Chapitre 6 : Sauvegarde des langues locales
À la question de savoir pensez-vous qu'il soit
important de sauvegarder ou de conserver les langues locales ?
cent-soixante-treize enquêtés sur cent-soixante-quinze
(parents et enfants), y ont répondu. Le nombre de ceux qui ont
répondu positivement à la question s'élève à
cent-soixante-huit, soit 97,11%, alors que cinq enquêtés (enfants)
y ont répondu négativement, soit 2,89%.
6.1. MOBILES DU MAINTIEN DES LANGUES LOCALES
Pour les cinq enquêtés, il n'est pas
nécessaire de sauvegarder les langues vernaculaires parce qu'ils ne les
comprennent pas et sont inutiles. L'autre raison principale est que ces langues
doivent disparaître afin qu'on puisse apprendre à parler d'autres
langues, les langues de grandes diffusion. C'est ainsi que l'un deux a
affirmé qu'« il n'est pas important de les sauvegarder pour
qu'on puisse causer seulement en français. »
Les cent-soixante-huit enquêtés par contre ont
évoqué diverses raisons pour conserver les langues locales ; nous
les avons reparties en six catégories
:
- le maintien de la diversité linguistique ;
- la constitution de l'identité ;
- la conservation des coutumes et des traditions ;
- la base de l'éducation ;
- la communication avec les personnes adultes ;
80
- la survie en cas de conflits interethniques.
6.1.1. LE MAINTIEN DE LA DIVERSITÉ LINGUISTIQUE
Les enquêtés (29,14%) ont évoqué la
raison selon laquelle les langues vernaculaires doivent être
conservées parce que la diversité linguistique doit être
maintenue. Pour eux, il n'est pas question d'admettre que les langues
vernaculaires disparaissent au profit d'autres langues,
étrangères.
Les premiers contacts entre colons et colonisés ont
engendré la bataille linguistique entre la langue du colon et celle du
colonisé dans un rapport de couple langue dominante/langue
dominée. Langue dominante parlée par les élites et
langue dominée parlée par le reste de la population. En effet, le
colonialisme a institué un champ d'exclusion linguistique à
double détente : exclusion de la langue dominée des
sphères du pouvoir et exclusion des locuteurs de cette langue (ceux qui
n'ont pas appris la langue dominante) de ces mêmes sphères en
établissant une langue exclusive : la langue dominante41.
C'est ainsi, que « Le premier anthropophage est venu d'Europe, il a
dévoré le colonisé. Et, au plan particulier qui nous
concerne, il a dévoré ses langues, glottophage donc.42
»
Pour ces enquêtés, les langues locales doivent
continuer d'exister comme toutes les langues de grande diffusion afin de
maintenir la diversité linguistique à travers le monde, il n'est
pas question qu'elles soient dévorées par celles-ci. D'où
les raisons comme « on doit les conserver pour éviter leur
disparition », « pour qu'elles existent continuellement »,
« pour qu'il y ait beaucoup de langues ».
41 Calvet, L.-J., Linguistique et colonialisme,
petit traité de glottophagie, Paris, Payot, 1974, p.65.
42 Calvet, L.-J., op.cit. p.12.
81
|