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La liberté de la presse et ses limites en droit congolais

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par Vinny KOYAGIALO KONYELO
Université protestante au Congo - Graduat 2013
  

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1.2. La présomption d'innocence au regard des instruments juridiques internes

Par instrument juridiques internes, nous entendons les normes qui font partie du système juridique d'un Etat donné et qui n'ont pas une portée internationale. Dans cette logique, nous analyserons la Constitution du 18 Février 2006 telle que modifiée à ce jour.

54 Voir C.A.D.H.P, (n9), art. 7, alinéa 1 (b)

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1.2.1 La présomption d'innocence à la lumière de la Constitution

Il faut reconnaitre que sur le plan formel, la Constitution du 18 Février 2006 consacre très importante aux droits et libertés fondamentaux à l'être humain. Pour s'en rendre compte, plus de cinquante articles sur deux cent vingt-neuf sont spécialement réservés aux droits et libertés fondamentaux de l'homme. Cela s'explique, nous semble-t-il, à l'adhésion de la RDC à plusieurs conventions internationales portant sur ces matières.55

Elle pose le principe de la présomption d'innocence en ces termes : « Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie par un jugement définitif. »56

Au regard de cette disposition, il ressort que la présomption d'innocence est un principe constitutionnel qui est posé en de termes nets et clairs. A ce sujet, la nuance qui existe entre la Constitution sous examen et les autres instruments juridiques ci - dessus évoqués sur ce point précis réside dans la détermination de la période ; mieux l'espace de temps à partir duquel l'accusé doit bénéficier de la présomption d'innocence. Ce qui nous permet d'étudier la question relative à la portée de la présomption d'innocence.

§2. Portée de la présomption d'innocence

A l'heure actuelle, bon nombre de normes affirment le principe de la présomption d'innocence. Bien que s'exprimant en de termes nuancés, la plupart de ces textes juridiques reconnaissent à l' « accusé » ce droit fondamental.

Nous pensons que la question de la portée de la présomption d'innocence mérite d'être soulevée pour la simple et bonne raison que, la plupart des textes qui en affirment, n'en détermine pas la portée ; c'est-à-dire le champ d'application. Chaque droit étant le reflet de la réalité de chaque société, il est intéressant pour nous, à travers le présent paragraphe, de tenter de définir la portée de la présomption d'innocence.

Sous la plume intelligente de Jean Pradel, nous pouvons lire que le principe de la présomption d'innocence s'applique à la décision pénale de fond dès lors que la partie poursuivante ne peut démontrer la culpabilité. C'est le sens l'adage latin « in dublio pro reo » ; en français « le doute profite à l'accusé »57.

55 Constitution de la République Démocratique du Congo, (n1) Préambule §4. 56Idem, art 17, in fine.

57 J. PRADEL, procédurepénale, Paris, éd. Cujas, 1995, p.306

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A cette même question, Jean Carbonnier soutient qu' « on a nié l'application de la présomption d'innocence avant la saisine du juge pénal au motif que scientifiquement, il ne devrait pas y avoir, tant que le procès pénal est en cours, de préjugé sur la culpabilité ou la non culpabilité de l'inculpé, de présomption d'innocence, comme celle que proclame peu imprudemment la déclaration des droits, ni à rebours, de présomption de délinquance, comme celle que l'école positiviste aura volontiers posée contre criminalité atavique. Ni l'un ni l'autre présomption mais une condition juridique neutre d'inculpé, un statut de l'inculpé à la fois pour lui et pour sa société [...] »58

Il appert, selon ce dernier auteur, que le principe de la présomption d'innocence ne s'applique que devant les cours et tribunaux ; et qu'en dehors d'une procédure se déroulant devant le juge, l'accusé ne bénéficie que d'un statut qui le protège. Telle est la conception anglo-américain de la présomption d'innocence. En effet, en droit anglo-saxon, l'infracteur peut être présenté, avant même qu'il ne soit condamné au public, par les médias, comme l' « auteur des faits dont le peuple a entendu parler »59.Cela démontre que la protection de la présomption d'innocence reste mince aux USA.

Ainsi, il n'est nullement interdit, en droit anglo-américain, de montrer des faits suggérant qu'une personne est coupable. Concrètement, cela veut dire que les lois américaines n'interdisent pas de montrer une personne arrêtée et soupçonnée d'un crime avec des menottes aux mains. Plus généralement, les médias se couvrent en parlant de crimes allégués60.

En l'absence d'une définition explicite du champ d'application de la présomption d'innocence, la doctrine fait naitre des controverses. Cependant, il faut souligner que tous soutiennent unanimement que c'est un principe qui ne s'applique qu'en matière répressive. En effet, les uns, à l'instar de Carbonnier, nient l'application de ce principe pendant la phase pré-juridictionnelle pour de raison théorique ; et les autres soutiennent qu'il concerne tant la phase pré-juridictionnelle que la phase juridictionnelle.

Face à ces deux courants idéologiques, il convient de prendre position en tenant compte de la réalité du droit positif congolais. En effet, la procédure

58 J. PRADEL, (n19), p.306

59 Lire T. NGOY ILUNGA WA NSENGA, (n1), p.242.

60 « Présomption d'innocence », disponible sur http://fr.joellebailard.com/2012/07/31/le-peuple-de-letat-de-new-york-contre-dominique-strauss-kahn/, consulté le 29 mai 2013.

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pénale congolaise est mixte ; c'est-à-dire il existe d'une part la phase pré-juridictionnelle ; et d'autre, part la phase juridictionnelle.

En parlant de la protection de la liberté individuelle dans un procès pénal, le professeur LUZOLO opine que celle-là est fondée sur la présomption d'innocence61. Cet éminent professeur de procédure pénale, dans ses enseignements, n'a jamais cessé de dire que les règles de procédure répressive ne s'appliquent pas seulement à la phase juridictionnelle, mais aussi et surtout à la phase pré-juridictionnelle. En tenant compte de la réalité de droit congolais, l'O.P.J peut, s'il estime qu' à raison des circonstances, la juridiction de jugement se verrait à prononcer une amende et éventuellement la confiscation, inviter l'auteur de l'infraction à verser au trésor une somme dont il détermine le montant sans qu'elle puise dépasser le maximum de l'amende en colles augmentée éventuellement les déci vies légaux 62.Cela implique que l'O.P.J ,avant la condamnation du suspect, ait réuni tous les éléments de preuve qui justifient l'existence de l'infraction ; et pendant ce temps, pesons - nous, l'individu doit bénéficier de la présomption d'innocence.

Par ailleurs, selon la lettre et l'esprit de l'article 17 in fine de la Constitution congolaise, il sied de dire que l'individu qui est accusé d'avoir commis une infraction, bénéficie de la présomption d'innocence dès la commission de cette infraction, et cette présomption ne prend fin qu'à l'intervention d'un jugement coulé en force de chose jugée. Cette conception n'est pas du tout parage par l'homme de la rue.

Pour le commun de mortel, il serait absurde de parler de la présomption d'innocence. Très souvent, lorsqu'il s'agit des infractions qui provoquent une grande émotion populaire, l'opinion se montre impatiente au point de vouloir bousculer la procédure ou grand méprise des droits de la défense63.En s'exprimant au sujet de la réaction sociale face à l'infraction, la doctrine soutient que celle - ci ne doit pas être instinctive, arbitraire et aveugle. Dans une société organisée, l'Etat assure la responsabilité de l'ordre public et du bien commun. Aussi en face d'une infraction qui vient de se commettre, l'on ne peut concevoir que la vengeance privée puisse satisfaire64.

61 E.J LUZOLO BAMBI LESSA et N.A. BAYONA BAMEYA(+), (n 15), p.245.

62 Code de procédure pénale congolaise, article 9.

63E.J LUZOLO BAMBI LESSA et N.A. BAYONA BAMEYA(+), (n15), p.26. 64Ibidem.

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Le constat est malheureux lorsque l'on observe ce qui se passe dans le secteur de l'audiovisuel en RDC. En effet, certains médias audiovisuels tant publics que privés, se permettent souvent de diffuser les informations et même l'image des « individus accusés » sans le consentement de ceux-ci. En diffusant l'image d'un accusé, nous pensons que ces médias portent atteinte au principe de la présomption d'innocence65.Ce qui est plus grave, ces medias présentent non seulement l'accusé à la télévision comme « coupable » sans être jugé, mais il le soumet à un traitement inhumain. Les exemples sont nombreux pour démontrer ces arguments soutenus ; notamment le cas du pasteur Deni LESSI qui, dès le seuil des poursuites engagées contre lui, a été présenté par les médias comme « coupable ».

Nul n'est censé ignorer la loi66 ; or la Constitution, « loi fondamentale » d'un Etat, interdit la soumission d'une personne à n'importe quel traitement cruel, inhumain ou dégradant67.cette pratique se fait souvent au vu et au su des O.P.J68 qui sont appelés à faire respecter la loi69.

65Article 9-1 du Code civil français dispose dans son premier alinéa dispose :

"Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence." Le second alinéa définit l'atteinte à ce principe comme la présentation publique d'une personne, avant toute condamnation, comme coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire et il édicte la possibilité pour le juge de prescrire, même en référé, afin de faire cesser l'atteinte à cette présomption, toute mesure telle l'insertion d'une rectification ou d'un communiqué aux frais du coupable de l'atteinte.

66 Constitution de la République Démocratique du Congo, (n1), art.62.

67Idem, articles 16 in fine et 61 litera 2.

68Dans une société organisé, mieux dans un Etat de droit démocratique, il est institué les organes chargés de la répression, ces organes sont : le pouvoir judicaire et le parquet. Il est de bon aloi que nous puissions analyser particulièrement le rôle de la police judicaire face à la présomption d'innocence.

Au regard de l'article 2 de l'ordonnance n° 78 - 289 du 3 Juin 1978, la police judicaire a pour mission essentielle la recherche et la constatation des infractions. L'article 7 alinéas 2 de la même ordonnance ne dispose que l'O.P.J avant d'exercer son fonction prête le serment suivant : « je jure fidélité au président de la république, obéissance à la constitution et aux lois de la R.D.C de remplir fidèlement les fonctions qui me sont confiées et d'en rendre Loyalement compte à l'O.M.P ».

Il ressort de ces deux dispositions sur évoquées que l'O.P.J a d'une part le devoir de rechercher et de constater les infractions ; et d'autre part l'obligation de respecter la Constitution et les lois. En observant les images telles que diffusées par les medias audiovisuels, il arrive que l'on voit au moins un O.P.J assister à la commission de plusieurs infractions au lieu où l'infraction initiale qu'il a trouvée ou constatée a été commise. Le comportement de la police judicaire face à cet Etat de fait nous permet de dire qu'elle viole à travers les medias, la Constitution, les lois ainsi que les traités et accords internationaux qui posent le principe de la présomption d'innocence.

69 La loi doit être comprise, dans ce cas, au sens large. C'est tout acte-règle : La Constitution, les traités, les lois émanant du parlement, les édits, le règlement, même la coutume. C'est la notion de légalité au sens large.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus