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Effets des interactions entre pairs dans l'expression de la théorie de l'esprit chez des enfants de cinq ans

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par Alexandre HIRSCH
IED Paris 8 - Master 1 psychologie du developpement et de l'éducation 2006
  

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1.3 Accéder à une théorie de l'esprit

Différentes approches théoriques ont été proposées pour expliquer les transformations cognitives qui se produisent chez l'enfant lorsqu'il accède à une théorie de l'esprit (Hale, 2003). La validation de ces différents modèles est difficile compte tenu de la difficulté d'accès, par des méthodes expérimentales, aux processus mis en oeuvre par l'enfant. La validité du modèle dépend donc le plus souvent de sa capacité à rendre compte des observations et des résultats expérimentaux tirés des différentes épreuves proposées aux enfants. La remarque suivante d'Astington permet ainsi de relativiser les divergences entre les différents modèles : « que la découverte de l'esprit mène les enfants vers un état de compréhension supérieur ou qu'elle les fasse passer d'un état de compréhension implicite vers un état plus explicite, il s'agit dans tous les cas d'un processus développemental très important » (Astington, 1999)

Notre démarche s'inscrit dans le cadre de la « théorie de la théorie », qui postule que l'accès à la théorie de l'esprit repose sur des réélaborations conceptuelles chez l'enfant au cours de son développement vers l'âge de cinq ans. Avant cet âge, la théorie de l'esprit n'est pas en place.

L'enfant a très précocement conscience de nombreuses manifestations de la pensée chez lui et chez autrui. Dès l'âge de trois ans les enfants savent par exemple différencier la réalité des représentations. Ils sont en effet capables de différencier les propriétés d'une image mentale de chien d'un vrai chien. (Flavell, 1995 in Flavell, 1999). Les enfants sont également capables d'attribuer certains états mentaux à eux-mêmes et à autrui. Ils ont la capacité d'exprimer leur peur et de l'identifier à partir des comportements observés. L'analyse de leurs propres états mentaux semble plus facile que ceux des autres mais avec de nombreuses limites. Comme nous l'avons vu, les enfants sont par exemple incapables de décrire leurs propres états mentaux passés lorsque ceux-ci ont subi des modifications. Leurs représentations et l'expression de leurs états mentaux semblent donc directement reliées au réel et à l'instant.

L'apparition des mensonges à partir de l'âge de deux ans marque un progrès important de la prise en compte des états mentaux d'autrui. L'utilisation du mensonge marque une prise de distance entre le contenu du discours et la réalité pour l'enfant. Il essaye d'agir sur le comportement d'autrui en modifiant les informations qu'il met à la disposition de son interlocuteur ce qui peut préfigurer la prise de conscience de la notion de représentation. Le mensonge est cependant utilisé sous une forme très rudimentaire puisque l'enfant ne tient pas compte lors de la formulation de son mensonge des autres données à la disposition de son interlocuteur.

Mais l'accès à la théorie de l'esprit ne peut se résumer à la maîtrise de ces capacités précoces. Nous avons bien vu que chacune présente des limites qui soulignent une acquisition incomplète. Par exemple, les enfants peuvent percevoir et identifier la peur chez autrui mais ne peuvent concevoir la peur comme une émotion provoquée par des facteurs qui varient selon les individus et qui sont reliés aux croyances et aux émotions.

La théorie de l'esprit chez l'enfant implique nécessairement le passage aux métareprésentations. Cet accès aux métareprésentations ne se fait pas au même stade de développement selon les modèles théoriques. Le jeu symbolique occupe une place importante à l'origine de certaines différences entre les théories qui interprètent différemment le rapport entre jeu symbolique et théorie de l'esprit. Les activités symboliques se mettent en place vers 18-24 mois. Les plus simples correspondent à la simulation de l'utilisation d'un objet comme servir le thé et boire ce thé fictif par exemple. Les activités vont ensuite se complexifier en augmentant la décontextualisation des activités jusqu'à la substitution où un objet d'aspect totalement différent peut être utilisé pour mimer l'utilisation d'un autre objet.

Leslie considère que le jeu symbolique atteste d'un accès aux métareprésentations. Les métareprésentations étant indissociables des représentations secondaires. Pour jouer avec sa mère au téléphone avec une banane, l'enfant doit se représenter que sa mère « pretend » que la banane est un téléphone (Reboul, 2000). Les enfants auraient donc déjà accès à la théorie de l'esprit lorsque le jeu symbolique se met en place. Les difficultés rencontrées aux épreuves de fausse croyance pouvant être expliquées par un développement insuffisant d'autres fonctions comme la capacité de traitement des informations ou par l'utilisation d'heuristiques inadéquates comme « prédire que l'agent va agir de manière à satisfaire ses désirs » (Fodor, in Bradmetz, 1999).

Leslie propose un modèle qui permet d'expliquer la capacité précoce des enfants à participer au jeu symbolique sans que leur compréhension du monde en soit modifiée. Lorsqu'il est impliqué dans un jeu symbolique l'enfant sait que la fonction qu'il attribue à un objet n'est pas sa fonction réelle. Leslie vient à définir le module de théorie de l'esprit (ToMM) qui permet à l'enfant de découpler les informations liées au jeu symbolique. Les simulations se trouvent ainsi séparée du monde réel (Leslie, 1984).

Mais d'autres études ont nuancé l'importance du jeu symbolique en montrant que les enfants considèrent le « pretense » davantage comme un processus physique que comme un processus mental. Le jeu de faire semblant doit donc être classé comme une action plutôt que comme une activité mentale (Lillard 1996 in Bouchand, 1999)

Ainsi, pour Perner (1991), le jeu symbolique marque bien le développement des représentations secondaires ou des représentations découplées mais, contrairement à Leslie, le jeu symbolique n'atteste en rien du développement des métareprésentations. Au cours du jeu symbolique, l'enfant n'est pas conscient des rapports qui existent entre les différents niveaux de représentation. L'enfant est effectivement capable d'imaginer des situations hypothétiques mais la séparation entre représentation mentale et objet n'est pas encore en place. L'enfant n'a pas encore conscience qu'un objet est utilisé pour en représenter un autre.

L'accès aux métareprésentations n'est pas indispensable puisque les représentations découplées sont suffisantes pour expliquer les activités symboliques implicites. Les représentations secondaires semblent donc dissociables des métareprésentations ce qui peut expliquer la capacité de certains autistes à participer à des activités symboliques en situation d'étayage sans être pour autant capables de les initier (Reboul, 2000).

Perner justifie cette capacité à mener des jeux symboliques par le terme « prelief » (Perner, Baker et Hutton, 1995 in Bradmetz, 1999). Le « prelief » (synthèse de pretence et belief) permet le jeu symbolique au cours duquel l'enfant fait « comme si » mais sans pouvoir tenir compte et évaluer son attitude vis à vis du jeu symbolique.

Gopnik compare le jeu symbolique à la lecture des contes aux enfants. Il y a mise en place de l'activité symbolique avec acceptation de la relation particulière entre l'objet et les propriétés différentes qui lui sont attribuées mais sans interrogation sur la nature de son adhésion à la représentation découplée. Leslie reconnaît également que l'enfant n'est pas conscient des représentations de représentations et utilise par la suite le terme « M-représentation » pour les décrire.

Avant le développement de la théorie de l'esprit, les représentations sont reliées directement au réel et ne sont pas accessibles à l'enfant qui ne peut les manipuler mentalement. Le passage aux métareprésentations et à l'attribution d'états mentaux est marqué par un changement conceptuel chez l'enfant. Les représentations ne sont plus strictement dépendantes du réel. Ce sont désormais des intermédiaires entre connaissance et action (Gopnik, 1993 in Bradmetz 1999). L'enfant comprend que la connaissance suppose l'accès à l'information ce qui lui permet de différencier les états mentaux et les représentations des individus en fonction des informations dont ils disposent.

La compréhension des états mentaux et des comportements d'autrui est rendue possible par la prise en compte des croyances et des désirs de l'enfant lui-même et de ceux qui l'entourent. Il s'agit donc d'un progrès basé sur l'utilisation de mécanismes inférentiels. Cette approche constructiviste insiste sur le rôle des interactions qui permettent une réélaboration constante des théories en fonction des capacités de l'enfant afin de produire la réponse la mieux adaptée à la situation.

L'interaction avec l'entourage joue donc un rôle prépondérant dans le passage vers une théorie de l'esprit. C'est par le biais des interactions que l'enfant va développer les outils de cette nouvelle théorie. Gopnik suppose que l'observation des attitudes d'autrui mène l'enfant à élaborer des hypothèses, à utiliser des modèles permettant de rendre compte des différents comportements. Ces hypothèses sont ensuite adaptées au comportement propre de l'enfant et vont évoluer en fonction de la complexité des problèmes ou des comportements auxquels les enfants seront confrontés.

Au-delà de ces différentes théories d'acquisition, la théorie de l'esprit met en jeu de nombreuses capacités développées par l'enfant au cours de ses quatre premières années de développement. Le développement de la théorie de l'esprit semble corrélé à l'acquisition de ces différentes fonctions parmi lesquelles les capacités suivantes jouent un rôle primordial :

- La différenciation du moi du non moi

- La prise de conscience des états mentaux.

- Etre capable d'attribuer des états mentaux et une Intentionnalité aux personnes.

- La capacité d'empathie.

- Différencier la réalité des représentations internes du monde.

- Utilisation des organes des sens et du regard en particulier. Cette importance est particulièrement marquée dans le modèle modulaire de Baron-Cohen.

- L'observation d'autrui et des pairs.

- Le développement du langage.

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