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Les multinationales pétrolières et la protection de l'environnement en Afrique Centrale

( Télécharger le fichier original )
par Levy Cardel PAYIMA
Université de Limoges - Master 2 en Droit International et Comparé de l'environnement 2006
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE LIMOGES

FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES

PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE

AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER DROIT INTERANTIONAL ET COMPARE DE L'ENVIRONNEMENT

Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

LES MULTINATIONALES PETROLIERES ET LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT EN AFRIQUE CENTRALE

Mémoire présenté par Levy Cardel PAYIMA

Sous la direction de M. Damien ROETS, Maître de conférences à l'université de Limoges

Août 2007

UNIVERSITE DE LIMOGES

FACULTE DE DROIT ET DES SCIENCES ECONOMIQUES DE LIMOGES

PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE

AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)

MASTER DROIT INTERANTIONAL ET COMPARE DE L'ENVIRONNEMENT

Formation à distance, Campus Numérique « ENVIDROIT »

LES MULTINATIONALES PETROLIERES ET LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT EN AFRIQUE CENTRALE

Mémoire présenté par Levy Cardel PAYIMA

Sous la direction de M. Damien ROETS, Maître de conférences à l'université de Limoges

Août 2007

DEDICACES

Je dédie ce travail en mémoire de mon défunt père Victor PAYIMA et en hommage à ma mère Henriette NDONGO pour tous les sacrifices qu'ils ont consentis pour ma réussite, en hommage à mon oncle l'Abbé Valentin MOYONGO qui a fait preuve de sacrifices pour ma réussite dans les études en général et dans ce travail en particulier, à mes frères Auxence, Eddy Ghislain et Hérissonne PAYIMA, à mes soeurs, à mon fils Lévy Benny Stavain PAYIMA, à ma concubine Laetitia Stavine MASSA AKOLI, à mon ami Silvère Jonas MAMBILA, à toutes mes connaissances.

En hommage également à tous ceux qui luttent pour la protection de l'environnement et la paix en Afrique et dans le monde.

Remerciements

Je remercie tout d'abord le bon Dieu qui m'a donné l'opportunité de suivre cette formation et qui a fait que j'ai une santé de fer tout au long d'elle. Je remercie l'Agence Universitaire de la Francophonie et le Campus Numérique de Brazzaville notamment M. KABIROU et Adolphe NKEPENA.

Mes remerciements également à M. Damien ROETS, Maître de conférences à l'université de Limoges qui a bien voulu assurer la direction de ce mémoire qui a fait preuve de disponibilité par l'attention accordée à travers ses suggestions et ses compléments. Mes remerciements à monsieur Guy Richard BOSSOTO professeur à la Faculté des Sciences à l'université Marien NGOUABI pour son soutien multiforme, au colonel Jules EBOUA des Forces armées congolaise (FAC), à mes oncles Raphaël et Guillaume MOKOKO pour leur soutien financier et matériel, au Docteur Jean Didier ELONGO de la Faculté de droit de l'université Marien NGOUABI. Mes remerciements aux correspondants locaux de l'INICA à Brazzaville, à la cellule antipollution du ministère des hydrocarbures et à la Direction Générale de l'environnement du ministère de l'Economie forestière et de l'environnement du Congo Brazzaville.

A tous ceux qui d'une façon ou d'une autre, de près ou de loin, m'ont apporté leur contribution et leur soutien dans l'élaboration de ce travail ; qu'ils trouvent ici l'expression de ma profonde gratitude.

Abréviations

ACERAC : Association des conférences épiscopales de la région d'Afrique centrale

AHJUCAF : Association des Hautes Juridictions de Cassation des Pays Ayant en Partage le Français

Al : Alinéa

Art : Article

BIT : Bureau International du Travail

CARPE  : Programme Régional d'Afrique Centrale pour l'Environnement

CAD : Centre de développement de l'OCDE

CEEAC : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale

CEFDHAC  : Conférence sur les écosystèmes des forêts denses et humides en Afrique centrale

CEMAC  : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CJCE : Cour de Justice des Communautés Européennes

CIPCRE : Centre International pour la Promotion de Création

COMIFAC : Commission des Forêts du Bassin du Congo

CORAF  : Congolaise de raffinerie

DSRP : Document de Stratégies de Réduction de la Pauvreté

ECOFAC : Ecosystèmes forestiers d'Afrique centrale

FAO : Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture

FIPOL : Fonds International d'Indemnisation pour les pollutions par les Hydrocarbures

GES : Gaz à Effet de Serre

IDH : Indice du Développement Humain

INADES : Institut Africain de Développement Economique et Social

INICA : Initiative pour l'Afrique Centrale

ITIE : Initiative de Transparence des Industries Extractives

ISO : International Organisation for Standardisation

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economique

OEV : Orphelins et Enfants Vulnérables

ONG : Organisation Non Gouvernementale

ONU : Organisation des Nations Unies

P : Page

PFBC : Partenariat pour les forêts du Bassin du Congo

PNAE : Programme National de l'Environnement

PNUE : Programme des Nations Unies pour l'environnement

PPTE : Pays pauvres très endettés

RDC : République Démocratique du Congo

RCA : République Centre Africaine

SIDA : Syndrome d'immunodéficience acquise

SNPC : Société Nationale des Pétrole du Congo

SOGARA  : Société gabonaise de raffinage

UDEAC : Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale

UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature

UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'enfance

WWF : World wildlife Fund (Fond mondial pour la nature)

ZEE : Zone Economique Exclusive

Sommaire

Introduction générale .........................................................................page,7

Partie I : L'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement : état des lieux.

Chapitre I : L'impact sur les milieux....................................................page,14

Chapitre II : L'impact socio-sanitaire ..................................................page,24

Conclusion de la première partie............................................................page,32

Partie II : les mesures visant à limiter l'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement

Chapitre I : Les stratégies de protection de l'environnement...............page,34

Chapitre II : La mise en oeuvre des stratégies........................................page,43

Conclusion de la deuxième partie...........................................................page,51

Conclusion générale...............................................................................page,52

Annexe

INTRODUCTION GENERALE

Sur une thématique telle que pollution et protection de l'environnement en Afrique centrale, on ne pouvait éviter de parler des multinationales pétrolières. Non par ce que l'actualité s'y prête avec des prix du baril qui s'affolent alimentant toutes sortes d'angoisses pour l'avenir, mais par ce que s'il est un domaine de l'économie de l'Afrique centrale qui porte atteinte à l'environnement, c'est bien celui de l'industrie pétrolière.

Le sujet est immense, on se limitera, dans le cadre de ce travail, aux multinationales dites « majors » (TotalFinaElf, Texaco, Exxon Mobil, Chevron, ...)1 dans le jargon pétrolier. Et il ne sera point question de traiter le cas par cas, pays par pays, entreprise par entreprise mais, de voir la situation d'une façon globale.

D'abord situons l'Afrique centrale. Contrairement à une idée fausse mais qui tend à s'enraciner, voulant étendre l'Afrique centrale à tous les pays du bassin du Congo et des grands lacs, l'Afrique centrale stricto sensu n'est composée que des six Etats membres de la CEMAC que sont : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale, la RCA et le Tchad.

Géographiquement, l'Afrique centrale est limitée au nord par la Libye, au sud par l'Angola et l'océan Atlantique sur un littoral de 1789 km, le plateau continental d'une profondeur de 200m a une superficie de 66500 km² et la zone économique exclusive s'étend sur plus de 537900 km². A l'ouest l'Afrique centrale est limitée par le Nigéria et le Niger, à l'est par la RDC et le Soudan.

Sur le plan démographique, l'Afrique centrale compte environ 32,1 millions d'habitants, en majorité jeune, repartis sur environ 3 millions de km².

Sur le plan politique et économique enfin, les Etats de l'Afrique centrale se regroupent au sein de deux institutions, la Communauté Economique et Monétaire des Etats de l'Afrique Centrale (CEMAC) créée en 1994 sur les cendres de l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (UDEAC) et la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale (CEEAC).

Cinq des six Etats de l'Afrique centrale sont producteurs de pétrole notamment le Gabon, le Congo, le Cameroun, la Guinée Equatoriale et le Tchad. Toutefois, certaines études sembles prometteuse au nord de la RCA a révélé l'Association des Conférences Episcopales de la Région de l'Afrique Centrale (ACERAC) 2. C'est pour ainsi dire qu'à court ou long terme, tous les pays de l'Afrique centrale pourront devenir producteurs de pétrole.

Au Congo, quatrième producteur africain avec une production journalière estimée, en 2006 à 250000 baril/jour, TotalFinaElf qui a hérité des actifs d'Elf dans les Etats francophones est le principal opérateur, où Agip, implantée depuis les années 60, occupe la deuxième place. TotalFinaElf y opère principalement en association avec Chevron Texaco, Energy Africa (Engen, Afrique du Sud) et SNPC (Société Nationale des Pétrole du Congo), la société nationale Agip opère également en association avec Chevron Texaco et SNPC.

1 - Bulletin annuel de statistiques 2005 de l'OPEP ; Society of petroleum Engineers

2 - ACERAC, L'Eglise et la pauvreté en Afrique centrale : le cas du pétrole

Si Shell, Exxon Mobil ou BP n'y ont que des intérêts très limités, des sociétés plus petites, souvent nord-américaines comme l'entreprenante société Marathon (également très présente en Guinée Equatoriale) ou Anadarko, ont récemment pris des participations importantes dans l'offshore congolais. Depuis 1968, les compagnies pétrolières travaillent sous le régime des jointes venture. En 1994, une nouvelle loi a offert aux compagnies étrangères la possibilité de passer des contrats de partage de production et la plupart des opérateurs en ont signé.

Cependant, le Congo ne dispose que d'une raffinerie sur les côtes de Pointe Noire, détenue par la société Coraf (Congolaise des raffineries).

Au Gabon, troisième producteur africain avec 325000 baril/jour en 2006, les deux principaux opérateurs restent Shell et TotalFinaElf implantés depuis le début dans le pays. Mais, plus encore qu'au Congo, les investissements d'exploration sont dorénavant surtout le fait de petites compagnies privées comme Amerada Hess, qui produit déjà, Pioneer Natural Ressources, Vaalco Energy, Pan African Energy Corporation Ltd, Sasol Petroleum International et Petro Energy Ressources Corporation. Agip, troisième opérateur historique du Gabon, s'est associée à la très active société nationale Petronas sur trois blocs d'exploitation.

Le Gabon, comme le Congo, ne dispose que d'une seule raffinerie, sur les côtes de Port Gentil détenue par la SOGARA (Société Gabonaise de Raffinage).

En Guinée Equatoriale, deuxième producteur africain avec 350000 barils/jour en 2006, la première découverte et la première production d'huile a été réalisée par la firme espagnole Cepsa en 1994. Ce premier champ à être exploité (Alba), qui fournit des quantités très modestes, environ 1 million de tonnes par an d'une huile très légère appelée « Condensat », est désormais la propriété de Marathon Oil, en association avec de petites compagnies indépendantes américaines (Noble Affiliate, Globex International). Le champ le plus important, Zafiro, est opéré par Exxon Mobil, avec Ocean Energy, une compagnie américaine indépendante. Le troisième champ important, Ceiba, est désormais exploité par Amerada Hess.

Le Cameroun, septième producteur africain avec une production moyenne de 62000 baril/jour, a commencé son exploitation en 1978. Elf était omniprésent et contrôlait jusqu'au début des années 90 les 2/3 de la production pétrolière du champ de Limbe. Les modestes réserves de pétrole et de gaz naturel du Cameroun se repartissent dans trois zones : la petite fraction du delta du Niger qui se situe en territoire camerounais, région vieillissante, le bassin de Douala/Kribi sur la côte, et le bassin de Lagoni dans le nord.

Le Cameroun ne dispose également que d'une seule raffinerie sur les côtes de Douala.

Au Tchad, nouveau venu dans la scène pétrolière de l'Afrique et du monde, l'exploitation a commencé en 2003 dans la région du Logone oriental dans le champ de Doba par le consortium Exxon Mobil, Chevron et Petronas. Prévue à l'origine pour s'élever à 225000 barils/jour, la production s'est en fait établie en moyenne en 2005 autour de 180000 baril/jour. Le pétrole produit à Doba est évacué vers le terminal de Kribi par un oléoduc long de 1070 km. Globalement, l'Afrique centrale a produit en 2006 1115000 barils/jour soit 406975000barils pour toute l'année 2006. Malgré cette potentialité énorme en produits pétroliers, l'Afrique centrale ne compte que trois raffineries de pétrole. L'essentiel de la production étant vendu brut. L'Afrique centrale est à 80% exportatrice nette de brut.

Riche en pétrole, essentiellement offshore, l'Afrique centrale demeure également exposée aux menaces sur l'environnement et les personnes que représente chacune des étapes de cette industrie. En effet, l'exploitation offshore obéit à plusieurs étapes.

Autrefois des plateformes fixes étaient utilisées pour l'extraction du pétrole, mais comme on a recherché le pétrole dans les eaux de plus en plus profondes (= 200 m) et de plus en plus au large des côtes, les installations de productions flottantes sont devenues la solution la plus courante pour exploitation offshore.

L'exploitation offshore commence généralement par les études sismiques. Cela consiste à générer des ondes sonores puissantes, généralement d'une basse fréquence. Leur réflexion depuis le fond de la mer et les couches souterraines fournit des données sur le potentiel en pétrole et en gaz de la zone. Cependant, les impacts écologiques des études sismiques sont généralement mal compris. Il existe que peu d'informations. Il a été révélé que des études sismiques peuvent avoir un impact négatif sur les poissons. Les prises de poissons dans la zone où une étude sismique a été conduite peuvent être réduites temporairement de 40%. Les scientifiques de ce domaines estiment que les impacts peuvent être plus profonds et à plus long terme si les études sont menées pendant la migration ou la reproduction des poissons.

Dès que les études sismiques révèlent une zone prometteuse pour la découverte de pétrole, le forage exploratoire commence. Les opérations de forage introduisent du pétrole et une grande variété d'autres composés chimiques complexes dans l'environnement à travers les fluides et les déblais de forage. Les écoulements les plus importants viennent des eaux de production. Les volumes varient considérablement tout au long de la durée de la vie d'un gisement. Les eaux de production sont constituées en majorité d'eau de réservoir à pétrole, relativement chaude, contenant du pétrole dissous et dispersé, de fortes concentrations en sel, de métaux lourds, d'hydrocarbures aromatiques polycycliques, pas d'oxygène et parfois des matériaux radioactifs.

Comment alors gérer les déchets ainsi produits ?

Quatre méthodes sont possibles pour se débarrasser des déchets de production, le rejet par-dessus bord, le transfert à terre, comme l'illustre l'image en annexe, la réinjection dans la structure géologique ou le stockage dans le coeur de la plateforme ou d'autres structures comme des cuves spécialement construites dans les fonds marins. Le rejet à la mer est la méthode la plus simple et la moins chère mais aussi, malheureusement, la méthode la plus dangereuse pour l'environnement.

La bande côtière fortement peuplée et lieu d'importantes activités économiques de l'Afrique centrale est l'une des zones les plus menacées par la pollution des hydrocarbures et par les torchères qui brulent des gaz à longueur de journée.

Si le pétrole fait peser la menace d'une marée noire et la diminution des possibilités de pêche et des activités touristiques, les torchères des gaz font quant à elles peser celle de la montée des eaux (augmentation du niveau de la mer), de la déforestation et la disparition de la diversité biologique. Sur la population cependant, les habitants de cette région de l'Afrique paient un lourd tribut. Non seulement les revenus pétroliers alimentent les conflits internes et contribuent à l'achat d'armes et au maintien de certains régimes dits dictatoriaux mais aussi son exploitation est source de beaucoup de maladies suite à la pollution. Le cas notamment du Congo Brazzaville (guerre du 5 juin 1997) et de la rébellion tchadienne aux alentours des champs pétroliers de la région du Logone oriental en sont révélateurs.

Ceci a pour conséquence la paupérisation des populations car en Afrique en général et l'Afrique centrale en particulier, le pétrole appauvrit plus qu'il n'enrichit entrainant l'abaissement des revenus agricoles, des revenus de pêche, mais aussi la diminution du taux de scolarisation.... En outre l'exploitation du pétrole est source de beaucoup de maladies, surtout respiratoires et épidermiques. Ainsi ces populations devraient méditer sur cette phrase très courante en Afrique « si tu trouves du pétrole dans ton jardin, bouches le trou et n'en parles à personne ». Dans cette logique, ces propos d'Ester PABOU MBAKI arrivent à point nommé quand elle déclare qu'«à Pointe-Noire, à la fois ville du pétrole et capitale économique du Congo Brazzaville, la pollution pétrolière est un vrai problème qui menace dangereusement aussi bien l'environnement que la santé des populations »3. Et au ministre congolais des hydrocarbures, l'écrivain Jean Baptiste TATI LOUTARD de reconnaître « qu'en dépit des flux financiers importants que génère l'activité pétrolière, son expansion à un impact, non seulement sur la nature mais aussi sur les populations proches des sites d'exploitation de pétrole ». Au Gabon, les habitants du champ de Gamba, au Tchad et Cameroun, les habitants du long de l'Oléoduc transportant le pétrole du champ de Doba vers le port de Kribi sont exposés à la pollution résultant des fuites des hydrocarbures. D'où cette indignation de monsieur Grégoire MBA MBA, maire de Kribi lors d'une fuite sur l'oléoduc en 2006 « Notre ville vit de la pêche et du tourisme. Si d'autres incidents, cette fois plus importants se produisent, c'est l'avenir économique de la ville qui est menacé ».

Face à cette situation et sous la pression de l'opinion publique et des ONG favorisées par l'arrivée de l'ère démocratique, les multinationales ont, à partir des années 70, multiplié les codes de conduite, les chartes, les labels sociaux et environnementaux. Ces codes sont pour la plupart auto-imposés, rédigés par les entreprises elles-mêmes et portent sur les normes sociales, environnementales voire sur le respect des droits de l'homme en général. Les « majors » avec en tête de liste TotalFinaElf se sont dotés de codes de conduite. Ainsi, TotalFinaElf dans son code notamment au point 10 préconise d'agir « en respectant les environnements naturels et les cultures de tous les pays dans lesquels il est implanté ». Toujours en vue de respecter les principes environnementaux ils mettent également en place des installations de traitement de déchets. C'est dans cette logique que le 23 octobre 2006, en présence du ministre congolais des hydrocarbures, TotalFinaElf, représenté par son directeur général monsieur Guy Maurice, a officiellement inauguré son installation de traitement biologique des boues de forage et autres résidus hydrocarburés sur son site du terminal pétrolier de Djeno (Congo), pourtant total opère au Congo depuis les années 60. Ces entreprises disposent aujourd'hui de département entier consacré aux questions environnementales.

En dehors de cet aspect « réglementaire », les multinationales mènent également d'autres opérations telles que la sensibilisation des populations environnantes des lieux de leurs activités des dangers résultants de ceux-ci. Ils assistent aussi les populations par des actions multiforme en faveur de la lutte contre la pauvreté en construisant les centres scolaires, les centres médicaux sociaux et en assistant les malades par une aide diversifiée aux malades.

Cependant ces déclarations de principes que sont les codes de conduite posent un problème de contrôle et de valeur juridique. Constituent-ils un réel progrès dans la prise en considération par les multinationales des normes environnementales ou bien sont-ils qu'un « rideau de fumée destiné à calmer et à rassurer l'opinion publique ? » Ainsi, pour M. Aubin de la Messuzière, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère français des Affaires étrangères : « les codes de conduite (....) ne sont pas dénués d'une certaine hypocrisie. Ils répondent au souci d'image... »4. L'ACERAC de renchérir en affirmant que «les entreprises pétrolières violent les engagements pris dans le domaine de la protection de l'environnement..... »5.

3 - voir PABOU MBAKI Esther, Le Congo désarmé face à la pollution pétrolière

4 - voir le Rapport d'informations sur le rôle des compagnies pétrolières dans la politique internationale et son impact social et environnemental

5 - ACERAC, Pétrole et pauvreté en Afrique centrale : le cas du pétrole.

Toutefois, même si l'ampleur des problèmes dépasse largement les solutions apportées, il faut tout de même reconnaître que ces compagnies veulent un tant soit peu protéger l'environnement. Mais malgré cette volonté, l'exploitation pétrolière ne peut être faite sans pollution. En outre cette volonté est limitée par des considérations tant intrinsèques qu'extrinsèques. Les considérations intrinsèques tiennent à la philosophie que suivent ces compagnies. Il s'agit du profit notamment. Toute activité commerciale vise tout d'abord le profit et la protection de l'environnement étant déconnecté du reste des activités, il est souvent difficile d'y faire attention et d'apporter les fonds énormes nécessaires à ces opérations. A cela s'ajoute la difficile remise en état des sites après l'exploitation. De ce fait, réduire la pollution au point zéro devient alors une illusion pour les multinationales pétrolières même si les codes de conduite le prévoient expressément.

Le problème de la pollution se pose avec acuité en Afrique centrale du fait d'un manque de volonté politique. En effet, les autorités politiques d'Afrique centrale brillent par un laxisme caractérisé quant à l'application des normes environnementales en général et celles relatives à l'industrie pétrolières en particulier.

En Afrique centrale il ne manque des normes en la matière6. Car la plupart des pays de cette région sont signataires des grandes conventions relatives à la protection de l'environnement adoptées depuis les années 60 au niveau international et régional. Ces Etats ont également développé au niveau national un corpus juridique apte à protéger l'environnement ; chacun de ces pays dispose d'un Programme National pour l'Environnement (PNAE). Le Congo a adopté le tien en 1992. Le problème qui se pose est au contraire celui de l'application de ces normes. Les normes environnementales ne sont pratiquement pas appliquées, surtout celles relatives à l'exploitation pétrolière. Cela se justifie par le fait que l'économie de l'Afrique centrale reste très dépendante de l'industrie pétrolière.

Le pétrole domine les économies nationales. Il représente plus de 67% du PIB au Congo, 73% au Gabon, 86% en Guinée Equatoriale. Les recettes pétrolières représentent, au Congo par exemple 80% des recettes budgétaires7. Cette situation est pratiquement la même pour tous les pays de la région, producteurs de pétrole sauf le Cameroun où, compte tenu de la diminution et de l'absence de nouvelles découvertes, il a été développé l'agriculture et l'industrie agropastorale. En outre, ces majors souvent impliqués dans la gestion de ces Etats et leur soutien aux différents régimes dits dictatoriaux. Du fait de cette situation la pollution due par l'industrie pétrolière devient un sujet tabou. Dans les milieux politiques on n'ose pas en parler car le faire serait risquer sa vie. Toutefois certaines têtes, dépasser par la situation finissent par « s'éclater » en le dénonçant ouvertement. C'est notamment le cas du député de l'opposition tchadienne NGARLEJY YORONGAR devenu la figure emblématique à cause surtout de ses dénonciations faites contre le consortium en charge de la construction de l'oléoduc Tchad - Cameroun.

6 - Voir Maurice KAMTO, Les conventions régionales sur la conservation de la nature et des ressources naturelles en Afrique et leur mise en oeuvre.

7 - Yates (2004)

Ce laxisme et ce caractère tabou du sujet de la pollution pétrolière sont en outre favorisés par la mauvaise perception des questions environnementales non seulement par les autorités politiques elles-mêmes, mais aussi par l'opinion publique et les quelques ONG qui existent. En effet, en Afrique centrale, parler de la pollution de l'environnement est une abstraction ou même une vue de l'esprit. Car dans cette région la dégradation de l'environnement n'est pas encore très perceptible aux yeux du public, sauf quelques esprits éveillés, malgré sa dégradation accélérée. On note toutefois quelques ONG internationales luttant pour la conservation de la nature présentes en Afrique centrale dont le World Wildlife Fund (WWF), le Global Witness, le Centre International pour la Promotion de la Création (CIPCRE), l'Institut Africain de Développement Economique et Social (INADES-Formation), etc.

Face à ce constat, doit-on décider du départ des multinationales pétrolières ? Sans embarras nous dirons non. Car « pour les Africains ce qui est pire que d'avoir une multinationale (pétrolière) sur son territoire, c'est de pas en avoir du tout ». Mais dans quelle mesure ces dernières sont-elles respectueuses de l'environnement en Afrique centrale ? La réponse à cette question nous amène, avant d'exposer les mesures visant à limiter l'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement (Partie II), de faire d'abord l'état des lieux de l'impact sur l'environnement (Partie I).

PARTIE I : L'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement : état des lieux.

L'Afrique centrale est une sous-région riche en ressources minérales et notamment en pétrole. De ce fait, elle représente un enjeu géostratégique, donc politique de taille et constitue l'alternative au Moyen-Orient. Car les Etats-Unis, la Chine, l'Inde ou le Brésil, pays dont les besoins énergétiques s'accroissent avec leur développement économique lui font recours.

Cette manne pétrolière n'apporte évidemment rien aux populations. Non seulement ces populations ne profitent pas des revenus pétroliers, au motif qu'il est géré dans une opacité caractérisée entre les mains d'une frange au pouvoir. Mais aussi leur environnement est durablement affecté. Dans les paysages de Gamba-Conkouati, cette industrie est un acteur essentiel et des impacts négatifs importants sur l'environnement ont été observés. Le sud Tchad, zone particulièrement favorable à l'agriculture et à l'élevage est également touché du fait de l'exploitation des puits de Doba. La ville de Kribi au Cameroun considérée comme l'une des meilleurs sites touristiques du monde, la pollution est visible et les populations sont gravement affectées.

A côté du risque réel de grandes marées noires, la pollution générale reste un problème, telle que ces populations du Golf de Guinée ont surnommé le pétrole «la merde du diable ». L'abandon non-conforme des puits de forage et pipeline tout comme les impacts indirects, notamment le braconnage résultant de l'ouverture des massifs forestiers, comme l'attestent les photos en annexe, mais aussi les maladies respiratoires et épidermiques dues à la poussière dans le cas du Tchad, des odeurs des hydrocarbures et des torchères de gaz qui brulent à longueur de journée menacent également la région. Le manque d'application des meilleures pratiques sur le plan social et écologique demeure à long terme un défi important. Il sera alors question, dans cette partie, de faire l'état des lieux de l'impact sur les milieux naturels (Chapitre I) avant de voir l'impact socio-sanitaire (Chapitre II) comme conséquence d'un manque de protection de l'environnement.

Chapitre I : L'impact sur les milieux naturels

L'exploitation du pétrole ne peut se faire sans emprise sur les milieux physiques. Cette emprise n'est pas cependant sans impact. En Afrique centrale deux milieux sont principalement affectés. Le milieu marin (section 1) du fait que l'exploitation du pétrole est faite essentiellement offshore et c'est sur les côtes que sont situés les terminaux et les raffineries, mais aussi le milieu forestier (section 2) du fait de l'ouverture des massifs forestiers pour y placer des installations et de l'effet de serre causé par les gaz brulés dans les torchères.

Section 1 : L'impact sur le milieu marin

La pollution par hydrocarbure est en augmentation dans les eaux côtières et sur les plages de toute l'Afrique centrale. Les effets observés sur place indiquent que des dommages sont causés aux écosystèmes côtiers (paragraphe 1), aux ressources halieutiques et limite ainsi les possibilités de pêche et les activités touristiques (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Pollution des côtes

Le littoral des pays d'Afrique centrale est long de 1789 km, le plateau continental d'une profondeur de 200 m a une superficie de 66500 km² et la zone économique exclusive (ZEE) 8 s'étend sur plus de 537900 km². La zone côtière d'Afrique centrale est caractérisée par des lagunes, des mangroves, des herbiers, des plages de sable et des zones humides d'estuaires constituant des ressources vitales pour les activités de substance et le développement économique. Cependant, compte tenu de l'activité pétrolière intense dans cette zone elle est exposée à une pollution multiforme notamment des plages et des habitats naturels due aux installations pétrolières comme les barges et les terminaux pétroliers qui reçoivent le pétrole même quand il est produit on shore comme au Tchad par exemple, mais aussi des torchères des gaz avec des conséquences variées sur le milieu marin que nous verrons ci-dessous.

a) Pollution des plages

La géomorphologie définit une plage comme une « accumulation sur le bord de mer de matériaux d'une taille allant des sables fins aux blocs ». La plage ne se limite donc pas aux étendues de sable fin ; on trouve également des plages de galets et, dans les cas des blocs les plus gros, des plages appelées beachrock.

On a tendance à restreindre la plage à l'estran, mais elle comprend aussi l'avant-plage (aussi appelée avant-côte et où l'on trouve les avant-dunes, appelées dunes par les vacanciers, qui fait partie de la zone infralittorale. Quoiqu'il en soit, les plages s'orientent perpendiculairement à la houle dominante.

8 - Longtemps les Etats ont chacun, selon ses capacités, déterminé leur plateau continental. Ce n'est qu'à la troisième conférence des Nations Unies sur le droit de la mer tenue à Montego Bay en 1986 qu'une eu été trouvée une solution, le limitant à 200 mille marin. C'est au cours de cette conférence que fut signée la convention de Montego Bay dite la constitution de la mer.

Les plages de sable fin sont les plus appréciées des vacanciers. On peut distinguer les sables « blancs » d'origine organique (reste squelettes et autres coquilles ou siliceux) des sables « noirs » d'origine minérale ou volcanique. La distinction ne doit cependant pas se faire uniquement sur la couleur, des sables d'origine organique pouvant apparaître noirs s'ils sont chargés en matières organiques, et des sables d'origine minérale pouvant être clairs, selon le type de roche qui leur a donné naissance9.

Les plages de l'Afrique centrale sont classées parmi les meilleures du monde. C'est notamment le cas des plages de Kribi au Cameroun, de Pointe Noire au Congo et de Libreville ou de Port-Gentil au Gabon, paradoxalement elles sont très polluées.

Cependant, le problème ne vient pas uniquement des marées noires. L'exploitation du pétrole se fait presque toujours au prix de la pollution des zones concernées et au détriment des populations autochtones, qui n'en perçoivent pas les bénéfices.

Il est fréquent que des pétroliers dégazent et nettoient leurs moteurs au large. Ainsi, des résidus de pétrole dégradé s'agglomèrent et sont déposés sur les rivages par le vent, les courants et les vagues, sous forme de boules de goudron. Viennent s'y ajouter les fuites provenant des activités de forage de puits de pétrole, de la manipulation du pétrole et des produits pétroliers dans les ports et des raffineries situées en zones côtières (Pointe-Noire, Port-Gentil, Douala), ainsi que celles des vedettes et pétroliers. D'où ce voeux du président du Conseil Economique et Social du Gabon constatant la pollution sur la plage de Mayumba : « il serait bon que nous prêtions attention à la pollution de nos côtes par les hydrocarbures issus de l'exploitation pétrolière. Ce qui est observé à Mayumba ne saurait nous laisser indifférents car ce phénomène suscite beaucoup d'inquiétudes auprès des populations ». Mais, le président va plus en disant qu'une enquête sera ouverte pour déterminer les responsabilités sur cette pollution et a suggéré «  de faire quelque chose qui oblige les responsables pétroliers de faire en sorte que l'environnement de ces côtes ne soit pas abîmé car les conséquences sont nombreuses sur la santé des hommes » 10.

b) Destruction des habitats naturels

L'habitat naturel c'est l'habitat de pêche nécessaire pour la production de ressources données. Il peut s'agir d'alevinières (par exemple, des mangroves et des herbiers marins), ou de frayères (par exemple, des lieux particuliers dans l'océan où les poissons se rassemblent pour se reproduire) 11. Ces habitats naturels font l'objet d'une destruction massive à cause de certaines pratiques de pêche notamment les grands chalutiers traînants et aussi par la pollution des hydrocarbures.

9 - Cette pollution n'est pas souvent prise en compte faute d'une preuve de la faute des pétroliers. Dans ce domaine, il faut bien arriver un jour à la mise en place de la responsabilité sans faute des pétroliers dès que l'on constate un cas de pollution liés aux hydrocarbures.

10 - FAO 2005

11 - Voir le site www.infosplusgabon

Ces habitats sont également détruits par l'activité pétrolière. En effet l'activité pétrolière en polluant les côtes, n'épargne pas les habitats naturels. Cette situation est encore plus accentuée en Afrique centrale. En effet, on relève une destruction accélérée des habitats naturels en Afrique centrale du fait que cette pollution atteint les lieux de reproduction. Aussi dans son rapport sur la diversité biologique, le gouvernement congolais, au titre des menaces qui pèsent sur la diversité biologique ne manque d'affirmer que « la pollution due aux activités pétrolières....engendre naturellement la destruction de la faune, de la flore, des habitats et des zones de fraie ». C'est aussi ce que nous révèlent ces propos de Marcel TATY, chef des projets de conservation de la nature dans la réserve de Conkouati à 160 km de Pointe-Noire « Nous avons enregistré des déversements pétroliers surtout à partir d'août 1998, sur les côtes. Et nous avons prélevé du goudron, du cambouis qui remontait même très haut dans la lagune de Conkouati qui constitue aujourd'hui une des réserves protégées de l'Afrique centrale ». Cela est le fait des rejets en mer des quantités de plus en plus importantes des hydrocarbures.

En détruisant les habitats naturels, la pollution ne permet pas ou limite la reproduction des espèces, d'où la diminution des possibilités de pêche et de tourisme.

Paragraphe 2 : Diminution des possibilités de pêche et de tourisme

La pollution des côtes entraine une diminution des possibilités de pêche (a) et de tourisme (b).

a) Diminution des possibilités de pêche

Les côtes ouest africaines en général sont riches en ressources d'une diversité variée. On y trouve des stocks pélagiques côtiers notamment des sardinelles et des stocks pélagiques hauturiers notamment des thonidés. Compte tenu de cette richesse, ces côtes sont le lieu d'une intense activité de pêche. On y trouve de fortes communautés de l'Afrique de l'ouest attirées par cette richesse.

Cette activité est d'abord menacée du fait de la surpêche et de certaines pratiques qui ne protègent pas les ressources d'une taille moyenne et d'un manque de politiques réelles de conservation des ressources de la zone. Car les Etats de l'Afrique centrale n'ont pas le contrôle effectif de leurs côtes. Parmi ces pratiques l'on peut citer la pêche à travers les chalutiers et certaines pratiques qui consistent à déplacer les rochers marins afin de permettre le passage libre de ces chalutiers qui, de par ce fait détruisent les habitats naturel.

Mais aussi et surtout, le développement croissant de l'activité pétrolière et la pollution qui en résulte est source d'une diminution de l'activité dans cette zone. En effet, les rejets d'huiles qui forment une nappe flottante dans la zone entraine un évitement de celle-ci par les espèces notamment les crustacées et les sardinelles.

Cela a pour conséquence de contraindre les pêcheurs artisanaux à aller de plus en plus loin au large pour pouvoir attraper quelque chose. D'où ce constat d'Abraham MOSSASSI, pêcheur dans un village près de Pointe-Noire « j'ai constaté que l'eau a noirci. Elle devient parfois très sale. Les pêcheurs reviennent avec peu de poisson. Et puis, ces derniers temps nous sommes obligés d'aller plus loin pour espérer rentrer avec une quantité de poisson. Ce phénomène de la pollution nous empêche de mener à bien nos activités. Aussi, Albert YAMA NKOUNGA dans son article intitulé « Pétrole et développement » ne manque pas de souligner qu' «.....en mer les espèces de poissons ont disparu »12. Cette pollution du milieu marin et les conséquences est aussi favorisée par le manque d'un encadrement conventionnel de la matière. C'est ainsi que M. Bruno Rebelle avait exprimé son regret pour le fait que « la convention de Londres ne contienne aucune disposition sur le rejet en mer des plates-formes pétrolières d'exploration ou d'exploitation ».

12 - voir Albert YAMA KOUNGA, Pétrole et développement en Afrique centrale.

Du fait que l'économie de l'Afrique centrale est entièrement tournée vers le pétrole, la diminution de ces espèces ne semble pas préoccuper les Etats de cette région. C'est à la fin de l'exploitation du pétrole que se manifestera la nécessité de protéger des ressources et ça sera trop tard ; la pollution ayant déjà tout emporté à son passage. C'est aussi à partir de ce moment qu'apparaîtra le drame de tant de décennies d'exploitation du pétrole.

L'une des causes de non intéressement des Etats aux problèmes de pollution marine est aussi le fait que la plupart des pêcheurs artisanaux ne sont pas les ressortissants de ces Etats. On y trouve de fortes communautés béninoises à Pointe-Noire et Port-Gentil.

Voir aussi à juste titre le rapport national sur la diversité biologique précité.

Une autre source de pollution cette fois moins visible est bien sûr celle due à la peinture anti-Fuling appliquée sur les coques des navires. En effet, la peinture anti-Fuling sur les navires est une source importante mais souvent négligée de la pollution causée par le trafic maritime. Ces peintures contiennent souvent de puissants biocides tels que la tributytin. Les biocides réduisent l'adhérence et la fixation des organismes marins sur la coque des navires.

Mais ces substances pénètrent dans l'environnement marin et peuvent affecter défavorablement plusieurs espèces. Un des effets de la contamination par la tributyrine est masculinisation d'escargots marins femelles, causant une réduction de reproduction et le déclin des populations. Les escargots femelles présentant un développement anormal d'organes reproductifs mâles (appelés aussi imposex).

b) Diminution des possibilités touristiques.

Quatre des six Etats de l'Afrique centrale sont côtiers et présentent de très belles plages qui constituent de ce fait le lieu d'intense activité touristique. Cependant, l'exploitation du pétrole étant essentiellement offshore, et du fait d'un manque de protection effective de l'environnement notamment côtier par ces Etats favorise la pollution résultante de l'exploitation pétrolière par les multinationales pétrolières. Cela cause un dommage à l'activité touristique, d'où son ralentissement. Au Congo par exemple, le nombre de touristes est passé de 30 milles en 1994 à 19 milles en 200013.

Ce ralentissement cause du tort non seulement aux passionnés du tourisme, mais également à l'économie de ces pays. Alors que l'on dénombrait plus de 356 milles touristes en Afrique centrale en 1991, ce nombre est en décroissance significative pour atteindre 335 milles en 1995.

En dépit du fait qu'ils sont producteurs de pétrole, certains d'entre eux dépendent énormément de l'activité touristique. Cette indignation de monsieur Grégoire MBA MBA, maire de Kribi lors d'une fuite sur l'oléoduc Tchad / Cameroun en 2006, « Notre ville vit de la pêche et du tourisme. Si d'autres incidents, cette fois plus importants se produisent, c'est l'avenir économique de la ville qui est menacé » n'est que révélatrice. A Pointe-Noire par exemple, on constate qu'il y a du goudron sur la plage. Cette plage qui, autrefois était beaucoup fréquentée, n'est devenue que lieu de simples promenades. Car les gens évitent également les odeurs des hydrocarbures qui viennent du large. Le constat est le même dans les autres pays. Au Gabon, les plages du Cap Lopez pourtant réputées comme l'une des meilleures en Afrique, ne sont pas épargnées par cette grogne.

Section 2 : L'impact sur le milieu forestier

La pollution pétrolière n'épargne pas les forêts tropicales d'Afrique centrale (Paragraphe 1) et la diversité biologique qu'elles contiennent (Paragraphe 2)

13 - entretien avec le directeur général du tourisme du Congo le 15 juin 2007

Paragraphe 1 : Dégradation des écosystèmes forestiers

La FAO définit la forêt tropicale comme étant « l'écosystème où la densité minimale du couvert forestier et/ou des bambous est de 10%, et qui ne fait pas l'objet d'utilisation agricole ». Cette définition s'écarte de celle adoptée par la Commission des Communautés Européennes. En effet selon elle les forêts tropicales sont « ....les écosystèmes forestiers naturels et semi naturels tropicaux ou subtropicaux intacts (primaires) ou non intacts (secondaires) qui se caractérisent par la présence abondante d'arbres, sous des climats secs humides »14. Ces forêts font l'objet d'une destruction accélérée due à l'exploitation industriels, artisanale mais aussi de la pollution.

a) Destruction des forêts suite à l'exploitation industrielle et artisanale

L'Afrique Centrale abrite la forêt tropicale humide du bassin du Congo, qui est la deuxième grande forêt tropicale primaire du monde après les forêts amazoniennes. C'est ainsi qu'on l'appelle le deuxième poumon du monde. Elle totalise à elle seule quelques 31323600 hectares de forêts naturelle contre 12516000 pour l'Afrique de l'Ouest, 6586000 pour l'Afrique australe. Sa flore détient un pourcentage d'endémisme très important de familles et de genres. Le Cameroun à lui seul renferme 17% des phanérogames et 44 à 55% de ptéridophytes du continent africain. Quant à la RCA, sa forêt naturelle est encore intacte à 59%. Cette forêt regorge plusieurs essences de valeur (3000 environ) dont les plus importantes sont : l'Okoumé, l'Obèche, l'Azobé, l'Andoung, l'Ebène, l'Eucalyptus, l'Acajou, le Sapéli, l'Ayous, l'Iroko. En chiffres, cela se traduit par les données ci-dessous :

14 - FAO, Le défi de l'aménagement durable des forêts : quel avenir pour les forêts du monde Rome 1994, P,18

La FAO classifie les forêts en forêts tropicales ombrophiles, forêts humide de zones sèches et très sèches. Cf. FAO, Le défi de l'aménagement durable des forêts, Rome 1994 P, 15 - 17

En Afrique, la forêt tropicale se trouve concentrée dans le bassin du Congo, principalement en sur la territoire de la République Démocratique du Congo. Ce pays concentre à lui seul 109 245 millions d'hectares de forêts, dont 109 203 sont des forêts naturelles, occupant 48% du territoire. Selon d'autres études, l'extension des forêts dans ce pays serait de 177 millions d'hectare, dont 90% de forêt vierge.

Selon Park, plus de 60% de toutes les espèces de plantes connues se trouvent dans les forêts tropicales ainsi que 40% des espèces d'oiseaux, 80% des espèces d'insectes ( sur un total estimé de 300000 espèces ) et 90% des espèces de primates.

Pays, superficies forestières Millions d'hectares, production de grumes Millions de m3

Cameroun

17,5

3,9

RCA

3,4

0,40

Congo

14,0

0,51

Gabon

20,4

3,0

Guinée Equatoriale

2,2

0,7

Tchad

0,2

 

Malgré cette grande potentialité, les forêts d'Afrique centrale subissent une forte pression tant de la part des autochtones mais aussi des étrangers.

En effet, l'Afrique centrale est classée parmi les régions les plus pauvres du monde, les populations tirent l'essentiel des substances de leur existence de la forêt. Il s'agit entre autre des ressources biologiques de cette forêt, du bois de chauffe, et toute autre ressource nécessaire à leur survie. Mais également ces forêts sont le lieu d'importantes activités agricoles mais une agriculture rudimentaire avec des pratiques comme itinérantes sur brulis très couteuses à l'environnement.15

En outre l'exploitation du bois par les sociétés étrangères surtout Malaisiennes ne respectent pas le respectent pas le principe du développement durable16.

Pourtant une institution à caractère sous régionale est mise en place depuis 1999 afin de protéger cette forêt : la COMIFAC qui a connu une mutation de la Conférence des Ministres en charge des Forêts d'Afrique Centrale à la Commission des Forêts d'Afrique Centrale lors du sommet de Brazzaville du 05 juin 05, qui a connu une participation internationale dont celle du président français Jacques CHIRAC.

15 - la COMIFAC est aujourd'hui soutenue par l'Union Européenne et les Etats-Unis d'Amérique

16 - le développement durable impose à ce que le développement économique des générations actuelles n'enfreigne pas les générations futures à répondre à leurs besoins.

b) Dégradation due à l'exploitation pétrolière

Les causes de dégradation sus évoquées occultent en effet celle relative à l'exploitation du pétrole.

L'exploitation du pétrole dans les forêts tropicales exige des défrichages de certaines zones. Ainsi, au Cameroun et au Tchad, la forêt a été détruite sur une longueur de 1070 km afin de faire construire l'Oléoduc sus évoqué. En dehors de cette dégradation directe, les forêts d'Afrique centrale subissent également un effet de serre résultant des torchères des gaz.

Le déversement du pétrole dans le milieu forestier ne permet pas le développement normal des espèces. En effet, quand le recouvre les racines aériens des arbres de mangrove, il empêche l'oxygène de circuler dans les tissus des racines enfoncées dans les sols anoxiques. Le pétrole peut être absorbé par les racines, véhiculé jusqu'aux feuilles et bloquer la transpiration. Le pétrole peut perturber les membranes des racines, ce qui provoque une concentration mortelle de sel dans les tissus.

Une mortalité soudaine et massive d'arbres de mangrove provoque une érosion des sédiments. A la suite d'un déversement de pétrole à Panama en 1986, beaucoup d'arbres de mangrove ont pourri et sont tombés. Cet exemple est visible aux alentours de Gamba et du terminal de Djeno. Les sédiments de ces habitats se sont érodés à des rythmes pouvant atteindre plusieurs centimètres par jour. Cet impact sur la mangrove atteint les habitats naturels marins que nous avons vus plus haut.

Paragraphe 2 : Disparition de la diversité biologique

La convention de Rio de 1992 sur la diversité biologique définit la diversité biologique comme étant la « la variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes » 17.

Il est devenu évident que depuis plusieurs années, dans les plus grandes zones forestières tropicales d'Afrique centrale, la diversité biologique se trouve menacée à la suite de la déforestation et de la dégradation des forêts. Le problème de l'extinction de la diversité biologique dans cette région devient ainsi une priorité internationale.

Les forêts tropicales de l'Afrique centrale abritent la plus importante réserve de la biodiversité du monde après les forêts amazoniennes. Elles sont riches en espèces emblématiques, rares et ou menacées dont les grands mammifères (Gorilles de plaines, Chimpanzés, etc....) ou les oiseaux de forêt (Perroquets, Picatharte...). On y dénombre plus de 10000 espèces de papillons....dont beaucoup sont endémiques.

Cette importante réserve mondiale est en prise également à la déforestation suite à l'exploitation du pétrole, et à la pollution qui en résulte. Cela entraine une diminution des ressources phitogénétiques.

17 - Convention de Rio de 1992 art.2

a) Disparition de la diversité biologique suite à la déforestation.

L'exploitation du pétrole impose, à certains endroits, l'ouverture et/ou le défrichage de massifs forestiers à grande échelle. Ce défrichage est indispensable pour l'implantation des installations nécessaires à l'exercice de l'activité mais également des pistes ou voies où doivent circuler les engins. La construction de l'oléoduc Tchad / Cameroun en est une belle illustration.

Ce défrichage et les piste ainsi créées favorisent un braconnage de plus en plus accrue dans les zones d'activités. Car ils permettent aux chasseurs de pénétrer très loin dans la forêt et à des endroits où, sans ces pistes et ces voies ils ne pouvaient pas y arriver au grand dame de la diversité biologique18.

Ainsi donc la suite de cette déforestation, la diversité biologique se trouve menacée 19. Le problème de l'extinction de la diversité biologique devient ainsi une priorité politique internationale.

Sur le plan mondial, la disparition de la diversité biologique a donné lieu à l'adoption de la convention sur la diversité biologique, dont les objectifs sont la conservation, l'utilisation commerciale durable et le partage des avantages découlant de l'exploitation de ces ressources.20

18 - Cf. The Ecologist, 1987, vol. 17, n°4/5. Selon l'éditorial de ce numéro, chaque jour de déforestation impliquerait la disparition d'une espèce.

19 - Rapport Brundtland, P. 185

20 - La convention sur la diversité biologique fut ouverte à la signature le 5 juin 1992 et est entrée en vigueur le 29 décembre 1993. Malgré l'existence de cet instrument juridiquement contraignant, la disparition des espèces continue à être l'un des problèmes majeurs de notre temps. Les constatations à cet égard sont accablantes. Le rapport préparé et publié par le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) confirme la tendance à la disparition accélérée de la biodiversité dans toutes les régions du monde. Cette tendance s'est accélérée plus particulièrement en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie ou la dégradation de la diversité biologique a atteint un niveau très préoccupant.

En dehors de cet aspect, l'exploitation du pétrole se fait parfois directement dans des zones considérées comme des réserves nationales ou mondiales de biodiversité. Les installations pétrolières dans les champs de Gamba Ivinga et de Rabi-Kounga au Gabon sont une illustration parfaite de ce cas de figure. C'est à juste titre que Jean BOURGEAIS, Conseiller Technique Principal de WWF - Gamba, intitule son article publié le 21 décembre 2001 « Impact de l'exploitation pétrolière dans le complexe de Gamba : le pire est à venir ». En effet, dans cet article Jean BOURGEAIS met en évidence la disparition de la biodiversité et l'impact socio-sanitaire qui en résulte.

b) Disparition de la diversité biologique suite à la pollution.

La diversité biologique, notion qui ne fait pas l'assentiment de tous les auteurs21, est victime de la pollution directe suite aux activités pétrolières. Le problème s'accentue encore en Afrique centrale dans la mesure où les Majors qui y opèrent n'entendent pas protéger cette dernière. La diversité biologique est exposée à la pollution des hydrocarbures notamment des odeurs, des nuisances et les rejets qui échappent des installations. Cette pollution détruit les habitats naturels. Tout compte fait, l'exploitation et extraction du pétrole sont incompatibles avec les objectifs des aires protégées appartenant aux catégories 1 à 4 de l'UICN22et devraient donc être interdites par la réglementation ou tout autre moyen.

L'environnement n'est pas une abstraction mais bien l'espace où vivent les être humains et dont dépendent la qualité de leur vie et leur santé et une atteinte à l'environnement a nécessairement des répercussions socio-sanitaires23.

21 - Voir à ce sujet Edward O. WILSON, La diversité de la vie, Paris, Odile Jacob, 1993. En général, Wilson préfère recourir à l'expression « diversité de la vie », plutôt qu'à son raccourci plus médiatique de « biodiversité ».

22 - Voir Jean BOURGEAIS, Impact de l'exploitation pétrolière dans le complexe de Gamba : le pire est à venir. Selon Mr BOURGEAIS, « le complexe d'aires protégées de Gamba n'est pas un cas unique d'implantation d'une activité pétrolière, il existe d'autres continents, et la zone tropicale humide africaine est depuis les années 70 le support d'une activité pétrolière en plein développement on shore et off-shore. Un recensement non exhaustif portant sur l'Amérique latine identifie seize aires protégées dans la situation de Gamba dont quatre classées en site Ramsar et quatre en réserve de biosphère.

A consulter aussi le rapport de la République du Congo intitulé « Rapport National sur la Diversité Biologique », juin 2001. www.riddac.org

23 - Voir à ce sujet l'ouvrage collectif de Michel GERIN, Pierre GOSSELIN, Sylvaine Cordier CLUDE VIAU et Philippe QUÉNEL : Environnement et santé publique : fondements et pratiques, Tec & Doc Lavoisier, 1er janvier 2003

Chapitre II : L'impact socio - sanitaire

La vie en société et la santé des hommes dépendent largement de leur environnement tant immédiat que lointain. L'environnement est un élément déterminant du maintien des moyens d'existence. La nécessité de conserver les forêts tropicales amazoniennes et celle du bassin du Congo témoigne cette adéquation entre l'environnement, la société et la santé. Cette relation est encore beaucoup visible et perceptible en Afrique en général mais en Afrique centrale en particulier. En effet, il existe un paradoxe, l'Afrique est la région la plus pauvre de la planète mais elle est également l'une des régions où l'environnement est encore à 70% naturel et intact malgré une dégradation accélérée. En Afrique centrale en particulier, compte tenu l'activité pétrolière qui s'y développe et du fait que les populations de cette région tirent l'essentiel de leur existence de leur milieu naturel, l'environnement en est gravement affecté (cf. chapitre I). Destruction des forêts, pollution des côtes, disparition des espèces, diminution de la biodiversité débouchent inévitablement sur un impact social (section 1) et encore et surtout à un impact sanitaire très grave (section 2).

Section 1 : L'impact social

La dégradation de l'environnement a de graves répercutions sur les populations de cette région d'Afrique centrale en les rendant pauvres (paragraphe 1) et plusieurs conséquences en résultent (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La paupérisation des populations

Qu'est ce que la pauvreté ? Selon le Larousse, « la pauvreté est l'insuffisance des ressources matérielles et des conditions de vie, ne permettant pas à des êtres humains de vivre dignement selon les droits légitime et vitaux (droit à l'eau, droit à l'alimentation etc.) de la personne humaine, et les condamnant aux dures difficultés de la survie au jour le jour ».

L'Afrique centrale est l'une des régions les plus pauvres du monde. Plusieurs causes expliquent cet état de chose, entre autre la dégradation de l'environnement. Comme le dit Ingrid HOVEN, Président du Groupe de travail sur la coopération pour le développement de l'environnement « La dégradation de l'environnement est la principale cause de pauvreté »24

Nombreux sont les facteurs qui expliquent la dégradation de cet environnement de l'Afrique centrale entre autre l'industrie pétrolière. Cette dégradation entraine une paupérisation directe suite à l'occupation de certains milieux notamment les terres agricoles (cf. sud Tchad) mais aussi une paupérisation à long terme compte tenu de la pollution.

24 - Ingrid HOVEN, Avant propos sur le rapport de l'OCDE «  Liens entre pauvreté, environnement et égalité entre l'homme et la femme. Pré-impression des dossiers du CAD 2001, Volume 2, n°4, P.3

Selon d'autres études et analyses « il faut commencer par éradiquer la pauvreté avant de se préoccuper de l'environnement ».

a) Paupérisation directe

« Le pétrole rend pauvre » dit - on. Cela est vrai pour les pays en développement. En effet, la plupart les pays producteurs de pétrole d'Afrique centrale sont classés parmi les plus pauvres du monde selon l'indice du développement humain (IDH) de 1998 de la Commission Economique pour l'Afrique et Centre de Développement sous Régional pour l'Afrique Centrale. Cela s'explique surtout par la mauvaise gouvernance. Aussi comme l'affirme Emil Salim « Non seulement les industries pétrolières (.....) n'ont pas aidé les populations les plus pauvres des pays en voie de développement, mais elles les ont appauvri davantage »25.

Les populations non seulement ne tirent pas profit de cette manne, elles sont encore victime de la pollution et de la dégradation de leur environnement suite à cette activité.

S'il est admis que par environnement, on entend la terre indispensable pour faire pousser de quoi manger, l'eau nécessaire pour boire, se laver et irriguer les cultures, l'air que l'on respire, et une multitude de produits alimentaires et médicaux naturels, il devient évident que préserver l'environnement équivaut à préserver la production alimentaire, préserver les moyens d'existence, et préserver la santé.

Or pour exploiter le pétrole, les multinationales portent une atteinte directe à l'environnement tant terrestre, aquatique qu'aérien. Cette atteinte résulte de l'implantation de leurs installations sur les terres cultivables ou en mer et du défrichage des forêts mais aussi des torchères des gaz. Cela rend les populations de plus en plus pauvres d'autant plus qu'elles ne tirent l'essentiel de leurs moyens d'existence que de leur environnement26.

25- Dr Emil Salim résumé du rapport de la Banque mondiale 2004, paru le 16 juin 2004 dans le Financial Times britannique, cité par Sandra Kloff et Clive Wicks dans Gestion environnementale de l'exploitation de pétrole offshore et du transport maritime pétrolier, paru octobre 2004

26 - Voir aussi le rapport aussi le Rapport d'Informations sur le Rôle des compagnies pétrolières dans la politique internationale et son impact social et environnemental, déposé par la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale française, présenté par Mme Hélène-Marie AUBERT, MM. Pierre BRANA et Roland BLUM, Tome 1, P.3 notamment l'audition de M. Mongo Béti, le 24 mars à 16h 15. Selon lui, « les populations ne savent rien sur le montant de la rente pétrolière, qui est déposé sur un compte du Président de la République en Suisse. Ces sommes servent à renforcer la dictature qui dispose ainsi de moyens importants pour se fournir en armes et corrompre les hommes politiques locaux ou étrangers, voire les intellectuels ».

Voir aussi à juste titre pour le cas du Congo, le Document de Stratégies de Réduction de la Pauvreté

b) Paupérisation à long terme

Les multinationales n'exploitent le pétrole de façon durable. Les actes qu'on pose aujourd'hui peuvent avoir des répercussions dans l'avenir mais, rares sont ceux qui se l'aperçoivent. La pauvreté qui sévi aujourd'hui peut être la conséquence d'un manque de protection effective de l'environnement. Seulement, cet aspect de la pauvreté n'est pas souvent pris en compte lorsqu'on évalue les facteurs de la pauvreté27. La destruction des forêts, la pollution des côtes et les terres conduit inévitablement à « l'insuffisance matérielle » et l'incapacité de répondre aux besoins de première nécessité. Les parents se retrouvent dans l'impossibilité d'envoyer leurs enfants à l'école par le manque de moyens. C'est ce qui ressort du tableau ci-dessous sur taux de l'éducation primaire:

Pays

1990

2000

2004

Cameroun

73,6

75,2

----

Centrafrique

46

44,9

66

Congo

79,4

77,9

----

Gabon

85

93,5

77

Guinée Equatoriale

91

93,3

85

Tchad

34

56,6

57

Certains n'arrivent plus accéder aux soins médicaux et l'alimentation de base comme l'indique le tableau ci-dessous :

Pays

Nombre de personnes sous alimentées (millions)

Proportion de personnes sous alimentées sur la population totale (%)

1999-90

2001-03

1990-92

2001-03

Cameroun

4,0

4,0

33

25

Centrafrique

1,5

1,7

50

45

Congo

1,4

1,2

54

34

Gabon

0,1

0,1

10

5

Guinée Equatoriale

-

-

-

-

Tchad

3,5

2,7

58

33

Total

10,5

9,8

-

-

Paragraphe 2 : Les conséquences résultantes de cette paupérisation

La dégradation de l'environnement conduit à la pauvreté. La pauvreté l'une des sources principales des maux qui minent l'Afrique centrale tant au plan sociopolitique qu'au plan économique.

27 - Document des stratégies de réduction de la pauvreté (DSRP, Congo)

a) Les conséquences sociopolitiques

La sous région d'Afrique centrale est non seulement l'une des régions les plus pauvres d'Afrique mais aussi celle où l'on retrouve plusieurs pandémies notamment le SIDA. L'insécurité alimentaire et la malnutrition constituent de graves problèmes. L'Afrique centrale est aussi l'une des régions où le taux de prévalence est très élevé. Il est de 10,7% en Centrafrique, de 7,9% au Gabon, de 3,5% au Tchad et de 3,2% en Guinée Equatoriale. Ce taux de prévalence et la mort des séropositifs qui s'ensuit, car les populations n'ont pas l'accès facile aux médicaments antiviraux est la cause d'un taux élevé d'orphelins. Au Congo par exemple, une enquête menée en 2003 a permis d'établir que 47% des enfants orphelins le sont du fait du SIDA. Ils sont 78000 enfants classés OEV (Orphelins et Enfants Vulnérables).

L'Afrique centrale est l'une des régions les plus agitées d'Afrique. Cependant, longtemps on occulte l'aspect lié à la pauvreté, qui est elle-même liée à la dégradation de l'environnement. Car comme le dit le professeur KAMTO, « l'idée de conservation de la nature est vaine dans des régions où sévit la misère, où les populations empruntent tout à la nature pour survivre, où l'économie monétaire moderne en est elle-même largement tributaire »28.

Cependant quand on évoque les causes de la situation sociopolitique comme la guerre en Afrique centrale, on ne fait jamais allusion aux causes liées à la dégradation de l'environnement.

Le cercle ainsi défini nous permet alors de dire que la dégradation de l'environnement entrainant la pauvreté est donc de loin l'une des causes des conflits armés en Afrique centrale. Car comme le dit Ingrid HOVEN « dans de nombreux pays en développement, (....) et l'accélération de la dégradation des ressources naturelles sont l'une des causes principales des affrontements qui se produisent autour des ressources naturelles. Aussi à Didier Claude ROD de renchérir « on est donc dans le cycle infernal où le pétrole est la cause et la conséquence du sous-développement : la population s'appauvrit, victime de la guerre alimentée par les achats d'armes grâce à la manne pétrolière ; tous les secteurs économiques se désagrègent, sauf le secteur pétrolier contrôlé par une minorité de dirigeants étatiques et les firmes internationales, qui se renforce. La boucle est bouclée : la population est non seulement spoliée des richesses que les dirigeants se sont appropriés, mais elle en est victime à travers la guerre » 29.

28- Maurice KAMTO, Les conventions régionales sur la conservation de la nature et des ressources naturelles en Afrique et leur mise en oeuvre.

«comment juguler, en effet, la destruction des forêts par des paysans qui ont besoin de lopins de terre pour pratiquer une agriculture de subsistance et de bois de chauffage pour des besoins domestiques si l'on n'est en mesure de leur proposer des solutions alternatives ? Comment mettre un terme à la déforestation massive ou à l'exploitation anarchique des ressources sylvicoles par un Etat qui en tire une part substantielle de ses revenus ou par des exploitants agréés par lui, sans créer des sources alternatives de revenus dans l'industrie par exemple sans promouvoir l'accès à la technologie du bois dans les pays concernés, à la maîtrise des techniques de régénération forestière et sans fournir les moyens de protection et de préservation des domaines forestiers classés en raison du caractère vital ou de la richesse exceptionnelle de leurs écosystèmes ? «

Voir aussi les auditions de Mongo Béti, de Pascal LISSOUBA et YORONGAR

29 - voir la sentence du Tribunal permanent des peuples prononcée sur plainte du collectif « Elf ne doit pas faire la loi en Afrique« Paris le 21 mai 1999.

a) Les conséquences économiques

Les conséquences économiques auxquelles on fait allusion ici il s'agit de celles résultant de la pollution pétrolière. Abstraction faite à la gestion des revenus de la cette rente.

L'exploitation du pétrole dans les pays en développement en général est synonyme de sous développement de pauvreté et de maladies. Comme l'illustre les cas du Congo, du Cameroun, Tchad et du Cameroun, c'est sous l'exploitation du pétrole que la dette de ces pays a augmenté d'une façon vertigineuse. Au Congo, la dette s'élevait à six milliard en 1992 alors que ce petit pays a commencé l'exploitation de son pétrole dans les années 1960.30

Des conséquences sont dues entre autre à la diminution de la force de travail. En réduisant la force de travail suite à la maladie qu'elle cause, la pollution pétrolière constitue un coup dur pour l'économie de cette région. Les autres secteurs se trouvent alors affectés non par ce que les revenus pétroliers ne sont pas ventilés vers ces secteurs mais par ce que toute la population se retourne alors à cette manne.

En négligeant les autres secteurs de l'économie, les Etats d'Afrique centrale deviennent des Etats rentiers très dépendants des fluctuations du prix du baril31.

L'économie d'un pays ou d'une région est intimement liée au niveau de vie de ses populations et de leur force de travail. C'est de l'état de santé de la population que dépend le rendement dans tous les secteurs de l'économie. Les populations de l'Afrique centrale étant durement affectées, l'économie paie un lourd tribut. Car ces populations ne peuvent plus travailler compte tenu de tous ce qui précède et ne peuvent plus produire la richesse normale nécessaire à sa survie. Il en résulte donc une dépendance à d'autres régions et d'autres continents notamment l'Europe ; exception faite toutefois au Cameroun. L'importation des produits alimentaires est par exemple de près de 40% du total général des importations chaque mois.

30 - Rapport d'informations précité de Mme Hélène HAUBERT de 1999, voir audition de monsieur Pascal LISSOUBA et ses deux ministres de l'époque.

31 - la conférence de l'association des Hautes Juridictions de Cassation des Pays Ayant en Partage le Français sur le thème « La contribution du droit au développement durable«, voir la contribution de Roland POURTIER.

Section 2 : L'impact sanitaire

La pollution due aux hydrocarbures est source de plusieurs maladies aussi bien respiratoires (paragraphe 1) qu'épidermiques (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les maladies respiratoires

Le pétrole tue. Le pétrole tue au double niveau, aussi bien à l'exploitation qu'à la consommation. La consommation de plus en plus élevée du pétrole de par le monde constitue un risque pour la santé de la planète. La canicule et aujourd'hui le combat pour les biocarburants en sont des illustrations parfaites de ce phénomène. Cependant ne seront abordées ici que les maladies liées à son exploitation.

a) La tuberculose

Le manque de protection effective de l'environnement par les multinationales pétrolières cause du tort à l'environnement (cf. chapitre 1) et aussi à la santé des populations surtout environnantes. Au premier bon des accusés, les maladies respiratoires : la tuberculose. La tuberculose est une maladie infectieuse causée par le bacille de Koch. Cette maladie est fréquente en Afrique centrale, surtout dans les zones pétrolières.

Cela est dû à la présence dans ce minerai (le pétrole) de certaines substances comme les oxydes d'azote, le monoxyde de carbone et surtout le dioxyde de soufre également très cancérigènes.

A cela s'ajoute la poussière des gros engins. En effet dans certaines zones, pour faire évacuer leurs productions, les multinationales pétrolières ont ouvert des voies, mais sans pourtant les bitumées. Des milliers de camions citernes qui y circulent nuit et jour, soulèvent de la poussière au mépris des populations environnantes. Cette situation est surtout perceptible le long de l'oléoduc Tchad / Cameroun. La poussière ne permet pas le développement normal des plantes. Car la poussière ainsi soulevée se dépose sur les feuilles, ce qui empêche la photosynthèse nécessaire à tout le métabolisme de la plante.

Ces substances et cette poussière sont très nuisibles à la santé et elles atteignent principalement les organes respiratoires (les poumons, le foie...). Ainsi, en Afrique centrale et nomment dans les zones d'exploitation, on relève une forte augmentation du taux de tuberculeux. Dans cette situation, les plus touchés demeurent les femmes et les enfants. Le taux des tuberculeux est de 385 de personnes au Gabon pour une population de moins de deux millions d'habitants et de 283 en Guinée Equatoriale pour une population de moins d'un million d'habitants. Au Cameroun, le taux des maladies respiratoires est de 25 à 30% alors qu'il était de 20% dans les années 80.

C'est ce que, parlant de la toux sans indiquer le nom de cette maladie, le député tchadien NGARLÉJY KOJI YORONGAR affirme « les gens souffrent de la toux ». Cette situation est devenue très préoccupante à tel point que monsieur Noël NOUDJITOUDJI de la cellule Environnement et sécurité routière du ministère tchadien des Infrastructures prédit en disant qu' : « à la longue, la zone enregistrera beaucoup de maladies pulmonaires, à la limite cancérigène ».

En outre, le pétrole en affectant les eaux côtières ainsi que les ressources qui y vivent, portent atteinte à la santé de la population environnante. Car celle-ci tire l'essentiel de sa subsistance des eaux, en consommant ces ressources, elle consomme donc directement les substances sus évoquées. Les poissons de mer à Pointe Noire par exemple ont un arrière gout d'hydrocarbures.

b) Le cancer

Le cancer est une maladie encore male connue en Afrique centrale, pourtant le nombre de cancéreux va en augmentant et on ignore aujourd'hui les origines de cette maladie. Pourtant les hydrocarbures polycycliques aromatiques font partie des premiers cancérigènes connus.

On trouve en Afrique centrale par exemple les cas de cancer d'estomac, de poumon, de foie et bien d'autres. Mais aussi le cancer de la peau qu'on étudiera ci-dessous. Au Congo Brazzaville et notamment à Pointe Noire, on relève 558 patients de cancer en 1999. Cette situation devient encore plus alarmante à cause d'un accès limité aux services de santé de base.

Paragraphe 2 : Les maladies de la peau

Elles sont plusieurs, les infections dues à l'exploitation du pétrole. Dans le cadre de cette étude, nous nous limiterons aux allergies cutanées et aux cancers de la peau.

a) Les allergies cutanées.

Les pays en développement en général et ceux de l'Afrique centrale en particulier contribuent peu sinon pas à la production industrielle des gaz à effet de serre (GES). Car dans cette région il n'existe pas de grandes industries de fabrication avec une consommation de plus en plus élevée des hydrocarbures, susceptibles d'entrainer un effet de serre et porter atteinte à la santé.

Toutefois, les problèmes de santé liés à la pollution de l'environnement demeurent cruciaux. En Afrique centrale, il manque de véritables sociétés de ramassage des ordures ménagères et bien d'autres déchets comme les sachets utilisés pour l'emballage. L'utilisation de plus élevé de sachets crée le problème d'inondation dans certaines zones. Car les eaux de pluies n'arrivent plus à s'infiltrer.

Cependant l'exploration et l'exploitation du pétrole dans cette région pollue l'atmosphère à cause des gaz qui sont brulés par les torchères au large des côtes et aussi de l'abandon non-conforme des puits après l'exploitation. Ainsi, du fait de cet effet de serre, on enregistre des cas de certaines allergies cutanées. A Pointe Noire, où près de 1200 personnes cohabitent avec terminal de Djeno, on enregistre cinq à dix cas par mois, auxquels s'ajoutent vingt à vingt quatre dermatoses traitées. Cette situation s'accentue à cause aussi de l'abandon non-conforme des anciens puits et de la mauvaise gestion des déchets. Ainsi, à Pointe-Noire, on trouve un endroit dite « rivière rouge » par la population environnante à cause de la pollution de la dite rivière exploitée par Total dans les années 70, aujourd'hui abandonnée à Zetath.

b) Les cancers de la peau

Les types les plus fréquents de cancer de la peau sont carcinome basocellulaire et carcinome spinocellulaire. Le carcinome basocellulaire se manifeste souvent sous forme de petits cratères dont la surface est brillante ou perlée.

Le cancer de la peau autre que le mélanome débute pratiquement toujours par une plaie ou une marque sur la peau qui n'arrive pas à guérir. Parfois, on remarque une modification de taille, de forme, de sensation, de couleur, d'apparence à la surface et d'élévation par rapport au reste de la peau. La plaie peut également devenir irritée ou douloureuse, ou commencer à saigner ou à s'ulcérer.

Cette maladie est très présente en Afrique centrale surtout dans les zones pétrolières. Cependant, faute d'une bonne information cumulée à l'inculturation, peu sont alors les patients qui consultent les médecins. Ceux qui souffrent de cette maladie se considèrent comme étant victime d'un mauvais sort communément appelée « mouandza) en Afrique centrale.

En outre, faute de voir un médecin, l'origine de la maladie demeure inconnue du grand public. Pourtant, les quelques cas enregistrés révèlent le rejet des substances cancérigènes dans l'atmosphère par les torchères qui brulent à longueur des journées.

Conclusion de la première partie

L'Afrique centrale exploite le pétrole depuis plus de quatre décennies. Quatre décennies d'exploitation, quatre décennies de destruction de l'environnement. Le bilan de l'exploitation du pétrole est lourd. En effet, l'exploitation du pétrole a porté une atteinte très grave à l'environnement tant terrestre, marin qu'aérien. On relève la destruction des écosystèmes forestiers, destruction qui entraine la disparition de la diversité biologique, pollution des côtes et des plages qui entraine la diminution des possibilités de pêche et de tourisme.

Cet impact aux milieux naturels a eu de graves répercutions sur la société. Car l'environnement et l'homme sont unis par un lien naturel de cause à effet. Ainsi, porter atteinte à l'environnement revient à porter atteinte à l'homme. Elles vont de l'atteinte physique à l'atteinte sociale. Cette atteinte a des conséquences pluridimensionnelles.

De l'atteinte physique, on relève des maladies de différentes sortes et en occurrence les maladies respiratoires, comme la tuberculose, et d'autre comme le cancer qui atteignent les appareils respiratoires, notamment les poumons, le foie etc. A ces maladies respiratoires, il s'ajoute les maladies de la peau entre autre, le cancer de la peau et d'autres infections et allergies cutanées.

Sur le plan social le bilan est également lourd. Le pétrole est une source théorique de richesse. Il est en fait, facteur de corruption et augmente l'écart entre les riches et les pauvres. Non seulement la destruction de l'environnement entraine des maladies qui, du reste, ne permettent pas à l'homme de travailler et de se développer comme il le faut, mais aussi elle rend pauvre. De la pauvreté résultent beaucoup de maux qui accablent l'Afrique centrale. Augmentation du taux de pauvreté, diminution du taux de scolarisation, insécurité politique et alimentaire, tous ces maux sont de près ou de loin les conséquences de la destruction de l'environnement et vice versa. La pauvreté constitue l'une des causes de la destruction de l'environnement. On se retrouve alors dans un cercle fermé entre l'environnement et la pauvreté. Car l''environnement et la pauvreté sont liés par un lien de causalité.

Ces maladies et toutes ces conséquences sont en proportions montante, malgré les voeux des ONG et de certaines institutions internationales pour le respect de l'environnement par les multinationales pétrolières sous le thème de développement durable, celles-ci peinent à protéger l'environnement compte tenu de la déconnection de cette activité avec les autres. Toutefois, sous cette pression, les multinationales pétrolières ont défini, depuis les années 1970, certaines stratégies et politiques visant à protéger l'environnement.

PARTIE II : Les mesure visant à limiter l'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement

L'Afrique centrale exploite le pétrole depuis les années 60. Cela fait plus de quarante ans. Pourtant, ce n'est qu'à partir des années 70 à la faveur de la conférence de Stockholm de 1972 sur le thème, l'Environnement humain qu'est apparue la nécessité d'oeuvrer de façon collective pour la protection de l'environnement. Suite à cette conférence et notamment aux principes contenus dans la déclaration dite de Stockholm, deux plus tard, en 1974, le Conseil Economique et Social des Nations Unies a mis sur pied une commission des sociétés transnationales. Trois ans après, cette commission lançait un groupe de travail chargé de faire des propositions pour réglementer au niveau international les activités des entreprises transnationales (tout secteur confondus). Mais les travaux n'aboutirent à aucun consensus politique et le projet tomba définitivement à l'eau en 1992, avec la fermeture du Centre des Nations Unies sur les entreprises transnationales. Une fermeture due aux pressions des Etats-Unis et d'autres pays industrialisés.

En 1976, l'Organisation pour la Coopération et le Développement Economique (OCDE), le club des pays industrialisés adoptait à son tour des principes directeurs de l'OCDE) à l'intention des entreprises de respecter ces principes partout où elles sont présentes. Rédigés de manière vague, ils couvrent notamment des aspects de développement durable et de droit de l'homme.

Dans cet élan, chacune des multinationales pétrolières adoptèrent, bien que de façon lancinante, des stratégies de protection de l'environnement. Ces stratégies peuvent être classées en deux groupes : les stratégies internes et les stratégies externes.

Les stratégies internes sont propres à l'entreprise. C'est l'entreprise elle - même qui défini ses normes relatives à la protection des droits de l'homme, de la protection de l'environnement..... Parmi ces stratégies, la première a consisté à adopter les codes de conduite. C'est Shell, dans le secteur pétrolier, qui a ouvert la voie dans ce sens. TotalFinaElf a adopté le tien en décembre 2000. A la page10 de ce code, le Groupe préconise d'agir « en respectant les environnements naturels et culturels de tous les pays dans lesquels il est implanté ».

Les stratégies externes sont celles relatives à la sensibilisation des populations aux dangers résultants de leurs activités et aussi des actions d'appui ou d'aide aux populations.

Ces stratégies du reste ne sont que des politiques et options à suivre dépourvues d'une force contraignante. Leur effectivité dépend de leur application pendant et après l'exploitation du gisement selon le bon vouloir de l'entreprise.

Partant, dans cette deuxième partie, nous examinerons ces stratégies (Chapitre 1) avant de déboucher sur leur mise en oeuvre (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Les stratégies de protection de l'environnement

Conscientes du fait que leur activité est très polluante, les multinationales pétrolières ont défini certaines stratégies internes (section 1), mais également d'autres externes (section 2) afin de protéger l'environnement.

Section 1 : Les stratégies internes

Parmi les stratégies internes figurent, les codes de conduite (Paragraphe 1) et aussi la formation de leurs agents aux problèmes environnementaux (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les codes de conduite

Selon une étude de l'Organisation pour la Coopération et le Développement Economique, on peut définir ces codes privés comme l'énoncé par la société « des normes et des principes régissant la manière de conduire son activité »32. Les codes de conduite sont des instruments à caractère intentionnel qui définissent des objectifs à atteindre mais, leur valeur juridique reste discutable.

a) Le caractère intentionnel des codes de conduite

Longtemps, l'industrie du pétrole comme toutes les autres formes d'industrie se sont développées en dehors des « préoccupations environnementales » 33. Ce n'est qu'à partir des années 70, suite aux catastrophes comme l'échouage d'Amoco Cadiz que la communauté internationale, suite à la pression des ONG et des organismes internationaux, a senti l'urgence de lutter pour la protection de l'environnement.

La pression des organismes internationaux (OCDE), régionaux (Conseil de l'Europe) et des ONG (Greenpeace, .....) a poussé les multinationales pétrolières à adopter les codes de conduite. Ceux-ci définissent les intentions ou des objectifs à suivre en matière de droits de l'homme et de protection de l'environnement. Cependant, ces documents sont souvent rédigés par des spécialistes de droit enfermés dans leurs bureaux, sans avoir mis pied sinon pour une courte durée dans un champ pétrolier.

Dans cette course aux codes de conduite, c'est Shell la première à avoir adopté un code de conduite. La position de Shell traduit les dénonciations faites à son endroit dans le Delta de Niger. Shell fut succédée par TotalFinaElf en 2000.

32 - Codes de conduite : étude exploratoire sur leur importance économique. Groupe de travail du Comité des échanges de l'OCDE.

33 - loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature, art. 2

Dans sa préface au code de conduite de TotalFinaElf, monsieur Thierry DESMARET, Président Directeur Général du Groupe énonce que « Nos valeurs de base sont le professionnalisme, le respect des collaborateurs du Groupe, le souci permanent de la sécurité et de la protection de l'environnement ainsi que la contribution à l'essor des communautés qui accueillent nos activités ».

Ces codes, chartes ou déclarations de principes, les intitulés varient, ressemblent souvent à des textes pour les consommateurs qu'à un outil de marketing destiné aux syndicats ou aux associations tiers-mondistes ou de défense de l'environnement. Dès lors, à côté des modèles avancés par les entreprises elles-mêmes ou encore proposés par des organisations non gouvernementales, sont apparus des codes proposés par des institutions gouvernementales, à l'instar de ceux élaborés par le Bureau International du Travail (BIT) ou encore, plus récemment, le Parlement Européen, ou encore, le code de conduite des multinationales de l'Organisation pour la Coopération et le Développement Economique.

b) Valeur juridique des codes de conduite

La valeur juridique des codes est un élément important lorsqu'on veut parler de la responsabilité des multinationales pétrolières. Doit-on les placer au même titre que des lois auxquelles elles sont tenues, ou bien encore que de simples intentions ou de simples objectifs à atteindre dépourvus de la force obligatoire ou contraignante ? Sinon, quelle est la valeur de ces codes ?

La réponse à toutes ces interrogations nous amènent à analyser le comportement de ces multinationales sur le terrain, en Afrique centrale en particulier, à travers les différents cas sus évoqués (Oléoduc Tchad / Cameroun, le champ de Gamba, les terminaux de Kribi et de Djeno). De l'examen de ces cas fait dans la première partie de ce travail et les conclusions sont très décevantes.

C'est pourquoi, l'on ose croire que ces codes, comme dit plus haut ne répondent qu'à un souci d'image suite aux dénonciations dont elles sont la cible, non pas à une volonté réelle de protection de l'environnement et de tous les autres objectifs qu'elles se sont fixées. Tout ceci découle du contexte et du processus de leur élaboration.

Les code sont élaborés par les multinationales pétrolières elles-mêmes et se concentrent généralement sur des questions précises ci-dessus évoquées. Volontaires, le non respect des principes érigés dans ces codes n'est pas « sanctionnable »34en droit. Néanmoins, le droit ne considère pas que le caractère juridiquement sanctionnable d'un document soit la condition nécessaire et suffisante de son fondement en droit. Dans son intervention à la session du Tribunal permanent des peuples sur les conditions de travail dans le secteur textile, René De SCHUTTER cite Giorgio SACEDOTI à propos de la portée des codes de conduite. « La théorie juridique, écrit ce dernier, s'est libérée du préjugé selon lequel la sanction est une donnée essentielle pour reconnaître à une règle un caractère juridique. La théorie du droit international s'est libérée à son tour d'un autre préjugé selon lequel il n'y aurait de droit que là où il y a une procédure formelle de création de la règle, bien établie à l'avance... »35

34 - Anne PEETERS, Les codes de conduite, instrument de régulation des multinationales ?

Le meilleur ou le pire

GESEA Asbl, 1999

35 - En Afrique la mise en cause d'un pétrolier est synonyme d'atteinte à l'Etat. Cf. la répression de Shell contre le peuple Ogoni au Nigéria appuyée par les forces de l'ordre de cet Etat

Il ressort que les codes de conduite peuvent bien servir de base pour engager la responsabilité des multinationales pétrolières.

Cependant, qui peut intenter une telle action et devant quel juridiction compte tenu de l'implication de ces multinationales dans la gestion de ces Etats d'Afrique centrale, mais aussi et surtout de la faiblesse de la société civile et de la faible mobilisation des ONG.

Paragraphe 2 : la formation des agents aux questions environnementales

Afin d'atteindre les objectifs qu'elles se sont fixés en matière d'environnement, les multinationales pétrolières entreprennent la formation de leurs agents. Elles ne peuvent prétendre préserver l'environnement si leurs agents ignorent les contours de ce concept.

a) des programmes de recherche

L'industrie pétrolière se développe, en grande partie en Afrique centrale, en milieu marin. Afin de mieux comprendre ce milieu et mieux le préserver face à la menace croissante des hydrocarbures, les multinationales pétrolières financent de nombreux programmes de recherche pour leurs agents, axés prioritairement sur les récifs coralliens et les mangroves.

Depuis 1992 par exemple, la fondation Elf est partenaire du parc national du Port-Cros, premier parc national marin d'Europe et de Méditerranée, et de son service, le conservatoire botanique national de Porquerolles.

Dans ce cadre, la fondation soutient un programme à forte dominance marine qui s'est poursuivi dans le les domaines suivant :

Etude de l'impact de plongée sous marine sur les milieux fragiles et particulier sur les algues calcaires, suivi et adaptation de mesures d'éradication des espèces toxiques ou envahissantes, évaluation et amélioration des mouillage écologiques expérimentaux.

Toujours dans ce sens de la formation de ses agents, la fondation vient de lancer un programme de recherche international sur la biodiversité des récifs coralliens. Couvrant environ un million de kilomètre carré (km²) et abritant des milliers d'espèces animales et végétales, ils constituent l'un des écosystèmes les plus diversifiés de la planète et protègent de nombreuses côtes de l'érosion.

Tout ceci, en vue d'atteindre l'objectif fixé à l'article 7 de sa Charte Sécurité Environnement Qualité selon lequel « Chacun, à tout niveau, doit être conscient de son rôle et de sa responsabilité personnelle en matière (.....) de dommage à l'environnement ».

Cependant cette option de formation est moins visible dans la région d'Afrique centrale. Ceux qui bénéficient de ces formations sont pour la plupart des expatriés et non les autochtones. Ce qui fait que cette région est toujours victime des pollutions et bien d'autres dégâts causés à l'environnement.

b) les ateliers et séminaires

Pour être toujours bien informées des enjeux de l'environnement et surtout des nouvelles questions qui se posent, les multinationales pétrolières participent également aux ateliers et séminaires qui sont organisés à travers le monde en la matière.

C'est pour cette raison que lors de l'atelier régional tripartite sous le thème « comment maximiser l'impact de l'industrie pétrolière sur le développement en Afrique centrale ? » organisé par l'Initiative pour l'Afrique Centrale (INICA) et le Centre de Développement de l'OCDE (DEV) du 13 au 14 juillet 2005 à Brazzaville, on note la présence des représentants de l'industrie pétrolière36.

36 - Liste des participants à l'atelier de l'INICA du 13 au 14 juillet 2005 à Brazzaville sous le thème «Comment maximiser l'impact de l'industrie pétrolière sur le développement en Afrique centrale ?«

Hormis cet appui financier et technique, les multinationales pétrolières consacrent des investissements croissants aux populations sous forme d'investissements sociaux et de plans de développement local, construction d'écoles, assistance SIDA pour les employés.

TotalFinaElf était représenté par André BAHOUMINA, coordonnateur de développement durable et d'Yves-Robert LEFEBURE, Directeur Négociations et Relations Extérieures. De son côté, Chevron était représenté par Katia Tatu MOUNTHAULT, coordonatrice des relations publiques et des projets communautaires.

Section 2 : Les stratégies externes

Dans le but de protéger les environnements dans lesquels elles opèrent, les multinationales pétrolières sensibilisent le public sur cette question (Paragraphe 1) et appuient les actions sous régionales de protection de l'environnement (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La sensibilisation du public

La sensibilisation du public aux questions environnementales découle de la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement.

a) La notion de public

La définition de la notion de public diffère à travers les textes.

La convention d'Aarhus introduit une distinction entre les notions de « public » (art 2 - 4°) et de « public concerné » (art 2 - 5°).

Le public selon ladite convention, « désigne une ou plusieurs personnes physiques ou morales, et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes ». Quant au public concerné, il est formé par « le public qui est touché ou qui risque d'être touché par les décisions prises en matière d'environnement ou qui a un intérêt à faire valoir à l'égard du processus décisionnel ». Toutefois, une présomption d'intérêt est posée au bénéfice des « ONG qui oeuvrent en faveur de la protection de l'environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne » : elles sont « réputées avoir un intérêt »37

Le public est donc entendu très largement38, mais on peut ne pas être absolument convaincu par l'opportunité de distinguer entre « public » et « public concerné ». En effet, une redondance est nette entre le « public concerné » de forme associative réputé avoir un intérêt du paragraphe 5 de l'article 2 et les « associations, organisations ou groupes constitués », « personnes (...) morales », du paragraphe 4 du même article. Tout au plus peut-on inférer que le « public concerné » désigne les personnes physiques ou morales plus directement affectées matériellement ou à l'égard de leurs buts par les décisions environnementales, mais sans que le régime institué ultérieurement par la convention n'établisse de privilège net en sa faveur au plan de la procédure administrative non contentieuse.

37 - voir la contribution de Gérard MANEDIAIRE au Séminaire International de Droit de l'Environnement : Rio + 10, sous le thème Mondialisation et Droit de l'Environnement, Page 33.

38 - voir en particulier le paragraphe 9 de l'art3 de la convention (Dispositions générales) qui exclut toute condition de nationalité, de citoyenneté, de domicile pour les personnes physiques, et fait de même, mutatis mutandis, pour les personnes morale.

La directive communautaire de 2001 quant à elle est beaucoup plus lapidaire dans sa définition du public. Selon l'article 2 (Définitions), le public désigne «  une ou plusieurs personnes physiques ou morales, ainsi que, selon la législation ou la pratique nationale, les associations, organisations et groupes rassemblant ces personnes ».

b) Les moyens de sensibilisation.

Plusieurs moyens sont employés à cet effet pour informer le public. Il peut s'agir de la sensibilisation de proximité lors surtout des études d'impact, de la sensibilisation à travers les médias, les séminaires et les ateliers, les forums ou encore les journées portes ouvertes.

TotalFinaElf a depuis longtemps compris la nécessité de sensibiliser le public sur ses activités. Ainsi, à travers sa fondation, le Group a développé une mission d'informer et de sensibiliser le public sur les enjeux de la biodiversité et l'utilisation rationnelle des ressources naturelles. Le Groupe informe également le public sur la dangerosité de certaines installations.

Sans attendre l'élaboration de la loi, certaine entités ont déployé des programmes d'action volontaires pour améliorer l'information du public et des acteurs locaux (élus, écoles, entrepreneurs voisins, etc.). Ainsi, Atofina, pôle chimie du Groupe, a lancé en juillet 2002 la démarche « Terrains d'Entente« qui a donné lieu déjà à des actions d'information variées et originale : visite d'élus, échanges avec les écoles, etc.

Depuis plusieurs années, les sites industriels du Groupe que ce soit en France ou à l'international, mettent en oeuvre de nombreuses actions d'information de proximité. L'usine Atofina (branche chimie du Group Total) de Crosby au Texas (Etats-Unis) est très impliquée dans les organisations économiques ou sociales. Elle édite des brochures et un journal d'information à destination des riverains et organise une coopération très active avec le milieu enseignant. A Feluy en Belgique, la mise en service d'une nouvelle unité de production de polypropylène (PP3) a été accompagnée par des journées portes ouvertes. Un film original «PP3 : l'enquête« a permis d'aborder avec les riverains et les employés du site les impacts de cette réalisation sur la sécurité et l'environnement.

Considéré en Afrique centrale cependant, ce principe connaît beaucoup de limites malgré l'affirmation des déclarations en ce sens39.

39 - voir à ce sujet la déclaration de Brazzaville du 30 mai 1996 qui évoque « la nécessité d'impliquer d'avantage les populations autochtones, les collectivités locales, les organisations non gouvernementales.....dans la conservation et la gestion des écosystèmes » (Paragraphe 9, Déclaration issue de la CEDHAC)

Voir aussi la Déclaration de Yaoundé des chefs d'Etats du 17 mars 1999 qui précise la volonté des Etats d'Afrique centrale de renforcer les actions visant à accroître la participation rapide des populations et des autres acteurs dans le processus de gestion durable et de conservation des écosystèmes forestiers

Le public ou le public concerné selon les cas n'est pas effectivement sensibiliser. Cela s'explique par plusieurs raisons et notamment de l'organisation de ce public en occurrence les ONG. Ces ONG sont limitées dans leurs missions. Cela tient à certaines entraves intrinsèques mais aussi à d'autres extrinsèques.

Des faiblesses intrinsèques résultent entre autre aux finances et aux ressources humaines.

Qu'il s'agisse des ONG nationales ou internationales présentes dans la région, l'on note d'une manière générale que l'absence ou l'insuffisance des moyens financiers ou matériels constitue leur faiblesse majeure, d'où une dépendance poussée à l'égard des financements extérieures.

Beaucoup d'ONG en Afrique centrale qui sont nées dans la mouvance des années 1990 répondaient plus à un besoin d'opportunisme qu'à une connaissance réelle des problèmes environnementaux. Aussi, ces ONG sont-elles souvent de « petits cercles d'amis » sans aucune qualification.

Par ailleurs, le personnel des ONG est également flottant et instable tantôt il s'agit des fonctionnaires de l'Etat déjà très occupés, tantôt des étudiants en quête d'un travail temporaire, tantôt encore d'hommes d'affaires pour qui la gestion de l'ONG ne constitue qu'un passe temps40.

Des faiblesses extrinsèques sont dues à la marginalisation.

Les ONG nationales sont très peu impliquées et consultées lors des activités de gestion de l'environnement. Elles ne sont pas considérées comme partenaires efficace ni par l'Etat qui déjà les redoute, ni par les bailleurs de fonds moins encore par les ONG internationales41.

En dehors de cet aspect, lorsque le public arrive quand même à être informé et consulté, cas très rares d'ailleurs, son avis est difficilement, sinon pas pris en compte.

Ainsi par exemple, les dénonciations faites au consortium en charge de la construction de l'oléoduc sus cité entre le Tchad et le Cameroun par le public n'ont jamais été prise en compte et la population et l'environnement en sont victimes. Il en est de même pour les activités pétrolières des terminaux de Djeno, de Kribi et du champ de Gamba ou les timides dénonciations faites ne retiennent jamais l'attention des pétroliers.

Faute d'une population sensibilisation effective enfin, les populations n'hésitent pas à fréquenter et à circuler aux alentours des installations dangereuses. C'est ainsi qu'au mois de juin 2007 un incendie a été déclaré sur les installations de TotalFinaElf à Pointe-Noire causant la mort à deux pêcheurs.

40 - Selon Elena CORSI, Intervention à l'atelier de l'OCDE sus cité, cela s'explique aussi par le fait que « les liens forts entre le secteur public et multinationales du pétrole marginalisent dans certaine mesure les communautés locales et la société civile, souvent males organisées et divisées ».

41 - voir Patrick Juvet LOWE GNINTEDEM, mémoire sur le thème «Les ONGO et la protection de l'environnement en Afrique centrale, sous la direction de Gérard MONÉDIAIRE

Paragraphe 2 : Appui aux actions de protection de l'environnement.

L'Afrique centrale est une région pauvre, cette pauvreté ne permet pas la protection adéquate de l'environnement, faute de moyens financiers et surtout de moyens techniques. Cet état de chose ne laisse pas indifférent les multinationales pétrolières qui, d'ailleurs sont tenues pour responsables de la pollution de l'environnement. Elles apportent un soutien financier et technique aux actions de protection de l'environnement.

a) Appui financier42

Les pays d'Afrique centrale sont très pauvres ; ils se classent parmi les plus pauvres du monde, avec un produit intérieur brut très faible.

La protection de l'environnement exige la mobilisation de beaucoup de moyens financiers. L'Europe a dépensé en 2006 près de 800000 millions d'Euro pour la protection de l'environnement. Cependant, en Afrique centrale les Etats, pourtant avec des budgets en hausse, plus de 1000 milliards pour le Congo Brazzaville en 2007, ce budget ne consacre que peu d'argent à la protection de l'environnement. En 2003, à la rubrique «environnement« du budget d'investissement alloué au ministère de l'Economie forestière sont inscrits 362 millions de francs CFA soit 550 000 euros.

conscientes de cet état de chose et du danger qui pèse sur la population suite à la pollution de l'environnement et aux conséquences socio-sanitaires et socio-économiques que nous avons vu dans la première partie de ce travail, les multinationales initient des projets et mettent les moyens à la disposition des population dans le cadre du développement durable qui n'est en fait que la prise en compte de la protection de l'environnement pour préserver les intérêts des générations présentes et futures dans les activités de productions. C'est dans ce cadre que le Président Directeur Général de la compagnie anglo-néerlandaise Shell Gabon, Hans BAKKER, a annoncé jeudi 22 mars 2007 qu'un fonds d'une valeur de 300 millions de francs CFA sera octroyé au bénéfice du développement communautaire de Gamba. « Le but de ce programme, a annoncé monsieur BAKKER, est d'aider le département de Ndougou et les parties prenantes locales à développer une vision prospective dans un contexte « après pétrole« et une stratégie réaliste pour atteindre cette vision ». À cette même occasion, monsieur BAKKER a traduit son « souci de vulgariser la sensibilisation aux actions de développement durable et de permettre au personnel d'acquérir des connaissances nouvelles ».

Hormis cet aspect qui concerne directement les populations, les multinationales pétrolières sont souvent sollicitées pour financer les actions liées à la protection de l'environnement. Ces actions sont entre autres les séminaires, ateliers et forums qui sont organisés dans la cette région. Ainsi, il n'est pas rare de voir mentionné, lors de ces événements les mentions telles que « TotalFinaElf, Sponsor officiel » ou encore « Shell ou Chevron Sponsor officiel ». Cette participation financière aux actions de protection de l'environnement traduit à la volonté de ces multinationales de protéger l'environnement.

42 - Au niveau international, les multinationales pétrolières financent le FIPOL, crée en 1992 pour indemniser les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.

Ces multinationales ne manquent pas également à signer des accords de partenariat avec les organismes internationaux ou régionaux dans leurs actions de protection de l'environnement et de formation des populations. Elles soutiennent la COMIFAC et l'ECOFAC. En date du 13 octobre 2005 un accord de partenariat a été signé entre Total Gabon et le Fonds des Nations Unies pour l'Enfance (UNICEF) dans le but d'apporter un appui au renforcement de la lutte contre le paludisme et la promotion de la vaccination des enfants ». Cet accord paraît ne pas inclure la protection de l'environnement, mais lorsqu'on sait le paludisme découle aussi bien de la pollution de l'environnement, il vaut la peine d'être cité.

b) Appui technique et scientifique

L'Afrique centrale, comme il a été mentionné plus haut, est une région pauvre. Cette pauvreté, cumulée au désintéressement des autorités politiques, ne permet pas le financement à grands coût des actions de protection de l'environnement. D'où la tendance de faire la politique de la main tendue vers les organismes internationaux et les grandes firmes pétrolières pour pouvoir obtenir le financement nécessaire. Mais à cela s'ajoute le manque de la maîtrise de la technologie et de la science dans leur acception la plus large.

La protection de l'environnement fait intervenir plusieurs sciences (la chimie, la biologie, la médecine, le droit, .....) 43. Or cette région, aux ressources limitées, ne dispose pas des grandes écoles en ces domaines. Cela entraine un manque d'une bonne connaissance des milieux par les ressortissants de cette région.

Sur le plan du droit, pour ne citer que celui là, l'Afrique centrale n'a qu'un seul professeur de renommé international en matière d'environnement. Il s'agit du professeur Maurice KAMTO du Cameroun. D'où, pour élaborer les textes régissant le domaine de l'environnement, les Etats sont contraints sinon obligés de faire appel aux cabinets de juristes internationaux qui, pour la plupart, de connaissent pas très bien cette région.

Dans ces conditions, les experts des multinationales restent le dernier recours à défaut des cabinets internationaux. Dans ces multinationales on trouve les chimistes bien assermentés en la matière, des physiciens ou même des juristes qui constituent un secours pour les institutions sous régionales de protection de l'environnement comme ECOFAC, COMIFAC, etc. Pour aller plus loin, ces multinationales signent des accords avec les instituions internationales qui opèrent dans la région. Ainsi, Total Gabon a conclu en 2005 un accord avec l'UNICEF dans le cadre de la sensibilisation de la population de Gamba pour préparer l'après pétrole.

Ces experts des multinationales fournissent des données qui contribuent à la connaissance des milieux de la région d'Afrique centrale. Lors des sommets internationaux ou sous régionaux organisés en Afrique centrale, on note la présence des représentants de ces groupes pétroliers dans les groupes techniques.

L'industrie pétrolière devient un mal nécessaire dans double dimension en Afrique centrale. Non seulement le pétrole génère de l'argent aux pays producteurs et représente un grand pourcentage dans les budgets de ces Etats, mais aussi un apport en technologie indispensable pour le développement de ces pays.

Cependant, comme le disait un contemporain, « une loi aussi en lettres d'or soit-elle écrite, n'a de la valeur que si elle est effectivement appliquée«.

43 - SCET Tunisie : Etude d'impact sur l'environnement dans le cadre de l'Aménagement et bitumage de la route Obouya - Bondie - Okoyo - Frontière Gabon, juillet 2007

Cette phrase nous amène à voir la mise en application des stratégies définies.

Chapitre II : La mise en oeuvre des stratégies.

Une fois les stratégies définies, leur effectivité dépend de leur mise en oeuvre. Cette mise en oeuvre se fait en deux moments principaux en amont et en aval. En amont, il s'agit de la phase d'exploitation (Section 1), en aval c'est la gestion des sites après exploitation (Section 2).

Section 1 : Mise en oeuvre des stratégies pendant l'exploitation.

La mise oeuvre des stratégies pendant l'exploitation se fait à travers les installations (Paragraphe 1) et la gestion des déchets (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Les installations

La mise en oeuvre des stratégies définies se fait d'abord à travers les installations. Parmi celles-ci il faut faire une première distinction entre des installations à terre et les installations à l'eau et une deuxième distinction avec les engins mobiles.

a) Les installations à terre et à l'eau.

L'exploitation du pétrole, comme nous l'avons sus évoqué, se fait soit à terre (exploitation on shore), soit à l'eau (exploitation offshore). La différence de localisation géographique entraine la différence du matériel et des pratiques pour protéger l'environnement.

A terre, les compagnies pétrolières ont cherché à mettre en place des innovations techniques en utilisant les équipements moins polluants. Par exemple, pour éviter les déversements accidentels d'hydrocarbures à travers le transport par la route à l'aide des camions citernes, les multinationales pétrolières ont mis en place une technique de transport par pipeline en acier. Tel est le cas de l'oléoduc Tchad / Cameroun précité. A Pointe-Noire, le transport de pétrole des puits au large des côtes jusqu'au terminal de Djeno se fait également par le même procédé.

A l'eau, plusieurs installations permettent de protéger l'environnement marin contre la pollution par les hydrocarbures. Pour se faire, certaines installations sont spécialement aménagées afin de protéger l'environnement. A la suite des accidents connus ici et là, la conception des plates formes pétrolière a considérablement changé. On en distingue trois principaux modèles, les plates formes fixes utilisées en mer peu profonde, moins de 300 mettre, les plates formes flottantes, utilisées pour l'exploitation de champs pétroliers dans les grands fonds de plus 300 mettre, c'est ce type de plates formes qui est utilisé dans le Golf de Guinée.

Les multinationales construisent également des cuves dans les fonds marins afin estoquer les déchets produits.

b) Les engins à terre et à l'eau

Pour assurer la protection de l'environnement, les multinationales ont également conçu des engins spécialement aménagés à cette fin.

Ainsi, à terre par exemple, elles ont mis en place le transport par oléoduc ou pipeline au lieu du transport par les camions citernes. Ce qui protège la biodiversité et les populations environnantes contre les nuisances et la poussière due à la circulation intense des camions citernes.

A l'eau par contre, les côtes de l'Afrique centrale sont le lieu d'intense activité pétrolière. De cette intensité résulte le risque de plus en plus élevé de marée noire.

Conscientes de cette situation et suite aux désastres causés par les accidents des bateaux pétroliers, Exxon Valdez (24 mars 1989, 40000 tonnes déversées, 1744 km de côtes polluées), Torrey Canyon (18 mars 1967, 119 000 tonnes déversés), Amoco Cadiz (16 mars 1978, 223 000 tonnes déversés) pour ne citer que ceux là, les multinationales ont mis en place des navires de production, de stockage et de déchargement à double coque. Cela est d'autant plus vrai lorsque qu'on observe que depuis les années 1960, début de la production du pétrole dans cette région, aucun accident majeur de type Amoco ou Exxon Valdez précité ne s'y est produit. En outre si cela venait à se produire, l'Afrique centrale ne dispose pas de moyens nécessaires pour faire face et risque est grand pour la population et l'environnement.

A l'eau toujours, les multinationales ont développé un autre mode de nettoyage de leurs bateaux. Jusqu'à un passé récent, le nettoyage des barges se faisait avec du pétrole0. Ayant constaté les dégâts causés à l'environnement, les multinationales utilisent actuellement de l'eau pour nettoyer leurs cargaisons.

Paragraphe 2 : La gestion des déchets

L'Afrique centrale n'est pas en soit productrice de déchets industriels de grande quantité, car elle ne dispose pas de grandes industries de fabrication. Par contre, compte tenu de la présence d'une grande forêt et l'exploitation du pétrole, on dénote un accroissement des déchets provenant de ces secteurs. Cependant, les compagnies pétrolières, productrices de déchets dit dangereux s'emploi à protéger l'environnement contre les effets de ces déchets.

a) Circonscription de la notion de déchets

Etats européens, conscients de la croissance de production de déchets dangereux à travers le monde et de leurs mouvements transfrontières, ont adopté à Bâle, le 22 mars 1989, la Convention sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination. Selon cette convention, « On entend par "déchets" des substances ou objets qu'on élimine, qu'on a l'intention d'éliminer ou qu'on est tenu d'éliminer en vertu des dispositions du droit national ». Article 2 de la convention44

.

44 - La convention de Bâle signée le 22 mars 1989 est entrée en vigueur en juin 1992. Au niveau européen, elle a été renforcée par une directive communautaire qui catégorise les déchets selon trois listes : la liste verte, la liste rouge et la liste orange.

Deux ans plus tard, on réaction à cette convention qu'ils avaient refusé de signer du fait qu'elle ne correspondait pas à leurs aspirations, les Etats africains ont adopté à leur tour la Convention de Bamako sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontières et la gestion des déchets dangereux produits en Afrique. Celle-ci en son article 1er définit les comme étant « des substances qu'on élimine, qu'on a l'intention d'éliminer ou qu'on est tenu d'éliminer en vertu des dispositions du droit national ».

Les déchets en soi ne poseraient pas de problème s'il n'y en avait pas de dangereux45. La notion de déchet dangereux a fait l'objet d'une abondante littérature. La convention de Bamako, sans donner une définition de la notion de déchets dangereux, les énumère et en donne la façon de les gérer. A l'annexe 1, plusieurs substances sont citées et parmi ceux-ci les « mélanges et émulsions d'huile / eau ou hydrocarbure / eau » (Y9) mais aussi les « résidus goudronneux de raffinage, distillation ou de toute opération de pyrolyse » (Y11) qui concernent le domaine pétrolier.

Cependant avant de faire cette énumération la convention de Bamako préconise la gestion des dits déchets. En effet, « on entend par gestion, la prévention et la réduction de déchets dangereux ainsi que la collecte, le transport, le stockage, le traitement, même en vue de recyclage ou de réutilisation, et l'élimination des déchets dangereux, y compris la surveillance des sites d'élimination ». Il ne s'agit pas ici de n'importe quelle gestion mais d'une « gestion écologiquement rationnelle de déchets dangereux, toutes mesures pratiques permettant d'assurer que les déchets dangereux sont gérés d'une manière qui garantisse la protection de la santé humaine et de l'environnement contre les effets nuisibles que peuvent avoir ces déchets » art 1er 10). 46

45 - Sur différentes catégories de déchets, voir aussi Agenda 21 chapitre 20 (Gestion écologiquement rationnelle des déchets dangereux, y compris la prévention du trafic international illicite de déchets dangereux ; chapitre 21 (Gestion écologiquement rationnelle des déchets solides et questions relatives aux eaux usées).

46 - Malgré l'adoption de cette convention le 30 janvier 1991 par une conférence des ministres de l'environnement de 51 Etats africains, ceux-ci peinent encore à gérer leurs déchets. Preuve palpable du fait que cette convention n'était pas signée par conviction mais simplement par enthousiasme en réponse à la convention de Bâle de 1989 dont ils avaient refusé de signer.

En outre, non seulement cette convention n'est pas appliquée par les Etats, pour preuve le déversement à Abidjan en 2006 des déchets toxiques par le Probo Koala, faute d'une transposition des conventions internationales sur plan national. (cf. Maurice KAMTO, Les conventions régionales de conservation de la nature et des ressources naturelles en Afrique et leur mise en oeuvre).

b) Pratiques de gestion

La des déchets est en quelque sorte le revers de la médaille de l'exploitation du pétrole. En effet, l'exploitation du pétrole est productrice de déchets à chaque de son processus, des études sismiques, au forage d'exploitation et au transport et au stockage des produits. Les déchets produits par l'industrie pétrolière sont classés selon la directive européenne sur la liste rouge.

En Afrique centrale, les multinationales pétrolières qui y opèrent, conscientes de cette situation, ont développé des pratiques et des stratégies de gestion des déchets. Cette prise en compte de la gestion des déchets leur a value des distinctions honorifiques dont la certification ISO.

Il ya dix ans, Shell Gabon devenait la première société du Groupe Shell en Afrique, et la première de la sous région à obtenir la certification ISO 14001 pour son système de gestion de l'environnement, dans toutes ses activités. En 2000 et 2003, Shell Gabon a été ré-certifiée ISO 14001.

Quant à Total Gabon, il a obtenu en juillet 2006 un trophée de la Direction Hygiène, Santé, Sécurité, Environnement du Groupe Total pour la qualité de ses actions menées et les résultats obtenus dans le domaine de l'hygiène Sécurité Environnement (HSE) depuis plus de cinq ans.47

Plus concret, Total E&P Congo, a mis en place des installations de traitement de déchets par le procédé Land-Farming. Ce procédé consiste d'abord en la caractérisation en laboratoire des matériaux pollués et au calcul des besoins en nutriments et autres apports. Les déchets hydrocarburés sont ensuite mélangés à des structurants tels que ; sciure de bois, copeaux, et à de l'engrais. Ce mélange est homogénéisé puis étalé sur une surface dite « plate forme biologique », il est régulièrement arrosé et retourné par un tracteur, pour faciliter l'aération, et donc le développement bactérien « bactéries mangeuses d'hydrocarbures ». Le sol est isolé de la plateforme de traitement par une bâche (géotextile ou géo membrane) pour empêcher l'infiltration dans le sol des eaux souillées par les hydrocarbures. Un réseau de drainage permet de collecter toutes ces eaux souillées par les hydrocarbures vers un séparateur des hydrocarbures.

L'eau décantée est contrôlée puis rejetée dans un drain naturel à un taux en hydrocarbures inférieur à 5mg/1 suivant la sensibilité de l'environnement.

Un suivi est régulièrement fait sur le site afin de s'assurer du retournement, de l'homogénéité et de l'aération du mélange. Il peut aussi être nécessaire de ré-humidifier le mélange. Des échantillons sont donc prélevés périodiquement afin de vérifier l'évolution de la bio dégradation. Les matériaux doivent avoir un résiduel de 0,5 à 2g/kg d'hydrocarbures de la masse des matériaux traités. La durée moyenne d'un cycle de traitement varie entre six et douze mois.

47 - Mr Alphonse MOUSSAVOU DOUKAGA, le Directeur de la communication et des relations extérieures, « cette distinction a été décernée à l'occasion du séminaire HSE de la Direction Générale de l'Exploitation - Production du Groupe Total qui a réuni dans la ville du Mans, en France, du 29 juin au 1er juillet 2006 dirigeants et responsables HSE du siège et de toutes les filiales du Groupe.

Section 2 : Mise en oeuvre des stratégies après l'exploitation

Après l'exploitation, les multinationales pétrolières réhabilitent et remettent en l'état les sites d'implantation et d'exploitation (Paragraphe 2). Ces opérations ne sont pas cependant sans difficultés (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Réhabilitation des sites.

Les modalités de réhabilitation des sites se différencient selon que l'exploitation a été off shore ou on shore.

a) Réhabilitation des sites offshore

L'exploitation du pétrole en Afrique centrale se fait comme nous l'avons dit plus haut essentiellement off shore. Cependant, depuis le début de l'exploitation en Afrique centrale, c'est à peine que l'on s'aperçoit de l'épuisement des réserves et donc de la nécessité de penser à d'autres secteurs d'activité d'où la nécessité de réhabiliter les sites pouvant servir à ces activités.

La réhabilitation des sites offshore ne pose pas trop de problème aux multinationales pétrolières. Car les hydrocarbures se dégradent facilement d'eux même dans l'eau.

Par contre ce qui reste à faire ce n'est que le démantèlement des installations érigées pour cette activité.

Total Congo par exemple, conscient de la mauvaise gestion des autorités congolaise, a mis en place des provisions pour abandon de sites pétroliers constituées par des capitaux ségrégué durant toute la durée d'exploitation des puits. Jusqu'à une date récente, ces provisions était gérées exclusivement par les compagnies pétrolières. Désormais, un comité mixte d'évaluation des provisions pour réhabilitation examinera les programmes de travaux, calculera les sommes dues et les intérêts financiers ainsi que le partage des dits intérêts entre Total et l'Etat.

En mer toujours, malgré cette prise de conscience et la volonté qui anime les multinationales, la réhabilitation demeure difficile ; par ce que l'environnement perceptible est seulement la surface de la mer, le fond marin étant mal connu ou presque pas du grand public. Cet état de choses fait qu'il n'y ait pas un contrôle sur les fonds marins. En outre, même si les sites peuvent être réhabilités, les ressources marines comme les poissons ne fréquenteront plus ce milieu comme avant l'exploitation. De ce fait, la remise en l'état du milieu marin demeure une question préoccupante en Afrique centrale.

Un autre problème non résolu est celui du milieu aérien dégradé par les gaz à effet de serre torchés en mer et qui créent un effet de serre « local ». Est-il que les questions d'environnement se caractérisent aussi par leur internationalisation. Une source de dégradation de l'environnement détectée en Afrique centrale a des répercutions au niveau international. Afin de réhabilité ce milieu, les multinationales luttent en faveur des biocarburants, des énergies renouvelables et à la réduction de la production de gaz à effet de serre.

b) Réhabilitation des sites on shore

La réhabilitation des sites sur terre est un réel problème auquel les multinationales s'emploient depuis de longues dates.

A terre comme en mer d'ailleurs, il s'agit de démanteler les installations et de traiter le sol contaminé par la pollution et les déchets. Il s'agit ici de redonner à la terre ses compositions et sa capacité de production après l'exploitation. Ces opérations nécessitent beaucoup de fonds et de technologie.

Cependant sur terre comme en mer le démantèlement n'est pas facile par ce que dans la sous région d'Afrique centrale il n'existe pas de grandes industries de traitement ou de recyclage des métaux. Le fait que le matériel démantelé s'il n'est pas réutilisé est abandonné sur les sites car le transporté vers les zones de traitement reviendrait encore plus cher aux entreprises. C'est ainsi que même après tant d'années d'exploitation, on retrouve encore le matériel sur les sites. En mer, cela entraine la salinisation des côtes. Cette salinisation est aussi l'une des sources des conséquences décrites plus haut notamment la diminution des possibilités de pêche et de tourisme.

Le traitement des déchets intègre bien cette politique de réhabilitation des sites. Toutefois aussi bien qu'on s'emploiera à réhabiliter les sites, cette opération prend beaucoup de temps et les populations doit attendre pour pouvoir réutiliser cette terre.

Paragraphe 2 : Difficultés de mise en oeuvre des stratégies

Il serait faut de dire que les stratégies définies plus haut sont facilement mises en oeuvre. En effet, plusieurs causes enfreignent la mise en oeuvre des stratégies. Certaines sont intrinsèques aux multinationales elles-mêmes, d'autres sont extrinsèques.

a) Difficultés intrinsèques aux multinationales.

Dans le processus d'exploitation du pétrole, qu'elle soit offshore ou on shore, la protection de l'environnement n'y fait pas partie. C'est lorsque, pour la plupart des temps qu'on a terminé les différentes phases que l'on pense aux actions de protection de l'environnement. Il s'agit alors de la gestion des déchets ou de la réhabilitation ou de la remise en l'état des sites. Comme on peut le constater, toutes ces opérations n'interviennent qu'à la fin des opérations. Cette déconnection de la protection de l'environnement au processus d'exploitation fait que malgré la volonté de protéger l'environnement, les multinationales reviennent peu sinon pas en arrière pour gérer les questions d'environnement. L'idéal serait que la protection de l'environnement soit inclus dans le processus et que les études d'impact sur l'environnement soient bien menées en amont afin que les problèmes qui se posent en aval ne connaissent pas difficile pour traitées.

Il est souvent difficile dans ces conditions de redonner à la nature tout ce qu'elle avait de naturel sans qu'il n'y ait pas de ratés.

Les multinationales pétrolières sont des acteurs commerciaux internationaux. La protection de l'environnement est une question qui nécessite la mobilisation de beaucoup de fonds. Pour se faire, les multinationales doivent soit prelever à chaque étape de l'exploitation des pourcentages en vue de la protection de l'environnement. Ce fait n'arrange pas les opérateurs que sont les multinationales. Car tout opérateur économique ne poursuit qu'un seul but : le profit.

Ces dépenses colossales pour les questions environnementales font que les multinationales ne prêtent pas toujours attention aux problèmes d'environnement ou quand elles le font, les solutions apportées ne sont pas à la hauteur des problèmes. Ainsi, Total Congo par exemple, comme nous l'avons évoqué plus haut, a dépensé en 2003 et pour le seul site de la rivière rouge, 1,5 millions d'euros. Et tous les ans, Total Congo emploie entre 3 et 4 milliards d'euros pour la protection de l'environnement, alors que l'Etat congolais ne consacre que 362 millions de francs CFA soit 550000 euros48.

En dehors de la protection de l'environnement par des actions préventives, il y a également un autre volet lié la réparation des accidents. La réparation des accidents environnementaux peut même entrainer la faillite d'une entreprise. En effet, la réparation des accidents n'est chiffrée qu'en millions ou même en milliards selon les cas.

En 2001 par exemple, le filet d'un bateau de pêche s'accroche à la vanne de la bouée où les cargos viennent s'amarrer au large pour être chargés. 15000 barils s'échappent, l'amende est fixée à 150 millions de francs CFA.

Cette difficulté à laquelle sont confrontées les multinationales se trouve réconforté ou même favorisée par une opinion publique qui n'accorde pas une attention particulière aux « préoccupations d'environnement ».49

b) Difficultés extrinsèques

Plusieurs causes extrinsèques aux multinationales pétrolières expliquent la difficulté de mise en oeuvre des stratégies définies.

D'abord la notion même de l'environnement, si elle intègre aujourd'hui les politiques des multinationales pétrolières, elle demeure encore male comprise d'elles et des populations de l'Afrique centrale. En effet, le droit de l'environnement ou l'environnement lui-même font l'objet de beaucoup d'interprétations. Ce foisonnement des définitions et des interprétations de la législation environnementale crée une confusion au niveau des multinationales. Aussi, dans leurs chartes, leurs codes de conduite ou même dans leurs déclarations, elles ne font état que de l'aspect lié au respect de l'environnement. Ainsi, il n'est pas rare de lire dans leurs codes de conduite « ....veille au respect des environnements »50 des pays dans lesquels elles sont implantées.

Par contre, elles délaissent l'aspect du droit à l'environnement. Faute de cette connaissance, les actions en faveur de la protection de l'environnement sont menées en dehors de la considération de la vie humaine donc du droit à l'environnement.

48 - Voir Budget d'investissement de l'Etat congolais exercice 2003

49 - Loi française N°76 - 629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, art 2 al 1er

« Les travaux et projet d'aménagement qui sont entrepris par une collectivité publique ou qui nécessitent une autorisation ou une décision d'approbation ainsi que les documents d'urbanisme doivent respecter les préoccupations d'environnement ».

50 - voir le code de conduite de TotalFinaElf, le principe 10.

Ensuite, l'absence d'une bonne connaissance des milieux dans lesquels elles opèrent constitue un handicap pour la protection de l'environnement. Les actions qui sont menées ne concernent que l'environnement immédiat, alors que la destruction de l'environnement a des effets différés ou à long terme très graves pour la santé humaine ou les milieux physiques. Tel en est le cas de l'effet de serre. Car l'interdépendance est l'un des critères du droit de l'environnement. Un incident environnemental produit en Afrique centrale peut avoir des répercutions dans le reste du monde. La mobilisation pour la protection des forêts amazoniennes et celles du bassin du Congo illustre bien cet aspect de chose.

Enfin, l'environnement n'est pas une abstraction ou une création de l'homme. Quelque soit cette volonté de le protéger, l'action de l'homme ne lui donnera qu'un aspect artificiel. Dans ces conditions, la vraie protection de l'environnement devrait se faire par des actions préventives de sensibilisation ou de mobilisation contre des atteintes dont-il est victime. D'où la difficulté des multinationales pétrolière à appliquer les stratégies définies, au motif qu'elles ne sauraient décider à la place de l'autorité politique détenue par les Etats eux-mêmes.

Cependant, l'environnement est une notion male comprise tant par les populations que par les Etats d'Afrique centrale. En Afrique centrale, l'environnement est un concept qui fait partie des mots savant lorsqu'on emploie auprès des populations. Il est réservé aux têtes bien faites alors que les conséquences de sa dégradation touchent surtout les défavorisés qui sont exposés aux impacts tant environnementaux que socio sanitaire.

L'action de protection de l'environnement est une action laissée à l'initiative des quelque ONG encore à la recherche d'identité et d'affirmation. La population pour elle s'en remet à l'Etat à qui, selon revient l'initiative de protection de l'environnement. Les populations ignorent leur droit à l'environnement, cela est d'autant plus vrai par le simple fait que rares sont les cas de saisine du juge pour atteinte à l'environnement.

Au niveau de l'autorité politique cependant plusieurs initiatives louables ont été prises. La signature des accords sous régionaux en est un exemple.51

Ces accords, faute d'une application effective dans chaque pays deviennent du « droit dormant » 52. Ce droit dormant n'incite pas les multinationales pétrolières dans le sens de la protection de l'environnement. Pourtant dans d'autres continents, notamment l'Europe et l'Amérique ce sont ces accords ou ces conventions cumulés avec l'action des ONG qui incitent les multinationales à oeuvrer pour la protection de l'environnement.53

51- ces accords ont donné naissance aux institutions comme la COMIFAC, ECOFAC et bien d'autres initiatives

52 - Voir Maurice KAMTO précité.

53 - voir le travail de Patrick Juvet LOWE GNINTEDEM précité.

Conclusion de la deuxième partie.

En définitive, les dénonciations faites à l'endroit des multinationales pétrolières suite à l'impact de leurs activités sur l'environnement et les hommes les ont amené à prendre compte les préoccupations d'environnement. Pour traduire cela dans les faits, elles se sont imposées certaines stratégies.

Pour se faire, elles ont adopté certaines mesures internes.

Dès les années 70, elles ont adopté les codes de conduite, les chartes ou encore formulé des déclarations de principe dans le sens de la protection de l'environnement. Cependant, ces codes de conduite ou ces chartes, adoptés par les multinationales elles-mêmes posent un réel problème de valeur juridique et de contrôle. Peuvent-ils être considérés au même titre qu'un code de l'environnement par exemple, donc à valeur de loi ? Comment assurez leur contrôle à partir du moment où il n'existe pas un pouvoir ou une autorité extérieur aux multinationales pétrolières capable de veiller à leur strict respect ? Comment enfin engager leur responsabilité sur la base de ces codes ?

Comme stratégie interne, les multinationales procèdent également à la formation de leurs agents aux questions environnementales en les envoyant en formation dans des centres de formation, en leur faisant participer aux séminaires et ateliers qui se tiennent à travers le mode. Preuve de cette volonté de protéger l'environnement, dans leur organisation, elles disposent actuellement d'un département entier consacré à l'environnement. Ce département veille au respect des principes environnementaux par la compagnie.

Enfin, pour mieux protéger l'environnement et surtout que cette protection nécessite beaucoup de fonds, les multinationales pétrolières oeuvre aux côtés des Etats de la sous région dans leurs actions de protection de l'environnement. Elles leur apportent un appui tant financier que technique. Elles financent les séminaires et ateliers ou conférences consacrés à la protection de l'environnement.

Cependant, toutes ces stratégies qui ont été définies connaissent des limites endogènes et exogènes dans leur application.

En premier lieu, le processus d'exploitation du pétrole n'intègre pas d'abord la protection de l'environnement. En ce domaine, la protection de l'environnement apparaît comme « l'oiseau de minerve » qui prend son envole que la nuit que faisait allusion Hegel à propos de la philosophie. En effet, c'est lorsqu'on a fini d'exploiter qu'il faut alors penser à la protection de l'environnement, tandis que l'argent produit par cette exploitation a déjà peut être servi à d'autres besoin ou investi à ailleurs. Cela explique la déconnection de la protection de l'environnement. D'où l'abandon non-conforme des puits et de certaines installations.

Mais aussi et surtout, la protection de l'environnement coûte très cher. Toute société ou tout opérateur économique ne poursuit que le profit. La protection de l'environnement en nécessitant beaucoup de moyens financiers ne rencontre pas souvent l'assentiment des multinationales. Car cette opération ne leur apporte rien au retour.

En deuxième lieu, la mauvaise perception de la notion d'environnement ne permet pas la mise en oeuvre effective de ces stratégies. Peu sont ceux qui, dans la sous région de l'Afrique centrale ont une bonne connaissance de la notion d'environnement. Aussi les multinationales n'abordent la question de l'environnement que sous l'angle de préservation de la nature simplement en laissant de côté l'aspect du droit à l'environnement considéré au même titre que les autres droits de l'homme à travers les constitutions des Etats de l'Afrique centrale.54

Cependant les multinationales pétrolières ne perçoivent pas la question sous cet angle. Cela ne favorise pas les multinationales, en ce qui les concerne, elles ne mènent que des études précises dans un environnement précis. Il revient aux nationaux eux-mêmes d'étudier leur environnement et de fournir les données.

54 - Voir constitution de la République du Congo du 20 janvier 2002 art.35 ; Constitution gabonaise du 11 octobre 2000, art 1er , 8) ; Préambule de la Constitution camerounaise du 02 juin 1972 ; Constitution Tchadienne du 31 mars 1996, art.47.

Conclusion générale

Plus de quatre décennies d'exploitation pétrolière en Afrique centrale, le bilan de l'impact de cette activité sur l'environnement est très lourd. Cet impact se présente sous divers aspects et atteint différents milieux.

Le milieu marin est le premier à être affecté par la pollution, le pétrole étant exploité essentiellement offshore dans cette région. Cette pollution du milieu marin implique donc celle des côtes et des plages qui forment ce milieu, le tout conduisant à une diminution des possibilités de pêche et de tourisme.

L'Afrique centrale, région a forte présence de forêts tropicales, l'exploitation du pétrole qui s'y pratique affecte durement ce milieu. La dégradation des forêts entraine la disparition de la diversité biologique. Car ces forêts constituent un « trésor mondial », un « poumon mondial » pour la préservation de la diversité biologique selon Walter Kansteiner. Cette idée a conduit à l'institutionnalisation de la protection du bassin du Congo55. On y trouve des espèces inscrites sur la liste rouge de l'UICN. Cependant, cet impact sur les ces milieux a de graves répercutions sur la société, la politique et l'économie de cette région. D'où on parle d'un des conséquences sociopolitiques et économiques.

Cet impact est dû au manque d'une bonne politique environnementale des multinationales pétrolières qui opèrent dans cette région.

Toutefois, conscientes de la nocivité de leurs activités sur l'environnement, les multinationales ont développé des stratégies en vue de minimiser cet impact. Ainsi, elles ont adopté des codes de conduite, des chartes et des labels environnementaux qui prennent en compte des préoccupations d'environnement. Cependant, les solutions apportées ne sont pas la hauteur des résultats escomptés. Faute de pouvoir protéger l'environnement, les multinationales multiplient des actions sociales qui du reste ne répondent pas parfois aux besoins des populations. Des écoles et des centres médicaux sociaux construits en pleine forêts manquent du personnel. Les populations sont obligées de payer eux-mêmes les enseignants et les médecins. N'ayant plus des possibilités financières à cause de la dégradation de l'environnement, les enfants ne vont plus à l'école, le taux de mortalité augmente suite aux moyens limités d'accès aux services de santé de base.

55 - le Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (PFBC) est défini comme  « une association qui regroupe 29 organisation gouvernementales et non gouvernementales et qui s'efforce d'améliorer la communication et la coordination entre ses membres concernant leurs projets, programmes et politiques pour promouvoir la gestion durable des écosystèmes et des ressources naturelles des forêts du bassin du Congo, ainsi que pour améliorer la vie des habitants de la région. Le PFBC ne participe pas directement à la mise en oeuvre ou au financement des programmes et ne dispose pas de secrétariat ou de personnel. Par contre, il assure un service de coordination entre bailleurs de fonds et organismes d'exécution et sert de forum pour le dialogue. Le PFBC vise à sensibiliser davantage les bailleurs et autres aux programmes qui sont actuellement financés et mis en oeuvre par ses organisations membres, à relever l'efficacité de ces programmes et des activités de coordination correspondantes, ainsi qu'à identifier et éliminer les lacunes et les chevauchements des programmes et des financements »

Au plan sociopolitique, la pollution occasionne beaucoup de maux.

D'abord il sied de rappeler que c'est à son environnement que la population de l'Afrique centrale doit sa survie. Car c'est de ce dernier qu'elle tire l'essentiel des subsistances. De cet environnement dépend l'Agriculture même si les pratiques appliquées ne sont pas protectrices de l'environnement (itinérante sur brûlis), de lui proviennent le poisson et la viande pour l'alimentation. De cet environnement, dépend toute la vie de cette population, le pétrole ne bénéficiant qu'à élite au pouvoir. En détruisant l'environnement l'exploitation du pétrole ne permet pas aux parents de payer les frais scolaires et de santé de leurs enfants par manque de ressources. On voit alors la décroissance rapide du taux de scolarisation, du taux de maladies surtout respiratoire males connues par le passé dans cette région. On voit également l'augmentation de la pauvreté (Cf. Indice du développement humain) à travers les conflits sociopolitiques inter-états ou internes qui n'ont pas d'autres explications que la lutte pour le contrôle de la manne et c'est sous l'exploitation pétrolière que la dette des pays d'Afrique centrale a quadruplé.

Sur le plan économique, le pétrole n'a pas permis à cette région de « décoller » économiquement. Ces Etats peinent toujours sur le poids de la dette malgré l'exploitation du pétrole. Les effets de la pollution sur l'économie ne sont pas encore très visibles sauf aux esprits avisés qui savent que le pétrole est une ressource non renouvelable. Et si son exploitation a entraîné la destruction de l'environnement, à la longue ces Etats ne seront plus à même de juguler leurs problèmes d'alimentation.

L'attitude des multinationales à ne pas protéger l'environnement est favorisée par les liens forts qu'elles tissent avec les pouvoirs en place. Il est aujourd'hui connu en Afrique que « pour se maintenir au pouvoir il faut être en bonne relation avec les compagnies pétrolières surtout françaises. Le cas de M. Pascal LISSOUBA et la guerre civile de 1997 au Congo Brazzaville, la rébellion tchadienne autour de la zone pétrolifère du pays en sont des illustrations parfaites56. Cela se justifie par la dépendance économique que ces Etats ont vis-à-vis du pétrole et de l'implication de ces multinationales pétrolières à la gestion de ces Etats de l'Afrique centrale.

Ce comportement des pétroliers et des hommes politique est aussi favorisé par le cadre légal et la société civile, encore en quête d'identité. En effet, en Afrique centrale la plupart des textes législatifs et conventionnels adopté en matière de protection de l'environnement ne sont pas appliqués. Pour mémoire, l'Afrique en général y compris les Etats de l'Afrique centrale est l'une des premières régions ou continents au monde à avoir adopté une convention sur la conservation de la nature, la Convention d'Alger de 1968, précédée par la convention sur les ressources phytogénétiques de 1967 adoptée à Kinshasa. Alors que les instruments de cette même nature adoptés en Europe et en Amérique contribuent efficacement à la protection de la nature, en Afrique et Afrique centrale en particulier ils constituent du « droit dormant ». En outre le mécanisme de transposition ne marche pas bien ; souvent les conventions adoptées au niveau international ne trouvent pas une application au niveau national.

56 - voir le rapport de la Commission des Affaires Etrangères précité, l'audition de Pascal LISSOUBA, ex président de la République du Congo et NGALEZY YORONGAR, député tchadien.

Lire aussi à ce sujet l'article de Benoît KOUKEBENE, Le pétrole, facteur de développement ou du sous développement : le cas de l'Afrique centrale, Juillet 2006

La société civile notamment les ONG de l'Afrique centrale se cherchent encore. De graves problèmes entravent leurs activités. D'une part des problèmes internes, ceux-ci sont liés à la configuration de ces ONG. Celle-ci manque encore du personnel qualifié dans les différents domaines de leurs interventions. Souvent, ce sont les timides individus désespérés par ceux qu'ils vivent et ne trouvant pas les moyens de l'exprimer ils se constituent en ONG non qualifiée d'ailleurs pour dénoncer le mal. Les principales ONG qu'on trouve sont des ONG internationales comme la WWF, les Amis de la terre etc. qui, du reste n'ont pas de représentations locales. Les ONG locales manquent de financement et ne peuvent pas mener des opérations de grande envergure. Et lorsqu'elles révèlent quelques vérités cachées aux populations, elles le font au risque de leur vie. Les compagnies pétrolières n'hésitent pas de recourir à la violence pour les disperser et l'Etat ne manque pas d'occasion pour les suspendre. Tout près de l'Afrique centrale, les répressions de Shell contre les populations de la région pétrolière du Nigeria illustre bien ce cas de figure. Mais aussi, lorsqu'on envisage mener une exploitation pétrolière, les études d'impact qu'on mène le sont pour la bonne forme, les opinions des citoyens et des ONG ne sont pas pris en compte57.

Dans ces conditions, comment alors emmener les multinationales pétrolières à respecter les environnements dans les quels elles travaillent en Afrique centrale ?

A cette question plusieurs voies de sorties sont envisageables :

Tout d'abord couper les liens entre le monde du pétrole et celui de la politique en développant de véritables Etats démocratiques. Avant cela, il faut tout d'abord développer les autres secteurs économiques comme l'agriculture, l'agropastorale, l'élevage afin que l'économie ne soit pas dépendante de la manne pétrolière dont on sait d'ailleurs que le prix n'est pas stable.

Redynamiser les ONG en sensibilisant les populations afin que leur travail trouve un écho au sein de la population. Cela ne pourra être effectif que si l'on assure l'autofinancement des ONG.

Enfin il faut opérer la transposition des conventions adoptées au niveau international ou régional à travers des lois et décrets sur le plan national.

57 - voir Patrick Juvet LOWE GNINTEDEM, mémoire sur le thème «Les ONGO et la protection de l'environnement en Afrique centrale, sous la direction de Gérard MONÉDIAIRE

BIBLIOGRAPHIE

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Articles et mémoires

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DOCUMENTS

- Actes du 1er Séminaire International de Droit de l'Environnement : Rio+10, Mondialisation et Droit de l'environnement, Rio de Janeiro 24 - 26 avril 2002

- - Code congolais de l'environnement

- Constitution de la République du Congo du 20 janvier 2002, art.35

- Constitution de la République du Gabon du 11 octobre 2000, art 1er, 8)

- Constitution de la République du Tchad du 31 mars 1996, art. 47

- Constitution de la République du Cameroun

- Convention de Rio sur la Diversité Biologique, juin 1992

- Convention de Bâle du 22 mars 1989 sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination

- Convention de Montego Bay sur le droit de la mer de 1982

- Convention de Bamako du 30 janvier 1991 sur l'interdiction d'importer en Afrique des déchets dangereux et le contrôle de leurs mouvements transfrontières en Afrique

- Convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement du 25 juin 1998

- Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires de 1973,

- Déclaration de Stockholm de 1972

- Déclaration de Rio de 1992

- Discours de Didier Claude ROD, pétrole et éthique : une conciliation possible ?

- Déclaration de Brazzaville du 30 mai 1996

- Le protocole de Kyoto sur l'élimination des gaz à effet de serre de 1997

- Le vivant, les hommes et le territoire, Essai de bio géopolitique, Thèse présentée par Hervé BREDIF, 10 novembre 2004, p.65 - 68

- Rapport sociétal et environnemental 2005 de TotalFinaElf

- Loi française sur la conservation de la nature du 10 juillet 1976, art. 2

- Rapport d'information, de la Commission des Affaires Etrangères, sur le Rôle des compagnies pétrolières dans la politique international et son impact social et environnemental, Tome 1, 13 octobre 1999

- Rapport national sur la diversité biologique (Congo - Brazzaville, juin 2001)

- Traité instituant la CEMAC, Ndjamena, le 16 mars 1994

Liens Internet :

www.equatorialeguinea.monalige.com

www.univ-lemans.fr

www.assemblee-nationale.fr

www.rac-f.org

www.grida.no

www.exxonmobil.com

www.chevrontexaco.com

www.environnement.totalfinaelf.com

www.total.com

www.monde-diplomatique.fr

www.sangonet.com

www.ahjucaf.org

www.infoplusgabon.com

www.congopage.com

www.congo-site.net

Table des matières

Abréviations..........................................................................Page,4

Sommaire.............................................................................. Page, 6

Introduction générale .................................................................................Page,7

Partie I : L'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement : état des lieux

Chapitre I : l'impact sur les milieux.........................................Page,14

Section 1 : l'impact sur le milieu marin ........................................Page,14

§ 1 : Pollution des côtes...............................................................Page,14

a) Pollution des plages

b) Destruction des habitats naturels

§ 2 : Diminution des possibilités de pêche et de tourisme...............Page,16

a) Diminution des possibilités de pêche

b) Diminution des possibilités touristiques

Section 2 : l'impact sur le milieu forestier...................................Page,18

§ 1 : Dégradation des écosystèmes forestiers................................Page,19

a) Destruction industrielle et artisanale

b) Destruction liée à la pollution

§ 2 : Disparition de la diversité biologique...................................Page,21

a) Disparition liée à la déforestation

b) Disparition liée à la pollution

Chapitre II : l'impact socio-sanitaire...........................................Page,24

Section 1 : l'impact social............................................................Page,24

§ 1 : la paupérisation des populations...............................................Page,

a) Paupérisation directe

b) Paupérisation à long terme

§ 2 : les conséquences résultantes de cette paupérisation..............Page,26

a) Les conséquences socio politiques

b) Les conséquences économiques

Section 2 : l'impact sanitaire.....................................................Page,28

§ 1 : les maladies respiratoires...................................................Page,28

a) La tuberculose

b) Le cancer

§ 2 : les maladies de la peau......................................................Page,30

a) Les allergies cutanées

b) Les cancers de la peau

Conclusion de la première partie............................................... Page,32

Partie II: les Mesures visant à limiter l'impact de l'exploitation pétrolière sur l'environnement.

Chapitre I : Les stratégies de protection de l'environnement.............. Page,33

Section 1 : les stratégies internes..............................................................Page,34

§ 1 : Les codes de conduite.............................................................................Page,34

a) Caractère intentionnel des codes de conduite

b) Valeur juridique des codes conduite

§ 2 : La formation des agents aux questions environnementales...................Page,36

a) Des programmes de recherche

b) Les ateliers et séminaire

Section 2 : Les stratégies externes.............................................................Page,38

§ 1 : Les sensibilisation des populations....................................................Page,38

a) La notion du public

b) Les moyens de sensibilisation

§ 2: Appui aux actions sous régionales de protection de l'environnement...... Page,41

a) Appui financier

b) Appui technique

Chapitre II : La mise en oeuvre des stratégies.............................................Page,43

Section 1 : Mise oeuvre des stratégies pendant l'exécution des travaux............ Page,43

§ 1 : Les installations de protection de l'environnement.................................. Page,43

a) Les installations à terre et à l'eau

b) Les engins à terre et à l'eau

§ 2 : La gestion des déchets......................................................................... Page,44

a) La notion de déchet

b) Pratiques de gestion

Section 2 : Mise en oeuvre des stratégies après l'exécution des travaux..............Page,47

§ 1 : Réhabilitation en état des sites...............................................................Page,47

a) Réhabilitation sites offshore

b) Réhabilitation des sites on shore

§ 2 : Difficultés de mise en oeuvre................................................................Page,48

a) Difficultés intrinsèques aux multinationales pétrolière

b) Difficultés extrinsèques

Conclusion de la deuxième partie................................................................Page,51

Conclusion générale................................................................................... Page,53

Annexe

Annexe

Torchage de gaz à Pointe-Noire

Barge de pétrole au large de Pointe-Noire

Installations pétrolières dans le champ de Gamba

Site pollué à Pointe-Noire

Pollution à Pointe-Noire

Plage de Kribi

Plage de Kribi

Carte de l'Afrique centrale

Pollution zone CORAF à Pointe-Noire






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