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Les défis du terrorisme au Sahel. Aqmi,une menace stratégique?

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par Rodrigue NANA NGASSAM
Université de Douala - Cameroun - Master II en science politique- option : études internationales 2013
  

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CONCLUSION DU CHAPITRE I

Aucune évaluation à proprement parlée des diverses réponses et initiatives à ce jour conçues, tentées, initiées ou planifiées afin de lutter contre le terrorisme au sahel n'a été menée pour en mesurer l'impact. Cependant, l'analyse d'un certain nombre d'enseignements permet de tirer une conclusion dont certains ont transpiré tout au long de cette analyse. La lutte contre la menace terroriste en Afrique de l'Ouest et particulièrement dans la bande sahélo-saharienne, est une entreprise complexe, qui doit prendre en compte une multitude d'aspects : diplomatique, politique, socioéconomique et sécuritaire, et les liens que ce fléau entretient avec d'autres problèmes tels que la criminalité transfrontalière organisée et précisément les différents trafics qui se sont développés dans la région408(*). Les Etats du sahel doivent prendre acte de cette réalité et collaborer plus étroitement pour éviter que les mouvements terroristes et les groupes criminels ne s'enracinent davantage dans cet espace. L'éradication du terrorisme au sahel passe, en effet, par un renforcement de la coopération entre tous les pays de la zone et non à travers des postures différentes et souvent divergentes dans la lutte contre AQMI.

Ainsi, en termes d'efficacité, la lutte contre le terrorisme et le crime organisé ne peuvent plus se concevoir à partir de catégories telles que l'intangibilité des frontières, la souveraineté ou les rivalités pour le leadership régional ; elle doit au contraire s'articuler autour de domaines d'application transversaux et sur des aires régionales intégrées, soumises aux mêmes problématiques et aux mêmes menaces, transcendant le prisme purement colonial409(*). « Il est temps de mieux méditer la réponse fondamentale, la restauration des nations historiques devant prévaloir sur les entités coloniales dressées artificiellement par les métropoles dans l'intérêt des calculs impériaux de l'époque ». « Il est temps de tourner la page coloniale et d'aller vers la régionalisation bien comprise et le respect des ensembles homogènes sur la base des grandes nations historiques ayant précédé le charcutage colonial ». L'Afrique doit désormais se réapproprier sa propre destinée.

CHAPITRE II :

ACTIONS CONCRETES ET DE CONCERTATIONS FACE A LA MENACE TERRORISTE AU SAHEL

Terrorisme, criminalité, piraterie, conflits internes, coup d'état, déstabilisation des pays secoués par le « printemps arabe », chaos en Libye, crise au Nord du Mali...l'année 2011 et 2012 n'aura pas épargné la sécurité de l'Afrique, qui connaît une situation toujours préoccupante, malgré des avancées positives (création d'un nouvel Etat au Sud-Soudan, résolution de la crise ivoirienne etc.). Les facteurs d'insécurité se diversifient, la violence ne recule pas et jamais les activités illicites n'ont connu une telle ampleur. Les Etats du continent ne parviennent pas à trouver la stabilité et la sécurité nécessaire à leur développement, malgré les efforts entrepris depuis plusieurs années. En effet, les pays d'Afrique subissent les effets de trois phénomènes : la persistance des conflits internes et des rebellions locales, le développement du crime organisé et l'enracinement du terrorisme djihadiste incarné par AQMI, les milices somaliennes AL-SHEBAB SHEBAB et la secte islamiste nigériane BOKO HARAM. Ces phénomènes concomitants représentent un défi considérable pour les pays africains.

Depuis la mort de Ben Laden (le cerveau d'Al-Qaïda), si la dynamique de l'islam salafiste combattant semble marquer le pas au Moyen-Orient, son berceau, elle connaît un élan nouveau en Afrique, précisément dans sa partie sahélienne. Ce qu'il faut retenir, c'est que même si le terrorisme n'est pas encore profondément ancré dans les pratiques africaines, le continent renferme les germes d'un terrorisme en puissance. Le procédé risque de prendre de l'ampleur et éclore véritablement avec le temps si la situation sociale demeure statique et que les marchands d'illusions parviennent à récupérer les mécontentements populaires pour en faire une arme à leur disposition. A cet égard, l'extrême difficulté des Etats à exercer leurs fonctions régaliennes sur de vastes espaces dont ils ont la charge représente la problématique centrale de la sécurité des Etats africains.

En l'absence de décisions rapides et fortes au niveau régional (CEDEAO), continental (UA) et international, tous les scénarios seront ouverts et le risque à venir est celui de voir un sahel dans le chaos propice à la propagation de l'extrémisme religieux et de la violence terroriste et au-delà. Il est donc urgent d'adopter une stratégie cohérente et efficace contre le danger terroriste au sahel (Section I) et un système antiterroriste qui intègre des objectifs communs face à cette menace (Section II) avant que ne survienne un retournement de situation qui ferait du continent africain une place forte de cette pratique. Malgré cette avalanche de nouvelles préoccupantes, nous sommes convaincus que les raisons d'espérer existent. C'est pourquoi il est essentiel de suivre avec vigilance tous les facteurs de déstabilisation du continent africain, lequel jouera, au XXIe siècle plus que jamais auparavant, un rôle essentiel pour la stabilité mondiale.

