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L'applicabilté des conventions internationales relatives au droit de l'enfant au Tchad

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par Eugène Le-yotha Ngartebaye
Université Catholique de Lyon - Master 2 Recherche Fondements des droits de l'homme 2007
  

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Section II : Les pesanteurs économiques et sociales

Certains droits ne peuvent être réalisés que si l'on atteint un niveau de vie minimum. Or, au Tchad la question de la pauvreté (§1) et ses effets sur la société se lit très aisément sur les enfants portés sur le marché de l'emploi (§2).

§1- L'incidence de la pauvreté

La pauvreté n'est pas un phénomène récent. Elle affecte des millions de personnes aussi bien dans les pays industrialisés que ceux en voie de développement. Cependant, elle connaît une progression remarquable dans les pays d'Afrique subsaharienne et plus particulièrement au Tchad pour diverses causes : l'incidence de la crise économique causée par l'imposition des programmes d'ajustement structurel des années 1980 et les effets conjugués de la dévaluation du franc CFA en 1994. Ces facteurs ont accru la pauvreté des ménages. Mais que désigne le terme « pauvreté » ?

Le concept de pauvreté et la charge affective dont il est porteur n'ont cessé d'évoluer au cours des siècles. On s'accorde généralement pour reconnaître au terme pauvreté deux sens : un sens socioéconomique caractérisé par un état de manque (absence d'un minimum de moyens matériels) et un sens religieux. Mais il est indéniable que la signification de ce mot a beaucoup varié en fonction de l'évolution des sociétés.

Selon Peter Towsend, « les individus, familles ou groupes de la population peuvent être considérés en état de pauvreté quand ils manquent des ressources pour obtenir l'alimentation type, la participation aux activités et avoir les conditions de vie et de commodités qui sont habituellement ou sont au moins largement encouragées ou approuvées dans les sociétés auxquelles ils appartiennent. Leurs ressources sont si significativement inférieures à celles qui sont déterminées par la moyenne individuelle ou familiale qu'ils sont, de fait, exclus des modes de vie courants, des habitudes et des activités »41(*).

Quant à la Banque Mondiale, elle définit la pauvreté suivant la réunion de trois éléments : « le capital naturel (la valeur économique de la terre, l'eau, des richesses du sous sol, des matières premières), le degré d'équipement industriel (les usines, infrastructures, moyen de transport), les ressources humaines - le degré de formation et d'instruction de la population -, la situation sanitaire et nutritionnelle »42(*).

Le Programme des Nations Unies pour le Développement (Pnud ci-après) estime que l'interprétation de la pauvreté passe par la prise en compte « du degré de l'instruction de la population, du revenu par habitant et de l'espérance de vie »43(*). C'est cette conception qui donne un Indicateur de Développement Humain (IDH).

L'IDH consiste en une évaluation du niveau de vie des populations par la prise en compte des indicateurs monétaires, l'espérance de vie à la naissance, le taux d'alphabétisation des adultes et le taux de scolarisation.

A partir de cette définition de la pauvreté, le Tchad reste l'un des pays le plus pauvres de la planète. Sa situation s'est considérablement dégradée. Selon le rapport mondial sur le développement humain, le Tchad est passé de 167ème rang en 2000 au 173ème rang sur 177 en 2003 avec un Indice de Développement Humain de 0,341.

Cette extrême pauvreté produit d'énormes effets sur la réalisation des droits humains comme le rappelle si bien le rapport des Nations Unies sur l'extrême pauvreté44(*). Ces incidences produisent des effets considérables sur les enfants. Ils s'observent particulièrement sur :

- la faim et la malnutrition.

Au Tchad, plus de 500 00045(*) personnes se trouvent chaque année en situation d'insécurité alimentaire chronique et conjoncturelle. La faim frappe notamment des personnes particulièrement vulnérables en milieu rural ou urbain : veuves, handicapés, retraités de la fonction publique, personnes âgées sans soutien, ménages avec un grand nombre d'enfants en bas âge.

La malnutrition chez les enfants est très prononcée. Selon les données de l'EIMT 2000, 28,3 % des enfants souffrent de la malnutrition aiguë. Cette proportion a baissé de 12 points par rapport aux résultats de l'EDST 1996/1997 où 40 % des enfants étaient touchés par cette forme de malnutrition. Par ailleurs, 12 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë (14 % en 1997), soit une baisse de 2 % par rapport aux résultats de l'Enquête sur la Démographie et la Santé au Tchad46(*). La malnutrition chez les enfants se manifeste également par de nombreux cas d'insuffisance pondérale (26 % des enfants de moins de cinq ans), ou de goitre (5,5 % des enfants de 6 à 12 ans).

