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Les défis du terrorisme au Sahel. Aqmi,une menace stratégique?

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par Rodrigue NANA NGASSAM
Université de Douala - Cameroun - Master II en science politique- option : études internationales 2013
  

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B- Les premiers signes de la présence de l'islam radical au sahel

Les signes avant coureurs de la présence effective de l'islam radical au sahel peuvent être analysés d'abord à travers la prise d'otage d'occidentaux en 2003 dans le Sud de l'Algérie (1) et par la suite, par l'extension de ce phénomène vers les pays Saharo-sahéliens (2).

1- La prise d'otage de 2003 par Abderrazak EL PARA

En 2003, un groupe dirigé par Amari SAIFI dit `'Abderrazak EL PARA'' a eu les honneurs de l'actualité en `'négociant'' la libération de trente deux touristes occidentaux enlevés dans le Sud algérien331(*). Prise d'otages ou sur médiatisation par la négociation d'El Para ? Jusqu'à la fin 2002, la « visibilité » du GSPC futur AQMI reste relativement limitée : les journalistes algériens réputés être la bouche et les yeux du DRS n'en font que rarement état. Et la violence résiduelle qui perdure depuis 1998 jusqu'à 2002 reste principalement attribuée aux GIA, ou à d'autres groupes plus ou moins visibles qui prétendaient substitués cette organisation, comme le Groupe Salafiste Libre (GSL) ou le Groupe Salafiste Combattant (GSC). Dès 1999, quelques journalistes algériens aux ordres font bien état des liens entre le GSPC et Al-Qaïda, mais ceux-ci ne sont pas pris en considération. La situation bascule le 4 janvier 2003 : Ce jour là, à la veille de l'arrivée d'une délégation militaire américaine, venue notamment discuter d'une reprise des ventes d'armes à l'Algérie dans le cadre de la lutte antiterroriste, la presse algérienne rapporte qu'un groupe du GSPC, conduit par Abderrazak EL PARA, a attaqué un convoi militaire près de Batna, tuant 43 soldats332(*). C'est l'opération la plus spectaculaire attribuée jusque là au GSPC qui ne sera jamais revendiquée. Cette affaire restera mystérieuse, les journalistes algériens qui ont tenté d'en savoir plus se heurtant à un mur de silence333(*).

A la mi-mars 2003, survient une nouvelle affaire, fort mystérieuse. Les médias européens annoncent la disparition de touristes dans le Sahara. Entre le 22 février et le 23 mars 2003, six groupes de touristes sont enlevés avec leurs véhicules dans le désert, près d'Illizi : trente deux personnes au total, dont seize Allemands, dix Autrichiens, quatre Suisses, un Néerlandais et un Suédois. Ils vont vivre une odyssée éprouvante, qui coûtera la vie à une femme, victime d'une insolation. Pendant des semaines, les médias, les responsables politiques et les familles des otages spéculent sur l'identité et les revendications des ravisseurs qui ne sont pas connues. Les otages seront libérés en deux temps, le 13 mai et le 18 août 2003, et les « sources sécuritaires » de la presse algérienne annonceront que l'opération a été menée, au nom du GSPC, par Abderrazak EL PARA jusque là réputé être l'émir de la zone 5 du GSPC. Présenté comme un « lieutenant de Ben Laden » chargé d'implanter Al-Qaïda dans la région du sahel, l'affaire des otages marque ainsi l'entée du GSPC sur la scène internationale et, selon les partisans de la thèse d'une présence d'Al-Qaïda au sahel, l'entrée de l'organisation de Ben Laden dans la région et le signe de la menace islamiste.

2- L'extension vers les pays Saharo-sahéliens

En mars 2004, lors d'une visite en Algérie, le Général Charles WALD, commandant en chef adjoint des forces américaines en Europe (EUCOM), affirmait que des membres d'Al-Qaïda tentaient de s'établir « dans la partie Nord de l'Afrique, au sahel et au Maghreb. Ils cherchent un sanctuaire comme en Afghanistan, lorsque les talibans étaient au pouvoir. Ils ont besoin d'un endroit stable pour s'équiper, s'organiser et recruter de nouveaux membres »334(*). En effet, depuis le rapt des otages par El Para dans le Sud de l'Algérie, le sahel est devenu un terrain d'enlèvement et de prises d'otages. L'obtention du label Al-Qaïda au Maghreb Islamique en 2007 signe le début de l'internalisation de l'organisation, tant du point de vue des combattants que des territoires. Cette internalisation est observable dans les actions menées par AQMI et les groupes djihadistes au sahel entre 2007 et 2013, et s'appuie sur des opérations à grande échelle avec le kidnapping des ressortissants occidentaux.

AQMI a développé une véritable industrie criminelle des otages au sahel qui s'alimente moyennant rançon. Cette industrie de l'enlèvement est si prospère que les prises d'otages ont connu une croissance de 150% entre 2008 et 2009. Il apparaît clairement que l'année 2008 a été une année juteuse du point de vue de la prise d'otages d'étrangers. Dès lors, « les brigades du Sahara » se sont mises à enlever des ressortissants des pays occidentaux, y compris le Canada et les Etats-Unis335(*). Tous ont été libérés contre des rançons, à l'exception du britannique Edwin DYER (exécuté en 2009) et du français Michel GERMANEAU (vraisemblablement mort par manque de soins médicaux le 25 juillet 2010). Une fois enlevés, les otages sont généralement transférés vers le Nord du Mali, une zone sous contrôle des terroristes où ils sont échangés contre la `'Diyya''336(*), sont retenus ou exécutés. La prise d'otages, accompagnés de demande de rançon, et quelques fois de demande de libération de djihadistes retenus prisonniers dans certains pays de la région (Mauritanie, Mali, Niger) ou hors du continent, s'est également illustrée comme le principal mode opératoire d'AQMI337(*). A cet effet, depuis 2003, 53 personnes ont été prises en otages dans le sahel par les groupes terroristes y opérant et ce phénomène tend de plus en plus à s'élargir maintenant en Afrique Subsaharienne.

Outre ces actions, il semblerait qu'AQMI, tout au moins ses katibas sahéliennes, jouent également de plus en plus un rôle majeur dans le transfert de savoirs terroristes et précisément dans la formation338(*) et le soutien logistique à d'autres organisations ou mouvements islamistes radicaux de la sous région ou même du continent, tels que BOKO HARAM ou les milices somaliennes Al-SHABAAB. C'est notamment ce que précise la Stratégie Nationale Américaine Antiterroriste publiée en juin 2011339(*). La mort le 31 mai 2012 à Kano de l'ingénieur Allemand Edgar Fritz RAUPAUCH et la prise en otage en mai 2011 d'un britannique et d'un italien travaillant pour le compte d'une firme italienne de construction, attribué à un groupe supposé être associé à BOKO HARAM (et avoir des liens avec AQMI), et leur mort le 8 mars 2012 lors d'une tentative de libération par des forces de sécurité nigériane et britannique (dans l'Etat de Sokoto, Nord-Ouest du pays) pousse à s'interroger, sur l'éventualité d'une évolution vers la prise d'otages d'occidentaux. Le fait que BOKO HARAM ait explicitement nié son implication dans cette prise d'otages nourrit le doute d'autant plus qu'elle a récemment revendiqué l'enlèvement de la famille française Moulin-Fournier au Cameroun le 19 février 2013. Se pose ainsi la question de savoir si BOKO HARAM jouerait le rôle de geôlier pour le compte d'AQMI ? Il importe donc que les pays de la région se mobilisent pour que le vent du sahel ne devienne pas un « harmattan »340(*) pour le reste du continent.

* 331 Alain RODIER et Eric DENECE, « La menace terroriste dans le sud algérien et au sahel », Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), 31 octobre 2004, p. 1.

* 332François GEZE et Salima MELLAH, « Al-Qaïda au Maghreb » ou la très étrange histoire du GSPC algérien, Algéria-Watch, 22 septembre 2007, p. 22.

* 333 « L'embuscade de Batna : près d'un mois après, un mutisme inexpliqué dans la région », El Watan, 29 janvier 2003.

* 334 Le Quotidien d'Oran, le 6 mars 2004.

* 335 Mathieu GUIDERE, «Al-Qaïda au Maghreb Islamique : Le tournant des révolutions arabes », Maghreb-Machrek, n° 208, 2011, p. 5.

* 336 La Diyya signifie littéralement le prix du sang et correspond à la rançon perçue pour tout otage occidental enlevé par l'organisation.

* 337 William ASSANVO, « Etat de la menace terroriste en Afrique de l'Ouest », Note d'analyse n° 12, juillet 2012, p. 7.

* 338 Laurent PRIEUR, `'BOKO HARAM got al Qaeda bomb training, Niger says'', Reuters, January 25, 2012. http://www.af.reuters.com/article/topnews/idAfJoeooook20120125.

* 339 US National Strategy for Conterterrorism, june 2011, p. 16.

* 340 En référence au vent violent qui souffle dans le Nord du Cameroun appelé Harmattan.

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