SECTION I: ADOPTER UNE STRATEGIE COHERENTE ET EFFICACE CONTRE LA MENACE TERRORISTE AU SAHEL

La mise sur pied de contres mesures exhaustives pour contrecarrer la menace terroriste au Sahel (paragraphe I) et un engagement communautaire dans la prévention et la lutte contre l'extrémisme sont indispensables pour les Etats de la région (paragraphe II).

PARAGRAPHE I : UNE MISE EN PLACE DE CONTRES MESURES EXHAUSTIVES POUR CONTRECARRER LA MENACE TERRORISTE AU SAHEL

L'ampleur de la menace terroriste au sahel dicte une stratégie commune entre les pays du champ (A) à côté d'une aide internationale nécessaire (B) pour briser le cycle de la violence et éviter l'enracinement de l'insécurité.

A- De la nécessité d'une vision commune entre les différents acteurs de la région

Le renforcement de la coopération régionale à travers une réelle volonté de répartition des rôles (1) et la fin des divergences entre Etats riverains permettraient de dissiper des stratégies qui, pour le moment, ne convergent pas (2).

1- Le renforcement de la coopération régionale

L'évolution des menaces qui pèsent sur la sécurité et la stabilité des pays africains met en exergue la nécessité de faire évoluer les moyens mis en oeuvre par les Etats, les Organisations Régionales ainsi que la Communauté Internationale vers une stratégie commune. La mise en commun de moyens humains, militaires et de renseignement est primordiale pour lutter plus efficacement contre les menaces de déstabilisation410(*). La coopération à tous les niveaux devrait être l'axe essentiel à toute démarche visant à prévenir et à éradiquer l'instabilité qui règne au Sahel et au Sahara. Les approches individuelles ou partielles, répondant à des intérêts nationaux ont démontré leur limite. Malgré le nombre considérable de dispositifs économiques, législatifs, militaires, policiers, régionaux et internationaux, mis en place pour le Maghreb et l'Afrique sahélienne et Occidentale par les africains eux-mêmes, l'UE, l'OTAN et les USA411(*), les actions pour lutter contre la criminalité organisée et le terrorisme restent dispersées et atomisées en fonction d'objectifs partiels et sectoriels, et selon les priorités et les intérêts particuliers des Etats ou groupement d'Etats.

En outre, la multiplication des organisations régionales et sous-régionales et la variété des accords bilatéraux et multilatéraux, en conduisant à une certaine confusion, ont dilué les vrais enjeux de sécurité et dispersé les efforts. « L'absence de plan d'action contre le terrorisme au niveau sous-régional entrave les efforts collectifs menés pour faire face à la menace terroriste » concluait ainsi l'enquête sur la mise en oeuvre par les Etats membres de l'ONU de la résolution 1373 (2001) du Conseil de Sécurité évoquant la situation en Afrique de l'Ouest et en Afrique Centrale412(*). La coopération au niveau des pays de la CEDEAO en matière de lutte contre le terrorisme est assez embryonnaire et peu institutionnalisée dans sa forme collective. Quant à la coopération au niveau des Etats du Maghreb, elle reste morte depuis. L'UMA n'a pas pu sortir de la léthargie dans laquelle elle se trouve depuis une quinzaine d'années.

Participer à des dispositifs régionaux non coordonnés dont les domaines d'action sont multiples, ne suffit pas à combattre les flux et les activités criminelles car le propre des flux est d'avoir des effets sur des espaces qui transcendent les territoires nationaux. Leur fluidité, leur mobilité, leur capacité d'adaptation rapide, font que les flux ne connaissent que des espaces déterritorialisés. L'intégration régionale réduirait les risques de menace sécuritaire. Aussi, pour être plus efficace, la lutte contre le crime organisé, y compris contre le terrorisme, ne peut plus se concevoir à partir de catégories telles que l'intangibilité des frontières, la souveraineté, ou les rivalités pour le leadership régional ; elle doit au contraire s'articuler autour de domaine d'applications transversales et sur des aires régionales intégrées soumises aux mêmes problématiques et aux mêmes menaces, hors du prisme purement national. L'engagement d'une action concertée et coordonnée au plan régional doit permettre aux pays riverains de la bande sahélienne d'organiser de manière rationnelle et efficace, la lutte contre les groupes terroristes et criminels qui ont choisi le sahel comme leur nouveau sanctuaire. La sécurité de cet océan sahélien ne saurait comme en mer, que relever d'un effort concerté des riverains, notamment dans le partage de renseignement, et d'une perception commune des menaces afin de dissiper des stratégies, qui pour le moment, ne convergent pas. Bien au contraire, elles se croisent, voire se neutralisent, au nom des calculs étroits413(*).