La faim et la malnutrition sont essentiellement dues à l'insécurité alimentaire et à une alimentation inappropriée ne permettant pas à l'organisme de disposer des vitamines et micro nutriments indispensables. L'analyse des apports caloriques des produits vivriers par zone (données ECOSIT I) qui montre une diversité des situations nutritionnelles, souligne aussi que, par rapport à la moyenne mondiale de 2100 cal/hab./jour, 2 zones seulement sur 8 réalisent des productions qui leur permettent de couvrir leurs besoins énergétiques (Chari Baguirmi rural et ville d'Abéché).

- la mortalité maternelle.

Le niveau de la mortalité maternelle (827 décès pour 100 000 naissances vivantes) est parmi les plus élevés au monde. La moyenne en Afrique est de 600 décès pour 100 000 naissances vivantes. Les décès maternels sont dus aux accouchements dystociques, aux éclampsies, aux infections graves dans la période qui suit l'accouchement, aux hémorragies, aux complications des avortements provoqués et aux maladies (paludisme, hépatite).

Le niveau élevé de mortalité maternelle est dû au faible accès des femmes aux services de santé de la reproduction, notamment les services de planification familiale, de maternité sans risque, de prévention et prise en charge des complications des avortements, de traitements des IST et de prévention du VIH. En effet, l'utilisation des services de planification familiale reste encore faible, même si l'on constate une certaine progression. Selon l'EDST, le taux de prévalence contraceptive est de 1,2 %, variant de 0,3 % en milieu rural à 7 % à N'Djaména et 4 % dans les autres villes47(*).

- la prévalence élevée du VIH/SIDA.

La séroprévalence au VIH est estimée à 5,2 % de la population sexuellement active en 2003 et le nombre de cas cumulés de SIDA notifiés de 1986 à fin 2002 a atteint le chiffre de 17.878, contre 13.385 à fin 2004. Ces chiffres sont loin de refléter la réalité du phénomène car la surveillance épidémiologique reste faible. On remarque néanmoins une très forte tendance à la féminisation de l'épidémie du VIH/SIDA.

La forte propagation du VIH/SIDA s'explique d'abord par les comportements à risque : multi-partenariats sexuels, faible utilisation des moyens de protections, infections sexuellement transmises mal soignées, transfusion de sang non dépistée pour le VIH, faible niveau de l'hygiène dans les formations sanitaires, recrudescence de la prostitution, etc.. Il y a ensuite les facteurs de vulnérabilité tels que : les pratiques sociales admises (relations sexuelles coercitives, dépendance des femmes dans le mariage, persistance de pratiques traditionnelles néfastes aux jeunes filles et aux femmes) ; les conditions aggravantes de faim et de malnutrition ; les conditions socio-économiques difficiles dues aux migrations vers les pôles de développement (projet d'exportation du pétrole), à l'afflux de réfugiés, au chômage des jeunes, aux emplois exposant les jeunes filles et les femmes, ou encore à la faiblesse du système éducatif.

La cause principale de la propagation est surtout liée à la faiblesse qualitative ou quantitative des programmes de prévention et de protection : les groupes vulnérables prioritaires cibles sont très peu couverts par les interventions.

- La forte incidence du paludisme.

L'incidence élevée du paludisme en fait un problème majeur de santé publique au Tchad. C'est la première cause de consultation dans les structures sanitaires (37 % des problèmes notifiés dans les centres de santé et 45 % dans les hôpitaux en 2002). Les cas les plus fréquents sont notifiés pendant la saison des pluies, de juillet à novembre. Les populations les plus touchées sont les enfants de moins de 5 ans (54 %) et les incidences les plus élevées se rencontrent dans la zone méridionale : Mayo-Kebbi, Logone Occidental, Logone Oriental, Tandjilé et Moyen Chari.

Un des principaux déterminants du paludisme réside dans l'insuffisance de la prévention. En effet, l'utilisation de moustiquaires imprégnées ou non est extrêmement limitée. Plus de 73,1 % des enfants de moins de 5 ans ne dorment pas sous moustiquaire et parmi les 26,9 % qui l'utilisent, on compte 94,4 % de moustiquaires non imprégnées. Il faut noter qu'il existe dans le cas du paludisme une tendance générale à l'automédication. La connaissance insuffisante des moyens de protection ne permet pas l'application des mesures de prévention. A cela s'ajoute l'environnement insalubre qui caractérise la plupart des villes et favorise ainsi la multiplication des moustiques, porteurs du paludisme.

- L'accès limité à l'eau potable et aux systèmes d'assainissement.

(45,7% en zones urbaines et 26,7% en zones rurales)

L'accessibilité à l'eau potable et aux systèmes d'assainissent est fort limité. Globalement l'accès permanent à l'eau potable est limité à 23 % de la population totale du Tchad48(*). Une autre manifestation est la forte proportion de la population ne disposant pas de latrines (moins de 2 % des citadins disposent d'installations sanitaires avec eau courante). Selon l'EIMT, près de trois personnes sur quatre vivent dans des ménages qui ne disposent pas de toilettes49(*). Ceci explique la forte prévalence des maladies liées à l'eau et à l'hygiène telle que le paludisme, la bilharziose, la diarrhée.

Les coûts élevés de l'eau constituent par ailleurs un facteur limitatif de l'accessibilité. Ces coûts reflètent les frais exorbitants de réalisation ou de maintenance de certains ouvrages (points d'eau, forages dans certaines régions, infrastructures hydrauliques) ou encore de distribution d'eau. Les populations les plus défavorisées peuvent ainsi acheter l'eau au revendeur de 15 à 25 fois plus cher que l'abonné qui dispose d'un branchement particulier.

Le problème de sous-équipement est plus crucial pour ce qui est de l'assainissement. Cela s'explique d'une part par le fait que les villes soient situées sur des sites inondables, mais qu'aucune d'entre elles ne dispose d'un système fonctionnel d'évacuation des eaux usées ni de réseaux de collecte en bon état de marche. D'autre part, il n'existe pas de système d'évacuation des excréta et des ordures ménagères, ni de traitement des déchets solides, pas plus que (ou très peu) de systèmes d'évacuation des eaux pluviales. Le faible usage des latrines s'explique par leur insuffisance, elle-même liée aux coûts élevés de leurs constructions, lesquelles s'avèrent inabordables pour la majorité de la population.

194 %o soit un taux de mortalité infanto-juvenile parmi les plus élevées au monde

Des villes entières sans système d'évacuation

et des latrines pour 10% de ménages

* 41 TOWSEND, P., Les cahiers français n°286

* 42 BRISSET, C. Pauvretés, Paris, Hachette, 1996, p. 24

* 43 Ibid.

* 44 Comité des droits de l'homme : Droit de L'homme et extrême pauvreté consultable sur le site/www.un.org / A/HRC/7/15

* 45 Ministère de l'Agriculture/Conseil National du Comité Inter Etat de Lutte conte la Sécheresse au Sahel « Propositions nationales sur le développement d'une sécurité alimentaire durable au Tchad dans une perspective de réduction de la pauvreté ». 09.2000

* 46 Ces chiffres varient selon le niveau socio-économique ou le milieu de résidence. On note que la proportion d'enfants souffrant de retard de croissance dans les ménages les plus pauvres est plus élevée (30,4 %) que dans les ménages les plus riches (25,6 %). La prévalence de la malnutrition présente un écart assez important selon le milieu de résidence : 29,2 % en milieu rural et 25,2 % en milieu urbain.

* 47 L'utilisation de la contraception est liée également au niveau d'instruction et à la religion. Elle varie de 2,5 % chez les femmes ayant un niveau d'instruction primaire à 12,8 % chez les femmes ayant un niveau secondaire et plus. Ce taux est de 0,9 %chez la femme musulmane, 1,2 % chez la femme catholique et 2,3 % chez la femme protestante.

* 48 Les études menées dans le Cadre du Schéma Directeur de l'Eau (SDEA) indiquent qu'environ une personne sur trois a accès à l'eau potable : 45,7 % dans les zones urbaines et 26,7 % dans les zones rurales. Dans le milieu villageois le taux d'accès réel en 2000 est de 17% ; dans les milieux urbain et semi-urbain de plus de 2000 habitants, ce taux est de 33 %. Dans les villes équipées d'un réseau d'adduction d'eau potable, seulement 9,7 % de la population dispose d'un branchement, tandis que 27,5 % se ravitaillent à la fontaine publique et que le reste, soit 63 %, doit s'approvisionner aux puits, souvent de type traditionnel.

* 49 Il ressort des études menées dans le cadre du SDEA que 10,6 % des ménages utilisent des latrines rudimentaires améliorées et 88,5 % des ménages utilisent la nature comme lieu d'aisance.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand