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Maintien à  domicile des personnes à¢gées isolées. Préconisation de robots "compagnons" par les ergothérapeutes.

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par Stéphane STENGER
 - Diplôme dà¢â‚¬â„¢Etat dà¢â‚¬â„¢Ergothérapeute 2015
  

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Annexe V-II : retranscription de l'entretien effectué avec l'ergothérapeute 2

(Afin de garantir l'anonymat de la personne interrogée, les informations pouvant permettre de l'identifier ont été remplacées par « [xxx] »).

Enquêteur / Ergothérapeute

- Quel âge avez-vous ?

- J'ai 40 ans cette année.

- D'accord. De quel IFE venez-vous ?

- Nancy.

- Nancy.... Et depuis-combien de temps exercez-vous ?

- 99. Donc ça va faire 16 ans cette année.

- Ok. Quels ont été tous vos lieux d'exercice ?

- Alors... en maison de retraite pour commencer où j'étais ergothérapeute et animatrice

et hôpital pour personnes âgées, donc à [xxx], le Centre pour Personnes Âgées de

[xxx] où je suis allée dans tous les services : moyens séjour, Hôpital de Jour, long

séjour. Ensuite je suis allée à l'hôpital de [xxx] où j'étais particulièrement en Hôpital

de jour, court séjour et long séjour et j'intervenais ponctuellement pour l'équipe

mobile de soins palliatifs. Et maintenant Unité Mobile de Gériatrie.

- Ok. Donc avec les personnes âgées...

- ... Uniquement oui !

- D'accord. Avez-vous déjà préconisé des aménagements de domicile à une

personne âgée isolée afin de favoriser son maintien à domicile ?

- Oui.

- De quel(s) type(s) ?

- De plein de types. Aménagement de domicile ça peut passer de la main courante à

mettre dans les escaliers, à la sécurisation des appareils électroménagers, la mise en

place d'alarmes anti feu ou pour le monoxyde de carbone ou la mise en place d'un lit

médicalisé pour sécuriser les transferts, mise en place de guidons, mise en place de

chaise percée pour la nuit, mise en place de barres dans la douche, dans la salle de

bains, sécurisation de la salle de bains, mise en place de plateforme élévatrice pour

l'extérieur, amélioration de l'accès extérieur.... C'est mon lot quotidien !

- Ok. Donc ça se sont en fait plutôt pour les aides techniques...

- Oui.

- Et est-ce qu'il y a plutôt des aménagements architecturaux ? De domicile ?

- Des aménagements architecturaux, bien sûr ! Le fait de pratiquer des aménagements

de salle de bains. Il veut casser la baignoire et mettre une douche...oui ! Je fais aussi

des cahiers des charges pour demander des subventions de la part de l'ANAH, de la

part du Conseil Général, de la MDPH.

- D'accord.

LXXII

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

Vous êtes-vous déjà sentie démunie face à une situation pour laquelle il ne semblait y avoir aucune solution pour favoriser le maintien à domicile d'une personne âgée isolée ?

- Oui, plein de fois !

- Et c'était dans quelles situations ?

- Dans les situations dans lesquelles les gens ne se rendent pas compte des risques qu'ils prennent. Quand ils vivent au quotidien dans leur maison, qu'ils sont habitués, qu'ils ont toujours fait comme ça... Donc y'a une grande différence entre l'inquiétude de l'entourage, l'évaluation ergo où on peut se rendre compte effectivement qu'au niveau fonctionnel il y a des troubles qui nécessitent du matériel à mettre en place ou une surveillance ou une aide humaine et où les personnes ne se rendent absolument pas compte des risques qu'elles prennent et du coup on peut faire toutes les préconisations qu'on veut, ça ne fonctionne pas. Donc là oui, je me sens complètement démunie et je n'ai pas le pouvoir de les faire changer d'avis. Ça leur appartient.

- D'accord. C'est essentiellement ce problème en fait ?

- C'est essentiellement ce problème, après il y a aussi le problème architectural, en clair de l'environnement. Quand j'étais sur [xxx] je faisais beaucoup de visites dans les maisons des mines. Les maisons des mines ce n'est juste pas fait pour des personnes âgées qui ont des difficultés à monter les escaliers ! Et voilà et en fait, les difficultés sont très souvent financières parce que les gens qui sont dans les maisons des mines ne paient quasiment rien au niveau du loyer et on ne peut pas leur demander de déménager parce que financièrement ils n'ont pas les moyens de déménager. Donc là c'est architecturalement où c'est un vrai problème parce que tu as une pièce ou deux par étage, c'est terrible pour eux de vivre dans une seule pièce. Y'en a qui le font...

- ... Tout est très étroit et en hauteur ?

- Tout est très étroit et à chaque fois t'as des escaliers pour aller d'un endroit à un autre, donc là les patients peuvent très bien se rendre compte des difficultés mais je ne peux pas enlever les escaliers, ce n'est juste pas possible ! Et mettre une plateforme élévatrice à chaque escalier c'est vraiment pas possible !

- Clairement ! Ok...

- .... Après y'a des familles qui bloquent aussi. Y'a des situations où la personne est en demande et par contre c'est l'entourage qui refuse parce que l'entourage considère que par exemple la personne serait mieux en maison de retraite.

- D'accord.

- Et là je suis démunie aussi ! Parce que ce n'est pas dans le même sens mais les préconisations que je peux faire ne sont pas entendues et ne sont pas mises en place par la famille, qui là, est toxique par rapport au projet de vie de la personne.

- Oui complètement...

- Donc y'a dans tous les sens mais... ce sont des systèmes complexes ! On n'a pas affaire à une personne toute seule, alors...souvent quand elle est isolée oui, d'accord elle est toute seule, mais on n'a pas de pouvoir par rapport aux troubles cognitifs, par rapport aux finances, là on n'a pas de pouvoir !

- Oui !

LXXIII

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

- On peut préconiser un tas de choses ! Moi je peux préconiser une aide 24h sur 24 ! Après... qui est-ce qui paie ? Et on ne peut clairement pas se reposer sur les subventions du Conseil Général ! À savoir qu'un GIR 2 c'est trois fois une demi-heure par jour... ça ne permet pas à quelqu'un qui est tout seul de vivre correctement. Donc c'est tout ça.

- D'accord. Aviez-vous dans certaines de ces situations, ou d'autres peut être ou ça aurait été possible, aviez-vous considéré une éventuelle assistance robotique ?

- Hmm... Pour le moment non...

- Après, dans les situations que vous m'avez décrites là, ça n'a pas forcément de lien... ça ne remplacera pas un escalier ou quelque chose comme ça, mais est-ce que dans certaines situations qui posaient problème, aviez-vous considéré la robotique d'assistance ?

- Non ! À aucun moment je n'ai pensé à la robotique... Parce qu'en gériatrie c'est compliqué... Ne serait-ce que la domotique est compliquée, parce que ça ne fait clairement pas partie de leur façon de vivre. À savoir que ce sont des gens qui n'avaient pas du tout accès à cette technologie à l'époque. Déjà moi ma génération... Voilà, je suis la génération « X », je ne suis pas la génération « Y » et tout ça c'est compliqué. C'est compliqué pour nous... j'ai déjà vu quand j'étais en stage, des maisons entièrement domotisées, j'ai trouvé ça formidable, c'était utilisé par un paraplégique de 30 ans, voilà, j'ai trouvé que c'était effectivement l'outil indispensable pour ce genre de personnes, qui s'est appropriée très facilement la domotique. Après la robotique, pour moi c'est un vaste... un vaste truc qui a des difficultés à me parler à moi, à savoir que même les aides techniques c'est compliqué en gériatrie. Même les aides techniques ! Je prends par exemple l'enfile-bas de contention : moi je le conseille que très rarement. Parce qu'en fait, ce n'est pas seulement l'autonomie de la personne qui compte, finalement en gériatrie... Et moi je suis dans une niche hein !... c'est de la très grande gériatrie. Nous nos patients ont en moyenne 87 ans...

- ...Ah oui !

- En moyenne... donc ils sont très âgés.

Donc clairement je ne suis plus dans l'aide technique qui fait qu'ils soient autonomes après. Moi je suis dans la surveillance, dans le « faire pour », dans « être avec », dans « rompre l'isolement », vous voyez ? Je ne suis pas dans la rééducation...

- ...Bah ça tombe bien, c'est le sujet de mon mémoire !

- Je vais dire... plus du tout ! Vraiment pas ! C'est vraiment autre chose, c'est au-delà de tout ça. Donc pour moi, quand je conseille des aides techniques, c'est rarement des aides techniques qui font que la personne est autonome avec. Ce sont des aides techniques qui sont utilisées par un tiers pour que la situation soit plus confortable, par la soignante, enfin pour l'aidant et pour mon patient. Très rarement pour qu'il soit autonome. Après, j'en conviens qu'il y a des personnes qui demandent à être autonomes. C'est compliqué, c'est franchement compliqué ! Parce qu'il y a de multiples pathologies en gériatrie ! Et tu ne peux pas passer à côté de ça. Tu peux leur faciliter juste un petit truc et en fait il va y avoir autre chose. Les personnes qui souffrent de démence, elles pourraient encore très bien faire la cuisine, si elles avaient

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Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

quelqu'un qui surveille ce qu'elles font... Si elles ont un appareil qui détecte la fumée si elles ont encore le gaz, etc. C'est vraiment des choses qui sont très compliquées à mettre en place à domicile et moi en plus dans ma façon de travailler à l'UMG, on va chez les gens faire une évaluation, en fait c'est une « consultation », on va chez les gens, j'évalue, je conseille, je préconise et je m'arrête là.

- D'accord.

- Donc je ne fais pas de suivi et je n'y retourne pas 10 fois. Si je considère qu'il faut que j'y retourne parce que tout ce que j'ai évalué ça fait beaucoup trop... là cet après-midi j'ai fait une visite de 2h30 ! C'est énorme pour les gens ! Moi je suis rétamée après mais ça ce n'est pas grave... ça n'empêche que c'est trop pour les gens ! Alors parfois je vois à leur comportement que c'est trop, alors j'y retourne. Mais je n'y retourne pas pour un suivi ou pour les aider à mieux utiliser le Rollator® par exemple que je viens de préconiser. Ce n'est pas mon job. Donc forcément c'est compliqué. Et effectivement la robotique ça pourrait amener ça. Mais pour le moment... ça ce sont des idées de la génération « Y » quoi ! Nous on ne pouvait pas avoir ce genre d'idées ! Ce n'est pas possible ! Pour nous les robots c'est « Transformers » quoi !

- Oui je vois, ce n'est pas du tout concret, réel, quotidien.

- Oui complètement et ce qu'on peut voir des images de...comment ça s'appelle, la super structure... l'exosquelette, c'est robotisé ça aussi ! Mais ça me parait totalement hors de portée par rapport à mes petits papys et mamies, qui sont très vieux ! Et un exosquelette mais c'est hypra cher ! Mais ce sont de supers innovations, des supers idées, c'est là-dedans qu'il faut aller c'est sûr, sauf que faut pas oublier l'humain.

- Complètement !

- Et là moi je suis... C'est pour ça que l'histoire de...du truc de l'innovation, j'avais peur que tout tourne autour de la technologie « c'est formidable... », oui... mais faut pas oublier que nous ne sommes pas des machines triviales ! Nous sommes des humains et que nos personnes âgées, je ne peux parler que d'eux..., elles n'ont pas besoin que de matériel autour d'elles, elles ont besoin d'humains, clairement !

- Tout à fait. Ok, intéressant !

Quel est votre niveau de connaissance au sujet de la robotique d'assistance ? - Ben je pense qu'elle est nulle...

- Oui...

- Parce que je ne vois pas trop, je pourrais peut être me dire c'est genre... je ne sais pas si c'est ça, par exemple les semainiers qui bipent, qui font rappeler à la personne qu'il faut prendre un médicament ou... l'autre fois...on va avoir une réunion là avec un des revendeurs du phoque Paro®...

- Oui...

- Moi je ne sais pas de quoi... ça me paraît complètement... absurde, enfin voilà, je suis assez intéressée mais...

- C'est quelqu'un qui vient ici vous présenter ça ?

- Oui. Mais on fait des trucs nous ergos, on n'est pas complètement que à la ramasse ! Mais je ne sais pas... Moi j'ai vu la plaquette... Une collègue a contacté un des revendeurs et on va le rencontrer le 1er juin. Voilà. Donc c'est très bizarre pour moi !

LXXV

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

- Et est-ce que vous connaissez un peu Paro® ? Parce que forcément vous avez lu la plaquette, j'imagine ?

- J'ai lu la plaquette...

- Et du coup ?

- Du coup, ce que j'en sais, c'est qu'il s'adresse à des gens étiquetés « Alzheimer », donc difficulté pour parler, difficulté pour s'exprimer, gros troubles cognitifs et apparemment, à ce que j'ai compris, y'a eu un travail sur le physique de ce phoque avec une tête plus ronde pour qu'il soit plus agréable à regarder, pas agressif...c'est ce que j'ai compris... ils ont agrandi les yeux, ils ont rétréci la bouche, etc. Ils ont pris un phoque parce que ça n'avait pas de référence agressive, à aucun moment par exemple comme un chat ou un chien qui peut provoquer chez certaines personnes une peur... c'est vrai y'a des gens qui ont très peur des chats, y'a des gens qui ont très peur des chiens, voilà, donc ils ont pris totalement autre chose, un bébé phoque, blanc et à ce que j'ai vu sur la photo il réagit au niveau de son visage. Donc il était pris dans le bras de quelqu'un et j'ai vu qu'il avait les yeux fermés. Alors... je ne sais pas... ça m'interroge !

- D'accord.

- Vraiment !

- Il bouge les nageoires aussi !

- Ah d'accord ! Mais je ne sais pas ce que ça peut apporter mis à part le fait que, moi ce qui m'a fait, moi ce que j'ai vu comme référence quand j'ai vu ça, c'est que quand tu te balades dans les services qui ont beaucoup de personnes qui sont très atteintes de démence, souvent elles ont des peluches. Les dames... alors, moi j'étais toujours un peu étonnée. Alors voilà, les peluches qu'on leur met dans les mains, qu'elles caressent... je comprends, je ne suis pas complètement débile je pense, mais je comprends le fait d'avoir quelque chose qu'on peut caresser, surtout que ce sont des gens, faut quand même dire ce qui est, on ne les touche plus que pour faire leur toilette, qui n'ont plus du tout le contact que nous on peut avoir ou dans un couple ou même dans une famille où on est pris dans les bras... Donc ça je comprends très bien que ça peut manquer. Donc c'est ce que je disais en manutention, il faut avoir de la tendresse... j'ai plus le droit de le dire mais je le pense. Je le pense très fort parce que je pense effectivement que c'est quelque chose qui manque de façon cruciale à nos personnes âgées et quand je dis qu'il faut de l'humain, c'est là aussi qu'il faut de l'humain et que les institutions déshumanisent les choses. C'est pour ça que moi j'aurais plus envie de travailler sur l'humain dans les institutions que plutôt rajouter des robots hors des institutions. Donc voilà, ça c'est vraiment ma façon de voir. Après si on peut rajouter un robot qui a des compétences relationnelles que la personne qui a des troubles relationnels, une aphasie, une agnosie, enfin, quelque chose qui la met en situation de fort handicap au niveau relationnel, c'est formidable ! Mais je ne demande qu'à voir ! ça m'interroge, ça m'intrigue, ça m'interpelle !

- Je comprends, je comprends... d'accord. Alors en fait, concernant la robotique d'assistance, il y a plusieurs types de robots. Il y a les robots par exemple comme Paro®, qui sont des robots de soutien émotionnel, robots sociaux ou robots compagnons encore on les appelle... et ils sont là justement pour divertir la personne,

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Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

pour la rassurer, pour la stimuler aussi cognitivement, etc. Tout dépend des robots,

Paro® ne fait par exemple pas tout ça !

- Oui voilà, un bébé phoque ne peut pas stimuler cognitivement quand même !

- Non mais par exemple, il y a des études qui ont été menées sur Paro® et ils se sont

rendu compte que sur des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, qu'avec

Paro® ils prescrivent moins de médicaments, les gens ont moins mal...

- ... Oui ça agit sur les troubles du comportement !

- Oui et les personnes sont aussi plus ouvertes aux autres.

- D'accord !

- Elles ne sont pas tournées uniquement vers ce robot. Eh bien, pour l'avoir déjà testé,

j'étais aux Journées Annuelles de la Société Française des Technologies pour

l'Autonomie et de Gérontechnologie, à Paris, où il y avait pas mal de robots, il y avait

Paro® et je me suis rendu compte que ce n'était en fait pas qu'une simple peluche. Il y

a un véritable retour...

- ... Il y a quelque chose qui se créait, il y a une véritable relation ?

- Oui voilà, j'étais très sceptique au départ, je me suis dit « qu'est-ce que c'est que cette

chose ? »... et en fait il y avait deux Paro® sur la table et tous les gens qui passaient à

proximité, faisaient du bruit, etc. et les « bébés phoques » répondaient à ces

stimulations. Par exemple, levaient la tête quand quelqu'un passait. Alors, forcément,

les gens se rapprochent, sont curieux...

- Ça intrigue...

- Oui et tout le monde, tout le monde, commence à leur parler directement « Comment

ça va Paro® ? ». Vraiment tout le monde, c'était incroyable.

- C'est dingue !

- C'est quelque chose qui m'a vraiment surpris... Après je l'ai testé un peu plus, je l'ai

pris dans mes bras, je l'ai caressé un peu pour voir comment ça réagit et, au bout d'un

moment, bien que je ne souffre pas de démence, on se laisse prendre au jeu et on

oublie totalement que c'est un robot.

- D'accord, ok...

- Après on peut se poser des questions : est-ce que ce n'est pas tromper la personne ou

quelque chose comme ça...

- Bien sûr, bien sûr !

- Mais n'empêche qu'il y a quelque chose...

- C'est intrigant !

- Il y a une relation qui s'installe.

- Et les autres robots c'était quoi ?

- Il y a aussi des robots d'assistance aux tâches ménagères.

- Oui... ?

- C'est par exemple le robot aspirateur qui passe l'aspirateur tout seul...

- ...Oui oui, ben oui, la tondeuse à gazon, les trucs comme ça ! Oui d'accord, on est

d'accord...

- Ça c'est aussi de la robotique d'assistance.

- Ça c'est de la robotique, oui.

LXXVII

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

- On a des robots de téléprésence aussi. Ce sont des robots qui peuvent explorer

l'environnement de la personne, ils se déplacent de manière autonome... Et permettent

à une personne d'entrer en interaction avec un soignant, un petit fils ou de la famille,

enfin, voilà, quelqu'un d'autre.

- A la place de la personne ?

- Oui, par exemple la personne n'est pas sur place, le soignant n'est pas sur place, ou un

membre de la famille n'est pas sur place, le robot possède un écran...

- ... avec une caméra... ?

- Oui voilà et les deux personnes se voient et communiquent verbalement.

- Oui d'accord, donc là ça rapproche le patient du soignant ou de sa famille.

- C'est ça.

- Ah oui donc ça c'est intéressant aussi.

- Et en général ce genre de robot, si par exemple la personne fait une chute ou est en

situation de danger, il y a deux possibilités : soit le robot alerte de manière

automatique une liste de personnes qui a été pré enregistrée...

- Oui...

- Ou soit c'est la personne qui demande au robot d'appeler les secours et le robot

appelle les secours, ou une centrale qui gère les appels du robot. Et puis il y a encore

une catégorie, celle des robots « majordomes ». Alors, ces robots n'existent pas

encore, clairement, ils sont testés uniquement dans des laboratoires ou des choses

comme ça...

- ... Donc là ce sont des « Androïdes » ?

- Voilà, ils ont souvent l'apparence humaine, humanoïde est leur but et à terme, d'aider

l'humain dans toutes ses AVJ.

- Oui, c'est intéressant ! Mais c'est vrai que l'idée du robot, dans ma tête de femme de

40 ans, est très liée à un truc en métal, complètement déshumanisé qui va avoir du mal

à entrer en relation avec la personne. Le film là... Intelligence Artificielle là...

- Ah je ne sais pas...

- IA ? Avec Will Smith...

- Je l'ai peut-être déjà vu mais je ne m'en souviens pas...

- Ben c'est ça, ce sont des robots qui sont mis chez les gens.

- Ah oui euh... c'est I-Robot ?

- I-Robot !

- Je l'ai regardé spécialement pour le mémoire...

- Et ben n'empêche que ce film là il induit quand même la peur du robot.

- Énormément de films induisent la peur du robot.

- Énormément ! Parce qu'on se dit à chaque fois qu'à un moment ils vont penser par

eux-mêmes et ils vont tuer la race humaine.

- C'est ça. Quasiment dans tous les films de science-fiction avec des robots, les robots,

automatiquement, se retournent contre l'Homme...

- Et c'est vrai que du coup ça fait partie d'un inconscient collectif qui fait que quand tu

dis robot on n'est pas bien...on n'est pas bien !

LXXVIII

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

C'est vrai que Paro®, on ne dirait pas que c'est un robot. C'est pour ça vous dites qu'à

un moment on oublie que c'est un robot. Parce que c'est totalement déconnecté de

l'inconscient collectif qui tourne autour des robots.

- C'est ça. S'il était carré, s'il était froid et qu'il avait les boulons apparents...

- ... Ahhh ce serait affreux !

- ... On n'oublierait pas que c'est un robot, effectivement !

Avez-vous déjà rencontré ou entendu parler d'ergothérapeutes qui préconisent

des robots d'assistance ?

- Ben non...

- Non... Jamais ?

- Non... Mais je pense que ça serait notre job ! Effectivement. D'où l'intérêt de votre

mémoire. Je pense. Parce que ça fait partie de... On préconise des aides humaines, on

préconise des aides techniques, on préconise des systèmes de sécurité genre le tapis

qui est relié à une sonnette pour que quand tu tombes du lit... je veux dire, si ces

robots-là sont, d'ailleurs ils mélangent ces trois formes, on préconise aussi d'ailleurs,

enfin je ne préconise pas mais y'en a qui préconisent l'animal... ça mélange ces

systèmes-là donc évidemment il faudrait qu'on soit formés à ça !

- En fait c'est la même chose mais sous une autre forme.

- C'est ça ! ça va venir de toute façon, avec votre génération ça va venir !

- D'accord, c'est intéressant.

Selon vous, les ergothérapeutes sont-ils suffisamment formés ou informés au sujet

des robots d'assistance pour en préconiser ?

- Non, non, ben non ! Pas encore, non ! Ben non parce que c'est nouveau et que... une

fois qu'on est sorti de l'école on se débat quand même avec toutes nos difficultés

quotidiennes et c'est vraiment compliqué de continuer à se former particulièrement

dans les choses innovantes. Je pense que c'est vraiment la grande qualité de la

nouvelle façon de vous former à l'école d'ergos, c'est de vous mettre vraiment le pied

dans la recherche et de vous obliger à être ouverts au niveau de la lecture, des articles,

en anglais et tout ça et je trouve que c'est vraiment super parce que nous on n'avait

pas tout ça. On n'avait pas cette ouverture-là. Surtout là où j'ai été formée...

- Après, rien ne dit qu'ailleurs ils en parlent, de la robotique. Pour le moment je n'ai

rencontré personne...

- Personne ?

- Non, après je n'ai pas fait toute la France...

- Vous n'avez pas été au Canada ou aux États-Unis ?

- Personne en France hein, en France ! Ailleurs ça se fait un peu différemment...

- Au Japon...

- Surtout au Japon.

- Au Japon ils sont très axés là-dessus. Je pense que c'est culturel et même dans les

anciennes générations. Ça vient déjà d'avant nous... Je pense que c'est culturel.

- Oui, culturel et politique...

- Politique aussi ?

- Absolument.

LXXIX

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

- D'accord.

- Oui parce que, chez nous par exemple, s'il y a un manque d'aidants pour les personnes

âgées, on ouvre les frontières pour faire arriver des immigrés.

- C'est ça, c'est ça...

- Au Japon, pour des raisons culturelles et géographiques, ils sont assez limités niveau

place, ils préfèrent fabriquer des robots.

- Ah oui !

- En plus de ça, ça créait de l'emploi. En fait ils ont une vision totalement différente de

la nôtre. C'est aussi culturel car là-bas, la religion qui prédomine est le Shintoïsme

selon lequel l'humain n'est qu'un élément parmi un grand tout. Donc, en gros, entre

guillemets, il est « remplaçable »... ce n'est pas le bon terme hein, car justement, on

ne remplace pas l'humain par un robot, mais on accepte plus facilement qu'un robot,

qui est un objet, qui n'a pas de vie, puisse s'occuper des humains. Chez nous, avec le

Christianisme, c'est totalement différent. Et le Shintoïsme prête une entité animiste,

donc une âme, à chaque objet.

- Ahhh !

- Même si ce n'est pas vivant.

- Donc un robot...

- Une plante, un caillou, une montagne, un robot...

- Ah oui !

- Et du coup leur vision est très différente.

- Très différente !

- Et c'est pour ça qu'ils acceptent ça aussi beaucoup plus facilement.

À ce propos, par exemple, le robot Paro®, il y a énormément de familles, de foyers,

qui prennent un robot Paro®, plutôt qu'un véritable animal de compagnie, en guise

d'animal de compagnie.

- D'accord !

- Donc on retrouve des Paro® là-bas... je ne dirai pas à foison, mais comme ça,

simplement, pour tenir compagnie.

- C'est eux qui l'ont construit ?

- C'est un chercheur japonais qui l'a mis au point.

- D'accord ! D'accord, oui ! Ben en même temps on n'a pas besoin de le nourrir, il ne

fait pas caca, voilà, formidable !

- Il y a des avantages et des inconvénients...

- Il ne meurt pas !

- Bah, à un moment...

- À un moment... oui mais on peut toujours le faire réparer !

- On peut le faire réparer...

- Oui d'accord, c'est intéressant !

- Seriez-vous prête à préconiser ce genre d'aide à une personne âgée ?

- Euh... pourquoi pas ! Il faudrait juste que je connaisse mieux, que je me fasse un peu

former et puis il y a l'histoire du prix quand même.

- C'est vrai que c'est assez onéreux.

LXXX

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

- Ben j'imagine oui !

- D'accord. Donc ce n'est pas un « oui » franc mais « pourquoi pas » ?...

- Oui, pourquoi pas.

- Ok.

Dans quelle mesure le coût d'une aide technique préconisée par un ergothérapeute influence-t-il son acceptation par la personne ?

- Euh... alors... il faut qu'il y ait toujours, à mon sens, un équilibre entre le bénéfice et le coût et après, évidemment, mise en relation avec les capacités financières de mes personnes, de mes patients. La dernière fois, il y a une fois j'ai eu un monsieur qui se cassait la figure dans sa piscine, maison d'architecte, voilà... il a fallu que je lui préconise une main courante dans sa piscine, bon. Et plein de fois je vais dans les HLM ou dans les maisons des mines où les personnes âgées ont moins de 400€ par mois pour vivre. Donc clairement, c'est quand même à moi qui préconise les choses, d'adapter ce que je préconise avec ce que je vois dans la vraie vie. Et clairement, il faut dire les choses comme elles sont, les gens qui ont beaucoup de moyens m'appellent beaucoup moins. Parce que finalement, eux peuvent se payer les aides humaines, ils peuvent aller souvent...ben par exemple, j'ai eu une dame démente, complètement dépendante, avait beaucoup d'argent, était isolée, la famille a payé quatre auxiliaires de vie qui tournaient jour et nuit.

- D'accord.

- Et donc là, c'est idéal. Mais c'est tellement peu souvent. Et elle était installée dans un fauteuil roulant super... C'est vraiment le pied pour un ergo ! Parce qu'il n'y a pas de frein financier. Or, nous, généralement, nos patients ont quand même de gros freins financiers. Et du coup, c'est compliqué avec la robotique, parce que c'est nouveau encore.

- Et que c'est par conséquent très cher...

- Et que c'est par conséquent très cher !

Mais comme c'était à l'époque avec, je ne sais pas moi, la télé avec une télécommande... Les smartphones, c'est déjà quelque chose d'extraordinaire ! Pour nous maintenant, au niveau de l'agenda, ça sonne quand on a un truc à se rappeler, je veux dire, ça, ça pourrait être une aide robotique géniale pour les personnes âgées mais c'est pas possible, parce que déjà, elles ont du mal à accepter ce genre de truc et en plus ça coûte ! L'histoire du phoque Paro® par exemple, peut être dans les institutions, ce serait les institutions qui l'achèteraient, ça pourrait être une super idée ! Pourquoi pas !

- Il coûte à peu près 5000€ aujourd'hui.

- Ah oui ce n'est pas possible ! Clairement pas possible ! Après c'est vrai que si on le prend comme animal de compagnie pour les enfants c'est top parce que tu investis une fois et après t'as pas les croquettes à acheter, ou la litière à acheter...

- A la longue c'est probablement rentable, y'a pas les vaccins et tout ça...

- Après dans ma pratique je ne vois pas comment je peux utiliser ça. J'étais là chez une dame, elle a installé presque un truc pour ouvrir les portes avec une caméra. Mais y'en a très peu qui le font ! Alors que c'est vraiment bien parce que ça lui laisse la possibilité d'ouvrir ou de ne pas ouvrir alors que les autres, il y a très souvent soit une

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Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

boîte à clés, soit les gens ont carrément la clé et ils rentrent comme si c'était chez eux quoi !

- Oui...

- Alors que là ça lui laisse son autonomie, à la personne !

- Ça lui laisse son autonomie de décision.

- Voilà, « j'ai le choix de choisir ». Et ça c'est super.

- D'accord.

- Mais c'est compliqué tout ça. Faut encore que ça évolue.

- Et dans quelle mesure, la famille/l'entourage/le ou les aidant(s) influence(nt) l'acceptation et l'utilisation des aides techniques proposées ?

- Je pense que c'est fondamental. C'est pour ça que je suis en train de faire une formation sur les familles.

- Ah oui ?

- Oui...

- Et pourquoi c'est fondamental ?

- C'est fondamental parce qu'ils font partie du système familial et qu'une personne ne peut pas ou a beaucoup de mal à choisir seule et que quand tu choisis quelque chose dans ta vie qui va changer ta vie, même si c'est juste une aide de marche, si la personne avec qui tu vis n'est pas d'accord, ça va pas marcher. Par exemple, aujourd'hui, là tout de suite, cet après-midi, une dame qui a de très grosses difficultés à marcher, eh ben pour elle, c'est fondamental d'avoir son mari qui l'aide à marcher. Elle lui donne les mains. Le médecin est passé outre, il a fait carrément livrer par la pharmacie un Rollator®, et ben elle l'utilise pas le Rollator®... Parce que ce qui se passe entre eux, la relation qui se passe entre le mari et la femme, fait que le mari est valorisé par le fait que sa femme a besoin de lui.

- Oui, je vois.

- Et du coup il a une valeur !

- C'est ça !

- Il n'est pas juste le mari de la femme qui va pas bien. Il est là, c'est lui qui la fait tenir debout. Symboliquement c'est fort quand même !

- Ah oui complètement !

- Donc tu ne peux pas mettre un Rollator® entre les deux !

- Non...

- Ce n'est pas possible ! Donc c'est pour ça que si tu n'as pas l'entourage avec toi pour ce genre de chose, tu peux te battre mais ça ne marchera pas. Et quel est l'intérêt en tant qu'ergo de te battre pour mettre en place quelque chose alors que dans le système familial ça n'a pas de sens. Moi je pense qu'on fait fausse route. Et les nouveaux ergos, moi quand j'étais nouvelle ergo j'ai fait beaucoup fausse route dans ce sens-là. Parce que je pensais que c'était bien pour la personne, donc ça m'énervait, j'étais souvent très frustrée de me dire que « mais enfin, j'ai fait l'évaluation, cette dame elle a besoin d'un Rollator®, je veux qu'elle ait son Rollator®, ça marche pas ». C'est terrible ! Sauf que je ne voyais pas tout ce qu'il y avait autour ! Donc là je suis en train

LXXXII

Annexe V-II Entretien ergothérapeute 2

Durée de l'entretien : 50 min

de faire une formation sur la thérapie familiale. Pour comprendre et analyser les

familles.

- Ça a l'air super intéressant ! Parce que déjà un humain c'est super complexe...

- C'est ça...

- Mais un humain dans son environnement, dans son milieu, avec d'autres humains...

- Et en fait ce qui nous intéresse dans cette formation, ce ne sont pas les humains, ce

sont les relations qu'il y a entre eux.

- Oui, ce sont les liens, les rôles de chacun, les statuts, c'est super intéressant !

- C'est hypra complexe ! Mais du coup ça renforce chez moi le fait de dire qu'on ne

peut pas faire les choses... « moi ergo, je pense que c'est bien pour la patiente ». Donc

effectivement, sans la famille, sans le conjoint, évidemment sans l'accord de la

personne, on ne peut rien faire ! Ça ne sert à rien, il faut travailler autrement.

- D'accord. Ok, eh bien j'ai terminé, c'était la dernière question. Merci beaucoup !

- Eh ben de rien.

- Vous m'avez apporté plein d'infos, même sans connaître la robotique d'assistance !

LXXXIII

Annexe V-III Entretien ergothérapeute 3

Durée de l'entretien : 36 min

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway