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La police nationale d'Haiti, entre l'efficacité et le respect du droit à  la défense. Considération faite de l'émission "Allo la police": 2005-2015

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par Emmanuel TILIAS
Université d'État d'Haiti - Licence 2016
  

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PREMIÈRE PARTIE- CONSIDÉRATION PHILOSOPHIQUE, LÉGALE ET ÉTAT DES
LIEUX EN HAÏTI

CHAPITRE I- CONSIDÉRATIONS PHILOSOPHIQUES ET ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT HAÏTIEN PAR RAPPORT AUX DROITS DE L'HOMME

17-Jeremy BENTHAM, Official Aptitude Maximized, Expense Minimized, Oxford, Oxford University Press, 1993, p.346.

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SECTION 1- DROITS DE L'HOMME ET POLICE, CONSIDÉRATIONS PHILOSOPHIQUES ET IDÉOLOGIQUES

Ordinairement, les actions d'un État sont soumises à de grands principes constituant le fondement de ses interventions. Car, en tant que fiction combinant à la fois coutumes et valeurs, il demeure incontestable que ses décisions revêtent une certaine légitimité. Les sous-sections suivantes nous présentent, d'une part, les courants philosophiques antagoniques relatifs au rapport de l'État avec ses membres. D'autre part, apporte une clarification et une mise en contexte des concepts droit de l'homme et police.

1.1.1.1.- Sous-section 1- Considérations philosophiques et idéologiques du rapport Citoyen-État

En effet, il existe des principes qui priorisent le bien-être collectif aux dépens de celui de l'individu considéré comme un, versus la collectivité. Ces courants sont nombreux et dits hostiles aux droits humains. Nous allons considérer deux d'entre eux : le Nationalisme et l'Utilitarisme.

1.1.1.1.1.- Courants philosophiques hostiles aux droits de l'homme

1.1.1.1.1.1.- L'utilitarisme, fondement philosophique des interventions d'un État

Pour ce qui est du courant Utilitariste, il consiste en une théorie inspirée du philosophe de l'antiquité Épicure, développée par la suite par Jeremy Bentham et John Stuart Mills. Elle se base sur l'hédonisme qui, du grec hêdonê, signifie plaisir. Elle est une éthique qui pose le plaisir comme le bien moral suprême. On peut qualifier l'éthique utilitariste d'être de conséquence téléologique, par opposition à l'éthique kantienne, qui est non basée sur les conséquences, donc déontologique. Bentham affirme que la référence au contrat social dans la philosophie morale et politique constitue une période particulière de l'histoire des idées, qui s'achève avec l'avènement du principe d'utilité17. Pour lui, l'utilitarisme est le « principe qui approuve ou désapprouve toute

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action, quelle qu'elle soit, selon la tendance qu'elle semble avoir à augmenter ou à diminuer le bonheur de la partie dont l'intérêt est en jeu18.

Pour sa part, Mills déclare au sujet de ce courant que « [...] les actions sont bonnes ou mauvaises dans la mesure où elles tendent à accroître le bonheur ou à produire le contraire, le malheur ». Ainsi, les penseurs utilitaristes entendent fonder l'éthique sur l'idée que la valeur morale d'une action se détermine par sa contribution à augmenter ou à diminuer le bien-être de la communauté dont les intérêts sont en jeu [19]. Il n'y a pas que le courant utilitariste qui a prôné l'importance des intérêts collectifs aux dépens de l'intérêt individuel, d'autres courants de penser ont également abondé dans le même sens. Ainsi, à coté de l'utilitarisme, nous abordons le courant du nationalisme qui, pour sa part, prône l'intérêt de la collectivité locale par rapport à tout autre intérêt qui se trouverait aux antipodes de ce dernier.

1.1.1.1.1.2.- Le Nationalisme, fondement philosophique des interventions de l'État

Selon Larousse, le Nationalisme [20] désigne premièrement le mouvement politique d'individus qui prennent conscience de former une communauté nationale en raison des liens (langue, culture) qui les unissent et qui peuvent vouloir se doter d'un État souverain. Une deuxième acception du concept nous renvoie à le considérer comme étant une théorie politique qui affirme la prédominance de l'intérêt national par rapport aux intérêts des classes et des groupes qui constituent la nation ou par rapport aux autres nations de la communauté internationale.

Du point de vue idéologique, le nationalisme est vu comme une sacralisation de la nation. Ceux qui le soutiennent donnent un contenu politique à la nation qui devient vite dangereux, puisqu'il s'affirme au détriment des autres. Il est souvent utilisé par les États-nations pour justifier le protectionnisme. Ils sont divers les prétextes qui sont évoqués pour défendre les intérêts économiques, sociaux ou culturels de la nation. Dans cet ordre d'idées, il est question de la suprématie du collectif sur l'individuel, au nom de la souveraineté nationale. La nation est

18-Id, An Introduction to the Principles of Morals and Legislation [1789], Oxford, Oxford University Press, 1996, p.11.

19 - Bozzo-Rey MALIK et Émilie DARDENNE, Deux siècles d'utilitarisme, Presses universitaires de Rennes, 2012, www.pur-editions.fr

20- http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/nationalisme/53867, consulté le 4 septembre 2015, 14 h 13

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devenue alors le prétexte d'une réduction des libertés individuelles et d'une atteinte aux droits de propriété.

1.1.1.1.2.- Courants philosophiques favorables aux droits de l'homme

Il existe en outre d'autres courants qui sont plutôt favorables au respect de l'individu en tant qu'être libre, indépendamment d'un calcul mathématique d'intérêt de la collectivité par rapport à celui du citoyen. Ce sont entre autres : les courants et philosophes politiques tels : L'individualisme, le Libéralisme, la théorie de John Rawls et celle de Emmanuel Kant.

