle alors de « rendre visible des scènes
banales »57(*)Coulon(1987, 124, citant Garfinkel) ajoutera
à ce propos que « La réalité objective des
faits sociaux, en tant que toute société est produite localement,
est naturellement organisée, est réflexivement descriptible, est
un accomplissement continu et pratique, en tant que cette réalité
objective est partout, toujours, seulement, exactement et entièrement le
travail des membres, elle est le phénomène fondamental de la
sociologie »58(*)
L'ethnométhodologie nous permettra donc de prendre avec
la plus grande attention, le point de vue des acteurs concernés, mieux,
impliqués et influencés par notre objet de recherche à
savoir l'impact du bigmanisme sur le processus de légitimation
politique locale des élites urbaines dans l'arrondissement de
Zoétélé ; en effet cette méthode d'analyse, au
regard de ses postulats dont la pratique quotidienne, la
réflexivité, la notion de membre entre autres, permettra de
mieux appréhender le sentiment et le vécu, bref le sens que les
différents acteurs (actifs et passifs) du jeu politique dans
l'arrondissement de Zoétélé donnent à leur
implication dans ce processus. Aussi, cette méthode nous permettra de
mieux éprouver, au-delà du jeu politique la manière avec
laquelle les populations concernées perçoivent, vivent et
ressentent les effets du bigmanisme politique, tant du point de vue
socioéconomique que socioculturel. Il s'agira en fait, de comprendre
leur appréciation du développement de l'arrondissement lié
à la quête bigmaniaque ou alors des tares
apportées par cette dernière.
2- La méthode
interactionniste
Par interaction, « Goffman entend à [...]
les influences réciproques que [des personnes exercent] sur leurs
actions respectives, lorsqu'ils sont en présence physique les uns des
autres».59(*)
La méthode interactionnistes consiste en l'étude
des grandes organisations, représentatives des sociétés
contemporaines et dont le but est d'élaborer une théorie
générale des systèmes culturels contemporains mettant
l'accent sur l'étude du comportement des individus en situation avec
d'autres. Il s'agit d'une démarche scientifique basée en
quintessence sur une double approche dont l'interactionnisme symbolique et
l'analyse stratégique.
En ce qui concerne l'interactionnisme symbolique, il s'agit,
d'après Erving Goffman, de concevoir la
société dans une perspective de mise en scène de la vie
quotidienne par l'affectation d'un coefficient de symbolisme à toutes
les interactions par le jeu de communication. D'après cet auteur, les
relations individuelles sont des actes de représentations
théâtrales.60(*) Becker soutient qu'il s'agit d'un programme
spécifique d'analyse du social. Considérant qu'aucune situation
ne peut se déduire mécaniquement d'un système, mais
plutôt de la construction de sens que réalisent les participants
au travers de leurs interactions.61(*)
Parlant de l'aspect stratégique de l'interactionnisme,
Michel Crozier62(*)
souligne que chaque individu « est aussi et avant tout une
tête,c'est-à-dire une liberté ou, en termes plus concrets,
un agent autonome qui est capable de calcul et de manipulation et qui s'adapte
et invente en fonction des circonstances et des mouvements de ses
partenaires » ; il est question pour cet individu
d'accroître sa liberté de manoeuvre tout en essayant de
réduire celle des autres. Autrement dit, « le jeu concilie
la liberté et la contrainte. Le joueur reste libre, mais doit, s'il veut
gagner, adopter une stratégie rationnelle en fonction de la nature du
jeu et respecter les règles de celui-ci »63(*).Cette méthode d'analyse
permet, du point de vue de Jacques Lagroye « de comprendre et de
vérifier quel type de relation relie diverses unités sociales et
structure les rapports que les unités entretiennent».64(*) De ce fait, l'usage des
expressions « jeu » et
« marché » permettent de rendre compte des rapports
de pouvoir et les relations entre agents dans une perspective relationnelle et
dans des systèmes d'interaction. Cette méthode cherche à
expliquer pourquoi telle unité sociale participe à l'interaction,
ses intérêts à «entrer dans le jeu», les
comportements qu'elles parviennent à imposer et les ressources dont
elles disposent dans la compétition. David Le Breton lui, souligne que
« pour l'interactionnisme, l'individu est un acteur interagissant
avec les éléments sociaux et non un agent passif subissant de
plein fouet les structures sociales à cause de son habitus ou de la
«force » du système ou de sa culture
d'appartenance».65(*)
Ces deux aspects de la méthode interactionnistenous
permettront d'étudier plus en profondeur les types de relations entre
les différents acteurs interagissant dans l'univers d'analyse à
savoir les élites. Ensuite, elle nous permettra de mettre davantage en
exergue les relations d'échanges, de pressions et de positionnement
entre ces élites et les populations locales en fonction des
différents intérêts de part et d'autres. En effet, il sera
question d'étudier les interactions entre les élites urbaines en
quête de légitimaté politique dans la localité de
Zoétélé à travers l'activité
bigmaniaque d'une part ; ensuite d'analyser les interactions
entre ces élites et les acteurs représentant la communauté
locale, soit l'électorat. De plus, nous nous attarderons davantage sur
les différentes ressources mobilisées par les grands hommes et
les élites (bureaucratiques, économiques, intellectuelles, etc.)
pour peser sur l'échiquier politique local, c'est-à-dire, compter
parmi les « dignes » fils du terroir ; enfin de
montrer les différentes influences exercées de part et d'autre
entre les élites urbaines, les élites et les populations, les
populations entre elles selon les intérêts (économiques,
politiques, etc.) de clans ou de factions.
B- Les techniques de
collecte des données : la recherche documentaire, l'entretien et
l'observation participante
Pour M. GRAWITZ66(*), toute recherche
scientifique « doit comporter l'utilisation des
procédés opératoires rigoureux bien définis,
transmissibles, susceptibles d'être appliqués dans les mêmes
conditions, adaptés au genre de problème en cause : ce sont
là des techniques ». Les techniques choisies nous ont
permis de collecter des informations importantes quant à la
compréhension de la légitimation politique locale des
élites urbaines à travers l'activité bigmaniaque
dans l'arrondissement de Zoétélé. Il s'agit de l'analyse
documentaire, l'entretien et l'observation participante.
1- La recherche
documentaire
La recherche documentaire d'après G.R. ASSIE et R.R.
KOUASSI consiste en « la collecte d'informations à travers
des documents et supports divers »67(*) dont entre autres « des documents
écrits, sonores, visuels, audiovisuels ou des
objets »68(*). Autrement dit, c'est le traitement intellectuel
de documents servant à décrire et à caractériser le
contenu d'un document en y repérant des éléments
d'informations essentiels et en les « traduisant » sous une
forme concise et précise.
La technique documentaire nous a permis de parcourir des
ouvrages généraux, des articles plus ou moins
spécialisés, la visite de sites internet
spécialisés (sur la vie politique, les institutions
étatiques tutélaires des institutions politiques locales, sur
l'arrondissement de Zoétélé, entre autres). Lesdits
documents ont été consultés entre autres dans les archives
de la mairie de Zoétélé, des articles et documents de
presse tant écrite que numérique (notamment
cameroon-tribune.cm ; Zoétéléactu.com ;
Nkul-beti-camer.com ; arte.tv ; cameroon-info.net, etc.), des sites
institutionnels (minatd.cm ; statistics-cameroon.org ; rdpcpdm.cm,
etc.), des sites de publications scientifiques et des oeuvres de recherches
(dont les sites leportique.revue.org ; cairn.info ;
cerium.umontreal.ca ; editions-harmattan.fr ; karthala.fr ;
persee.fr ; politique-africaine.com, mémoire-online.org ;
etudeafricaines.revue.org). Nous avons aussi eu accès à des
documents privés de l'ancien maire de Zoétélé, Mme
MENGUE NKILI. Tous ces documents nous ont donné d'avoir une meilleure
connaissance de la vie sociopolitique de la localité de
Zoétélé.
2- L'entretien
L'entretien d'après Madeleine Grawitz69(*) est un
«procédé d'investigation scientifique, utilisant un
processus de communication verbale, pour recueillir des informations en
relation avec le but fixé». L'entretien permet, d'après
Ibrahima Lo70(*)
d'instaurer un échange au terme duquel l'interlocuteur exprime ses
perceptions d'un évènement ou ses expériences. Cette
technique a pour avantage, entre autres, de faciliter l'analyse du sens que les
acteurs donnent à leurs pratiques et aux évènements
auxquels ils sont confrontés, autrement dit, une certaine profondeur de
l'analyse des éléments recueillis à travers notamment une
souplesse du dispositif permettant de récolter les témoignages et
les interprétations des interlocuteurs en respectant leurs propres
cadres de références.
Cette technique nous a permis d'aller à la rencontre
des acteurs dont certaines élites, des citoyens ordinaires, entre
autres, pour découvrir la manière dont les concernés,
acteurs actifs et passifs de la vie politique de l'arrondissement de
Zoétélé vivent le phénomène de quête
bigmaniaque et l'idée qu'ils ont de son poids sur la
légitimation politique de ces « grands hommes »,
mais aussi son influence sur la localité en général.
Nous avons en effet effectué une enquête de
terrain en deux phases. Au cours de la première phase qui eut lieu entre
le 02 et le 16 avril 2015, nous avons rencontré le maire de la commune
de Zoétélé, quelques responsables locaux de partis
politiques et des responsables de certaines institutions publiques et
parapubliques représentées dans l'arrondissement. Cette
première phase nous a permis d'avoir un premier aperçu sur les
réalités de la vie politique dans l'arrondissement de
Zoétélé et surtout l'impact de l'action des grands hommes
et autres élites urbaines en ce qui concerne le bigmanisme et
la quête légitimité politique.
Quant à la deuxième phase qui a eu lieu entre le
29 avril et le 22 mai, nous avons effectué de nouveaux entretiens avec
des élites (notamment celles identifiées comme étant
politiquement active d'une manière ou d'une autre dans l'arrondissement)
afin de mieux les connaitre, mais aussi de savoir quel est leur aperçu
de la vie politique et de son aspect concurrentiel lié à la
redistribution en l'occurrence dans la localité. Nous avons aussi
effectué des entretiens semi directifs avec un corpus constitué
de citoyens «ordinaires » ; soit une cinquantaine, au
total. Au demeurant, nous avons retenu de ces enquêtes que les grands
hommes, entrepreneurs politiques ou non, accordent une place importante
à la redistribution comme(étant pour eux) un moyen d'affirmation
et de développement de la localité d'une part, et que d'autre
part, les populations, plus exigeantes avec le temps, mesurent la
légitimité des grands hommes à leurs capacité de
redistribuer et d'influencer le développement sous diverses formes au
sein de la localité.
3- L'observation
participante
L'observation participante est une technique de recherche qui
permet de rendre visible des aspects de la réalité sociale
inaccessible dans les représentations courantes du
phénomène étudié71(*). Il s'agit d'une technique d'immersion, de
participation à la dynamique de l'objet étudié comme le
souligne si bien Howard Becker : « l'observateur participant
rassemble des données en prenant part à la vie quotidienne du
groupe ou de l'organisation qu'il étudie. Il regarde à quelles
situations sont confrontées les personnes qu'il fréquente,
comment elles s'y comportent, et il discute avec certaines d'entre elles pour
connaitre leurs interprétations des évènements qu'il a
observé ».72(*) L'observation participante est un exercice
délicat, a priori aisé, mais au demeurant jonché de
multiples exigences car il s'agit d'une technique d'enquête qui implique
prioritairement les relations humaines73(*). En effet, « le travail de terrain sera
envisagé ici comme l'observation des gens in situ : il s'agit de
les rencontrer là où ils se trouvent, de rester en leur compagnie
en jouant un rôle qui, acceptable pour eux, permette d'observer de
près certains de leurs comportements et d'en donner une description qui
soitutile pour les sciences sociales tout en ne faisant pas de tort à
ceux que l'on observe. Même dans le cas le plus favorable, il n'est pas
facile de trouver la démarche
appropriée ».74(*)
Cette technique nous a permis de nous imprégner des
réalités liées à la vie politique dans la
localité de Zoétélé. Nous avons pour ainsi dire
participé à de nombreuses activités telles que des
meetings politiques lors de la campagne électorale liée aux
municipales de septembres 2013, puis à celle liée au
renouvellement des organes de base du RDPC en décembre 2015, entre
autres. Nous avons aussi suivi de près des militants dans leurs
multiples activités, suivi et écouté de près
certaines élites candidates à des postes électifs, ou bien
des élites urbaines soutenant des candidats de leurs factions.
Notre travail se structure en deux parties constituées
de deux chapitres chacune. La première partie porte sur les trajectoires
de déploiement du bigmanisme et la mobilisation du capital social dans
la recherche de légitimité par les élites de
Zoétélé. Il s'agit dans le premier chapitre de la mise en
lumière de la recherche du capital social par les élites
urbaines, de la recherche de légitimité politique par la
mobilisation dudit capital social et des luttes factionnelles suscitées
par la concurrence créée par cette recherche dans le second
chapitre. La seconde partie quant à elle porte sur l'impact
sociopolitique et économique de la recherche bigmaniaque dans
l'arrondissement de Zoétélé. Dans son premier chapitre
(soit le troisème en général) il est question de la
portée politique de la quête bigmaniaque dans l'arrondissement de
Zoétélé, et la mise en exergue de son impact
socioéconomique dans le second chapitre.
PREMIERE PARTIE :
TRAJECTOIRES DE DEPLOIEMENT DU BIGMANISME ET
MOBILISATION DU CAPITAL SOCIAL DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
L'activité politique en Afrique et notamment au
Cameroun est constituée d'un certain nombre de réalités
qui lui sont inhérentes. Loin d'être seulement ce que Jean
François Bayart75(*) décrit comme étant la politique du
ventre, il est opportun de souligner la place importante qu'occupe cet aspect
du phénomène en ce qui concerne le processus de
légitimation politique des différents acteurs.
Dans le cas de l'arrondissement de
Zoétélé, les trajectoires de légitimation politique
reposent sur la mobilisation de leur capital social par les élites
urbaines ; mieux encore, cette mobilisation est davantage
consolidée par le caractère concurrentiel que revêt
l'activité politique dans cette aire qui est un espace de confrontation
concrète de ces élites en interaction autours d'enjeux
communs76(*).
Dans cette première partie, nous nous proposons de
mettre en contexte la recherche du capital social par les élites
urbaines (chapitre I) dans le but d'analyser les
différentes luttes factionnelles liées à la recherche de
légitimité politique dans l'arrondissement de
Zoétélé (chapitreII).
CHAPITRE 1 :
QUETE BIGMANIAQUE ET RECHERCHE DU CAPITAL SOCIAL PAR
LES ELITES URBAINES DE ZOETELE
Pour Pierre Bourdieu77(*), le capital social s'entretient, quel que soit le
domaine où il s'acquière et/ou sert. Il est un
élément incontournable pour les acteurs en ce qui concerne la vie
politique. Exister pour un acteur politique, c'est d'abord jouir d'une
réputation favorable à un positionnement stratégique
sur l'échiquier politique convoité. La recherche du capital
social constitue de ce fait une quête permanente ; quête qui
se structure de diverses manières selon le domaine socioprofessionnel
d'origine de l'acteur politique en question78(*). Des plus nantis aux moins bien lotis, la
construction d'une réputation est un souci permanent ici. Tous types de
moyens sont alors mobilisés pour engranger des points. C'est dans cette
optique que la redistribution, entre autres, sous diverses formes
apparaît comme une ponctuation incessamment activée et dont les
répercussions sont assez palpables dans la plupart des cas.
Dans le contexte africain et celui camerounais plus
précisément, la construction et la mobilisation du capital social
en politique par les acteurs ne fait pas exception ; d'autant plus que
ladite construction se base d'abord et surtout sur la redistribution ; une
redistribution qui aurait tendance à s'accentuer en période
électorale. Le but pour les acteurs politiques étant de raviver
la sympathie des populations en leur faveur ou bien de mieux se faire
connaître.
L'arrondissement de Zoétélé est sans
déroger à cette réalité. Comme ailleurs,
l'entretien du capital social en vue d'une conquête de l'espace politique
est une effective. Pour être plus précis, jouissent d'une certaine
popularité, ceux des membres de la communauté dont les
activités profitent à cette dernière. De la
capacité à entretenir des factions et des courtiers79(*) dépend la
qualité du capital social des hommes ou femmes engagés en
politique. La mise en commun des initiatives individuelles porteuses de profits
devient de ce fait une nécessité de la part de cette
catégorie d'individus leur ouvrant ainsi les portes du
bigmanisme. Dans le cadre de la présente étude, il est
question, concernant le présent chapitre, de tester la pertinence de la
redistribution comme étant un vecteur de relèvement du capital
social des élites urbaines, dont les entrepreneurs économiques et
les élites bureaucratiques. En d'autres termes, nous nous attarderons
sur la recherche du capital social par les élites bureaucratiques d'une
part, et par les entrepreneurs économiques d'autre part. En ce qui
concerne ces derniers, il serait opportun de nous attarder sur quelques cas
précis, tirés sur le volet, et englobant dans une certaine mesure
les éléments de recherche de capital social sus
mentionnés, afin de tester la pertinence de cette hypothèse. De
ce fait, nous mobiliserons les approches réputationnelles,
décisionnelles, positionnelle80(*) et surtout l'approche par l'activité sociale
qui nous permettra de mesurer leur niveau de participation au
développement de la localité en tant qu'élites.
SECTION I : RECHERCHE DU CAPITAL SOCIAL PAR LES ELITES
BUREAUCRATIQUES.
L'arrondissement de Zoétélé se situe dans
un espace socioculturel dans lequel la reconnaissance de « la
valeur » d'un individu dépend de ses
« preuves ». Il y a lieu de souligner ici l'aspect
stratégique de cette redistribution au-delà de celui purement
affectif lié à l'appartenance à la localité. Max
Weber81(*) met en
exergue l'idée selon laquelle l'activité politique, pour
être bien menée, fait appel à de nombreux moyens
matériels; notamment des moyens financiers et logistique politique,
entre autres, permettant aux acteurs engagés dans ce secteur de garantir
le fonctionnement structurel et organisationnel de leur entreprise politique.
Dans le contexte Africain et, plus précisément de
l'arrondissement de Zoétélé, cette réalité
parait incontournable ; d'autant plus qu'il s'agît d'une aire
socioculturelle où exister véritablement en tant qu'élite
c'est aussi redistribuer ; redistribuer pour entretenir et maintenir
toujours relevé sa notoriété ; ladite
notoriété étant garantie par la communauté
(constituée entre autres des populations de la localité dont le
clan originaire des acteurs, les autorités traditionnelles et des fois
étatiques, des connaissances et courtiers de tous bords) qui profite des
retombées liées à la relation de dépendance
à laquelle conduit le souci des élites à se construire un
capital social mobilisable en politique. Il s'agît bien là d'un
pan d'une relation de type «dépendance-obligation»
telle que décrite par Laurent P.J.82(*) Dans le cadre de cette section, nous structurons les
élites bureaucratiques en deux catégories. D'une part les
élites politico administratives, soit les hauts fonctionnaires et commis
d'Etat en poste, et d'autre part, les élites bureaucratiques
complètement reconverties en politique, dont des anciens directeurs et
des fonctionnaires à la retraite pour la plupart.
Paragraphe I : Les
élites politico administratives
Lors de nos enquêtes de terrain, la plupart des
personnes interrogées affirmaient qu'elles attendaient beaucoup des
élites de la localité, surtout des élites urbaine dont
à l'observation, la notoriété et la reconnaissance par la
communauté dépendaient de leur capacité et de leur
propension à redistribuer. C'est par les réalisations
effectuées par ces élites que les populations jugent du
degré d'attachement de ces dernières à la localité.
Il en est de même pour l'accès à la
légitimité politique produisant des profits (accès
à plus de voix pour eux ou pour leur parti, accès à de
divers postes électifs, accès à la notoriété
politique, etc.). Il y a lieux de comprendre, l'accentuation de l'aspect
redistributif qui entoure les campagnes lors des périodes
électorales.
Sous diverses formes, on peut observer de multiples
réalisations matérielles et symboliques faites par des
élites politico administratives ici. Cette course à la
redistribution est aussi due à une double
réalité politique et économique.
La réalité politique, à l'observation,
nous a amené à faire le constat selon lequel les élites
urbaines sont dans l'obligation de présenter leurs réalisations
à la communauté pour gagner une clientèle politique soit
pour eux même, soit pour leur parti ou encore pour un candidat qu'ils
soutiennent. La réalité économique quant à elle
renvoie aux difficultés de la localité en termes
d'infrastructures sociales, entre autres. Carence structurelle liée aux
difficultés de l'Etat à assurer tout seul le développement
de l'arrondissement. De ce fait, la redistribution des élites serait
aussi motivée par le souci de contribuer au développement de la
localité par simple évergétisme. Cet état des faits
est à l'origine des diverses réalisations et investissements
faits dans la localité par les élites urbaines.
Réalisations et investissements à but lucratif ou à
caractère purement social, au profit de la localité.
Dans cet ordre d'idées, de nombreuses initiatives
telles que la promotion des infrastructures et matériels scolaires sont
réalisées par des élites. La construction dans son village
(Meyila) d'un collège d'enseignement secondaire par Polycarpe AbahAbah
et le soutien aux élèves promus à des examens officiels
par l'octroi de bourses d'études en est un exemple. Chaque fin
d'années scolaire depuis 2002, le directeur général
(1998-2004) des impôts puis ministre des finances(2004-2007) organisait
des cérémonies de remises de lauriers audits élèves
(ceci jusqu'en 2007, année de son arrestation par les autorités
judiciaires).
Nous avons aussi le tournoi de football organisé par
Jean Jacques NDOUDOUMOU chaque vacances scolaire depuis une dizaine
d'années et qui contribue à l'épanouissement de la
jeunesse de cette localité. En marge de ce tournoi sont
organisées des campagnes de sensibilisations contre les infections
sexuellement transmissibles, ainsi que des conférences débat avec
des thèmes axés sur la responsabilisation de ladite jeunesse et
son implication au développement local, etc.
Par ailleurs, on compte des investissements telles que des
plantations, des menuiseries entres autres, mises en places par ces
élites bureaucratiques et offrant des emplois aux jeunes (ruraux pour la
plupart) tel que le montre la présente illustration :
Tableau de quelques investissements des élites
urbaines dans la localité de
Zoétélé :
ELITES
|
REALISATIONS
|
Rémy ZE MEKA
|
Des plantations (dont une grande palmeraie) ; des
investissements immobiliers dans la ville de Zoétélé.
|
Polycarpe ABAH ABAH
|
Des plantations (dont une palmeraie étalée sur
environs 180 hectares) ; une « petite » usine
(MeyilaOil Corporation) de transformation d'huile de palme, notamment en
plusieurs produits dérivés dont des savons, etc.
|
J.J. NDOUDOUMOU
|
Un domaine touristique dans le village Mvoutessi.
|
Martin BELINGA E.
|
Des plantations dont une grande palmeraie.
|
(Source : enquêtes)
Ce tableaux faut-il le notifier ne prétend pas
restituer de manière exhaustive les différents investissements
des élites bureaucratiques dans l'arrondissement de
Zoétélé. Il s'agit là des élites urbaines
les plus en vue en termes d'investissements.
De ce point de vue, il appert que la plupart des élites
politico-administratives de la localité de Zoétélé
investissent au terroir. L'une des raisons de ces investissements se justifie,
d'après la plupart des personnes interrogées lors de nos
entretiens, par le souci des différents promoteurs de démontrer
leur capacité à investir dans la localité, à
créer des emplois ou encore à influencer le développement
de la localité ; Toutes choses qui dénotent du souci de
création et de consolidation d'un capital social et politique dans la
sphère locale.
PARAGRAPHE 2 : les
fonctionnaires reconvertis en politique : de la nécessité de
consolider leur capital social
Parmi les élites bureaucratiques, il y a une
catégorisation qui se dégage. Nous avons d'une part les
élites en poste, dont des hauts fonctionnaires, des cadres moyens, etc.
D'autre part, les élites (hauts cadres d'administration et
fonctionnaires) à la retraite soit de façon ordinaire soit par
simple reconversion en politique.
Cette autre catégorie d'élites urbaines se livre
soit à la recherche d'un capital social, soit à la quête
incessante de sa consolidation. A cet effet, on observe une diversité de
réalisations au profit de la localité, et participant de cette
démarche. Il s'agit d'un ensemble d'actes symboliques posés par
ces élites dans la perspective d'une meilleure visibilité, mais
aussi pour une consolidation, voire une amélioration positionnelle pour
ceux qui ont déjà accès à des positions politiques
porteuses d'avantages. A titre d'illustration, nous nous attardons sur deux cas
d'élites urbaines reconverties en politique et se livrant à la
redistribution, source de capital social.
Dans un premier temps, nous avons le sénateur RDPC
Calvin ZANG OYONO, ancien directeur général des impôts dont
l'action s'inscrit dans le soutien au secteur de l'éducation. Depuis
plusieurs années, ce dernier se démarque à travers des
dons divers aux écoles de l'arrondissement. C'est ainsi par exemple que
le 17 Octobre 2015, il a fait une descente sur le terrain avec des dons tel
qu'il en a prit l'usage comme le relate Désiré
Aba'aNko'o 83(*) : « C'est le 17 octobre que le
sénateur originaire de l'arrondissement de Zoétélé,
Honorable ZangOyono Calvin, a effectué une descente sur le terrain pour
remettre aux populations de sa circonscription électorale des dons
divers. La remise desdits dons avait pour cadre la maison du parti de
Zoétélé [...] les dons en eux-mêmes étaient
constitués du matériel didactique et des bourses d'études
aux élèves. S'agissant du matériel, le sénateur a
offert 500 tables bancs à une vingtaine d'école. La distribution
desdits table bancs a été fonction des demandes recensées
au préalable par école Quant aux bourses d'études,
l'Honorable sénateur a contribué à la promotion de
l'excellence scolaire en dotant une bourse de 50.000 frs à tous les
élèves admis au baccalauréat, toutes séries
confondues dans l'ensemble de l'arrondissement [...] les dons de ce 17 octobre
2015 ont une valeur de près de 7.000.000 de frs
CFA ».84(*) A coté de ce don, ce sénateur a
réhabilité le CETIC de Nsimi, un village de l'arrondissement
facilitant ainsi les conditions d'enseignement dans cette contrée.
Aussi, Calvin ZANG OYONO est promoteur d'une scierie et d'une menuiserie dont
les populations de l'arrondissement se réjouissent.
Inscrit dans la même dynamique, Le député
RDPC Prosper MériméMonessel, professeur des lycées et
ancien intendant du lycée de Zoétété,
présidait un grand meeting à la place des fêtes de
Zoétélé le 1er aout 2015, meeting qui marquait
la clôture d'une tournée effectué par ce dernier dans la
plupart des villages de l'arrondissement ; tournée placée
sous le signe de la gratitude d'après ses propres
déclarations : « je suis venu dire merci
à mes camarades pour m'avoir accordé leur vote. Ensemble, nous
travaillerons pour le développement de notre
section ».85(*) De ce fait, « comme le veut la
tradition africaine, Prosper MériméMonessel n'est pas allé
les mains vides. Il a remis des dons d'une valeur de 10 millions de F aux
populations. Des houes et des machettes aux agriculteurs et des lits
équipés aux centres de santé de la section RDPC de
Dja-et-Lobo II- Zoétélé [...] l'année
dernière, il a remis le matériel scolaire aux
établissements secondaires et primaires du public et du privé de
sa circonscription politique ».86(*)
Toutes ces réalisations et investissements contribuent
effectivement à dorer l'image des élites qui s'y adonnent.
Cependant, ces différents aspects de la redistribution ne leurs
permettent pas toujours d'accéder à la légitimité
politique (tel que nous le montrerons plus loin dans ce travail). Si oui, pas
de façon systématique. Certes, peut-on dire dans la plupart des
cas que la politique en Afrique est très peu basée sur le facteur
idéologique, mais cependant, il ne s'agît pas d'une
réalité propre au continent Africain, tel que le soutiennent
certains auteurs africanistes (Faverjon)87(*).
SECTION II : RECHERCHE DU CAPITAL SOCIAL PAR LES
ENTREPRENEURS ECONOMIQUES
Les entrepreneurs économiques occupent une place
importante dans la vie socio-économique de Zoétélé.
A travers leurs différentes activités, ils influencent le
développement de la localité et se créent par ce fait
même une notoriété qui leur est si précieuse pour un
engagement et une pérennisation en politique. De ce point de vue, cette
section s'attardera sur deux cas d'élites urbaines, entrepreneurs
économiques aux trajectoires semblables qui ont développé
leur capital social à travers diverses formes d'investissements dans le
secteur social et économique. Toutes choses qui leur ont ouvert les
portes de la légitimité politique; notamment la magistrature
municipale. Comme le souligne si bien Max WEBER, l'entrepreneuriat politique
fait appel à d'énormes moyens matériels tels que l'argent,
la logistique politique et infrastructurelle, entre autres, permettant aux
entrepreneurs du domaine de s'assurer non seulement de leur survie, mais aussi
de leur pérennité dans cette activité.88(*) Ainsi, l'analyse des
trajectoires de ces deux entrepreneurs du secteur socioéconomique,
reconvertis en entrepreneurs politiques aura retenu notre attention. Il s'agit
de Pauline MENGUE NKILI d'une part, et de MGBWA Odile d'autre part.
Paragraphe 1 : Pauline
MENGUE NKILI : du souci d'émancipation à l'activisme
politique
MENGUE NKILI a connu une enfance difficile; difficulté
doublement caractérisée par une vie paysanne précaire et
par des discriminations liées à son statut de jeune fille. En
effet, elle ne connaîtra pas le bonheur d'aller à l'école
à temps comme la majeure partie des jeunes filles de sa
génération, son père soutenant alors que l'instruction
scolaire de la jeune fille était inutile. Frustrée et
révoltée, elle fera de l'idée de s'émanciper une
obsession. Cependant, elle consacrera la majeure partie de son temps à
des travaux agricoles (entre les plantations familiales et celles de la
contrée où elle travaillait moyennant un prix) et au petit
commerce. De plus, ayant ouvert une caisse (d'épargne), elle s'inscrira
elle-même à l'école grâce aux 15000f de son
épargne personnelle. Elle obtiendra plus tard une bourse pour
étudier aux Etats-Unis d'où elle reviendra avec un diplôme
d'institutrice adjointe, elle accèdera ensuite à l'école
normale supérieure de Yaoundé d'où elle sortira comme
professeur des lycées. Elle prendra fonction au CETIC89(*) de Ngoa-Ekellé
à Yaoundé jusqu'au moment où elle se consacrera
entièrement aux affaires et à l'action sociale.
Soucieuse de promouvoir l'éducation de la jeune fille,
notamment dans sa localité d'origine (Zoétélé),
elle créera en 1984 la « fondation
menguenkili », puis un foyer pour enfants en détresse
destiné plus particulièrement aux orphelines en 1989; ledit foyer
sera transformé quelques années plus tard en lieu d'accueil de
jeunes des deux sexes, des élèves pour la plupart. Cette
fondation à la vocation multiple est aussi pourvoyeuse de bourses
scolaires à des élèves des deux sexes.
MENGUE NKILI accèdera dès lors à une
popularité qui ne cessera de croître. Ceci grâce
à ses diverses réalisations liées au social dans la
localité. Cependant cette nouvelle popularité dont elle jouit ne
lui apportera pas que des admirateurs. En effet elle commence à
ressentir de l'adversité de la part de certaines élites de
l'arrondissement qui voyaient en elle un potentiel adversaire politique. Loin
de la décourager, cette adversité va la pousser, elle qui n'en
avait pas vraiment l'intention au départ, à s'engager en
politique. S'appuyant ainsi sur la notoriété que ses
réalisations lui avaient garantie.
MENGUE NKILI entre en politique en 1996, dans l'opposition
notamment dans le MDR90(*). Cette dernière trouvera en Polycarpe ABAH
ABAH un solide allié politique. Au début de l'année 2000,
elle est cooptée par le RDPC et crée le 31 décembre de la
même année la sous-section91(*) d'Akok dans laquelle elle est élue
présidente. Aux municipales de 2002, elle est élue maire de
l'arrondissement de Zoétélé. Elle occupera ce poste
jusqu'en septembre 2013.
MENGUE NKILI dénonce le degré d'adversité
trop élevé dans l'arrondissement dont elle a été
maire. Elle insiste notamment sur les luttes de positionnement et de
déstabilisation qui règnent entre les fils (élites) de
l'arrondissement et en interne au sein du RDPC, parti majoritaire.
Paragraphe 2: NGBWA
Odile : de l'action socioéconomique à l'entrepreneuriat
politique
BIKIE Odile épouse NGBWA est originaire de Ngoulemakong
par Ebolowa où elle est née il y a une cinquantaine
d'années. Adolescente, elle souhaite entrer au couvent et devenir bonne
soeur, voeux qui malheureusement ne se réalisera jamais. C'est dans
cette perspective qu'elle va adhérer, en marge de sa profession
d'institutrice, à des associations caritatives ; de plus, voyant
les difficultés que rencontraient les villageois et les populations de
l'arrondissement, cette dernière va créer une association
à caractère socioéconomique qui contribuera à
soulager lesdits villageois de plusieurs difficultés liées
à leurs difficultés agricoles.
NGBWA Odile crée en 1996 le réseau des hommes et
des femmes de Zoétélé (RESOHFEZ) dont elle est
présidente. Il s'agit d'un réseau réunissant de nombreux
groupements d'initiative commune (GIC) en plus de plusieurs cultivateurs et
petits commerçants indépendants. Cette association assiste les
différents acteurs du secteur agricole à travers entre autres des
services tels que, l'octroi de microcrédits, l'épargne, les
tontines volontaires pour les membres et non membres de l'association. NGBWA
Odile, à travers cette association, aidera les villageois à
valoriser leurs épargnes en investissant ensemble dans plusieurs
domaines dont celui agricole. A ce propos, l'association est par exemple
propriétaire de plusieurs bananeraies au sein de l'arrondissement. Ces
différentes réalisations permettront à cette
dernière de gagner la sympathie des populations dans la plupart des
contrées de l'arrondissement.
Son entrée en politique sera influencée par deux
facteurs : premièrement, en constatant que l'initiative
associationnelle dont elle était l'auteur fonctionnait bien et lui
attirait une certaine popularité. L'idée de transformer le
capital social ainsi développé en capital politique lui vint
à l'esprit. Deuxièmement, elle sera fortement inspirée par
ses modèles en politique à savoir, entre autres, Madame ETO'O
Juliette, présidente de sous-section OFRDPC à
Zoétélé au début des années 1990 et Madame
Rose OBOUNOU AKONG, femme active au sein du même parti au début
des années 1990. De plus, le maire NGBWA Odile soutient qu'il existe un
lien direct entre la politique et l'action sociale. De ce fait, pour elle, pour
mieux exercer l'un, il faut être adepte de l'autre. Cette dernière
s'engage donc en politique au sein du RDPC en 1996 et devient présidente
de la sous-section OFRDPC92(*) à Zoétélé en 1998, puis
présidente de cellule du comité de base cumulativement avec le
poste de présidente de sous-section. Elle occupera cette position
jusqu'à l'accession au poste de maire de la commune d'arrondissement de
Zoétélé lors de l'échéance électorale
de septembre 2013, avec le soutiens des élites urbaines. A titre
d'exemple, plusieurs habitants de la localité interrogés lors des
entretiens sur le terrain ont fait mention d'une certaine proximité
entre Odile NGBWA (maire de Zoétélé) et Edgard Alain MEBE
NGO'O. Ce dernier se serait d'ailleurs assez impliqué pendant la
campagne électorale liée aux municipales de 2013 ayant conduit
à l'élection de Mme NGBWA.
NGBWA Odile a donc su mobiliser son influence
économique pour développer un capital social.
CONCLUSION
Il appert en fin de compte que les élites urbaines et
les grands hommes se construisent un capital social dans une dynamique
bigmaniaque fondée sur des logiques redistributives ;
logiques qui leur permettent de se positionner comme étant des
personnalités importantes dans l'espace sociopolitique de
l'arrondissement de Zoétélé. Dune part les élites
bureaucratiques et d'autre part, des entrepreneurs économiques, tous en
quête d'une certaine notoriété. Il devient aisé de
comprendre la mise en valeur de leurs multiples réalisations en
période électorale. C'est dire que la redistribution dans ce
contexte est certes motivée par un certain évergétisme,
mais au-delà de ce fait, elle représente pour les élites
urbaines et les grands hommes, un moyen de développer un capital social
convertible en légitimité politique.
CHAPITRE 2 :
RECHERCHE DE LEGITIMITE POLITIQUE ET LUTTES
FACTIONNELLES
L'entrepreneuriat politique a ceci de particulier qu'il peut
mettre en branle toute élite ou membre d'un parti politique avant,
pendant et après la période électorale. En effet, mue par
un activisme à multiples facettes, les élites engagées en
politique se battent pour un rayonnement de leurs formations politiques tout en
se positionnant ; positionnement ayant pour but, soit de se maintenir
à un poste de pouvoir obtenu (électif ou nominatif, pour ce qui
est du parti au pouvoir) grâce au militantisme, soit d'y accéder.
Dans l'un et l'autre cas, il s'agit bien d'accéder à la
légitimité politique. Pour y arriver, les différents
acteurs impliqués (dont les élites urbaines et les entrepreneurs
économiques engagé en politique) ne lésinent sur aucun
moyen (matériel, financier, symbolique, etc.) afin d'atteindre leurs
objectifs. C'est dans cette perspective qu'on constate une mobilisation des
différentes réalisations faites dans la localité pars les
acteurs en quête de légitimité politique. Aussi, cette
quête de légitimité et la « diversité
dans la trajectoire des politiciens »93(*) jette les jalons d'une
concurrence politique quasi incessante, tant dans un contexte électoral
qu'en période ordinaire. Il s'agit des luttes factionnelles liées
à cette concurrence politique. Il est question pour les uns et les
autres de s'assurer constamment une visibilité leur assurant une
légitimité politique.
SECTION 1 : RECHERCHE DE LEGITIMITE POLITIQUE
Pour accéder à la légitimité
politique, les élites urbaines et les entrepreneurs politiques
s'appuient sur leur popularité ; popularité due à la
redistribution, notamment leurs différentes réalisations au
profit de la localité pour se propulser sur la scène politique.
La recherche de légitimité est dès lors un des
véritables objectifs liés à la quête d'un
éventuel capital social.
A coté de la mobilisation du capital social dans la
recherche de légitimité politique, les entrepreneurs politiques
impliquent d'autres ressources ; il s'agit en ce qui concerne les
élites bureaucratiques, des ressources institutionnelles, conduisant
souvent ces derniers au phénomène de straddling,94(*) entre autres.
L'objectif de la présente section est de montrer dans
quelle mesure les élites urbaines mobilisent leurs différentes
réalisations au profit du terroir, ainsi qu'une diversité de
ressources dans leur souci d'accéder à la
légitimité politique.
Paragraphe 1 : Recherche
de légitimité politique et mise en exergue du capital social
Le bigmanisme politique
est une réalité liée à la redistribution en milieux
politique, notamment en Afrique où son impact est certain et observable.
Cependant, cela n'est pas le propre de la seule société
africaine. Il s'agit bien d'une situation vérifiable ailleurs, telle que
le démontre si bien Jean Louis Briquet95(*) lorsque parlant de la Corse en France, il souligne
que : «le vote se modèle fréquemment [...] sur
les relations personnelles et familiales. Il s'énonce plus facilement
dans les registres de la proximité individuelle (l'amitié, la
confiance, la reconnaissance) que dans ceux de la conviction politique
abstraite. Il peut être la contrepartie (ou l'anticipation)
d'avantages matériels que l'élu local a octroyé (ou
promet) à certains de ses électeurs ». Cette
affirmation montre la place significative du capital social et de l'entretien
de coutiers, puis de factions diverses dans leur dimension politisée et
leur rôle dans la recherche de légitimité politique. Il en
est ainsi dans le contexte de Zoétélé où les
élites urbaines mettent en valeur leurs différentes
réalisations locales pour en appeler au soutien des
bénéficiaires au moment des élections en faveur de leur
parti96(*). Il
s'agît, comme Ramsès TSANA NGUEGUANG le décrit, d'un jeu
politique basé sur des « échanges mutuels existant
entre les entrepreneurs économiques [élites urbaines] qui font la
politique et les populations locales. Après avoir accumulé de
nombreuses ressources, les entrepreneurs les redistribuent sous forme de dons
en direction de leur localité et établissent ainsi des rapports
de clientèle auprès des populations et s'assurent le patronage ou
l'amitié des autorités traditionnelles. Tout don appelant un
contre-don, les bénéficiaires offrent dans l'immédiat au
donateur des remerciements, tout en lui assurant leur soutien plus tard
à travers les suffrages qu'ils lui accorderont lors des
compétitions politiques locales. Cette stratégie d'échange
a permis à des entrepreneurs d'accéder à des postes
politiques de maire ou de députés dans leur localité et de
devenir ainsi entrepreneurs-politiciens».97(*)Cet auteur souligne ainsi les rapports de
dépendance-obligation98(*) que suscitent les réalisations des
élites urbaines à travers sa théorie des
échanges mutuels qui, comme le relève Richard BANEGAS,
créent des devoirs d'entraide entre les élites et les
populations, conduisant entre autres à une instrumentalisation populaire
du vote clientélaire.99(*)
Il appert ainsi que le bigmanisme politique
s'avère Quasi incontournable pour les élites urbaines en
quête de positionnement dans le corps politique de leurs
localités100(*).
A Zoétélé, les entrepreneurs économiques d'une part
mettent en valeur leurs réalisations pendant que les élites
bureaucratiques (haute administration, structures parapubliques, etc.)
rappellent entre autres leurs divers apports pour les populations de la
localité, notamment leurs doléances apportées dans les
hautes sphères de l'Etat (aux décideurs) dans leur
intérêt ainsi que les divers outputs favorables obtenus à
cet effet.
Par ailleurs, les périodes de campagne
électorales sont ici une occasion de raviver les rapports de
dépendance-obligation entre les élites,
représentant le corps politique d'une part, et les populations locales
d'autre part. Les aspirants à la légitimité politique,
bien que mobilisant leurs différentes réalisations, renouvellent
leur volonté de contribuer au développement de la localité
(tout en offrant des festins électoraux101(*), entre autres, pour le
compte de la campagne) en promettant de nouvelles réalisations.
De leur cotés, les populations (dont les
autorités traditionnelles, les courtiers, entre autres, ayant la
capacité de mobiliser l'électorat ou alors d'influencer le reste
de la population quant au vote) font de ces ponctuations électorales,
l'opportunité de renouveler leurs doléances aux élites en
posant de nouveaux problèmes. Cet état des choses
représente une consécration des rapports clientélistes
entre les entrepreneurs politiques et les populations locales. Il s'agit d'un
clientélisme renforcé en période électorale et
impliquant une forme de redistribution ponctuelle visant à convaincre
l'électorat. Ainsi, « hormis les promesses en dotation
d'infrastructures de développement, des produits alimentaires et
vestimentaires, des gadgets et des pacotilles de toutes sortes sont offerts aux
populations [...] Ce sont, pour l'essentiel, de la viande (boeuf, mouton et
chèvre), du poisson fumé, du riz, du vin rouge, de la
bière, des liqueurs, des pagnes, des tee-shirts à l'effigie du
parti, des casquettes, des écharpes, des porte-clés, etc. Bien
plus, dans l'intention manifeste d'amener les populations à leur
accorder leurs suffrages, les hommes politiques prennent l'engagement ferme de
trouver des solutions immédiates aux doléances des populations
[...] ».102(*)
Paragraphe 2 : Recherche de légitimité
politique et mobilisation de ressources diverses
Pour Faure et Médard, « les ressources
économiques, sociales et politiques sont ainsi à la base de
l'élévation du big man dans la mesure où elles sont
convertibles les unes dans les autres ».103(*)Bien que toutes les
élites urbaines à Zoétélé ne soient pas
nécessairement des big men, force est de constater que cette
assertion est porteuse de sens dans la mesure où les élites
engagées en politiques mobilisent une diversité de ressources
publiques ou privées.
Anthony GIDDENS suggère que les élites sont des
« individus qui occupent des positions d'autorité
formellement définies à la tête d'une organisation sociale
ou institutionnelle »104(*). Il en est ainsi de ces fils de
l'arrondissement de Zoétélé qui occupent des positions
d'autorité et de prestige au niveau de la haute administration
étatique au Cameroun. Ces élites urbaines ayant en partie
construit leur capital social et symbolique grâce à leur
carrière bureaucratique, tirent de ces positions d'autorité
pourvoyeuses d'avantages et de prébendes divers, les ressources
nécessaires non seulement à leur implication politico partisane,
mais aussi à leur quête personnelle de légitimité au
sein de la localité. Autrement dit, ces élites assurent la
légitimité de leur parti (le rassemblement démocratique du
peuple camerounais, généralement) tout en s'assurant un
rayonnement personnel. Cette assurance passe entre autres par l'apport de
divers avantages et réalisations à la localité, mais aussi
par l'entretien d'une multitude composée de courtiers en tout genre, de
factions, etc.
Cet état des choses entraine généralement
ces élites à se livrer au phénomène de straddling.
En effet, une certaine confusion du patrimoine public et privé propre
à la pratique africaine du point de vue de J.F. Médard105(*) est ici observable.
D'après ce dernier, le straddling consiste en un dédoublement,
mieux, un chevauchement de positions et, dans une certaine mesure, de fonctions
pourvoyeuses de prébendes ; « parexemple de haut
fonctionnaire et d'homme d'affaires [qui] exprime la nature
politico-économico-sociale du pouvoir »106(*). La plupart des
élites bureaucratiques de l'arrondissement de
Zoétélé sont ainsi des big men qui profitent des
avantages de leurs positions pour tirer des ressources nécessaires non
seulement à la consolidation de leur capital social et symbolique, mais
aussi, à leur recherche de légitimité politique. A cet
effet, « les positions d'autorité offrent
l'opportunité d'accès aux ressources publiques pour la
satisfaction des besoins privés »107(*)
Ces big men et élites urbaines correspondent
ainsi à l'illustration comparative suivante : «
le grand homme accumule de la richesse afin de la distribuer ; en la
distribuant il la consomme mais il la transmet en capital symbolique dont une
partie peut être à son tour reconvertie en richesse. Il en est de
même du politicien entrepreneur qui, dans le cas africain, profite de son
accès à l'Etat pour s'enrichir. Sur la base des ressources ainsi
accumulées, il investit une partie de la richesse dans des entreprises
économiques variées ; en même temps il convertit une
autre partie de sa richesse en capitalsymbolique, sous forme de soutiens
politiques, en la redistribuant. L'art de la redistribution est la clé
de la légitimation et donc de l'accumulation de capital
politique ».108(*)
Il apparait évident que les ressources
institutionnelles contribuent non seulement à légitimer les
élites urbaines dans la mesure où elles leur permettent de
distribuer et de réaliser davantage, tout en entretenant plus de
courtiers. Ce qui leur facilite un positionnement aisé sur
l'échiquier politique de Zoétélé, mais aussi
à entretenir leur action politique pour se positionner dans
l'échiquier politique. Généralement, leur activisme dans
ce sens consiste à gagner des voix pour leur parti ou bien de soutenir
un candidat quelconque appartenant à leurs factions.
Par ailleurs, nous avons, à coté des ressources
institutionnelles mobilisées par les élites bureaucratiques, les
ressources para institutionnelles.
A propos de ressources dites para-institutionnelles, il s'agit
de l'ensemble des ressources plus ou moins liées aux institutions
étatiques et pouvant être mobilisées par les élites
en quête de légitimité politique ou de consolidation de la
dite légitimité. Il s'agit là de ressources issues
d'institutions telles que les partis politiques, les ONG109(*), entre autres. Il en ressort
de ce fait que la capacité d'en tirer profit, dépend de
l'accessibilité des élites aux « organes »
porteurs desdites ressources. Autrement dit, il s'agît des ressources
issues de l'Etat et de ses partenaires et dont les oeuvres profitent aux
élites ayant accès à leur gestion.
Dans l'arrondissement de Zoétélé,
l'accès aux ressources para-institutionnelles passe
nécessairement par la capacité à accéder à
certaines positions. Aussi, le positionnement partisan constitue ici le moyen
d'accès auxdites ressources. De ce fait, l'omniprésence des
partis politiques, et notamment de leurs militants et cadres, se justifie dans
leurs diverses réalisations. En effet, les réalisations des
partis politiques sont une opportunité de promotion de leur image par
les élites urbaines impliquées dans lesdites
réalisations ; aussi évident que cela apparait,
« les positions acquises au niveau politique et social
déterminent le comportement des acteurs et structurent leurs
comportements »110(*). Les cadres de partis111(*) sont dans cette optique les
plus en vue, d'autant plus qu'ils sont dans la majeure partie des cas, les
contributeurs desdites réalisations. Le RDPC étant le parti le
plus représenté ici, nous y avons appuyé notre analyse.
Chaque descente sur le terrain représente pour ces acteurs une occasion
d'aller au contact des populations, d'user du mobil de la descente (meeting,
visite à un village précis, offre de dons, etc.) pour une
opération de « séduction », soit de
consolidation ou de recherche de légitimité, non seulement pour
le parti, mais aussi et surtout en latence, pour leur propre compte.
Ces modes d'actions des élites sont identiques en ce
qui concerne les différentes interventions économiques et
sociales de l'Etat dans la localité. En réceptionnant un projet
par exemple, l'élite impliquée (maire, député ou
sénateur, entre autres) en profite pour mettre en valeur son image en
récupérant d'une manière quelconque autant de
légitimité possible. De ce fait, « Les
élites urbaines mobilisées par le parti roulent pour leur propre
compte même si, à travers leurs actions participent au
développement de la localité »112(*)
La construction du nouveau marché de
Zoétélé par la commune en partenariat avec le
FEICOM113(*) entre 2012
et 2013 a été récupérée par les partisans de
MENGUE NKILI, alors maire de Zoétélé. Cette
réalisation a d'ailleurs été mobilisée par cette
dernière pendant la campagne électorale liées aux
municipales de 2013. Une certaine partie de la population interrogée
lors de nos enquêtes de terrain est d'ailleurs persuadée que ce
marché est une réalisation personnelle de l'ancien maire. C'est
dire l'impact des ressources dites para-institutionnelles dans le processus de
légitimation des élites urbaines dans l'arrondissement de
Zoétélé. Médard et Faure soutiennent ainsi que
« l'Etat est un capital dont il s'agit de tirer un maximum de
profits ».114(*) Au demeurant, l'action des élites ici est, du
fait d'une recherche incessante de légitimité, motivée par
un « esprit de la rente »115(*) ; l'exploitation
de diverses ressources dont des ressources institutionnelles et
para-institutionnelles.
SECTION 2 : CONCURRENCE POLITIQUE ET LUTTES
FACTIONNELLES
D'après Luc SINDJOUN, « on ne peut pas
envisager la démocratisation indépendamment de la
domination ».116(*) En effet, la dimension liée à l'aspect
de la domination constitue l'un des catalyseurs des dynamiques
politico-bigmaniaquesinhérentes à la démocratie,
surtout dans sa dimension concurrentielle des sphères politiques
abstraites. La concurrence politique suscitée par la quête de
légitimité basée sur le bigmanisme est de nature
à multiplier les niveaux de compétitions et à mettre en
situation de concurrence les différents acteurs engagés. Comme
dans toute société consacrant le libre accès à
l'activité politique, les entrepreneurs politiques mobilisent tous les
moyens à leur portée pour non seulement s'imposer face aux
adversaires, mais aussi pour rendre pérenne leur domination dans le
champ politique donné.
En ce qui concerne les différentes luttes factionnelles
liées au jeu politique, force est de constater que celles-ci ont lieu
à des niveaux multiples et dépendent généralement
des enjeux sociopolitiques, économiques et culturels des espaces
politiques concernés. Une constante demeure certaine, les entrepreneurs
de la chose politique se livrent des batailles directes ou latentes visant
à se positionner au mieux, voire au détriment des autres. De ce
fait, l'idée du souci de s'ériger en figure dominante
écrasant toutes concurrences117(*) conduit les élites urbaines, dans le cas de
l'arrondissement de Zoétélé à demeurer dans une
dynamique de compétition constante, mettant en exergue leur capital
social et symbolique. Tant en période électorale qu'en
période non électorale.
En période électorale, nos analyses
s'attarderont non seulement sur les élections locales, mais aussi sur
les élections présidentielles. Concernant la période
ordinaire, il s'agira de mettre en exergue d'autres niveau d'affrontements
entre les différentes factions et notamment leurs leaders.
Paragraphe 1 : En
période électorale
Les périodes électorales sont
particulièrement houleuses à Zoétélé. Les
différents acteurs mobilisent tous les moyens à leur
portée pour s'imposer. Il en est ainsi des logiques dites
bigmaniaques qui caractérisent les comportements politiques de
la plupart des acteurs impliqués. Dans un environnement politique
animé par des concurrences de factions, de constantes rancoeurs
politiques, il règne une atmosphère concurrentielle quasi
incessante. Le positionnement politique pour les élites urbaines et les
grands hommes n'est pas une aubaine offerte.
Les luttes de factions se caractérisent
généralement par l'importation dans le champ politique des
querelles et rivalités souvent nées sous d'autres auspices.
Lesdites luttes factionnelles constituent de véritables pierres
d'achoppement pour de nombreuses élites. A titre d'illustration,
évoquons les dernières élections municipales du 30
septembres 2013 ayant opposé deux listes du RDPC dont les têtes de
listes furent Mmes Pauline MENGUE NKILI, maire sortant d'une part, et Odile
NGBWA d'autre part. Ces deux candidates se sont livré une concurrence
farouche, soutenues par leurs différentes factions. La première,
comptant dans ses rangs certains chefs traditionnels et des membres du
clergé. Tandis que la seconde était alliée à
certaines élites urbaines dont MEBE NGO'O alors ministre de la
défense, entre autres. En fait, tel que le soulignait Léopold
Clovis Noudjio : « Alain MebeNgo'o nourrirait l'ambition de
placer ses affidés politiques comme candidats investis du RDPC et compte
sur son poids gouvernemental [...] pour atteindre son objectif. Contrairement
à l'autre camp où l'actuel maire MengueNkili [dont] la conviction
s'appuie non seulement sur les populations, mais aussi [sur le soutien du]
pasteur Ngomo Simon Pierre ».118(*) Cette ponctuation électorale ayant vu la
défaite de MENGUE NKILI, elle aura néanmoins été
l'apogée d'une concurrence locale de longues dates entre ces
différents belligérants.119(*)
A côté de ces municipales, d'autres luttes de
factions seront enregistrées lors du renouvellement des bureaux des
organes de base du RDPC dans le même arrondissement entre le premier aout
et le 10 décembre 2015. Lesdites luttes seront marquées du sceau
d'une violence particulière et inédite dans cette localité
avant et après le scrutin.
Avant le scrutin, l'arrondissement a été
frappé par de nombreuses contestations et crises. A propos des
contestations, nous avons par exemple le cas de Mme EBANGA Isabelle, dont le
nom a été insidieusement retiré de la liste dont elle
faisait partie sans explications aucune. En effet, cette dernière,
jusqu'à lors secrétaire de la sous section OFRDPC de
Zoétélé-ville aura démissionné de son poste
pour en briguer un autre au bureau de la section OFRDPC. Grande sera sa
surprise de constater quelques temps avant le scrutin qu'elle ne faisait plus
partie de la liste collective qui pourtant se voulait consensuelle. Plus grave
encore, elle verra s'ajouter à la liste trois nouvelles candidates en
situation irrégulière. Mme EBANGA saisira ainsi M. EVINA OBAM
Richard, président de la commission électorale de section Dja et
Lobo 2 (Zoétélé) en ces termes : « Je
viens de constater sur la liste le cumul de deux militantes qui occupent des
places dans leurs sous-section d'origine. Il s'agit de Avezo'oAmougou qui
occupe un poste dans son Comité de base à Ngolbang, Mbengono
Cécile même chose. Or les dispositions du règlement interne
de notre parti interdisent les cas de cumul »120(*) Face à cette
requête, le président de la commission reportera le scrutin
initialement prévu au 14 Novembre 2015 à une date
ultérieure, afin d'éclaircir la situation.
A propos des noms additifs ayant remplacé celui de Mme
EBANGA et faisant objet de contestations, il y a Mme MBENGONO Cécile,
délégué aux conflits et aux organisations
spécialisées à la sous section de Mekak-ngougoumou ;
Mme AVEZO'O AMOUGOU délégué à la communication
du comité de base OFRDPC de Ngolbang ; Mme MEYABEME ZANG,
présidente de la cellule OFRDPC d'Elang. Ces dernières
étaient en même temps candidates à leurs propres
successions dans les listes de leurs sous bureaux respectifs et candidates sur
la liste collective de la section OFRDPC Dja et Lobo 2.
Mme EBANGA soulignait par ailleurs le fait que tous les clans
de la localité n'étaient pas représentés sur la
liste querellée, notamment son clan, les MvogZomo, conformément
auxindications du comité central du RDPC qui voudrait qu'il soit tenu
compte d'un équilibre clanique au niveau de chaque liste.
Au demeurant, la liste querellée sera élue avec
à sa tête Mme EKOTTO Adeline, et comme vice présidente, Mme
NGBWA Odile (par ailleurs maire de Zoétélé et membre de la
commission électorale liée à ces élections).
Certains militants interrogés diront que cette dernière, de
connivence avec la présidente élue, serait à l'origine des
tripatouillages de la liste ayant conduit à l'exclusion de Mme EBANGA,
avec qui elle ne serait pas en harmonie du fait de sa sympathie à une
certaine période avec Mme MENGUE NKILI, d'autres par contre affirmeront
le contraire. Mme NGBWA d'après ces derniers serait celle qui aurait
suggéré à la candidate malheureuse de briguer un poste
à la section, au regard de son dynamisme.121(*) A l'observation, il ne
s'agit là que des points de vus de sympathisants de l'une ou de l'autre
faction.
Quant aux tensions post électorales, notons qu'une
vague de violence a traversé l'arrondissement de
Zoétélé après la publication des résultats
renouvellement des organes de base du RDPC. En exemple, nous avons le cas de
Mistral Geogien ZOMO, ancien conseillé municipal et candidat malheureux
à ces élections dont la concession a été assaillie
par des inconnus armés de machettes la nuit du 9 au 10 février
2016. Ne l'ayant pas trouvé, ils ont menacé sa famille avant de
disparaitre, promettant de revenir. A coté de ce cas, il ya celui de
ELONG ABESSOLO, proche de Marc ESSAMA, candidat malheureux à la
présidence de la section OJRDPC122(*), qui déposera une plainte à la brigade
de gendarmerie de Zoétélé le 18 novembre 2015 pour
agression à son domicile à 02 heures du matin dans la nuit du 15
au 16 novembre par deux inconnus cagoulés. D'autres cas de violence
seront enregistrés après ces élections, dénotant du
degré d'adversité ambiant suscité par des concurrences
politiques à Zoétélé. Ces différentes
situations contribuent ainsi à entretenir des rancoeurs entre certaines
élites urbaines, mais aussi entre leurs factions.
Les luttes de positionnement, fruits de désillusions,
entre les entrepreneurs politiques dans l'arrondissement de
Zoétélé se traduisent aussi en période
électorale par des consignes et contre-consignes de votes123(*) que s'opposent les
différentes élites urbaines pendant les campagnes
électorales. Il s'agit d'une forme de déstabilisation des
concurrents sous forme de dénonciation, d'incitation de
l'électorat à accepter les dons et cadeaux électoraux
desdits concurrents, comme étant une restitution légitime de ce
qu'il aurait dû recevoir depuis. Ce faisant, les concurrents incitent
ledit électorat à voter non pas pour leur adversaire, mais contre
ce dernier en guise de sanction.124(*)
Paragraphe 2 : En
période non électorale
Les périodes électorales se caractérisent
par des effervescences particulières à
Zoétélé. Il s'agit des différentes manifestations
liées aux campagnes électorales et autres luttes de factions pour
un rayonnement politique des différents acteurs. Cependant force est de
constater que les concurrences politiques et lesdites luttes factionnelles
continuent une fois les périodes électorales révolues,
prenant une forme latente et se manifestant sous d'autres aspects tels que
l'aspect socioculturel et symbolique, entre autres.
Le transfert des concurrences politiques dans les
sphères socioculturelles et symboliques se manifeste par une invasion
des structures traditionnelles locales porteuses de valeurs. Les élites
urbaines sont les plus engagées dans ces processus qui pour eux,
représentent un autre enjeu de positionnement et de confortation
positionnelle, de même que l'aspect symbolique qui les entoure. En effet,
« Les dirigeants doivent justifier leur
puissance et leurs privilèges, non seulement par l'abstraction du droit,
mais surtout en éveillent des émotions, des passions politiques
qui sous-entendent l'acceptation par les citoyens du pouvoir [...] De ce fait,
les élites politiques et administratives émettent des discours,
des symboles et des mythes par un processus plus ou moins ritualisé en
vue d'assoir leur légitimité ».125(*)Cette assertion souligne
la place du symbolisme dans la vie politique. Les aspects socioculturels et
symboliques sont de ce fait incontournables, voire inhérents au domaine
politique à Zoétélé. La ritualisation du pouvoir
politique consolide, dans une certaine mesure, les acquis en termes de
légitimité et de capital social et politique.
Les aspects matériels et financiers comptent certes,
mais la dimension symbolique consacre davantage en termes de
légitimité et de capital social.« Le
dépôt de roses rouges sur les tombes de quelques héros
français [dont jean Moulin, Victor Schoelcher et Jean Jaurès] au
panthéon par François Mitterrand après son élection
n'est pas qu'un simple hommage anodin ; il s'agit bien là d'un
acte dont la valeur symbolique est porteuse de sens ».126(*) Elsa Clairon souligne
à ce propos qu' « il fallait une cérémonie
très solennelle pour démontrer quele Président
[nouvellement élu] de la gauche était prêt à tutoyer
les plus grands héros de la République, que les socialistes
étaient aptes à gouverner, qu'ils n'avaient pas peur du rituel,
de la grandeur qui [...] accompagne l'exercice du
pouvoir. »127(*) De cette lecture, il appert que la dimension
symbolique du pouvoir est d'une importance primordiale, d'autant plus qu'elle
contribue du processus de légitimation des dépositaires
d'autorité et de pouvoir. C'est dans cette perspective que les
élites en général se ruent sur des symboles et les
positions porteuses de ces derniers. C'est ainsi que dans le contexte de
l'arrondissement de Zoétélé, la plupart des élites
urbaines occupent des fonctions de notabilités traditionnelles.
Nombreux sont ceux qui s'improvisent dépositaires des
traditions et connaissances ancestrales et se battent pour accéder
à un quelconque titre de notabilité, quand bien même aucun
membre de leur famille ni de leur lignage n'a jamais occupé de telles
fonctions ; « en explorant les origines des uns et des
autres ici, on constate ahuri qu'aucun de ces chefs n'est descendant d'un
véritable chef. De qui sont-ils fils ou arrière
petits-fils ? »128(*)En réalité, il s'agit là d'une
autre course vers des positions permettant d'accroître plus facilement
leur capital social au sein des populations locales ; capital social
convertible en légitimité politique, ou encore consolidant la
légitimité politique et le statut de dominant que confère
la consécration politique. Pour ces élites urbaines, l'accession
à des titres de noblesse représente aussi un lieu de rayonnement
positionnel ; « plusieurs hautes personnalités de
cette aire culturelle [région du sud] usent de leur position au pouvoir
pour s'imposer comme chefs dans leurs régions d'origine, au
mépris des dispositions légales »129(*).
Une réalité demeure certaine, la quête des
postes d'autorités traditionnelles par les élites urbaines
s'inscrit d'abord dans la dynamique du positionnement politique, bien que
pouvant se justifier dans un cas ou un autre par l'argument vocationnel.
Véritable phénomène à la mode, la chefferie
traditionnelle et les fonctions connexes procurent un avantage certain au
regard de la course vers ces derniers par les élites urbaines ;
notamment dans l'arrondissement de Zoétélé, preuve qu'elle
est porteuse de profits symboliques et politiques. La capacité de
drainer, de rassembler les foules autour du chef, de le mettre
« au-dessus de la mêlée », de lui
conférer de l'autorité et des prérogatives traditionnelles
et coutumières en font un élément stratégique du
point de vue politique ; une véritable passerelle vers les cimes de
la vie politique locale. C'est ainsi que l'arrondissement de
Zoétélé compte des chefs traditionnels dont entre autres
leurs Majestés Martin BELINGA EBOUTOU chef du village Nkilzok, Jean
Jacques NDOUDOUMOU chef du village Mvoutessi, le sénateur Calvin ZANG
OYONO chef du village Nsimi.
CONCLUSION
Plusieurs éléments caractérisent la vie
politique dans l'arrondissement de Zoétélé en termes de
recherche de légitimité politique et de concurrence politique
auxquelles sont liées des luttes factionnelles. La mobilisation du
capital social et des ressources diverses par les élites urbaines et les
grands hommes en quête de légitimité ici est un fait, tout
comme les batailles houleuses, apogées des luttes factionnelles en
périodes électorales. Enfin le transfert desdites concurrences
vers des aspects symboliques en périodes non électorales se
caractérisant par un souci de positionnement des élites urbaines
et autres grands hommes à des postes de notabilité traditionnel.
CONCLUSION PARTIELLE
La démarche adoptée dans cette partie consistait
à faire une économie des différentes trajectoires de
déploiement du bigmanisme concurrentiel à travers la
recherche du capital social par les élites urbaines et les grands
hommes, entrepreneurs politiques en premier essor, ladite recherche du capital
social mettant en branle les élites bureaucratiques d'une part, et les
entrepreneurs économiques d'autre part. Ce capital social permettant
à ces différents acteurs de se positionner en termes de recherche
de légitimité politique tel que nous l'avons vu en second
lieu ; une recherche de légitimité marquée par des
concurrences politiques et des luttes factionnelles. Force est de constater
qu'il existe en effet plusieurs niveaux de compétitions
politico-bigmaniaques en période électorale,
marquées par des affrontement houleux, tout comme en période non
électorale où la concurrence est plus latente, marquée par
des courses de la plupart des élites urbaines et les grands hommes vers
l'accroissement de leur capital à travers des facteurs socioculturels et
symboliques.
DEUXIEME PARTIE :
IMPACT SOCIOPOLITIQUE ET ECONOMIQUE DE LA RECHERCHE
BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
Analyser la portée de la recherche bigmaniaque
par les élites urbaines dans l'arrondissement de
Zoétélé constituera l'essentiel de la présente
partie de notre travail. Etant établi que les élites urbaines
mobilisent plusieurs ressources pour s'imposer tant symboliquement que
politiquement, ceci dans une dynamique concurrentielle quasi incessante, il
apparait opportun de questionner l'impact de cet activisme chercheur de
légitimité. Il s'agira d'une part d'évaluer La
portée du jeu politique concurrentiel lié au bigmanisme,
de mettre en lumière les retombées politiques de ce
phénomène à plusieurs niveaux à
Zoétélé (Chapitre 3). D'autre part, il
sera question de faire une économie de l'impact véritable de la
quête bigmaniaque dans l'arrondissement de
Zoétélé, du point de vue socioéconomique
(Chapitre 4) afin d'éprouver l'idée selon
laquelle la population (dont l'électorat) ne serait qu'une
« paysannerie capturée »,130(*) au profit des élites
urbaines en quête de positionnement
politico-hégémonique.
CHAPITRE 3 :
DE LA PORTEE POLITIQUE DE LA QUETE BIGMANIAQUE DANS
L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
Si
« l'Afrique noire, c'est toujours l'échange : un
univers où dons et contre dons, accumulation et redistribution
constituent la colonne vertébrale des mécanismes de
légitimation du pouvoir »,131(*) le constat selon lequel la
stratégie « redistributive »apparait quasi
infaillible est évident. Grâce à cette stratégie, de
nombreuses élites accèdent à la consécration
politique. Comme dans tous champ de compétition
électorale132(*),
les retombées sont diverses ; tant du point de vue individuel que
collectif. Notre travail en ce chapitre consistera à effectuer une
analyse des dites retombées et réussites politiques ou
consécrations.
Parler de retombées politique ici nécessitera
une certaine classification. La consécration ou réussite
politique ici se mesure à plusieurs niveaux. Le premier niveau de
réussite est lié à la formation politique pour laquelle
l'élite urbaine milite, c'est-à-dire une victoire de groupe,
soit, celle du parti en l'occurrence (section 1). Le second
niveau de réussite représente une victoire individuelle (fruit
des différents efforts personnels, investissements privés, mise
en exergue ou mobilisation du capital social et implications multiples pour le
parti) ; il s'agit d'une part de la consécration d'une élite
à un poste électif, et d'autre part du maintien à son
poste ou de la promotion d'une élite dans la haute administration
publique au sein de l'Etat (section 2). Nous mentionnerons un
troisième niveau de réussite ayant une double nature dite
individualo-groupale, consacrant en même temps le parti, les
individus et la communauté, soit les factions (section
3).
SECTION 1 : UN EFFET DE CONSOLIDATION DE LA
DOMINATION PARTISANE
Questionner les retombées politiques de la quête
bigmaniaque dans l'arrondissement de Zoétélé en
ce qui concerne le parti le plus représenté ici, à savoir
le RDPC passera par une double analyse basée sur le cas des
élections présidentielles de 2004, et sur des cas
d'élections locales mettant en exergue les dites retombées.
Paragraphe 1 : De larges
plébiscites comme portée politique de la quête
bigmaniaque : le cas du RDPC aux élections présidentielles
de 2004
Les élections présidentielles de 2004 ont
été une occasion de démonstration de la domination
effective d'un parti grâce au bigmanisme à
Zoétélé. En effet, la forte victoire du RDPC en
l'occurrence a été le produit d'une grande implication des
élites urbaines et des grands hommes, membres de ce parti auxdites
élections. Arrivé en tête du scrutin présidentiel
(soit 99,59%) devant les partis adverses.
En ce qui concerne l'implication des élites urbaines
dans les processus bigmaniaques ayant abouti à ce
plébiscite, il s'agit de la somme des investissements desdites
élites dans la localité au fil des années et au
moment de la campagne électorale. En 2004 à
Zoétélé, ces différentes réalisations ont
été mobilisées par les élites pour montrer à
la population tout ce qu'elle avait gagné grâce à leur
champion133(*).
Présentant à la moindre occasion, la longue litanie des avantages
liés au soutien de ce champion-là à travers leurs voix.
Les différents investissements, réalisations et dons sont
à l'observation, comme un gage de victoire pour les partis politiques
dans ce contexte, face à la population. Cette dernière serait
plus ou moins « [une ressource politique], voire une force
sociale non négligeable, qu'il faut contrôler et
manipuler ».134(*) C'est dans cette perspective « que les
élites urbaines entreprennent des relations de proximité avec les
couches sociales à la base »135(*) puisqu'elles doivent obtenir
« l'apathie des sujets à
leursujétion ».136(*) Il appert de ce fait que les investissements dans la
localité représentent un moyen non seulement d'accession à
la légitimité, mais mieux encore, une assurance d'une certaine
redevance de ladite localité. D'où les différentes
mobilisations de leurs faits par élites urbaines en période
électorale, dans l'arrondissement de Zoétélé.
Par ailleurs, dans le cadre des élections
présidentielles de 2004 au sein de l'espace politique de
Zoétélé par exemple, la mobilisation des faits et
réalisations par les élites urbaines, membres du RDPC consistait
à gagner des voix pour leur candidat. La quête de victoire dans
l'intérêt du parti primait alors sur la
« quêtebigmaniaque » ordinaire consistant
pour ces élites à se livrer concurrence les unes aux autres, bien
que ladite concurrence demeurait latente. Certes, il s'agissait pour ces
élites de se positionner à travers leur activisme lors de la
campagne liée à cette échéance électorale,
bien que s'activant pour une victoire dans laquelle elles ne siégeaient
pas aux premières loges en termes d'intérêts. En effet, il
s'agissait pour certaines de ces élites urbaines, de s'attirer les
faveurs du champion de leur parti en cas de réélection, pour
d'autres il s'agissait de se maintenir ou bien de préserver leurs
positions, soit dans le gouvernement, soit dans la haute administration
publique ou parapublique ; pour d'autres encore il s'agissait de revenir
dans les bonnes grâces du Président, toute chose qui les sortirait
d'une lointaine déchéance. A cet effet, « la
nomination à un poste de responsabilité et surtout le maintien
d'un responsable n'est plus l'expression de la récompense
professionnelle, mais raisonnablement l'issue heureuse du dynamisme politique
de ce dernier surtout à la faveur du parti au pouvoir ».
137(*) Cet état
des choses se justifie davantage au regard de la réaction des
différentes élites, membres du RDPC après une campagne
présidentielle victorieuse ; il en est de même pour celles de
l'arrondissement de Zoétélé, tel que le décrit si
bien Jean Claude Fogno après la proclamation des résultats des
présidentielles d'octobre 2011 : « quelques
heures seulement après la proclamation des résultats par le
président de la cour suprême, Alexis DipandaMouelle donnant Paul
Biya vainqueur [...] les premières litanies de félicitations ont
commencé à pleuvoir comme ce fut le cas avec les appels à
candidature de Paul Biya à la veille de l'élection
présidentielle. Les élites du Dja et Lobo II, réunies
à Zoétélé sont parmi les premières sections
RDPC à adresser le message de félicitations au candidat
présenté comme « le choix du peuple ». Les
[...] chefs traditionnels ainsi que Martin Belinga Eboutou, directeur du
cabinet civil à la présidence de la République, Edgar
Alain MebéNgo'o, Rémy ZéMeka, ancien ministre de la
défense en quête de positionnement et Jean Jacques Ndoudoumou de
l'agence de régulation des marchés publics espèrent une
récompense pour leur performance de 9,535% contre 99,59 obtenus en 2004.
Ce qui les place à la tête des meilleurs scores par
département ».138(*) Ce « rituel d'adoubement »
est en effet la démonstration de l'attente de
« prébendes » liées aux efforts fournis en
tant qu'élite urbaine militante dans terroir pour son candidat.
D'où l'obsession pour ces élites de faire de l'électorat
une entité acquise à leur parti.
Paragraphe 2 : Une consécration du parti lors
des élections locales
La plupart des candidats aux élections locales à
Zoétélé sont partisans du RDPC en général,
il s'agit des big men, des élites bureaucratiques reconverties en
politique, des entrepreneurs économiques. Ces différents acteurs
ont en commun la recherche bigmaniaque dont les retombées sont mises en
valeur lors des élections au profit du parti. Aussi, il importe de
relever que lorsque les candidats aux élections ne sont pas des big men
ou des grands hommes, ils sont néanmoins soutenus par ces derniers qui
pour la plupart entretiennes des factions et influencent le jeu politique. De
ce fait, le poids du RDPC lors des élections locales demeure grand dans
la mesure où la population locale dont l'électorat, suit les big
men et ceux qui peuvent leur apporter du profit. A cet effet les autres partis
dont le MDR et l'UNDP ont du mal à se positionner au regard de cette
configuration de l'échiquier politique. Le RDPC et, notamment ses
différentes factions régnant sans partage sur dans cette
localité, les unes et les autres se partageant à tour de
rôle les postes électifs en jeu au rythme de leurs affrontements,
mais à la gloire de leur parti qui demeure rayonnant grâce
à l'activisme des différents belligérants. Le cas des
factions rivales mettant en opposition MENGUE NKILI et Odile NGBWA en est un
exemple des plus illustratifs.
Cette consécration quasi systématique de ce
parti est donc le fruit du bigmanisme des acteurs politiques qui drainent leurs
factions et donc l'électorat dans leur parti de
préférence.
SECTION 2 : PORTEE POLITIQUE DE LA QUETE
BIGMANIAQUE SUR LES ELITES
Le bigmanisme politique, notamment dans son aspect
concurrentiel ne trouve son véritable sens que dans la mesure où
il produit des effets favorables pour ses adeptes. Notre but dans cette section
est de montrer la portée politique dudit bigmanisme à la
faveur des élites urbaines, entre autres, dans l'arrondissement de
Zoétélé. Dans un premier temps nous montrerons la
consécration des élites urbaines et bureaucratiques en termes de
promotion ; ensuite, nous mettrons en exergue la consécration
électorale de certains de ces acteurs.
Paragraphe 1 : Promotion des élites urbaines et
bureaucratiques : un feedback favorable
Les élites urbaines et
bureaucratiques impliquées dans la vie politique de l'arrondissement de
Zoétélé trouvent en leur activisme des prébendes et
des avantages divers qui dénotent de l'efficacité de la
quête bigmaniaque comme stratégie dans l'entrepreneuriat
politique.
Le plébiscite du RDPC dans cette localité aux
élections présidentielles de 2004 a été suivi par
un feed-back favorable pour les élites urbaines et surtout
bureaucratiques, feedback symbolisant une victoire individuelle pour chacune
des élites récompensées. En effet, les multiples
nominations des fils de cet arrondissement dans le gouvernement et à de
hautes fonctions de responsabilités au sein de l'Etat auront
été, à l'observation, la consécration des logiques
bigmaniaques comme mode de recherche de positionnement politique au
Cameroun en général, et dans l'arrondissement de
Zoétélé en particulier. Au demeurant, cette forte
implication des élites urbaines dans le jeu politique au sein de cet
arrondissement se justifie par le fait qu'un score négatif serait mal vu
par la hiérarchie du partie, et, notamment par le candidat en
lice ; toutes choses qui compromettrait les différentes
prébendes et autres récompenses de toutes natures escompté
par ces élites. « Le statut d'élite devient [ainsi]
un business qui assure une insertion dans la classe politique locale ou
nationale ».139(*)
En ce qui concerne les différentes
« récompenses » sus mentionnées, notamment la
promotion de certaines élites et le maintien aux affaires des autres,
nous avons entre autres Martin BELINGA EBOUTOU (directeur du cabinet civil de
la Présidence de la République) ; Rémy ZE MEKA
(ministre de la défense) ; Polycarpe ABAH ABAH (ministre des
finances) ; Edgard Alain MEBE NGO'O (délégué
général à la sureté nationale) ; Jean Jacques
NDOUDOUMOU (directeur général de l'agence de régulation
des marchés publics), etc.
Ces différentes consécrations
représentent un véritable sésame ouvrant les portes de la
« gloire » politique sous le prisme politico-administratif,
aubaine issue du pouvoir discrétionnaire présidentiel140(*). Dans le cas
d'espèce, ladite nomination symbolise généralement
« la récompense» d'un activisme politique
avéré du promu au profit du parti au pouvoir. En effet,
l'entrepreneuriat politique dans cette localité s'articule autour de
plusieurs enjeux dont deux principaux, en termes de légitimation. Le
premier, obtenir de la légitimité politique pour le parti. Le
second, faire l'objet d'une nomination en guise de récompense des
« efforts » effectués ; ladite nomination ayant
la particularité de promouvoir même les élites les plus
désespérées dans le La ruée des élites
urbaines vers le parti politique au pouvoir trouverait ainsi l'une des
multiples explications applicables et vérifiables à cet effet. Il
s'agit d'une double opportunité de positionnement que recherchent au
final lesdites élites. Dans un premier temps, c'est la recherche d'un
capital social et symbolique ; dans un second temps, l'accès
à des positions offrant un accès aux affaires publiques, soit,
à des ressources institutionnelles leur permettant de ce fait de
consolider la bonne marche de « leurs affaires » ;
J.F. Bayart soutient de ce fait que « l'accès au pouvoir
d'Etat [....] est également l'accès aux ressources
matérielles et morales de cet Etat ».141(*) D'où le
caractère quasi incessamment interférentiel des
« logiques politiques et [des] logiques
économiques »142(*) dans l'environnement politique de
l'arrondissement de Zoétélé. Ainsi, plus qu'un simple
engagement militant, l'investissement dans le champ politique et, notamment
dans le parti politique au pouvoir est pour les élites urbaines de cette
localité, un moyen de quête de légitimité à
double effet.
Paragraphe 2 : Consécration électorale
des élites comme portée politique de la quête bigmaniaque
dans l'arrondissement de Zoétélé
La consécration électorale représente la
réussite suprême pour les entrepreneurs de la chose politique,
notamment au niveau de la localité de Zoétélé.
Accéder à un poste électif ici est le but recherché
et nourrit par de nombreuses élites. Le caractère houleux des
compétitions politiques tant en période électorale qu'en
période non électorale. Une fois encore, la recherche
bigmaniaque dans cette localité se trouve au centre de ces
performances politiques. En effet il est très difficile de se faire
élire dans l'arrondissement de Zoétélé sans toutes
fois recourir à des logiques bigmaniaques, « tous les
maires qui ont été élus ici à
Zoétélé ont d'abord prouvé qu'ils peuvent
« supporter » cette fonction »143(*)nous confiera un
conseiller municipal, il ajoutera ensuite que « même au
niveau des postes des organes de bases du parti, il n'y a que les
« forts » qui sont élus, les autres se font
éliminer ».Il apparait évident que le niveau de
compétition est assez élevé dans cet arrondissement, ce
qui fait de l'accès à des postes électifs un
véritable exploit.
Se hisser à un poste électif à
Zoétélé nécessite quasi systématiquement la
mobilisation des logiques bigmaniaques, et à l'observation, ces
dernières sont porteuses de résultats politiques
favorables ; l'élection de certaines élites est à ce
propos une parfaite illustration de ces trajectoires. Le cas de Pauline MENGUE
NKILI en est un des plus illustres. Enseignante, puis entrepreneur
économique, elle a su se faire une place de choix sur l'échiquier
politique local à grâce à la quête
bigmaniaque et a, en fin de compte été élue
maire ; poste qu'elle perdra cependant après deux mandats au profit
de Odile NGBWA, membre d'une faction adverse hissée à ce poste
grâce aux mêmes logiques que sa concurrente de toujours.
L'arrondissement de Zoétélé est pour
ainsi dire un espace politique où la quête bigmaniaque
permet effectivement aux entrepreneurs politiques d'accéder
à la légitimité politique, notamment à des postes
électifs. Par cette consécration, ils reçoivent de la part
de la communauté une invitation tacite à participer au forum
très fermé et sélectif de l'élite politique.
Dès lors, ils font parti de ceux-là qui jouent « un
rôle immense, un rôle privilégié, parce que [ils ont]
les loisirs de la fortune, de l'éducation et l'influence
sociale »144(*) qui leur offrira d'avoir une « force
qui [leur permettra] d'exercer [leurs] aptitudes au bénéfice de
tous ».145(*)De plus, au-delà des éventuels
clivages factionnels et politico-partisans, les élites consacrées
ont face à elles, et avec elle la communauté toute
entière. D'une part des membres de leurs factions, en attente d'une
confirmation de cette réussite à travers de nouvelles
redistributions ; des redistributions qui justifieront ainsi l'excellence
de leur choix. D'autre part, des adversaires (l'opposition politique ou des
concurrents politiques, etc.) en attente de la première erreur de la
part des élus pour pointer du doigt d'éventuelles tares, et
préparer ainsi une éventuelle revanche.
SECTION 3 : IMPACT POLITIQUE DE LA QUETE BIGMANIAQUE SUR
LES DIFFERENTES FACTIONS
Etant avéré que la quête
bigmaniaque permet à la plupart des entrepreneurs politiques et aux
partis politiques qu'ils structurent d'accéder à la
légitimité à Zoétélé, force est de
constater que les factions auxquelles appartiennent ces acteurs politiques
jouent un rôle primordial dans ce processus. Cependant, les logiques
bigmaniaques n'étant pas mobilisables par tous les acteurs
politiques, il appert qu'elles s'avèrent de ce point de vue, porteuse de
disfonctionnements.
Paragraphe 1 : Hégémonie du parti et
consécration des élites : Une victoire des factions
Les victoires du RDPC dans l'arrondissement de
Zoétélé tout comme celles des élites qui y militent
sont en grande partie boostées et garanties par les différentes
factions actives dans cette localité. Cet état des choses
implique une part de victoire à chaque faction dont un des meneurs est
nommé à un poste ou bien élu. Les différentes
factions sont en constante activité, presque toujours à pieds
d'oeuvre pour le compte de leurs meneurs. A titre d'illustration nous nous
attarderont sur le cas des deux factions les plus actives et les plus en vues
ces 20 dernières années.
Les concurrences factionnelles à
Zoétélé ces derniers temps ont mis en vitrine deux
principales factions dont les leaders auront été d'une part
Polycarpe ABAH ABAH, MENGUE NKILI et de façon quelque peu latente
le pasteur NGOMO et le Dr MVIE MEKA, et d'autre part Edgar Alain MEBE NGO'O,
Rémy ZE MEKA, Jean Jacques NDOUDOUMOU et le député EBANGA.
Ces deux factions se sont menées une concurrence farouche dans laquelle
la première prenait presque toujours le dessus au regard de ses
victoires au plan local, notamment en ce qui concerne les organes de base du
RDPC et surtout l'accès à la mairie de
Zoétélé qui est un véritable symbole de domination
d'une faction sur les autres dans cet arrondissement. En effet Pauline MENGUE
NKILI aura été maire de 2002 jusqu'en 2013,
échéance à laquelle la faction adverse prendra enfin le
dessus à travers l'élection de Odile NGBWA. L'accès
à la mairie, entre autres motifs de concurrence, constitue le pic des
batailles factionnelles ici ; « qui contrôle la mairie
contrôle Zoétélé » nous dira un
militant du RDPC lors de la campagne électorale liée aux
municipales de 2013. En effet, la plupart des maires élus à ce
poste sont soutenus par des élites urbaines, notamment bureaucratiques,
il s'avère ainsi que ces élites urbaines se retrouvent en
concurrence à travers leurs factions et leurs candidats, d'où le
caractère houleux des débats politiques et de la
prépondérance des logiques bigmaniaques et donc de la
quête bigmaniaque à Zoétélé.
Par ailleurs, les factions sont certes menées par des
élites et autres grands hommes mais il importe de relever la force que
sont les militants de la base s'inscrivants dans l'une et l'autre faction. En
effet, les « petits » courtiers qui entourent ces grands
hommes représentent leurs bras séculiers en ce qui concerne
plusieurs taches dont la propagande en leur faveur, la mobilisation des foules
pour soutenir leurs factions, notamment lors d'échéances
électorales, etc.
Il apparait donc que la quête bigmaniaque est
porteuse d'un véritable impact politique au niveau des factions, elle
est au coeur des luttes politiques impliquant ces dernières. Les dites
luttes garantissent une certaine animation de la vie politique à
Zoétélé tout comme elles relèvent le niveau des
concurrences politiques, donnant ainsi vie à une certaine alternance au
niveau de la mairie, et des bureaux des organes de base du parti auquel
appartiennent la plupart des factions concurrentes dans cet arrondissement,
notamment le RDPC.
Paragraphe 2 : Quête bigmaniaque et
dysfonctionnement des factions et du RDPC à
Zoétélé : l'éveil
d'une nouvelle génération d'entrepreneurs politiques
L'environnement sociopolitique dans l'arrondissement de
Zoétélé se caractérise par un monopole quasi
systématique des élites urbaines. Leur hégémonie
est incontestable. Cependant ladite hégémonie ne fait pas
toujours l'objet de toutes les sympathies. En effet, les élites urbaines
chapeautent et mènent, souvent à leur rythme, la vie politique
dans la localité, laissant ainsi peu de place et moins de
visibilité à une certaine catégorie d'entrepreneurs
politiques, jeune en général. Cette catégorie de
« cadet politiques », ou
« sous-élite »146(*)se compose d'individus de professions diverses,
d'enseignants, de jeunes entrepreneurs, de « petits »
agriculteurs, etc. Bien que n'ayant pas les moyens et le charisme des
élites urbaines, ceux qui constituent cette catégorie que nous
qualifierons de nouvelle génération d'entrepreneurs politiques,
s'activent au niveau de la base au sein des partis politiques présent
dans la localité, dont le RDPC. Ces derniers sont des ouvriers d'un
militantisme très porteur en termes de résultats et sont souvent
au coeur des luttes factionnelles comme ouvriers. Ils se chargent de la
propagande et de la mobilisation des populations quelques fois
hésitantes ou boudeuses. Ces militants sont en quelque sorte les
gardiens de la popularité des élites urbaines et du parti qu'ils
soutiennent. Cependant, ces militants rencontrent de nombreuses
difficultés à se faire une place de choix au sein de
l'élite politique locale.
Les militants de la base éprouvent des
difficultés à s'imposer dans la sphère politique locale
pour plusieurs raisons dont entre autres, l'asymétrie des moyens de
concurrence, ne possédant souvent que des idées, dans un contexte
où la politique se résume encore « au
manger » et au « boire », soit, à des
élément de conviction plutôt matériels
qu'idéologiques.147(*) Ensuite, leur statut de suiveurs semble les
réduire indéfiniment à jouer les seconds rôles.
Tantôt courtiers chez les élites urbaines et les big men,
tantôt animateurs lors des meetings politiques. Frustrée par son
incapacité à sortir de la domination bigmaniaque des
meneurs du jeu politique local qui tendent « à
pérenniser leur positionnement et dans une certaine mesure, leur
sédentarité »148(*) , incapable de tenir face à la concurrence,
lorsqu'elle ose s'y engager, ne pouvant ni redistribuer à grande
échelle, ni tutoyer véritablement les élites urbaines dont
la renommée précède souvent l'entrée en politique
pour la plupart ; cette catégorie de politiciens de
« second rang » cherche sa voie à travers d'autres
stratégies.
Cette nouvelle génération d'entrepreneurs
politiques149(*) a pour
principale démarche politique la revendication. En effet, dans
l'environnement politique de l'arrondissement de Zoétélé,
il règne depuis un certain nombre d'années, une atmosphère
de revendications doublée de dénonciations. Les entrepreneurs
politiques de la base se sentent exploités, cependant
écartés au moment du profit, ou encore au moment d'accéder
à des sphères porteuses de ce dernier150(*). C'est à cet effet
que de plus en plus, entend on relever, notamment dans les rangs du RDPC, un
certain nombre d'injustices. Du manque d'impartialité dans la
redistribution des avantages politiques et autres prébendes issus du
militantisme, à la non prise en compte des avis et doléances de
tous, notamment de la base. Ces militants prétendent à un
meilleur traitement et à plus d'estime, rebutent ainsi ce qu'ils
qualifient d'abus des meneurs du parti qui ne sont autres que les élites
urbaines. C'est à cet effet, que nous avons constaté de
nombreuses agitations lors du dernier renouvellement des organes de base du
RDPC dans la localité en décembre 2015. De nombreuses
velléités d'émancipation de la base militante, en manque
de visibilité et fatiguée d'évoluer à l'ombre des
puissantes élites urbaines mais aussi et surtout, soucieuse de rompre
avec les pratiques politiques qu'elle considère comme étant peu
orthodoxes, comme le souligne si bien Jean-Marie Nkoussa :
« Le département d'origine du chef de l'Etat et
président national du RDPC n'est pas épargné par [les]
contestations qui ont accompagné le renouvellement des organes de base
du parti au pouvoirà travers le triangle national ».151(*) « La ville
de Zoétélé, arrondissement de ce département, [Dja
et Lobo], est toujours empreinte à d'incessantes
jérémiades et cris stridents des militants frustrés par
les dysfonctionnements qui ont émaillé les élections dans
leur circonscription, en dépit des plaintes et complaintes
portées à l'attention de la commission départementale de
supervisiondes élections [mais] sans issue. Au centre, des accusations
de tripatouillages combinés au
népotisme ».152(*) Ce mouvement de contestations fut
créé par des disparitions mystérieuses de noms de certains
militants tels que Mme Ebanga (OFRDPC), entre autres, en faveur d'une militante
appartenant à l'une des factions dominantes et menée par une
élite urbaine de l'arrondissement. Quelle que fut l'issue de cet
épisode, il est avéré, au demeurant que les entrepreneurs
politiques constituants la base émettent au fil du temps davantage de
volonté de sortir de leur passivité servile pour se positionner
en tant qu'acteurs politiques à part entières dans la
localité. Et ce, malgré leur incapacité à mobiliser
des logiques bigmaniaques ou encore à faire valoir des lauriers
d'un quelconque capital social et symbolique.
CONCLUSION
Notons en guise de conclusion que la quête bigmaniaque
est en effet porteuse d'effets politiques dans l'arrondissement de
Zoétélé, tant en ce qui concerne la consécration,
à plusieurs niveaux des différents acteurs impliqués dans
le jeu politique ici, les élites, leur parti (RDPC) et leurs factions.
Cependant, cette quête bigmaniaque suscite quelques dysfonctionnements,
notamment à cause de l'hégémonie qu'elle consacre à
une certaine catégorie d'entrepreneurs politiques, toutes choses qui
implique des contestations de militants de la base constituant souvent la main
d'oeuvre de ces élites urbaines et de leurs différentes
factions.
CHAPITRE 4 :
IMPACT SOCIO-ECONOMIQUE DE LA QUETE BIGMANIAQUE DANS
L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
Bien qu'étant un élément davantage
mobilisé en politique, la quête bigmaniaque est aussi porteuse
d'effets du point de vue socioéconomique. Au-delà des
débats politiques, des batailles et rivalités divers, le facteur
concurrentiel ou non du bigmanisme contribue à influencer plus ou moins
cet arrondissement.
Le but du présent chapitre est de questionner l'apport
socioéconomique de la redistribution sous le prisme du
bigmanisme dans ses différentes dimensions
(évergétisme, concurrence, etc.) dans l'arrondissement de
Zoétélé d'une part (section 1), ensuite
de montrer dans quelle mesure cet apport contribue à faire rayonner
cette localité, bien que les rivalités entre les élites
nuisent quelques fois la dynamique évolutive de ce développement
d'autre part (section 2).
SECTION 1 : IMPACT DE LA QUETE BIGMANIAQUE SUR LE
DEVELOPPEMENT DE L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
Dans un contexte social, économique et politique
marqué par l'impact de la crise économique et des effets de
l'ajustement structurels des années 1990, l'Etat Camerounais s'est
heurté à de nombreuses difficultés quant à la
poursuite de son processus de développement153(*) face à son
incapacité d'assurer son rôle d'Etat providence. C'est à
cet effet que des personnes, dont des élites de divers horizons,
disposant de ressources diverses se sont
« appropriées » ce développement, contribuant
ainsi à soutenir tant bien que mal l'Etat dans son périple vers
la modernisation et le développement. S'activant davantage dans leurs
terroirs, les élites urbaines entre autres, contribuent à
influencer plus ou moins le progrès desdits terroirs.154(*)Il en est ainsi de
l'arrondissement de Zoétélé où les élites
urbaines influencent la dynamique socioéconomique tant à travers
un apport certain en infrastructures diverses que par l'influence de
l'activité économique, grâce à leurs
investissements.
Paragraphe 1er : Un apport
infrastructurel non négligeable
Le bigmanismesous toutes ses formes dans la
localité de Zoétélé est porteur d'une certaine
influence sur le développement infrastructurel. Autrefois un petit
village, cette localité érigée en district en 1958, puis
en arrondissement en 1962 a connu un développement plutôt lent.
Comme la plupart des villes de cet acabit, Zoétélé a
évolué, du point de vue infrastructurel dans ses premières
années après sa création au rythme des infusions de
l'Etat, autrefois seul pourvoyeur d'infrastructures et seul véritable
contributeur au développement social et économique. Cette
exclusivité sera amortie par la récession survenue dans les
années dites de crise, soit vers le milieu de la décennie 1980.
Dès lors, de nouveaux acteurs s'inviteront dans le processus de
développement de l'arrondissement de Zoétélé, aux
côtés de l'Etat dont l'action aura été plus ou moins
limitée. En effet, « à côté de l'Etat
qui avait jusque-là joué le rôle de principal et d'unique
promoteur du développement local, des acteurs privés et autres
organisations non gouvernementales se verront de plus en plus sollicités
pour insuffler une dynamique nouvelle dans le processus de développement
[...] ».155(*) Cet état des faits se consolidera par la
libéralisation qui aura suivi cette situation de crise. C'est dans ce
contexte qu'entreront en scène des acteurs tels que les élites
urbaines souvent à cheval entre l'entrepreneuriat économique et
l'entrepreneuriat politique, d'où l'aspect bigmaniaque
lié à leurs investissements, dans la mesure politique.
Loin des contextes occidentaux où les politiques de
développement des localités sont pensées et construites
sur des bases mobilisationnistes des divers acteurs sociaux156(*) : mobilisation ayant
pour objectif non seulement d'avoir une certaine maitrise des ressources
disponibles (ou à pourvoir), mais aussi d'impliquer tous les
différents acteurs au développement, le développement
infrastructurel dépend des efforts diffus des divers acteurs
privés, dont les élites urbaines. Ici, l'initiative desdites
élites est de nature privée et généralement
construite selon la totale liberté de l'initiateur, créant ainsi
un développement quelque peu anarchique de la localité comme le
souligne le Maire de Zoétélé, faisant état de
l'étroitesse de la ville, liée à un développement
non maitrisé : « L'endroit où est bâtie
la ville en ce moment commence à être étroit. Il faut donc
penser à reconstruire la ville ailleurs, [...] à la
sortie. »157(*) Cela étant, on observe avec une certaine
aisance des réalisations faites par des élites urbaines. Dans
cette perspective, nous pouvons citer à titre d'exemple la menuiserie
fort sollicitée par les populations locale mise sur pied par le
sénateur Calvin ZANG OYONO, un site hôtelier établit par
Rémy ZE MEKA, un site touristique aménagé par NDOUDOUMOU,
un foyer ouvert pour accueillir les élèves venus des villages et
d'ailleurs pour les études, oeuvre de MENGUE NKILI, etc.
Cependant, il est important de relever le fait selon lequel
« bien que le [processus] de développement [fasse]
intervenir une multitude d'acteurs sociaux »158(*), une grande partie de
ces acteurs sont des élites urbaines ; souvent doublées du
statut de big man, et du fait qu'elles soient dans une concurrence
quasi incessante, ces élites font ainsi de l'opportunité du
développement infrastructurel de l'arrondissement de
Zoétélé « un lieu d'affrontement
politique ».159(*) Au-delà des divers dons ponctuels
(infrastructures et accessoires scolaires et sanitaires, etc.) que les
élites urbaines offrent fréquemment à la localité,
il est observable qu'elles participent effectivement à son
développement infrastructurel.
Paragraphe 2 : Une
influence certaine de l'activité économique de la
localité
Le développement de l'arrondissement de
Zoétélé est, comme dans la plupart des villes de la
même envergure, dépendant d'un environnement
socioéconomique dynamique et des infrastructures favorables à
cette dynamique. A propos, l'apport infrastructurel lié à
l'initiative privée joue un rôle non négligeable dans le
processus de développement économique de cet arrondissement. En
effet, les élites urbaines, de par leurs différents
investissements, contribuent nettement, bien qu'à une échelle
relative à l'observation, à influencer positivement
l'activité économique de la localité.
Parallèlement, bien que la majeure partie des élites urbaines ici
évolue dans des initiatives isolées ou bien personnelles, force
est de constater que certaines d'entre-elles animent et dirigent des groupes
dits d'action locale. Un groupe d'action local doit être
« composé[s] de représentantsdes
intérêts socio-économiques locaux publics et privés,
tels que les entrepreneurs et leurs associations, les autorités locales,
les associations rurales ou de quartier, les groupes de citoyens, [...] les
organisations communautaires et volontaires, etc. »160(*) Bien que ne remplissant pas
tous ces critères, ces associations, sous l'impulsion
(généralement) des élites urbaines, oeuvrent, de par leurs
activités, au rayonnement de l'activité économique. Parmi
ces groupes, citons par exemple Le RESHOFEZ161(*) mis sur pied il y a plusieurs années par
Odile NGBWA, entourée de nombreux investisseurs locaux dont des
agriculteurs pour la plupart. Composée essentiellement de GIC et de
quelques investisseurs indépendants, cette association s'active
particulièrement dans l'accompagnent financier (par l'octroi de
microcrédits ou alors la facilitation de leur obtention dans une
micro-finance pour les demandeurs), logistique et en encadrement divers
(conseils, écoulement des produits sur le marché, etc.) de ses
partenaires, mais aussi dans l'investissement agricole. Bien qu'ayant une
portée relative, cette association contribue au développement de
l'activité économique de la localité.
Au-delà des initiatives en synergie telles que des
groupes d'action locale, l'investissement personnel représente le type
d'entrepreneuriat économique le plus répandu dans
l'arrondissement de Zoétélé. En effet, l'environnement
économique ici est dans sa grande partie impulsé par le secteur
agricole. De ce fait, on observe une multiplicité de plantations,
palmeraies, bananeraies, ananeraies, entre autres, appartenant à des
élites urbaines. Cependant, bien que les produits issus de ces
investissements ne soient quasiment pas écoulés dans
l'arrondissement, mais plutôt exportés vers d'autres
marchés, il importe de souligner l'offre en termes d'emplois tant
ponctuels qu'à durée indéterminée que créent
ces élites urbaines à travers leurs investissements. A
côté de l'activité économique agricole, d'autres
investissements liés au tourisme et au transport interurbain meublent
l'environnement économique au sein de l'arrondissement. Ainsi, bien que
«les élites urbaines [...] roulent pour leur propre compte,
celles-ci, à travers leurs actions participent au développement
de la localité ».162(*)
Par ailleurs, il serait opportun de souligner le niveau
d'influence quelque peu relatif de l'activité économique ici,
concernant les investissements des élites urbaines par rapport au
véritable potentiel économique de ladite localité. En
effet, au-delà des différentes initiatives permettant à la
localité de jouir d'un certain nombre d'infrastructures,
« les élites pourraient mettre en valeur tout le potentiel
économique dont jouit notre arrondissement. Le secteur du tourisme est
très peu exploité, aussi, la plupart investissent dans les
mêmes secteurs, comme l'agriculture alors qu'ils peuvent exploiter
d'autres secteurs et mieux développer l'arrondissement»comme
le soulignait si bien un patriarche lors de nos enquêtes.
SECTION 2 : QUETE BIGMANIAQUE : LE PARADOXE D'UN
FACTEUR DE DEVELOPPEMENT SOURCE DE SON PROPRE BLOCAGE
Du fait de son impact sur le développement
socioéconomique de l'arrondissement de Zoétélé, la
quête bigmaniaque contribue à son rayonnement. Cependant, si
l'idée d'une légitimation politique par la redistribution et le
bigmanisme sous ses multiples formes est assez
développée et démontrée par de nombreux
auteurs163(*), force est
de constater que la trop forte propension de ce phénomène
à Zoétélé est une source de ralentissement dudit
développement qui pourtant pourrait mieux se porter. Les
rivalités entre les élites de cette localité constituent
à cet effet un facteur retardant
Le but de la présente section est de montrer la
contribution de la quête bigmaniaque sur le rayonnement de
Zoétélé grâce à l'influence de son
développement d'une part, et d'autre part de mettre en lumière
l'impact des rivalités entre les élites comme étant un
facteur de ralentissement de ce développement.
Paragraphe 1er : Une
influence positive du rayonnement de l'arrondissement de
Zoétélé
L'influence de l'arrondissement de
Zoétélé par le bigmanisme concurrentiel en
général et dans le sens socioéconomique en particulier est
source d'un certain rayonnement pour cette localité. Du point de vue
socioéconomique, social et même politique.
Du pont de vue social, par l'apport au secteur de
l'éducation à travers le soutien des établissements de la
localité en termes d'offre en infrastructures, salles de classes, des
tables-bancs et du matériel didactique pour le corps enseignant. De
plus, il est organisé chaque année par certaines élites
des cérémonies de récompense des élèves de
l'arrondissement qui se sont distingués l'année scolaire
précédente.
Par ailleurs, l'organisation par des élites dont Jean
Jacques NDOUDOUMOU, entre autres, d'un certain nombre d'activités en
période de vacances scolaire n'est pas en reste ; en effet, chaque
année, il est organisé des championnats de vacances dans
plusieurs disciplines dont le football, le handball, le volleyball, etc.
A coté de ces activités, il est organisé
des cours de vacances et de remise à niveau pour les
élèves, de même que des campagnes de sensibilisation
liées à la sexualité, notamment les infections
sexuellement transmissibles, impliquant la jeunesse.
Du point de vue politique, les retombées pour la
localité en termes de postes au sein de la haute administration
étatique ces quinze années est dans une certaine mesure le fruit
de cette quête bigmaniaque dont font preuve les élites de cette
localité, faisant d'elle une zone pionnière dans le
département du Dja et Lobo. En effet, « la petite ville
aux allures de métropole qu'est Zoétélé fait une
exception dans la région du sud, département du Dja et Lobo. Et
parmi les arrondissements que compte ce département fief du chef de
l'Etat, Zoétélé est celui qui a le plus profité de
la générosité de Paul Biya [...] on se souvient qu'en
2004, l'arrondissement de Zoétélé comptait 04 de ses fils
au gouvernement au gouvernement, sans oublier les directeurs
généraux. Toute chose qui a frustré les élites des
autres arrondissements. Imbues d'elles-mêmes les élites de
Zoétélé se considéraient comme ressortissant d'un
département à part et narguaient même leurs frères
de Sangmelima qui se sentaient marginalisés.»164(*)
L'arrondissement de Zoétélé rayonne ainsi
à travers le dynamisme de ses élites, cependant ce rayonnement
serait meilleur si la quête bigmaniaque dont font preuve ces
élites n'était pas aussi poussée dans le sens de
l'entretien des rivalités entre les fils de ce terroir qui pourtant
constitueraient une force en s'unissant tel que cela fut le cas pendant un
certain nombre d'années. En effet il fut crée une ponctuation
annuelle au cours de laquelle les élites se réunissaient pour
tabler sur des questions liées au développement de la
localité. La FEDAZ165(*) avait en effet lieu tous les 13 février,
malheureusement les multiples rivalités et tensions entre les
élites ont conduit à sa déchéance.
Paragraphe 2 : Quête
bigmaniaque et ralentissement du développement de l'arrondissement de
Zoétélé
La quête bigmaniaque est dans l'arrondissement
de Zoétélé comme une épée à double
tranchant dans la mesure où elle exerce, à travers les actions et
investissements des élites, une certaine influence sur le
développement de la localité. Cependant la très forte
rivalité qu'entretiennent les élites de ce terroir fait de cette
quête bigmaniaque, une source de ralentissement dudit
développement.
Les rivalités entre les élites sont en effet un
frein au développement de Zoétélé, au regard du
potentiel dont regorge cette localité en termes de ressources humaines.
Ces rivalités ont conduit à la cessation de la collaboration
véritable entre les élites, notamment la fin de la fête
annuelle qui réunissait les dignes fils de Zoétélé
autour des problèmes de la localité. La soif de domination
entre les élites, constitue de ce fait une diversion au
développement de cette localité comme le souligne si bien NGWA
ELLA, un patriarche de la ville de Zoétélé,
« les élites auraient mieux développé notre
ville si elles mettaient de temps en temps leurs égos et leurs
affrontements politiques de coté, mais hélas, chacun veut que les
autres deviennent ses valets ». Il ajoutera à titre
d'illustration,« les adversaires de Polycarpe ABAH ABAHayant
appris qu'il voulait faire construire une route ici dans l'arrondissement, ils
ont tout fait pour le déstabiliser »166(*)
Aujourd'hui, « Zoétélé et
ses enfants s'entre déchirent, la chute, la trahison, la
décadence, la trahison, les coups bas [...] sont le leitmotiv des
élites. Cette guerre a commencé en 2004, pendant la campagne
présidentielle, et s'est accentuée en 2007 pendant les
élections législatives et municipales ».167(*)
Le fait désolant pour le processus de
développement de Zoétélé au regard de cet aspect de
la quête bigmaniaque est l'importation des batailles
politiques qu'il produit vers d'autres sphères, notamment en ce qui
concerne le secteur socioéconomique, mettant ainsi en cause le
développement de l'arrondissement au profit des querelles de personnes.
Les efforts de réconciliations sont dans la plupart du temps vains,
comme ce fut le cas le 14 février 2016 où, profitant de
l'occasion qu'offrait le meeting d'installation des membres élus des
bureaux des organes de base, le comité central du RDPC, à travers
son chef de délégation, le ministre MOTAZE avait essayé de
faire entendre raison à ces fils de Zoétélé comme
le décrit si bien Gérard ABEGA :
« autant le dire, si le meeting [...] a permis à BELINGA
EBOUTOU, MEBE NGO'O, [...] et NDOUDOUMOU de se tenir la main, image qu'on avait
plus vue à Zoétélé depuis belle lurette, il est
moins sûr qu'il a rapproché les militants déchirés
par les dissonances cognitives orchestrées par ces mêmes
élites. »168(*) Ceci montre la profondeur du
phénomène. Toute chose qui souligne l'aspect négatif de la
quête bigmaniaque dans l'arrondissement de
Zoétélé.
CONCLUSION PARTIELLE
La mobilisation des logiques bigmaniaquesà
travers la mise en exergue de leur capital social par les élites
urbaines produit dans l'arrondissement de Zoétélé de
nombreux effets tant sur le point politique que socioéconomique. En
effet, ce bigmanisme est porteurs de résultat favorables pour
ces élites urbaines et autres big men, et se
caractérisant par une accession effective à la
légitimité politique au sein de l'arrondissement. Une
légitimation se manifestant par une consécration politique
à plusieurs niveaux, notamment dans le cadre du parti dominant ici
(RDPC), pour les élites et enfin pour leurs factions. Il importe de
souligner que le bigmanisme et notamment la quête
bigmaniaque dans l'arrondissement de Zoétélé
influence la vie économique ; notamment en termes d'apport
infrastructurel et par une relative redynamisation de la quasi-totalité
de l'activité économique mais constitue aussi un frein à
ce développement dans la mesure où les élites cessent
rarement leurs rivalités pour tabler ensemble sur les problèmes
de la localité.
CONCLUSION GENERALE
La motivation initiale de cette étude était de
mettre en lumière un pan des multiples dynamiques de
légitimations politique au Cameroun, notamment dans l'arrondissement de
Zoétélé, département du Dja et Lobo, au sud du
pays. Dans ce travail, il était en quintessence question de la recherche
de légitimation politique basée sur la mobilisation des logiques
liées au bigmanisme, par les élites ;
bigmanisme doublé d'une forte dimension concurrentielle. Il
fallait éprouver l'idée du déploiement de la quête
bigmaniaque par les élites urbaines et les grands hommes,
particulièrement à travers la mise en exergue de leur capital
social et symbolique, de leurs influences multidimensionnelles, de leur poids
économique en plus de leurs différentes réalisations pour
la localité ; toutes choses constituant un gage d'accession
à la légitimité politique grâce à
l'accroissement de leur capital social. Cette approche aura constitué la
principale hypothèse de cette étude. Suivie d'une double
hypothèse secondaire.
Dans un premier temps, il s'est agi de présenter la
quête bigmaniaque comme étant un facteur important, quasi
indispensable dans le champ politique de l'arrondissement de
Zoétélé en termes de construction d'un capital social et
de recherche de légitimité politique. Ceci, au regard de la place
qu'elle occupe dans le processus de légitimation des élites
urbaines et des grands hommes. En effet, dans la perspective d'Ibrahim
Mouiche169(*), nous
avons montré la nécessité du bigmanisme,
notamment du facteur redistributif tant dans la construction et la
consolidation d'un capital social que dans la conversion dudit capital en
légitimité politique. La démarche, marquée par
l'étude de quelques cas de recherche et de mobilisation du capital
social et symbolique nous a permis de souligner le caractère
nécessairement constant du bigmanisme comme moyen de
légitimation politique dans cette localité. Ensuite, nous nous
sommes attardés sur les multiples éléments de
compétition participant de cette recherche de légitimité
mettant en marche des processus concurrentiels entre les élites. Dans un
second temps, il s'est agi, dans une perspective de mise en lumière de
la portée effective de la quête bigmaniaque dans cette
localité en termes politique mais aussi socioéconomique. D'une
part, nous avons observé les différents niveaux d'impact
politique de ce phénomène. D'abord pour le parti, ensuite pour
les élites et enfin pour les factions en présence dans la
localité. Ensuite, nous avons questionné l'impact
véritable de la quêtebigmaniaque dans l'arrondissement de
Zoétélé. A ce propos, nos travaux sur le terrain nous ont
permis de relever de multiples apports au niveau du développement local
liés à ce phénomène. Entre autre, une certaine
influence de l'activité économique, de même qu'un apport
infrastructurel non négligeable et nettement profitable à la
communauté. Cependant,une analyse plus approfondie a permis de relever
le caractère vicieux des logiques bigmaniaques comme facteur de
développement au regard des rivalités quasi incessantes entre les
principaux acteurs de la scène politique à
Zoétélé, dont les élites urbaines.
En dernière analyse, notre travail aura permis de
mettre en lumière la quête bigmaniaque comme facteur de
positionnement et d'accession à la légitimité politique au
Cameroun, et, notamment dans l'arrondissement de Zoétélé.
Véritable instrument politique entre les mains des élites
urbaines, le bigmanisme est néanmoins porteur de plusieurs
effets tant profitable aux élites urbaines qu'à la
localité où il est mobilisé. Cela étant, il y a
lieu de souligner pour sortir, que la quête bigmaniaque est,
à bien y regarder, plus propice à limiter l'émergence de
nouveaux paradigmes politiques tels que l'affrontement purement
idéologique, entre autres.
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www.érudit.org
www.karthala.com
www.mémoireonline.com
www.minatd.cm
www.nkul-beti-camer.com
www.persee.fr
www.politique-africaine.com
www.rdpcpdm.cm
www.statistics-cameroon.org
www.uquac.uquebec.ca/zone30/Classique_des_sciences_sociales/index.html
www.zoeteleactu.com
LISTE
DES ANNEXES
ANNEXE 1 : PROTOCOLE D'ENTRETIEN AVEC LE MAIRE DE
ZOETELE.
ANNEXE 2 : PROTOCOLE D'ENTRETIEN AVEC LES ELITES
URBAINES.
ANNEXE 3 : PROTOCOLE D'ENTRTIEN AVEC LES POPULATIONS DE
L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE, DONT DES MILITANTS DU RDPC.
ANNEXE 4 : CARTE DE L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE
ANNEXE 5 : QUELQUES REALISATIONS ET INVESTISSEMENTS DES
ELITES URBAINES AU SEIN DE L'ARRONDISSEMENT.
ANNEXE 1 : PROTOCOLE D'ENTRETIEN AVEC LE MAIRE
DE ZOETELE.
1- Le milieu d'origine :
- Clan, famille.
- Parcours scolaire
- Arrivée en ville.
2- Découverte de la
politique :
- Premier contact avec la politique (référence
ou modèle ayant inspiré sa jeunesse)
3- Entrée en politique :
- Premier engagement politique (année, âge,
motivation de l'époque)
- Les rapports entre la politique et le sociale.
4- Action politique et sociale au plan
local :
- Qu'est-ce qui la pousse à l'action ?
- Les motivations
- le sens donné aux actions
5-Quelques données chiffrées sur les
investissements.
6-Les actions sociales posées avant
l'engagement politique ont-elles contribuées à construire, sinon,
à renforcer sa légitimité politique dans l'arrondissement
?
7- les relations avec les autres Grands Hommes de
l'arrondissement :
- Qu'est-ce qui vous distingue de ces autres leaders ?
- Qu'est-ce qui vous distingue de MENGUE NKILI à qui
on vous compare et vous oppose très souvent ?
8- Les relations avec le Président de la
République
9- Quelle est votre ambition politique
suprême ?
10- Quelle image souhaitez-vous que l'on retienne de
votre engagement dans la vie politique camerounaise en général et
de ZOETELE en particulier ?
ANNEXE 2 : PROTOCOLE D'ENTRETIEN AVEC LES
ELITES URBAINES.
1-Le milieu d'origine :
-clan (père, mère...)
-La place dans la famille
2 -Parcours scolaire et
académique
-le primaire et le secondaire (école, lieu, date...)
-l'université :
-l'année du Baccalauréat
-les facultés fréquentées
-les diplômes obtenus
3-Parcours professionnel et
politique
-les étapes marquantes de votre carrière
professionnelle
-Carrière politique
-premier engagement politique (année, âge,
motivation de l'époque)
- les rapports entre votre profession et la politique
4-Action politique au plan
local : de l'intérêt pour l'arrondissement.
Une enquête dans l'arrondissement vous fait
apparaître comme l'une des principales personnalités de
ZOETELE.
-Qu'est -ce qui vous pousse à participer aux
compétitions politiques dans l'arrondissement ?
-Quelle interprétation donnez-vous à vos
résultats lors des diverses élections locales ?
-Que recherchent les élites urbaines dans
l'arrondissement ?
5-Avez-vous posé des actes
allant dans le sens du développement de l'arrondissement ? Si oui
lesquels ? Pensez-vous qu'elles ont contribuées à
améliorer votre image, mieux, qu'elles vous ont permis de gagner en
légitimité du point de vue politique ?
6 -Vos relations avec les autres
élites de l'arrondissement.
8- Quel regard portez-vous sur la vie
politique locale à ZOETELE depuis1990 ?
ANNEXE 3 : PROTOCOLE D'ENTRTIEN AVEC LES
POPULATIONS DE L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE, DONT DES MILITANTS DU
RDPC.
1- D'après vous qu'est-ce qu'une élite ?
2- Que vous inspirent les différentes
réalisations des élites dans la localité ?
3- Comment les élites construisent-elles leur
réputation auprès des populations ?
4- Quels types de relation les élites urbaines
entretiennent-elles avec les populations de la localité ?
5- Existe-t-il des luttes de leadership ou des divisions entre
les élites ?
ANNEXE 4 : Carte de l'arrondissement de
Zoétélé
SOURCE : INSTITUT NATIONAL DE LA
CARTOGRAPHIE
ANNEXE 5 : QUELQUES REALISATIONS ET
INVESTISSEMENTS DES ELITES URBAINES AU SEIN DE L'ARRONDISSEMENT DE
ZOETELE.
ELITES
|
REALISATIONS
|
Rémy ZeMeka
|
Des plantations (dont une grande palmeraie) ; des
investissements immobiliers dans la ville de Zoétélé.
|
Polycarpe AbahAbah
|
Des plantations (dont une palmeraie étalée sur
environs 180 hectares) ; une « petite » usine
(MeyilaOil Corporation) de transformation d'huile de palme, notamment en
plusieurs produits dérivés dont des savons, etc.
|
Jean Jacques Ndoudoumou
|
Un domaine touristique dans le village Mvoutessi.
|
Martin Belinga Eboutou
|
Des plantations dont une grande palmeraie.
|
(Source : enquêtes)
TABLE
DES MATIERES
AVERTISSEMENT
i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
SOMMAIRE
iv
RESUME
v
ABSTRACT
vi
INTRODUCTION GENERALE
1
I - LA CLARIFICATION CONCEPTUELLE
4
A- Elite/ élites
4
B- Bigmanisme/ Quête bigmaniaque
7
C- Légitimation politique
8
II- REVUE DE LA LITTERATURE 10
III- LA PROBLEMATIQUE DE L'ETUDE
16
IV- HYPOTHESES DE L'ETUDE
18
V- LA DETRMINATION DU CHAMP DE L'ETUDE
19
VI- CONSIDERATIONS METHODOLOGIQUES 22
A- Les méthodes d'analyse :
l'ethnométhodologie et la méthode interactionniste 22
1-L'ethnométhodologie 22
2- La méthode interactionniste 23
B- Les techniques de collecte des données : la
recherche documentaire, l'entretien et l'observation participante 25
1- La recherche documentaire 25
2- L'entretien 26
3- L'observation participante 27
PREMIERE PARTIE : TRAJECTOIRES DE DEPLOIEMENT DU
BIGMANISME ET MOBILISATION DU CAPITAL SOCIAL DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE.
29
CHAPITRE 1 : QUETE BIGMANIAQUE ET RECHERCHE DU CAPITAL
SOCIAL PAR LES ELITES URBAINES DE ZOETELE 31
SECTION I : RECHERCHE DU CAPITAL SOCIAL PAR LES ELITES
BUREAUCRATIQUES 33
Paragraphe I : Les élites politico administratives
33
Paragraphe 2 : Les fonctionnaires reconvetis en
politique: de la nécessité de consolider leur capital social
36
SECTION II : RECHERCHE DU CAPITAL SOCIAL PAR LES
ENTREPRENEURS ECONOMIQUES 38
Paragraphe 1 : Pauline Mengue Nkili : du souci
d'émancipation à l'activisme politique.. 38
Paragraphe 2: Ngbwa Odile : de l'action
socioéconomique à l'entrepreneuriat politique.. 40
CONCLUSION 41
CHAPITRE 2 : RECHERCHE DE LEGITIMITE POLITIQUE ET LUTTES
FACTIONNELLES 42
SECTION 1 : RECHERCHE DE LEGITIMITE POLITIQUE 44
Paragraphe 1 : Recherche de légitimité
politique et mise en exegue du capital social 44
Paragraphe 2 : Recherche de légitimité
politique et mobilisation de ressources diverses.. 46
SECTION 2 : CONCURRENCE POLITIQUE ET LUTTES FACTIONNELLES
50
Paragraphe 1 : En période électorale...
51
Paragraphe 2 : En période non électorale
54
CONCLUSION PARTIELLE 57
DEUXIEME PARTIE : IMPACT SOCIOPOLITIQUE ET ECONOMIQUE DE
LA RECHERCHE BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 58
CHAPITRE 3 : DE LA PORTEE POLITIQUE DE LA QUETE
BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 60
SECTION 1 : UN EFFET DE CONSOLIDATION DE LA DOMINATION
PARTISANE 61
Paragraphe 1 : De larges plébiscite comme
portée politique de la quête bigmaniaque: le cas du RDPC aux
élections présidentielles de 2004 62
Paragraphe 2 : Une consécration du parti lors des
élections locales 63
SECTION 2 : PORTEE POLITIQUE DE LA QUETE BIGMANIAQUE SUR
LES ELITES 64
Paragraphe 1 : Promotion des élites urbaines et
bureaucratiques: un feedback favorable. 64
Paragraphe 2 : Consécration électorale des
élites comme portéepolitique de la quête bigmaniaque 66
SECTION 3: IMPACT POLITIQUE DE LA QUETE BIGMANIAQUE SUR
LES DIFFERENTES FACTIONS....67
Paragraphe 1: Hégémonie du parti et
consécration des élites: Une victoire des factions..67
Paragraphe 2: Quête bigmaniaque et
dysfonctionnement des factions et du RDPC à
Zoétélé: l'éveil d'une nouvelle
génération d'entrepreneurs politiques...69
CHAPITRE 4 : IMPACT SOCIO-ECONOMIQUE DE LA QUETE
BIGMANIAQUE DANS L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 72
SECTION 1 : IMPACT DE LA QUETE BIGMANIAQUE SUR LE
DEVELOPPEMENT DE L'ARRONDISSEMENT DE ZOETELE 74
Paragraphe 1er : Un apport infrastructurel non
négligeable 74
Paragraphe 2 : Une influence certaine de
l'activité économique de la localité 76
SECTION 2 : QUETE BIGMANIAQUE: LE PARADOXE D'UN FACTEUR
DE DEVELOPPEMENT SOURCE DE SON PROPRE BLOCAGE 77
Paragraphe 1er : Une influence positive du
rayonnement de l'arrondissement de Zoétélé 78
Paragraphe 2 : Quête bigmaniaque et ralentissement
du développement de l'arrondissement de Zoétélé
79
CONCLUSION PARTIELLE 81
CONCLUSION GENERALE 82
BIBLIOGRAPHIE 85
LISTE DES ANNEXES 93
TABLE DES MATIERES 100
* 1 BAKO-ARIFARI,
Nassirou ; 1995, « Démocratie et logique du terroir
au Bénin». in Politique africaine, nr. 59 :7-24.
« Par logiques de terroir, il faut entendre l'ensemble des
mécanismes et modes d'interférence des considérations
d'ordre villageois dans l'exercice quotidien des activités politiques et
dans le processus de promotion des élites au niveau
national ».
* 2Dogan MATTEI ; 1967,
« les filières de la carrière politique en
France ». in Revue française de sociologie,
8-4, pp 468-492.
* 3 ABE, C,
« espace publique et recompositions de la pratique politique au
Cameroun » in polis/RCSP/CPSR. Vol 13, Numéros 1-2.
* 4 Cité par YANKEU
YANKEUYanik ; 2008, in «l'évaluation à mi-parcours
des projets de développement communautaire : le cas des puits
à pompe du projet d'appui au développement communautaire (PADC)
de Mebomo et de Bikogo (centre-Cameroun)». Mémoire de Master
en développement et management des projets en Afrique.
Université catholique d'Afrique centrale, Yaoundé.
* 5LAURENT PIERRE
Joseph ; Le « big man » local ou la
« gestion coup d'État » de l'espace
public », Politique africaine 4/2000 (N° 80),
p. 169-181
* 6KENGNE FODOUOP ;
2003, Citadins et développement des
campagnes au Cameroun, Paris, Harmattan.
* 7Dogan MATTEI ;
op. cit. p 475
* 8Daloz, J.P, concepteur de
la notion de quête bigmaniaque comme étant «le souci [des big
men] de s'ériger en figure politique dominante, écrasant toute
concurrence [...] ». Cité par MOUICHE. Ibrahim, in cours
d'anthropologie politique, Master 2, science politique, université
de Yaoundé 2-SOA, avril 2014.
* 9 DURKHEIM, E. ; 1894,
Les règles de la méthode sociologique, Paris,
Quadrige
* 10GRAWITZ M ; 1993,
Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 9ème
éd
* 11 V. Pareto, 1968,
Traité de sociologie générale. OEuvres
complètes : tome XII. Librairie Droz.
* 12Aron R;
1971, « Classe sociale, classe
politique, classe dirigeante » in BIRNBAUM et CHAZEL, Pp.
132-133
* 13R. Bourdon, 1990,
Dictionnaire critique de la sociologie, Paris. Cité par
Leferme-Frédérique et Van Renterghem Vanessa in « le
concept d'élite » Approches historiographiques et
méthodologiques, Hypothèses, 2000/1 p. 55-67.
*
14Leferme-Frédérique et Van Renterghem Vanessa in
«le concept d'élite» Approches historiographiques et
méthodologiques, Hypothèses, 2000/1 p. 55-67.
* 15Wright Mills C; 1956,
The Power Elite.
16Ibid.
17Aron R. 1971.Op.
Cit.
18Busino G cité par Coenen-huther, 2004,
sociologie des élites, Paris, Arman collin,
19Mosca G; 1896, Elementi di
Scienzepolitica.
* 16Mosca G; 1896,
Elementi di Scienzepolitica.OPcit
* 21Wright Mills C, Op.
cit.
* 17DAHL. R; 1961, Who
governs ?
23 Rocher.G, 1992; Introduction à la
sociologie générale: l'action sociale, l'organisation sociale, le
changement social, vol.1. Hurtubise HMH, 3è éd. 685
p.
* 18KENGNE FODOUOP; op.
cit.
* 25 MOUICHE, I. ;
2005,Autorités traditionnelles et démocratisation au Cameroun
entre centralité de l'État et logique de terroir, Munster,
LIT VERLAG, pp 49.
26 MOUICHE, Ibrahim, cité par NUEMBISSI KOM,
Paul in «élites urbaines et politique locale au Cameroun :
Le cas de Bayangam ». Mémoire de Master en science
politique, université de Yaoundé 2, 2007.
* 19Notion
développée par jean Pascal DALOZ en 1999 dans l'ouvrage collectif
(dirigé par cet auteur) intitulé Le (non-)
renouvellement des élites en Afrique subsaharienne, Talence, Cean,
Institut d'Études Politique de Bordeaux
28SAHLINS M.; 1963, ·Poor Men, Rich Men,
chief: political types in Melanesia and Polynesia· in Comparative
studies in society and history, vol. 3, April.
29 MOUICHE I. ;2004,« Processus de
démocratisation et rotation locale des élites au
Cameroun » in Law and Politics in Africa, Asia and Latin
America, N°4, pp 401-431
* 20FAURE Y.A. et
MÉDARD J.F. ; 1995, « L'État-
business et les politiciens entrepreneurs. Néo-patrimonialisme et Big
men : économie et politique »in ELLIS et FAURE
(dir), Entreprises et entrepreneurs
* 21DALOZ J.P.; 1999.Op.
Cit.
* 22GRAWITZ, M. ;
1983, Lexique des sciences sociales, Dalloz, 2è
édition.
33 GAXIE, D. ; 1996,La démocratie
représentative, Paris, Montchrestien.
* 34RANGEON, F; 1991, La
communication politique, Paris, PUF.
* 36WEBER, M. ; 1959,Le
savant et le politique, Paris, Plon. P 102.
* 23Ibid.
* 24 GATELIER K. 2005.
La représentation du pouvoir : la quête de
légitimité politique.
* 25 Ibid.
* 26 DUMEZ, 2001,
cité par (G.) FONKENG, (C. I.) CHAFFI, (J.) BOMDA, Précis de
méthodologie de recherche en sciences sociales,
Yaoundé-Cameroun, ACCOSUP (Association camerounaise de coaching et
d'orientation scolaires, universitaires et professionnels), 1ere
édition février 2014, p. 49.
* 27MOUICHE I, 2012,
« Démocratisation et intégration sociopolitique des
minorités ethniques au Cameroun ». Codesria, Dakar.
* 28MOUICHE I, 2012,
« Démocratisation et intégration sociopolitique des
minorités ethniques au Cameroun ». Codesria, Dakar.Op
cit, citant LAPEYRONNIE
* 29Mouiche. I ; 2004,
«processus de démocratisation et rotation locale des
élites au Cameroun».inLaw and Politics in Africa, Asia and
Latin America, N°4, pp 401-431
* 43 FERRAND A ; 1996,
«capital social comme échange social», colloque,
trente ans de sociologie. Institut de sociologie de Lille, Lille de France.
44 BOURDIEU P. 1980, «le capital social.
Note provisoires». Actes de la recherche en sciences sociales
* 30 COLEMAN. J. S; 1988,
«Social capital in the creation of human capital». American
journal of sociology, vol 94 pp 95-120
* 31 FERRAND A. 1996.
Supra.
47Ibid.
* 48Ibid.
* 32Zelao.
A. ;«élites traditionnelles et domination dans le champ
politique local : illustration à partir de l'arrondissement de
Tokombéré dans l'extrême nord Cameroun». Article
lu sur le
sitehttp://research.uni-leipzig.de/eniugh/congress/fileadmin/eniugh2011/papers/Zelao_Elit_traditionel_et_chanp_politic.pdf
* 33 Ibid.
* 34ibid
* 35ibid
* 36FAURE Y.A. et
MÉDARD J.F. ; 1995,«L'État- business et les politiciens
entrepreneurs. Néo-patrimonialisme et Big men : économie et
politique »in ELLIS et FAURE (dir), Entreprises et
entrepreneurs africains, Paris, Karthala/ Orstrom, Pp. 289-309
* 37Ibid, (citant Terray,
1986) pp. 290-293
* 38ibid
* 39FAURE Y.A. et
MÉDARD J.F. ; 1995. «L'État- business et les politiciens
entrepreneurs. Néo-patrimonialisme et Big men : économie et
politique »in ELLIS et FAURE (dir), Entreprises et
entrepreneurs africains, Paris, Karthala/ Orstrom, Pp. 289-309Op.
Cit.
* 40Cité par
Médard J.F. in «L'Etat patrimonialisé»,
Bordeaux, IEP-CEAN, 1995
* 58Max WEBER ; 1963,
Op. Cit.
* 59LAURENT P.J ; 4/
2000, Op. Cit.
* 41Mouiche. I. 2008,
«Multipartisme, « bigmanisme » politique et
démocratisation au Cameroun». Yaoundé II, Revue
africaine d'étude politique et stratégique (RAESP), n° 5.
* 42 Expérience
vécue par François Faverjon.
* 43 MOUICHE I. 2008.
CitantFaverjon.Op cit.
* 44DIONNE B. 1998.Guide
méthodologique pour les études et la recherche,
3è éd. Etudes vivantes, pp190-196.
* 45 MOUICHE
I.Op.cit.
* 46GESCHIERE P.,
1995, » Sorcellerie et politique en Afrique. La viande des
autres », Paris, Karthala.
* 47TREMBLEY R. &
PERRIER Y. ; 2006, Savoir plus : outils et méthodes de
travail intellectuel, Les éditions de la Chenelièreinc.
2e édition.
* 48 Source :
www.zoétéléactu.com
(Site visité le 07 juin 2015).
* 49 Rassemblement
démocratique du peuple camerounais.
* 50 Social Democratic
Front
* 51 Union Nationale Pour La
Démocratie et Le Progrès.
* 52GRAWITZ. M. 1993. Op
cit.
* 53MUCCHIELLI, A ;
1996, Dictionnaire des méthodes qualitatives en sciences humaines et
sociales, Paris : Armand Colin. 2e édition.
* 54DORTIER, J.F, 2005,
Dictionnaire des sciences humaines. Paris : Editions Sciences
Humaines.
* 55GARFINKEL.H.1967.
«Studies in ethnomethodology». Englewood Cliffs, New Jersey:
Prentice-Hall.
* 56Ibid
* 57GARFINKEL H. 1967.
Op cit.
* 58COULON A. ; 1987,
L'ethnométhodologie, Paris, PUF
* 59NJOYA Jean. 2012,
cours de sociologie des organisations, Master 1. Université de
yaoundé 2- Soa
* 60NJOYA Jean. 2012,
cours de sociologie des organisations, Master 1.Op. cit
* 61Cité par ZOLESIO
E. In « préparation à l'agrégation
sociale ». ENS-LSH Lyon.
* 62 CROSIER M. &
FRIEDBERG E. 1977. L'acteur et le système. Le Seuil.
* 63 CROSIER M. &
FRIEDBERG E. 1977. L'acteur et le système.
Opcit.
* 64LAGROYE J. 1991,
Sociologie politique, Paris, P.F.N.S.P/Dalloz
* 65 LEBRETON D. 2004,
L'interactionnisme symbolique, Paris, PUF, Quadrige Manuels, 249 p.
* 66 GRAWITZ. D,
1993.Op. cit.
* 67 ASSIE, G.R. &
KOUASSI R.R.Cours d'initiation à la recherche, ABIDJAN,
EPCCI.
* 68ASSIE, G.R. &
KOUASSI R.R. op.cit.
* 69 GRAWITZ M.1993. Op.
Cit.
* 70 Lo. Ibrahima ;
Cours de méthodologie de la rechercheen science
sociale.Université Cheikh AntaDiop, Dakar.
* 71 REVILLARD A. Cours
d'introduction à la sociologie. Université Paris 13 - L1
AES.
* 72 BECKER H. 2003.
« inférence et preuve en observation participante.
Fiabilité des données et validité des
hypothèses ». In L'enquête de terrain, sous la
direction de Céfai Daniel, Paris, La découverte, p350-351.
Cité par REVILLARD. In Cours d'introduction à la sociologie.
Université Paris 13 - L1 AES.
* 73REVILLARD A.
Supra.
* 74HUGHES E.C.
1996.« La place du travail de terrain dans les sciences
sociales.», in Le regard sociologique, Paris : EHESS,
p.267.
* 75BAYART J.F. 1989,
Op. Cit.
* 76 NOUEMBISSI KOM ;
2007, Op. Cit. Citant Olivier de SARDAN
* 77 BOURDIEU P.
1980.Op. Cit.
* 78 MOUICHE I. 2004.
Op. Cit.
* 79LAURENT P.J. 2000. Op.
Cit.
* 80 BIRNBAUM P. 1973.
Le pouvoir local : de la décision au système. In:
Revue française de sociologie, 14-3 ; pp. 336-351
* 81 WEBER M.Le savant
et le politique. Op.cit. p. 137.
* 82 LAURENT P.
J.« Le « big-man » local ou la
« gestion coup d'Etat » de l'espace
public ». Politique africaine 4/2000 (N° 80), p. 169-191.
OP. Cit.
* 83 Journaliste.
Rédacteur en chef du Magazine « King Zok »
* 84
www.zoeteleactu.com
* 85 Propos recueillis par
Pierre Rostand Essomba, in « Prosper MériméMonessel
chez les siens », Cameroon-Tribune du 06 Août 2015.
* 86 Propos recueillis par
Pierre Rostand Essomba, in « Prosper MériméMonessel
chez les siens », Cameroon-Tribune du 06 Août
2015.Op.cit.
* 87 Cité par
MOUICHE, 2005 ; Autorités traditionnelles et
démocratisation au Cameroun entre centralité de l'État et
logique de terroir, Munster, LIT VERLAGOp.cit.
* 88 Max WEBER, Le savant
et le politique, op.cit., p. 137.
* 89 Collège
d'enseignement technique, industriel et commercial.
* 90 Mouvement
Démocratique pour la défense de la République. Parti de
l'opposition dirigé par DAKOLE DAISSALA. Ce parti est faiblement
représenté dans cette localité, contrairement au
rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).
* 91 Le comité
central du RDPC est composé de quatre organes de base dont (selon
l'ordre croissant) la cellule, le comité de base, la sous section et la
section.
* 92 Organisation des
femmes du rassemblement démocratique du peuple camerounais.
* 93 Ibrahim MOUICHE,
« Processus de démocratisation et rotation locale des
élites au Cameroun », op.cit. p. 401.
* 94 Sur le
« straddling » (chevauchement) lire à cet
effet, Jean- François BAYART, L'Etat en Afrique, Paris, Fayard,
1989, p. 132 ; J.-F. MEDARD, « Consolidation démocratique
et changement des élites au Botswana : du parti dominant au
bipartisme » in J.-P. DALOZ, Le (non-)renouvellement des
élites en Afrique subsaharienne, Bordeaux, CEAN, 1999. Pp.
187-215 ; Y.-A. FAURE et J.-F. MEDARD, « L'Etat business et les
politiciens entrepreneurs. Néo-patrimonialisme et Big
men : économie et politique », Paris, Karthala,
1995, p. 298.
* 95 Briquet L. 1997.
La tradition en mouvement, clientélisme et politique en Corse.
Belin.
* 96 Notons que la
quasi-totalité des grands hommes et élites urbaines à
Zoétélé sont membres du RDPC, parti dominant dans cette
localité.
* 97 TSANA NGUEGANG R.
2015/4 ; « Entrepreneur-politiciens et populations locales
au Cameroun. Entre clientélisme et échanges
mutuels ». Cahier d'études africaines, N° 220. 248
p.
* 98 LAURENT PIERRE-JOSEPH,
« Le « big-man » local ou la
« gestion coup d'Etat » de l'espace
public », Politique africaine 4/2000 (N° 80), p. 169-191.
OP. Cit.
* 99Banégas, R.
1998 ; « Bouffer l'argent. » Politique du ventre,
démocratie et clientélisme au Bénin ». Le
clientélisme politique dans les sociétés contemporaines.
Puf.
* 100 MOUICHE I. 2008,
«Multipartisme, « bigmanisme » politique et
démocratisation au Cameroun». Yaoundé II, Revue
africaine d'étude politique et stratégique (RAESP), n° 5.
Op. Cit.
* 101 L'expression
« festin électoral » est employée par
Antoine SOCPA pour désigner un pan des différentes formes de
redistributions liées aux périodes électorales dans
l'espace politique camerounais. Cet auteur met en exergue la place de ce qu'il
appelle « des dons électoraux » pendant les
campagnes électorales dans ce champ d'étude, ainsi que leur
capacité à mobiliser de nombreuses personnes en faveur des
donateurs, les politiciens en l'occurrence. In « les dons dans le
jeu électoral au Cameroun », cahiers d'études
africaines [en ligne], 157|2000, mis en ligne le 20 novembre 2013,
consulté le 19 juin 2016. URL :
http://etudesafricaines.revues.org/5
* 102 SOCPA A. 2000 ;
Ibid.
* 103 FAURE Y.A., MEDARD
J.F. 1995, « L'Etat-business et les politiciens entrepreneurs,
Néo-patrimonialisme et big men : économie et
politique : économie e politique » in Ellis S. (ed)
FAURE YVES-ANDRE (ED), Entreprise et entrepreneurs africains. Paris, Karthala
p.289-309. Op. Cit.
* 104 Genieys William.
2011 ; Sociologie politique des élite(s). Armand Colin-
Collection U. Sociologie.
* 105 MEDARD J.F. 1990.
« L'Etat patrimonialisé » in Politique africaine
n° 39 p.25-36
* 106 FAURE Y.A., MEDARD
J.F. 1995, « L'Etat-business et les politiciens entrepreneurs,
Néo-patrimonialisme et big men : économie et
politique : économie e politique » in Ellis S. (ed)
FAURE YVES-ANDRE (ED), Entreprise et entrepreneurs africains. Paris, Karthala
p.289-309.
* 107 BIGOMBE LOGO
P.« Les élites et la gestion décentralisée
des forêts au Cameroun. Essai d'analyse politiste de la gestion
néo-patrimoniale de la rente forestière en contexte de
décentralisation ».in CERAD-GEPAC-GRAPS. P 18.
* 108 FAURE Y.A., MEDARD
J.F. 1995 idem.
* 109 Organisation non
gouvernementale.
* 110 BIGOMBE LOGO
P.« Les élites et la gestion décentralisée
des forêts au Cameroun. Essai d'analyse politiste de la gestion
néo-patrimoniale de la rente forestière en contexte de
décentralisation ». Op. Cit.
* 111Que sont les grands
hommes et les élites urbaines (dont certains sont des big men).
* 112 MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M ; 2006 ; « Les Elites Urbaines et
le développement local au Cameroun », GEO I NOVA, Revista
do departamento de Geographia e planeamentoRegional, Lisboa, n° 12, pp.
107- 128.
* 113 Fond spécial
d'équipement et d'intervention intercommunale.
* 114 FAURE Y.A., MEDARD
J.F. 1995, « L'Etat-business et les politiciens entrepreneurs,
Néo-patrimonialisme et big men : économie et
politique : économie e politique » in Ellis S. (ed)
FAURE YVES-ANDRE (ED), Entreprise et entrepreneurs africains. Paris, Karthala
p.289-309. Op. Cit.
* 115 MBEMBE A.
« Pouvoir, violence et accumulation », in :
(J.-F.) BAYART, (A.) MBEMBE, (C.) TOULABOR, (dir.), Le politique par le bas
en Afrique noire. Contributions à une problématique de la
démocratie, Paris, Karthala, 1992, p. 245.
* 116 Luc SINDJOUN,
« Science politique réflexive et savoirs sur les pratiques
politiques en Afrique noire ». Op.cit., p. 26.
* 117 DALLOZ J.P.
«le souci [des big men] de s'ériger en figure politique
dominante, écrasant toute concurrence [...] ».
Cité par MOUICHE Ibrahim, in cours d'anthropologie politique,
Master 2, science politique, université de Yaoundé 2-SOA, avril
2014. Op. Cit.
* 118Léopold Clovis
Noudjio. « Cameroun/Zoétélé-MebeNgo'o et
MengueNkili: La guerre ne fait que commencer ». In Journal
L'Epervier du 09 juillet 2013.
* 119 La version des faits
de l'ancien maire MengueNkili concordera avec celle de Léopold Clovis
Noudjio du journal L'Epervier, notamment en ce qui concerne la lutte de
factions l'ayant opposée à l'actuel maire (Odile Ngbwa), soutenue
par Le ministre MebeNgo'o qui « avait
juré » selon ses propos de la faire partir de la mairie
de Zoétélé après qu'ils se soient brouillés
quelques années plus tôt. « il ne supporte pas qu'on
s'oppose à lui de quelque manière que ce soit, il faut soutenir
« sa cause » même si elle est injuste ; et comme
moi je suis intègre il a fait de moi son adversaire ».
Elle précisera cependant que le pasteur cité dans l'article
n'était qu'un ami de longue date qui l'a certes beaucoup soutenue par la
prière, et non un allié politique, et qu'il subissait
malgré lui les effets d'une adversité avec laquelle il n'avait
rien à voir, apolitique qu'il est.
* 120 Extrait de la
requête adressée au président de la commission communale de
renouvellement des bureaux des organes de base du secteur politique Dja et Lobo
2.
* 121Madame EBANGA nous
dira que certains fils du terroir, hauts cadres de la République et
membres influents du RDPC n'apprécient pas son dynamisme politique au
sein de la localité. Elle n'en dira pas davantage.
* 122 Organisation des
jeunes du rassemblement démocratique du peuple camerounais.
* 123 SOCPA Antoine,
« Les dons et contre dons dans le jeu électoral au
Cameroun », Cahier d'études africaines [En ligne], 157|
2000, mis en ligne le 20 novembre 2013, consulté le 10 décembre
2013.
http://etudesafricaines.revue.org/5
*
124.SOCPA Antoine. 2000. ibid.
* 125 MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M. 2006 ; « Les Elites Urbaines et le
développement local au Cameroun », GEO I NOVA, Revista do
departamento de Geographia e planeamentoRegional, Lisboa, n° 12, pp. 107-
128. Op. Cit.
* 126 NJOYA Jean ;
Cours de sociologie des organisations, Master 1, Avril 2012.
* 127 Commentaires de Elsa
Clairon sur la chaine Arte en ligne, émission « Karambolage
» numéro 237 du 8 mai 2011 commémorant les 30 ans de
l'investiture de François Mitterrand.
Sites.arte.tv/karambolage/fr/larchive-linvestiture-de-francois-mitterrand-karambolage.
visité le 10 mai 2016.
* 128 ONDOA Cyr,
« chefferies dans le grand sud Cameroun : le bal des
imposteurs » paru dans le journal Emergence du 12-10-2012.
Article consulté sur le site
www.nkul-beti-camer.com/ekang-people-label.php
visité le 10 mai 2016.
* 129ONDOA Cyr,
« chefferies dans le grand sud Cameroun : le bal des
imposteurs » paru dans le journal Emergence du 12-10-2012.
Op.cit.A propos des dispositions légales, voir le décret
n° 77/245 du 15 juillet 1977 modifié et complété par
le décret n° 2013/332 du 13 septembre 2013 portant organisation des
chefferies traditionnelles. Cet investigateur met la lumière sur le fait
que d'après cette loi, les chefs traditionnels doivent être
choisis au sein des familles appelées à exercer
coutumièrement le commandement traditionnel. Il insiste davantage sur
l'aspect héréditaire qui prime au moment de choisir un successeur
à un quelconque trône.
* 130MIMCHE H; NELEM B;
NJOYA MAMA M. 2006.« Les Elites Urbaines et le
développement local au Cameroun », GEO I NOVA, Revista do
departamento de Geographia e planeamentoRegional, Lisboa, n° 12, pp. 107-
128. Op. Cit.
* 131 DALOZ J-P. 1999
(dir.), Le (non-) renouvellement..., op.cit., p. 18.
* 132 SINDJOUN L. 1997,
« Elections et politique au Cameroun : concurrence
déloyale, coalition de stabilité hégémonique et
politique d'affection », RAEPS vol 2, n°1 pp 89-121. (Par
champ de la compétition électorale, cet auteur désigne
« le lieu où les relations de concurrence, de coalition et
de transaction entre acteurs politiques en quête du droit de
représenter et d'agir au nom des gouvernés soit sur le plan
local » p 91).
* 133Le Président
Paul Biya, alors candidat à sa propre succession.
* 134MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M. 2006 ; « Les Elites Urbaines et le
développement local... ». Op.cit. citant Denis Constant
Martin.
* 135
Ibid.
* 136Ibid
* 137MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M. 2006 ; « Les Elites Urbaines et le
développement local... ». Op.cit.
* 138 FOGNO J.C.
« Présidentielle-Après la victoire : Bal des
vautours autour du gâteau national ». in Le quotidien
L'Actu du 25 Octobre 2011. L'auteur insiste sur les comportements liés
à « La répartition des postes en fonction de l'apport
des uns et des autres pour la victoire de Paul Biya explique ces bousculades
pour l'accès au cercle de la « mangeoire
nationale » ».
* 139 MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M. 2006 ; « Les Elites Urbaines et le
développement local... ». Op.cit.
* 140 Selon l'article 8
(10) de la constitution camerounaise, le Président de la
République «nomme aux emplois civils et militaires de
l'Etat ; »
* 141 Cité par AWONO
Cyprien. 2011.« Le néo-patrimonialisme au Cameroun. Les
leçons sur le mal africain ». Mémoire en vue de
l'obtention du diplôme de maître es en sciences politiques.
Université de Sherbrooke.
* 142OWONA NGUINI M. E.
« L'Etat et les milieux d'affaires au Cameroun :
autoritarisme, ajustement au marché et démocratie
(1986-1996) », Polis, Revue camerounaise de science politique,
vol. n°2, pp.43-67.
* 143 Propos recueillis
lors d'un entretien le 5 avril 2015. Par « supporter », ce
dernier voulait dire être capable de redistribuer et de tenir face
à la concurrence des adversaires à cet effet.
* 144 DOGAN MATTEI ;
1967, «les filières de la carrière
politique... ». Op. Cit. Citant Gambetta, PP 469
* 145Ibid.
* 146 BLANCHET Gilles.
1969. Réflexions sur les élites et le développement en
Afrique noire. Paris. ORSTROM.
* 147BAYART J.F. ;
1989, L'État en Afrique. La politique du
ventre, Paris Fayard, 439p. Op.cit.
* 148 KAPTCHOUANG, TCHEJIP,
Célestin, Les partis politiques et démocratie locale au
Cameroun : une analyse de la compétition politique locale,
Thèse de Doctorat en science politique, Université de
Yaoundé II, 2006
* 149 Nouvelle parce
qu'elle tend à rompre avec l'étiquette de militantisme de rang,
ou de factions soutenant plus des individus que la construction de leur propre
carrière ou bien la recherches personnelle de prébendes
politiques.
* 150Mouiche Ibrahim. 1996
« Mutations socio-politiques et replis identitaires en
Afrique : Le cas du Cameroun ». In Revue Africaine de
Science Politique. Vol 1 N° 2, pp 17-201.
* 151 NKOUSSA J.M.
« Cameroun- Elections RDPC : Risques d'implosion chez Paul
Biya ».
www.cameroon-info.net
(visité le 10 février 2016).
* 152Ibid. (citant
le journal « La nouvelle expression »).
* 153 MIMCHEH ; NELEM
B ; NJOYAMAMA M. 2006.« Les Elites Urbaines et le
développement local... » Op.cit.
* 154 MOUICHE I. 2004,
« processus... ». Op.cit.
* 155 MIMCHE H ; NELEM
B ; NJOYA MAMA M. 2006. Supra.
* 156 TEISSERENC Pierre.
1994. « Politique de développement local : la
mobilisation des acteurs ». In : Sociétés
contemporaines N°18-19, juin/ Septembre. Langage en pratique. Pp.
187-213.
* 157 Interview
donné au magazine « kingzock » n° zéro.
Consulté le 30 juin 2015 sur le site
www.zoeteleactu.com
* 158 Olivier de Sardan
J.P. 1993. « Le développement comme champ politique
local », Bulletin de l'APAD [En ligne] mis en ligne le 10 mars
2008, consulté le 08 juillet 2015. URL://apad.revues.org/2473
* 159 Ibid.
* 160 Commission
européenne. « Développement local mené par
les acteurs locaux » in : Politique de cohésion.
Article consulté le 12 juillet 2015
http://ec.europa.eu/regional_policy/what/future/publication/index_fr.cfm
* 161 RESHOFEZ ou
réseau des hommes et femmes de Zoétélé.
* 162MIMCHEH ; NELEM
B ; NJOYAMAMA M. 2006.« Les Elites Urbaines et le
développement local... » Op.cit.
* 163MOUICHE I. 2004,
2008 ; DALOZ 1999 ; PIERRE-JOSEPH LAURENT 2000 ; etc.
* 164Léopold Clovis
Noudjio. « Cameroun/Zoétélé-MebeNgo'o et
MengueNkili: La guerre ne fait que commencer ». In Journal
L'Epervier du 09 juillet 2013.Op Cit
* 165Fête des
élites pour le développement de l'arrondissement de
Zoétélé.
* 166 En effet Polycarpe
ABAH projetait de faire construire une route reliant le village Nsimi
situé sur la route nationale n° 9 à l'arrondissement de
Zoétélé en passant par son village Meyila, mais il ira en
prison, et le projet tombera à l'eau.
* 167 Léopold Clovis
Noudjio. « Cameroun/Zoétélé-MebeNgo'o et
MengueNkili: La guerre ne fait que commencer ». In Journal
L'Epervier du 09 juillet 2013. Op Cit
* 168 Gérard ABEGA
« réconciliation en trompe l'oeil à
Zoétélé » in le journal Sans détour du 17
février 2016
* 169 MOUICHE I. 2004.
« Processus électoraux et rotation locale des
élites au Cameroun» in Law and Politics in Africa, Asia
and Latin America, N°4, pp 401-432. Op.cit.
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