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Les soins psychiatriques sans consentement : la réforme du 5 juillet 2011

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par Delphine ROUZO
Université Catholique de Lille - Master 2 Droit de la responsabilité médicale 2012
  

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B. Le jugement et l'expertise

Au vu des éléments du dossier du patient, le juge de la liberté et de la détention peut soit ordonner le maintien du patient en hospitalisation complète, soit ordonner la mainlevée de la mesure. En outre, la loi du 5 juillet 2011 introduit la faculté pour le juge de différer de vingt quatre heures la prise d'effet de sa décision62. Cet effet différé vise à éviter un brusque arrêt des soins dans les cas où la poursuite de soins en ambulatoire est malgré tout nécessaire au patient. Il convient dès lors d'établir un programme de soins. Toutefois, le juge n'a pas le pouvoir de contraindre l'établissement de santé ou le préfet à instaurer ce programme de soins63. Si ce dernier n'est pas établi, le patient doit quand même se maintenir dans l'établissement pendant vingt-quatre heures.64 A l'issu de ce délai, la mesure d'hospitalisation complète prend fin et le patient peut sortir de l'établissement.

S'est posée la question de la responsabilité dans le cas où le patient, à défaut d'un programme de soins ou lorsque le juge a levé la mesure, sort de l'hôpital et récidive. Le psychiatre qui a refusé d'établir un programme de soins ne peut pour sa part être tenu pour responsable puisque la loi ne l'oblige pas explicitement à l'établir. Par ailleurs, le patient peut aussi le refuser.

Pourrait-on engager la responsabilité du juge des libertés et de la détention ? La faute du juge judiciaire a été peu à peu absorbée par le « dysfonctionnement du service de la justice ». En vertu de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire, il est possible

61 Article L.3211-12-1 IV du Code de la santé publique.

62 Article L.3211-12 du Code de la santé publique.

63 Circulaire du 21 juillet 2011 relative à la présentation des principales dispositions de la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge et du décret n°2011-846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques.

64 En pratique, beaucoup de psychiatres refusent d'élaborer un programme de soins dans le cadre de l'effet différé de mainlevée, se sentant « contraints » par le juge.

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d'engager la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service de la justice, mais uniquement en cas de faute lourde ou de déni de justice. En cas d'erreur d'appréciation par le JLD, cette faute, bien que personnelle, est rattachable à l'activité judiciaire de service public, l'action doit donc être intentée contre l'Etat. Toutefois, cette erreur d'appréciation ne saurait être considérée comme une faute lourde, celle-ci étant défini par la Cour de cassation comme « soit celle qui a été commise sous l'influence d'une erreur tellement grossière qu'un magistrat normalement soucieux de ses devoirs n'y aurait pas été normalement entraîné, soit celle qui révèle l'animosité personnelle, l'intention de nuire ou qui procède d'un comportement anormalement déficient ».65 Au vu de ces critères d'appréciation, il nous semble peu probable de pouvoir engager la responsabilité de l'Etat dans cette situation.

La loi prévoit néanmoins la possibilité pour le juge de demander une expertise. Notons que la circulaire du 21 juillet 2011 insiste sur la subsidiarité des expertises, et sur la prédominance des informations contenues dans les documents médicaux figurant au dossier du patient. La circulaire se réfère à l'article 147 du Code de procédure civile relatif aux mesures d'instruction pouvant être ordonnées par le juge et qui précise que « le juge doit limiter le choix de la mesure à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en s'attachant à retenir ce qui est le plus simple et le moins onéreux. ». Lorsque cela est possible, le juge doit donc privilégier l'étude des certificats médicaux contenus au dossier. De plus, les juges de la liberté et de la détention relèvent une certaine difficulté à obtenir des expertises, les experts étant souvent débordés et dans l'impossibilité de rendre leur rapport dans les délais fixés par les textes. Il arrive ainsi régulièrement que le juge contacte plusieurs experts qui tous refusent la mission.66

Par ailleurs, pour des raisons d'impartialité et de déontologie évidentes, les experts désignés par le juge67 ne peuvent exercer dans l'établissement d'accueil du patient.68

Dans le cadre de la saisine systématique du juge, les experts ont dix jours pour remettre leur rapport, le juge bénéficiant du même coup d'un délai de quatorze jours pour statuer.

65 Ass.Pl. 23 février 2001 n°99-16165.

66 Informations recueillies auprès d'un JLD du TGI de Lille. Exemple d'une ordonnance JLD du TGI de Lille en date du 20 juin 2012, dans laquelle le juge mentionne avoir contacté sept experts psychiatres aux fins d'évaluer la persistance d'une pathologie médicale et d'un éventuel danger pour la personne soignée ou pour les tiers. Aucun psychiatre n'était disponible compte tenu des délais imposés par la loi.

67 Les règles de droit commun sont applicables à la désignation des experts.

68 Article L.3211-13 et L.3211-30 du Code de la santé publique.

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A l'audience, le patient est entendu dans le cadre d'un débat contradictoire et public lorsque celui-ci est en mesure de se déplacer.69Le patient est alors en droit d'être assisté d'un avocat choisi par lui ou commis d'office. Le principe étant que la personne qui fait l'objet d'une mesure de soins sans consentement doit être entendue par le juge, si ce patient ne peut être entendu en raison de son état de santé, il doit impérativement être représenté par un avocat. De même, si le patient n'a pu être transféré au tribunal, le juge ne peut statuer en son absence, sauf si le patient a expressément donné son accord pour être représenté par un avocat.70

Enfin, l'ordonnance est notifiée aux parties présentes à l'audience, à l'établissement, au préfet dans le cas d'une SDRE, ainsi qu'au ministère public. Elle est susceptible d'appel dans les dix jours à compter de sa notification, devant le premier président de la cour d'appel qui doit rendre sa décision dans les douze jours de l'appel, délai porté à vingt-cinq jours en cas de demande d'expertise.

Toutefois, le ministère public peut demander à ce que le recours soit suspensif : le patient étant alors maintenu dans l'établissement jusqu'à ce que le président de la cour d'appel statue sur la demande d'effet suspensif, le délai d'appel est donc réduit à six heures. Le président de la cour d'appel dispose ensuite d'un délai de trois jours pour examiner la question, et de quatorze jours s'il a recours à une expertise.

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