1.1.1.1.2.1.- Le Libéralisme politique, fondement philosophique des interventions de l'État

Le libéralisme politique pour sa part considère qu'un régime politique de contraintes collectives ne peut être moralement acceptable que s'il respecte le principe suivant : l'État doit être au service des individus et non l'inverse. Car, la fonction fondamentale de l'État est de protéger les droits des individus contre tout ce qui tend à les violer. Il prône un comportement de l'État qui priorise le respect des droits de l'individu entant qu'être libre, détenteur d'un ensemble de prérogatives dits droits fondamentaux en sens que celui-ci les détient dès la genèse de la société. Etant libre, l'individu décide de s'associer avec d'autres individus, eux aussi, détenteurs de ces mêmes droits fondamentaux [vie, liberté et propriété], pour former l'État. Du point de vue sociologique, le Libéralisme voit l'individu comme l'unité de base, l'atome constitutif de la vie sociale, d'où l'expression « atomisme21 » accolée à ce type de conception d'inspiration libérale.

1.1.1.1.2.2.- L'Individualisme, courant philosophique de l'intervention de l'État

Au sens doctrinal, le courant individualiste considère l'individu comme une valeur fondamentale, supérieure aux valeurs collectives du groupe, de la société22. Cette conception théorique de l'individu se traduit sur le plan politique par une reconnaissance d'un ensemble de droits pour l'individu de pouvoir mener des revendications contre l'emprise de l'État. C'est pourquoi voit-on, que ce courant semble être étroitement associé au libéralisme, indépendamment de la forme considérée : politique, économique ou culturel.

21- Michel MÉTAYER, La philosophie éthique, enjeux et débats actuels, Édition du Renouveau Pédagogique Inc., Québec, 2008, p.143.

22- Claude-Danièle ECHAUDEMAISON, et al, Dictionnaire d'Economie et de Sciences Sociales, Paris, Éditions Nathan, 1989, p.214.

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1.1.1.2.- Sous-section 2- Les concepts Droits de l'homme et Police

Qu'est-ce qu'on entend par Droits de l'homme ? Quelles sont leurs caractéristiques ? Sur quelles valeurs et idées se fondent-ils ? D'où sont-ils venus ? Quelle a été leur trajectoire ? Quel rapport les lie au rôle de contrôle social que doit jouer l'État via ses organes de répression ? Dans cette sous-section, nous allons tenter d'apporter des éléments de réponse à ces questions, dans le but de préciser les concepts Droit de l'homme et Police. Une question préalable se pose alors. Elle serait plutôt d'ordre terminologique, allons-nous parler de Droits de l'homme ou de Droits humains ? Ce détail qui nous permettra de mieux nous situer dans l'étendue de la question, va donner une assise solide à notre travail.

1.1.1.2.1.- Droits de l'homme : Précision conceptuelle, historicité et caractéristiques

Les droits de l'homme sont les droits inaliénables de tous les êtres humains, quels que soient leur nationalité, lieu de résidence, sexe, origine ethnique ou nationale, couleur, religion, langue ou toute autre situation23. En français, on entend souvent les deux terminologies : droits humains et droits de l'homme. Cette différence ne se pose plus pour autant dans les autres langues. En anglais aujourd'hui, on est passé, depuis la déclaration universelle des droits de l'homme, de la terminologie rights of man à celle de humans rights qui est devenu la terminologie dominante. Ce changement a été délibéré, il visait à préciser que les droits de l'homme ne sont pas l'apanage du genre masculin, mais des privilèges reconnus à tous les êtres humains. De même que l'anglais, la terminologie « droits de l'homme » reste officielle en français. Nos réflexions se porteront sur les droits, privilèges et valeurs reconnus à tous les êtres humains, indépendamment de leur sexe.

Alors, les droits de l'homme sont des droits subjectifs garantis par le droit international, visant à protéger les intérêts les plus fondamentaux de la personne humaine et subsidiaires par rapport aux garanties nationales. Ils permettent au titulaire du droit d'exiger quelque chose du destinataire de ce droit. Ces prérogatives impliquent toujours une relation entre deux parties : d'une part, le sujet du droit, le titulaire, le bénéficiaire du droit. D'autre part, le destinataire, la personne qui est tenu au respect du droit. En effet, les titulaires peuvent être des personnes

23-Elisa Peter Coordinatrice par intérim du Service de liaison des Nations Unies avec les organisations non gouvernementales (SLNG), Les droits de l'homme et le système des Nations Unies: Des clés pour agir, Palais des Nations, 1211 Genève 10, Suisse, août 2008.

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physiques, aussi bien que des personnes morales. Pour ce qui est du destinataire, les droits de l'homme se dirigent principalement contre l'État24, donc, tous les organes et entités qui, de facto ou de jure, agissent en son nom. Cependant, même si l'État constitue l'entité qui est tenue au respect des prérogatives reconnues aux titulaires, d'autres entités juridiques, telles les entreprises multinationales ne sont pas exclues dans la liste des destinataires des droits de l'homme. Il est aussi important de mentionner que les droits de l'homme revêtent une certaine restriction en ce qui a trait aux domaines de sa matière. Ce ne sont pas toutes les violations de droits et privilèges qui peuvent être taxées de violation de droits humains. Donc, l'idée derrière les droits de l'homme ce n'est pas de garantir une liberté générale d'action, mais ils se concentrent dans les domaines où il y a un risque avéré de violations.

En outre, les droits de l'homme revêtent diverses caractéristiques. On peut citer entre

autres : l'universalité, l'égalité, l'inaliénabilité, l'indissociabilité, l'imprescriptibilité,
l'interdépendance et l'inhérence. En plus de ça, ils sont des droits moraux et des droits légaux. Ces deux caractéristiques ensemble font la force particulière des droits de l'homme.

1.1.1.2.1.1.- Historicité des droits de l'homme

La notion de droits de l'homme s'est développée au fil d'un long processus qui est toujours en cours. Elle a ses racines dans la philosophie de la Grèce antique et dans la religion : tous les êtres humains sont égaux devant la divinité. Avec la tradition du droit naturel séculaire, selon lequel les droits de l'homme trouvent leur fondement dans la nature de l'être humain et dans la dignité qui le caractérise, la notion de droits de l'homme s'est épanouie et a traversé les âges. Du droit pour quelques-uns à une responsabilité Mondiale25.

1.1.1.2.1.2.- Évolution des droits de l'homme

Cette notion a évolué sur le plan politique à travers sa mise en oeuvre dans les Constitutions des Etats : au départ, celles-ci reconnaissaient des droits à leurs citoyens uniquement (généralement de sexe masculin) ; ce n'est qu'après, avec la Déclaration française

24- Quand on parle de l'État, on voit les organes qui agissent, de facto ou de jure, en son nom. On voit dans cette catégorie : l'Administration, les tribunaux, le pouvoir législatif et, dans les démocraties directes, le peuple. 25-Confédération Suisse, ABC des droits de l'homme, Département fédéral des Affaires étrangères (DFAE) 3003, Berne, 2008, p.6.

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des droits de l'homme et du citoyen de 1789, que des embryons de droits pour tous les êtres humains ont fait leur apparition26. Les Constitutions nationales et les catalogues des droits de l'homme des temps modernes ont d'abord été axés sur les libertés civiques et politiques : ce sont les droits de l'homme classiques, ceux de la première génération.

Les conditions de vie et de travail pitoyable de larges pans de la population ont conduit, dans le courant du 19èmesiècle, à formuler des revendications sociales prudentes qui ont débouché sur une deuxième génération de droits de l'homme, les droits économiques, sociaux et culturels. Ce n'est qu'à un troisième stade que les droits de l'homme ont prétendu à l'universalité sur le plan international, avec l'avènement des conventions de droit international relatives aux droits de l'homme adoptées notamment dans l'enceinte de l'Organisation des Nations Unies (ONU).

La création de l'ONU en 1945 a vu la naissance de la première organisation politique d'envergure mondiale orientée, en vertu de la Charte du 26 juin 1945, sur les libertés fondamentales des individus et sur la dignité et la valeur de la personne humaine. Il fallait que les États ne puissent plus invoquer leur souveraineté et le principe de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures pour traiter leurs habitants comme bon leur semble. Le totalitarisme et les crimes du national-socialisme ainsi que les horreurs de la seconde guerre mondiale avaient changé les mentalités et fait comprendre qu'il était nécessaire d'imposer certaines limites à la souveraineté étatique afin de protéger les individus et la communauté des États dans son ensemble.

1.1.1.2.2.- Police : définition, historicité et caractéristiques

1.1.1.2.2.1.- Définition

Police du grec « polis » = cité, ville, société, politique. Lato sensu, le mot désigne l'ensemble des règles qui permettent l'organisation rationnelle de l'ordre public dans une société. Mais stricto sensu, il fait référence à l'organe qui assure les différentes mesures liées à la tranquillité, la sécurité et la salubrité, nous rapporte Vincent JEAN27. Le mot « police » fait appel

26- Ibid., p.7.

27- Jean VINCENT, al, la justice et ses institutions, édition Dalloz, Tome 2, Paris, 1985, p.269.

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à quelques précisions terminologiques. Il vient du latin politia qui, lui-même, trouve son origine dans le grec politeia (art de gouverner la cité), lequel dérive du mot polis (cité, ville)28.

1.1.1.2.2.2.- Historicité

La fonction policière tire son origine de l'antiquité. A l'époque de la préhistoire, chaque famille s'occupait de sa propre sécurité et la défense du territoire qu'elle occupe. Pour bien le situer dans le temps, il faudra faire quelques précisions terminologiques. Le mot police vient du latin politia qui, lui-même, trouve son origine dans le grec politeia (art de gouverner la cité), lequel dérive du mot polis (cité, ville)29.

A la chute de l'empire romain, les édiles chargés de la police disparaissent. Le pouvoir est atomisé entre une multitude de seigneurs féodaux. Maitres de leurs fiefs, ils y exercent tous les pouvoirs, y compris celui de justice. En 1340 Av. J-C, l'empereur Hur Mahob de l'Égyte a constitué une division de police pour combattre la piraterie et surveiller les activités le long du Nil. Ramsès fit de même en 1198 et 1166 Av. J-C, mais cette fois-ci pour surveiller les tombeaux des riches pharaons. L'origine des constables30 remonte en Grèce entre 800 et 600 Av. J-C. l'origine des enquêteurs remonte en 450 Av. J-C. et ils étaient spécialisés dans les enquêtes aux homicides31. Il fallait ainsi attendre l'an 27 Av. J-C. jusqu'à l'an 14 de notre ère pour avoir un véritable système policier qui va être établi par Auguste et comportera 4 unités administratives :

1. Les Cura tores Urbis, qui sont connus aujourd'hui comme surintendant de police

2. La garde prétorienne, garde du corps

3. Les miles stationnaires, qui ont le pouvoir d'arrestation et constitue la police militaire

4. Les vigiles, connus comme le corps des sapeurs pompiers aujourd'hui

On ne saurait faire l'historicité de la police sans tenir compte des grands noms dans la politique française, de laquelle Haïti tient l'essence et la forme de son administration. Ainsi, il nous convient de considérer les travaux de Louis IX (Saint Louis) qui, en 1254, transforme le Guet Royal en police (ou milice bourgeoise)32. Cette milice était dirigée par le chevalier du guet, assisté de vingt sergents à cheval et de vingt-six à pied. Ce corps de sécurité avait pour charge d'assurer la sécurité à Paris pendant la nuit. Après Louis IX, on considère également les travaux

28-www.police-nationale.interieur.gouv.fr, site consulté le 29 juillet 2016, 8 hr 45 am 29-www.police-nationale.interieur.gouv.fr, site consulté le 29 juillet 2016, 8 hr 45 am 30- Ce mot désigne policier en Angleterre 31-Net/policev/service_police/indexhistoire.htm 32-https//.fr.wikipedia.org/police_nationale_France

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effectués sur le règne de Philippe Le Bel en 1306. Ce nom a vraiment marqué son temps, en sens qu'il a fait beaucoup d'interventions dans l'administration française de l'époque. Celui-ci créa, en plus des reformes dans la structure de la police, les commissaires examinateurs au Chatelet, qui jouaient également le rôle de magistrats, portant une longue robe, symbole du plein pouvoir judiciaire, ils étaient pour ainsi chargés de lutter contre la criminalité dans Paris. En 796, des commissaires de police sont instaurés dans toutes les villes de plus de 5 000 habitants. En 1799, et ce, jusqu'à 1815, la police impériale de Napoléon est garante de la sécurité civile.

Une bonne prise en charge de cette fonction va être opérée en 1829 en Angleterre. Ce sera avec le fils d'un fabricant de coton, le Sir Robert Peel33, que va être établi une loi sur le maintien de l'ordre moteur que l'on retrouve encore aujourd'hui, cet ordre se traduit en neuf (9) principes et trois (3) fonctions :

1. La prévention du crime

2. La protection de la vie et de la propriété

3. L'arrestation des suspects

Les efforts du Sir Robert PEEL ne s'étaient pas limités à définir les fonctions de la police, il a aussi émis des principes directeurs devant mener la gouvernance de cette institution. Ainsi, on repère les neuf principes de Sir Robert Peel stipulés comme suit :

1. La mission de base pour laquelle la police existe : prévenir le crime et le désordre

2. La capacité de la police pour accomplir ses taches dépend de l'approbation du public et des actions de la police

3. La police doit assurer la bonne coopération du public dans le respect volontaire de la loi pour être en mesure d'assurer et de maintenir le respect du public

4. Le degré de coopération du public qui peut être garanti diminue proportionnellement la nécessité d'utiliser la force physique ,
·

5. La police demande et préserve les faveurs du public non pas en répondant à l'opinion publique, mais par la démonstration constante absolue de service désintéressé à la loi ,
·

6. La police utilise la force physique dans la mesure nécessaire pour assurer le respect de la loi ou pour rétablir l'ordre lorsque l'exercice de la persuasion, de conseils et d'alerte est jugée insuffisant ,
·

7. La police, en tout temps, doit entretenir une relation avec le public qui donne la réalité à la tradition voulant que la police est le public et le public, la police. La police étant seule,

33- Sir Robert PEEL, né le 5 février 1788 et mourut le 2 juillet 1850, était un homme d'État britannique qui a été pendant secrétaire d'État (1822-1827, 1828-1830) et deux fois premier ministre, (1834-1835, 1841-1846). Il était membre du parti conservateur. www.historic-uk.com

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les membres du public sont payés pour donner toute leur attention à des fonctions qui

incombent à tout citoyen dans l'intérêt du bien-être communautaire et l'existence

8. la police doit toujours diriger leur action strictement à l''egard de ses fonctions et ne ressemble jamais usurper les pouvoirs de la magistrature ,
·

9. le critère de l'efficacité de la police est l'absence de criminalité et de désordre, et non le signe de l'action policière dans le traitement avec elle.

Comme dans tout autre pays, le système de protection policière en Haïti date depuis la

genèse de l'État. Il a été adapté en fonction des régimes et des besoins des occupants de l'espace territorial. Après l'indépendance, l'empereur Jean Jacques DESSALINES a pris des mesures visant à organiser les forces armées qui avaient, outre des fonctions militaires, des fonctions administratives. A sa mort, le pays était scindé en deux, à l'Ouest, la République avec Pétion, au Nord, le Royaume de Christophe. Dans le Nord, le roi Henry Christophe a crée un corps de police dénommé « Royals Dahomets34». Cette force de police avait pour but de garantir l'ordre et la discipline dans les plantations du royaume et d'accompagner les habitants planteurs. De son côté, le président Pétion dans l'Ouest a prit des dispositions légales prévoyant trois (3) corps de police35, ce sont :

1. La gendarmerie, placée sous le commandement du commandant d'arrondissement et auxiliaire de la justice, était chargée des attributions de police dans les campagnes ,
·

2. L'armée a eu pour rôle d'assurer la défense du territoire de l'État de l'Ouest ,
·

3. La Police proprement dite opérait dans les villes ou s'installent les tribunaux, elle a eu pour rôle d'aider les juges et les commissaires de gouvernement à bien remplir leur mission.

Même si l'on peut douter de son effectivité, mais, les efforts pour avoir une force de police ont pu être remarqués dans plusieurs de nos constitutions. La constitution de 1889 en faisait mention dans son article 177 qui stipulait : l'organisation et les attributions de la police de ville et la campagne feront l'objet d'une loi ». Avec l'arrivée des américains en 1915, on avait encore une force publique à trois branches :

1. La garde nationale, composée de citoyens libres de tous services militaires âgés de 18 ans à 50 ans ,
·

34- Prosper AVRIL, l'armée d'Haïti, victime ou bourreau, le Natal S.A., Port-au-Prince, 1997, p. 17.

35- Barthelemy GERARD, État de droit et décentralisation, Imprimeur II, 1996, p.24.

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2. La police, qui se trouvait dans les grandes villes et qui jouait une fonction administrative en protégeant vies et biens d'une part. Et d'autre part, une fonction de police judiciaire et répressive ;

3. L'armée, qui avait une fonction de défense du territoire36.

La décision de converger toute la force publique entre les mains d'une seule entité va être prise par les américains. Arrivé en Haïti le 28 juillet 1915, les marines ont procédé à l'occupation militaire et politique du pays, il y va sans dire que de cette situation de fait va découler des décisions qui vont influencer la structure administrative du pays. Ainsi, le 16 septembre 191537, ils ont crée une force unique, combinant la police rurale et urbaine, dénommée gendarmerie. En 1923, un corps de police rurale a été créée avec un effectif de 151 agents repartis dans les campagnes à raison de un par section rurale38. Mais, il faut tout de même mentionner que tous ces agents étaient des membres de la Force Armée d'Haïti, ce, Jusqu'à 1991. Ainsi, Prédestin SEM39 nous rapporte que la création d'une force de police40 civile professionnelle en Haïti était soulignée lors des accords pour résoudre la crise engendrée par le coup d'État qui a renversé le président J.B. Aristide en septembre 1991, tel l'accord de « Governor Island's » du 3 juillet 1993. Dès son retour en Haïti le 15 octobre 1994, des discussions ont eu lieu entre l'organisation des Nations-Unies, le gouvernement des Etats-Unis et les autres parties intéressées au sujet de la formation de la police haïtienne et de l'établissement dans cette attente d'une force de police intérimaire. Donc, malgré toutes les lois faisant appel à la création d'une force de police à part entière, notamment, la constitution de 1987 amendée en ses articles 263 à 274, ce n'est qu'en 1994 que ce voeu va être réalisé, par le traité Gorvenor's Island.

1.1.1.2.2.3.- Caractéristiques

En effet, il y a lieu de distinguer la police administrative de la police judiciaire. Du point de vue fonctionnel, la police administrative constitue l'activité administrative qui vise à prévenir les troubles à l'ordre public. Elle est distincte de la police judiciaire. Cette distinction

36-Avril PROSPER, op.cit., p. 45

37-Article 4 du traité du 16 septembre 1915 : la gendarmerie sera considérée comme unique force militaire et de police de la République d'Haïti.

38-Emile DARIUS, La nouvelle force de police et le système judiciaire haïtien, mémoire de sortie, Faculté de Droit, des Sciences Economique, Port-au-Prince, 1996, p.35

39-Prédestin SEM, La police et les droits de l'homme en Haïti de 1991 à 1997, mémoire présenté en vue de l'obtention du grade de licencié en Droit, promotion 1993-1997, Université d'État d'Haïti, registre 2016 de la Bibliothèque de la Faculté de Droit, des Sciences Économiques et de Gestion du Cap-Haitien, document # 14, p.19. 40- La nouvelle force de police haïtienne a été créée par la loi organique du 23 novembre 1994.

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fonctionnelle, répondant à la séparation qui est faite entre prévention des crimes et des délits et répression de ces derniers, est néanmoins mise à mal dans de nombreux cas. Ainsi, la police nationale a des missions à la fois de police administrative (prévention) et de police judiciaire (répression). Maurice André FLAMME définit la police administrative comme : « l'ensemble des pouvoirs accordés en vertu de la loi aux autorités administratives et qui permettent à celles-ci d'imposer en vue d'assurer l'ordre public des limitations aux droits et libertés individuelles41 ». Donc, la police administrative a pour but de prévenir, de maintenir l'ordre public et de sureté générale, elle est placée sous la direction des autorités policières42.

Pour sa part, la police judiciaire est chargée de constater une infraction déterminée ou d'en rechercher ou arrêter les auteurs. Elle a donc un but répressif qui s'oppose au but préventif de la police administrative. La distinction entre les deux fonctions est essentielle pour la compétence contentieuse qui relèvera tantôt de la juridiction administrative, tantôt du judiciaire, ainsi que pour la responsabilité qui est plus facilement engagée pour les activités de la police administrative. Les agents de la police judiciaire dépendent sur le plan organique de la direction de la police et sont soumis sur le plan fonctionnel à l'autorité du parquet et du juge d'instruction43. La distinction entre les deux est parfois délicate. Car, les deux fonctions sont souvent exercées par les mêmes agents. Ainsi, une opération de police administrative, nous rapporte Dubellay JASMIN44, peut se transformer en opération de police judiciaire.

Dans le cadre de ce travail, notre attention se portera sur la première branche ou du moins sur le travail de la police administrative. Nous croyons comprendre que l'arrestation d'un individu rentre normalement dans la catégorie des tâches de la police judiciaire. Car, cette action ressemble beaucoup plus à un acte de répression que celui de prévention. Néanmoins, le suivi qui est fait de cette arrestation, dans bien des cas, doit être une action de la police administrative. Il s'agit alors de la présentation des suspects interpellés dans le cadre d'une enquête judiciaire pour intimider les éventuels délinquants, également, protéger celui-ci jusqu'à sa comparution par devant le juge compétent, la gestion de l'individu, constitue un acte d'administration, en un sens,

41- Maurice André FLAMME, Droit Administratif, Tome II, collection de la Faculté de Droit de l'Université libre de Bruxelles, Bruylant, 1989, p.1103.

42-MINUSTHA, L'officier de la police judiciaire, Documents à l'usage des officiers et agents de police judiciaire, 2ème édition, juillet 2010, p.16.

43- Ibid., p.16.

44- Dubellay JASMIN, Momento de Droit Administratif, vol. I, COMPLEXE S.A. Imprimerie, Cap-Haïtien, 2012, p.100.

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de prévention. Donc, dans le cas qui va être traité consistera cette phase de gestion qui est faite par la police nationale d'Haïti du suspect appréhendé dans le cadre d'une enquête judiciaire. Pour mieux cerner la dimension du débat en question, nous allons analyser les engagements de l'État haïtien en ce qui a trait au comportement à adopter, le traitement à donner aux individus soumis à une procédure criminelle en Haïti.

SECTION 2- ENGAGEMENTS DE L'ÉTAT HAÏTIEN EN MATIÈRE DE RESPECT DES DROITS HUMAINS

Parler d'État, en Droit International, suppose la reconnaissance internationale aussi bien que la jouissance de certains droits reconnus aux autres nations faisant partie de la communauté internationale. Ainsi, nous allons voir un ensemble de traités [45] et conventions signés et ratifiés par Haïti qui sont relatifs aux droits humains. Certains de ces accords ont une portée générale. D'autres, par contre, présentent une portée plus ou moins régionale desservant un nombre réduit de pays se trouvant dans une région géographique rapprochée déterminée. Qu'ils soient à portée générale ou régionale, ces instruments juridiques internationaux sont retrouvés partout et concernent divers aspects de la vie internationale, tout en influençant également la législation interne des États parties.

1.1.2.1.- Sous-section I- Quelques conventions et traités ratifiés par Haïti 1.1.2.1.1.- La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH)

La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, adoptée le 10 décembre 1948 à Paris par l'Assemblée Générale des Nations Unies, est un instrument à portée générale. Bien qu'elle ne présente pas à priori de caractère contraignant, elle est pourtant considérée comme une référence internationale fondamentale dans le domaine des droits de l'Homme. Sa force normative tient notamment au fait qu'en 1966, l'Assemblée Générale a adopté deux traités qui en reprennent le contenu : le Pacte des droits civils et politiques et le Pacte des droits économiques, sociaux et culturels. Dans le cadre de ce travail, nous allons plutôt nous accentuer sur des clauses relatées

45 -La convention de Vienne défini en son article 2, a : accord international conclu par écrit entre États et régi par le droit international, qu'il soit consigné dans un instrument unique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes, et quelle que soit sa dénomination particulière.

Ce rappel nous permet de présenter quelques organismes de surveillance ou de défenses de l'application des traités signés et ratifiés par Haïti. Nous allons les considérer en deux grands

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dans le premier pacte, celui relatif aux droits civils et politiques, du plus ancien instrument juridique international, sinon le seul à portée générale.

1.1.2.1.2.- La Convention Américaine des Droits de l'Homme (CADH)

Une seconde catégorie d'instruments juridiques internationaux constitue celles ayant une application beaucoup plus restreinte par rapport à celle ci-dessus mentionnée. Cette catégorie comporte des instruments qui ont une portée régionale, notamment, la Convention Européenne des Droits de l'Homme (CEDH), la Charte Africaine des Droits de l'Homme et la Convention Américaine des Droits de l'Homme (CADH) de 1969. Cette convention, qui renferme le Pacte de San Jose, Costa Rica, a été signée en 1969, ratifiée par Haïti et publiée dans Le Moniteur No.77 du 1er octobre 1979, fera l'objet de notre étude.

1.1.2.2.- Sous-section II- Les mécanismes de protection des droits humains

Ordinairement, tout système juridique comporte deux éléments fondamentaux, les instruments juridiques : traités, conventions, accords et lois d'une part. Les organes d'application : Cours, Commissions, Comités et Tribunaux d'autre part. Dans la réalité du droit international, autrement dit, le système juridique international se singularise en sens que pour chaque instrument juridique international, il est prévu un organisme de mise en oeuvre spécifique. Ou encore, chaque convention ou traité prévoit son propre mécanisme d'application. Cette particularité simplifie l'exercice des actions auprès de ces organismes et facilite du coup, l'application des conventions et traités signés par les États parties. On doit se le rappeler, les normes sont toujours inspirées d'un ensemble de valeur sur lesquelles se fonde l'action des États. C'est dans cette perspective que nous trouvons des États qui se penchent beaucoup plus vers une tendance utilitariste, pendant que d'autres optent de préférence pour une tendance libérale, plutôt favorable à la protection des droits individuels. Cependant, pour harmoniser et donner une plus grande légitimité à leurs actions, les États, indépendamment de leur tendance, ont accepté de se lier en signant certains accords internationaux, créant ainsi une assise juridique internationale aux décisions qu'ils vont prendre. L'étude de la portée et du contenu de ces instruments nous permet de voir les marges de manoeuvre des États parties.

46-Manuel de cours sur le Droit International des Droits humains, dans le cadre du Cours de Droit de l'Homme, Me Hérode CHARNEL, aout 2015.

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groupes, d'une part, des organismes dont le pouvoir de contrôle dépasse les frontières des États, ce que nous appelons, dans le cadre de ce travail, organismes interétatiques de protection des droits humains. D'autre part, ceux dont le rôle de surveillance se limite sur le champ national, d'où le nom : organismes intra étatiques de protection des droits humains.

1.1.2.2.1.- Organismes interétatiques de protection des droits humains

Comme mentionné plus haut, tout traité prévoit son propre mécanisme d'application. Ainsi, pour le continent américain, il est prévu une commission dénommée Commission Interaméricaine des Droits de l'Homme (CIDH), elle a été créée en 1959. La commission a une double nature : d'une part, organe statutaire de l'OEA pour la promotion des droits de l'homme, en particulier de ceux énoncés dans la Déclaration, et, d'autre part, organe de contrôle de l'application de la Convention, pour autant que l'État concerné l'ait ratifiée. Dans ses attributions, la CIDH peut seulement donner des avis consultatifs sur des questions susceptibles de faire l'objet de violation de droits humains.

En appui à la Commission, il est aussi placé un autre organe dénommé « Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme (CrIDH) » qui a été créée en 1979, dont le siège se trouve à San José en Costa Rica. La mission de la Cour consiste à veiller à la stricte application des conventions durement signées et ratifiées par les États. Établie par la Convention, sa compétence, qui peut être consultative ou contentieuse, s'étend uniquement aux droits garantis par celle-ci, ou à des droits consacrés par d'autres instruments du système, dans la mesure où ces derniers le prévoient46. En effet, pour que la Cour puisse juger une affaire individuelle, il ne suffit pas seulement que le pays ait ratifié la Convention, il est crucial que celui-ci ait accepté cette compétence en faveur de la Cour.

Ainsi, toute personne ou groupe de personnes a le droit de soumettre une communication à la Commission portant sur le non-respect d'un droit reconnu dans la Déclaration ou, si l'État l'a ratifié, dans la Convention. Après une analyse préliminaire de la requête par le secrétariat, si elle remplit à priori les conditions de recevabilité, la Commission transmet la plainte à l'État et lui demande de présenter ses commentaires. Ceux-ci sont à leur tour remis au plaignant qui aura

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le devoir de les analyser puis les contester, le cas échéant. En outre, c'est seulement à ce stade que la Commission décidera définitivement sur la recevabilité de la communication.

1.1.2.2.2.- Organismes intra étatique de protection des droits humains

Mise à part les organismes interétatiques de protection des droits humains, qui ont une juridiction plus ou moins étendue, dépassant ainsi les frontières territoriales, il existe d'autres organismes qui reflètent la lutte au niveau interne, qui sont dites Institutions Nationales de Promotion et de Protection des Droits Humains (INDH). Elles sont constituées, d'une part, des organismes de la société civile, d'autre part, des institutions étatiques qui assurent ou qui peuvent également veiller à la protection des droits humains.

1.1.2.2.2.1.- De la Société Civile : Organismes internes de défense des droits humains

Dans la société civile, plusieurs organisations jouent le rôle d'avant-gardiste des droits de l'homme en Haïti. Comme nous l'avions vu au début, elles s'accordent souvent pour dénoncer les abus de pouvoir, le mauvais traitement perpétré par les agents publics à l'encontre des citoyens, aussi bien que le fonctionnement de l'institution policière. A partir de là, nous allons présenter brièvement à quel niveau chacune de ses organisations a contribué dans la lutte pour le respect des droits humains en Haïti.

1.1.2.2.2.1.1.- Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH)

En effet, le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) est un organisme qui a pris naissance à New York en 1982 sous le label de National Coalition for Haitian Refugees (NCHR).Il s'agissait alors de combattre les violations des droits humains qui constituaient l'une des causes fondamentales du départ massif de nos compatriotes pour les Etats Unis. Consciente de la réalité qui existait encore en Haïti après le départ de Jean Claude Duvalier, l'organisation a décidé en 1992, pour attaquer le mal à la racine, d'ouvrir une filiale en Haïti. La diversité de ses actions l'amène à partir de 1995 à opérer sous la dénomination de National Coalition for Haitian Rights (NCHR-Haïti).Depuis 1996, elle développe ses programmes et activités de manière autonome, assure ses propres fonds, sans appui aucun de la part de NCHR-NY. Au fur et à mesure que la NCHR-Haïti a continué à se développer, certains

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changements ont dû être apportés, comme l'adoption d'un leadership et d'une direction haïtienne ainsi qu'un nom haïtien : Réseau National de Défense des Droits Humains(RNDDH).

Dans le contexte actuel de violation systématique des droits de l'homme, le RNDDH ne reste pas indifférent. Il publie plusieurs rapports dans lesquels il dénonce soit les abus faits aux citoyens, soit le mauvais fonctionnement de certaines institutions, ou du moins les mauvais traitements que subissent les officiers de la PNH. De là, on peut voir que le RNDDH s'efforce de faire un travail transversal, touchant de nombreux secteurs de la vie nationale.

1.1.2.2.2.1.2.- Plateforme des Organisations Haïtiennes de Défense des Droits Humains (POHDH)

La POHDH pour sa part constitue une autre organisation très active dans la lutte pour le respect des droits humains en Haïti. Comme son nom l'indique, c'est une plateforme regroupant sept (7) organisations qui sont conscientes de la réalité haïtienne en ce qui a trait au respect des droits des citoyens par l'État ou encore par d'autres citoyens ou entités. Nous rappelons que la POHDH fait partie des organisations de la société civile reconnues par le ministère des affaires sociales, ce qui lui confère déjà la qualité reconnue par l'article 44 de la convention américaine des droits de l'homme. Reconnue pour ses nombreuses luttes contre la corruption et l'impunité en Haïti, la POHDH s'est fait une bonne réputation en ce qui a trait à la défense des droits humains.

1.1.2.2.2.2.- Des Institutions Étatiques de défense des droits humains

D'autres institutions comme le parlement, quoiqu'implicitement, peut également veiller au respect des droits fondamentaux par les organes du pouvoir exécutif. A celui-ci, faut-il bien ajouter l'Office de Protection du Citoyen, à laquelle la constitution confie cette noble obligation.

1.1.2.2.2.2.1- Le Parlement haïtien

En ce qui a trait au parlement, sa part de responsabilité peut déjà être identifiée depuis sa mission qui est essentiellement de surveiller l'exécutif dans ses actions. L'article 24 de la constitution de la République d'Haïti de 1987 amendée a réaffirmé que la liberté individuelle est garantie et protégée par l'État, avant que les constituants n'exigent aux parlementaires de faire

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un serment d'allégeance à l'article 9. Ledit article est ainsi libellé : avant de prendre officiellement fonction, les membres de chaque chambre prêtent le serment suivant : « Je jure de m'acquitter de ma tâche, de maintenir et de sauvegarder les droits du peuple et d'être fidèle à la constitution ». Ce serment confère indirectement aux honorables parlementaires la responsabilité de veiller au respect des droits de chaque individu et de contraindre toute institution qui oserait agir autrement. Cette responsabilité conférée tacitement au parlement, fait de lui l'une des institutions protectrices des droits humains en Haïti. A cela peut-on également ajouter le fait que le parlement doit sanctionner tous les traités et conventions signés par Haïti, ce, conformément aux articles 276, 276-1 et 276-2 de la constitution de la République d'Haïti de 1987 amendée. Ainsi, celui-ci, tant qu'il existe, a l'impérieuse obligation de contrôler l'exécution des conduites qu'il a préalablement autorisées au pouvoir exécutif.

1.1.2.2.2.2.2.- Office National de Protection du Citoyen (OPC)

L'Office National de Protection du Citoyen constitue la seconde institution étatique que nous allons voir dans le cadre de ce travail. En effet, elle fait partie des institutions créées par la constitution de la république d'Haïti de 1987 et reprise par la version amendée. Notamment à l'article 207 on peut lire ceci : Il est créé un office dénommé «Office de la Protection du Citoyen» dont le but est de protéger l'individu contre toutes les formes d'abus de l'administration publique. En effet, il n'existe pas seulement la constitution comme référence juridique à cette institution. La loi portant sur le fonctionnement de l'OPC décrit également la mission de cette institution par rapport au respect des droits humains. L'article 3 de ladite loi reprend ce rôle dans les mêmes termes que l'article précédent, au 3ème alinéa : la mission de l'OPC est de protéger tout individu contre toutes les formes d'abus de l'Administration publique.

En effet, bien que les marges de manoeuvre de l'institution soient limitées, en sens que ses décisions ne sont pas contraignantes par rapport à l'État. Cependant, elle dispose tout de même d'un pouvoir d'influence, car les rapports qu'elle aura à produire seront pris en compte dans l'évaluation des efforts consentis par les pouvoirs publics pour le respect des droits humains en Haïti. A cela faut-il ajouter, la capacité que possède l'institution de porter plainte par devant la commission interaméricaine des droits de l'homme. Car, la Convention Américaine des Droits de l'Homme permet à chaque État contractant ou toute entité juridiquement reconnue d'un Etat

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partie d'exercer cette action quand bien même ses ressortissants ne seraient pas inquiétés47. Ainsi, il est stipulé à l'article 44 de ladite convention que : « Toute personne ou groupe de personnes, toute entité non gouvernementale et légalement reconnue dans un ou plusieurs Etats membres de l'Organisation peuvent soumettre à la Commission des pétitions contenant des dénonciations ou plaintes relatives à une violation de la présente Convention par un Etat partie ».

Cette disposition de la convention confère clairement à l'OPC, entant qu'entité de l'État juridiquement reconnue, l'aptitude de soulever des questions auprès de la CIDH et éventuellement, de saisir la CrIDH contre Haïti. Cet article nous laisse entrevoir également que les stipulations de la Convention sont d'ordre public international.

En effet, nous avions vu comment les courants philosophiques peuvent nous livrer un éclairage sur les grandes idées qui guident les actions d'un État. La légitimité des actions que posent les gouvernants sont assujettis à ces courants de penser qui ont plus ou moins une portée universelle. Cette démarche nous a permis de comprendre, sinon, d'interpréter le niveau d'acceptation des décisions par les membres de la population. Nous avions également touché certains engagements de l'État en matière du respect des droits de l'homme en Haïti, aussi bien que les mécanismes de mise en oeuvre des traités et conventions signés à ce propos. A travers le chapitre suivant, nous allons présenter l'émission : son origine, son évolution dans le temps et dans l'espace. Ainsi, nous allons faire ressortir les éléments de violation avant de les comparer aux lois en vigueur. Ceci nous aidera à mieux situer le débat dans un contexte juridico-politique, s'agissant de comprendre dans quelle mesure l'émission Allô La Police a affecté les efforts consentis pour le respect des droits humains en Haïti.

47 . Egalement, art. 24 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, art. 49 de la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.

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