2- La fin des ambiguïtés entre Etats riverains du sahel

Pour empêcher AQMI de continuer à consolider sa présence au sahel, il va falloir mettre fin aux divergences d'approches, au conflit de leadership et aux incidents politico-diplomatiques entre Etats du champ. Les Etats du sahel ont pris des mesures pour faire face à AQMI mais ne sont en général pas parvenus à mettre au point une stratégie consensuelle pour lutter contre ces groupes de mieux en mieux organisés et établis. Certains leaders au sahel ont hésité à reconnaître la menace qui prend de l'ampleur. Certaines initiatives ont vu le jour, mais certains défis et désaccords qui en résultent se conjuguent à des déséquilibres de puissance qui déterminent la manière dont chaque partie appréhende la menace. Le Mali est historiquement considérée comme le maillon faible de la lutte contre AQMI, et désigné comme tel par tous ses voisins. Un des principaux reproches formulés à son encontre serait qu'il aurait délibérément choisi de préserver le pays utile, c'est-à-dire le Sud, où sont concentrées les ressources majeures, comme le coton, par exemple, au détriment d'un Nord trop grand, méconnu et peuplé, entre autres de Touareg réputés hostiles au pouvoir de Bamako.

L'Algérie pour sa part semble réticente à l'égard de tout soutien étranger extérieur au continent, qu'il considère comme prétexte pour la mise en place de bases militaires sur son territoire par des puissances étrangères. En outre, les doutes de l'Algérie quant à l'assistance étrangère ont limité le flux des ressources qui permettaient de mener des opérations de surveillance dans les vastes zones non gouvernées du sahel qui servent d'abri à AQMI. Pour garantir une gestion moins crispée et plus sereine de l'espace sahélien, la fin des dissensions entre les Etats du sahel est nécessaire et indispensable pour répondre à la problématique de l'insécurité, notamment de la drogue, du terrorisme et du banditisme transfrontalier, dans toute sa complexité. « Aujourd'hui, l'introspection est de mise : il faut être lucide sur l'aveuglement quant à la dégradation de la situation gouvernemental, institutionnelle et sécuritaire du Mali tant de la part des premiers concernés, les maliens eux-mêmes et leurs voisins »414(*) que de la part des partenaires extrarégionaux, au premier rang desquels les voisins européens ; il faut admettre que l'on n'a pas vu, que l'on n'a pas su ou peut être pas voulu voir certains signes alarmants415(*). Il faut dès lors tirer des leçons sur les erreurs commises et les manquements passés et s'interrogés sur les orientations des politiques futures416(*).

La coopération dans le domaine de la sécurité est donc un enjeu majeur pour l'avenir de la région et il apparaît que la menace d'AQMI a, peu à peu, provoqué une prise de conscience et des comportements nouveaux parmi les acteurs régionaux. Ces actions locales, sont, cependant, loin d'être suffisantes et doivent être soutenues par la communauté internationale, laquelle mène déjà plusieurs initiatives en ce sens.

* 408 William ASSANVO, « Menace terroriste en Afrique de l'Ouest : Etat des réponses nationales, régionales et internationales », Note d'Analyse n° 13, Observatoire de la Vie Diplomatique en Afrique, septembre 2012, p. 31.

* 409 Mehdi TAJE, « Les enjeux sécuritaires dans le sahel africain : Grille d'Analyse », CF2R, Tribune Libre n° 8, juin 2010.

* 410 Intervention de M. Ali BOJJI, Ambassadeur de sa Majesté le Roi du Maroc au Gabon, « le Sahel-Sahara : danger des espaces de non droit », 4e édition de la Conférence Internationale « Marrakech Security Forum », 25 et 26 janvier 2013, p. 3.

* 411 Voir la liste en annexe de l'Institut de Recherches Stratégiques de l'Ecole Militaire (IRSEM).

* 412 Enquête sur la mise en oeuvre par les Etats membres de l'ONU de la résolution 1373 (2001) du Conseil de Sécurité S/2011/463, 1er septembre 2011, para 63, p. 22.

* 413 Mehdi TAJE, « La réalité de la menace d'AQMI à l'aune des révolutions démocratiques au Maghreb », Géostratégiques n° 32, 3e Trimestre 2011, p. 293.

* 414 Propos tenus par un participant africain lors du séminaire d'Abuja organisé par la Friedrich Ebert Stiftung et approuvé par d'autres participants africains.

* 415 Bérangère ROUPPERT, « Les Etats Sahéliens et leurs partenaires extrarégionaux : le cas de l'Union Européenne en particulier », Note d'Analyse du GRIP, le 06 décembre 2012, p. 7.

* 416 Bérangère ROUPPERT, ibid.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand