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Coopération au développement et renforcement des capacités locales : Intervention des ONG et marges d'autonomie des acteurs à la base (cas des ONG GADEC et DIAPANTE )

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par Mamadou DIOUF
Université GASTON BERGER de Saint Louis - Maîtrise de Sociologie du Développement 2007
  

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    UNIVERSITE GASTON BERGER DE SAINT - LOUIS

    UFR DE LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

    SECTION DE SOCIOLOGIE

    THEME : Coopération au développement et renforcement des capacités locales

    SUJET : Intervention des ONG et marges d'autonomie des acteurs à la base : cas des ONG GADEC et DIAPANTE

    SOUS LA DIRECTION DU :

    Pr. Issiaka-P. Latoundji LALÈYÊ

    PRESENTE PAR :

    Mamadou DIOUF

    ANNEE ACADEMIQUE 2006 / 2007

    « J'ai la conviction que rien de solide ne pourra se faire en matière d'organisation -ni d'ailleurs dans aucun autre domaine- sans que ne s'instaure un dialogue permanent avec les premiers intéressés, c'est-à-dire les acteurs eux-mêmes. Et s'il est une seconde conviction que j'espère partager c'est celle de l'extraordinaire capacité des paysans africains à soutenir un tel dialogue, à y participer pleinement et à l'enrichir de leur réflexion ».

    BELLONCLE (G). Coopération et Développement en Afrique noire sahélienne. Collection du CEDEC N°10, Canada, 1978, p.28.

    introduction

    Au courant de la décennie 80-90, les politiques de coopération au développement ont connu d'importantes réformes qui en ont modifié la configuration de façon  décisive. De la forme classique de l'aide publique au développement, le système international de l'aide est, en effet, passé à une tout autre forme de coopération essentiellement basée sur la filière non gouvernementale (ONG) 1(*). Il peut paraître évident, à première vue, que si les ONG ont progressivement joué les « premiers rôles » dans le système de l'aide au développement c'est dû au fait que le système classique de coopération avait montré ses limites. Mais, le fait reste aussi que pour bien comprendre l'importance sans cesse grandissante acquise par ces organisations dans le système de l'aide au développement il faut, comme le suggère Moussa BA, se référer « aux différentes politiques de développement économique et social adoptées par les Etats et aux dures réalités vécues par les populations dans les années 70 »2(*). C'est dire que les raisons profondes de la montée en puissance des ONG dans le champ de la coopération au développement sont bien plus à chercher dans les crises multiformes des années 70 (crise des théories et modèles, crise des Etats, crise du monde rural et des activités agricoles, sécheresses, famines...) et dans les réponses que les pouvoirs publics et leurs partenaires au développement ont essayé d'y apporter.

    En s'appropriant les théories et approches sur l'auto développement3(*) et le développement participatif, et en se déclinant d'emblée comme des institutions d'appui à l'auto développement (IAAD) les ONG ont vite fait d'attirer l'intérêt, la convoitise et la confiance du public, des bailleurs, des Etats et des agences internationales de coopération. Etant d'avis avec Jean Paul DELER que « l'importance croissante des ONG dans le processus du développement de nos pays ainsi que sur les mécanismes de l'aide (....) justifie assez largement que s'engage une réflexion d'ensemble et un bilan collectif autour d'un phénomène contemporain mais encore obscur » 4(*),  nous avons choisi, dans le cadre du présent mémoire de maîtrise, de travailler sur la thématique générale de la coopération au développement et plus spécifiquement sur la question des marges d'autonomie dévolues aux acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG. La pertinence d'un tel sujet nous est parue d'autant plus grande qu'à l'heure où d'aucuns émettent des réserves sur la capacité des ONG de prendre en charge les défis d'un développement auto centré et durable, il est clair que l'enjeu d'action et de réflexion sur la nature réelle des rapports que ces organisations entretiennent avec les populations à la base n'en est que plus important. Ainsi notre objectif principal a été de nous interroger sur deux aspects de l'intervention des ONG:

    1. Quelle est la nature réelle des rapports que les ONG entretiennent avec les populations à la base ?

    2. Est-ce que ces rapports sont conformes aux dimensions endogènes, participatives et humaines du développement?

    Conscient qu'aucune ONG ne ressemble « traits pour traits » à une autre, nous avons fait le choix de mener cette étude auprès de deux ONG nationales. Il s'agit du Groupe d'Action pour le Développement Communautaire (GADEC) et de DIAPANTE5(*). Les enquêtes de terrain ont été menées auprès de trois organisations communautaires de base (OCB) avec lesquelles ces ONG travaillent respectivement dans les régions de Tambacounda et de Saint Louis. La méthodologie utilisée repose sur deux piliers que sont la recherche documentaire et les enquêtes de terrain.

    Le plan du mémoire est établi autour de trois parties. Dans la première intitulée cadres théoriques et méthodologiques de la recherche nous exposons la problématique de recherche, faisons l'état de la question, déclinons les objectifs et hypothèses de recherche, construisons nos concepts clés, établissons le cadre opératoire de la recherche, précisons et justifions nos outils de collecte de données ainsi que les techniques d'échantillonnage pour enfin revenir sur l'histoire de la collecte des données et sur les difficultés rencontrées.

    Dans la seconde partie titrée présentation du cadre de l'étude, nous présentons à la fois les ONG étudiées, les organisations communautaires de base auprès desquels les enquêtes de terrain se sont menées de même que les cadres géographiques et humains qui ont vu se dérouler nos enquêtes.

    La troisième et dernière partie du mémoire est quand à elle consacrée à la présentation, à l'analyse et à l'interprétation des données de nos enquêtes. Il s'agit aussi bien des données de l'analyse de contenu que des données obtenues grâce aux enquêtes de terrain.

    Rédigée en deux chapitres, cette première partie du mémoire nous permet d'exposer, à la fois, les cadres théoriques et méthodologiques de référence. Par cadre théorique de référence nous entendons la problématique de recherche, l'état de la question, les objectifs de recherche, les hypothèses ainsi que la construction (définition) des concepts sur lesquels repose la recherche. Dans la problématique nous revenons, après une brève définition du concept de coopération au développement, sur l'historique des différentes politiques qui,  dans ce domaine, ont marqués les rapports Nord Sud notamment depuis les années 50. Cette revue historique nous permet par la même occasion de mettre un accent particulier sur les ONG, leur définition, leur typologie, le contexte historique de leur émergence, leur philosophie........ L'objectif visé étant, d'une part, de mieux comprendre les différents tournants qui ont marqué ces politiques et, d'autre part, d'aider à mieux cerner le contexte à la faveur duquel les ONG se sont vues propulsées au devant de la scène internationale de la coopération au développement.

    L'état de la question se présente sous la forme d'une revue de la littérature sur les ONG et leurs interventions. Il s'agit en effet, d'une restitution synthèse de ceux d'entre les éléments de connaissance auxquels nous avons eu accès au cours de nos recherches bibliographiques et qui traitent de la problématique générale de la coopération au développement et plus spécifiquement de la question du renforcement des capacités locales dans le cadre des interventions des ONG. Nous nous efforçons ainsi d'y rendre compte aussi bien des points de vue laudatifs que des analyses critiques sur les ONG et leurs interventions. Les objectifs de l'étude sont exposés à la section 3, alors qu'à la section 4 nous procédons à la formulation des hypothèses de recherche ainsi qu'à la construction des concepts de l'étude.

    Le cadre méthodologique qui constitue le second et dernier chapitre de cette première partie, recoupe quatre (4) sections. Il s'agit, après avoir défini et précisé le cadre théorique de notre recherche ; d'exposer et de justifier nos principaux choix méthodologiques (le modèle d'analyse, les techniques et outils de recueil de données utilisés, la technique d'échantillonnage, le choix des personnes ressources). Nous en profitons aussi pour faire l'historique de la collecte des données en exposant les différentes étapes par lesquelles nous sommes passés et les principales difficultés que nous avons eu à rencontrer à chacune de ces étapes.

    Chapitre un (1) : Cadre théorique de la recherche

    Section une (1) : Problématique

    Contrairement à une conception assez répandue, l'histoire de la coopération au développement remonte bien avant la période des indépendances nationales. Cette histoire reflète, à y regarder de plus près, les différentes conceptions et approches du développement qui se sont succédées dans les pays en développement.

    Selon une approche classique, le concept de Coopération au développement désigne les transferts des pays développés vers les pays en voie de développement (PVD) de ressources financières, techniques et humaines d'origine publique (agences d'aide bilatérales ou multilatérales) ou privée (Organisations Non Gouvernementales). Le motif de ces transferts étant le rattrapage du développement économique, la recherche d'une plus grande justice sociale et la diminution des disparités. Le principe est donc de favoriser le développement économique et social des régions les moins avancées par des transferts de moyens du Nord vers le Sud à des conditions plus favorables que celles des marchés financiers. Même s'il est rare de rencontrer des auteurs qui établissent la distinction entre ce concept et ceux d'aide publique au développement ou de système d'aide, il reste toujours important de garder en tête que le concept de coopération au développement « peut revêtir bien des formes de collaboration différentes de l'aide financière et/ou technique tels les programmes culturels, les accords commerciaux, les conventions sur les migrations... »6(*).

    Pour de nombreux auteurs, l'idée même d'instaurer un système de coopération au développement remonte aux années 50. Cette thèse repose sur le fait que les pratiques de coopération au développement ont fortement été inspirées par les expériences initiées dans les pays industrialisés au lendemain de la seconde guerre mondiale (Plan Marshall) et par les mesures appliquées ensuite dans les relations entre pays industrialisés et pays décolonisés.

    Claude FREUD7(*) montre bien, cependant, qu'il est tout à fait possible de retrouver dès la période coloniale déjà des tentatives métropolitaines de promouvoir le développement économique et social des colonies. Il va même jusqu'à faire remonter la naissance de la coopération au développement aux années vingt (20) « Un bref point d'histoire s'impose donc : sous la colonisation, à partir de quel moment les pouvoirs publics vont-ils s'engager dans la mise en valeur des possessions d'outre- mer ? En fait, très tardivement, à partir des années vingt ; jusque là les rapports économiques relèvent de ce que l'on a appelé le pacte colonial8(*)»9(*) .

    La signature des accords de Yaoundé dans les années 1965-1967 constitue de la même sorte un tournant dans l'histoire de la coopération au développement puisqu'elle consacre l'association des ex- colonies à la Communauté Economique Européenne (CEE).

    En tout état de cause, ce qu'il nous paraît essentiel de retenir de ce débat d'experts sur la date de naissance de la coopération au développement c'est qu'en définitive le contexte dans lequel est née celle-ci à savoir la volonté des autorités coloniales de promouvoir le développement économique et social des colonies, a très fortement conditionné son modèle pendant de nombreuses décennies. Des indépendances nationales jusqu'au début des années 80, en effet, l'essentiel des efforts de coopération bilatérale et/ou multilatérale s'est fait sous la houlette des Etats et des agences publiques de coopération. Autrement dit ce que l'on nomme communément la coopération au développement «classique» ou «publique» a été pendant près de trois décennies l'apanage exclusif des Etats et, dans une moindre mesure, celle des agences et institutions internationales de coopération « elle s'est établi suivant un axe gouvernemental qui mettait en rapport des organisations bureaucratiques de grande taille»10(*).

    L'hypothèse de base de la coopération publique telle que posée par l'économiste ROSTOW était que le progrès économique et social suit un parcours linéaire, identique pour toutes les nations. Dès lors l'idée était qu'un apport massif de ressources financières, d'assistance technique ou d'assistance en marchandises allait permettre aux économies du Sud de se lancer vers la voie de la croissance et du développement. On comprendra dès lors que les options étaient claires ; il s'agissait pour les pays du Nord de combattre la pauvreté, de soutenir la croissance économique et de développer les échanges internationaux par des approches globales consistant notamment à recourir à de grands projets et à promouvoir des types de productions (cultures de rente) ne tenant souvent pas compte des contextes locaux, des traditions ou même des besoins réels.

    Comme le souligne CASSEN, il est difficile de faire une analyse détaillée des réussites et des échecs de la coopération au développement classique «car malheureusement, on manque d'analyses sérieuses de cette période de la coopération au développement»11(*). Néanmoins et même s'il faut reconnaître que grâce aux transferts opérés des souffrances ont été apaisées, le niveau d'instruction relevé et beaucoup de cadres formés ; le fait reste que globalement il est à déplorer l'existence de problèmes de fond qui ont profondément remis en cause la contribution effective et efficace de cette forme de coopération à la solution de situations économiques et sociales difficiles. D'une part, les acteurs extérieurs (agences d'aide, bailleurs de fonds, Etats du Nord...) ont toujours voulu jouer un rôle prépondérant dans l'identification, la conception, la négociation, la mise en oeuvre, le suivi et l'évaluation des actions de coopération.... Dans toutes ces étapes, l'implication des acteurs locaux est restée faible ; Alain PIVETEAU note que dans un tel contexte «les motivations réelles des politiques publiques qu'elles soient bilatérales ou multilatérales s'avèrent incompatibles avec la nature profonde d'une aide au développement»12(*). D'autre part, en voulant mettre l'accent sur la réalisation d'objectifs à court terme (ce qui est inhérent à l'approche projet qui a caractérisé la coopération publique), la dimension institutionnelle du développement a généralement été négligée. Au milieu des années quatre vingt (80), trois organismes de poids dans le domaine de la coopération au développement avaient soulevé cette question récurrente dans l'analyse du système d'aide publique et avaient proposé à l'appui de publications sérieuses des réformes du système. Il s'agissait d'un document de l'OCDE, d'un ouvrage rédigé par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et d'une publication de l'European Center for Development Policy Management (ECDPM). Pour Daniel FINO ces trois documents critiquaient assez clairement et assez radicalement aussi le système de coopération classique dans la mesure où leurs auteurs estimaient que «les aspects institutionnels ont été fortement négligés et ce, malgré qu'il ne puisse y avoir de développement durable sans institutions bien structurées à l'intérieur du pays récepteur. (...), la coopération n'aurait pas atteint l'un de ses objectifs principaux à savoir renforcer l'autonomie des institutions locales et nationales»13(*). Il est, par ailleurs, souvent posé la question de l'importante disproportion entre les résultats obtenus et le coût exorbitant de la Coopération14(*).

    Dans son ouvrage consacré à l'analyse des politiques de coopération au développement; Sylvie BRUNEL écrit que «la façon dont l'aide a été affectée aux différentes époques reflète assez fidèlement les différentes conceptions du développement qui se sont succédées»15(*). C'est dans cet ordre d'idée qu'elle soutient, s'inspirant des grands courants mobilisateurs de l'aide mis en évidence par l'économiste Jean-Jacques GABAS16(*), que d'une approche quantitative qui partait du postulat que seul un apport massif de capitaux dans les secteurs dits lourds pouvait engendrer le décollage, on est passé progressivement à une nouvelle approche qualitative insistant sur l'importance de la ressource humaine. Inspirée des théories émergentes de l'époque, la nouvelle approche mise sur d'autres types d'interventions en mesure de prendre en charge les nouvelles préoccupations que sont la participation populaire et la responsabilisation des groupes humains. Les ONG vont se présenter comme les porteurs de cette nouvelle approche.

    En tant que formations sociales, les ONG ne sont, en aucune façon, un produit des années 70 ou 80. De telles organisations existent en effet, depuis plus longtemps que la majeure partie des gouvernements bien que leur dénomination ait été initialement différente. Jean Pierre LEWIS17(*) rappelle que durant le 17ème et le 18ème siècles les britanniques oeuvraient déjà en faveur de groupes sociaux et de minorités opprimés en fournissant une aide philanthropique aux missionnaires et aux écoles pour les indiens, les esclaves et pauvres blancs d'Amérique du Nord. En France, le 17ème siècle qualifié de grand siècle eu égard à l'influence politique, diplomatique et culturelle de l'Etat monarchique, voit apparaître au même moment au sein de la haute bourgeoisie et d'une partie de la noblesse un vaste mouvement de charité privée qui ne cessera de se développer au cours des siècles suivants. Alexis De TOCQUEVILLE18(*) mettait à jour, dès 1840 déjà, la pierre angulaire de la démocratie en Amérique en pointant du doigt le fait associatif. Ces initiatives collectives ou communautaires tournées ou non vers la satisfaction de leurs auteurs rendent compte selon RYFMAN d'une véritable tradition pluraliste d'auto assistance dont les ONG sont l'expression contemporaine. Des études très sérieuses ont montrées en ce sens que les ONG contemporaines sont fortement marquées du sceau de deux empreintes culturelles datant du 19ème siècle. Il s'agit tout d'abord de l'idéale démocratique et des valeurs libérales portées par la bourgeoisie occidentale, et ensuite, de la projection outre mer de la charité chrétienne traditionnellement axée vers le territoire d'origine. Il faut reconnaître concernant cette seconde empreinte culturelle que les églises ont été parmi les premiers à tracer la voie d'une coopération que J.TENDLER qualifie de People to people19(*).

    Ainsi une approche historique des ONG, permet de se rendre compte de l'indépendance et de la primauté d'une aide internationale privée par rapport à l'engagement des gouvernements. C'est dire qu'il est difficile de ne percevoir dans l'émergence des organisations non gouvernementale qu'une simple remise en cause de la légitimité et de l'efficacité du traditionnel «tête à tête» des Etats dans la coopération Nord Sud. L'antériorité d'actions collectives d'assistance issues de la société civile tant dans les pays d'origine (Nord) que sur la scène internationale conduit à rejeter toute analyse confinant à la réaction un mouvement social dont l'histoire révèle qu'il procède initialement de l'action indépendante et autonome. Cependant même si la présence et l'émergence des ONG ne jettent pas l'anathème sur le rôle et l'efficacité des Etats dans les rapports Nord Sud, la réalité reste que la montée en puissance des ONG de développement au cours des années 70-80 s'appuie quant à elle sur une critique souvent virulente du rôle de la coopération publique durant les deux précédentes décennies.

    Section deux (2) : Etat de la question

    La littérature aujourd'hui disponible sur les ONG est suffisamment substantielle mais souffre encore «de préjugés trop faiblement maîtrisés ou reflète des prises de position relevant d'idéaux pratiques qui l'exposent encore aux biais opposés mais tout aussi dérisoires de l'enchantement naïf et du dénigrement commode (...) »20(*) . L'espace non gouvernemental fait, en effet, l'objet d'analyses polémiques, les opinions émises à son propos étant pour la plupart soit laudatives soit accusatrices. Si certains observateurs estiment tout à fait satisfaisantes leurs interventions d'autres, par contre, émettent des réserves quant à leur capacité effective de répondre à l'engouement qu'elles avaient suscité notamment à travers leurs professions de foi.

    Pour les premiers malgré les déficiences constatées ça et là, les réponses données par ces organisations aux besoins pratiques des ruraux constituent une stimulation capitale et non négligeable pour les franges les plus pauvres des sociétés rurales africaines. Ils se demandent, par exemple, ce qu'il y a de plus stimulant ou de plus motivant :

    § qu'un projet de case de santé résolvant les problèmes de santé d'une population qui jusqu'alors devait pour ses soins les plus élémentaires parcourir des dizaines de kilomètres ?

    § que de voir un jeune d'un village devenir agent de santé communautaire, grâce à un projet, ou des femmes des matrones accoucheuses ?

    § que d'entendre les batteuses, les moulins à mil, les motopompes tournaient à plein régime pour  alléger les travaux des femmes, irriguer les terres ou tirer l'eau des puits récemment creusés ?......

    Comme pour dire qu'aujourd'hui nombre de réalisations sont à l'actif de ces organisations qui comme le juge Abdou SARR21(*) ont très tôt su venir à la rescousse des associations et organisations communautaires.

    Par ailleurs, de nombreuses études ont mis l'accent sur le fait que les projets réalisés par les ONG ont eu comme résultat de prendre en charge les besoins de populations longtemps restées brimées par des systèmes de développement qui leur ont laissé si peu de liberté. Ces micro projets furent de réelles opportunités pour elles de se mettre à l'épreuve et de recouvrer une confiance en leurs propres capacités de trouver les solutions à leurs problèmes. Cette prise de conscience a été essentielle dans les mutations qui se sont enclenchées au sein des collectivités rurales dès la fin des années 70. Il est en ce sens important de souligner que la complicité des ONG qu'elles soient locales ou étrangères a été un stimulant fort dans les mutations du milieu rural subsaharien vers des associations villageoises de développement (AVD), «elles ont en fait très fortement contribué à l'émergence et au progrès du mouvement associatif qui a trouvé à travers elles des alliés naturels»22(*).

    On peut aussi enregistrer à l'actif des ONG la prise en compte dans les stratégies de coopération au développement et de lutte contre la pauvreté, d'une masse relativement importante de populations souvent exclues, marginalisées et/ou très mal intégrées dans les modèles étatiques de développement. Il s'agit d'une part des populations des zones géographiques les plus reculées que les autorités et leurs services techniques avaient tendance à délaisser et, d'autre part, des femmes que les modèles de développement importés ou étatiques avaient exclues ou mal intégrées. Ainsi, par exemple, plusieurs projets d'allègement des travaux des femmes, de protection maternelle et infantile, d'accès au crédit, d'alphabétisation, d'économie familiale...ont été largement encouragés et financés par les ONG.

    Sans rejeter ni nier la réalité de ces résultats beaucoup d'auteurs comme Marie RAVEL, P.J ROCA, Valérie BOULOUDANI, Serge GHINET, K. VERHAGEN, B. LECOMTE, P. C DAMIBA..., se montrent tout de même très réservés et critiques à l'égard des ONG.

    La grande contradiction dans les démarches et les luttes entreprises pour changer radicalement de stratégie sur le thème des «pauvres d'abord» est selon Pierre Claver DAMIBA,

    «Celle qui existe entre le discours et l'action de la coopération internationale. Le souci exprimé pour les pauvres est affirmé à temps et à contre temps par les pouvoirs en place et leurs technostructures ainsi que par les donateurs et les ONG. La diversité des analyses sur la pauvreté, la variété des projets concernant les dimensions sociales de l'ajustement, la richesse des recherches académiques, témoignent de la préoccupation des parties intéressées, au Nord et au Sud au sujet de l'éradication de la pauvreté. Cependant, l'impact des politiques, des programmes et des actions proposées n'atteint pas le degré de générosité exprimé dans les rhétoriques»23(*).

    A propos de ce décalage entre discours et pratique des ONG Claude FREUD écrit « qu'en y regardant de plus près le discours que ces organisations tiennent à propos d'elles-mêmes n'est pas tout aussi harmonieux qu'il y parait »24(*). Pour lui25(*), lorsque les ONG parle :

    - d'atteindre les pauvres : force est de constater que ce n'est pas évident quand on examine de près l'impact de leurs actions. La faiblesse de leurs ressources sélectionne objectivement l'accès aux progrès techniques qu'elles proposent. Elles partent toujours de l'hypothèse erronée qu'un contrôle lâche au niveau local entraînera automatiquement une répartition équitable des avantages distribués. Or, semences, engrais, matériel, crédit, proposés en petit nombre ne pourront être acquis que par les personnes les plus aisées ou ayant le plus de pouvoirs dans la communauté ; voire par des élites étrangères au milieu rural (fonctionnaires, commerçants ...) qui saisissent à travers l'intervention une possibilité d'accéder à de nouveaux profits. De ce point de vue, les résultats ne se différencient guère, de ceux des grands projets qui sont à l'origine de l'émergence des paysans pilotes ou dynamiques ;

    - de répondre à une demande locale et de participation des pauvres aux décisions : quand on s'attache à l'historique des décisions et des actions des ONG, on s'aperçoit que celles-ci n'accompagnent que très rarement un projet préexistant lancé par les populations. Bien au contraire, l'ONG crée son projet, l'élabore, suit ses étapes et une connaissance insuffisante du milieu d'intervention peut empêcher que l'action bénéficie aux plus défavorisés (paysans sans terre, groupes socialement marginaux, femmes...) dont on ignore la représentation et le poids dans les processus de décision de la collectivité. Par contre, l'investissement en travail de cette dernière est généreusement sollicité ;

    - d'une contribution qui n'est pas substitution : là aussi il faut nuancer le discours. Tout d'abord si l `ONG tient à se caractériser par son type d'action, son fonctionnement lui ne la démarque aucunement de celui d'une bureaucratie banale. Toute ONG est classiquement pyramidale (siège, délégués régionaux, volontaires de terrain...). Cette bonne hiérarchie entre souvent en contradiction avec le principe de la souplesse, de la confrontation d'homme à homme : les conflits de pouvoirs existent bel et bien. De ce fait, trop souvent le partenariat ne se différencie pas d'une prestation d'un service public à une collectivité. Puisque par ailleurs, la formation d'homologues nationaux est délicate (le problème de leur futur statut et de leur rémunération se pose toujours après le départ de l'ONG) l'ONG a aussi tendance à ignorer les personnels du service public qui travaillent dans le même domaine et cela aboutit à des situations conflictuelles. Tout cela contribue à rendre délicate la prise en charge de l'action par la communauté une fois l'ONG partie. Trop souvent l'arrêt de l'intervention signifie l'arrêt de l'action. Même quand la question de la formation est réglée, il reste celle de la capacité des villageois d'entretenir et de renouveler tous les équipements qui ont été mis en place : c'est tout le problème de l'héritage des charges récurrentes ;

    - d'action non assujettie à une relation de gouvernement à gouvernement : outre le problème des relations avec l'autorité au niveau local, il faut constater que plus on gravit les échelons plus les liens se distendent. On assiste à une quasi-rivalité avec l'Etat qui a débouché dans certains endroits sur un antagonisme ouvert. Cette attitude naïve conduit non seulement à ignorer les représentants de l'Etat (qui régissent quoiqu'on en dise la vie des collectivités) mais aussi la politique (même si elle est contestable). On va agir dans une région sans vouloir savoir ce qu'elle représente dans le pays, sans vouloir savoir quelle est la part de biens et d'équipements variés (écoles, dispensaires, crédits, eau, intrants agricoles...) fournis par le secteur publique ou les grandes aides, sans se demander si les dépenses du petit projet sont comparables à l'ensemble des besoins régionaux. Fi du plan, fi de l'aménagement du territoire, fi des ministères techniques ! Mais une fois l'ONG partie la communauté aidée devra bien vivre ce monde. Ces rapports difficiles sont encore aggravés par la lutte que mènent entre elles les ONG, toutes jalouses de leur indépendance elles agissent chacune de son côté. Dans certains Etats particulièrement démunis, elles présentent le spectacle affligeant de leur zizanie. Certains pays s'en inquiètent et rendent obligatoire le respect d'une charte et d'une concertation ;

    - de petite taille, souplesse, petit coût : est-ce que l'échelle d'intervention est porteuse d'innovations ? En premier lieu, les thèmes techniques diffusés sont les mêmes et sont autant importateurs d'équipements et d'intrants que les grands projets. Les effets multiplicateurs sont faibles, les réalisations spontanées étant dépendantes d'un approvisionnement extérieur. En second lieu, la diffusion des thèmes ne va pas toujours dans le sens souhaité. On constate que les thèmes porteurs sont toujours ceux qui encouragent la promotion individuelle et que ceux qui ne marchent pas sont ceux qui sont liés au développement communautaire. Cela va à l'encontre de l'objectif initial, qui est de venir en aide à l'ensemble des populations et non à une catégorie particulière. Enfin concernant le rapport coût/avantages, il est difficile d'estimer le coût de l'activité, car très souvent le montant de la main-d'oeuvre et celui des autres contributions ne sont pas dissociés. Quand on peut le faire pour effectuer des estimations du coût par bénéficiaire (par unité de production par exemple) et que l'on compare ces estimations à celles de projets similaires du secteur public, on constate que les avantages ne sont pas forcément du côté des ONG : ces dernières fonctionnent à des prix bien supérieurs aux normes nationales ; en outre elles laissent des charges récurrentes aux collectivités ;

    - par rapport aux grandes opérations sur financements extérieurs, il n'est pas évident non plus que les ONG soient moins chères. Le coût de fonctionnement des premières ramené à l'espace touché par les secondes peut révéler des surprises (si le volontaire est moins payé et peut être moins luxueusement logé que les expatriés des grands projets, il a les mêmes moyens de fonctionnement : véhicules et entretien) ;

    - le personnel des ONG : c'est pour Claude FREUD à coup sûr le principal atout. Ce personnel est en général doté d'une expérience pratique et il est motivé idéologiquement. Il veut vivre en symbiose avec le milieu pour mieux y lancer ses actions au ras du sol par la force de la démonstration et de l'animation. Cela dit les ONG qui oeuvrent dans le développement rural ne tiennent pas plus compte des contraintes inhérentes à toute intervention dans ce domaine que les grands projets. A l'image de ces derniers, elles prônent des messages productivistes, qui se heurtent aux mêmes obstacles faute de prendre en considération les stratégies paysannes de minimisation des risques.

    C'est dire qu'un immense fossé sépare les objectifs avoués de la coopération non gouvernementale (combattre la pauvreté, favoriser le développement économique des régions les plus défavorisées, promouvoir la participation populaire...) des pratiques et résultats observés sur le terrain. Les raisons profondes de ce déphasage sont nombreuses et variables selon les auteurs.

    D'un côté, beaucoup d'auteurs insistent sur la nécessité de relativiser la rupture que les démarches participatives prétendent réaliser d'avec les démarches classiques d'intervention. J. C. NGUINGUIRI montre bien dans son article que trop souvent la méthode participative telle que mise en pratique sur le terrain se réduit à de simples dialogues «participatifs», en des échanges ritualisés où les acteurs ne font que valider ou alimenter les analyses et les choix faits par les agents extérieurs, 

    «La planification participative même si elle était à ses débuts considérée comme un processus évolutif dépourvu de toute ambition exhaustive comme c'était le cas dans les démarches précédentes, elle a toutefois perdu ses principes fondateurs qui ont été vite évacués par la plupart des intervenants avides de produits et à la recherche de diagnostics correspondant à leurs propres perceptions des enjeux de développement. Dans la plupart des cas les diagnostics participatifs et les analyses d'experts impliquent déjà des choix de développement en amont de ce qui aurait dû être une concertation interne sur les options futures de développement du territoire»26(*).

    Ce que l'on nomme dans les projets participatifs le pilotage par les besoins exprimés par les populations est en vérité largement un fait de rhétorique. Des auteurs comme J.P.CHAUVEAU et Philippe Lavigne DELVILLE insistent, par exemple, sur le fait que la structure de la demande est souvent largement déterminée par l'offre. Autrement dit le choix des usagers (acteurs à la base) est généralement surdéterminé par les propositions des intervenants,

     «Beaucoup d'intervenants prétendent partir des demandes tout en les orientant nettement vers leur offre. Les diagnostics participatifs menés par les projets dans le but de faire émerger les vrais besoins des populations peuvent être une sophistication supplémentaire dans la manipulation des populations par le projet (il est rare qu'un diagnostic participatif mené par un projet agro - forestier ne débouche pas sur une demande de reboisement...)»27(*).

    La question des sources de financement est également une question qui revient très souvent dans la vaste littérature critique consacrée aux ONG «pour beaucoup de personnes, la dépendance des ONG vis-à-vis de l'argent fédéral et d'une manière plus générale de l'argent officiel constitue un réel motif de polémique»28(*) .

    Schématiquement, l'argument des sceptiques se résume à une question de fond : Comment une  Private Voluntary organization  peut-elle véritablement être privée et indépendante dans ses choix lorsqu'elle est financée à près de 80% par un gouvernement ou une institution dont les options de développement ne sont pas toujours celles qui correspondent aux attentes réelles et à la conception profonde des populations ?

    Ce qui se pose c'est donc la question de l'indépendance ou de l'autonomie des ONG car il est largement démontré que le mode de financement peut influencer la nature des opérations, les régions d'intervention.....et par conséquent restreindre les marges d'initiative et de manoeuvre des ONG.

    Il est vrai que certaines ONG refusent catégoriquement tout subside et cela pour préserver une indépendance totale et exprimer leur engagement vis-à-vis d'un type de développement différent. Mais il est tout aussi vrai que de telles ONG sont aujourd'hui pour ainsi dire une «espèce rare et/ou en voie de disparition ». Un tel constat n'est pas sans soulever un certain nombre d'interrogations toutes plus ou moins relatives à l'espace de liberté (d'autonomie) effectivement dévolu aux ONG. Valérie BOULOUDANI et Serge GHINET, par exemple, s'interrogent avec Sophie BESSIS en ces termes,

    «L'étroitesse des rapports qui lient les plus importantes d'entre elles (les ONG) aux organismes étatiques et/ou publics d'aide au développement n'en fait-elle pas des otages des stratégies d'aide au tiers monde et des alibis commodes pour des bailleurs de fonds soucieux de rectifier leur image de marque, surtout aux yeux des peuples du Sud»29(*).

    Dans son article consacré à l'étude de la relation donateur/ONG, Myriam DONSIMONI soutient que don et altruisme ne vont pas forcément de paire en cela elle cite l'exemple du potlatch ou don de rivalité (Marcel MAUSS). Elle explique que le don considéré par les anthropologues comme un phénomène social total est pour l'homme d'affaires un produit qui s'échange sur le marché de la solidarité. Ainsi l'une des définitions classiques de la science économique est qu'elle a pour sujet l'allocation des biens «rares et utiles»30(*). La thèse de cet auteur est en fait que le don est bien plus qu'un simple transfert de capitaux, de biens ou de services ; il s'accompagnerait de relations sociales, d'attitudes et sentiments qui engendrent d'autres sentiments, attitudes et comportements «chaque transfert par don a une utilité directe, une utilité affective et une utilité d'établissement de relations sociales»31(*). Dès lors le don devrait selon elle être perçu comme un système économique régi par la satisfaction morale, autrement dit, par son geste le donateur doit maximiser sa satisfaction morale sinon il ne restera pas donateur «afin que son don se transforme en aide, le donateur doit accompagner son geste d'un certain altruisme ou d'un altruisme certain»32(*).

    Pour le Dr VERHAGEN, il ne s'agit pas de mettre en doute la sincérité des organes donatrices lorsqu'elles expriment leur préoccupation d'appuyer un processus autoporteur et spontané (self-sustaining) de mobilisation et d'organisation à la base. Selon lui il s'agit plutôt de s'interroger sur l'efficacité de l'outil principal forgé par l'aide internationale pour atteindre ce but en l'occurrence le projet « même s'il est souvent dit, par abus de slogan, petit ou de petite envergure »33(*).

    L'idée principale de la thèse du Dr VERHAGEN est que l'aide par projets ne semble non seulement favoriser « ni l'initiative locale, ni la mobilisation des ressources locales » ; mais en plus «elle ne favorise pas également la participation de la base à la conception et à la planification des activités »34(*). Pour lui si,

    «Les milieux du développement expriment des critiques croissantes à l'égard de l'aide par projet, celles-ci ne s'adressent pas spécifiquement au concept de projet lui-même. Elles s'élèvent contre la manière dont le projet est géré et enchâssé dans un système international dont les limites structurelles entravent plutôt qu'elles ne facilitent la participation populaire»35(*).

    A travers une étude comparative de trois ONG il en arrive à faire trois constats:

    1. les fonds arrivent trop tard provoquant presque une crise des disponibilités financières ou bien il faut les dépenser dans certaines limites de temps,

    2. il arrive fréquemment que ces ONG n'aient pas eu le temps de discuter en détail et tout en profondeur des projets avec les populations cibles,

    3. ou inversement lorsque les agents de terrain ont bien conduit ces entretiens participatifs à la base, les délais de mise en oeuvre ou l'attente des fonds en provenance des sources internationales provoquent frustrations et complications.

    Il est bien évident de l'avis du Dr VERHAGEN que de tels constats contrastent fortement d'avec les procédures participatives qui exigent l'emploi de fonds souples assortis de la garantie que l'assistance financière requise sera disponible au moment requis et en quantité requise,

    «L'une des faiblesses les plus évidentes du système actuel se réfère au temps considérable absorbé par des prés opérations dédiées soit à l'examen minutieux soit à l'estimation des budgets de projets. Ces prés opérations s'effectuées au sein des organismes de financement et de leurs services administratifs qui se trouvent à des milliers de kilomètres du point d'implantation prévu, interrompent  ou entravent un suivi rapide des processus de recherche participative et de planification rapide»36(*).

    Pierre Claver DAMIBA semble abonder dans le même sens, lorsqu'il parle de «non proximité physique ». Pour lui le premier paramètre d'inadéquation est celui de la non proximité des instances de financement et de leur personnel, autrement dit leur éloignement géographique du terrain de lutte contre la pauvreté « qu'elles soient basées à Washington, à New York, à Abidjan ou à Bruxelles, ou qu'elles aient des représentations locales d'aide et de coopération ne change pas la nature de l'éloignement»37(*). L'auteur conforte sa position en expliquant que, la pauvreté étant un phénomène de masse sans l'immersion sociale qui donne la proximité et facilite l'adéquation ; les techno structures demeurent isolées  installées «là bas dans le lointain», elles ont une capacité limitée sinon nulle d'enregistrer à temps, d'analyser et de réagir de manière adéquate aux pulsions des différentes strates sociales. Selon lui leurs missi dominici sont sans doute des visiteurs ou des résidents respectés mais c'est également un fait qu'ils n'arrivent pas à réduire les distances dans le cadre des procédures opérationnelles qui leur servent de législation.

    Les ONG du Sud ou ONG locales sont de l'avis de la plupart des observateurs les plus exposées et les moins nanties face à la situation de dépendance financière. Par exemple sur la question de la disponibilité trop souvent tardive des fonds, Bernard LECOMTE nous fait noter que les «apports d'aide extérieure sont découpés par opérations particulières et ne forment en aucune façon un flux d'aide continu»38(*). En fait ce que déplore l'auteur, c'est surtout le fait que quelquefois il se passe 6, 12, 18 mois au plus entre le moment où les deux parties commencent à entrer en discussions et le moment où le contrat est signé. Plus gênant encore, note t'il, c'est le rythme imprévisible d'arrivée des financements eux-mêmes si l'on sait par exemple dans le cas des ONG donatrices du Nord qu'elles cherchent d'abord à assurer en priorité leur propre fonctionnement et à constituer des provisions c'est-à-dire essayer de garder en permanence une trésorerie suffisante,

    «La préoccupation d'envoyer à temps une trésorerie, même minima à leurs partenaires du Sud, n'est pas essentielle. Beaucoup d'entre elles dépendent pour constituer leurs ressources (parfois à 90%) du rythme de décaissement des programmes dont elles ont obtenu le cofinancement auprès des agences d'aide publiques ou des grandes agences privées»39(*).

    Pour échapper à cette dépendance vis-à-vis d'un organisme ou agence de financement, nombre d'ONG du Sud préfèrent, comme le révèlent de nombreuses études, répartir leurs attaches entre plusieurs institutions. Cette pratique bien connue et largement répandue dans le milieu des ONG du Sud ne procure selon le Dr VERHAGEN qu'une autonomie bien relative. Il soutient en effet, qu'il pourrait résulter de cette situation des effets pervers en ce sens que l'ONG en question pourrait du fait de la multitude de ses bailleurs (institutions donatrices) être confrontée à un «bizarre amalgame de concepts, de stratégies et de projets»40(*).

    Bernard HUSSON analyse la question des sources de financement sous un tout autre angle. Après avoir constaté que certaines ONG pour échapper au risque d'instrumentalisation, valorisent de plus en plus leur enracinement dans la société civile HUSSON s'interroge sur la pertinence d'un tel choix. Il se pose les questions de savoir:

    1. Pourquoi acquérir et conserver les faveurs des citoyens, les ONG ne risquent t-elles pas de coller à leurs «états d'âme» ?

    2. Si l'accès à des financements publics est assimilé à une perte d'autonomie, en quoi la collecte de dons privés rend t-elle les ONG plus autonomes ?

    Les réponses auxquelles ses analyses le mènent sont sans équivoque. Pour lui les ONG ne peuvent échapper,  pour collecter des fonds, à «caresser dans le sens du poil» l'opinion publique, à affecter les dons reçus à des actions qui répondent à l'idée que les citoyens du Nord se font du développement au Sud. Il estime qu'il y a là justement une forme d'instrumentalisation des ONG,

    «Cette instrumentalisation peu ou pas évoquée n'en demeure pas moins constante, et bien réelle ; les puits et le dispensaire, l'école et l'aménagement d'un gué sont plus vendables que le renforcement des collectivités, la mise en place des fonds d'investissements locaux ou l'adaptation des systèmes de formation aux conditions de développement d'une zone»41(*).

    En résumé, l'état de la question sur les interventions des ONG, notamment en rapport aux marges d'autonomie des acteurs à la base, révèle une opposition fondamentale de points de vue et d'analyses chez les observateurs, experts et chercheurs. Si les uns se montrent optimistes et laudatifs ; les autres, par contre, se montrent beaucoup plus réservés, prudents et parfois même sceptiques.

    Les arguments sur lesquels reposent les points de vues et analyses des premiers sont principalement :

    1. le fait que les réponses données par ces organisations aux besoins pratiques des ruraux, ont été des stimulations capitales pour les franges les plus pauvres des sociétés rurales africaines,

    2. le rôle déterminant joué par ces organisations dans l'émergence, la formation et le développement des associations paysannes,

    3. le fait que les projets réalisés par ces organisation aient contribué à la prise en charge des besoins de populations trop longtemps restées brimer par des systèmes de développement qui leur ont soit laissé trop peu de place soit exclu, marginalisé et/ou mal intégré.

    Bien que reconnaissant la plupart de ces arguments, les tenants du camp opposé justifient leur scepticisme par les faits :

    1. qu'il existe une grande contradiction entre le discours et les pratiques des ONG,

    2. qu'il est nécessaire aujourd'hui de relativiser la rupture que les démarches participatives (cheval de bataille des ONG) prétendent réaliser d'avec les démarches classiques d'intervention,

    3. que la question des sources de financement de ces organisation est aujourd'hui suffisamment problématique au point qu'elle ne semble favoriser ni l'initiative locale, ni la mobilisation des ressources locales, ni encore la participation de la base à la conception et à la planification des activités,

    4. qu'il existe comme le nomme P.C. DAMIBA une non proximité physique qui fait les techno structures ont une capacité limitée sinon nulle d'enregistrer à temps, d'analyser et de réagir de manière adéquate aux pulsions des différentes strates sociales.

    L'intérêt qu'a pu revêtir ce rapide état de la question est qu'il nous aura permit en toute connaissance de cause de nous fixer non seulement des objectifs de recherche, mais aussi et surtout de formuler des hypothèses et variables de recherche suffisamment cohérentes et pertinentes vu l'état des connaissances actuelles.

    Section trois (3) : Objectifs de recherche

    Définir l'objectif d'une recherche c'est surtout se demander « quelle est la question que je pose et à laquelle je cherche une réponse  »42(*), il est en ce sens utile de rappeler que nous nous proposons à travers cette étude de faire un état des lieux de la participation des populations (communautés de base) aux projets et programmes de développement réalisés par les ONG GADEC et DIAPANTE. C'est ainsi que le principal objectif théorique que nous nous sommes fixés a été de voir si les acteurs à la base sont effectivement et suffisamment impliqués et responsabilisés dans les projets mis en oeuvre par le ONG GADEC et DIAPANTE, l'objectif secondaire étant le cas échéant de mettre en lumière les mécanismes par lesquels ces acteurs sont impliqués et responsabilisés. Formulée en une question générale de recherche notre objectif théorique a été de savoir si : dans leurs interventions respectives les ONG GADEC et DIAPANTE, laissent effectivement et suffisamment de place à l'expression des marges d'autonomie des acteurs à la base ?

