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Les soins psychiatriques sans consentement : la réforme du 5 juillet 2011

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par Delphine ROUZO
Université Catholique de Lille - Master 2 Droit de la responsabilité médicale 2012
  

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2. Les soins psychiatriques sur décision du représentant de l'Etat

L'admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l'Etat qui succède au régime de l'hospitalisation d'office ne révèle pas de profond changement par rapport au dispositif antérieur. L'article L.3213-1 du Code de la santé publique prévoit que le représentant de l'Etat, c'est-à-dire le préfet, prononce par arrêté l'admission « des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. » Le préfet devra établir un

31 Dans les trois derniers jours de la période.

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arrêté motivé en précisant les raisons précises l'ayant poussé à prendre la décision d'admission en soins sous contrainte.

Il se prononce au vu d'un certificat médical circonstancié qui ne peut être établi par un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, afin de prévenir l'éventualité d'un conflit d'intérêt. Sur ce point, les commentateurs soulignent l'inconvenance d'une telle rédaction car celle-ci prête à une interprétation a contrario : en effet, on pourrait en déduire que ce certificat peut être établi par un médecin non psychiatre exerçant dans l'établissement32. Or, cette interprétation irait certainement contre l'esprit du texte qui vise bien à empêcher que le certificat soit rédigé par un personnel soignant, qu'il soit médecin ou psychiatre, exerçant dans l'établissement au sein duquel est accueilli le patient.

Certains auteurs dénoncent par ailleurs un déséquilibre entre le pouvoir médical et le pouvoir administratif dans la prise de décision d'admission en soins sans consentement.33Le préfet ne se base en effet que sur un seul certificat médical, ce qui laisserait subsister une certaine prédominance du pouvoir administratif dans le processus de décision.

Le législateur a également prévu un dispositif d'urgence, en cas de danger imminent pour la sûreté des personnes : le maire (à Paris, les commissaires de police) peut arrêter toutes les mesures provisoires nécessaires « à l'égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes ».34 A cet égard, le texte prévoyait qu'à défaut d'être attesté par un avis médical, le danger imminent pouvait être attesté par la « notoriété publique ». Cette disposition a fait l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité. La requérante contestait la constitutionnalité notamment de l'article L.3213-2 du Code de la santé publique en ce qu'il ne respectait pas les exigences de l'article 66 de la Constitution et considérait que les conditions permettant au maire de prendre des mesures provisoires étaient trop peu encadrées. Mais ce n'est pas la première fois que cette notion de notoriété publique fait débat. En effet, le sénateur Robert VIZET contestait déjà cette possibilité de recourir à la notoriété publique pour justifier de

32 COUTURIER (M), La réforme des soins psychiatriques sans consentement : de la psychiatrie disciplinaire à la psychiatrie de contrôle, Revue de droit sanitaire et social 2012 p. 97

33 CASTAING (C), Pouvoir administratif versus pouvoir médical, AJDA, 2011. 2055

34 Article L.3213-2 du Code la santé publique.

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l'admission en soins sans consentement lors des débats parlementaires précédent le vote de la loi du 27 juin 1990. Selon le sénateur VIZET, l'ancien article L.343 du Code de la santé publique (aujourd'hui L.3213-2) donnait « le pouvoir au maire ou au commissaire de police de prendre des mesures totalement discrétionnaires à l'encontre de n'importe quel citoyen.(...) Cette notion, éminemment vague, ne pourrait qu'entrainer des abus . »35

Saisi de cette question le 16 juillet 2011 par la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel considère dans sa décision du 6 octobre 201136 qu'« en permettant qu'une telle mesure puisse être prononcée sur le fondement de la seule notoriété publique, les dispositions de cet article n'assurent pas qu'une telle mesure est réservée aux cas dans lesquels elle est adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état du malade ainsi qu'à la sureté des personnes ou la préservation de l'ordre public.» Le Conseil constitutionnel censure ainsi la notion de notoriété publique et les mots « ou à défaut par la notoriété publique » sont déclarés contraires à la Constitution.

Cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet dès la publication de la décision et la référence à la notoriété publique est alors supprimée de l'article L.3213-2.

Le maire doit signaler la mesure provisoire au représentant de l'Etat dans le département dans les vingt quatre heures, à charge pour ce dernier de prononcer s'il l'estime nécessaire, un arrêté d'admission en soins psychiatriques. A défaut d'une telle décision, ces mesures provisoires sont caduques au terme d'un délai de quarante-huit heures.

Si le patient est admis en soins psychiatriques par arrêté préfectoral, s'ensuit la même procédure que celle précédemment exposée pour l'admission et le maintien en soins psychiatriques à la demande d'un tiers : la période initiale de vingt quatre heures d'observation et de soins à l'issue de laquelle le psychiatre doit établir un certificat, puis le certificat des soixante-douze heures et enfin le certificat devant être établi entre le cinquième et le huitième jours suivant l'admission confirmant ou non la nécessité des soins et l'adaptation de la prise en charge37.

35 Commentaire aux Cahiers du Conseil, op. cit., p.3

36 Conseil const., décision n°2011-174, QPC, 6 octobre 2011, AJDA 2011, p.1927.

37 Voir supra : 1. A. du présent paragraphe.

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Si un des certificats propose la levée de la mesure, le préfet dispose de deux options : soit il suit l'avis du psychiatre et lève la mesure de soins (il établi alors un nouvel arrêté), soit il refuse de suivre l'avis du médecin. Dans ce cas, il doit en informer sans délai le directeur de l'établissement qui demande alors l'examen du patient par un second psychiatre. Si ce dernier conclut à la possibilité de lever l'hospitalisation du patient, le préfet est alors dans l'obligation de lever la mesure. A contrario, si ce second avis ne confirme par le premier, le préfet peut décider de maintenir la mesure de soins.

Enfin, notons que dans le cadre de ses pouvoirs en matière de sécurité publique, le préfet peut décider de modifier le cadre juridique de soins psychiatriques sans consentement d'un patient faisant l'objet d'une telle mesure suite à la demande d'un tiers. En effet l'article L.3213-6 du Code de la santé publique, tel que modifié par la loi du 5 juillet 2011, permet au préfet de transformer une procédure de soins psychiatriques à la demande d'un tiers en une procédure de soins psychiatriques sur décision du représentant de l'Etat, sur la base d'un certificat ou d'un avis médical d'un psychiatre de l'établissement. Deux critères cumulatifs exigent toutefois d'être réunis : l'état mental du patient doit nécessiter des soins et, soit compromettre la sûreté des personnes, soit porter atteinte de façon grave à l'ordre public. Toute la procédure de maintien dans le dispositif de soins rythmée par les différents certificats médicaux recommence alors à nouveau.

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