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La protection du domaine public maritime en Tunisie

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par Sami BEN SLAMA
FDSPT - DESS Droit de l'env.et de l'urbanisme 2002
  

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Sami Ben Slama

LA PROTECTION DU DOMAINE PUBLIC

MARITIME EN TUNISIE

INTRODUCTION GENERALE

la protection du domaine public maritime connait actuellement un certain regain d'intérêt à cause essentiellement des conséquences désastreuses de l'implantation industrielle, de l'exploitation effrénée et d'une forte attirance d'un public sans cesse croissant pour le littoral, la mer et les loisirs qui s'y attachent. Mais une telle protection connait des difficultés qui proviennent principalement de la prise en considération de préoccupations souvent contradictoires, entre l'intérêt général et des intérêts particuliers, entre industriels, pêcheurs et plaisanciers, entre protection du littoral et développement des activités liées à la mer.... c'est un enjeu délicat dont dépend l'efficacité de la protection du littoral et du domaine public maritime

Le domaine public maritime qu'il soit naturel ou artificiel fait partie du domaine public de l'Etat.

Le domaine public est l'ensemble des biens des collectivités publiques et des établissements publics qui sont soit mis à la disposition directe du public, soit, par leur nature ou par des aménagements particuliers, adaptés exclusivement ou essentiellement à la fonction spécifique des services publics.

La notion de domaine public maritime est une notion complexe. Elle comprend plusieurs termes, le premier « domaine » signifie l'ensemble des biens qui sont publics, puisque appartenant à une ou des personnes publiques.

Le second « public », signifie que ce bien n'appartient pas à des personnes privées, c'est un bien qui appartient à tous et qui peut être utilisé par tous.

Le troisième « maritime » signifie qu'il est situé à proximité de la mer ou implanté dans l'intérêt de la navigation maritime.

Le domaine public maritime est donc composé de l'ensemble des biens publics appartenant aux personnes publiques, qui sont affectés à l'usage du public, et qui sont situés à proximité de la mer ou implantés dans l'intérêt de la navigation maritime, qu'ils soient naturels ou artificiels1.

1 Ben Cheikh Ahmed-Dellagi H. : « Le domaine public maritime », Mémoire DEA, FDSPT, 1995-1996, p.4 et s.

Il a été admis que le littoral est un espace plus large que le domaine public maritime, il a été défini par la loi n° 95-72 du 24 juillet 1995, portant création de l'A.P.A.L dans son article 1er comme étant « la zone de contact qui concrétise la relation écologique, naturelle et biologique entre la terre et la mer et leur interaction directe et indirecte ».

Quant au rivage, il est conçu comme le point de rencontre entre le littoral et le domaine public maritime, c'est la partie alternativement couverte par les marées, les lais et les relais de la mer et les dunes. Il constitue à la fois une partie du domaine public maritime naturel et une partie du littoral2.

La côte, est une notion moins large que celle de domaine public maritime, c'est un point de contact entre la terre et la mer, qui borde le continent, c'est une frontière entre le littoral et le domaine public maritime. C'est une ligne longitudinale qui suit la configuration de la zone maritimo-terrestre.

Dans le droit français, le domaine public maritime comprend les rivages de la mer et les étangs salés. La mer territoriale n'est pas considérée comme faisant partie du domaine public; elle est seulement soumise au pouvoir de police de l'Etat riverain. Cependant, une jurisprudence récente incorpore au domaine le sol et le sous-sol des eaux territoriales et les terrains qui sont artificiellement soustraits à l'action des flots.

La notion de domaine public maritime est très ancienne et l'intérêt accordé à sa préservation et à la prévention des dégradations de ses composantes n'est pas nouveau3.

En Tunisie, le décret beylical du 24 septembre 1885 relatif au domaine public dans son art. 1er a adopté une conception étroite des composantes du domaine public maritime constitué des « rivages de la mer et les lacs jusqu'aux plus hautes eaux, les rades, ports et leurs dépendances »

Le domaine public maritime se limitait à une ligne de contact entre la terre et la mer, qui dépendait des « caprices des flots », et qui était convoitée par les différentes initiatives des usagers4.

2 Op. cit., p. 7.

3 Hostiou R. : « Le domaine public maritime naturel », C.J.E.G, juin 1993, p. 306 et s.

4 Moussa S. : « La protection de l'environnement sur le domaine public maritime », A.J.T 1997, p.103.

Dans la loi n° 95-73 relative au domaine public maritime, on remarque par contre, une délimitation extensive des composantes du domaine public maritime.

Le domaine public maritime naturel englobant, du côté de la mer, les eaux internes, les eaux territoriales, le sol et le sous-sol du plateau continental, tels que ces espaces sont délimités par les textes et les accords bilatéraux concernant les limites du territoire maritime tunisien, la zone de pêche exclusive et la zone économique exclusive5.

Les eaux internes, telles que délimitées par le décret n° 73- 527 du 3 novembre 19736 font depuis lors partie intégrante du domaine public maritime suivant un principe admis en droit de la mer, selon lequel ces espaces sont soumis au même statut que celui des rivages.

Du côté de la terre, le domaine public maritime naturel englobe les rivages de la mer, constitués par le littoral, alternativement couvert et découvert par les plus hautes et les plus basses eaux de la mer et par les terrains formés par les lais et les relais ainsi que par les dunes situées dans la proximité immédiate de ces terrains, sous réserve des dispositions du code forestier. Il comprend aussi les lacs, étangs et sebkhas en communication naturelle et en surface avec la mer.

Cette délimitation prend en considération les

caractéristiques écologiques de la zone littorale qui est perçue comme une « bande » séparant la mer de la terre, et non plus comme une ligne difficilement perceptible et dépendante des caprices des flots7.

C'est désormais une « entité géographique qui appelle une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur »8 et qui est définie comme étant la zone de contact qui concrétise la relation écologique naturelle et biologique entre la terre et la mer et leur interaction directe et indirecte.

5 Loi n° 95-73 relative au domaine public maritime, art.2.

6 Pris en application de la loi n° 73-49 du 2 août 1973, portant délimitation des eaux territoriales tunisiennes.

7 Moussa S., op. cit., p. 110.

8 Loi du 3 janvier 1986, relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, art. 1er, JORF, 4 janvier 1986, p. 200 et s.

Le littoral comprend ainsi, d'une part, les composantes naturelles du domaine public maritime et, d'autre part, des « zones intérieures dans des limites variables selon le degré d'interaction climatique, naturelle et humaine entre elles et la mer, tels que les forêts littorales, les estuaires, les caps marins et les zones humides littorales »9.

Le littoral est un espace rare, dans lequel la densité de la population est supérieure à la moyenne nationale.

C'est aussi un espace fragile en raison de la pression croissante qui s'exerce sur lui, il est particulièrement sensible aux risques de dégradation et de pollution.

C'est en même temps un espace de plus en plus convoité pour l'exercice d'activités très diverses et souvent concurrentes, en effet, le littoral dont le domaine public maritime est un champ d'activités très diverses, c'est un espace de travail et de production et aussi de repos et de loisirs.

Le dénominateur commun entre ces activités reste sans doute leur participation à la « consommation » du domaine public maritime pour alimenter les autres domaines de l'activité.

Cette situation est d'un grand impact sur l'environnement du littoral, mais, comme les priorités économiques ont toujours primé sur les considérations environnementales, le résultat a été une littoralisation sans cesse croissante de l'organisation spatiale de l'économie nationale10.

Le domaine public maritime est d'une importance vitale, c'est un patrimoine de la nation11, idée qui ne semble pas être partagée par tous, la conscience de son importance, de l'urgence et de la nécessité de le protéger et de l `entretenir n'étant pas assez développées.

Le législateur a chargé principalement l'Etat de sa protection. Toutefois, on constate que certaines associations écologiques jouent un rôle assez positif malgré le peu de ressources dont elles disposent.

9 V. art. 1er de la loi n° 95-72 du 24 juillet 1995 portant création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral.

10 Belhédi A. : « L'organisation de l'espace en Tunisie », publication de la fac. Des sciences sociales et humaines de Tunis, 1992, p.107-181.

11 Concept reconnu du droit de l'environnement en France, où la législation reconnaît, s'agissant des sols, le concept de patrimoine commun de la nation, qui implique notamment la faculté, pour le conservatoire du littoral d'exproprier en vue d'assurer la sauvegarde des sites naturels et le respect de l'équilibre écologique.

Historiquement cette protection était inefficace malgré l'existence d'un cadre réglementaire12. L'Etat a développé cette entreprise de protection par la délimitation du domaine public maritime, entreprise qui nécessite un enrichissement par la promotion de son infrastructure et par la mise en oeuvre de mesures de protection plus efficaces.

En effet, indépendamment des règles générales de protection des biens domaniaux, certaines dépendances du domaine public bénéficient, en outre, de règles de protection particulières.

C'est la raison pour laquelle des mesures spécifiques doivent être adoptées pour assurer la protection des dépendances du domaine public maritime13.

Ces mesures concernent d'une part un domaine assez élargi (partie I) et tendent, d'une d'autre part, à utiliser des méthodes de protection particulières (partie II).

12 Décret Beylical du 24 septembre 1885 relatif au domaine public.

Décret Beylical du 25 juillet 1897, portant sur la police de conservation du domaine public.

Décret Beylical du 18 août1926, réglementant la police et la conservation du domaine public maritime.

13 Becet J.-M. : « Vers une véritable politique d'urbanisme littoral », AJDA 20 mai 1993, n° spécial, p.1 16. Caldéraro N. : « Droit du littoral », Editions Le Moniteur 1993.

Yousry L. : « La Loi littoral et le juge administratif », RFDA 1992, p. 272.

PREMIERE PARTIE :

LE DOMAINE DE LA PROTECTION DU DOMAINE
PUBLIC MARITIME

Après des années d'une exploitation effrénée et avec des efforts de protection ou d'entretien minimes, ou même trop superficiels pour être utiles, le résultat a été les innombrables atteintes que subit le domaine public maritime tant sur le plan environnemental, que sur le plan urbanistique.

Il est évident que la promotion de l'infrastructure littorale dans ses dimensions environnementales et urbanistiques est le fondement essentiel de la protection du domaine public maritime qui doit être conjuguée avec des opérations de délimitation et de recensement du domaine public maritime pour réaliser l'efficacité espérée des moyens de protection.

Ces opérations constituent une protection préventive du domaine public maritime, en effet, l'inventaire périodique du domaine public maritime, constitue une garantie pour une protection plus efficace des biens publics en tant que patrimoine national.

Cet inventaire est établi par le ministère du Domaine de l'Etat et des Affaires Foncières et ce par le recensement des biens composants le domaine public maritime, en établissant une liste sans cesse actualisée et qui passe par des opérations d'identification et de délimitation. Ensuite, par l'inscription des biens délimités sur des registres appelés « sommier de consistance des biens immobiliers de l'Etat ».

La tenue de ces registres des biens publics est une forme de protection préventive du domaine public maritime14.

Mais, le mode de protection le plus efficace reste l'opération de délimitation du domaine public maritime qui consiste à en fixer les limites par rapport aux propriétés privées riveraines.

Cependant, le décret de délimitation publié peut toujours être modifié par un décret spécial pour déclasser le domaine public maritime, en vertu de la règle de parallélisme des formes, ce qui démontre l'instabilité du domaine public maritime. Ses composantes peuvent faire un jour partie du domaine public et être désaffectées ou déclassées le lendemain, les procédures de désaffectation et de déclassement n'étant pas aussi lourdes et aussi complexes que les procédures de délimitation.

14 Ennaili M.A : « La tenue des registres des biens publics », (en arabe).

Mais malgré tout, la délimitation a des effets protecteurs sur le domaine public maritime, en faisant peser des obligations et des interdictions sur les riverains que sont les servitudes qui grèvent les propriétés privées riveraines et les interdictions de faire des travaux. Cela n'empêche nullement l'émergence de politiques de protection de l'environnement marin et côtier du domaine public maritime (chapitre I), et de protection de l'espace territorial de ce domaine (chapitre 2).

CHAPITRE 1 : LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT MARIN ET COTIER DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

La mise en oeuvre de la stratégie de protection de l'environnement marin et côtier a conduit au renforcement du cadre législatif et institutionnel dans ces domaines.

Au niveau international, la Tunisie a ratifié la plupart des conventions, dont notamment:

- La convention pour la protection de la Mer Méditerranée contre la Pollution, conclue à Barcelone 1976, ratifiée en 1977, révisée en 1995.

- Le protocole de Genève (1982) relatif aux

aires spécialement protégées de la Méditerranée,

ratifié en 1983.

- La convention internationale sur la

préparation, la lutte et la coopération en matière de

pollution par les hydrocarbures de 1990, ratifiée en

1995.

- La convention Internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, 1998.

- La convention sur les espèces migratrices (Bonn, 1979), ratifiée en 1986.

En ce qui concerne les mesures en faveur des ressources marines, ce sont des mesures spécifiques qui ont été prises pour atténuer les pressions sur ces ressources comme :

- L'actualisation, en 1994, de la législation régissant le secteur de la pêche15 et institution d'incitations en faveur de l'amélioration des techniques de pêche et de l'abandon des engins de capture les plus nocifs, le développement de l'aquaculture, l'institution de mesures de protection des espèces menacées, la surveillance accrue des différents indicateurs de la santé de la mer et de contrôle des polluants dans les organismes marins.

- La parution en 1994 de la loi 94-122 du 28 novembre 1994 portant promulgation du Code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme qui a été révisé dans le sens de l'intégration de la prévention de la dégradation de l'environnement.

15 Loi 94-13 du 31 janvier 1994 relative à l'exercice de la pêche et Arrêtés du Ministère de l'Agriculture.

- La révision, en 1995, de la loi relative au domaine public maritime16.

- La création en 1995 de l'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral (APAL), chargée d'appliquer la politique de l'Etat en matière de protection du littoral, en général, et du domaine public maritime, en particulier.

- L'institution, en 1996, d'un Plan National d'Intervention Urgente pour la lutte contre les évènements de pollution marine17.

- La promulgation en 1996 de la loi 96-4 1 du 10 juin 1996 relative aux déchets et au contrôle de leur gestion et de leur élimination.

Cependant, il faudrait souligner que malgré le renforcement du cadre législatif et institutionnel, l'exploitation intensive des composantes du domaine public maritime pendant des décennies ainsi que les dégradations causées par la nature ont eu des effets nuisibles sur les rivages (section 1) et sur l'eau de mer (section 2), posant de grandes difficultés pour la protection de l'environnement marin et côtier du domaine public maritime.

16 Loi 95-73 du 24 juillet 1995 relative au Domaine Public Maritime et les décrets en préparation délimitant l'espace littoral.

17 Loi 96-29 du 3 avril 1996, instituant un plan national d'intervention d'urgence pour la lutte contre les pollutions marines.

SECTION 1 : LA PROTECTION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME CONTRE L'EROSION

L'érosion des plages est un phénomène général dans le monde. Elle se présente essentiellement sous la forme de pénurie en sable et en galets sur les côtes.

Les côtes tunisiennes sont atteintes pour la plupart par un appauvrissement alarmant du fait de cette érosion due à des origines diverses (§1), et en raison du danger que représente ce phénomène à long terme, des recherches ont été entreprises pour trouver des moyens efficaces de lutte contre ce problème (§2).

§1- ORIGINES DU PHENOMENE DE L'EROSION

Plusieurs facteurs sont à l'origine de l'érosion, certains sont du fait de la nature, d'autres sont du fait de l'Homme.

En ce qui concerne le facteur naturel, il faudrait souligner que la Tunisie, de par sa position géographique est exposée à l'action des vents dominants18 et spécialement le mistral et la tramontane dont l'impact sur les plages est très grand, puisqu'ils emportent des quantités énormes de sables.

Les effets dévastateurs des vents dominants sont plus vérifiables sur les îles, ils ont provoqué à titre d'exemple, des dégâts énormes sur les plages de l'île de Jerba19.

En plus de l'action des vents dominants, l'effet de serre sur la planète provoque une augmentation du niveau de l'eau qui inonde les plages, L'élévation attendue du niveau de la mer aggravera probablement l'érosion des plages.

Ce qui contribuera à diminuer leur surface, surtout, avec les innombrables tempêtes qui augmentent la hauteur des vagues et multiplient leur capacité de nuisance.

Cette situation, provoquée par la nature a été accentuée par des actions humaines.

En effet, l'homme a un rôle tout aussi important que la nature dans la détérioration de l'état des rivages et l'atteinte à leur équilibre écologique, en raison essentiellement de son exploitation intensive des plages comme carrières de sable pour la construction.

18 Encyclopédie des pêches -Atlas- 1994 - p 115 et s.

19 Paskoff, R. : « Remarques sur les causes et remède de l'érosion des plages à Djerba », Colloque environnement et érosions littorales à Djerba, Djerba, juin 1980.

Ce phénomène se poursuit jusqu'à nos jours et a provoqué la destruction partielle de plusieurs des plus belles plages de la Tunisie qui ont été aplaties et ont perdu leurs immenses dunes.

D'autre part, l'implantation le long du littoral de constructions, surtout touristiques, perturbe l'action des vents continentaux, ce qui engendre la diminution des effets de leur action (reconstruction des étendues de sables) contraire à celle des vents dominants surtout sur les îles.

La conjugaison de l'action de l'homme et de la nature a eu pour conséquences essentielles, l'appauvrissement des plages tunisiennes avec la perte de quantités énormes de sable qui avaient un rôle essentiel dans leur équilibre naturel.

En outre la ceinture urbaine qui ne réussit pas à diminuer l'érosion des plages due aux vents dominants a contribué à contrecarrer l'action contraire des vents continentaux et son rôle naturel dans la réparation de ces dégâts ce qui en a fait le facteur essentiel du déséquilibre de son écosystème.

Ceci, justifie la recherche des moyens adéquats pour lutter contre les effets de cette érosion.

§2- LES MOYENS DE LUTTE CONTRE L'EROSION

Plusieurs voix se sont élevées depuis le début des années quatre-vingt pour demander l'établissement d'un plan national de lutte contre l'érosion que subissent les côtes tunisiennes, ce qui a poussé les pouvoirs publics à entreprendre quelques actions qui visaient à en réduire les dégâts.

En effet, le besoin d'avoir une gestion intégrée des plages était devenu de plus en plus pressant (infrastructures et équipements, entretien et hygiène, nettoyage et collecte des déchets), conciliant les contraintes environnementales et les activités économiques et humaines, devant les multiples menaces, les convoitises et les agressions diverses dont ces espaces sont l'objet.

Comment limiter la vulnérabilité des plages vis-à-vis de l'érosion, assurer un contrôle efficace et préserver la qualité des eaux de baignade? Tels sont certains des défis qui se posent aux gestionnaires de ces espaces récréatifs et de ce patrimoine naturel.

Divers types de solutions existent pour lutter contre l'érosion marine. Les moyens techniques ont eu, de longue date, la préférence des hommes. Les ouvrages de défense (digues, enrochements, épis et brise-lames) sont généralement efficaces, mais perturbent l'équilibre morpho dynamique des littoraux. D'autres méthodes, comme le rechargement des plages en sédiments, sont possibles.

En effet, il y a eu des essais de régénération de quelques plages dégradées par l'utilisation de techniques appropriées et en particulier celles dites "douces" : rechargement artificiel de la plage, reconstitution du cordon dunaire,...

Parmi les recommandations de l'UNESCO au séminaire de Mahdia de juin 199920, celle du professeur Roland Paskoff, qui avait préconisé la reconstitution du bourrelet dunaire littoral dans le secteur des plages publiques où il avait été profondément dégradé par une fréquentation anarchique du bord de mer. Cette restauration s'imposait à un double titre : d'abord, parce que le bourrelet dunaire constitue une réserve en sable, indispensable à l'équilibre sédimentaire de la plage; ensuite, parce qu'il empêche le sable d'envahir intempestivement l'avenue qui longe la côte.

Des travaux de réhabilitation de ce bourrelet dunaire ont été entrepris le 10 novembre 2000 sur une linéaire de 650 m. Ces travaux ont été réalisés par l'Agence pour l'Aménagement et la Protection du Littoral (APAL) avec l'assistance technique d'un organisme d'Etat français, l'Entente Interdépartementale pour la Démoustication (EID), organisme basé à Montpellier, qui a en charge des problèmes de gestion du littoral Méditerranéen et en particulier celui de l'entretien des dunes.

L'opération a été à l'origine d'un transfert de technologie puisque les deux ingénieurs et le chef de chantier venus de France ont profité de l'occasion pour former des praticiens tunisiens.

Certaines méthodes utilisées sont cependant inappropriées, en effet, si l'on continue à tenter de résoudre le recul des côtes par le recours aux murs de béton, on aura un mur gigantesque le long du littoral.

20 Développement urbain et ressources en eau dans les petites villes côtières historiques, Colloque, Mahdia, juin 1999.

Cette méthode a un autre effet secondaire, bien connu des géomorphologues: Si l'on "protège" une côte rocheuse, on annule brutalement le renouvellement du sable qui était le produit de l'érosion. Or ce sable, surtout dans le contexte actuel d'épuisement du stock sédimentaire et de relèvement du niveau de la mer (1,2 à 1,5mm par an), constitue justement un capital à valoriser et non à gaspiller, surtout pour les régions touristiques dont il constitue la principale richesse.

Il est important aussi de maîtriser l'impact des grands ouvrages sur l'équilibre du littoral.

D'un autre côté la richesse écologique des côtes tunisiennes a intéressé les organisations internationales qui ont oeuvré à leur tour à sa protection et à sa préservation par certaines mesures dont le classement du site du lac « Ichkeul » comme patrimoine commun de l'humanité en plus des efforts de protection des espèces vivantes dans l'île de Zembra.

Mais ces efforts ont eu un effet très relatif, car malgré la création du ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire et de L'Agence Nationale pour la Protection du Littoral (APAL)21, les dégradations que subit le domaine public maritime n'ont pas cessé pour autant.

Malgré les études conduites en ce domaine, qui ont abouti à plusieurs mesures tendant à limiter les effets de l'érosion, dont la plus importante est la création d'une zone non-constructible le long du littoral22, il est regrettable de voir que ces mesures sont la plupart du temps ignorées et non respectées par l'administration elle-même et aussi par les particuliers surtout dans les régions côtières non- touristiques où l'on constate de nouvelles constructions élevées pratiquement dans l'eau.

21 Créée en 1995, suite aux recommandations de la conférence Med21, et qui a pour missions de protéger et d'améliorer l'utilisation ainsi que l'organisation de l'espace littoral et d'empêcher les abus pouvant nuire à l'environnement côtier en particulier dans le domaine public maritime, ainsi que de mener des études sur la réhabilitation et la protection des zones sensibles et humides.

22 Cette bande est d'une largeur variant entre 25 et 100 mètres selon l'existence ou non d'un plan d'aménagement dans la zone concernée, avec la possibilité d'élargir cette surface dans les zones menacées par l'érosion et chaque fois que les nécessités écologiques l'imposent.

En outre, les dépassements sont toujours présents malgré le renforcement du système des permis administratifs pour toutes les activités qui nécessitent l'extraction de matières premières des plages dont le sable et leur soumission si nécessaire à des études d'impact sur l'environnement côtier avant la délivrance du permis et malgré le renforcement du contrôle postérieur sur son bénéficiaire, avec pour objectif la limitation du phénomène de l'érosion ou du moins la maîtrise de ses effets.

Il faut aussi signaler que l'état des côtes dans certaines régions nécessite des mesures urgentes en raison la détérioration de leur écosystème, surtout dans les zones à forte activité touristique telles que Nabeul, Hammamet, Sousse, Monastir et surtout Jerba et aussi dans les régions industrielles comme Sfax et Gabès, où ils faudrait entreprendre des actions pour arrêter ou du moins limiter le rejet des eaux usées et polluées dans la mer et des actions de réaménagement de certaines zones en tenant compte de l'environnement et des actions de classement de certaines autres zones comme parties du domaine public maritime.

L'érosion n'est pas le seul mal qui ronge les composantes du domaine public maritime, un problème encore plus important les concerne, c'est la pollution marine

SECTION 2 : LA PROTECTION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME CONTRE LA POLLUTION

La pollution est définie comme étant « l'introduction directe ou indirecte par l'homme de substances ou d'énergies dans le milieu marin, y compris les estuaires, lorsqu'elle a ou peut avoir des effets nuisibles, tels que les dommages aux ressources biologiques et à la faune et à la flore marines, risques pour la santé de l'homme, entraves aux activités maritimes... altération de la qualité de l'eau de la mer du point de vue de son utilisation... »23.

Cette pollution se trouve par ailleurs aggravée par la situation de la Tunisie dans le cadre de la Méditerranée, mer semi-fermée et peu profonde, où le renouvellement des eaux est long24.

Les origines de la pollution des eaux de mer et des rivages sont multiples (§1) ce qui nécessite l'action d'intervenants divers pour lutter contre ce phénomène et en limiter les effets (§2).

23 Attar Z. : « Le cadre juridique des pêches maritimes en Tunisie », Mémoire D.E.A de droit public, FDSPT, Tunis 1989, p. 111 et 112.

24 Ravenel B. : « Méditerranée : Le Nord contre le Sud », Paris, Harmattan 1992. Exemple : 55% des eaux usées de 120 villes du littoral sont rejetées dans la mer sans traitement préalable.

§1- ORIGINES DE LA POLLUTION MARINE

La pollution provient ou bien de déversements à partir de la terre de déchets industriels et urbains (origine tellurique), Cette pollution résulte pour la plupart de comportements assez communs dont le déversement des déchets ménagers et industriels sur le rivage25, le rejet des eaux usées dans la mer, surtout que la plupart des réseaux d'assainissement dans les villes côtières sont reliés à la mer, des études ont même démontré que 200 milles tonnes de matières chimiques utilisées comme détergents ménagers sont rejetées dans la mer Méditerranée chaque année26.

Elle provient aussi de déversements des résidus de carburants ou d'eaux usées par les navires27 (origine pélagique ou par émersion)28.

Ce phénomène prend, depuis quelques années, des proportions inquiétantes sur les côtes tunisiennes surtout celles des grandes villes portuaires, en raison des déversements de déchets et de résidus industriels.

25 Les déchets présents sur le littoral n'ont pas tous été déposés sur place, certains viennent de loin, les principales familles en sont :

- Les abandons sur le littoral par les usagers, Les déchets ainsi abandonnés sont principalement : des restes de pique- niques (papiers gras, emballages alimentaires, restes d'aliments, etc.) ; des bouteilles en verre ou en matière plastique, des canettes en métal ; des mégots et des paquets de cigarettes ; des journaux, des crèmes solaires, des vêtements, etc....

- Les ports

- Les décharges

- Les activités domestiques, agricoles et industrielles

- Les navires de passage

- La pêche, la conchyliculture et la plaisance

- Les déchets d'origine naturelle.

26 Truchot, C. : « la pollution du littoral » in mer et littoral : couple à risques, Colloque organisé par le Ministère de l'environnement français, Biarritz, septembre 1987, La documentation française p. 23 à 48.

27 La gestion des déchets ménagers sur l'ensemble des navires est régie par l'annexe V de la Convention de Londres du 22 novembre 1973 (convention "MARPOL"). La règle 3 de cette annexe stipule que hors des zones spéciales où tout rejet est interdit :

"l'évacuation dans la mer de tous les objets en matière plastique, y compris notamment les cordages et les filets de pêche en fibre synthétique ainsi que les sacs à ordures en matière plastique est interdite ;

l'évacuation dans la mer des ordures suivantes se fait aussi loin que possible de la terre la plus proche ; elle est interdite en tous cas si la terre la plus proche est à moins :

- de 25 milles marins, en ce qui concerne le fardage et les matériaux de revêtement et d'emballage qui flotteraient ;

- de 12 milles marins, en ce qui concerne les déchets alimentaires et toutes les autres ordures, y compris les papiers, les chiffons, les objets en verre, les objets métalliques, les bouteilles, les ustensiles de cuisine et les rebuts de même nature.

Lorsque les ordures sont mêlées à d'autres rebuts dont l'évacuation ou le rejet sont soumis à des dispositions différentes, les dispositions les plus rigoureuses sont applicables."

Il est difficile de déterminer parmi les échouages la part des déchets provenant des navires : ceux produits à bord sont du même type que ceux produits à terre par les ménages.

28 Jenayeh R. : « la pollution des mers par les tankers et le droit international », mémoire DESS de droit public, FDSPT, 1974, CERP de Tunis.

Toutes ces pratiques ont une influence très néfaste sur l'écosystème marin, avec l'apparition d'algues et de végétation marine polluées, ce qui contribue à la diminution des réserves en poissons ou à l'apparition de maladies dues à l'augmentation du taux de microbes par litre d'eau et à l'augmentation du taux de salinité de l'eau de la Méditerranée29, ce qui représente une menace pour l'existence de certaines espèces marines à long terme.

Aujourd'hui en Tunisie, l'exemple le plus marquant des effets de la pollution est celui du Golfe de Gabès, qui suite à la pollution intensive, a vu la dégradation de ces prairies de posidonie, et la chute de sa production de la pêche et l'élévation de la teneur des poissons en matières toxiques, présentant un sérieux risque pour la santé30.

Le même constat peut être fait pour les côtes des autres villes : lac de Bizerte, le golfe de Tunis, côte de Mahdia... 31

Le transport maritime représente quant à lui une activité tout aussi polluante de l'environnement marin côtier et un danger qui le guette tout à la fois.

En effet, les navires de transport maritime rejettent au large plusieurs matières très polluantes sans aucun contrôle, dont le produit des vidanges de leurs machines comme des huiles et des hydrocarbures usés, en plus des excédents de marchandises jetés à la mer en cas de tempête, ou des produits radioactifs qui peuvent être enfouis au fond de la mer, sans parler du risque que fait encourir le passage devant nos côtes de navires militaires ou de commerce chargés de centaines de milliers de tonnes de produits dangereux et très polluants et même radioactifs avec le risque d'accidents probables conséquents à cette activité intense et non contrôlée.

Les plages tunisiennes accueillent quant à elles chaque année des millions de vacanciers avec une utilisation excessive qui nuit à leur environnement.

29 Travaux préparatoires de la convention de Barcelone relative à la protection de la Méditerranée contre la pollution, 26 mai 1976, ratifiée par la loi n°77-29 du 25 mai 1977.

30 Hayder A. : « L'industrialisation à Gabès et ses conséquences », Pub. De l'université de Tunis, 1986. Chaffai-Hamza : « Etude de la bio accumulation métallique et des métallo-thionèmes chez des poissons de la côte de Sfax », ENIS 1993 (thèse de doctorat de spécialité).

31 Attar Z., op.cit. p. 114.

Gueddari M. : « Dynamique du littoral du golfe de Tunis », laboratoire de géochimie et de géologie de l'environnement, Faculté de sciences de tunis.

La présence prés des côtes de plusieurs entreprises industrielles très polluantes comme c'est le cas surtout à Mahdia32, Sfax et Gabès, qui rejettent leurs déchets polluants et très toxiques sur le rivage et dans la mer contribue pleinement à la détérioration de l'environnement marin et de l'environnement en général et est même très nuisible à la santé des habitants.

Il y a donc urgence en la matière et il est primordial de lutter contre ces formes de pollution.

§2- LA LUTTE CONTRE LA POLLUTION MARINE

Les institutions en charge de l'Environnement en Tunisie sont variées. A leur tête, le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est responsable de la conception et de la mise en oeuvre d'une politique nationale de la protection de l'Environnement. Les institutions sous-tutelle sont au nombre de cinq : L'Office National de l'Assainissement (ONAS)33 ; Le Centre International des Technologies de l'Environnement de Tunis (CITET)34 ; L'Agence Nationale des Energies Renouvelables (ANER)35 ; l'Agence Nationale de Protection de l'Environnement (ANPE)36, organe chargé de la recherche et de l'exécution des programmes de lutte contre les pollutions qui touchent l'environnement sous toutes ses formes.

La spécificité de l'espace littoral a rendu nécessaire la création d'une structure spéciale qui est l'Agence Nationale de Protection et d'Aménagement du Littoral (APAL), chargée essentiellement de l'exécution des politiques publiques en matière de protection du littoral en général et du domaine public maritime en particulier.

32 Sardinerie, savonnerie,..

33 Il a été créé en 1974 pour combattre la pollution et protéger les ressources hydriques. Sa tâche est de contribuer à l'amélioration des conditions d'hygiène et de santé dans les milieux urbains, touristiques et industriels.

34 Créé en 1996 dans le cadre des recommandations de la conférence de Rio de Janeiro, le CITET a pour missions de promouvoir le savoir, les connaissances et les technologies de l'environnement et d'oeuvrer pour le transfert de ces technologies du Nord vers le Sud et de les adopter aux conditions locales pour faciliter un transfert du Sud vers le Sud, dans le cadre d'un partenariat triangulaire.

35 L'Agence Nationale des Energies Renouvelables (ANER) rattachée au Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire en 1998, l'ANER a pour mission de concevoir et de mettre en place des stratégies pour la promotion des énergies renouvelables.

36 Créée en 1988, l'ANPE est un organisme spécialisé contre la pollution, particulièrement celle d'origine industrielle. Elle a une double mission : étudier et contrôler l'état de l'environnement dans le pays dans le but d'éliminer toutes les sources de dégradation du milieu naturel et de la qualité de vie. Dans ce cadre, elle approuve les études d'impact environnemental des grands projets. Plus récemment, elle a été chargée de superviser le programme national de gestion des déchets solides (PRONAGDES).

L'APAL a été créée37 en 1995, suite aux recommandations de la conférence Med21, elle a pour missions de protéger et d'améliorer l'utilisation ainsi que l'organisation de l'espace littoral et d'empêcher les abus pouvant nuire à l'environnement côtier en particulier dans le domaine public maritime, ainsi que de mener des études sur la réhabilitation et la protection des zones sensibles et humides38.

Cela a été précédé par la création du fonds de lutte contre la pollution par la loi n° 92-122 du 29 décembre 1992, portant loi de finances pour la gestion de 199339 qui dispose dans son article 35 que ce fond est destiné à financer les projets visant à protéger l'environnement et à aider les entreprises à investir dans la lutte contre la pollution et à exécuter les procédures visant l'incitation à l'utilisation des techniques non polluantes40.

Le décret d'application de cette loi explique que le fonds avait pour objectif d'encourager les actions visant la protection de l'environnement de la pollution industrielle en participant au financement du matériel pouvant limiter ou éliminer la pollution résultant des entreprises industrielles et des projets des unités de collecte et de recyclage des déchets.

Ce fonds peut aussi être appelé à financer l'acquisition d'équipements collectifs d'élimination de la pollution par des intervenants publics ou privés pour le compte de certaines entreprises industrielles qui pratiquent la même activité ou produisent la même pollution41.

D'un autre côté et vu le nombre élevé d'entreprises industrielles concentrées le long de la bande littorale, les objectifs de ce fonds concernent le domaine public maritime de manière aussi bien directe qu'indirecte.

37 Le Conservatoire du littoral en France contribué à la demande du Ministère de l'environnement et de l'aménagement du territoire tunisien, à la création de l'APAL (Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral tunisien).

38 La loi tunisienne n° 95-72, portant création de l'A.P.A.L., prévoit, dans son article 8, qu'un décret fixera les zones sensibles, qui sont des zones caractéristiques du patrimoine naturel national ou présentant un ensemble d'éléments dans un éco-systeme fragile ou constituant un paysage remarquable menacé par la dégradation ou par l'utilisation irrationnelle.

39 J.O.R.T n° 88 du 31 décembre 1992, p.1668.

40 Art. 35 : « il est ouvert dans les écritures du Trésorier Général de Tunisie un fonds spécial du trésor intitulé « fonds de dépollution » destiné à financer les projets de protection de l'environnement et à aider les entreprises à réaliser des investissements anti-pollution et à mettre en oeuvre des mesures d'incitation à l'utilisation de la technologie non polluante. Le Ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire est l'ordonnateur des dépenses dudit fonds ».

41 Décrets n° 20-21 de 1993 du 25 octobre 93, J.O.R.T n° 83 du 02 novembre1993, p.1857.

L'ensemble des mesures de protection contre la pollution marine constitue le programme "Main bleue" établi en vue d'améliorer et protéger l'environnement marin et côtier du pays.

Le programme "Main bleue" se propose de protéger le littoral et les ressources en eau contre les risques engendrés par les activités basées dans les régions côtières. Il s'agit notamment de la prévention de la pollution pétrolière, de l'organisation et de la promotion du nettoyage des plages, de l'incitation au traitement des eaux usées et de l'installation dans les villes côtières d'importants dispositifs pour la maîtrise des problèmes des déchets.

Ce programme a plusieurs objectifs dont la protection contre la pollution hydrique avec la construction, la réhabilitation et l'extension de stations d'épuration dans les villes côtières; toutes les eaux usées urbaines sont collectées et traitées dans des stations d'épuration avant d'être rejetées dans le milieu récepteur.

Il vise aussi au traitement des eaux usées industrielles et l'élimination de tous les rejets industriels polluants en mer, la promotion de la réutilisation des eaux épurées, la construction d'émissaires en mer et la protection des eaux de baignade.

La gestion des déchets solides (récupération, valorisation et recyclage) fait aussi partie de ce programme.

La protection contre la pollution marine accidentelle par les hydrocarbures fait aussi partie de ces objectifs, cela s'est manifesté par la mise en place, en 1996, d'un Plan National d'Intervention Urgente pour lutter contre les événements de pollution marine42, comprenant l'équipement des ports tunisiens par des moyens d'intervention, appropriés et la formation dans les domaines de l'intervention en cas d'urgence, contre la pollution par les hydrocarbures.

42 Une commission nationale est chargée du suivi de ce Plan.

Des opérations blanches43 ont été organisées, pour servir de tests, elles ont vu la participation d'unités de la garde nationale, de la protection civile, des services de la marine marchande et de l'Agence Nationale de Protection de l'Environnement, ce qui a permis de mettre à l'épreuve les ressources matérielles et humaines et la coordination existant entre ces différents intervenants et de tester l'efficacité du matériel employé dans ce genre de situations

La protection de l'environnement marin et côtier du domaine public maritime ne peut être efficace que si elle est appuyée par une protection qui s'étend sur tout son espace territorial et même au-delà.

43 Une de ces opérations a consisté en la simulation d'un accident écologique le large des côtes tunisiennes suite à la une collision entre un navire transportant des hydrocarbures et une épave marine causant l'infiltration de 6000 tonnes de carburant dans la mer.

CHAPITRE 2 : LA PROTECTION DE L'ESPACE TERRITORIAL DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

Le littoral a subi une exploitation excessive du fait d'une concentration des plus grandes villes, des populations et de la plupart des activités ; concentration qui s'est faite sans aucune organisation et sans véritable politique d'aménagement, même si c'est l'habitat qui en a été le principal bénéficiaire.

Le législateur a essayé d'éviter cette utilisation incontrôlée de l'espace territorial littoral en promulguant le Code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme (C.A.T.U)44 par la loi n°94-122 du 28-11-1994 qui a réservé à l'aménagement du littoral des dispositions spécifiques qui concernent aussi le domaine public maritime qui en en faisant partie, a souffert des mêmes inconvénients.

L'objectif des politiques publiques envisagées en ce domaine doit être de rechercher l'équilibre entre développement économique et protection du territoire au travers du contrôle de l'occupation du domaine public maritime (section 1) et de la maîtrise de l'aménagement du territoire (section2).

44 Travaux préparatoires : discussion et adoption par la chambre des députés dans sa séance du 22 novembre1994.

SECTION 1 : LE CONTROLE STRICT DE L'OCCUPATION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

Le domaine public maritime, appartient à l'Etat et est inaliénable. Son occupation, strictement contrôlée et soumise à autorisation, doit être limitée aux constructions et équipements à usage collectif (aucune habitation à usage individuel ne peut être autorisée).

L'utilisation du DPM doit dans tous les cas être conforme à la destination des terrains concernés.

A ce titre, il faut rappeler que la destination fondamentale des plages est leur usage libre et gratuit par le public.

Il s'agit avant tout de préserver un littoral de qualité pour la détente et les loisirs et les activités économiques liées à la proximité de la mer.

En effet, le domaine public maritime naturel répond à un principe fondamental et ancien, celui du libre usage par le public pour la promenade, la pêche, l'échouage des bateaux ou les activités balnéaires et nautiques, ce qui fonde les principes de gestion du littoral : favoriser les activités liées à la mer et qui ne peuvent se développer ailleurs, au premier rang desquelles l'accès du public à la mer.

Le domaine public maritime artificiel est généralement aménagé pour mettre en valeur le littoral : toute décision qui favorise cette mise en valeur contribue donc à la réalisation de la vocation du domaine. Ainsi, les ports maritimes sont aménagés pour recevoir les navires et permettre l'embarquement et le débarquement des marchandises, du poisson ou des passagers, ce qui nécessite de multiples services connexes à cette activité de transit et qui participent à ce service.

Une telle utilisation du domaine est donc avant tout économique et commerciale, et les règles de gestion doivent viser à la meilleure utilisation économique du domaine ainsi aménagé, ce qui peut justifier d'importantes occupations privatives s'accompagnant d'un régime de redevance lié à l'activité apportée : telle la reconnaissance des " droits réels " à l'occupant par la loi française de juillet 1994, et même de la fermeture d'une partie du domaine au public.

En effet, si le domaine public maritime reste de façon inaliénable la propriété de l'Etat45, il peut donner lieu à différentes utilisations et exploitations, notamment dans le cadre de concessions spécifiques.

Le domaine public maritime présente un intérêt évident pour de multiples acteurs exerçant les activités les plus variées. Il est alors possible au gestionnaire d'autoriser des occupations plus ou moins privatives du domaine public maritime, c'est à dire de permettre une construction, une installation réalisée par un permissionnaire et l'usage exclusif d'une portion du domaine. Les exemples sont multiples, de la simple marche d'escalier pour permettre au riverain d'aborder le rivage à la réalisation d'une usine de transformation de produits liée à l'activité portuaire.

La règle de base est que ces occupations doivent être compatibles avec l'usage normal du domaine, et bien sûr respecter les principes de gestion évoqués plus haut.

Aussi, l'administration effectue un contrôle très strict sur l'occupation du domaine public maritime, elle doit le protéger notamment de tous les occupants sans titre (§1) et veiller à l'organisation de cette occupation qui peut être concédée sous certaines conditions (§2).

45 Loi n°95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime, art. 19 : « Le domaine public maritime est insaisissable, inaliénable et imprescriptible. Il ne peut être grevé d'hypothèque ».

§1- LA PROTECTION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME CONTRE LES OCCUPANTS SANS TITRE

Les occupations illégales du domaine public maritime sont anciennes et multiples. Les sanctions prévues, sont en réalité peu efficaces, en particulier, elles ne permettent pas de totalement réparer les préjudices subis par l'environnement.

Indépendamment de la procédure de la contravention de voirie, l'administration -propriétaire ou affectaire- du domaine public dispose de moyens d'action renforcés à l'encontre des personnes privées qui occupent indûment le domaine.

Pour obtenir l'expulsion des occupants ou l'enlèvement des installations irrégulièrement implantées ou maintenues sur le domaine public, elle doit normalement recourir au juge, la possibilité d'agir par voie d'exécution d'office ne lui est ouverte qu'à titre exceptionnel46.

L'A.P.AL joue aussi un rôle très important en ce domaine, elle a pour tache essentielle d'assurer l'exécution de la politique de l'Etat dans le domaine de la protection du littoral en général et du domaine public maritime en particulier.

A cette fin, et suivant les termes de l'art. 3 de la loi 95-72 portant création de l'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral, elle est notamment chargée de :

« - La gestion des espaces littoraux et le suivi des opérations d'aménagement et de veiller à leur conformité avec les règles et les normes fixées par les lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de ces espaces, leur utilisation et leur occupation ;

- La régularisation et l'apurement des situations foncières existantes à la date de publication de la présente loi et contraires aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime en particulier et ce conformément à la législation en vigueur et tout en respectant le principe du caractère non saisissable, non susceptible d'hypothèque, inaliénable et imprescriptible du domaine public maritime. »

Cependant, il faut dire que des procédures spécifiques pour l'occupation du domaine public maritime existent, ce sont les concessions d'occupation du domaine public maritime.

46 Lavialle CH. : « L'occupation sans titre du domaine public », AJDA 1981 I p.563.

§2- L'ORGANISATION DE L'OCCUPATION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

Il existe en droit français, des concessions d'endigage, de plage et des concessions portuaires.

Le principe est un contrat entre l'Etat et le bénéficiaire de la concession. En règle générale une collectivité territoriale, un établissement public ou un organisme doté d'une mission de service ou d'intérêt public, au terme de laquelle l'Etat met à disposition, éventuellement moyennant contre partie financière, une partie du domaine public maritime, à charge pour le bénéficiaire, d'y construire les ouvrages, de les exploiter et de les entretenir.

Les projets et les travaux doivent être d'intérêt général. En particulier les concessions d'endigage ne peuvent être accordées que pour la réalisation de travaux de défense contre la mer, de sécurité maritime, de développement de la pêche ou des cultures marines...et sous réserve de figurer préalablement dans un document de planification (les endiguements, assèchements, enrochements restant interdits dans le cas général).

Les plages font généralement l'objet de concessions aux communes, qui en assurent notamment leur exploitation touristique, leur entretien, leur protection (en particulier contre l'érosion marine), elles peuvent les sous louer à des entreprises privées.

Les ports sont concédés selon les cas à des collectivités locales ou territoriales ou à des chambres de commerce et d'industrie.

L'outil juridique de droit commun pour effectuer ces opérations est l'autorisation d'occupation temporaire47, assujettie à redevance et toujours délivrée à titre personnel, précaire et révocable. C'est-à-dire, qu'il peut y être mis fin à tout moment si l'intérêt du domaine ou un intérêt général le justifient, avec parfois une indemnisation qui est fonction des droits accordés et du motif de retrait.

La jurisprudence veut également que le titre d'occupation délivré et sa durée soient adaptés à l'importance de l'ouvrage réalisé ou de l'activité exercée.

En droit tunisien aussi, le domaine public maritime donne lieu à des utilisations communes et à des utilisations privatives.

47 A.O.T. ; Article L 28 du Code du domaine de l'Etat.

En ce qui concerne l'utilisation commune du domaine public maritime, elle est libre, égalitaire et gratuite.

Elle se limite à l'usage courant selon les usages et les coutumes, dans le respect de la tranquillité, de la salubrité, de la sécurité, de l'ordre public et de la protection de l'environnement.

L'utilisation privative du domaine public maritime est permise, soit sous forme d'occupation temporaire soit sous forme de concession, conformément aux spécificités de ce domaine et aux conditions prescrites par la loi n° 95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime48.

En outre, et selon l'art. 23 de la loi 95-73, toute occupation temporaire du domaine public maritime ne peut être accordée qu'à titre précaire et révocable sans réparation ni indemnité. Cette occupation ne peut avoir lieu que sur autorisation du ministre chargé de l'Environnement et sur proposition de l'Agence de la Protection et de l'Aménagement du Littoral.

Un décret pris sur proposition du ministre chargé de l'Environnement après avis des ministres chargés de l'Equipement, des Domaines de l'Etat, de l'Agriculture et de la Santé Publique, détermine les modalités d'application des dispositions de cet article 23 et notamment les conditions d'occupation temporaire du domaine public maritime.

Il faut signaler aussi, que selon l'art. 24 de la loi n°95-73, toute occupation temporaire du domaine public maritime donne lieu à redevance à la charge de l'occupant conformément à la législation et à la réglementation en vigueur.

Cependant, lorsqu'il y a lieu de réaliser des ouvrages ou des installations fixes dans la mer ou à sa proximité, l'autorisation ne peut être accordée que sous forme de concession fixant notamment la durée de l'occupation et le montant de la redevance.

Un cahier des charges annexé au contrat de concession, précisera notamment les conditions d'exécution des ouvrages ou installations ainsi que le mode d'exploitation, et ce, après avis de la collectivité locale concernée.

48 V . Art. 20, 21 et 22 de la loi n° 95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime.

Cette concession ne pourra être accordée que pour une durée maximale de trente ans et dans le cas où il est stipulé qu'elle peut être prorogée tacitement, elle sera renouvelée toutes les fois pour une durée de deux ans.

Le contrat de concession ainsi que le cahier des charges sont approuvés par décret pris sur proposition du ministre chargé de l'Environnement, après avis des ministres chargés de l'Agriculture, des Domaines de l'Etat, de l'Equipement et de la Santé Publique49.

Aussi, selon les dispositions de la loi n°95-72 du 24 juillet 1995 portant création d'une Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral (art. 7), celle-ci prend en charge la gestion, la conservation et la préservation des terres qui sont mises à sa disposition.

Elle peut transférer l'exploitation des espaces aménagés à un établissement public ou privé ou à une association autorisée et ce, dans le cadre d'un accord fixant notamment la contrepartie financière et sur la base d'un cahier des charges qui fixe les usages, les modes de gestion et de préservation et les travaux autorisés qui contribuent obligatoirement à la réalisation des objectifs de l'Agence qui peut dans certains cas avoir recours à l'expropriation.

En effet, et pour la conservation des zones sensibles50, elle peut avoir la maîtrise des immeubles soit par leur acquisition à l'amiable, soit le cas échéant, par leur expropriation par l'Etat à son profit conformément à la législation en vigueur relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique.

L'Agence peut aussi, dans les cas où elle le juge opportun, conclure des accords de partenariat avec les propriétaires des terres situées dans les zones sensibles. Les propriétaires s'engagent dans ces accords à gérer leurs terres conformément à un cahier des charges approuvé par le ministre chargé de l'Environnement51.

49 V. Art. 25 et 26 de la loi n° 95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime.

50 Art. 8 : « Un décret fixe les zones sensibles, qui sont des zones caractéristiques du patrimoine naturel national ou présentant un ensemble d'éléments dans un écosystème fragile ou constituant un paysage naturel remarquable, menacé par la dégradation ou l'utilisation irrationnelle... »

51 Loi 95-72 portant création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral, art. 8.

Cependant, la protection de l'espace territorial du domaine public maritime ne se limite pas au contrôle de son occupation quelle qu'en soit l'efficacité.

Une vraie protection de domaine nécessite également une réelle maîtrise de l'aménagement du littoral dont fait partie le domaine public maritime.

SECTION 2 : LA MAITRISE DE L'AMENAGEMENT DU LITTORAL

« L'aménagement du territoire est une projection géographique de la société de l'avenir »52, l'inventeur de l'expression et apôtre de l'idée, estimait que l'aménagement du territoire n'est en réalité que l'aménagement de la société53.

En fait l'aménagement du territoire peut se définir comme la recherche dans un cadre géographique donné, d'une meilleure répartition des hommes en fonction des ressources naturelles et des activités54.

Le littoral est une zone comprenant notamment l'ensemble des sites, espaces et milieux naturels en bord de mer présentant une situation ou un caractère exceptionnel justifiant leur protection (dunes, landes, forêts, ....), il est plus vaste que le domaine public maritime qui mérite du fait de sa spécificité une grande protection.

L'aménagement de ces zones doit se faire au travers d'un développement équilibré de l'ensemble des activités économiques liées à la présence ou proximité de l'eau, dans le respect du patrimoine naturel et des équilibres écologiques et biologiques55.

Des principes forts doivent guider la politique d'aménagement du littoral, ils concernent aussi bien le domaine public maritime - DPM - que le littoral.

La bande littorale, dont le domaine public maritime, est un espace territorial nécessitant un aménagement particulier pour limiter son utilisation anarchique qui faciliterait les violations et les atteintes.

52 Massé P. : « le plan ou l'anti-hasard », Collection Idées, Gallimard, 1965, p.105 et s.

53 Claudius-petit E. « Journées d'études », H.E.C avril 1962.

54 Aouij-Mrad, A. : « Précis de Droit de l'Urbanisme », Publications de l'imprimerie officielle, 2002, p. 37.

55 Olsen Stephen B., Directeur du Centre des ressources littorales de l'Université de Rhode Island (Etats-Unis), le courrier de l'UNESCO, novembre 2001 : « à certains endroits de la planète, la pression humaine augmente à un point tel qu'elle ne permet plus à l'écosystème de se développer, ni même de se maintenir. Quiconque visite les régions les plus touristiques du littoral Méditerranéen, en Italie, en Espagne ou en Tunisie, réalise combien peut coûter un développement mal conçu. .. Au vu des résultats d'une étude réalisée pour le Fonds pour l'environnement mondial (Le Fonds pour l'environnement mondial a été lancé en 1991 pour protéger l'environnement et promouvoir le développement durable dans le monde. Il réunit 166 gouvernements, les principales institutions de développement, la communauté scientifique, un large éventail d'ONG et le secteur privé), ils faut réviser complètement les plans, modifier aussi bien l'architecture que la densité et la localisation des infrastructures dans ces régions.

Dans ce contexte, l'article 2 du C.A.T.U définit l'aménagement du territoire comme étant « ..L'ensemble des choix, des orientations et des procédures fixées à l'échelle nationale ou régionale pour organiser l'utilisation de l'espace et même d'assurer notamment la cohérence dans l'implantation des grands projets d'infrastructures, d'équipements publics et des agglomérations ».

L'objectif principal est le contrôle de l'urbanisation, mais aussi la préservation des espaces et milieux naturels, l'inconstructibilité des espaces proches du rivage, la protection des espaces boisés, le contrôle de l'extension de l'urbanisation et la limitation de la construction de routes nouvelles en bord de mer.

La maîtrise de l'aménagement du littoral comprend aussi la maîtrise du risque spécifique lié au phénomène de recul des côtes sous l'influence de l'érosion marine.

L'aménagement du territoire passe donc par deux étapes qui sont : les schémas directeurs d'aménagement «S.D.A» (§1) et les plans d'aménagement urbain «P.A.U» (§2).

§1- LES SCHEMAS DIRECTEURS D'AMENAGEMENT

Ces schémas visent la protection de l'espace territorial concerné par l'aménagement et assurent l'organisation de l'utilisation de l'espace en orientant l'implantation des programmes de l'Etat, des collectivités publiques locales, des établissements et services publics et en oeuvrant à leur cohérence dans le cadre des perspectives de développement économique et social, prenant en compte l'impact de l'aménagement sur l'environnement56.

Selon l'article 5 alinéa 1er du C.A.T.U, ces schémas fixent les orientations fondamentales de l'aménagement des zones territoriales concernées compte tenu des relations avec les régions avoisinantes et de l'équilibre à conserver entre l'expansion urbaine et l'exercice des activités agricoles et d'autres activités économiques.

Ces schémas, prennent aussi en considération la nécessité de protéger les sites naturels et culturels, y compris les sites archéologiques et les zones de sauvegarde, tels que définis par la législation en vigueur.

La bande littorale apparaît comme une zone de sauvegarde selon les dispositions de la loi n°95-7257 et de la loi n°95-7358.

Le C.A.T.U a crée plusieurs catégories de schémas directeurs d'aménagement plus adaptés aux diverses régions du pays. Ce sont les S.D.A relatifs aux agglomérations urbaines59, les S.D.A relatifs aux zones sensibles et les S.D.A relatifs aux zones restantes60.

Les S.D.A relatifs aux zones sensibles sont établis pour les besoins de la promotion écologique dans ces zones61 qui sont des zones écologiquement fragiles.

Néanmoins, le C.A.T.U n'a pas spécifié leur objet, il a uniquement évoqué la liste des zones sensibles qui devra être fixée par décret (art.7 du C.A.T.U).

56 Loi n° 94-122 du 28 novembre 1994, portant promulgation du code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, art. 5.

57 Loi n° 95-72 du 24 juillet 1995, portant création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral.

58 Loi n° 95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime.

59 Loi n° 94-122 du 28 novembre1994, portant promulgation du code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme, art.6.

60 Relatifs aux zones non-couvertes par un autre S.D.A infra national, celles qui ne font parties ni des agglomérations urbaines, ni des zones sensibles prévues par le décret n° 98-2092 du 28 octobre 1998.

61 Aouij-Mrad, op. cit. p. 53.

C'est le décret n° 98-2092 du 28 octobre 1998 qui a défini et fixé la liste des zones sensibles dans son article 2 : «.. est considérée zone sensible... toute zone qui présente des caractéristiques naturelles spécifiques, qui constituent un écosystème fragile ou un élément ou un ensemble d'élément dans ce système et qui requiert, pour sa protection contre la dégradation, la mise en oeuvre de normes et de procédés d'aménagement prenant en compte ses spécificités et préservant les sites naturels y existants ».

Ce texte a désigné 19 zones sensibles, la plupart d'entre elles (15 au total) sont côtières62 et sont caractérisées par un écosystème fragile, qui doit être protégé contre une trop grande prolifération d'implantations touristiques, industrielles ou tout simplement humaines63.

Les S.D.A, constituent une étape primordiale de l'aménagement du territoire, mais elle n'en est pas l'unique, car ces schémas sont suivis par d'autres documents d'aménagement.

§2 : LES PLANS D'AMENAGEMENT URBAIN

En dehors des S.D.A relatifs aux zones sensibles, il existe d'autres sortes de documents visant la protection de certains espaces particulièrement fragiles comme les Plans d'Occupation des Plages (POP), qui sont des instruments de planification et d'aménagement des plages qui ont pour objet de définir le mode d'occupation des plages élaborés par l'A.P.A.L.

En effet, les exigences environnementales sont désormais prises en compte dans les documents d'urbanisme. Elles sont imposées aux particuliers comme c'est le cas pour les plans d'aménagement urbain ou les documents qui protègent une composante environnementale tels que les plans d'occupation des plages... elles ont une grande influence sur le contenu des documents ou des opérations d'urbanisme.

En ce qui concerne les P.A.U, ils représentent un moyen d'exécution des orientations des schémas directeurs d'aménagement et « fixent notamment les règles et servitudes d'utilisation des sols et déterminent64 :

62 Tabarka-Zouaraâ, extrême-Nord, Est-Bizerte, Carthage-Sidi Bou Said, Ouest-CapBon, Selloum-Hergla, KhnisBekalta, El Ghedhabna-Echebba-Melloulech, les îles de Kerkennah, Mahrès-Skhira, Gabès-ElJorf, l'île de Jerba, Zarzis, El Bibène.

63 Aouij-Mrad, op. cit., p. 53.

64 V. Art 12 du C.A.T.U

1- Les zones selon l'usage principal qui leur est assigné ou selon la nature des activités dominantes qui peuvent y être exercées et celles qui doivent y être interdites ;

2- La densité des constructions autorisée dans chaque zone fixée ou dans chaque partie de la zone, en fonction de la capacité d'accueil de l'infrastructure et des équipements collectifs déjà existants ou à réaliser, de la qualité des sols de ces zones, des risques naturels éventuels et des facteurs environnementaux ;

3- Le tracé des voies de circulation à maintenir, à modifier ou à construire et la fixation de leurs caractéristiques ;

4- Les zones de protection des monuments historiques, les zones de sauvegarde65, les sites culturels, archéologiques66, agricoles et naturels ayant fait l'objet d'une réglementation de protection, de sauvegarde ou de mise en valeur, ainsi que les zones devant être conservées eu égard à leurs spécificités, telles que le littoral ;

5- Les emplacements réservés aux ouvrages, aux équipements collectifs, aux équipements d'utilité publique, aux espaces verts et aux places publiques ; et ce conformément à une grille d'équipement fixée par décret ;

6- Les règles d'urbanisme relatives au droit d'implantation des constructions, à leur nature et à leur affectation, à condition de respecter les procédures pouvant renforcer l'intégration sociale au sein des agglomérations, une meilleure utilisation des sols, et de respecter également les besoins générés par la situation particulière des handicapés.

Les plans d'aménagement urbain prennent donc en compte certains éléments primordiaux afin d'éviter que l'aménagement du territoire ne se fasse au détriment des zones de sauvegarde dont le littoral.

65 En France, une loi portant sur la matière établit une liste indicative comprenant les dunes, landes, forêts, zones boisées côtières, falaises et les milieux abritant des concentrations d'espèces animales et végétales.

66 la protection du « patrimoine archéologique » situé au fond de la mer est prévue par la loi n° 94-3 5 du 24 février 1994, portant code du patrimoine archéologique, historique et des arts traditionnels, dans chapitre (II) relatif aux découvertes maritimes

D'autre part, des normes spécifiques s'appliquant aux espaces non couverts par des P.A.U et qui sont généralement des espaces non urbanisés. C'est en effet, le règlement général d'urbanisme qui est appliqué67 dans ces cas pour protéger les espaces naturels sensibles qui ne constituent pas des espaces urbains68.

Il existe aussi d'autres normes spécifiques s'appliquant à d'autres formes d'espaces sensibles, et qui peuvent être, pour certains, intégrés dans un P.A.U

Car, en plus des dispositions législatives générales relatives au littoral et qui concernent le domaine public maritime, le législateur a adopté quelques mesures spécifiques au domaine public maritime.

On peut en citer la zone non constructible établie par l'art 25 C.A.T.U « ..Il est interdit de construire à une distance inférieure à cent mètres à partir du domaine public maritime dans les zones du littoral et du domaine public hydraulique dans le reste des zones.. Cette distance peut-être augmentée dans les zones menacées d'érosion maritime et chaque fois que la nécessité de protection du littoral l'impose...cette distance sera également fixée dans les zones couvertes par un plan d'aménagement approuvé en fonction de la situation particulière de chaque zone, mais elle ne peut en aucun cas être inférieure à vingt cinq mètres ».

Cette zone non constructible varie donc entre 25 et 100 mètres à partir du domaine public maritime selon l'existence d'un plan d'aménagement approuvé ou non, avec la possibilité de son extension dans les zones menacées d'érosion maritime et chaque fois que la protection du littoral l'impose.

Cependant cette règle n'est pas appliquée aux équipements publics et aux activités économiques nécessitant d'être à proximité du rivage de la mer qui restent soumis à l'obtention d'autorisations préalables et à l'étude préalable d'impact69.

67 Il est applicable à « toutes les opérations de construction sur les terrains situés en dehors des limites des zones couvertes par des P.A. U... et des zones régies par des réglementations particulières dont les forêts, les sites archéologiques et historiques et les exploitations agricoles » art. 1er du décret 99- 2253 du 11 octobre 1999, portant approbation du règlement général d'urbanisme.

68 En dehors du cadre communal.

69 Article 11 C.A.T.U : « les projets d'aménagement, d'équipement et d'implantation d'ouvrages pouvant affecter l'environnement naturel par leur taille ou impacts, sont soumis à une étude préalable d'impact.. »

En effet, selon l'existence ou non d'un P.A.U ou d'un plan spécifique à la zone70, ce sont soit les normes du plan existant qui s'appliquent, soit celles du règlement général d'urbanisme.

Pour les normes propres à certains espaces naturels ou protégés et en ce qui concerne le littoral, et en cas d'existence d'un décret de délimitation du domaine public maritime, s'il y a un P.A.U, la distance minimale de construction par rapport au domaine public maritime que doit prévoir ce document est de 25 mètres71.

Par contre, s'il n'y a pas de P.A.U approuvé, la distance minimale de construction est de 100 mètres par rapport au domaine public maritime.

Si le domaine public maritime n'a pas encore été délimité, et qu'il y'ait un P.A.U ou seulement un règlement général d'urbanisme, il ne peut y avoir de zone constructible, ou lotissable en deçà de 200 mètres à partir de la limite des plus hautes eaux de mer.

C'est la « zone de protection absolue » établie par la loi relative au domaine public maritime72 où toute construction est impossible.

En qui concerne les normes établies par le règlement général d'urbanisme, on trouve ou bien des zones non constructibles qui peuvent être soit des zones exposées à des risques naturels prévisibles73 dont le domaine public maritime, soit des zones soumises à des servitudes « non aedificandi » comme les monuments historiques et les sites protégés ou bien le domaine public maritime74.

Il y a aussi des zones constructibles sous conditions qui sont celles soumises aux servitudes des divers réseaux (transports, télécommunications, électricité, gaz, eau...) et les zones protégées (archéologiques, littoral...).

Dans ces zones seules les constructions nécessaires au fonctionnement des équipements spécifiques peuvent être autorisées.

70 Les plans de sauvegarde et de mise en valeur des sites archéologiques comme exemple.

71 Cette restriction ne vaut pas pour « équipements publics et les activités économiques nécessitant d'être à proximité du rivage de la mer.. » d'après l'art. 25 alinéa 4 du C.A.T.U.

72 Loi n° 95-73 du 24 juillet 1995 relative au domaine public maritime, art. 14.

73 Inondations, érosion, éboulements, affaissements..(art.2 du décret n° 99-2253).

74 Aouij-Mrad, A., op. cit., p.146.

Le domaine de protection du domaine public maritime est donc assez large, il englobe des considérations

environnementales qui concernent la lutte contre certains phénomènes nuisibles au domaine public maritime (érosion, pollution).

Il englobe aussi des considérations territoriales qui concernent un effort soutenu de l'administration pour en réaliser les objectifs (contrôle de l'occupation des sols, maîtrise de l'aménagement du territoire).

Cependant, cette protection ne peut être menée à terme que par l'utilisation de certaines méthodes de protection qui sont soit préventives ou bien répressives.

DEUXIEME PARTIE :

LES METHODES DE PROTECTION DU DOMAINE
PUBLIC MARITIME

Le domaine de la protection du domaine public maritime est assez vaste, d'où la nécessité d'adopter les méthodes adéquates et qui doivent être assez efficaces pour protéger le domaine.

Ces méthodes ne sont pas spécifiques au domaine public maritime, il les partage avec les autres dépendances du domaine public puisqu'il fait partie intégrante de ce dernier.

Ces méthodes de protection du domaine public maritime peuvent être divisées en deux catégories : Elles peuvent ou bien viser la protection du domaine public maritime par leur effet dissuasif et sont alors préventives (chapitre I), ou bien elles peuvent viser la protection du domaine public maritime par leur effet coercitif et elles sont dans ce cas répressives (chapitre II).

CHAPITRE I : LES METHODES PREVENTIVES

Le contrôle préventif est une forme de protection qui se manifeste à deux niveaux : l'adoption des principes fondamentaux que sont les règles de l'inaliénabilité et de l'imprescriptibilité du domaine public (section I) et l'obligation d'entretien qui pèse sur l'administration (section II).

SECTION 1 : L'ADOPTION DES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE PROTECTION

Selon l'article 19 de la loi n° 95-73 « « le domaine public maritime est insaisissable, inaliénable et imprescriptible. Il ne peut être grevé d'hypothèque ».

La non saisie et la non-hypothèque découlent du principe d'inaliénabilité.

L'inaliénabilité signifie que le domaine public ne peut être aliéné par l'administration tant qu'il restera affecté à un usage public ou à un service public75.

L'imprescriptibilité constitue un prolongement de la règle de l'inaliénabilité et signifie l'acquisition par une possession prolongée de la propriété des biens du domaine public ou un autre droit réel immobilier sur ces mêmes biens76.

75 Dufau J., le domaine public, 4éme édition, 1993, p.265.

76 Op. cit., p. 274.

Une des bases de la protection par la prévention du domaine public maritime a été l'adoption de ces deux principes fondamentaux que sont l'inaliénabilité et l'imprescriptibilité par le législateur tunisien qui se sont révélés très utiles (§1), malgré leurs effets relatifs qui limitent l'étendue de la protection qu'ils procurent au domaine public maritime (§2).

§1- UTILITE DES REGLES D'INALIENABILITE ET

D'IMPRESCRIPTIBILITE DU DPM

Historiquement, ces 2 principes ont été introduits dans le droit tunisien par un décret Beylical de 188577, mais leur existence effective est antérieure à cette date78.

En outre le législateur a adopté ces 2 principes dans tous les textes organisant le domaine public.

Le droit français reconnaît le principe de l'inaliénabilité depuis 1566, date de parution de l'ordonnance de Moulins.

Bien que l'imprescriptibilité du domaine public y compris le domaine public maritime soit conséquente au principe de l'inaliénabilité, ces deux principes sont complémentaires79 en réalité, puisque l'inaliénabilité protège le domaine public

contre toutes les formes d'aliénations tandis que
l'imprescriptibilité le protège des atteintes du public.

Plusieurs effets très importants résultent du principe de l'inaliénabilité du domaine public maritime dont la nullité de toutes les opérations de vente de certaines parties du domaine public maritime conclues par l'administration sans un acte administratif préalable annulant l'affectation à un usage public ou à un service public ou le déclassant80.

Egalement il est de règle qu'il est impossible d'exproprier le domaine public maritime, l'interdiction touchant aussi bien les aliénations volontaires que les aliénations forcées.

Bien que la loi n°76-85 du 11 août 1976 relative à l'expropriation ne soit pas explicite à ce sujet, on peut déduire cette règle de l'article 1 alinéa 3 de cette loi qui dispose que les biens intégrés dans les travaux publics ne peuvent faire l'objet d'expropriation.

77 Décret Beylical du 24 septembre 1885, art.2..

78 Jugement du tribunal civil de Tunis, 19 juin 1903, JT, 1903, p.377, « dés avant le décret du 24 septembre 1885, le domaine public naturel existait et jouissait de l'inaliénabilité et l'imprescriptibilité.. »

79 Waline M., traité de droit administratif, p. 211.

80 Arrêt du Tribunal Administratif n°994 du 18 février 1985, Mohamed Ridha Lakhoua/ municipalité de L'Ariana.

Et comme le principe d'inaliénabilité vise à garantir l'unité du domaine public maritime et sa protection contre tout démembrement, il n'est donc pas permis de constituer de droits réels civils au profit des administrés ou de lui appliquer des servitudes au profit d'immeubles privés.

En effet, le domaine public maritime ne peut être assujetti, en principe, aux servitudes de droit privé. En revanche l'administration peut se prévaloir de ces mêmes servitudes à l'encontre des propriétés riveraines du domaine public maritime.

C'est aussi le cas si elles faisaient partie du domaine public, mais l'application des servitudes administratives aux dépendances du domaine public a soulevé de nombreuses controverses81.

Parmi les principales servitudes administratives grevant les propriétés voisines du domaine public, on trouve les servitudes au profit du domaine public maritime qui sont les terrains réservés en bordure du rivage.

En effet, dans certaines zones côtières, le rivage se ramène souvent, en raison de la faible amplitude des marées, à une bande de terrain très mince. C'est la raison pour laquelle la loi du 28 novembre 1963 (art.4 et 5) a institué une procédure à caractère conservatoire, empruntée au droit de l'urbanisme, dans le double but de lutter contre la spéculation foncière dont sont l'objet les terrains contigus au rivage et d'accroître l'étendue du domaine public maritime côté terre82.

Cette réserve peut atteindre -perpendiculairement à la limite côté terre du rivage- une profondeur de 20 mètres pour les terrains clos ou bâtis, de 50 mètres dans les autres cas83.

81 Selon certains auteurs (Auby, Jouve et Bouyssou, JCA fasc. 390 n°109 et 110) il convient de faire la distinction entre :

- Les servitudes établies par la loi d'une manière générale et pesant sur un nombre indéterminé d'assujettis ne sont

pas applicables au domaine public alors même qu'elles seraient compatibles avec la destination du domaine.

- Au contraire, les servitudes qui résultent d'un acte administratif déterminant individuellement les assujettis
peuvent s'appliquer au domaine public après entente entre les personnes publiques intéressées.

Jean Dufau estime quant à lui les servitudes établies par la loi d'une manière générale sont applicable au domaine public, l'arrêt Schwetzoff, CE, 30 mers 1973 affirme que les plans d'urbanisme -et donc les servitudes prévues par ces plans- s'appliquent au domaine public maritime, y compris aux terrains immergés compris dans ce domaine (AJDA 1973 II p.366, note Dufau).

82 Dufau J., op. cit., p.308.

83 Décret n° 58-1463 du 31 décembre 1958 relatif aux plans d'urbanisme, art. 28.

Il y a aussi les servitudes de passage destinées à faciliter l'accès des piétons à la mer et qui grèvent les propriétés riveraines du domaine public maritime sur une bande de 3 mètres de largeur. Il s'agit d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons84.

Cette servitude de passage existe en droit tunisien, elle consiste à assurer exclusivement le passage des piétons sur une bande de trois mètres de large sur les propriétés riveraines du domaine public maritime, selon l'art17 loi 95-73 : « Les terrains limitrophes au domaine public maritime et frappés d'alignement, sont assujettis dans leur partie contiguë à ce domaine d'une servitude de passage d'une largeur de 3 mètres ».

Cette servitude ne bénéficie qu'au domaine public maritime, elle s'exerce le long du littoral et s'applique donc de plein droit sur toutes les propriétés privées situées en bord de mer.

En France, depuis la loi du 3 janvier 1986, relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (art.5), elle peut être complétée par une autre servitude permettant l'accès transversal au rivage.

Enfin, le domaine public maritime ne peut pas faire l'objet d'une saisie-arrêt.

L'imprescriptibilité engendre des effets tout aussi importants, dont l'irrecevabilité des actions possessoires contre l'administration relatives à une des dépendances du domaine public maritime dont les biens meubles qui peuvent y être inclus puisque affectés à son service85 et aussi l'action en revendication de biens irrégulièrement aliénés, l'action domaniale et l'action en réparation des dommages causés au domaine public.

Ce principe interdit aussi l'usucapion qui est la possibilité d'appropriation de biens du domaine public maritime conformément aux règles de la possession acquisitive de la propriété par le jeu de la prescription.

84 V. article 52 de la loi n° 76-1286 du 31 décembre 1976, dont les modalités d'application ont été fixées par le décret n° 77-753 du 7 juillet 1977.

85 Bouachba T. : « Droit administratif des biens publics», 1999.

Même si la doctrine et la jurisprudence s'accordent sur le fait que les effets de ces deux principes (inaliénabilité et imprescriptibilité) sont absolus pour garantir l'affectation du domaine public -dont le domaine public maritime- à un usage public et pour garantir aussi bien son utilisation collective qu'exclusive dans les meilleures conditions, certains droits comparés ont introduit des exceptions très importantes sur les deux principes.

§2- LIMITES DE L'INALIENABILITE ET DE L'IMPRESCRIPTIBILITE DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

L'application des principes d'inaliénabilité et

d'imprescriptibilité ne soulève pas de problèmes particuliers, sauf le fait qu'ils ne sont pas totalement absolus puisqu'il est permis à l'administration d'aliéner les biens du domaine public maritime si elle annule préalablement leur affectation ou les déclasse86 selon une position commune de la Jurisprudence tunisienne87 et comparée88 et de quelques lois89.

Mais, cette position de la Jurisprudence mérite des éclaircissements, car la désaffectation, les changements d'affectation et les déclassements sont relatifs dans la plupart des cas aux parties artificielles du domaine public maritime sans les parties naturelles.

Il est difficile en fait d'imaginer le déclassement du littoral du domaine public maritime pour l'intégrer au domaine privé de l'Etat ou le vendre aux tiers, comme il est difficile d'imaginer le changement d'affectation des eaux territoriales ou de la zone de pêche exclusive pour des raisons différentes de celles pour lesquelles elles ont été initialement établies.

Cette exception apparaît donc comme une limite relative à ces deux principes dans le droit tunisien.

86 En effet, lorsqu'une dépendance du domaine public n'est plus utile à l'usage du public ou du service public ou ne correspond plus à la nature qui a justifié son caractère public, elle peut être selon des circonstances et procédures particulières déclassée (C'est à dire sortir du domaine public pour être classé dans le domaine dit " privé " de l'Etat. L'Etat dispose d'une grande latitude de gestion pour son domaine " privé " et peut notamment procéder à des aliénations. Une telle pratique se rencontre surtout sur le domaine public maritime artificiel, en accompagnement les mutations des ports qui s'étendent sur les nouveaux espaces et génèrent parfois des espaces "délaissés".

87 Arrêt du Tribunal administratif, n°994 du 18 février 1985.

88 C.E, 13 octobre 1967, RDP, 1968, p.887.

89 V. article 122 de la loi n° 75-33 portant loi organique des communes.

Dans le droit français par contre, et depuis la loi du 25-7-1994 portant réforme du Code du Domaine de l'Etat90, les concessions d'occupation du domaine public sont constitutives de droits réels.

En effet, une telle utilisation du domaine est avant tout économique et commerciale et les règles de gestion doivent viser à la meilleure utilisation économique du domaine ainsi aménagé.

Ce qui peut justifier d'importantes occupations privatives s'accompagnant d'un régime de redevance lié à l'activité apportée, la reconnaissance des " droits réels " à l'occupant depuis la loi de juillet 1994, et même de la fermeture d'une partie du domaine au public.

Ces principes fondamentaux que sont l'inaliénabilité et l'imprescriptibilité qui interdisent les démembrements de la propriété du domaine public maritime, sont indispensables pour la protection du domaine public en général et du domaine public maritime en particulier.

Toutefois, elles ne sont que relatives et peuvent facilement être détournées par la règle de la désaffectation.

Ces règles ne sont donc pas absolues et ne permettent pas une protection efficace sur un plan préventif, car cette protection préventive du domaine public maritime doit être complétée par l'entretien du domaine public maritime, obligation qui pèse sur l'administration.

90 J.O.R.F, du 26 juillet 1994, p. 10749.

SECTION II : L'ENTRETIEN DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

Le domaine public maritime étant très vaste il est difficile qu'une seule autorité soit chargée de le gérer.

C'est pour cela que la gestion des différentes dépendances du domaine public maritime est éparpillée, hétérogène et confiée à plusieurs structures et organismes à statut variable.

Le domaine public maritime n'en devient que plus
vulnérable, et nécessite encore plus de protection.

Cependant, une gestion partagée si elle venait à être mieux organisée, pourrait lui assurer une meilleure protection et un meilleur contrôle de l'utilisation de ces biens.

Le domaine public maritime artificiel est géré par des organismes sous formes d'établissements publics dotés de la personnalité civile et de l'autonomie financière, ayant le caractère d'un E.P.I.C (l'O.P.N.T pour les ports de commerce ; l'A.P.I.P pour les ports de pêches) à l'exception des ports de plaisance qui relèvent de la tutelle du M.E.H.

Les dépendances du domaine public maritime naturel91 sont ou bien gérées par l'Etat lui-même, ou par les conseils régionaux ou les communes pour les dépendances qu'il est possible d'exploiter sur le plan régional ou communal.

Cependant, la gestion est différente de l'entretien et c'est l'article 27 de la loi n°95-73, qui définit le titulaire de cette obligation.

C'est donc l'administration qui doit entreprendre « . .Les travaux de protection, d'entretien et d'aménagement.. ».

L'obligation qui pèse sur l'administration dans cet article a une nature et un contenu spécial (§1) et pose la question de la charge de son exécution (§2).

91 Loi n°95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime, art. 2 et 3.

§1- CONTENU DE L'OBLIGATION D'ENTRETIEN

L'administration doit conserver aux biens du domaine public la destination qu'ils ont reçue et cela en procédant aux travaux d'entretien nécessaires.

Cette obligation d'entretien protège toutes les dépendances du domaine public et s'applique à celles qui constituent des ouvrages publics, c'est-à-dire aux biens immobiliers qui ont fait l'objet d'aménagements particuliers en vue de leur utilisation par le public92.

L'administration est également tenue d'entretenir les autres dépendances du domaine public qui n'ont reçu aucun aménagement spécial, comme les dépendances du domaine public maritime telles que les rivages de la mer (en ce sens qu'une plage non aménagée ne constitue pas un ouvrage public).93

Cependant, l'administration est parfois exonérée de toute obligation d'entretien.

C'est le cas pour les ouvrages du domaine public qui intéressent la défense contre les eaux, l'Etat n'étant pas tenu d'assurer la protection des propriétés riveraines de la mer ou des cours d'eaux contre l'action naturelle des eaux94.

En droit tunisien, l'art 27 de la loi n° 95-73 pose une obligation d'entretien du domaine public maritime contre toute forme d'empiètement ou de dégradation :

« Le ministère chargé de l'Equipement, entreprend par lui- même ou fait entreprendre sous son contrôle, les travaux de protection, d'entretien et d'aménagement programmés et ce, en collaboration avec le ministère chargé de l'Environnement, les collectivités locales ou avec les personnes physiques ou morales autorisées à utiliser le domaine public maritime, ou avec ceux qui ont réalisé conformément à la législation et à la réglementation en vigueur, des ouvrages avant la promulgation de la présente loi ».

92 Dufau J. : « Le domaine public », t.II, 4éme édition, p. 64.

93 CE 5 avril 1974, Allier, Recueil Lebon p.232.

94 Le Notre J.P. : « La défense des propriétés riveraines de la mer contre l'érosion », Droit, littoral et mer, 1982, n°4 p. 9.

Eu égard aux spécificités de l'espace, objet de l'entretien, son étendue et les moyens dont dispose l'administration, celle ci devant disposer de moyens énormes pour mener à bien cette tache, ce qui n'est pas très évident, si l'on considère les moyens modestes dont elle dispose.

En effet, l'administration ne peut objectivement effectuer une surveillance permanente sur toutes les dépendances du domaine public maritime.

Il est inconcevable qu'elle établisse par exemple des clôtures sur toutes les plages pour les protéger et les entretenir, cela étant contraire au principe de l'affectation à l'usage du public et au principe du libre accès aux plages.

En outre, l'administration ne peut contrôler tous les actes nuisibles au domaine public maritime. Cela étant matériellement impossible, elle peut seulement effectuer un contrôle périodique.

En plus, on ne peut évoquer le manque d'entretien pour invoquer la responsabilité de l'Etat en ce qui concerne les dégâts causés par la nature et on ne peut donc sur cette base exiger de celui-ci de protéger les biens du domaine public maritime adjacents à la mer.

Dans le droit français, cette obligation est imposée sur les propriétaires riverains depuis fort longtemps par le biais des articles 33 et 34 de la loi du 16-09-1807, position qui a été adoptée par la Jurisprudence française95.

En contrepartie, la responsabilité de l'Etat pourrait être invoquée si les dommages subis par les biens des propriétaires riverains résultent des travaux d'entretien, comme dans le cas où les eaux envahiraient un immeuble privé après avoir été détournées suite à ces travaux.

L'entreprise d'entretien du domaine public maritime doit faire partie d'une politique globale de protection du littoral de la pression urbaine et de la pollution maritime et de préservation de son environnement et de sauvegarde de son écosystème.

Ces opérations d'entretien pourraient s'effectuer sous la forme d'opérations d'assainissement des plages et de lutte contre les atteintes qui peuvent la toucher pour faciliter son utilisation collective suivant son affectation.

95 CE 17 mai 1946, Recueil Lebon, p.146.

Ces opérations ne sont cependant pas effectuées par un seul intervenant, le législateur tunisien ayant chargé plusieurs parties de l'obligation d'entretenir le domaine public maritime.

§2- L'EXECUTION DE L'OBLIGATION D'ENTRETIEN

L'article 27 de loi n° 95-73 désigne les ministères chargés de l'équipement96 par le biais de ses services ou sous son autorité pour « entreprendre les travaux de protection, d'entretien, et d'aménagement programmés et ce en collaboration avec le ministère chargé de l'Environnement, les collectivités locales ou avec les personnes physiques ou morales autorisées à utiliser le domaine public maritime... » pour exécuter cette obligation d'entretien.

Cependant , il faut noter que ni l'A.P.A.L, ni même l'A.N.P.E. n'ont été citées dans cette liste établie par l'article 27 de la loi n° 95-73 contrairement à l'art 3 de la loi n° 95-72 qui a octroyé à l'A.P.A.L. des pouvoirs étendus en ce qui concerne la protection du littoral y compris le domaine public maritime97.

Cette discordance entre les 2 textes est un terreau fertile pour les éventuels conflits de compétences entre les différents intervenants.

Néanmoins on pourrait comprendre les termes « ...en

collaboration avec le ministère chargé de l'environnement », que contient le texte comme une implication de l'agence qui est une structure publique sous tutelle du ministère de l'environnement.

96 Le Ministère de l'Equipement et de l'Habitat est chargé de l'administration du domaine public relatif à l'exercice de ses attributions et propose les expropriations entrant dans le cadre de ses activités et il est de même chargé de la délimitation du domaine public maritime.

97 Loi n°95-72 du 24 juillet 1995, portant création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral, art. 3 : « l'agence assure l'exécution de la politique de l'Etat dans le domaine de la protection du littoral en général et du domaine public maritime en particulier.

A cette fin, elle est notamment chargée de :

- la gestion des espaces littoraux et le suivi des opérations d'aménagement et de veiller à leur conformité avec les règles et les normes fixées par les lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de ces espaces, leur utilisation et leur occupation ;

- la régularisation et l'apurement des situations foncières existantes à la date de publication de la présente loi et contraires aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime en particulier et ce conformément à la législation en vigueur et tout en respectant le principe du caractère non saisissable, non susceptible d'hypothèque, inaliénable et imprescriptible du domaine public maritime ;

- l'élaboration des études relatives à la protection du littoral et à la mise en valeur des zones naturelles et entreprendre toutes les recherches, études et expertises à cette fin ;

- l'observation de l'évolution des éco-systèmes littoraux à travers la mise en place et l'exploitation de systèmes informatiques spécialisés.

Il est improbable que l'A.P.A.L. puisse effectuer les opérations d'entretien du domaine public maritime sous le contrôle du ministère de l'Equipement et de l'Habitat qui n'est pas son autorité de tutelle, car elle relève de la tutelle du ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

l'A.P.A.L98 est notamment chargée de la protection du littoral en général et du domaine public maritime en particulier contre les empiètements.

Cela s'effectue d'une manière préventive par la soumission obligatoire de nouvelles implantations et projets d'aménagement à son approbation préalable, et d'une manière curative en ce qui concerne les constructions établies sur le domaine public maritime en violation des lois et règlements, créant des situations foncières à régulariser.

l'A.P.A.L est chargée aussi de la gestion, l'occupation et l'exploitation des espaces littoraux, soit directement, soit indirectement par des personnes publiques ou privées cocontractantes.

L'A.P.A.L est considérée comme un « observatoire du littoral »99 puisqu'elle est chargée du suivi des entreprises d'aménagement et d'équipement et de garantir leur conformité avec les règles et les normes fixées par les lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de ces espaces.

98 Elle a été créée sous forme d'établissement public à caractère industriel et commercial dont l'appartenance à la catégorie entreprise publique n'est pas clairement affirmée par le texte.

99 En France, le développement du tourisme et des industries, l'extension des villes et la diversification de leurs activités ainsi que le souci de protéger la nature sont donc à l'origine de l'élaboration par l'Etat d'une politique globale d'aménagement des espaces littoraux. Cette politique volontariste s'est traduite notamment par la mise en place du Conservatoire de l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres, créé par la loi 75-602 du 10 juillet 1975 insérée dans le code rural.

Cet établissement public à caractère administratif a reçu, au terme de l'art. L.243-1 du Code Rural, "mission de mener, après avis des conseils municipaux intéressés, une politique foncière de sauvegarde de l'espace littoral, de respect des sites naturels et de l'équilibre écologique... ","Il peut présenter aux collectivités publiques toutes suggestions en rapport avec sa mission".

En Angleterre une politique globale d'aménagement des zones littorales a été définie dès 1972 par une circulaire. C'est d'ailleurs l'exemple anglais du National Trust qui a servi de modèle pour la création du conservatoire. Il s'agit d'un organisme dû à une initiative privée, crée en 1895, sous la forme d'une fondation par trois philanthropes, Miss Octavia HILL, Sir Robert HUNTER, et le Chanoine RAUNSLEY. Il bénéficie toutefois de l'appui des pouvoirs publics et une loi de 1907 l'autorise à prononcer l'inaliénabilité de ses propriétés. Il dispose, grâce à la générosité des citoyens, d'un domaine immobilier important, dont l'accès est très largement ouvert. Il réalise également ses deux objectifs de conservation des sites ou des monuments et de mise à la disposition du public grâce à des conventions qu'il conclut avec des propriétaires privés. Si la mission du National Trust dépasse la seule conservation du littoral, celle-ci constitue néanmoins une part importante de son activité et l'a conduit à acquérir 46000 hectares près de la côte, depuis l'opération "Neptune" lancée à partir de 1965.

Toutefois le législateur n'a pas transposé purement et simplement ce "patron" britannique mais a essayé de traduire en termes de droit français les idées qui ont fait la réussite de cette institution en les insérant dans le cadre très classique de l'établissement public national.

Elle est chargée, par ailleurs, d'assurer la sauvegarde et la conservation des zones sensibles.

Elle veille ainsi à la maîtrise des immeubles, soit par l'acquisition à l'amiable, soit, le cas échéant, par leur expropriation par l'Etat à son profit, ou encore par la conclusion d'accords de partenariat avec les propriétaires les obligeant à gérer les terres en question, conformément à un cahier des charges.

Elle a aussi une mission de recherche et d'étude en vue d'observer l'évolution des écosystèmes littoraux et la constitution d'une banque de données informatisée.

Malgré les compétences qui lui ont été attribuées, cette institution souffre du manque de moyens matériels et humains et d'un problème de coordination avec les autres institutions intervenantes en la matière, ce qui ne permet pas à la protection préventive du domaine public maritime d'avoir les résultats escomptés.

En définitive, on peut dire que l'administration peut accomplir un rôle capital en matière de protection du domaine public maritime et limiter ainsi les atteintes et les dégradations qu'il subit.

Seulement, dans le cas où cette protection préventive ne suffirait pas, il serait primordial d'appliquer des moyens de protection répressifs.

CHAPITRE II : LES METHODES REPRESSIVES

Ces méthodes répressives font partie de la protection pénale du domaine public maritime. elle suppose l'encadrement juridique des contraventions, leur constatation et la dissuasion de ceux qui risquent de les commettre.

Cette protection est assurée par une police spéciale, la police de la conservation qui est assortie de sanctions originales : les contraventions de voirie.

La police de conservation est une police spéciale qui renferme l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires destinées à préserver l'intégrité matérielle de certaines dépendances du domaine public et l'usage auquel elles sont affectées100.

La police de conservation ne s'exerce que sur le domaine public et uniquement dans les cas où elle a été prévue par des textes spéciaux.

Elle vise à protéger son intégrité matérielle et elle revêt essentiellement un caractère patrimonial.

Les infractions à la police de conservation constituent des contraventions de voirie.

Cette police, qui est assortie de sanctions pénales, n'est pas attachée à la propriété du domaine public, mais à son affectation.

En effet, en cas de mutation domaniale -opération qui n'entraîne aucun transfert de propriété-, c'est la collectivité publique, bénéficiaire de la mutation, qui est chargée de la police de la conservation et non pas la collectivité propriétaire du domaine.

L'administration propriétaire du domaine public a droit de prendre toutes les mesures nécessaires en vue d'assurer la conservation de son domaine, alors même qu'aucun texte ne lui donne de compétence à cet effet.

Mais de telles mesures ne constituent pas nécessairement des mesures de police de la conservation. Seules méritant cette qualification, celles d'entre elles qui comportent des sanctions pénales particulières prévues par un texte.

100 Dufau J., T II, op. cit., p.13.

L'administration dispose de plein droit d'un « pouvoir de conservation » qui lui permet d'édicter toutes mesures -réglementaires ou individuelles- pour préserver l'intégrité de l'ensemble des biens faisant partie de son domaine public.

En revanche « la police de la conservation » ne peut s'exercer qu'a l'égard des biens domaniaux qui bénéficient, en vertu de textes spéciaux, de la protection pénale du régime des contraventions de voirie.

D'après les dispositions de la loi n° 95-72 portant création de l'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral et les dispositions de la loi n°95-73 relative au Domaine Public Maritime, l'organisation de cette police concerne essentiellement les autorités compétentes pour mettre en mouvement les poursuites d'un côté (Section 1) et le domaine de la police, à savoir le genre d'infractions qui lui sont rattachées (Section 2).

SECTION 1 : LES AUTORITES COMPETENTES

La police de la conservation crée des obligations à la charge des autorités administratives chargée de les mettre en oeuvre et notamment de faire usage des pouvoirs que leurs confèrent les textes pour faire cesser la situation irrégulière qui compromettrait l'usage normal du domaine public101.

Cette protection répressive du domaine public maritime que constitue la police de conservation est définie par « Auby » et « Bon » comme étant des pouvoirs qui permettent à l'administration de prendre des mesures de police qui garantissent la conservation des composantes du domaine public102.

« Chapus », quant à lui, estime que la police de conservation vise la protection de l'entité matérielle des composantes du domaine public maritime et le respect de leur affectation .

103

En principe, la compétence de rechercher et de constater ces infractions revient aux officiers de police judiciaire (§1) et aux agents de l'administration compétents en vertu de lois spéciales (§2).

§1- LES OFFICIERS DE POLICE JUDICIAIRE

La liste des officiers de police judiciaire est établie par l'article 10 du code de procédure pénale qui les charge de constater les infractions, d'en rassembler les preuves, d'en rechercher les auteurs et de les livrer aux tribunaux104 dans les limites de leur compétence territoriale.

Cette liste comprend :

- Les procureurs de la République et leurs substituts. - Les juges cantonaux.

- Les commissaires de police.

- Les officiers de police et les chefs de poste de police. - Les officiers, les sous-officiers et chefs de poste de la garde nationale.

- Les cheikhs.

101 Op. cit., p. 15

102 Auby J.M et Bon P. : « Droit administratif des biens », p. 134.

103 Chapus R. : « Droit administratif général », p. .357.

ö

104 Article 9 du code de procédure pénale.

- Les agents des administrations qui ont reçu en vertu de lois spéciales le pouvoir de rechercher et de constater par des procès-verbaux certaines infractions

- Les juges d'instruction dans les cas prévus par le code de procédure pénale.

Un problème se pose concernant les officiers de police judiciaire qualifiés pour constater les infractions touchant le domaine public maritime.

En effet, l'article 4 alinéa 2 de la loi n°95-72 donne d'un côté à tous les officiers de police judiciaire la compétence de constater les infractions. Cet article dispose : « ...en plus des officiers de la police judiciaire et des agents de l'administration qui sont habilités par des lois spéciales, les infractions aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime sont constatés dans des procès verbaux rédigés par des agents et des experts-contrôleurs assermentés et habilités à cette fin par le ministère chargé de l'Environnement... ces agents et experts- contrôleurs exercent les fonctions de police judiciaire conformément aux dispositions du code de procédure pénale».

L'article 31 de la loi n°95-73 a chargé d'un autre côté uniquement les officiers de police judiciaire cités dans les alinéas 1,2,3 et 4 de l'article 10 du code de procédure pénale105, de « rechercher et de constater toutes les infractions aux dispositions de la présente loi, d'en dresser procès-verbaux qu'ils transmettent au ministère public, et aux ministères chargés des Domaines de l'Etat, de l'équipement, de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire ».

Les divergences entre les deux textes sont évidentes, mais incompréhensibles du fait qu'ils ont été discutés et approuvés durant la même période.

D'autre part, le fait de déclarer que la constatation des infractions qui touchent le littoral est de la compétence de tous les officiers de police judiciaire cités par l'article 10 du code de procédure pénale (comme l'a établi l'art. 4 alinéa 2 de la loi n°95-72), tandis que les officiers cités par les quatre premiers alinéas de ce même article 10 (comme l'a souligné l'art. 31 de la loi n°95-73), sont compétents pour constater les infractions qui touchent le domaine public maritime, est contraire à la réalité.

105 Ce sont les procureurs de la République et leurs substituts, les juges cantonaux, les commissaires et officiers de police, les chefs de poste de police, les officiers, les sous-officiers et les chefs de poste de la garde nationale.

En effet, l'article 4 de la loi n° 95-72 a étendu la compétence à tous les officiers de police judiciaire pour constater «...les infractions aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime... ».

L'application des dispositions de la loi n°95-72 s'impose dans ce cas pour des raisons diverses, dont l'étendue du domaine d'application de la police de conservation du domaine public maritime, qui doit être appuyé par le plus grand nombre de structures répressives.

Cependant, les conséquences des contradictions entre ces deux textes sont minimes, car si une infraction à la réglementation relative au domaine public maritime est constatée par les cheikhs ou les juges d'instruction, et que le contrevenant invoque la nullité du procès-verbal devant le juge, en raison de sa violation des dispositions de l'article 31 de la loi n°95-73, l'administration peut invoquer les termes de l'art 4 de la loi n°95-72 et sa position sera juridiquement fondée.

Néanmoins, les officiers de la police judiciaire n'ont pas le monopole de la recherche et de la constatation des infractions touchant le domaine public maritime, cette compétence est étendue à d'autres agents administratifs en vertus de quelques lois spéciales.

§2- LES AGENTS ADMINISTRATIFS COMPETENTS EN VERTU DE LOIS SPECIALES

Ces agents administratifs compétents en vertu de lois spéciales sont évoqués aussi bien dans la loi n°95-72, que dans la loi n°95-73.

Selon l'article 4 de la loi n° 95-72, en plus des officiers de la police judiciaire et des agents de l'Administration qui sont habilités par des lois spéciales, les infractions aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime sont constatées dans des procès verbaux rédigés par des agents et des experts-contrôleurs assermentés et habilités à cette fin par le ministère chargé de l'Environnement parmi les agents classés dans une catégorie équivalente au moins à la catégorie «A» visée dans la loi n°83-112 du 12 décembre 1983 portant statut général des personnels de l'Etat, des collectivités publiques locales et des établissements publics administratifs.

Ces agents et experts-contrôleurs exercent les fonctions de police judiciaire conformément aux dispositions du Code de Procédure Pénale.

Quant à l'article 31 de la loi n°95-73, il contient une liste de ces agents compétents qui sont :

« ... Les agents techniques assermentés dûment habilités à cet effet et relevant du ministère de l'Equipement ; les agents assermentés dûment habilités à cet effet et relevant du ministère chargé de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire ; les agents assermentés dûment habilités à cet effet et relevant du ministère chargé des Domaines de l'Etat et des affaires Foncières ; les agents de la santé publique assermentés dûment habilités à cet effet et relevant du ministère de la Santé Publique ; les experts-contrôleurs relevant de l'Agence Nationale de la Protection de l'Environnement assermentés et dûment habilités à cet effet ; les agents chargés du contrôle des règlements municipaux... ».

Il faut rappeler que le décret Beylical du 18 août 1926 relatif à la protection et la conservation du domaine public maritime chargeait les agents de la douane et des forêts de constater ces infractions.

Le législateur n'a pas jugé utile de conserver ces deux catégories d'agents dans la liste établie par la loi n°95-73, bien qu'ils aient pu être très utiles au regard de leurs compétences et de leur expérience dans la recherche et la constatation des infractions et la rédaction des procès-verbaux, et aussi de leurs prérogatives, qui sont en relation étroite avec le domaine public maritime.

Ces autorités compétentes pour engager les poursuites ont un domaine limité. En effet, ils ne peuvent dépasser les champs d'action établis pour la police de la conservation.

SECTION 2 : DOMAINE DE LA POLICE DE CONSERVATION DU DOMAINE PUBLIC MARITIME

Le champs d'action de la police de conservation du domaine public maritime englobe les infractions à la réglementation relative au domaine public maritime.

Ces infractions, c'est-à-dire les faits susceptibles de compromettre l'intégrité matérielle des biens du domaine public maritime ou de nuire à l'usage auquel ces biens sont légalement destinés, sont réprimées par des sanctions spéciales appelées : Contraventions de grande voirie.

La contravention de grande voirie n'a pas uniquement pour but de sanctionner le contrevenant, elle vise surtout à réparer le dommage causé au domaine public.

D'une manière générale, on peut dire que toute occupation sans titre du domaine public, même lorsqu'elle est réalisée sans emprise, constitue une contravention de grande voirie dès lors que cette occupation est contraire à un texte ayant pour objet d'assurer la protection de ce domaine106.

La contravention de grande voirie présente un caractère matériel. L'absence d'élément intentionnel de la part du contrevenant ne constitue pas une cause d'exonération. La responsabilité de celui-ci est engagée dès lors que la matérialité de l'atteinte au domaine public est établie107.

Cependant, la contravention de grande voirie n'implique pas nécessairement un acte positif, elle peut résulter d'une négligence ou d'une abstention, notamment d'une absence d'entretien d'un ouvrage domanial108.

Les seules causes d'exonération susceptibles d'entraîner la relaxe des poursuites sont la force majeure et la faute de l'administration assimilable à un cas de force majeure109.

Les contraventions de grande voirie donnent lieu à trois sortes de condamnations alternatives ou cumulatives et qui présentent de nombreuses singularités par rapport au droit pénal et qui sont:

- L'amende

106 Dufau J., op. cit. p. 37.

107 Op. cit. p. 50.

108 Pacteau B. : « Le fait de l'administration, cause exonératoire de contravention de grande voirie », RFDA 1986 p. 188.

109 Dufau J., op. cit. p 52.

- Le paiement des frais du procès-verbal

- La réparation des dommages causés au domaine public.

Le régime des contraventions de grande voirie contient d'autres règles totalement étrangères au droit pénal ordinaire qui confèrent à ce type d'infractions un particularisme très accentué. Parmi les principaux éléments de ce particularisme on peut relever :

- la non-application de la règle non bis in idem, de sorte que la condamnation par le juge répressif ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif prononce en considérant les mêmes faits une condamnation pour contravention de grande voirie.

- La possibilité de cumuler les amendes en cas de pluralité de contraventions.

- L'application de la prescription et de l'amnistie à la seule amende et non à la réparation en raison de la règle de l'imprescriptibilité du domaine public.

- La possibilité de transiger.

- Le caractère matériel de l'infraction et la conception purement objective de la responsabilité : le juge ne se préoccupe pas de la qualité du prévenu ; la condamnation peut être prononcée à l'encontre d'une personne morale110.

En définitive, les contraventions de grande voirie constituent une infraction de caractère spécifique qui est beaucoup plus proche de la sanction administrative que de l'infraction pénale de droit commun

Ces infractions sont différentes des infractions prévues par l'article 14 du code pénal que sont les contraventions et qui sont punissables d'une peine allant de 1 à 15 jours de prison et d'une amende ne dépassant pas 60 dinars.

Elles concernent les infractions dues à la violation des lois organisant le domaine public et les règlements y afférents, ces violations peuvent constituer un crime, un délit ou une simple contravention selon les termes de l'article 14 du code pénal.

110 Op. cit. , p. 64

Plusieurs textes définissent les conditions d'exercice de la police de conservation du domaine public maritime, certains revêtent un caractère général (§1) et d'autres ont un caractère qui peut être qualifié de spécial (§2).

§1- LES TEXTES A CARACTERE GENERAL

Le police de conservation du domaine public maritime sanctionne tous les agissements susceptibles de causer sa détérioration soit par « jet et dépôt de matériaux nuisibles » ou par « extraction de matériaux » sur ce domaine et ses dépendances111.

Ces textes112 accordent aux autorités administratives compétentes113 le droit d'édicter des mesures assorties de sanctions pénales afin de préserver l'intégrité matérielle du domaine public et l'usage auquel celui-ci est affecté.

- La loi n° 95-73 relative au domaine public maritime prévoit dans son art. 28, plusieurs infractions qui sont l'atteinte à l'équilibre écologique ou le déversement de produits nuisibles en milieu marin et susceptibles de faire obstacle au développement économique ou touristique, les sanctions prévues contre ces agissements sont très sévères114.

Cet article 28 dispose : « nonobstant les dispositions de l'article 164 du code pénal, l'auteur d'actes d'usurpation ou de dégradation affectant le domaine public maritime et en général de tout acte qui porte atteinte ou qui est de nature à porter préjudice à l'intégrité de ce domaine et des ouvrages qu'il comporte ou à son équilibre écologique, à modifier l'emplacement de ces ouvrages ou à leur occasionner des détériorations, est puni peine d'emprisonnement de 16 jours à une année et d'une amende entre 100 dinars et 50000 dinars ou de l'une de ces deux peines seulement. En cas de récidive la peine susvisée est portée au double».

111 Décret Beylical du 25 juillet 1897, portant sur la police de conservation du domaine public.

Décret Beylical du 18 août 1926, réglementant la police et la conservation du domaine public maritime.

112 Décret Beylical du 18 août 1926, réglementant la police de conservation du domaine public maritime.

113 La gestion de ce domaine demeure de la compétence du ministère de l'équipement.

114 Les sanctions comprennent l'emprisonnement de 16 jours jusqu'à 1 an, et des amendes pouvant aller de 100 d à 50000 d. ces sanctions sont portées au double en cas de récidive.

L'article 28 puni toute personne qui commet des « actes d'usurpation et de dégradation » et non toute personne qui provoque le préjudice intentionnellement.

Sur cette base, l'infraction est constatée dés la survenance de l'acte préjudiciable et du préjudice sans obligation de rechercher l'existence de l'élément intentionnel, ce qui est compatible avec la politique législative en matière d'infractions environnementales et essentiellement les plus dangereuses d'entres-elles.

Seulement, il apparaît que cet article peut être étendu à tous les actes qui portent atteinte ou qui sont de nature à porter préjudice à l'intégrité de ce domaine et des ouvrages qu'il comporte ou à son équilibre écologique, à modifier l'emplacement de ces ouvrages ou à leur occasionner des détériorations.

C'est une position que certains jugent excessive, car il est important de prendre en considération l'élément intentionnel dans ces infractions si elles s'avèrent être d'une nature non environnementale d'un côté et si, d'un autre côté, elles sont commises par erreur et sans préméditation.

En outre, le législateur même s'il a cité le cas de récidive à la fin de l'article où la peine est doublée, il a cependant omis de réprimer la tentative, ce qui est incompréhensible vu la gravité des actes signalés par l'article 28, surtout celles ayant un caractère environnemental.

Ce qui retient l'attention dans l'article 28 ce sont les termes très généraux utilisés « usurpation », « dégradation » et tous les actes nuisibles en général et tout ce qui nuit à l'équilibre naturel sans citer d'exemples pouvant aider dans la compréhension de la logique du législateur.

Ce caractère général des termes de l'article est incompatible avec l'esprit législatif en matière pénale qui suppose la précision et la présence de tous les éléments (légal, matériel, intentionnel) spécifiques à l'infraction, ce qui engendre quelques difficultés dans son application par le juge.

Le problème s'accentue pour les contraventions minimes, car le fait de jeter une cigarette sur la plage et de répéter cet acte par d'autres individus est un acte qui porte atteinte au domaine public maritime et est préjudiciable à son équilibre naturel, mais il est inconcevable d'appliquer des peines aussi lourdes que celles prévues par l'article 28 sur celui qui commet pareils actes.

Cela reste soumis à l'appréciation des agents de la police de conservation du domaine public maritime dans leur constatation de l'infraction, du ministère public en cas de poursuites et du juge en cas de procès.

Plusieurs critères peuvent être utilisés comme les usages et les coutumes puisque le législateur parle de l'usage courant du domaine public maritime115.

En réalité et concernant les infractions de nature environnementale qui touchent le domaine public maritime, la jurisprudence applique sa position dominante en la matière qui est d'alourdir la sanction toutes les fois où le dommage qui atteint l'écosystème ne peut être réparé et l'atténuer toutes les fois où les dégâts peuvent être réparés sans dommages pour le domaine public maritime.

A coté de ces textes généraux et particulièrement de cet article 28 de la loi n° 95-73, il existe certains textes spéciaux réglementant la police de conservation du domaine public maritime.

§2- LES TEXTES A CARACTERE SPECIAL

Parmi les textes à caractère spécial le code de l'exercice de la pêche, notamment dans ses articles 7,9,10,11 et 12116, prévoit d'importantes mesures protectrices du milieu marin et de ses ressources biologiques.

Ainsi, de larges pouvoirs de police sont dévolus aux services du ministère de l'Agriculture qui contrôlent la nature du matériel utilisé dans la pêche, les zones de pêche ainsi que les périodes d'exercice de cette activité, ces pouvoirs sont consolidés par des sanctions pénales très dissuasives.

115 V. article 21 de la loi n° 95-73

116 Loi n° 94-13 du 31 janvier 1994, relative à l'exercice de la pêche, JORT, 8 février 1994, p.227.

Aussi, on peut citer la législation sur les établissements dangereux, incommodes et insalubres117, qui soumet ces établissements à un système de surveillance administrative sur la base de normes administratives de classement118.

L'administration est dotée d'un large pouvoir de surveillance et de contrôle en matière de lotissement industriel par la législation relative aux lotissements industriels119 en les soumettant à un cahier des charges type, comprenant un titre relatif à la protection de l'environnement et à l'assainissement, instituant ainsi une obligation de traitement des déchets dangereux avant déversement.

L'étude d'impact prévue par la loi n°91 de 2 août 1988, portant création de l'Agence Nationale de la Protection de l'Environnement120 dont les conditions de mise en oeuvre ont été précisées par le décret n° 362 du 13 mars 1991, pourrait éventuellement, servir de moyen de prévention contre les atteintes à l'environnement121.

Le code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme (C.A.T.U) dans son art. 7, a prévu l'étude d'impact avant l'établissement des plans d'aménagement de détail.

Enfin, plusieurs textes ont réglementé les déversements marins122, ces mesures participent à la prévention de la pollution tellurique du milieu marin en imposant une obligation de traitement préalable des déchets industriels et urbains soit en collaboration avec l'office national d'assainissement123, soit dans des circuits propres aux unités industrielles déversant des déchets industriels dans la nature.

117 Loi n°66-27 du 3 avril 1966, portant code du travail. D. n°88 du 28 mars 1968.

118 Moussa S., op. cit.

119 Décret du 29 février 1984, portant réglementation des lotissements industriels. On peut citer, dans ce cadre, la loi n° 94-16 du 31 janvier 1994, relative à l'aménagement et à la maintenance des zones industrielles. JORT du 8 février 1994.

120 La loi n°91 de 2 août 1988, portant création de l'agence nationale de la protection de l'environnement dans son art. 5, indique qu'une étude d'impact sur l'environnement doit être présentée à l'agence avant la réalisation de toute unité industrielle, agricole ou commerciale dont l'activité présente, de par sa nature ou en raison des moyens de production ou de transformation utilisés ou mis en oeuvre des risques de pollution ou de dégradation de l'environnement.

121 Moussa S., op. cit.

122 Loi du 31 mars 1975, portant code des eaux dans ses articles 107 et 108, relatifs aux effets nuisibles de l'eau. Décret du 2 janvier 1985, réglementant les rejets dans le milieu récepteur.

Décret n° 904-2050 du 3 octobre 1994, fixant les conditions de raccordement aux réseaux publics d'assainissement dans les zones d'intervention de l'ONAS.

123 Loi n° 93-41 du 19 avril1993, relative à l'office national de l'assainissement et abrogeant la loi n° 73 du 3 août 1974.

En plus de ces infractions qui portent atteinte à l'intégrité matérielle du domaine public maritime, d'autres infractions peuvent être commises sur le domaine public maritime et sont du domaine du droit pénal.

Certaines infractions commises sur le domaine public maritime sont du domaine du droit pénal comme l'infraction d'ivresse évidente124 qui est contraire à l'affectation du domaine public maritime puisque contraire au principe de l'utilisation commune dans le respect de la tranquillité, de la salubrité, de la sécurité et de l'ordre public du domaine public maritime125.

Néanmoins, cette généralisation est dangereuse car elle conduirait à considérer que toutes les infractions du code pénal touchent le domaine public maritime si elles y sont commises.

Il faut donc choisir certains critères qui permettent de distinguer les infractions liées au domaine public maritime de celles qui ne le sont pas.

En ce sens, pourrait être considérée comme liée au domaine public maritime l'infraction prévue par l'article 286 code pénal par exemple, qui n'écarte pas le domaine public de son champs d'application et qui dispose : « Quiconque, pour prendre possession de tout ou partie de la chose immobilière d'autrui, en enlève, déplace, supprime ou modifie, soit, les bornes, soit, les limites naturelles ou faites de main d'homme, est puni de l'emprisonnement pendant un an et d'une amende de 500 francs... ».

Ou bien l'article 292 code pénal qui peut être appliqué au domaine public et donc au domaine public maritime et qui dispose : « est assimilé à l'escroquerie et puni des peines prévues à l'art précédent (emprisonnement de 5 ans et amende de 10000 francs), le fait : de vendre, hypothéquer, mettre en gage ou louer des biens dont on n 'a pas le droit de disposer... ».

On pourrait aussi citer les infractions d'attentat contre l'intégrité matérielle du domaine public organisées par les articles 160 à 164 code pénal qui a prévu des peines d'emprisonnement allant de 1 à 10 ans et qui peuvent être appliquées au domaine public maritime.

124 Article 317 alinéa 2 du code pénal.

125 Loi n°95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime : «L'utilisation commune du domaine public maritime est libre, égalitaire et gratuite. Elle se limite à l'usage courant selon les usages et les coutumes, dans le respect de la tranquillité, de la salubrité, de la sécurité, de l'ordre public et de la protection de l'environnement ».

CONCLUSION GENERALE

Le domaine public maritime connaît des formes d'utilisation diverses, générale et commune qu'organisent les règles de police administratives, ou bien privative et exclusive nécessitant une autorisation préalable de l'administration ou de contracter avec elle suivant les cas, ce qui a conduit dans certains droits comparés à privatiser le domaine public maritime comme c'est le cas dans le droit français.

Dans le droit tunisien, il a découlé des diverses formes d'exploitation auxquelles a été soumis le domaine public maritime pendant longtemps, en l'absence d'une police de conservation efficace, une dégradation de parties du domaine public surtout les rivages en raison de l'érosion, et l'eau de mer en raison de la pollution.

Ces dégradations ont touché aussi les différentes composantes du domaine public maritime en raison notamment de l'absence d'informations fiables et exactes sur son étendue et sur ses frontières.

Pour toutes ces raisons une étude de la situation a été effectuée, il en a résulté un plan national de protection du domaine public maritime avec quelques efforts d'entretien et de conservation.

La protection s'est basée sur la promotion du cadre matériel du domaine public maritime, en luttant contre les causes de sa dégradation, que sont les atteintes à son intégrité matérielle et à son écosystème.

Elle s'est traduite aussi par sa protection contre l'effritement et contre l'urbanisation sauvage par sa délimitation et par un contrôle strict de son occupation et la maîtrise de son aménagement, d'une manière, qui prend en compte ses spécificités environnementales et naturelles essentiellement.

Les moyens de protection adoptés quant à eux, sont, ou bien préventifs, ou bien répressifs, avec un aspect de rigueur, comme gage de la volonté du législateur de dissuader les contrevenants de nuire au domaine public maritime, avec cependant, des difficultés dans l'application de cette protection.

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GE NERAL E..................... ..................2

Première partie: le domaine de la protection du domaine public maritime 8

Chapitre 1 : La protection de l'environnement marin et côtier du domaine public maritime 11

Section 1 : la protection du domaine public
maritime contre l'érosion 13

§1- origines du phénomène de l'érosion 13

§2- les moyens de lutte contre

l'érosion 14

Section 2 : la protection du domaine public

maritime contre la pollution 18

§1- origines de la pollution marine 19

§2- la lutte contre la pollution marin 21

Chapitre 2 : La protection de l'espace territorial du domaine public maritime 25

Section 1 : Le contrôle strict de l'occupation du domaine public maritime 26

§1- la protection du domaine public maritime contre les occupants sans titre 28

§2- l'organisation de l'occupation du

domaine public maritime 29

Section 2 : La maîtrise de l'aménagement du littoral 33

§1- les schémas directeurs d'aménagement 35

§2- les plans d'aménagement urbain.............36

Deuxième Partie : les méthodes de protection du domaine public maritime 41

Chapitre I : les méthodes préventives 42

Section 1 : l'adoption des principes fondamentaux de protection 42

§1- utilité des règles d'inaliénabilité et d'imprescriptibilité du domaine public maritime 43

§2- limites de l'inaliénabilité et de l'imprescriptibilité du domaine public maritime 46
Section II : l'entretien du domaine public

maritime 48

§1- contenu de l'obligation d'entretien 49

§2- l'exécution de l'obligation d'entretien 51

Chapitre II : les méthodes répressives 54

Section 1 : les autorités compétentes 56

§1- les officiers de police judiciaire 56

§2- les agents administratifs compétents en vertu de lois spéciales 59
Section 2 : domaine de la police de conservation

du domaine public maritime 61

§1- les textes à caractère général 63

§2- les textes à caractère spécial 65

Conclusion générale 68

BIBLIOGRAPHIE

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Pacteau B. : « le fait de l'administration : cause exonératoire de contravention de grande voirie », RFDA 1986.

Prieur Michel : « Droit de l'environnement », 3ème éd., Précis Dalloz, Toulouse, 1991.

Ravenel B. : « Méditerranée : Le Nord contre le sud », Paris, Harmattan 1992.

Romi Raphaël. : « Droit et administration de l'environnement », Montchrestien, Paris,1996.

THESES ET MEMOIRES

Attar Z. : « le cadre juridique des pêches maritimes en Tunisie », Mémoire pour le D.E.A. de droit public, FDSPT, Tunis 1989.

Ben Cheikh Ahmed-Dellagi H. : « Le domaine public maritime », Mémoire pour le DEA de droit public et financier, FSJPST, 1995-1996.

Bennour Ezzedine : « l'encadrement juridique du littoral », Mémoire pour le DEA de droit public, FDSPT, 1989.

Hafsi Abdelmajid : « la Tunisie face à la pollution marine », Mémoire pour le DEA de sciences politiques, FDSPT, 1990.

Jenayeh Ridha : « la pollution des mers par les tankers et le droit international », mémoire pour le DESS de droit public, FDSPT, 1974.

Ribard François : « Dualité du régime juridique des Paysages », Mémoire pour le DEA de Droit de l'environnement, université Paris II, Panthéon Assas, 1998.

ARTICLES

Becet J.-M. : « Vers une véritable politique d'urbanisme littoral », AJDA 20 mai 1993, n° spécial.

Belhédi A. : « l'organisation de l'espace en Tunisie », publication de la faculté des sciences sociales et humaines de Tunis, 1992.

Bouachba T. : « Cours de droit administratif des biens publics », 1999 (non publié).

Bouraoui Soukeina : « Faut-il un droit pénal de

l'environnement ? », Revue Tunisienne de Droit, 1988.

Caillosse Jacques : « plaidoyer pour le domaine public maritime naturel », Revue Juridique de l'environnement, 1990-4.

Chikhaoui L. : « la protection de l'environnement en Tunisie », R.T.D. 1993.

« le cadre légal des pollutions marines », R.T.D 1997.

Hayder A. : « l'industrialisation à Gabès et ses conséquences », Pub. De l'université de Tunis 1986.

Kiss A. : « le droit international à Rio de Janeiro et à côté de Rio de Janeiro », R.J.E. 1993-1.

Lavialle : « L'occupation sans titre du domaine public », AJDA 1981.

Le Notre J.P. : « la défense des propriétés riveraines de la mer contre l'érosion », Droit, littoral et mer, 1982 n°4, p. 9.

Morand-Deviller J. : « Renforcement de la protection de l'environnement », AJDA, 20 Juin 1995.

Moussa S. : « la protection de l'environnement sur le domaine public maritime », A.J.T, numéro spécial, 1997.

Pacteau B. : « Formes et tendances de la protection du littoral maritime contre les pollutions », A.J.D.A. décembre 1978.

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Prieur M. : « le droit à l'environnement et les citoyens : la participation ». R.J.E. 198 8-4.

Romi R. : « Espaces Naturels et Littoral, Acteurs, Enjeux, Outils », Les Petites Affiches, 2 Janvier 1995.

Yousry L. : « La Loi littoral et le juge administratif », RFDA 1992.

RAPPORTS ET DOCUMENTS OFFICIELS

- Rapport au parlement français sur l'application de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986, relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral et sur les mesures spécifiques prises en faveur du littoral, février 1999.

- Etat de l'environnement. Rapport annuel sur l'environnement, années 1994, 1995, 1996. Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

- Programme d'action national de l'environnement et du développement durable pour le XXIème siècle. Agenda 21 national. Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

COLLOQUES

- Colloque : « environnement et érosions littorales à Djerba », Djerba, juin 1980.

- Colloque : « Développement urbain et ressources en eau dans les petites villes côtières historiques », Mahdia, juin 1999.

- Colloque : « Mer et littoral : couple à risques », Colloque organisé par le Ministère de l'environnement français, Biarritz, septembre 1987, La documentation française p. 23 à 48.

DECRET ET LOIS

Décret Beylical du 24 septembre 1885 relatif au domaine public.

Décret Beylical du 25 juillet 1897, portant sur la police de conservation du domaine public.

Décret Beylical du 18 août1926, réglementant la police et la conservation du domaine public maritime.

Décret n° 58-1463 du 31 décembre 1958 relatif aux plans d'urbanisme.

Décret n°68-88 du 28 mars 1968.

Décret du 29 février 1984, portant réglementation des lotissements industriels.

Décret du 2 janvier 1985, réglementant les rejets dans le milieu récepteur.

Décret n° 904-2050 du 3 octobre 1994, fixant les conditions de raccordement aux réseaux publics d'assainissement dans les zones d'intervention de l'ONAS.

Décret 93-2061 du 11 octobre 1993 portant création de la Commission Nationale pour le Développement Durable, tel que modifié par le décret 94-253 8 du 12 décembre 1994 et par le décret 95-1037 du 12 juin 1995

Décrets n°20-21 de 1993 du 25 octobre 93, J.O.R.T n°83 du 02 novembre1993 p.1857.

Décret 99-2253 du 11 octobre 1999, portant approbation du règlement général d'urbanisme.

Loi n°66-27 du 3 avril 1966, portant code du travail, modifiée

par.

Loi 75-16 du 31 mars 1975 portant promulgation du code des eaux, telle que modifiée par la loi 87-3 5 du 6 août 1987 et par la loi 88-94 du 2 août 1988

Loi n° 76-1286 du 31 décembre 1976, dont les modalités d'application ont été fixées par le décret n° 77-753 du 7 juillet 1977.

la loi n°77-29 du 25 mai 1977 qui a ratifié la convention de Barcelone relative à la protection de la Méditerranée contre la pollution, 26 mai 1976.

Loi du 3 janvier 1986, relative à aménagement, la protection et

la mise en valeur du littoral, JORF, 4 janvier 1986, p. 200 et s.

Loi 8 8-20 du 13 avril 1988 portant refonte du code forestier

Loi n°91 de 2 août 1988, portant création de l'agence nationale

de la protection de l'environnement.

Loi n° 93-41 du 19 avril1993, relative à l'office national de l'assainissement et abrogeant la loi n° 73 du 3 août 1974.

Loi n° 94-13 du 31 janvier 1994, relative à l'exercice de la pêche, JORT, 8 février 1994, p.227. (modifiée par la loi 97-34 du 26 mai 1997)

Loi n° 94-16 du 31 janvier 1994, relative à l'aménagement et à la maintenance des zones industrielles. JORT du 8 février 1994.

Loi 94-35 du 24 février 1994, relative au code du patrimoine archéologique, historique et des arts traditionnels

Loi n°94-122 du 28 novembre 1994, portant promulgation du code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme.

Loi n° 95-72 du 24 juillet 1995 portant création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral.

Loi n° 95-73 du 24 juillet 1995, relative au domaine public maritime,

Loi 96-29 du 3 avril 1996, instituant un plan national d'intervention d'urgence pour la lutte contre les pollutions marines.

ANNEXES

LISTE DES PRINCIPAUX DOCUMENTS UTILISES

1/ DOCUMENTS OFFICIELS

-- Etat de l'environnement. Rapport annuel sur l'environnement, années 1994, 1995, 1996. Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

-- Programme d'action national de l'environnement et du développement durable pour le XXIème siècle. Agenda 21 national. Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

2/ TEXTES OFFICIELS

* PRINCIPAUX ETABLISSEMENTS PUBLICS

-- Loi 88-9 1 du 2 août 1988, portant création de l'Agence Nationale de Protection de l'Environnement, telle que modifiée par la loi 92-115 du 30 novembre 1992

-- Loi 93-41 du 19 avril 1993 portant refonte de la législation relative à l'Office National de l'Assainissement

-- Loi 95-72 du 24 juillet 1995, portant création de l'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral

-- Loi 85-92 du 22 novembre 1985 ratifiant le décret-loi 85-8 du 14 septembre 1985 portant création de l'Agence de Maîtrise de l'Energie

-- Loi 88-11 du 25 février 1988 portant création de l'Agence Nationale de Mise en Valeur et d'Exploitation du Patrimoine Archéologique et Historique

- Loi 76-6 du 7 janvier 1976 portant création de l'Institut des Régions Arides

* ORGANISME CONSULTATIF EN MATIERE DE DEVELOPPEMENT DURABLE

-- Décret 93-2061 du 11 octobre 1993 portant création de la Commission Nationale pour le Développement Durable, tel que modifié par le décret 94-253 8 du 12 décembre 1994 et par le décret 95-1037 du 12 juin 1995

* Principaux textes organisationnels de secteurs ou d'activités

-- Loi 75-16 du 31 mars 1975 portant promulgation du code des eaux, telle que modifiée par la loi 87-35 du 6 août 1987 et par la loi 88- 94 du 2 août 1988

-- Loi 88-20 du 13 avril 1988 portant refonte du code forestier

-- Loi 94-13 du 31 janvier 1994 relative à l'exercice de la pêche, telle que modifiée par la loi 97-34 du 26 mai 1997

-- Loi 94-35 du 24 février 1994, relative au code du patrimoine archéologique, historique et des arts traditionnels

-- Loi 94-122 du 29 novembre 1994, portant promulgation du code de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme

DECRET N° 93-303 DU 1ER FEVRIER 1993

FIXANT LES ATTRIBUTIONS DU MINISTERE DE L'ENVIRONNEMENT
ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE

Le Président de la République;

Sur proposition du ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire;

Vu la loi n° 88-91 du 2 août 1988 portant création de l'Agence nationale pour la protection de l'environnement telle que modifiée par la loi n° 92-115 du 30 novembre 1992;

Vu le décret n° 87-779 du 21 mai 1987 portant organisation du ministère de l'Agriculture;

Vu le décret n° 88-1413 du 22 juillet 1988 portant organisation du ministère de l'Equipement et de l'Habitat;

Vu le décret n° 91-1071 du 20 juillet 1991, portant organisation du ministère de l'Economie Nationale;

Vu le décret n° 92-1098 du 9 juin 1992 portant nomination du ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire;

Vu l'avis du ministre d'Etat, ministre de l'1ntérieur, des ministres des Finances, de l'Economie Nationale, du Plan et du Développement Régional, de l'Agriculture et de l'Habitat;

Vu l'avis du Tribunal Administratif;

Décrète :

ART1CLE PREM1ER. -- Le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est chargé de proposer en collaboration avec les ministères et organismes concernés, la politique de l'Etat dans le domaine de la protection de l'environnement et de la nature, de l'amélioration du cadre de vie et de l'aménagement du territoire et de veiller à sa mise en oeuvre.

1l est chargé de promouvoir la législation en matière de protection de l'environnement et de conservation de la nature et de l'aménagement du territoire par des mesures à caractère général ou particulier et en prescrivant des normes d'équilibre dans le milieu naturel.

Le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est chargé aussi de la conservation et de l'amélioration de la qualité de l'environnement en général et du cadre de vie, de la prévention, la réduction ou la suppression des risques qui menacent l'Homme, la flore et la faune et tous les éléments de l'environnement air, eau et sol, de préserver et développer les espaces libres nécessaires au développement des générations futures et les espaces permettant le développement des espèces sauvages et des paysages naturels.

ART. 2. -- En matière d'environnement et de protection de la nature, le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est chargé notamment de :

--Veiller à inscrire l'élément environnement et intégrer les préoccupations environnementales dans les plans de développement économique et social.

--Animer et coordonner les actions de l'Etat dans le domaine de la protection de l'environnement et de la conservation de la nature y compris les actions de contrôle, de prévention, de réduction ou de suppression de la pollution et des nuisances et de tous les risques touchant l'environnement qu'ils résultent des particuliers ou qu'ils proviennent des grands ensembles ou des équipements collectifs ou des activités agricoles, commerciales ou industrielles.

--Elaborer en collaboration avec les ministères et les organismes concernés les normes de rejet des déchets et des émissions provenant des activités industrielles, urbaines, agricoles, touristiques, de l'énergie, du transport et des autres activités et de veiller à leur mise en oeuvre.

--Agréer les investissements dans les projets qui participent à la lutte contre la pollution et à la protection de l'environnement, encourager leur développement et veiller à leur exécution.

--Promouvoir toutes actions de sensibilisation d'étude et de recherche en matière de lutte contre la pollution et de protection de l'environnement et de la nature en collaboration avec les organismes et associations concernés.

--Coordonner entre les programmes nationaux et internationaux de lutte contre la pollution et de protection de l'environnement.

--Veiller à l'application des engagements internationaux en matière de lutte contre la pollution et de protection de l'environnement.

--Représenter le gouvernement tunisien auprès des instances internationales et aux réunions bilatérales et multilatérales ayant pour objet la protection de l'environnement et de la nature et ce, en collaboration avec les départements ministériels concernés.

--Elaborer un plan national d'intervention urgente en vue de garantir une intervention rapide en cas d'accident de pollution ou de risques majeurs qui menacent l'équilibre environnemental et veiller à sa mise en oeuvre en collaboration avec les ministères concernés.

--Promouvoir en collaboration avec les départements ministériels et organismes concernés toutes actions et recherches à caractère scientifique, technique ou économique ayant pour objet l'amélioration des techniques de protection de l'environnement et de préservation du cadre naturel et de lutte contre la pollution.

--Le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire exerce la tutelle sur les établissements publics qui en relèvent et sur les associations dont l'objet relève des attributions de ministère et fournit dans le cadre des moyens disponibles tout appui, aide et encouragement à l'action associative dans le domaine de la protection de l'environnement.

ART. 3. -- Les administrations et les établissements publics prêtent leur concours aux services compétents du ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire pour l'accomplissement de leurs missions de prévention des risques et de lutte contre la pollution et les nuisances. 1ls leur communiquent toutes informations sur leurs activités en matière de recherche, de contrôle et de prévention des risques dans les domaines de leur compétence. Le ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est informé sur les activités programmées et les moyens qui leur sont affectés.

Le ministre de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est chargé de prendre toutes mesures de coordination de nature à améliorer la qualité et l'efficacité de l'action de l'Etat dans les domaines susvisés ainsi que celles qui peuvent être nécessaires à l'information du public.

ART. 4. -- En matière d'aménagement du territoire et dans le cadre de la conception et de la mise en oeuvre de la politique nationale dans ce domaine, le ministère est appelé à mettre en forme une gestion plus rationnelle du territoire et à réunir les conditions favorables à la réalisation d'un développement durable.

A cet effet, il est chargé notamment de :

--Entreprendre toutes les études et les recherches permettant d'améliorer la connaissance des spécificités économiques et physiques des différentes régions du pays ;

--OEuvrer en collaboration avec les départements ministériels et organismes concernés à la fixation des options en matière d'aménagement et d'équipement du territoire sur le double plan national et régional ainsi que pour ce qui est du développement des ensembles urbains.

--Veiller en collaboration avec les ministères concernés à garantir la programmation de la réalisation de l'infrastructure de base et les grands équipements conformément aux choix arrêtés dans le domaine de l'organisation de l'utilisation du sol et de l'exploitation des ressources.

--Contribuer à fixer les incitations et les encouragements tendant à orienter les investissements dans le sens de la concrétisation des choix en matière d'aménagement du territoire.

--Veiller à la réalisation d'un développement harmonieux des réseaux urbains.

--Promouvoir la cartographie et les documents et développer les systèmes d'information nécessaires à l'élaboration des études d'aménagement du territoire.

ART. 5. -- Sont rattachés au ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire les services administratifs ci-après :

1 - La direction générale de l'aménagement du territoire relevant du ministère de l'Equipement et de l'Habitat à l'exception des services de l'urbanisme.

2 - La direction de l'environnement relevant du ministère de l'Agriculture.

3 - Les services chargés de l'environnement au ministère de l'Economie Nationale.

ART. 6. -- Le ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire est représenté dans les conseils d'administration des agences foncières, industrielles, touristiques et de l'habitat.

ART. 7. -- Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires au présent décret.

ART. 8. -- Le ministre d'Etat, ministre de l'1ntérieur, les ministres des Finances, de l'Economie Nationale, du Plan et du Développement Régional, de l'Agriculture, de l'Equipement et de l'Habitat et de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret qui sera publié au Journal Officiel de la République Tunisienne.

Tunis, le 1er février 1993 Zine El Abidine Ben Ali.

LOI N°95-72 DU 24 JUILLET 1995 PORTANT CREATION D'UNE AGENCE DE PROTECTION ET D'AMENAGEMENT DU LITTORAL(1)

Au nom du peuple,

La Chambre des Députés ayant adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article premier - La présente loi a pour objet la création d'une Agence de Protection environnementale du Littoral défini comme étant la zone de contact qui concrétise la relation écologique, naturelle et biologique entre la terre et la mer et leur interaction directe et indirecte.

La protection environnementale concerne notamment :

1 - Le rivage de la mer, les plages, les sabkhas, les dunes de sable, les îles, les falaises et les différentes composantes du domaine public maritime à l'exception des forteresses et autres ouvrages de défense.

2 - Les zones intérieures dans des limites variables selon le degré d'interaction climatique, naturelle et humaine entre elles et la mer, tels que les forêts littorales, les estuaires, les caps marins et les zones humides littorales.

Le périmètre de la zone littorale est fixé par décret, sur proposition du Ministère chargé de l'environnement.

ART. 2. - 1l est créé un établissement public à caractère industriel et commercial, doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière, dénommé «Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral».

L'Agence dont le siège est fixé à Tunis, est placée sous la tutelle du Ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du Territoire.

La Direction de l'Agence est assurée par un Directeur Général nommé par décret.

Contrairement aux dispositions de l'article 10 de la loi n°89-9 du 1er février 1989 relative aux participations et entreprises publiques, il est créé auprès de l'Agence un conseil consultatif dont la composition et les attributions seront fixés par décret.

L'organisation administrative et financière de l'Agence et les modalités de son fonctionnement sont fixées par décret, sur proposition du Ministre chargé de l'environnement.

ART. 3. - L'Agence assure l'exécution de la politique de l'Etat dans le domaine de la protection du littoral en général et du domaine public maritime en particulier.

A cette fin, elle est notamment chargée de :

-La gestion des espaces littoraux et le suivi des opérations d'aménagement et de veiller à leur conformité avec les règles et les normes fixées par les lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de ces espaces, leur utilisation et leur occupation ;

-La régularisation et l'apurement des situations foncières existantes à la date de publication de la présente loi et contraires aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime en particulier et ce conformément à la législation en vigueur et tout en respectant le principe du caractère non saisissable, non susceptible d'hypothétique, inaliénable et imprescriptible du domaine public maritime ;

-L'élaboration des études relatives à la protection du littoral et à la mise en valeur des zones naturelles et entreprendre toutes les recherches, études et expertises à cette fin ;

-L'observation de l'évolution des écosystèmes littoraux à travers la mise en place et l'exploitation de systèmes informatiques spécialisés ;

ART. 4. - L'Agence est chargée de la protection du littoral contre les empiétements occasionnés, notamment par les constructions et implantations contraires aux lois et règlements en vigueur. Les nouvelles implantations et les projets d'aménagement et d'équipement sont obligatoirement soumis à l'approbation préalable de l'Agence.

En plus des officiers de la police judiciaire et des agents de l'Administration qui sont habilités par des lois spéciales, les infractions aux lois et règlements relatifs au littoral et au domaine public maritime sont constatées dans des procès verbaux rédigés par des agents et des experts-contrôleurs assermentés et habilités à cette fin par le Ministère chargé de l'Environnement parmi les agents classés dans une catégorie équivalente au moins à la catégorie «A» visée dans la loi n°83-112 du 12 décembre 1983 portant statut général des personnels de l'Etat, des collectivités publiques locales et des établissements publics administratifs.

Ces agents et experts-contrôleurs exercent les fonctions de police judiciaire conformément aux dispositions du Code de Procédure Pénale.

ART. 5. - En conformité avec les dispositions de l'article 3 de la présente loi, l'Agence est chargée de la régularisation et de l'apurement des situations foncières des constructions, ouvrages et implantations établis sur le domaine public maritime ou sur des parties de ce domaine, en violation des lois et règlements en vigueur.

Au cas où la régularisation nécessite la conclusion d'un contrat de concession avec l'occupant du domaine public maritime, ce contrat doit fixer la redevance d'occupation ainsi que le montant revenant à l'Agence en contrepartie des actions de protection et de réhabilitation rendus nécessaire du fait de l'occupation.

Les procédures et les modalités de la régularisation et de l'apurement sont fixées par décret. L'Agence dispose de toutes les compétences légales requises pour la réalisation de la régularisation ou de l'apurement et son exécution y compris intenter des actions devant les tribunaux compétents.

ART. 6. - L'Agence peut, conformément aux procédures en vigueur, bénéficier selon le cas du transfert de la gestion ou de l'affectation de parties du domaine public ou privé de l'Etat ou du domaine public soumis au régime forestier qui constituent des espaces naturels ou libres nécessitant protection. L'Agence assure la gestion des immeubles qui lui sont confiés ou affectés, conclue tous les accords et assume les engagements qui s'y rattachent.

ART. 7. - L'Agence prend en charge la gestion, la conservation et la préservation des terres qui sont mises à sa disposition. Elle peut transférer l'exploitation des espaces aménagés à un établissement public ou privé ou à une association autorisée et ce, dans le cadre d'un accord fixant notamment la contrepartie financière et sur la base d'un cahier des charges qui fixe les usages, les modes de gestion et de préservation et les travaux autorisés qui contribuent obligatoirement à la réalisation des objectifs de l'Agence.

ART. 8. - Un décret fixe les zones sensibles, qui sont des zones caractéristiques du patrimoine naturel national ou présentant un ensemble d'éléments dans un écosystème fragile ou constituant un paysage naturel remarquable, menacé par la dégradation ou l'utilisation irrationnelle.

Pour la conservation des zones susvisés, l'Agence peut avoir la maîtrise des immeubles soit par leur acquisition à l'amiable, soit le cas échéant, par leur expropriation par l'Etat à son profit conformément à la législation en vigueur relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique.

(1) Travaux préparatoires :

Discussion et adoption de la chambre des députés dans sa séance du 18 juillet 1995.

L'Agence peut aussi, dans les cas où elle le juge opportun, conclure des accords de partenariat avec les propriétaires des terres situées dans les zones sensibles. Les propriétaires s'engagent dans ces accords à gérer leurs terres conformément à un cahier des charges approuvé par le Ministre chargé de l'Environnement.

ART. 9. - L'Agence de Protection et d'Aménagement du Littoral peut, après approbation de l'autorité de tutelle, conclure avec des partenaires ou des établissements nationaux ou étrangers des accords et des contrats de prestations de services à titre onéreux s'inscrivant dans le cadre de ses activités telles que les recherches, les études et les expertises.

ART. 10. - Les ressources de l'Agence sont constituées par :

-les participations et subventions fournies par l'Etat ;

-les revenus des biens meubles et immeubles qui lui reviennent ;

-les revenus des prestations de services ;

-les dons et les legs ;

-toutes ressources créées ou qui lui sont affectées par la Loi.

ART. 11. - En cas de dissolution de l'Agence, son patrimoine fera retour à l'Etat qui exécutera les engagements contractés par elle.

La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi

d'Etat.

Tunis, le 24 juillet 1995

Zine El Abidine Ben Ali.






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