    Au-delà de cet objectif théorique général, nous nous sommes fixé un certain nombre d'objectifs spécifiques de recherche que nous déclinons ci-dessous sous la forme de questions spécifiques de recherche :

    1) Quelles sont les modalités de participation des acteurs à a base aux projets du GADEC et de DIAPANTE ?

    2) Les acteurs à la base sont-t-ils effectivement (selon les exigences de l'auto développement) les « décideurs » dans les processus de planification, d'exécution et d'évaluation des projets du GADEC et de DIAPANTE ? L'initiative populaire est-elle souveraine dans les projets du GADEC et de DIAPANTE?

    3) Quelles sont les contraintes et contradictions que soulèvent cette participation tant du point de vue de ces deux (2) ONG que de celui de leurs OCB partenaires ?

    4) Quels sont les impacts des cadres juridico -institutionnels et politiques sur la participation des acteurs à la base aux projets du GADEC et de DIAPANTE?

    5) L'origine des sources de financement a-t-elle effectivement une incidence sur l'autonomie du GADEC et de DIAPANTE et donc sur leurs capacités à promouvoir effectivement et efficacement le renforcement des capacités locales ?

    Section quatre (4) : Hypothèses et construction des concepts de la recherche

    Les éléments de connaissance tirés de la revue littéraire ainsi que les données de nos pré enquêtes nous ont permis de formuler, dès le départ de notre recherche, une hypothèse générale en réponse à notre question de départ C' elle-ci est que :

    Du fait de la composition d'un certain nombre de facteurs, les marges d'autonomie des acteurs à la base même si elles sont effectivement prises en compte dans les interventions du GADEC et de DIAPANTE se retrouvent tout de même limitées.

    Partant de cette hypothèse principale, une seconde hypothèse a été formulée à savoir que :

    Ces dits facteurs en composition ont essentiellement trait  au fait que d'une part, ces ONG sont perpétuellement à la quête de la performance, de la crédibilité et de la visibilité et au fait que, d'autre part, les cadres juridico institutionnels et financiers dans lesquels elles évolues sont devenus de plus en plus contraignants.

    Emile DURKHEIM dans Les règles de la méthode Sociologique (1895) insistait sur la nécessité pour le chercheur de définir les choses dont il traite afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est question « une théorie ne peut être contrôlée que si l'on sait reconnaître les faits dont elle doit rendre compte »43(*). L'étape de la construction des concepts correspond à cet exercice de définition provisoire qui permet dans ses grandes lignes de délimiter le champ de la recherche et de désigner les phénomènes dont il sera question.

    Dans la présente recherche les concepts qui nous ont paru centraux au point de mériter un travail de construction sont ceux : d'intervention des ONG, de marges d'autonomie (des acteurs à la base), d'effectivement et suffisamment de place (à l'expression des marges d'autonomie) et/ou d'effectivement mais limitées et de composition (de divers facteurs).

    - Intervention des ONG : sans vouloir nous étendre sur le concept d'intervention et sur toute la littérature qu'il a pu susciter, nous remarquerons que de manière générale l'intervention qu'elle soit politique, économique, sociologique ou autre suppose une action où prennent part (volontairement ou non) des acteurs précis dans le but de produire, d'encourager et/ou de susciter une dynamique de changement sous quelque forme que ce soit dans un milieu donné. Ainsi en sociologie, le concept d'intervention est toujours à lier à celui de changement. L'intervention des ONG ne semble pas échapper à cette logique dans la mesure où elle devra essentiellement être comprise comme l'ensemble des actions (construction d'ouvrages, formation/alphabétisation/sensibilisation, introduction de nouvelles variétés culturales ou de nouvelles techniques.....) menées par ces dernières sur le terrain du développement en vue d'atteindre des objectifs c'est-à-dire de produire et/ou de susciter un processus de changement social, économique, politique...tel la réduction de la pauvreté. Ces actions ou interventions se déclinent généralement sous la forme de projets et programmes. Selon R.DECLERCK « les projets ne sont que des ensembles d'activités limités dans le temps et dans l'espace, insérés et en interaction avec un environnement politico socio-économique et tendus historiquement vers un but redéfini progressivement par la dialectique entre la pensée (plan du projet) et la réalité ». Ainsi si le projet est la dimension essentielle de l'intervention des ONG, DECLERCK semble vouloir lui assigner les indicateurs suivants : le temps, l'espace, l'environnement politique et socio-économique, le but.

    Ces « indicateurs de DECLERCK » sont dans le cadre de cette étude regroupés autour de deux indicateurs principaux :

    1. Les déterminants structurels et/ou conjoncturels

    2. Les modalités de mise en oeuvre

    S'agissant des déterminants structurels et/ou conjoncturels (ou plus simplement des contraintes et contradictions de l'intervention) nous pourrons retenir les indices suivants :

    1. Les sources de financement ou les partenaires financiers,

    2. Les cadres juridiques, institutionnels et politiques,

    3. Les aspects idéologiques ou les options sous jacentes

    Quant aux modalités de mise en oeuvre (modes opératoires) elles concernent surtout :

    - L'identification / analyse des besoins

    - La planification des activités

    - La réalisation du projet

    - Le suivi - évaluation

    Remarquons pour terminer que les processus de décision occupent une place centrale dans l'intervention des ONG ; elles sont comme qui dirait à la « croisée des chemins ».

    - Marges d'autonomie des acteurs à la base : La marge se définit dans un sens générique comme l'espace ou la latitude dont on dispose entre certaines limites « possibilité d'action entre une limite théorique et un limite pratique »44(*). L'autonomie quant à elle se dit d'une personne, d'un groupe ou d'une chose qui a la capacité (liberté) de se gouverner par ses propres lois45(*).

    L'étude retiendra cependant deux dimensions principales pour ce qui est du concept de marges d'autonomie des acteurs à la base :

    1. Les marges d'initiative

    2. Les marges de manoeuvre

    Il faut rappeler tout simplement que notre cadre conceptuel général s'articule autour de la problématique de l'auto développement qui suppose une liberté des acteurs alors que celle-ci (la liberté) chez l'homme ne saurait très concrètement se manifester qu'à travers l'initiative et la manoeuvre.

    L'initiative (marges d'initiative) est définie comme l'action de celui qui est le premier à proposer, à entreprendre, à organiser quelque chose. Ici donc il s'agit pour les acteurs à la base de « décider par soi » ; c'est ce que nous pourrions nommer le principe de l'auto détermination. La marge d'initiative suppose dès lors que l'action soit dès le départ la plus indépendante possible d'une animation extérieure,

    « Le premier principe de l'endogénéité est que l'accompagnement technique (l'intervention) ne se fixe aucun objectif préalable à sa démarche d'appui si ce n'est tout au plus d'être disponible pour l'émergence d'une dynamique endogène de décision et de planification »46(*) .

    La manoeuvre (marges de manoeuvre) est selon le Larousse  « la manière de régler le jeu »47(*) ; ce qu'il est important de retenir à ce niveau de l'étude c'est que cette dimension renvoie surtout à la liberté d'action et de contrôle qu'ont les acteurs à la base dans le cadre des projets et programmes initiés par les ONG. Il s'agit donc pour eux d'agir « pour et par soi » c'est le principe de l'auto gestion.

    L'initiative (auto détermination) et la manoeuvre (auto gestion) sont donc les deux dimensions des marges d'autonomie auxquelles nous pourrions associer quatre indicateurs selon la formule de G. BELLONCLE « les quatre mots de l'auto développement sont : auto analyse ; auto programmation ; auto organisation ; auto évaluation »48(*) . Ainsi nous aurons :

    Pour les marges d'initiative :

    1. L'auto analyse

    2. L'auto programmation

    Et pour les marges de manoeuvre :

    1. L'auto organisation

    2. L'auto évaluation

    - Effectivement et suffisamment de place et/ou Effectivement mais Relativement limitées : Contrairement à « l'intervention des ONG » et aux « marges d'autonomie » qui sont les deux variables fondamentales de cette étude et pour lesquelles nous nous sommes attachés au-delà d'une définition à identifier des dimensions, des indicateurs et des indices ; ici et pour le concept de « composition » il s'agira plus pour nous de préciser par rapport à nos objectifs et options théoriques le contenu qu'il faudra donner à ces concepts. S'il est exact comme le remarquent R. BOUDON et F. BOURRICAUD que les questions que le sociologue se pose n'impliquent pas toutes des problèmes de mesure, il est également tout aussi vrai que certaines de ces questions comportent d'inévitables problèmes de mesure. Si nous avons pu jusque là éviter de parler de mesure, le fait reste que cette étude ne saurait atteindre ses objectifs en occultant l'inévitable question du niveau de participation des acteurs de la base aux projets et programmes du GADEC et de DIAPANTE « la nécessité de définir des mesures, fussent-elles ordinales découle donc de la nature même de certains concepts »49(*). Ainsi l'usage des concepts de « effectivement et suffisamment » ou de « effectivement mais relativement limitée » doit être comprise comme une volonté de définir une échelle ordinale50(*) de mesure de la participation des acteurs à la base. Cette échelle s'établit selon les degrés suivants :

    - Effectivement et suffisamment

    - Effectivement mais moyennement

    - Effectivement mais passablement (ou relativement limitée)

    - Effectivement mais nulle

    - Non effectivement

    - Composition : Tout comme pour le dictionnaire Larousse le dictionnaire robert définit la composition dans son sens familier comme l'action ou la manière de former un tout en assemblant plusieurs éléments c'est à dire donc comme la disposition des éléments. Sous cet angle « composition de divers facteurs » doit être compris de l'action ou de la manière de former un tout par l'assemblage de divers facteurs. Ici nous concevons d'une part que ce tout c'est le « partenariat ONG / acteurs à la base (OCB) » et que d'autre part ces divers facteurs assemblés sont à la fois les déterminants structurels et/ou conjoncturels de l'intervention, ses modalités de mise en oeuvre, les marges d'initiative et les marges de manoeuvre. En outre, le concept de composition doit être compris en référence à ce que Jean Michel BERTHELOT51(*) nomme les schèmes de composition par différenciation aux schèmes de dépendance et aux schèmes de signification. Ici le principe est que l'explication (explicandum) du phénomène étudié est la résultante de la composition d'éléments divers s'opérant soit par agrégation (schème actanciel) soit par insertion dans un système de forces antagonistes (schème dialectique).

    Cadre opératoire de la recherche

    Marges d'autonomie

    Marges d'autonomie

    Suiv./Eva

    Gest.Inter

    F. Inter

    M. Inter

    Souveraineté des AB

    Aspirations

    Besoins

    Suivi/Eval..

    RP

    PA

    IABA

    AI

    CJIP

    SF.

    Auto-Ev.

    Auto-Org.

    Auto-Prog.

    Auto-Ana

    M.M.OE

    D.S et/ou Conj.

    Marges d'initiatives

    Projets

    Intervention des ONG

    Variable dépendante

    Variable indépendante

    ++

    LÉGENDE DU CADRE OPÉRATOIRE

    Abréviations

    Significations

    DS et/ou Conj.

    Déterminants structurels et/ou Conjoncturels

    M. M. OE

    Modalités de Mise en OEuvre

    S.F

    Sources de financement

    CJIP

    Cadres Juridico- Institutionnels et Politiques

    A.I

    Aspects idéologiques

    IABA

    Identification Analyse des Besoins et Aspirations

    PA

    Planification des activités

    R.P

    Réalisation du Projet

    Suiv. Eva.

    Suivi / Evaluation du Projet

    Auto Ana

    Auto Analyse

    Auto Prog.

    Auto Programmation

    Auto Org.

    Auto Organisation

    Auto Ev.

    Auto Evaluation

    A.B (Souveraineté des AB)

    Acteurs à la base

    M. inter.

    Mode de l'intervention

    F. inter.

    Forme de l'intervention

    Gest. Inter.

    Gestion de l'intervention

    Chapitre deux (2) : Cadre méthodologique de la recherche

    Section cinq (5) : Le modèle d'analyse

    Pour J. M. BERTHELOT un schème d'intelligibilité ou schème explicatif est «une matrice d'opérations permettant d'inscrire un ensemble de faits dans un système d'intelligibilité, c'est-à-dire d'en rendre raison ou d'en fournir une explication »52(*). Suivant la logique de notre hypothèse qui postule que c'est du fait de la composition entre divers facteurs liés à l'intervention des ONG que les marges d'autonomie des acteurs à la base, même si elles sont effectivement pris en compte se retrouvent limitées dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE ; notre modèle d'analyse pour rendre raison du phénomène (procès) étudié a dû faire recours aux schèmes de composition et plus précisément au schème dialectique, dont la forme idéale typique se retrouve dans la fonction mathématique :

    (A l B) = (a & non a) B

    Avec ici :

    a = déterminants structurels et/ou conjoncturels et modalités de mise en oeuvre.

    Non a = les exigences de l'auto développement (auto analyse, auto programmation, auto organisation, auto évaluation)

    B = le procès étudié (partenariat ONG/acteurs à la base).

    Pour BOUDON et BOURRICAUD l'histoire officielle de la notion de dialectique au sens moderne du mot commence avec Emmanuel KANT, ils insistent cependant sur le fait que c'est principalement à partir de HEGEL et à sa suite de Karl MARX que la notion connaît un engouement considérable et prend une signification qui concerne directement les sciences sociales. Pour ces auteurs du Dictionnaire critique de la sociologie, chez HEGEL comme chez MARX la notion de dialectique et celle de contradiction qui l'accompagne sont incontestablement polysémiques mais désignent dans l'autre sens,

    « (Par delà les différences entre les deux auteurs que résume l'opposition traditionnelle entre l'idéalisme de Hegel et le matérialisme de Marx) une intuition d'une importance fondamentale dans l'analyse des phénomènes sociaux à savoir que les agents sociaux peuvent, par le fait même qu'ils poursuivent un objectif contribuer à provoquer un état de chose distinct (et éventuellement contradictoire) avec l'objectif recherché »53(*).

    Abondant dans le même sens J. M. BERTHELOT explique que dans la tradition philosophique la dialectique implique un noyau à travers l'idée de contradiction :

    (A l B)= (a & non a) B ((A l B) = (forme simple forme développée) = (a & non a) B

    ? base matérielle (M)

    Cette double détermination interne et externe, formelle et matérielle relève, selon lui, d'une même logique qui pourrait se résumer de la sorte : le développement du procès étudié (B) dépend d'un double rapport d'interactions dynamiques entre les éléments constituants (a et non a) d'une part, et entre ceux-ci et leurs déterminants matériels d'autre part (M). Ce rapport de conditionnement réciproque et de déséquilibre relatif secrète la dynamique rendant compte du procès étudié autrement dit a rend possible B qui en se développant nécessite la transformation de a.

    Concrètement, il s'agit d'envisager le partenariat ONG/OCB ou plus exactement les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE sous l'optique, par exemple, de la loi de la baisse tendancielle du taux de profit54(*) développée par Karl MARX. Etant en situation de concurrence les uns par rapport aux autres (notamment pour se construire une légitimité ou pour attirer les flux de capitaux émanant des bailleurs ou, tout simplement, pour assurer leur survie dans la « jungle » de la coopération au développement); les ONG (celles nationales surtout) ont intérêt à rechercher constamment à améliorer leur productivité en diversifiant, par exemple, leurs sources de financement ou en ayant de plus en plus tendance à ajuster leurs approches, options, modes opératoires........aux exigences des partenaires/bailleurs ou aux textes réglementaires (accords cadres) de leurs Etats hôtes. Mais, ce faisant, elles contribuent à laminer la base à partir de laquelle le « profit » (l'atteinte des véritables objectifs de développement) est possible, puisqu'elles sont amenées à reléguer au second plan les véritables exigences de l'auto développement à savoir la participation effective, suffisante et centrale des acteurs à la base. C'est dire qu'elles sont progressivement amenées à force de rechercher la compétitivité, la crédibilité et le professionnalisme à limiter sinon à négliger l'importance des marges d'autonomie dont les acteurs à la base doivent disposer dans la conception, l'organisation, l'exécution et l'évaluation des projets de développement.

    Schéma Récapitulatif du Modèle d'analyse

    (A l B) = (a & non a) B

    (A l B) = (D.S et/ou Conj. et M.M.OE) (Partenariat ONG/acteurs à la base)

    D.S et/ou Conj. et M.M.OE

    MI et .M.M

    Source de financement

    Cadre J.I & Pol.

    Aspects Idéo.

    IABA

    P.A

    RP

    Suivi/Eva

    Besoins

    Aspirations

    Souveraineté des Act. B

    Mode de l'intervention

    Forme de l'intervention

    Gestion des projets

    Suivi/Eva

    (M)

    Avec = rapports de conditionnement et de déséquilibre relatif

    Section six (6) : Les techniques de recueil de données

    Deux (2) techniques ont été utilisées pour le recueil de données, il s'agit :

    1. des techniques vivantes à travers l'usage du questionnaire et du guide d'entretien,

    2. et des techniques documentaires (analyse de contenu)

    6.1 : Le questionnaire

    Il a été, avec l'analyse de contenu, l'un de nos principaux outils de collecte ; le guide d'entretien n'étant venu qu'en appoint. Il faut préciser, cependant, que ce n'est pas un seul et même modèle de questionnaire qui a été administré à toutes les personnes enquêtées. Trois (3) modèles de questionnaires ont été confectionnés et utilisés sur la base d'une distinction simple et fondamentale entre personnel ou membres des ONG et membres ou sympathisants des OCB partenaires.

    Les deux (2) premiers modèles de questionnaires ont ainsi été appliqués au personnel ou membres des ONG à l'étude selon leurs statuts respectifs au sein de celles ci. Quant au troisième modèle de questionnaire, il a été administré aux personnes membres ou sympathisants des OCB partenaires de ces deux ONG.

    Pour le premier modèle de questionnaire appliqué au personnel ou membres des ONG à l'étude, il a surtout concerné les délégués, coordonnateurs, responsables des programmes, responsable genre et développement (RGD), responsable éducation animation et développement (READ) et chargés de programmes au sein de DIAPANTE et du GADEC. Il a été bâti en plus de l'identification sociologique autour de cinq (5) rubriques :

    · Rubrique I : L'élaboration des projets et programmes

    · Rubrique II : La planification des activités

    · Rubrique III : L'exécution des projets et programmes

    · Rubrique IV : Le suivi/évaluation des projets et programmes

    · Rubrique V : Le projet ou programme : son environnement social, juridique, politique, institutionnel et financier

    Le second modèle de questionnaire appliqué au personnel ou membres du GADEC et de DIAPANTE a été quant à lui soumis aux délégués, coordonnateurs, administrateurs financiers et/ou responsables de l'auto financement ainsi qu'aux secrétaires exécutifs de ces deux ONG. Outre l'identification sociologique ce modèle de questionnaire comportait quatre (4) rubriques:

    · Rubrique I : Les partenaires financiers classiques de l'ONG et leurs visions/ exigences en matière de programmes de développement

    · Rubrique II : Les termes des partenariats financiers

    · Rubrique III : La qualité des partenariats financiers

    · Rubrique IV : L'auto financement : défis et écueils

    S'agissant du troisième modèle de questionnaire il a été appliqué aux membres ou sympathisants des OCB cibles (comités de jumelage et EIVC). Mis à part la partie identification sociologique55(*), ce modèle de questionnaire était bâti autour de quatre (4) rubriques:

    · Rubrique I : L'OCB : son historique, son organisation, son mode de fonctionnement et ses difficultés.

    · Rubrique II : L'ONG et son rôle dans le renforcement des capacités institutionnelles, organisationnelles et financières de l'OCB.

    · Rubrique IV : L'OCB dans les programmes de l'ONG.

    6.2 : Le guide d'entretien

    Comme nous le remarquions, le guide d'entretien n'a en fait été utilisé qu'en appoint par rapport aux questionnaires et à l'analyse de contenu. Il convient de dire que l'usage de cet outil s'est justifié par la nécessité pour l'étude de ne pas seulement se limiter à aborder la question de la participation des acteurs à la base sous une perspective quantitative. Nous avons, en effet, été profondément convaincu (dès le début de cette recherche déjà) par l'idée que certes il est tout à fait possible de quantifier la participation des acteurs à la base, mais l'important restait que ces acteurs donnent un sens à l'intervention des ONG. Autrement dit ils ont une vision/perception de la relation qui les lie aux ONG, des opportunités que leur offre la présence de ces acteurs, de leur intérêt à collaborer ou à ne pas le faire.... Bref ils assignent une portée au contexte qui se met en place grâce à l'intervention des ONG. Dans cette logique l'usage du guide d'entretien, nous a permis d'aborder « à bâtons rompus » avec les populations concernées56(*) un certain nombre de thèmes. Ce guide d'entretien semi directif, était articulé en cinq (5) thèmes :

    · Thème I : Le village : quelles potentialités, quelles contraintes et quels besoins?

    · Thème II : L'ONG et les opportunités qu'elle offre ou qu'elle pourrait offrir

    · Thème III L'ONG : ses interventions/réalisations et la prise en charge des besoins et aspirations des populations à la base

    · Thème IV Le programme : quelle participation pour les populations 

    · Thème V : Le partenariat ONG / OCB du village : qui décide et quelles difficultés majeures ?

    6.3 : L'analyse de contenu

    En appoint aux techniques de collecte sur le terrain, nous avons fait recours à l'analyse de contenu avec comme objectif de recouper certaines données. Les documents consultés ont été des documents émis (produits) par ou pour le compte des ONG GADEC et DIAPANTE (fiches synoptiques, rapports d'activités, documents de diagnostics internes et organisationnels, documents de planification stratégiques, textes d'orientation, statuts, documents de capitalisation, conventions cadre ou de partenariat, lettres de mission...).

    Section sept (7) : Echantillonnage, choix des personnes ressources et histoire de la collecte des données

    D'une façon générale les sciences sociales disposent de deux (2) techniques ou méthodes d'échantillonnage :

    1. les méthodes probabilistes ou méthodes du choix au hasard

    2. les méthodes des quotas ou méthodes du choix raisonné

    Pour leurs qualités de simplicité et de rapidité, nous avons dans la constitution de nos échantillons opté pour les méthodes des quotas. C'est dire que l'essentiel des échantillons desquels émanent les données de l'enquête de terrain s'est construit selon un choix raisonné. Qu'il s'agisse du personnel ou membre des deux ONG à l'étude ou encore des membres ou sympathisants des OCB partenaires de ces ONG, nous avons dû opérer par choix raisonné afin de satisfaire à deux (2) exigences qui n'ont cessé de nous hanter tout au long de cette étude :

    1. recueillir des informations qui seraient précises, fiables et au maximum détaillé,

    2. respecter au mieux la règle de la représentativité

    Dès lors nous avons dû, pour les deux catégories de personnes ressources sus citées, procéder par sélection rigoureuse ou systématique selon des critères de représentativité moyenne. C'est-à-dire que partant d'un modèle de la population de ces structures (organigrammes) nous avons opéré à des choix raisonnés selon un critère de représentativité assez simple : la maîtrise de l'information. Ainsi pour le recueil d'informations au GADEC et à DIAPANTE deux types de questionnaires ayant étaient confectionnés sur des thématiques différentes (les questions financières, les projets/programmes et l'état de la participation), il nous fallait identifier dans les organigrammes de ces structures les personnes ressources qui à priori paraissaient les plus indiquées pour parler de ces questions. Il nous est apparu après examen des organigrammes que s'agissant du questionnaire traitant des questions financières les personnes ressources les plus indiquées étaient :

    · au GADEC : le secrétaire exécutif, le coordonnateur et le responsable de l'auto financement (RAF)

    · à DIAPANTE : le délégué et l'administrateur financier (assistant administratif et financier)

    S'agissant par contre du questionnaire N°2, nous avons retenu comme personnes ressources :

    · pour le GADEC : le secrétaire exécutif, le coordonnateur, le responsable genre et développement (RGD), le responsable éducation animation et développement (READ), le responsable du suivi évaluation, les chargés de programmes et les animateurs paysans

    · pour DIAPANTE : le délégué, le responsable des programmes, les chargés de programmes.

    Notons qu'au GADEC, nous n'avons pu rencontrer qu'un seul chargé de programmes et deux (2) animateurs paysans. C'est ce qui fait que la collecte de données au niveau de ces ONG s'est faite avec des échantillons représentatifs de six (6) personnes pour DIAPANTE soit 100% de la structure opérationnelle et de neuf (10) personnes pour le GADEC (35%).

    Pour le recueil de l'information au niveau des OCB concernées par l'enquête, nous sommes également partis d'une base de sondage constituée par les organigrammes pour, par la suite, nous exercer à identifier les personnes ressources susceptibles de nous être d'un apport quelconque au regard des informations que nous souhaitions recueillir. Pour les comités de jumelage de Mbagam et de Ndiathène, les personnes ressources retenues ont été : les coordonnateurs des BE, dix (20) parmi les 72 coordonnateurs de commissions techniques (soit 10 coordonnateurs par comité de jumelage), les responsables techniques (2), les secrétaires à l'organisation (2) et les chefs de village. Pour l'EIVC l'échantillon s'est composé de quinze (15) représentants d'associations villageoises à l'AG (soit 1/5 des représentants d'associations villageoises), trois (3) membres du BE (président, vice président et secrétaire général) soit 34% des membres de ce bureau, trois (3) animateurs et un (1) relais principal ou contrôleur. De fait le questionnaire N°3 a été appliqué à un échantillon de vingt (30) personnes pour l'ensemble des deux comités de jumelage (un peu moins de 45%) et de vingt deux (22) personnes pour l'EIVC (20%).

    L'application du guide d'entretien ayant répondu à d'autres préoccupations ; la démarche d'échantillonnage aura par conséquent été tout autre. Rappelons tout simplement que l'usage de cet outil de collecte s'est justifié par l'exigence qui nous semblait s'imposer de ne pas nous limiter uniquement au recueil de données quantitatives sur la participation des populations aux projets et programmes du GADEC et de DIAPANTE. Autrement dit en tant qu'outil qualitatif le guide d'entretien devait nous aider à appréhender les problèmes de la participation sous une perspective qualitative. Dès lors il devenait méthodologiquement impossible de vouloir définir à priori un échantillon d'enquête d'autant plus que les outils qualitatifs ne sauraient se prêter à un tel exercice. Le critère d'échantillonnage retenu ne pouvait être dans cet ordre d'idée que la « saturation des réponses».

    L'histoire de la collecte des données peut être résumé en deux (2) étapes :

    1. La pré enquête : Elle correspond à la période qui va de l'ébauche de notre sujet de recherche à l'élaboration définitive de nos outils de collecte de données. Cette période a consisté en deux (2) activités principales : la recherche bibliographique et la quête d'ONG avec qui travailler sur cette étude.

    2. L'enquête proprement dite : Elle s'est faite en deux ou trois mois. Pour le GADEC et l'EIVC, elle s'est faite au mois de septembre 2004 alors que nous étions en stage au GADEC à Tambacounda, alors que pour DIAPANTE et les comités de jumelage les choses se sont quelque peu faites autrement. C'est à dire que nous avons dans un premier temps ( Août 2004) tenu une série d'enquêtes à DIAPANTE même et ce n'est que bien plus tard entre Décembre 2004 et Janvier 2005 que nous sommes allés sur le terrain à Mbagam et à Ndiathène.

    Articulée en trois (3) chapitres, cette partie du mémoire présente les cadres géographiques et humains de l'étude (chapitre 5) ainsi que les ONG et organisations à la base sur lesquelles nos enquêtes de terrain ont portées (chapitre 3 et 4).

    Chapitre trois (3) : Présentation des ONG étudiées

    Selon la direction du développement communautaire (DDC) de la mise en place du nouveau cadre de coopération Etat/ONG57(*) à 2000, le nombre d'ONG agrées au Sénégal était de 339 dont 198 ONG nationales et 141 ONG étrangères. Au 31 octobre 2003, ce chiffre de 339 ONG était passé à 410 ONG comprenant près de 65% d'ONG nationales (265). Sur la même période 165 programmes d'investissements ont été signés entre les ONG et le gouvernement du Sénégal pour un investissement prévisionnel global de 77.394.512.456 Fcfa. Cet investissement prévisionnel global est passé, de 2000 à 200358(*), de 27.000.000.000Fcfa à plus de 65.000.000.000Fcfa avec au total la signature de 114 programmes d'investissements couvrant l'ensemble du territoire national ainsi que tout les secteurs d'activités des populations rurales et urbaines.

    Années

    Nombre d'ONG

    Nombre de programmes d'investissements signés

    Montant des programmes d'investissements (FCFA)

    1996 -2000

    339

    165

    77.394.512.456

    2000-2003

    410

    114

    65.843.102.685

    Source : DDC (Ministère de la famille du développement social et de la solidarité nationale)

    D'un autre côté, alors qu'en 1996 le CONGAD estimait à près de 200 les ONG présentes au Sénégal (avec au moins plus de 180 ONG effectivement agrées)59(*) ; en 2000 ces mêmes chiffres ont été revus à la hausse puisque le nombre d'ONG présentes sur le territoire national était à nouveau évalué à près de 600 (ONG nationales et étrangères confondues).

    Tableau N°1 : ONG membres du CONGAD par région d'intervention

    Régions

    Nombre d'ONG membres du CONGAD présentes

    Dakar

    85

    Diourbel

    42

    Fatick

    46

    Kaolack

    55

    Kolda

    40

    Louga

    46

    Tambacounda

    43

    Thiès

    76

    Saint-Louis

    64

    Ziguinchor

    54

    Total

    551

    Source: CONGAD. Répertoire des Organisations non gouvernementales membres du CONGAD. Dakar, 3éme trimestre 1999, ed. CID / CONGAD

    Il ressort de ce qui précède que l'augmentation des ONG entre 1996 et les années 2000 a été fulgurant avec une nette prédominance des ONG nationales. Les projets et programmes mis en oeuvre par ces organisations concernent tous les secteurs d'activité des populations et couvrent l'ensemble des régions du pays. A ce titre DIAPANTE et le GADEC paraissent assez représentatifs de la configuration (morphologie) des ONG que l'on trouve au Sénégal. Dans cette présentation que nous faisons d'elles, nous nous efforçons :

    1. de revenir sur l'historique de leur création

    2. d'établir leurs profils organisationnels et/ou institutionnels

    3. d'identifier leurs différents axes stratégiques d'intervention (domaines d'activité) ainsi que leurs principaux objectifs, missions et partenaires

    Section huit (8). DIAPANTE : Association de développement

    La création en Mai 1987 de l'association de développement DIAPANTE fait suite à une action de volontariat menée par un groupe de jeunes marseillais venus réaliser dans la vallée du fleuve Sénégal un dispensaire de brousse. Il est important, pour bien cerner le contexte de la création de l'ONG, de faire remarquer que dès le début des années 80 déjà il s'était engagé à Marseille et sous la houlette du centre socioculturel Baussenque une intense réflexion sur l'appui au développement Nord/Sud. L'une des principales recommandations qui en était ressortie était qu'il fallait de plus en plus envisager les actions d'aide au développement non plus « en des termes économiques mais plutôt en terme d'urgence ». L'idée de mettre sur pied une organisation basée au Sénégal et durablement engagée à soutenir l'émergence de dynamiques endogènes de développement venait d'être lancée.

    Il est difficile de classer DIAPANTE dans le schéma classique que constitue la distinction entre ONG nationales (locales) et ONG internationales (étrangères), dans la mesure où elle dispose d'un double statut d'association française et sénégalaise. C'est pourquoi, par commodité théorique, nous retiendrons que DIAPANTE est une ONG locale disposant de la « double nationalité » franco-sénégalaise. C'est en effet, une association franco-sénégalaise à but non lucratif (ABNL) ayant le statut d'association française constituée depuis 1987, agrée ONG au Sénégal en 1989 (N°00049 MINT/ DDC/ DONG) et bénéficiant du statut d'association sénégalaise depuis 1992.

    L'association de développement DIAPANTE est organisée autour de deux (2) organes statutaires que sont la structure associative (SA) basée en France (conseil d'administration) et la structure opérationnelle (SO) active dans la région de Saint-Louis et chargée de l'exécution des projets et programmes.

    Après quinze (15) années d'intervention exclusive dans la vallée du fleuve Sénégal, DIAPANTE tente aujourd'hui d'élargir son champ d'action à l `ensemble du territoire sénégalais. Elle s'est parallèlement aussi, lancée dans un processus de diversification de ses domaines d'intervention en explorant des secteurs aussi variés que : le développement social, l'éducation de base, l'appui aux organisations à la base, l'hydraulique villageoise, le développement local, la coopération décentralisée, la gestion des ressources naturelles, la gestion des ressources humaines, la santé, la prévention, l'animation rurale, la recherche-action en ingénierie de formation, la communication/information...Soulignons cependant, que le CONGAD la classe au rang d'organisation spécialisée dans le domaine de la formation en milieu rural, c'est ainsi que selon des chiffres de la DDC le montant de l'investissement prévisionnel global de l'ONG dans ce domaine s'élevait en 2003 à près de 124.303.000Fcfa.

    En Avril 2002 l'ONG s'était exercée, à l'occasion de l'atelier de planification stratégique organisé pour l'élaboration de son Plan Stratégique 2003-2007, non seulement à actualiser sa vision et ses missions mais aussi à (re)définir ses orientations, axes stratégiques d'intervention et objectifs stratégiques. La vision de l'organisation est celle d'une « organisation forte et attractive à la pointe de la réflexion et de l'action et bénéficiant de la confiance des acteurs locaux, nationaux et internationaux oeuvrant pour une société juste et équitable »60(*), ce qui explique qu'elle est très impliquée dans les dynamiques de la société civile et quelle, est à ce titre, membre du CONGAD et de nombreux autres réseaux d'ONG et organisations de la société civile. Elle se fixe comme mission de,

    « Favoriser la promotion d'une société équitable permettant l'expression et le développement des plus pauvres par le renforcement du dialogue social et le développement des économies locales »61(*).

    Les axes stratégiques d'intervention de DIAPANTE touchent à des domaines tels:

    1. le développement socioéconomique et la gestion des ressources naturelles,

    2. la décentralisation, le développement local et le renforcement de la société civile,

    3. l'accès aux services de base et à l'information pour les plus démunis,

    4. la prévention et la préparation à l'urgence,

    5. le renforcement institutionnel de l'organisation et le développement du réseautage ;

    Dans son Plan Stratégique 2003-2007 l'ONG se fixe cinq (5) objectifs stratégiques que sont:

    1. Promouvoir les activités économiques alternatives prenant en compte la préservation des ressources naturelles et renforcer les potentialités endogènes pour un développement local durable ;

    2. Renforcer les cadres de concertation et les capacités de dialogue des acteurs locaux et en particulier de la société civile ;

    3. Favoriser l'accès à l'information et aux services de base aux groupes sociaux les plus démunis et/ou marginalisés ;

    4. Participer à la prévention et à la résolution des situations d'urgence ;

    5. Consolider les structures associatives et opérationnelles de DIAPANTE et s'impliquer dans les dynamiques fédératives.

    Pour mener à bien sa mission l'association travaille avec un certain nombre de partenaires au rang desquels nous citerons:

    · Le ministère sénégalais de la famille, du développement social et de la solidarité nationale,

    · L'administration territoriale et les services déconcentrés et/ou techniques de l'Etat sénégalais,

    · Le Fonds Mondial pour l'Environnement (FEM/PNUD)

    · Le ministère français des affaires étrangères

    · Les collectivités locales et territoriales françaises et sénégalaises

    · La ville de COMMERCY en France à travers l'Office Municipal de Coopération Internationale (OMCI)

    · Les ONG locales et étrangères intervenant au Sénégal

    · Les organisations villageoises et professionnelles de la région de Saint-Louis et d'autres régions du Sénégal

    Section neuf (9). Le GADEC : Groupe d'action pour le développement communautaire

    Créé le 28 Août 1987 à Tambacounda par des animateurs et des intellectuels techniciens, le GADEC, comme le note Karine TRIOLET,  « se définit comme une structure ouverte, mixte et démocratique »62(*). La création de l'ONG apparaît comme la résultante d'un processus de collaboration et de coordination entre les animateurs et appuis techniques de trois (3) projets de développement intervenant dans la région de Tambacounda:

    · Le projet COMIBAR (coordination mini barrages) intervenant essentiellement dans le domaine de l'environnement grâce à des partenaires comme Terre Nouvelle une ONG Belge et ASRADEC (Association sénégalaise de Recherche et d'Appui pour le Développement Communautaire).

    · Et les projets de développement intégré de Tamba Est et du Wuli financés par une ONG française le GRDR (groupe de recherche et de réalisations pour le développement rural dans le tiers monde).

    Pour les animateurs et appuis techniques qui ont été à la base de ce processus de collaboration et de coordination ; il était question, à travers la création du GADEC, de satisfaire à trois exigences particulières :

    1. « d'abord et plus fondamentalement, celle de mettre en place des mécanismes de coordination, d'harmonisation et de gestion des 3 projets qui en définitive partageaient non seulement la même conception du développement communautaire mais réalisaient aussi des actions similaires et /ou complémentaires et intervenaient de surcroît dans les mêmes terroirs,

    2. ensuite, celle de contribuer plus efficacement à la satisfaction des besoins fondamentaux des populations de la région orientale du Sénégal qui bien que disposant de réelles potentialités naturelles se trouvaient handicapées par une faiblesse des actions publiques et privées de développement et un enclavement qu'un désengagement brutal de l'Etat avait accentué,

    3. enfin, l'exigence de doter la région d'une ONG locale autonome, basée sur le terrain même des opérations et capable d'intégrer les dynamiques, préoccupations et attentes paysannes pour un développement communautaire »63(*)

    Association sans but lucratif (ASBL), le GADEC a été reconnu d'utilité publique par le récépissé N°6112 MINT/DAGAT du 8 Février 1990 et agréé ONG le 21 Juin 1990 (agrément N°06414 MINT/DDC/DONG).

    L'ONG est structurée en deux (2) entités que sont la structure associative (SA) et la structure professionnelle (SP). Alors que la première regroupe l'ensemble des membres de l'organisation et est, à la fois, chargée de la définition des politiques et orientations de l'ONG, et du contrôle de leur exécution ; la SP quant à elle est chargée d'exécuter les activités liées aux projets et programmes de terrain (c'est elle qui regroupe le personnel salarié du GADEC). Comprenant une douzaine d'organes (l'assemblée générale, le bureau exécutif, le secrétariat exécutif, la coordination de la SP, la coordination des projets et programmes, la représentation de Dakar, la cellule d'animation du GADEC, la cellule genre et développement, la commission de politique d'auto financement, le comité de sélection des projets, le conseil consultatif paysan et le forum des partenaires techniques et financiers), le GADEC compte un effectif de 30 à 35 personnes comprenant à la fois le personnel salarié (34%), les membres de l'association (62%) et les volontaires et/ou bénévoles (4%).

    Dix-sept (17) ans après sa création, les activités du GADEC se localisent principalement encore dans trois (3) régions du Sénégal :

    · la région de Tambacounda (département de Tamba et département de Bakel) : dans le département de Tamba la présence du GADEC est effective dans les communautés rurales de Natéboulou, Missirah, Dialocoto, Maka Coulibantang, Sinthiou Maléme (sous préfecture de Koussanar) et koupeuntoum. Dans celui de Bakel par contre il est présent dans les communautés rurales de Koulore, de Goudiry, de Kothiari et de Bala dans la sous préfecture de Bala,

    · la région de Kolda (département de Vélingara) : dans ce département l'action du GADEC se limite à la zone du Cantora communauté rurale de Sinthiou Coundara (sous préfecture de Bonconto)

    · et la région de Kaolack (département de Kaffrine) où les interventions du GADEC ne touchent pour le moment que le village de Douba Lampour dans la communauté rurale de Ida Mouride (sous préfecture de Maka yopp).

    C'est cependant, la région de Tambacounda qui polarise l'essentiel de l'activité du GADEC dont les interventions couvrent l'ensemble des quatre (4) zones géo écologiques et historiques de la région:

    · le Wuli, situé au centre du département de Tambacounda, elle correspond à la zone d'emprise du fleuve Gambie ;

    · le Niani, situé à l'extrême Est du département de Tambacounda, il correspond essentiellement aux arrondissements de Koussanar et de Koupeuntoun. Les cultures vivrières y dominent et la zone enregistre d'importants taux d'émigration ;

    · le Cantora, situé dans le département de Vélingara dans la région de Kolda ;

    · et le Bundu, qui recoupe les arrondissements de Bala et de Kidira.

    C'est au total une cinquantaine (50) de villages, comptant approximativement une population de plus de 20.000 personnes, qui est touchée par les interventions du GADEC dans la région de Tambacounda.

    L'ONG GADEC se veut une ONG « généraliste » dont les interventions embrassent de nombreux aspects du développement rural : hydraulique villageoise (puits, micros barrages...), agriculture (maraîchage et arboriculture) et élevage, formation, animation et sensibilisation, santé communautaire, artisanat, appui à l'épargne et au crédit, les questions de genre et de développement local..... Remarquons que pendant longtemps, cependant, ses interventions étaient exclusivement orientées vers les investissements communautaires lourds (micros barrages, puits...) ainsi ce n'est qu'au cours de la seconde moitié des années 90 que l'ONG s'est progressivement tournées vers la promotion des initiatives génératrices de revenus autour notamment des grands aménagements (maraîchage, riziculture....).

    Depuis 1995 le GADEC s'efforce aussi d'inscrire ses interventions dans ce qu'il convient de nommer un « cadre programmatique général » dénommé GRTV (Gestion Réhabilitation des Terroirs Villageois). Celle-ci s'articule autour de dix (10) axes d'interventions :

    1. l'appui et renforcement des organisations paysannes et des collectivités locales

    2. l'éducation / Alphabétisation

    3. l'animation

    4. le renforcement organisationnel et institutionnel du GADEC

    5. la valorisation des vallées

    6. la diversification des sources de revenus

    7. la sécurisation des productions agricoles

    8. les infrastructures et équipements

    9. l'aménagement et la gestion des espaces partagés

    10. la recherche / développement

    Définie comme une,

    « Approche de développement participatif et durable qui tient compte des ressources (naturelles et humaines), de leurs potentialités et contraintes, des problématiques qui se posent dans les terroirs, des dynamiques et des opportunités d'action, des acteurs et des interrelations entre les ressources, activités et acteurs (internes et externes) »64(*) ;

    la GRTV se fixe comme objectif global de « jeter les bases d'un développement durable dans les zones d'intervention du GADEC »65(*) .

    De 1987 à nos jours, le GADEC a connu un développement institutionnel remarquable et a enregistré d'importantes réalisations allant du fonçage de puits à l'aménagement de périmètres maraîchers en passant par la construction de barrages de retenu (12 barrages entre 1987 et 1993), l'ouverture de centres d'alphabétisation, la mise sur pied de banques céréalières, la formation juridique et civique des populations sur des questions telles le code forestier, l'Etat, la décentralisation, les législations en matière de sécurité des personnes et des bien, l'animation et la sensibilisation (organisation de conférences publiques, de séminaires, d'ateliers de formation ou d'information, de forum....) ou encore la construction et/ou la rénovation d'infrastructures communautaires. De fait, la DDC estimait en 2005 que les diverses interventions du GADEC touchent environ 25.000 à 30.000 personnes à travers les régions de Tambacounda, Kaolack et Kolda.

    Au départ, en 1987, l'organisation s'était fixée pour principale mission de « contribuer au développement communautaire, par la mise en oeuvre de programmes étudiés et élaborés à la base en rapport avec les associations villageoises de développement »66(*) , dix (10) ans plu tard il en avait déjà adopté une nouvelle et clairement défini (et même systématisé) sa nouvelle stratégie et ce qu'ils ont appelé une « vision propre du monde et du développement ». C'est dire que le GADEC a effectivement connu un développement institutionnel remarquable que l'on peut faire remonter à 1993 avec notamment la mise en oeuvre du programme de renforcement institutionnel (94-95) sur financement de la fondation rurale pour l'Afrique de l'Ouest (FRAO).

    La nouvelle vision que le GADEC se donne du développement est que celui-ci se résume en un « épanouissement intégral de l'individu et de la collectivité, celui-ci ne pouvant se faire en l'absence d'un processus continu centré sur l'homme en vue de l'expression de son potentiel et de la réalisation de son bien être économique, social et culturel »67(*) voilà pourquoi il doit « impliquer un processus démocratique ayant pour fondement la liberté de parole, d'association, d'action et d'expression reconnue par tous les citoyens »68(*) . C'est à ce titre que l'ONG considère que le développement doit non seulement être global, mais aussi durable c'est-à-dire économiquement, socialement et écologiquement soutenable pour que les « intérêts des générations actuelles ne compromettent pas ceux des générations futures »69(*).

    Dès lors le GADEC se fixe comme nouvelle mission de contribuer à « promouvoir un développement local durable dans ses zones d'intervention par des appuis aux initiatives de base individuelles et collectives »70(*). L'ONG compte aujourd'hui une grande diversité de partenaires dont nous citerons :

    · l'African Development Foundation (ADF)

    · l'ONG belge Terre Nouvelle

    · la coopération belge

    · l'ONG hollandaise CORDAID

    · la Lutheran World Relief (LWR), une ONG Hollandaise

    · la FRAO

    · la coopération suisse à travers VECO

    · l'ONG Bilance

    · OXFAM / América

    · le Catholic Relief Service (CRS)

    · Le FEM / PNUD

    Chapitre quatre (4) : Présentation des OCB concernées par les enquêtes de terrain

    Pour avoir le point de vue des acteurs à la base sur les marges d'autonomie dont ils disposent dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE, nous avons dû mener des enquêtes de terrain auprès de certaines organisations communautaires de base (OCB) avec lesquelles le GADEC et DIAPANTE travaillent. C'est ainsi que les comités de jumelage de Mbagam et de Ndiathène ainsi que l'Entente Inter Villageoise de Coulibantang (EIVC) ont été les OCB sur lesquels nos enquêtes de terrain ont porté. Ce sont ces organisations que nous présentons dans le présent chapitre.

    Section dix (10) : Les comités de jumelage de Mbagam et de Ndiathène

    Institués entre 1995 (Mbagam) et 1997 (Ndiathène), les comités de jumelage doivent leur création à la relation de jumelage qui s'est nouée entre la ville de Commercy et la communauté rurale de Ronkh. En théorie le comité de jumelage est une structure à forme associative régie par les textes de loi sur les groupements d'intérêt économique (GIE).

    Sur le plan organisationnel, les comités de jumelage fonctionnent selon un règlement intérieur et des statuts clairement édictés. Ils sont composés de quatre (4) organes que sont : l'assemblée générale (AG), le conseil d'administration (CA), le bureau exécutif (BE) et les bureaux des commissions techniques qui sont au nombre de cinq (5).

    1. L'assemblée générale peut être composée de tout membre du comité de jumelage âgé de 18 à 70 ans et s'étant acquitté de sa cotisation annuelle. Elle a principalement les rôles de délibération sur le rapport moral et financier du jumelage, d'approbation du programme d'activités annuelles et de renouvellement du CA ;

    2. Le conseil d'administration composé d'un représentant de la mairie de Commercy, du chef de village, d'un représentant de l'office municipal de coopération internationale de la ville de COMMERCY (OMCI), d'un secrétaire à la communication, de quatre (4) notables mandatés par le village et de membres actifs du comité de jumelage ; il est l'organe délibérant du comité de jumelage. Le CA est en effet chargé de la coordination et de l'administration du jumelage à travers la définition des orientations du programme de coopération, l'élaboration annuelle des programmes d'activités, le vote et l'approbation des budgets et enfin à travers l'élection et le contrôle du BE. Réuni en session ordinaire tous les 3 mois, le CA organise par ailleurs tous les ans une assemblée générale au cours de laquelle se tient le renouvellement de son bureau ;

    3. Le bureau exécutif, organe opérationnel du comité de jumelage il est chargé outre de l'exécution et du suivi des programmes, de l'étude technique des documents de projet qui devront être validés par le CA. Composé de quatre (4) postes permanents (coordonnateur général, secrétaire administratif, trésorier général et commissaire aux comptes) en dehors des dix (10) représentants issus des commissions techniques (à raison de deux (2) représentants par commission) ; le BE se réunit une fois tous les mois pour statuer sur les dossiers en cours ;

    4. Les bureaux des commissions techniques : les commissions techniques sont les organes chargées de l'identification des projets et de leur exécution sur le terrain ; au nombre de 5 (commission assainissement, commission santé, commission éducation, jeunesse et culture, commission économique, commission femme) chaque commission se compose d'un coordonnateur, d'un secrétaire à l'organisation, d'un responsable technique et d'un responsable du budget.

    Section onze (11) : L'entente inter villageoise de Coulibantang (EIVC)

    Officiellement reconnue par l'Etat du Sénégal le 06 avril 2000 sous le numéro DTC/062000, l'Entente Inter Villageoise de Coulibantang est une association de développement à la base dont la création le 17 septembre 1989 a été l'aboutissement d'un long et difficile processus entamé dés la seconde moitié des années 80 (1984). Si l'on en croit, en effet, les données recueillies sur l'historique de la création de l'EIVC tout serait parti en 1984 d'une association sportive (AS) de quartier basée dans le village de Coulibantang  ASJAMA. Ibrahima DABO, un jeune ressortissant du village étant rentré d'Espagne a voulu mobiliser toute l'énergie que pouvait susciter l'engouement des jeunes pour l'AS, autour d'un idéal de développement du terroir. Ainsi naissait l'association villageoise des jeunes de Coulibantang. C'est par la suite que l'idée fit peu à peu jour de sceller l'union d'avec d'autres associations villageoises de la communauté rurale de Maka. Entre 1989 et 1992 se seront ainsi 5 villages qui adhéreront à la jeune entente ; entre 1992 et 1994, 7 à 8 de plus ; enfin entre 1994 et 1997 l'entente en était à plus d'une dizaine de villages membres (11).

    Intervenant exclusivement dans la communauté rurale de Maka Coulibantang l'entente inter villageoise dont le siége se trouve à Coulibantang regroupe, à ce jour, 14 villages soit 24 associations villageoises de développement de toute nature (GPF, associations de jeunes, associations d'exploitants.....).

    Tableau N°2 : Liste des associations villageoises de développement (AVD) membres de l'EIVC

    Villages

    Associations

    Colibatang

    Association des jeunes et GPF Kamben Kaffo

    Fadya

    AVD de Fadya et GPF Kamben Kaffo

    Baracounda

    GPF Kamben

    Dyabougou

    AVD de Dyabougou et GPF Teesito

    Sandougou

    AVD de Sandougou et GPF Kamben Kaffo

    Boulémbou

    Meere Guimou, GPF Soxaana Fedde, GPF Sabou Siré et GPF Djické

    Samba ngaye

    GPF de Samba ngaye

    Sao Soukouta

    GPF Ala tentu et AVD de Sao Soukouta

    Walia

    GPF de Walia

    Maka cissé

    GPF de Maka cissé

    Minigui Kolikossa

    GPF de Minigui Kolikossa et AVD de Minigui Kolikossa

    Madina Moussa

    GPF de Madina Moussa et Association des hommes de Madina Moussa

    Kassedy Barkeyel

    GPF de Kassedy

    Sinthiou Kaldin

    GPF de Sinthiou Kaldin

    L'EIVC se fixe comme mission de « contribuer à l'émergence d'une société civile bien armée pour le développement économique et durable et s'engager pour l'auto prise en charge du développement rural »71(*). Dans cette optique elle se donne deux (2) objectifs principaux :

    1. développer toute production agricole et pastorale en amont et en aval de sa zone d'intervention,

    2. promouvoir le développement économique et social dans sa zone d'intervention et plus précisément dans les villages de la communauté rurale.

    Ceux-ci, se retrouvent scindés en une batterie d'objectifs spécifiques:

    1. assurer la survie des populations par l'amélioration des productions agricoles,

    2. maintenir les populations dans les villages par la création d'emplois,

    3. appuyer les organisations par l'animation, l'éducation et la formation,

    4. participer à la lutte contre la pauvreté, à la préservation de la santé et à la sécurité alimentaire / autosuffisance alimentaire,

    5. participer à la lutte pour la préservation de l'environnement pour un développement durable,

    6. sensibiliser les populations à la gouvernance locale,

    7. harmoniser les projets de développement dans sa zone d'intervention,

    8. améliorer le système de communication des populations,

    9. promouvoir la solidarité inter villageoise,

    10. renforcer les capacités institutionnelles et organisationnelles des groupements membres de l'EIVC,

    11. diversifier les sources de revenus des populations

    Dans le souci de remplir convenablement sa mission l'EIVC s'investit dans divers domaines du développement rural qui vont des actions d'IEC (formation, animation, sensibilisation, alphabétisation) à l'appui à la coopération décentralisée en passant par la promotion d'activités productives génératrices de revenus et l'appui à l'acquisition d'équipements et à la réalisation d'infrastructures.

    En terme d'organisation, l'EIVC est structurée autour de trois (3) instances que sont l'assemblée générale (AG), le conseil d'administration (CA) et le bureau exécutif (BE). Organe au fonctionnement collégial, l'AG regroupe l'ensemble des organisations membres de l'EIVC à raison de 3 représentants par organisation. Première instance de décision de l'EIVC, le rôle de l'AG consiste essentiellement à définir les orientations et politiques de développement de l'entente. Composé d'un délégué par village, le CA quant à lui est un organe central dans le dispositif de l'entente même si dans les faits il reste non fonctionnel depuis de nombreuses années. Le BE enfin est l'organe exécutif de l'EIVC, il se compose de 9 membres élus par le CA. En dehors de ces trois instances charnières, l'EIVC comprend diverses commissions (riziculture, épargne/crédit, maraîchage, appui au renforcement des capacités...), composées d'animateurs, de relais principaux (chargés de contrôler le travail des relais techniques) et enfin de relais techniques ; au nombre de 8 ces derniers sont polyvalents (riz, maraîchage, élevage, alphabétisation...).

    Chapitre cinq (5) : Présentation des cadres géographiques et humains de l'étude

    Il s'agit de présenter les différents villages des régions de Saint Louis et de Tambacounda dans lesquels nos enquêtes de terrain se sont déroulées. Ces villages sont les villages de Mbagam, de Ndiathène, de Coulibantang et de Diyabougou.

    Section douze (12) : Le village de MBAGAM

    Le village de Mbagam dans la région de saint Louis, département de Dagana (communauté rurale de Ronkh) est situé au bord du fleuve Sénégal à 2 km à l'Est de Rosso Sénégal et à 100 km de la ville de Saint-Louis. D'une population de prés de 300 hbts composée de Wolofs, de Toucouleurs, de Maures, de Peuls et de Diolas ; le village a pour principale activité économique l'agriculture qui fait vivre la grande majorité de ses habitants. Le phénomène d'exode (notamment chez les jeunes) vers la capitale régionale, les grandes agglomérations urbaines du Sénégal et vers l'étranger y est assez développé. Bien que les habitants du village ne soient pas des éleveurs, ils possèdent tout de même pour la plupart quelques têtes de bétails composés de bovins, d'ovins, de caprins d'ânes et de chevaux.

    Au plan sanitaire, le village dispose d'un poste de santé construit grâce au Programme de Coopération Décentralisée Commercy Mbagam Ndiathène (1992). Les infrastructures ne s'en limitent pas là puisque le village dispose également d'une école construite entre 1970 et 1986 grâce aux efforts des villageois eux mêmes qui n'ont reçu aucun concours extérieur. L'école compte aujourd'hui 6 classes, une bibliothèque communautaire une clôture et des latrines construites grâce au PCD / CMN.

    Section treize (13) : Le village de NDIATHENE

    Situé également dans la communauté rurale de Ronkh, le village de Ndiathène est limité au Nord Est par la région de Matam, au Sud par la commune de Richard Toll et à l'Ouest par celle de Rosso Sénégal. La création du village remonte au temps du royaume du Walo, l'un des compagnons du brack Althiaka THIAM l'avait, en effet, créé pour y installer sa famille. Le village était une sorte de base arrière où il pouvait se replier après les combats qui opposaient son royaume aux Maures de la rive droite du fleuve et aux Halpoularènes du Fouta Toro.

    Du fait de sa proximité de quelques mètres d'avec le fleuve, le village tire ses principaux revenus de l'agriculture traditionnelle. La sécheresse des années 70-80, a favorisé l'introduction de la culture irriguée qui, semble-t-il, a fini de gagner les populations. La population résidente du village de Ndiathène s'évalue à prés de 1923 hbts répartis dans 216 concessions soit une moyenne de 8,9 individus par concession.

    La question sanitaire souvent complexe et sensible dans les villages du Sénégal (manque d'infrastructures adéquates, d'équipements, de ressources humaines de qualité....) ne l'est malheureusement pas moins pour le village de Ndiathène. Il ne dispose que d'une case de santé souffrant de l'exiguïté des lieux, de l'insuffisance de matériel, de l'absence d'électricité, du manque d'eau et de personnel. Par ailleurs le village ne dispose que d'un seul établissement scolaire construit en 1974.

    Section quatorze (14) : Le village de COULIBANTANG

    Située dans le département de Tambacounda, la communauté rurale de Maka Coulibantang dans laquelle se trouve les villages de Coulibantang et de Diyabougou est limitée au Nord par celle de Malém Niani, à l'Est par celle de Ndoga Babacar, à l'Ouest par celles de Bamba et de Kahéne et au Sud par la république de Gambie. Selon des données du service de l'expansion rurale (MINT), la communauté rurale couvre une superficie de 937 km2 dont 35.000 ha cultivables et compte plus d'une cinquantaine de villages.

    Créé il y a de cela prés de trois (3) siècles par un certain Mamadou Diawara Kane ; le village de Coulibantang est situé à quelques 3 km à l'Est du célèbre village de Maka (station marabout) et à prés de 80 km de Tamba. Le village est limité à l'Est par le village de Diyabougou, au Nord par celui de Sinthiou Pathé BALDE, au Sud par les villages de Tambadiang Souna et de Yoly Souna et à l'Ouest par les villages de Maka (station marabout) et de Maka village. D'une population d'environ 2.000 hbts, Coulibantang abrite une grande diversité d'ethnies (Mandingue, Peuhls, Wolofs, Sarakolés, Sosseh....). Les Mandingues et les Sosseh y sont, cependant, les ethnies les plus représentatives. Doté d'une école primaire de 3 classes et d'une case de santé le village reste néanmoins très peu nanti du point de vue de ses infrastructures communautaires de base. La principale activité économique y est l'agriculture (arachide, maïs, fonio...) même si le commerce avec la Gambie frontalière est une activité en plein essor. L'immigration s'y présente également comme une donnée démographique non négligeable.

    Section quinze (15) : Le village de DIYABOUGOU 72(*)

    Créé entre 1925 et 1940 par Harfang BOUGOU et ses compagnons venus de Ségou Koura et de ses environ, Diyabougou est un village Soninké situé à une vingtaine de kilomètres à l'Est de Tambacounda (au Nord de la piste Tamba-Kidira). D'une population estimée entre 200 et 800hbts73(*), Diyabougou regroupe différentes ethnies Peuhls, Toucouleurs, Bambara, Mandingues, Soninké, Wolofs.... Cette diversité ethnique découle selon de nombreux experts d'un phénomène migratoire très intense provenant essentiellement de l'Ouest (Wolofs) et de l'Est (Bambaras, Mandingues...).

    Les résultats d'une étude socio anthropologique menée par Andrée DEFOIS et Thierry DUDERMEL, révèlent que l'organisation sociale du village demeure fondamentalement de type lignager même s'il peut être donné de constater un début de crise de la famille élargie « peut être à l'émigration » 74(*). La même étude révèle que l'organisation sociale du village ne repose en aucune manière sur un système de caste bien qu'il y existe des corps de métiers traditionnels (forgerons, tisserands....). Moins bien nanti que Coulibantang, Diyabougou connaît en matière d'infrastructures un déficit alarmant (ni école, ni case de santé).

    La démarche que nous empruntons dans la rédaction de cette partie du mémoire répond à notre souci de restituer l'essentiel des données collectées tant au moyen de l'analyse de contenu que de nos enquêtes de terrain. Voilà pourquoi elle est rédigée en deux chapitres l'un étant consacrée à la présentation, à l'analyse et à l'interprétation des résultats de l'analyse de contenu et l'autre à celles (la présentation, l'analyse et l'interprétation) des résultats de nos enquêtes de terrain.

    Chapitre six (6) : Présentation, analyse et interprétation des résultats de l'analyse de contenu

    L'analyse de contenu nous a permis de mettre en lumière un certain nombre d'éléments d'analyse relatifs notamment aux caractéristiques, valeurs, stratégies d'intervention.......des ONG GADEC et DIAPANTE. Ce que l'on peut retenir, de prime abord, c'est qu'à l'exception de leurs méthodes respectives et de leurs statuts, les ONG GADEC et DIAPANTE ont un profil similaire qui repose sur des valeurs partagées, des stratégies ou domaines d'intervention similaires et une philosophie commune.

    Graphique N°1

    Sources : Données de l'analyse de contenu

    Un premier élément pertinent d'analyse réside, pensons nous, dans le fait que l'une des caractéristiques qui est le plus souvent mis en avant par ces ONG est leur performance et leur crédibilité. Ce caractère d'organisations performantes et crédibles rejoint, dans le discours des ONG GADEC et DIAPANTE, celui d'organisations professionnelles. C'est comme qui dirait que l'un ne peut aller sans l'autre : le professionnalisme étant gage de performance et de crédibilité ; et la performance et la crédibilité un critère de mesure du degré de professionnalisme.

    Ainsi à la question de savoir si la concurrence et le besoin de faire des résultats sont des valeurs pour leurs organisations respectives, la majorité des membres ou personnels du GADEC et de DIAPANTE répondent par l'affirmative.

    Graphique N° 2

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°2)

    Il faut dire que même s'ils rejettent toute idée de concurrence ; le fait reste que ces responsables ne cachent pas que le besoin de faire des résultats est bel et bien réel chez leurs organisations respectives. Pour M. WELE du GADEC, son organisation ressent le besoins de faire des résultats par rapport, surtout, à trois (3) acteurs de son environnement:

    1. le GADEC lui-même

    2. les populations

    3. et les bailleurs

    Ce qui retiendra notre attention se sont, au-delà de l'ONG lui-même, les deux autres catégories d'acteurs. Il est clair, de notre point de vue, que si le GADEC et DIAPANTE recherchent l'efficacité d'action par rapport aux populations c'est qu'elles nourrissent un fort idéal de développement pour ces dernières. Mais, le fait est aussi que l'efficacité d'action par rapport à ces dernières procure une certaine légitimité auprès des bailleurs. Comment interpréter, en plus de cela, le besoin de faire des résultats vis-à-vis de ces derniers?

    L'autre caractéristique notable qui ressort de l'analyse de contenu c'est le souci permanent des ONG GAEDEC et DIAPANTE de s'auto garantir une certaine crédibilité et/ou visibilité. Dans les deux cas il s'agit, comme on le retrouve dans de nombreux documents, de gagner la confiance des populations et des bailleurs de fonds. C'est-à-dire que ces ONG, il faut rendre les structures crédibles et les actions visibles afin de gagner la confiance des principaux acteurs que sont les populations et les bailleurs. Ce qui nous ramène à notre précédente interrogation : quel peut être le sens de ce besoin de gagner la confiance des bailleurs...et des populations ?

    Comme on le soulignait plus haut, leurs méthodes respectives et leurs statuts sont les seules caractéristiques que les ONG GADEC et DIAPANTE ne partagent pas en commun. S'agissant de leurs méthodes respectives, nous retiendrons que même si les ONG GADEC et DIAPANTE ne les partagent pas (GRTV pour le GADEC et IFOSE pour DIAPANTE) ; il reste quand même que, que ce soit la GRTV ou l'IFOSE, la démarche et les principes directeurs demeurent presque toujours les mêmes « les choses doivent se faire de manière  participative sur la base d'une analyse des besoins et priorités qui impliquent au premier chef les bénéficiaires »75(*). Ainsi alors que les concepteurs de la GRTV la définisse comme une approche « (...) globale, non sectorielle et mettant en avant le principe de la participation consciente des populations..... »76(*) ; ceux de l'IFOSE par contre y voient « une approche  originale, proactive et plaçant les dynamiques et attentes populaires au coeur de ses préoccupations ».

    La différence dans les différents statuts de ces ONG réside dans le fait qu'alors que le GADEC se présente comme une « ONG locale et mixte » ; le DIAPANTE par contre présente la particularité d'être comme nous le disions d'une « double nationalité » (Franco-sénégalaise).

    Sur la question des valeurs ou de la philosophie de ces ONG en matière de projets et programmes de développement, les résultats de l'analyse de contenu permettent d'identifier trois (3) valeurs fondamentales:

    1. L'altruisme,

    2. L'endogénéité du développement,

    3. L'autonomie et l'indépendance vis-à-vis des différents partenaires.

    L'altruisme doit être compris comme une valeur morale ou éthique, il se manifeste dans les deux cas par une forte détermination à promouvoir une société équitable où règne une véritable justice sociale.

    Comme il ressort très clairement du discours qu'elles tiennent sur elles mêmes, ces ONG partagent tous les principes et valeurs sur l'auto développement (développement endogène) et le développement participatif. Voilà pourquoi d'ailleurs on retrouve chez elles des objectifs tels le renforcement des capacités endogènes, la promotion des potentialités locales, l'appui et le renforcement des organisations paysannes, la promotion d'un développement rural intégré...... ; toutes choses qui participent d'une seule conviction qui est que « Le développement signifie un épanouissement intégral de l'individu et de la collectivité qui ne peut se faire sans un processus continu centré sur l'être humain en vue de l'accomplissement de son potentiel et de son bien être économique, social et culturel..... »77(*) .

    Ce qui s'exprime à travers la valeur « autonomie et indépendance vis-à-vis des partenaires financiers et de l'environnement structurel », c'est une volonté du GADEC et de DIAPANTE de « prendre de la distance » par rapport à leurs différents partenaires financiers et institutionnels. Ainsi dans son plan stratégique 2003-2007, DIAPANTE réaffirme d'emblée que « l'autonomie est l'un des principes fondamentaux de l'organisation, ceci participe de sa volonté de développer une capacité d'auto financement lui permettant de conserver sa liberté vis-à-vis des partenaires »78(*). C'est dire qu'il est clairement question pour ces organisations de préserver leur liberté par l'affirmation de leur autonomie et de leur indépendance. C'est en ce sens qu'il faut comprendre tous les efforts mis en oeuvre par ces organisations pour se garantir un minimum d'autonomie financière (prestations de services -photocopie, traitement de textes...-). Ainsi à la question de savoir s'ils pensent que l'autonomie financière est une chose déterminante dans l'efficacité et l'indépendance de leurs interventions, la totalité des responsables du GADEC et de DIAPANTE que nous avons interviewé sur les questions financières nous répond par l'affirmative.

    Graphique N°3

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°1)

    Les résultats de l'analyse de contenu sur les stratégies d'intervention des ONG GADEC et DIAPANTE révèlent une large palette de stratégie qu'elles mettent en oeuvre afin de promouvoir un développement harmonieux et durable dans leurs zones d'intervention.

    Nous retiendrons par exemple: renforcement des capacités de l'ONG et de celles des communautés de base ; la préservation et/ou une meilleure gestion des ressources naturelles; la prise en charge des besoins prioritaires des populations ; la promotion de l'initiative privée et des initiatives à la base ; la promotion des économies locales; le renforcement du dialogue politique et social ; l'ouverture et/ou le dialogue permanent avec les autorités territoriales, les collectivités locales, les services techniques et les communautés de base ; la prise en compte des questions de genre et des opportunités offertes par les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC)........

    Chapitre sept (7) : Présentation, analyse et interprétation des résultats des enquêtes de terrain

    La présentation et l'exploitation des résultats de nos enquêtes de terrain nous permet, dans un premier temps, d'analyser les mécanismes, la nature et la portée de la participation des acteurs à la base aux différentes étapes des projets et programmes et, dans un second temps, de nous prononcer sur les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE.

    Section seize (16) : Les acteurs à la base et leur participation aux projets et programmes des ONG

    GADEC et DIAPANTE

    16.1 : A l'élaboration des documents de projets ou de programmes

    Il semblerait sur la question de l'élaboration des documents de projets et programmes que le GADEC et DIAPANTE recherchent effectivement à valoriser la connaissance que les populations ont de leurs propres situations. C'est là il faut le reconnaître tout l'enjeu de l'approche participative qui postule que « la prise en compte des savoirs locaux renforce considérablement l'efficience et l'efficacité des actions de développement »79(*).

    Les résultats des enquêtes sur le terrain confirment en effet que cette préoccupation est bel et bien pris en charge par les ONG GADEC et DIAPANTE puisqu' à la question de savoir quelle était la place des acteurs à la base dans le processus d'élaboration des documents de projets ou programmes, 93% des personnes membres ou sympathisants des OCB partenaires du GADEC et DIAPANTE, estiment qu'ils sont effectivement associés à l'élaboration des projets et programmes qui les lient à ces ONG.

    Graphique N°4

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°1)

    En terme de pouvoirs dans les processus de prise de décision, ces populations elles mêmes jugent pour leur majorité (74%) ceux-ci déterminant. Au GADEC et à DIAPANTE les avis des responsables enquêtés semblent corroborer cet état de fait, c'est ainsi qu'une personne à DIAPANTE nous révélait que les populations ont une place cruciale dans l'élaboration des documents de projets et programmes notamment pour tout ce qui a trait aux diagnostics et à la formulation d'activités alternatives « rien ne se fait sans eux et ils peuvent même avoir un droit de veto »80(*). Il est intéressant de remarquer à ce propos, l'importance toute particulière accordée aux phases de restitution/négociation qui jalonnent les processus d'élaboration. C'est comme qui dirait qu'après chaque étape il est impérieux de valider les éléments d'information collectés ainsi que leur même compréhension par tous. Cette démarche traduit à notre sens un réel désir chez le GADEC et DIAPANTE de trouver des solutions consensuelles sur les enjeux locaux de développement. Consensuelles non seulement entre elles et les populations locales mais aussi entre les différents groupes stratégiques en présence.

    Il ressort également que les partenaires financiers et bailleurs interviennent bel et bien dans le processus d'élaboration des documents de projets et programmes. La plupart des responsables rencontrés tant au GADEC qu'à DIAPANTE (97%) nous confient, en effet, que ces derniers interviennent dans les processus d'élaboration des documents de projets et programmes.

    Graphique N°5

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°1)

    Pour M. Ibrahima NDIAYE du GADEC « c'est généralement pour voir si le projet ou programme en passe d'être ficelé est en adéquation avec leurs cadres stratégiques. Si c'est le cas tant mieux, si non il faut trouver des alternatives »81(*) , des propos qui rejoignent ceux d'Amicolé BADJI de DIAPANTE pour qui « les partenaires financiers interviennent dans l'élaboration des documents de projets et programmes en référence à leurs préoccupations spécifiques »82(*). C'est dire que leur rôle est d'ordre consultatif et vise surtout à harmoniser les documents de projets d'avec les cadres stratégiques des bailleurs en vue de garantir aux futurs documents de projets ou programmes un  maximum de bancarité.

    Lorsqu'on interroge les responsables du GADEC et de DIAPANTE sur les difficultés que pose la participation des acteurs à la base à l'élaboration des documents de projets et programmes, la réponse qui revient le plus souvent (48%) a trait à la priorisation. Beaucoup de ces responsables déplorent en effet le fait qu'il peut souvent arriver que les différents groupes stratégiques, c'est-à-dire les principaux acteurs en présence (hommes/femmes, agriculteurs/éleveurs.....) ne tombent d'accord sur les besoins prioritaires auxquels il faut rapidement apporter des solutions au travers du futur projet ou programme. En d'autres termes on ne tombe presque jamais vraiment d'accord sur quel doit être parmi les besoins identifiés celui (ou ceux) auquel il faut expressément apporter des solutions. Pour Amicolé BADJI le problème est que « l'intérêt commun n'est pas toujours bien perçu »83(*).

    L'analphabétisme ou encore le manque de formation adéquate sont également des difficultés qui ont été souvent soulevées par les responsables du GADEC et de DIAPANTE. Il est important de signaler cependant que la question ne se pose pas véritablement dans le cas des OCB concernées par les enquêtes, car l'essentiel des personnes membres ou sympathisants de ces OCB rencontrés ont été si ce n'est à l'école tout au moins dans des cycles d'alphabétisation fonctionnelle.

    Graphique N°6

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°3)

    Il est vrai (l'analyse de contenu le révèle et les données recueillies au GADEC et à DIAPANTE le confirment) que le désir est réel du côté des ONG GADEC et DIAPANTE d'impliquer du début jusqu'à la fin les populations à l'élaboration des documents de projets et programmes. Cela se réalise effectivement aux étapes d'identifications des besoins, de priorisation et de définition des activités..... A toutes ces étapes en effet, les populations sont très fortement associées et leurs pouvoirs de décision y sont déterminants. Mais il ressort, aussi, des données et résultats de nos enquêtes qu'à l'étape de la planification les ONG GADEC et DIAPANTE paraissent moins enclines à écouter les populations.

    Ici le véritable problème n'est pas le fait de les « associer » au processus mais plutôt celui de les « écouter » et de leur conférer un certain pouvoir de décision. Elles peuvent en effet bel et bien y être associées comme le révèlent d'ailleurs les données recueillies auprès des responsables du GADEC et de DIAPANTE.

    Graphique N° 7

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°2)

    Mais, cette implication ne leur donne pas, pour autant, un pouvoir de décision déterminant sur les processus « le dernier mot ne leur revient pas ». En d'autres termes ils sont présents aux réunions et séances de planification, y participent même mais leur pouvoir de décision n'est déterminant que dans certaines limites comme le révèlent plus de 50% des réponses à la question de savoir si les populations ont un réel pouvoir de décision dans la planification des activités ?

    Graphique N°8

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°2)

    M. DIOP du comité de jumelage de Ndiathène déplore à ce propos ce qu'il nomme le « manque de confiance »84(*) de la part de l'ONG « comment pouvons nous être censés mettre en oeuvre ensemble un projet, sans nous être clairement convenu sur l'organisation au quotidien (modalités) ; je trouve que c'est à la limite un manque de confiance »85(*). Ce qui ressort généralement c'est, en effet, un sentiment de frustration lié au fait que ces populations estiment majoritairement qu'elles sont comme qui dirait laissées pour compte.

    Quoiqu'il en soit, le fait reste que pour ce qui est de l'organisation du projet, de la définition des inputs et outputs, de la détermination des périodes d'évaluations..., le GADEC et DIAPANTE se réservent le droit de prendre les décisions. C'est-à-dire que bien qu'elles s'attachent à analyser et à intégrer les dynamiques sociales en présence, à prendre en charge les besoins, potentialités, limites et aspirations des populations ; ces ONG ne s'en réservent pas moins le privilège de donner le ton dés qu'il s'agit de planification opérationnelle. Comment peut-on analyser et interpréter un tel état de fait ?

    Tout d'abord nous commencerons par avancer en partant d'un certain nombre de données tirées de l'analyse de contenu que ces ONG se voulant performantes, crédibles et visibles, il est tout à fait compréhensible que sur des décisions touchants des aspects aussi sensibles et décisifs pour un document de projet que la planification ; le pouvoir de décision et d'orientation soit détenu par la « technostructure » c'est-à-dire les cadres de conceptions et techniciens. Ce que nous voulons dire c'est que cet état de fait qui consiste en ce que l'ONG se réserve le dernier mot en ce qui concerne tout au moins la planification des activités du projet ou programme, peut s'analyser sous l'angle de ce désir profond qu'il y a au GADEC et à DIAPANTE de faire les choses de manière professionnelle, transparente, performante et crédible. Cette interprétation pousse à se dire en définitive que c'est parce que ces ONG souhaitent paraître professionnel et crédible vis-à-vis de certains partenaires qu'elles se refusent à croire véritablement et profondément en la capacité d'auto organisation des populations. Ce qui rejoint pour une large part les propos de M. DIOP que nous citions tantôt et qui se plaignait d'un manque de confiance.

    L'autre élément d'analyse que nous pourrions avancer pour tenter d'expliquer l'absence visible d'un pouvoir de décision suffisamment déterminant conféré aux populations dans le processus de planification, c'est peut être ce que nous pourrions nommer les exigences des bailleurs. Cet élément d'analyse est d'ailleurs fortement lié au premier à savoir la recherche de performance et de crédibilité. Mais il a aussi cela de particulier qu'au lieu de braquer le regard du côté des ONG (comme c'est le cas du premier élément d'analyse), il incite plutôt à orienter l'analyse du côté des bailleurs. Il faut dire qu'à partir de la planification déjà le projet ou programme commence à être ficelé, et l'identification des potentiels bailleurs commence à hanter l'esprit des promoteurs (responsables d'ONG)86(*). Il est donc aisé de comprendre qu'à partir de ce stade l'ONG cherche déjà à se conformer à certaines exigences, à respecter certains termes de références, cahiers de charges et protocoles d'engagements. Grâce à l'analyse de contenu on a pu, par exemple, se rendre compte en étudiant des protocoles de collaboration, contrats d'exécution, lettres de mission, convention de partenariat... que les bailleurs exigent (en terme de contrôle financier et de régularité des procédures) entre autres la totale régularité des montages financiers des projets et programmes qui leur sont soumis. Vu que ce montage financier se fait principalement à l'occasion de la planification (définition des inputs), on peut comprendre que ces ONG ne veuillent pas pâtir par manque de professionnalisme et de clairvoyance. Ce qui rejoint le premier élément d'analyse.

    Chacun pourra juger de la pertinence de ces éléments d'interprétation que nous avançons, mais ce qu'il est surtout intéressant de retenir c'est que les populations bien qu'elles soient consultées et associées au processus de planification ; n'y disposent pas pour autant de réels pouvoirs de décision. Nous n'irons pas jusqu'à dire que leurs opinions n'ont aucun poids, mais il est clairement démontré que leur pouvoir décisionnaire est limité et n'entre en compte que lorsqu'il convient aux exigences des bailleurs c'est-à-dire lorsqu'il correspond aux critères de professionnalisme et surtout de crédibilité et de performance.

    Bien qu'elle soit déterminante dans les processus de planification des activités, la participation des bailleurs et partenaires financiers n'en est pas moins tacite ou implicite. Ce qu'il faut comprendre c'est que cette participation n'est pas physique, autrement dit les bailleurs ou partenaires financiers ne sont pas explicitement et concrètement associés à chaque processus de planification d'un projet et programme (sauf s'ils sont eux-mêmes les porteurs de projet ou d'anciens partenaires sur d'autres phases d'un même projet ou sur d'autres projets du même genre). Dés lors leur participation devient tacite en ce sens ou c'est à travers l'idée ou les informations que les responsables d'ONG ont des cahiers de charges ou autres termes de référence des potentiels bailleurs, qu'il s'invitent par la petite porte aux processus de planification où ils finissent par prendre toute la place.

    Cette réalité de terrain, ils ne sont pas nombreux les responsables au GADEC et à DIAPANTE qui osent le reconnaître. Ainsi sur l'ensemble de nos questionnaires soumis aux coordonnateurs, délégués, administrateurs financiers et autres responsables administratif et financier à la question de savoir s'il est une fois arrivé dans l'histoire de l'ONG que des partenaires financiers aient à édicter des stratégies, des types d'actions ou zones particulières d'intervention ; les réponses affirmatives recueillies ont été de loin beaucoup moins importantes que celles négatives (20%).

    Graphique N°9 

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°2)

    Partout c'est un  «non catégorique», pour reprendre M. DIALLO du GADEC, qui a fusé même si le fait reste que sur le terrain tout laisse à penser que c'est généralement et de façon implicite le contraire. Oui, il arrive que les partenaires financiers parce que l'on calcul avec eux s'immiscent dans le processus de planification pour y voler la vedette et cela l'analyse de contenu le confirme.

    Si les responsables des ONG GADEC et DIAPANTE opposent un certain nombre de difficultés et manquements imputables aux populations et qui justifieraient qu'elles ne soient pas trop écoutées dans les ateliers de planification (manque de formations adaptés et parfois même d'éducation,  inaptitude à participer valablement à des exercices qui exigent un niveau de technicité suffisamment pointu comme c'est le cas au cours du montage financier, conflits d'intérêts et autres luttes de pouvoir) ; les populations elles aussi ne manquent pas de fustiger un certain nombre de faits. En fait elles déplorent surtout c'est le manque de confiance flagrant dont font preuve leurs partenaires (les ONG) dés qu'on parle de planifier quelque chose. De ce constat découle une certaine frustration qui donne l'impression que les ONG négligent les savoirs et capacités des populations.

    Certaines populations aussi comme c'est le cas pour Khaly KANE de l'EIVC reconnaissent et acceptent les griefs qui leur sont faites en terme de manque d'organisation et de conflits d'intérêts. Ce Monsieur nous répondant à la question de savoir à son avis, quelles sont les difficultés que pose leur participation à la planification des activités et programmes de l'ONG nous déclarait « la difficulté principale se situe au niveau des rapports entre le groupement du village de Diyabougou et l'EIVC ». Pour dire que même ces populations reconnaissent aujourd'hui les limites de leurs propres organisations et devinent nettement les enjeux et conflits d'intérêt qui se dessinent sur leurs terroirs.

    16.2 : A l'exécution des projets et programmes

    Chaque projet ou programme, selon son contenu, présente une spécificité du point de vue de ses modalités de mise en oeuvre (exécution). On ne mettra pas en oeuvre de la même sorte des projets de d'hydraulique villageoise ou de construction d'infrastructures et des projets de sensibilisation/animation ou de promotion d'une variété culturale (sésame). De la même sorte le rôle et l'intensité de la participation des différentes catégories d'acteurs, et plus particulièrement des acteurs à la base, varient en fonction des contenus des projets et programmes.

    Il est clair, de notre point de vue, que les acteurs à la base constituent une catégorie d'acteurs qu'il est impératif d'associée à l'exécution des projets ou programmes de développement ; tout doit être fait pour que les populations puissent s'approprier par elles mêmes les projets ou programmes de développement qui les touchent directement, qu'elles en assurent l'entière réalisation et qu'elles en garantissent la pérennité.

    Il semblerait au regard des résultats de nos enquêtes que le GADEC et DIAPANTE sont aussi de cet avis. On s'est, en effet, rendu compte à travers des projets comme le projet Adduction d'Eau Potable (AEP) du Programme de Coopération Décentralisée Commercy Mbagam Ndiathène (PCD/CMN), que les populations sont au coeur de l'exécution des projets ou programmes ; s'il y a quelque chose à construire ce sont elles qui le font, s'il faut aménager des périmètres agricoles ce sont elles aussi qui le font et s'il faut sensibiliser ou former c'est elles qu'on sensibilise ou forme.

    Il faut comprendre qu'à chaque fois qu'il s'agit d'exécuter des projets ou programmes, ce sont elles qui se retrouvent en première ligne. L'ONG ou ses partenaires techniques peuvent bien les appuyer et les conseiller mais elles sont concrètement celles qui exécutent le projet ou programme. Dans le cas du PPS qui recoupe le volet sécurité alimentaire du PADEL nous avons ainsi pu nous rendre compte, comme nous le disait M. WELE, qu'il appartenait aux populations d'identifier au cours de l'exécution du programme « les périmètres sur lesquels le sésame sera cultivé, de faire les démarches auprès des autorités compétentes pour l'affectation de ces terres, de cultiver, de récolter et de commercialiser les productions »87(*).

    L'implication va même, dans certains cas, au-delà de l'investissement physique (humain) jusqu'à l'investissement financier ou monétaire. C'est-à-dire que les populations peuvent même être amenées à engager leurs ressources financières dans l'exécution des projets ou programmes. Dans le cas du projet AEP, par exemple, il est convenu qu'une fois la réalisation de la station de pompage terminée, il appartiendra aux populations elles mêmes de supporter les coûts d'exploitation en payant notamment les notes d'électricité.

    Les choses auraient pu être parfaites s'il ne se trouvait que les processus de prise de décision qui ponctuent cette étape du projet ou programme sont le plus fréquemment biaisés. Nous trouvons qu'ils sont biaisés dans le sens où les faits révèlent qu'à ce niveau les exécutants qui logiquement auraient dû détenir les pouvoirs de décision, n'en sont pas véritablement les détenteurs. C'est-à-dire que les populations qui dans les faits exécutent les différentes phases de mise en oeuvre des projets ou programmes, n'en disposent pas pour autant d'un réel pouvoir de décision. Ils ne décident par exemple ni des décaissements, ni des périodes d'évaluation....

    En un mot elles n'organisent pas et ne gèrent pas. Dans la majeure partie des cas, les réponses que nous avons recueillies sur le terrain à la question de savoir si les populations ont un pouvoir de décision dans la gestion (technique, financière, humaine..) et l'organisation des projets ou programmes, ont soit été nuancées (54%) soit catégoriquement négatives (35%).

    Graphique N°10

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°1)

    A part peut être le fait que dans quelques rares cas elles peuvent décider de la localisation des activités (exemple lieu d'implantation d'un forage) ; à aucun moment de l'exécution elles ne sont réellement les décideurs. Tout vient de l'ONG, c'est elle qui prend les grandes décisions. Et cela ressort à travers les données recueillies auprès des populations. Alkali SAO de l'EIVC déplorait, par exemple, le fait qu'à l'étape d'exécution le projet devient «un projet du GADEC»88(*). C'est pour lui comme qui dirait que l'ONG, à l'étape d'exécution des projets ou programmes, fait délibérément l'impasse sur les populations qui disparaissent comme par enchantement des sphères de décision.

    Autrement dit bien qu'elles soient, par exemple, chargées de la construction le puits dans le cas d'un projet d'hydraulique villageoise; elles n'en demeure pas moins écartées de la gestion et de l'organisation de ces projets. Ce qui nous fait penser par métaphore à la théorie des entreprises de TAYLOR, les populations tels les ouvriers de TAYLOR ne sont que des bras à qui on demande d'exécuter et non de réfléchir d'autres sont là et qui savent mieux le faire.

    Si l'on cherche à analyser les choses en terme de difficultés que pose la participation des populations à l'exécution des projets ou programmes, on peut tout simplement relever un certain nombre de réponses qui nous ont été fournies par des responsables du GADEC et de DIAPANTE et qui parlent d'elles mêmes. Pour M. NDIAYE le responsable du Suivi/Evaluation au GADEC, par exemple, il faut déplorer que de manière générale ce sont « les femmes qui sont les plus impliquées dans l'exécution alors que ce sont les hommes qui obtiennent toujours les crédits »89(*). Sur un autre registre Alain KASRIEL regrettait les tiraillements et autres luttes d'intérêts auxquels on peut généralement assister « quand il y a de petites réalisations à faire ou tout simplement des choses à mettre en oeuvre, on rencontre très souvent des formes de favoritisme et de lobbying venant de leur part. Chacun cherche à se positionner ou tout au moins à placer un proche»90(*).

    Du côté des populations, le constat paraît amer pour tous « on fait semblant de nous impliquer, le plus souvent même c'est nous qui supportons l'essentiel des charges mais au fond tout n'est que leurre car nous ne décidons en fait de rien ». Il en découle ce même de sentiment de frustration latent dont nous parlions un peu plus en arrière.

    16.3 : Au Suivi/Evaluation des projets et programmes

    Pour Amicolé BADJI de DIAPANTE, le suivi/évaluation des projets et programmes de développement peut être résumé en trois (3) démarches  :

    1. Le suivi quotidien

    2. L'évaluation à mi parcours

    3. L'évaluation externe ou finale

    Chacune de ces démarches vise un objectif bien spécifique et interpelle, par conséquent, différemment tel ou tel autre acteur de l'environnement du projet ou programme.

    Le suivi quotidien vise à assurer la conformité des activités et résultats obtenus sur le terrain en rapport aux objectifs du projet ou programme. C'est-à-dire qu'il est question pour l'ONG d'assurer au jour le jour la concordance et la cohérence entre objectifs, axes stratégiques d'intervention, exigences de l'environnement et réalités de terrain. Cette activité de gestion au quotidien cherche à éviter tout dérapage et à garantir le respect de la planification et des conditionnalités de financement.

    Il est flagrant que dans ce processus ce sont l'ONG et les populations qui sont les acteurs les plus impliqués ; il s'agit notamment d'entretenir un échange permanent sur le déroulement des opérations. Au GADEC, par exemple, nous avons pu nous rendre compte que ce sont les animateurs de terrain qui sont surtout les moyens de cette démarche. Ainsi nous avons été témoin, pendant tout le temps que nous étions en stage à Tambacounda, que chaque jour 3 ou 5 animateurs de terrain quittaient à motocyclettes leurs villages pour se rendre au GADEC et y rencontrer des responsables. Ces visites, hebdomadaires pour certains, s'inscrivent justement dans l'optique de cette démarche de suivi quotidien. Dans le cadre du projet AEP du PCD/CMN nous avons, personnellement aussi, eu à participer à une rencontre du comité de gestion qui s'inscrivait dans l'optique d'une gestion directe et en temps réel de l'exécution du projet.

    Nous avons aussi et à maintes reprises était témoin au GADEC comme à DIAPANTE de nombreuses visites de terrain que devaient effectuer tel responsable de programme ou tel autre. C'est dire que le suivi quotidien est bel et bien réel au GADEC et à DIAPANTE et que outre l'ONG il se fait essentiellement avec les exécutants c'est-à-dire les populations elles mêmes.

    Au GADEC, par exemple, les choses se passent de la façon suivante : chaque jour les animateurs se rendent sur le terrain (d'où d'ailleurs leur appellation d'animateurs de terrain) pour recueillir auprès des populations des données quantitatives qu'ils se chargeront une fois par semaine de restituer aux chargés de programmes. C'est sur la base de ces données quantitatives fournies par les populations que les fiches de suivi quotidien sont établies.

    L'évaluation à mi parcours est au projet ou programme ce qu'est un brevet de fin d'études moyennes dans le cursus d'un élève. C'est en quelque sorte un examen de passage qui se tient à mi parcours de l'exécution du projet ou programme. Schématiquement il s'agit lorsque, par exemple, le projet ou programme est étalé sur 2 ans ; de procéder au bout de la première année d'exécution à un contrôle (audit) qui peut porter sur différentes rubriques (contrôle financier, audit de gestion, audit de procédures, audit des outputs....).

    Les populations y sont associées et nous avons pu d'ailleurs nous rendre compte qu'elles y occupaient une place centrale. Pour Ibrahima NDIAYE le responsable du suivi/évaluation au GADEC, cela semble aller de soi « dans la mesure où ce sont elles qui doivent assurer le remboursement du crédit, acheter le gasoil, payer l'eau ; ils ont intérêt à suivre si les choses se passent bien »91(*).

    Il ne faut en effet pas perdre de vue que, dans certains cas, l'implication des populations dans l'exécution des projets ou programmes peut aller bien au-delà de l'investissement physique (humain) jusqu'à l'investissement financier. Dans de tels cas il est, pensons nous, fort compréhensible qu'elles veuillent s'assurer de l'utilisation et de la gestion rationnelle de leurs fonds. C'est pourquoi on constate qu'elles participent très activement aux activités d'évaluation et apportent sur de nombreuses rubriques leurs avis.

    Plus fondamentalement cependant, ce qu'il faudra surtout retenir c'est que même s'ils ne s'investissent pas financièrement dans l'exécution d'un projet ou programme donné l'implication des acteurs à la base reste toujours effective (elle est presque même nécessaire) à l'étape de suivi/évaluation à mi parcours. A chaque fois en effet, qu'une mission d'évaluation descend sur le terrain c'est à elles prioritairement qu'elle s'adresse ; c'est dire que c'est principalement auprès d'elles que les données d'évaluation qualitatives sont recueillies.

    L'évaluation externe ou finale est, non seulement, un contrôle qui se tient en fin de projet ou programme mais c'est, en plus, un contrôle qui se fait le plus généralement avec le concours d'observateurs et/ou de structures externes. La chose la plus intéressante à retenir reste, nous semble t-il, que c'est un processus qui voit la participation effective des différents acteurs qui ont concouru à l'élaboration, la planification et à l'exécution du projet ou programme qui arrive à terme.

    Généralement les choses se passent de manière très simple : bailleurs, ONG, populations, instances de l'Etat, structures techniques déconcentrées, représentants des collectivités locales et souvent aussi des structures externes indépendantes du projet ou programme, se retrouvent autour d'une table pour tirer le bilan de ce qui a été fait, des résultats qui ont été atteints et de leur conformité d'avec les objectifs de départ. C'est à l'ONG au cours de ces rencontres d'évaluation, de faire les exposés et de diriger les échanges ; bailleurs, partenaires techniques et populations n'étant là que pour apporter leurs remarques et contributions (ce n'est surtout pas pour dire que c'est tout juste une affaire de l'ONG).

    On se doute bien cependant que les contributions des uns ou des autres varieront selon qu'il s'agit de tel ou tel autre acteur. Le bailleur est surtout là pour évaluer la rentabilité économique et sociale de son « investissement » et là les critères d'appréciation peuvent être de divers ordres :

    · L'exécution budgétaire

    · L'efficacité d'action

    · La pérennité des actions qui ont été mises en oeuvre

    · L'atteinte des objectifs

    · Le respect de la planification.....

    Tout en aidant donc à tirer le bilan de ce qui a été fait les bailleurs focalisent généralement leur attention sur des critères d'évaluation quantitatifs qui leur permettront de juger si oui ou non le projet ou programme qui arrive à terme a été une bonne « opération ».

    Dans le cas où elles s'investissent financièrement les populations peuvent, elles aussi, entretenir la même démarche. Mais ce à quoi on assiste le plus fréquemment c'est à une ferme volonté d'aider à tirer tous les enseignements sur des questions ayant notamment trait à l'atteinte des objectifs, à la satisfaction des besoins identifiés lors de l'élaboration du projet ou programme, aux futures actions à entreprendre.... Ce que nous voulons dire c'est que même si elles peuvent être là pour évaluer la rentabilité économique de leur participation financière, les populations saisissent toujours l'opportunité de ces rencontres pour participer sérieusement aux débats et donner leurs opinions sur ce qui a été fait et ce qui reste à faire.

    Il ressort de ce bref survol des démarches de suivi/évaluation des projets et programme au GADEC et à DIAPANTE que, globalement, trois (3) dispositifs ont cours chez ces ONG. Comme on a pu le voir, chacun de ces dispositifs vise un ou des objectifs différents et implique donc à des degrés différents chacun des acteurs de l'environnement du projet ou programme. Tantôt ce sont les populations et l'ONG qui sont à l'oeuvre, tantôt ce sont les bailleurs et des structures externes qui le sont plus. Il est dés lors très aisé de comprendre que les processus de décision soient elles aussi entachées de ces variations.

    Dans certaines situations la décision revient à l'ONG et dans d'autres elle est plutôt du ressort du ou des bailleurs. Dans le cas du suivi quotidien, par exemple, il est clair que c'est surtout à l'ONG qu'il appartient de corriger toute dérive sur le terrain. C'est à elle qu'il appartient, au jour le jour, de prendre les décisions qui s'imposent et de s'assurer de leur bonne application.

    Pour l'évaluation à mi parcours et l'évaluation externe, par contre, on s'est très rapidement rendu compte que les véritables décisions venaient des bailleurs. C'est à eux qu'il pouvait appartenir de juger de la qualité des résultats et donc de décider de la reconduction ou non d'un projet ou programme car tels sont, en vérité, les enjeux réels de ces deux procédures.

    Il est vrai que lorsqu'on interroge les responsables du GADEC et de DIAPANTE pour savoir si oui ou non les populations disposent d'un pouvoir de décision sur les procédures de suivi/évaluation, la majeure partie des réponses que l'on recueil est affirmative (83%) et de surcroît ils soutiennent presque tous que ce pouvoir de décision est déterminant.

    Graphique N°11

    Source : données de l'enquête (questionnaire n°2)

    Mais, le fait reste aussi que ces mêmes populations soutiennent mordicus le contraire. Sagni TOURE de l'EIVC parlait, par exemple, de « responsabilité partagée selon les compétences requises »92(*) pour dire que presque jamais leur avis n'est déterminant dans les processus de suivi/évaluation dans la mesure où ils n'ont presque aucune compétence avérée pour ce qui est de la plupart des rubriques du suivi/évaluation. Il semble rejoindre en cela A. SOW du comité de jumelage de Mbagam qui lui se plaignait surtout du fait que les acteurs à la base ignorent presque tout des indicateurs de performance qui permettent d'évaluer un projet ou programme. L'adage dit « qui souhaite noyer son chien, l'accuse de rage », pour dire qu'il est tout à fait permis de se demander si l'on ne fait pas croire aux populations qu'elles sont incompétentes pour mieux les écarter des véritables sphères de décision ?

    Dans tous les cas le fait reste que nos études sur le terrain révèlent que même si les populations participent de différentes manières, mais toujours très activement, aux processus de suivi /évaluation ; très concrètement, cependant, elles ne disposent d'aucun pouvoir de décision. Le ton est surtout donné par les bailleurs puis ensuite par l'ONG.

    S'agissant des différents types de difficultés que nous avons eu à relever concernant la participation des acteurs à la base aux processus de suivi/évaluation des projets et programmes, nous retiendrons que les responsables du GADEC et de DIAPANTE se sont plaints du manque de compétences, des rivalités personnelles, de l'absence d'une vision claire des véritables enjeux..... ; alors que du côté des populations on a surtout déploré le manque de moyens (par exemple le fait que leurs organisations ne soient dotées de motocyclettes), l'absence de motivation et surtout l'unilatéralisme des décisions qui sont prises. Ce qui nous pousse à aborder la question proprement dite des marges d'autonomie dévolues aux acteurs à la base dans les projets et programmes (interventions) du GADEC et de DIAPANTE.

    Section dix-sept (17) : Les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE

    Analyser les marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE tel était notre objectif principal, pour y parvenir nous avons défini deux (2) niveaux d'analyse à savoir les marges d'initiative et les marges d'autonomie. Sans revenir sur le contenu précis que nous donnons à ces 2 dimensions rappelons qu'elles couvrent, à notre sens, chacune deux (2) indicateurs principaux que nous avons empruntés à G. BELLONCLE; il s'agit de l'auto analyse et de l'auto programmation pour les marges d'initiative et de l'auto organisation et de l'auto suivi pour les marges de manoeuvre. C'est justement au regard de ces indicateurs que nous chercherons à tirer des conclusions de nos analyses précédentes en partant notamment des données qualitatives recueillies sur le terrain et des résultats de l'analyse de contenu.

    17.1 : Les marges d'initiative des acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE

    Derrière les marges d'initiative ou d'auto détermination il y a, comme nous le disions, cette capacité (pouvoir) pour les populations d'identifier par elles mêmes les problèmes et besoins prioritaires auxquels elles sont confrontées et d'initier par elles mêmes, aussi, les actions à entreprendre pour y remédier. En d'autres termes, quant on parle de marge d'initiative des populations dans une optique de développement endogène et participatif c'est surtout en référence aux capacités de ces dernières à prendre en charge leurs propres besoins et à leur trouver par la même des solutions adéquates.

    Dès lors si on doit juger valablement de la qualité ou du niveau d'initiative dont jouissent ces mêmes populations dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE il est plus pertinent, pensons nous, de beaucoup plus s'intéresser à l'étape de l'élaboration des documents de projets ou programmes. Non pas que c'est uniquement au cours de cette phase que l'initiative des populations peut être amenée à s'exprimer, mais tout simplement parce que c'est surtout au courant de ce processus que l'on procède à l'identification des besoins, qu'on les priorise et que l'on défini et planifie les actions ou activités à entreprendre.

    S'agissant de l'identification des besoins et de leur priorisation il est clair, au regard des résultats de nos enquêtes, que les marges d'initiative dont jouissent les acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE sont plus que larges. On s'est bien rendu compte, en effet, que cette phase des projets ou programmes était celle où les approches et les méthodes de ces deux ONG laissent véritablement cours au principe d'auto détermination. Que ce soit pour les diagnostics ou tout simplement pour la priorisation des besoins identifiés, les ONG GADEC et DIAPANTE cherchent à chacune de ces étapes, non seulement, à impliquer les populations mais surtout aussi à leur laisser les coudés libres en terme de pouvoir décisionnaire.

    Là où le bât blesse c'est qu'à partir de la planification et plus généralement de tout le processus de « ficelage » du futur projet ou programme les marges d'initiative dont jouissent les populations commencent véritablement à être limitées. Il est vrai, et cela est à encourager, qu'elles sont effectivement invitées à émettre des avis et à proposer des alternatives...Mais nous pensons, comme le démontre d'ailleurs notre analyse sur ce point, que cette participation (qui ne devient en fait qu'une contribution) est très largement limitée dans le sens où en terme d'initiative (auto programmation) ce ne sont pas ces mêmes populations qui décident. Comme il ressort, en effet, des données de l'enquête de terrain plus de 50% des responsables du GADEC et DIAPANTE reconnaissent que le pouvoir de décision dont jouissent ces dernières dans de tels processus n'est déterminant que dans certaines limites.

    Grâce à l'analyse de contenu nous avons également pu relever dans le cas de DIAPANTE, par exemple, un fait qu'il nous paraît pertinent d'exposer ici pour mieux illustrer tout ceci. Dans le cadre de son atelier de planification stratégique tenu en avril 2002, il avait été établi un modèle d'analyse des relations entre DIAPANTE et ses environnements. Ce modèle d'analyse distinguait cinq (5) éléments constitutifs du système de relation entre DIAPANTE et ses environnements.

    Dans les différents classements proposés, les acteurs à la base (comités de jumelage de Mbagam et de Ndiathène) figuraient dans l'élément environnement immédiat. Mais le fait qui a surtout attiré notre attention est que dans les conclusions de l'atelier on note que parmi les différents constats qui ont été fait figure le fait que l'environnement immédiat en général et les populations en particulier, n'ont aucune incidence sur le sous système stratégique de DIAPANTE. Autrement dit il n'a pas de rôle déterminant dans la détermination des stratégies d'intervention.

    On peut dans la même veine citer, dans le cas du GADEC, une donnée de l'analyse de contenu portant sur la catégorie générique expérience et qui confirme que les protocoles d'élaboration des documents de projets ou programmes (et un peu plus particulièrement les phases de planification) laissent souvent à désirer. Dans le texte introductif à la première session du forum des partenaires, le GADEC reconnaît qu'un premier bilan sur l'exécution du PTDI (programme triennal de développement intégré) en attendant une évaluation qualitative globale de ses actions, leur permet d'avancer quelques éléments parmi lesquels le point suivant « bien que la conception de ce programme ait été faite de manière participative sur une longue durée (6 mois environ), il y a eu des insuffisances dans sa méthodologie d'élaboration..... »93(*).

    Le plus important, pour nous n'est pas de se dire que dans le cadre du PCD/CMN par exemple lorsqu'il s'est agit de déménager le village de Ndiathène, le besoin de disposer d'une source permanente d'eau a était un besoin exprimé (identifié) par les populations elle mêmes (bien que cela soit encore une fois nécessaire et à encourager). Mais l'important reste plutôt de se demander si ce sont vraiment ces mêmes populations qui ont décidé que la source d'eau soit plutôt une station de pompage qu'un puit communautaire (ce qui leur aurait épargné des coûts financiers supplémentaires) ?

    Ceci est une question parmi d'autres qu'il est essentiel de se poser. Mais ce que nous voulons surtout dire c'est qu'il était primordial pour nous d'aller au-delà des intentions et du discours afin de mieux nous rendre compte des marges d'initiative qui sont effectivement laissées aux populations dans le cadre des interventions des ONG GADEC et DIAPANTE.

    De cela, il ressort que dans le fond même si les populations sont appelées à contribuer au processus de définition et de planification des activités ; il reste qu'elles n'en demeurent pas moins dépourvues de tout véritable pouvoir de décision. L'auto programmation est presque nulle dans le sens où ce n'est que quand les idées (initiatives) de l'EIVC ou des comités de jumelage rejoignent les schémas et cadres de référence (termes de référence) des potentiels bailleurs que l'ONG les valide et les fait figurer dans la programmation. Cette analyse des faits se confirme au regard des données qualitatives recueillies sur le terrain. Par saturation on remarque, en effet, que sur le thème 3 du guide d'entretien la plupart des personnes rencontrées estiment que même si des efforts sont fait pour prendre en charge leurs besoins spécifiques reste que le niveau d'implication, de responsabilisation et de concertation d'avec les acteurs à la base sur les actions et activités à mettre en oeuvre est plus que déplorable et mérite d'être revu sur de nombreux points.

    17.2 : Les marges de manoeuvre des acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et DIAPANTE

    Les marges de manoeuvre recoupent deux principaux indicateurs que sont l'auto organisation et l'auto évaluation. L'analyse des niveaux d'auto organisation dans les procédures d'intervention du GADEC et de DIAPANTE peut se faire à l'étape d'exécution ou de mise en oeuvre. En ce sens il peut être facile, à première vue, d'affirmer que l'auto organisation est effective en ce sens où les populations qui exécutent par elles mêmes les tâches à mettre en oeuvre parviennent d'une manière ou d'une autre à s'auto organiser. Autrement dit, il y a toujours dans l'exécution des projets et programmes une certaine part d'auto organisation du côté des populations surtout si elles en sont les principaux exécutants (ce sont les jeunes ou les femmes qui vont chercher l'eau et ce sont les hommes mûrs qui font les briques...).

    Mais, ceci n'est qu'une échelle d'auto organisation peu déterminante dans le processus d'exécution. Les rubriques les plus déterminantes dans l'organisation et la gestion de l'exécution des activités sont, comme nous avons pu le voir, à la charge des ONG. Pour tout ce qui est décaissement, approvisionnement en inputs ou encore définition des critères de suivi, l'ONG est en effet seul maître du jeu. Cette situation déteint bien évidemment sur les marges de manoeuvre dont disposent effectivement les populations, d'autant plus que c'est une situation similaire qu'il est donné de constater pour ce qui est de l'auto évaluation.

    Comme nous avons eu a le voir, en effet, autant leur participation à l'étape d'exécution est biaisée autant également elle l'est à l'étape de suivi/évaluation. Ce que confirment les données qualitatives. Jusqu'à saturation les populations auxquelles nous avons soumis le guide d'entretien estiment sur le thème 5 que l'ONG est celui à qui appartient les « grandes décisions ».

    conclusion

    Au terme de cette étude, il est important de préciser que notre prétention n'a pas été d'épuiser la question des marges d'autonomie des acteurs à la base dans le cadre des interventions des ONG. A la vérité nous pensons n'avoir qu'esquissé des pistes de réflexion qui pourront faire l'objet d'études plus poussées.

    L'importance sans cesse grandissante des ONG dans le système international de l'aide au développement s'est surtout justifiée par les approches et méthodes que celles-ci ont mis en avant dès leur apparition ; approches et méthodes se réclamant des théories de l'auto développement.

    L'objectif de cette étude était justement de nous interroger non seulement sur la nature réelle des rapports que ces structures entretiennent avec les populations à la base, mais aussi et surtout, sur la conformité de ceux-ci avec la dimension endogène et/ou humaine du développement.

    Pour cela nous sommes partis d'une démarche empirique reposant sur deux piliers méthodologiques que sont la recherche documentaire et les enquêtes de terrain. Les données collectées nous ont permis d'une part d'analyser dans le détail le profil des ONG concernées par l'enquête (nature, valeur, moyens ...), puis d'analyser la nature, la forme et l'intensité (ou la portée) de la participation des différentes catégories d'acteurs gravitant autour des interventions du GADEC et de DIAPANTE pour finir par nous prononcer sur les marges d'autonomie dont jouissent effectivement les acteurs à la base dans les interventions de ces ONG. Sur chacun de ces points nous pouvons retenir en guise de conclusion :

    1. concernant le profil des ONG : a l'exception de leurs méthodes respectives et de leurs statuts, les ONG GADEC et DIAPANTE ont un profil similaire qui repose sur des valeurs partagées, des stratégies ou domaines d'intervention similaires et une philosophie commune.

    2. concernant la participation des différentes catégories d'acteurs aux projets ou programmes du GADEC et de DIAPANTE : nous l'avons analysé aux phases d'élaboration des documents de projets, d'exécution ou de mise en oeuvre et de suivi/évaluation.

    · L'élaboration des documents de projets ou programmes : Il ressort des résultats de l'étude qu'autant à l'étape d'identification/priorisation qu'à l'étape de planification, les populations sont effectivement et volontairement associées par les ONG GADEC et DIAPANTE. Là ou le bât blesse cependant, c'est qu'en terme de pouvoir de décision les choses ne sont pas tout à fait les mêmes à l'étape d'identification/priorisation qu'à l'étape de planification. Lorsqu'il ne s'agit que d'identifier et de prioriser des besoins, les ONG GADEC et DIAPANTE sont effectivement promptes à conférer aux populations de réels pouvoirs de décision puisque déterminants dans le processus. Mais dès lors qu'il s'agit de planifier, les modalités de participation de ces dernières ne sont plus tout à fait les mêmes dans la mesure où elles (les populations) ne jouissent plus que d'un pouvoir de décision qui n'est déterminant que « dans certaines limites ».

    · L'exécution des projets ou programmes : dans la plupart des projets et programmes mis en oeuvre par le GADEC et DIAPANTE, les populations participent effectivement à l'exécution dans la mesure où elles sont dans la plupart des cas les principaux exécutants. Parfois même cet investissement humain ou physique s'accompagne d'un investissement financier ou monétaire. Au-delà de ces modalités de participation cependant, l'idée même de participation est biaisée à cette étape du projet ou programme dans la mesure où ces mêmes populations sont à la vérité absentes des véritables sphères de décision. Autrement dit bien qu'elles soient les premiers exécutants, elles n'en demeurent pas moins écartées de la gestion et de l'organisation du projet ou programme (elles ne décident par exemple pas des décaissements).

    · Le suivi/évaluation : les populations y sont effectivement associées mais elles n'y disposent d'un pouvoir de décision qui n'est déterminant que « dans certaines limites ».

    3. concernant les marges d'autonomie : elles comprennent les marges d'initiative et les marges de manoeuvre

    · Les marges d'initiative, au terme de cette étude l'appréciation que nous pouvons faire des marges d'initiative dont jouissent les acteurs à la base dans le cadre des interventions du GADEC et de DIAPANTE, est une appréciation mitigée. Il faut comprendre que sur les deux indicateurs principaux que nous avions eu à dégager concernant les marges d'initiative (auto analyse et auto programmation) on s'est rendu compte que si le premier est effectif et suffisamment appréciable ; le second par contre reste effectif mais néanmoins limité dans le sens où le pouvoir de décision dont les populations y jouissent est un pouvoir de décision qui n'est déterminant que dans certaines limites.

    · Les marges de manoeuvre, sur cet aspect par contre notre appréciation peut être catégorique dans la mesure où sur les deux indicateurs identifiés (auto organisation et auto évaluation) les résultats des enquêtes ont révélé que même si les populations sont appelées à participer ; cette participation reste de façade en ce sens où les pouvoirs de décision dont elles y disposent ne sont déterminants que « dans certaines limites ». Autrement dit, même si elles sont associées l'auto organisation et l'auto évaluation quant à elles restent quasi nulles puisque ce ne sont pas elles qui au fond prennent les décisions.

    En définitive, cette étude nous aura permis de nous rendre compte que même si les ONG GADEC et DIAPANTE se font les portes drapeaux des théories de l'auto développement, ce qu'il est possible de retrouver au travers de leur rhétorique ainsi qu'au travers de leurs méthodes respectives, le fait reste qu'à l'épreuve de la réalité (terrain) toute cette rhétorique et toutes ces professions de foi restent vaines du simple fait que ces ONG ne parviennent pas à échapper à des pesanteurs qui le plus souvent ont pour nom les bailleurs. L'autonomie et l'indépendance vis-à-vis de leurs partenaires financiers étant de moins en moins facile, les ONG GADEC et DIAPANTE en arrivent par «excès de professionnalisme» à négliger les marges d'autonomie des acteurs à la base .

    Cela ne veut aucunement dire que les populations ne sont pas associées aux protocoles d'intervention. Mais, le plus important étant de les responsabiliser et de les écouter, l'étude révèle que les ONG GADEC et DIAPANTE en arrivent très souvent à limiter très largement leurs marges d'initiative et de manoeuvre dans le sens où, sur les trois (3) étapes phares des procédures d'intervention elles (les populations) ne disposent presque jamais de réels pouvoirs de décision. A part l'auto analyse ; ni l'auto organisation, ni l'auto évaluation ne sont d'un niveau suffisamment appréciable pour garantir l'émergence d'une réelle dynamique d'auto prise en charge des questions de développement local par les populations elles mêmes. C'est dire que même s'il est bien de faire participer tout comme il est bien de recueillir des avis ; le plus important reste au-delà de tout d'écouter et surtout de faire confiance.

    Pour nous, le projet quel qu'il soit et quelque puisse être ses bailleurs doit être dans son fond comme dans sa forme non seulement une initiative des populations mais aussi, et surtout, une possibilité de manoeuvre pour ces dernières. Que ce soit pour l'identification/priorisation, la planification des activités, la mise en oeuvre (exécution) ou tout simplement le suivi/évaluation les populations doivent être les décideurs centraux. Ceux là qui après toutes les consultations d'usage seront ceux que l'on écoutera le plus et à qui l'on fera surtout, le plus confiance. De tous les avis recueillis les leurs doivent, à notre sens, être impérativement celles qui comptent le plus et qui pèsent plus lourd sur la balance parce que le développement endogène tel qu'il doit être pour satisfaire aux exigences de durabilité et de pérennité nécessite cela.

    Formulons, pour clore, quelques recommandations que nous ont suggérées les résultats de nos enquêtes :

    1. Vu que les moyens de créer un certain détachement vis-à-vis des cadres juridico institutionnels et financiers (bailleurs) sont largement limités pour les ONG, des stratégies comme le forum des partenaires du GADEC sont de notre point de vue à encourager et à vulgariser. Il s'agira d'établir et de conforter des cadres de concertation permanents avec l'ensemble des partenaires en vue de promouvoir des formes de collaborations sincères et respectueuses de la philosophie et des options de l'ONG. Il faut de plus en plus que les ONG aillent au-delà des discours et quelles cherchent, à travers une plus large concertation avec les bailleurs et autres partenaires, à faire comprendre qu'il leur faut plus de liberté pour que les exigences de participation à la base soit efficacement satisfaites,

    2. En appoint à cela, il nous parait également opportun que ces organisations pensent de plus en plus à développer des stratégies de collecte de fonds et de plaidoyer (en un mot de véritables plans de communication) adaptés à la société de l'information que nous vivons, et à renforcer leurs politiques d'auto financement en les rendant économiquement plus efficaces et socialement plus durables. Pour cela il faut par exemple, susciter (encourager) les vocations messianiques à travers des campagnes de sensibilisation et de communication de masse. Tout cela doit se faire tout en prenant garde de ne pas tomber dans le piège de la perversion c'est-à-dire finir par devenir autre chose que des organisations à buts non lucratifs,

    3. Les populations elles aussi ont de plus en plus intérêt à prendre en compte les exigences de professionnalisme. Ce que nous voulons dire c'est qu'au moins les associations à la base doivent de plus en plus relever leur niveau d'aptitude, il leur faut de plus en plus tendre vers un renforcement de leurs capacités de participer valablement aux projets et programmes qui les concernent. En cela nous pensons que le système de coopération au développement doit de plus en plus axer le financement sur des modules de formation ayant trait à la planification, au montage de projet, à l'évaluation et au suivi de projets et programmes de développement......

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    www.unige.ch/. Le rôle des ONG dans la politique de développement : forces et faiblesses.

    * 1 DELER (J.P). ONG et développement : Société, économie, politique. Paris, ed. Karthala, 1998, p.2. (Avant propos).

    * 2 BA (M). « Le mouvement ONG au Sénégal : outil de développement participatif » dans Les cahiers du CONGAD n°1 : symposium sur l'identité des ONG (12,13 et 14 novembre 1997 Saly/ Mbour). Dakar, CONGAD, Janvier 1999, p.13.

    * 3 Remarquons avec Yves A. FAURE («  Les ONG : de l'action à la recherche, de la compréhension à la banalisation » dans ONG et développement p.11) la proximité de la plupart des ONG d'avec les théories économiques de la dépendance ou de l'échange inégal ; théories qui ont été au point de départ du paradigme de l'auto développement.

    * 4 DELER (J.P), op.cit, p. 5.

    * 5 Le terme signifie littéralement en wolof « se donner la main ».

    * 6BOULOUDANI (V) et GHINET (S). Le financement extérieur du développement en Afrique de l'Ouest : étude des transferts et réflexions sur l'aide au développement 1960-1990. Abidjan, ed. CINERGIE, 1994, p.2.

    * 7 FREUD (C). Quelle coopération ? Un bilan de l'aide au développement. Paris, ed. Karthala, 1998, 270 p.

    * 8 Si l'on en croit Claude FREUD le système du «pacte colonial» imposait aux colonies de développer des productions dont la métropole avait besoin et de recevoir en retour ce que cette dernière produisait. Dans un tel contexte les colonies étaient considérées comme des marchés réservés au profit exclusif de la Métropole et se trouvait ainsi placées dans une dépendance économique totale. Ainsi le pacte reposait sur cinq (5) principes fondateurs :

    · Une colonie ne pouvait importer que les produits de la métropole.

    · Elle ne pouvait exporter ses produits naturels que vers la métropole.

    · Elle ne devait avoir aucune industrie qui ferait concurrence à celles de la métropole.

    · Entre elle et la Métropole tous les transports devaient se faire sous pavillon national.

    · Les seuls produits coloniaux admis en franchise dans la Métropole étaient ceux de ses colonies, les autres étaient prohibés ou frappés de droits d'entrée.

    * 9 FREUD (C), op.cit, p.5.

    * 10PIVETEAU (A). «Pour une analyse économique des ONG» dans ONG et Développement. p. 274.

    * 11CASSEN (R). Does Aids Work?. Oxford University Press, Oxford, 1986 cité par Daniel FINO, op.cit., p. 15.

    * 12 PIVETEAU (A), op.cit., p. 274.

    * 13 FINO (D), op.cit, p. 17.

    * 14 Notons à titre indicatif que malgré les coûts estimés exorbitants, l'aide publique au développement est jugée quantitativement faible par rapport au PNB des pays du Nord. Quelques chiffres suffiront peut être pour s'en convaincre : dans les années 60, les Nations Unies, la CNUCED et le CAD avaient à tour de rôle fixé à 1% du PNB la part des transferts des pays économiquement avancés vers le tiers monde. Les deux décennies suivantes ont vu cet objectif revu à la baisse pour être fixé à 0,7%. Or, en 1989 le CAD estimait que pour la totalité de ses membres, le rapport aide publique/PNB était de l'ordre de 0,35%, c'est-à-dire au même niveau qu'en 1975.

    * 15 BRUNEL (S). Le Sud dans la nouvelle économie mondiale. Paris, PUF, 1994, p.169.

    * 16GABAS (J.J). L'Aide contre le développement : l'exemple du Sahel. Paris, Economia, 1988.

    * 17LEWIS (J.P). «Coopération entre Organismes publics et Organisations Non Gouvernementales» dans Bulletin de liaison entre Instituts de Recherche et de Formation en matière de Développement n° 10. Paris, OCDE, 1983 Cité par Alain Piveteau, op.cit. p. 273.

    * 18 DE TOCQUEVILLE (A). La démocratie en Amérique. Paris, ed. M.TH.Genine Librairie de Médicis, cité par Philippe RYFMAN, op.cit, p.54.

    * 19 TENDLER (J). Turning private voluntary organizations into development Agencies: Questions for Evaluation. Washington U.S. AID: Program Evaluation Discusion paper n° 12, US Agency for Development, 151 p. cité par Philippe RYFMAN, op.cit. p. 57.

    * 20 FAURE (Yves A). op.cit., p.17.

    * 21 Dans son ouvrage, Abdou SARR s'attache à analyser de manière rigoureuse et merveilleusement objective les atouts et faiblesses de «l'accompagnement» (L'intervention) des ONG vis à vis du mouvement associatif du milieu rural en Afrique Subsaharienne ; voilà pourquoi nous ferons beaucoup référence à ses travaux dans cette partie de notre étude. Notons que s'il était question de le situer dans le débat sur l'efficacité des ONG en tant qu'outil de la coopération pour le développement et la lutte contre la pauvreté, nous dirons à l'attention de ceux qui n'auront peut être pas l'occasion de lire son ouvrage, qu'Abdou SARR tout en reconnaissant le rôle stimulant de l'action des ONG dans l'émergence, la formation et le développement des associations paysannes, n'en fustige pas moins ce qu'il estime être une «implication excessive ou un compagnonnage insuffisant».

    * 22 SARR (A), op.cit., p. 57.

    * 23 DAMIBA (P.C). « La coopération aux deux visages » dans Impasses et promesses : l'ambiguïté de la coopération au développement. 1999, p.27.

    * 24 FREUD (C), op.cit, p.27.

    * 25 En vérité ici Claude FREUD renvoie son lecteur aux travaux de Judith TENDLER, op. Cit. , 1982.

    .

    * 26 NGUINGUIRI (J.C). « Approches participatives et développement local en Afrique Subsaharienne : faut-il repenser la forme contemporaine du modèle participatif ? » dans Bulletin Arbres, Forêts et Communautés rurales, 15-16 FTTP/AOC. Douala, p.44 à 46

    * 27 DELVILLE (P.L). Participation, Négociation et Champ du développement : Quelques réflexions. Document interne au groupe de réflexion de l'association euro-africaine pour l'anthropologie du changement social et du développement (APAD) ,1995 cité par CHAUVEAU (J.P), DELVILLE (P.L) et un groupe de chercheurs de l'APAD. « Communiquer dans l'affrontement : la participation cachée dans les projets participatifs ciblés sur les groupes ruraux défavorisés » dans ONG et Développement. p.202.

    * 28 MARADEIX (M.S), op.cit, p. 41.

    * 29 BESSIS (S). «Les associations d'aide au tiers monde (ONG) à la croisée des chemins» dans problèmes politiques et sociaux n° 615. 1989, cité par Valérie BOULOUDANI et Serge GHINET, op.cit, p. 171.

    * 30 DONSIMONI (M). «La relation donateur/ONG : le jeu du don» dans ONG et Développement. p. 294.

    * 31 KOLM (S.C). La bonne économie : la réciprocité générale. PUF, Paris, 1984, cité par Myriam DONSIMONI, op.cit, p. 293.

    * 32 DONSIMONI (M), op.cit, p. 296.

    * 33 Dr.VERHAGEN (K). L'auto développement? Un défi posé aux ONG : Eléments comparatifs (Brésil, Indonésie, Thaïlande) pour des ONG en Recherche Action. Paris, l'Harmattan, 1996, p 152.

    * 34 Dr. VERHAGEN (K), op.cit, p. 158.

    * 35 Dr. VERHAGEN (K), op.cit, p. 161.

    * 36 Dr. VERHAGEN (K), op.cit, p. 162.

    * 37DAMIBA (P.C), op.cit, p. 29.

    * 38 LECOMTE (B), op.cit, p. 39.

    * 39LECOMTE (B), op.cit, p. 39.

    * 40Dr. VERHAGEN (K),, op.cit, p. 263.

    * 41 HUSSON (B). «Les ONG, une légitimité en question» dans ONG et Développement. pp. 545-557, p.552

    * 42 GRAWITZ (M). Méthodes des Sciences Sociales. Paris, Col. Dalloz, 1993, p. 478.

    * 43DURKHEIM (E). Les règles de la méthode Sociologique. Paris, PUF, 1968, p.34.

    * 44 Sous la direction de AUGUE (P). Dictionnaire de la langue Française. LAROUSSE, Paris, librairie Larousse, 1973, p.386.

    * 45 Op. Cit. p.13.

    * 46 SARR (A), op.cit, p.74.

    * 47 LAROUSSE, op.cit, p.412.

    * 48 « L'auto développement suppose de mettre en oeuvre une démarche qui part de l'analyse avec les populations concernées de leurs problèmes pour réfléchir avec elles aux solutions possibles, les aider à s'organiser et à se former pour passer à l'action et procéder enfin aux évaluations périodiques qui permettent de corriger le tir et de progresser. D'où les quatre (4) mots clefs : auto analyse ; auto programmation ; auto organisation; auto évaluation » BELLONCLE (G). Le chemin des villages : Formation des Hommes et Développement en Afrique. Paris/ACCT, 1979, p. 27.

    * 49 BOUDON et BOURRICAUD. Dictionnaire critique de la sociologie. Quadrige/PUF, Paris, 1982, 714 p., p.316.

    * 50 Contrairement à l'échelle métrique ou quantitative et à l'échelle nominale, l'échelle ordinale se borne à distinguer des niveaux ordonnés de mesure du phénomène

    * 51 BERTHELOT (J.M). L'intelligence du Social. Collection Sociologie d'aujourd'hui, Paris, PUF, 1990.

    * 52 BERTHELOT (J.M), op. Cit. p. 22.

    * 53 BOUDON et BOURRICAUD, op. Cit., pp. 175-176.

    * 54 La loi de la baisse tendancielle du taux de profit postule que «étant en situation de concurrence les uns par rapport aux autres, les capitalistes ont intérêt à rechercher constamment à améliorer la productivité de leurs entreprises. Mais, ce faisant ils contribuent à laminer la base à partir de laquelle le profit est constitué (selon la théorie Marxiste), puisqu'ils réduisent alors la part du travail dans les facteurs de production. A la limite, ils contribuent donc à la destruction du Capitalisme (...) la logique de la situation de concurrence dans laquelle ils se retrouvent les uns par rapport aux autres. Ils contribuent ainsi au développement de l'industrie et du prolétariat. Sans le vouloir, ils grossissent et arment la masse de leurs adversaires » ; BOUDON et BOURRICAUD, op. Cit., p. 179.

    * 55 Pour des besoins d'analyse cette rubrique a été le lieu de collecter un maximum d'informations sur la situation matrimoniale, familiale, professionnel...... des sujets enquêtés. 

    * 56 Terme que nous préférons à celui de populations cibles.

    * 57 Décret N°96-103 du 8 février 1996.

    * 58 En 2000, 28 programmes d'investissements et 4 avenants ont été signés entre le gouvernement du Sénégal et les ONG pour un investissement prévisionnel global de 27.771.368.536Fcfa ; en 2001, 37 programmes et 4 avenants ont été signés pour 22.354.588.399Fcfa d'investissement prévisionnel global ; en 2002, 35 programmes d'investissements et 6 avenants ont été signés pour 31.597.548.953 Fcfa d'investissement prévisionnel ; en 2003 enfin on en était finalement à 65.843.102.685Fcfa d'investissement prévisionnel global pour un peu moins de 95 programmes d'investissements.

    * 59 CONGAD. Du cadre institutionnel de l'intervention des ONG. Dakar, 1994, 28 p., p.12.

    * 60 DIAPANTE. Plan Stratégique 2003-2007. Saint Louis, Juillet 2002, 12 p., p.3.

    * 61 Op. Cit., p.5

    * 62 TRIOLET (K). Le développement rural au Sénégal oriental : l'appui du GADEC aux OP. Mémoire de maîtrise de Sociologie sous la direction de DUBOIS (P), université Paris X Nanterre, Octobre 1997, 136 p. , p.49.

    * 63 GADEC / FRAO. Evolution institutionnelle d'une ONG africaine : Le GADEC. Document de capitalisation des expériences du GADEC réalisé avec la collaboration de la FRAO, 1997, 38 p., p.14.

    * 64 GADEC. Texte d'orientation. Tambacounda, 1997, 18 p., p.6.

    * 65 Op. Cit. p.7.

    * 66 Op.cit, p. 3.

    * 67 Op.cit, p. 5.

    * 68 Op.cit, p. 5.

    * 69 Op.cit, p. 5.

    * 70 Op.cit, p. 5.

    * 71 GADEC. DIP / EIVC dans 4 villages de sa zone d'intervention (Coulibantang, Boulémbou, Diyabougou et Fadya). Tambacounda, Mars 1992, 25 p., p.4.

    * 72 Diyabougou est une expression Soninké qui peut littéralement signifier en français la « promesse d'une vie meilleure ».

    * 73A la date du 16 novembre 1992 la structure de la population par sexe et par catégorie se présentait comme suit :

    Adultes

    Enfants

    Total

    Garçons

    Filles

    Garçons

    Filles

    184

    54

    55

    35

    40

    Source : PRAAP / GADEC. Diagnostics Participatifs réalisés dans les villages de Diyabougou et Mboulémou, 10-20 Novembre 1992.

    * 74 DEFOIS (A) et DUDERMEL (T). Organisation sociale et structures de la parenté chez les Soninké de la région orientale du Sénégal. Université de Metz, 1988, 212 p, p.79.

    * 75 DIAPANTE. Fiche de présentation.

    * 76 GADEC, op. Cit. , p.7.

    * 77 GADEC, op. Cit., p.5.

    * 78 DIAPANTE, Plan stratégique 2003-2007, p.9.

    * 79 SECK (S.M) et D'AQUINOT (P), op. Cit., p. 232.

    * 80 Interview M. DIAW

    * 81 Interview M. Ibrahima NDIAYE.

    * 82 Interview Mme Amicolé BADJI.

    * 83 Interview Mme Amicolé BADJI.

    * 84 Interview Mr DIOP du comité de jumelage de Ndiathène.

    * 85 Op. Cit.

    * 86 Précisons que notre approche analytique part toujours du postulat que l'ONG est le porteur de projet ou programme. A chaque fois que nous envisagerons l'ONG en tant qu'elle est sollicitée par un bailleur pour la réalisation d'un projet ou programme nous prendrons la peine de le préciser.

    * 87 Interview M. WELE.

    * 88 Interview Alkali SAO.

    * 89 Interview M. NDIAYE.

    * 90 Interview Alain KASRIEL.

    * 91 Interview Ibrahima NDIAYE.

    * 92 Interview Sagni TOURE.

    * 93 GADEC. Texte introductif à la première session du forum des partenaires. Décembre 1993, p.5.






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore