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Terrorisme et géopolitique en Afrique. Sens et contresens.

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par Sékou COULIBALY
Alassane Ouattara de Côte dà¢â‚¬â„¢Ivoire - Master 2015
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITÉ ALASSANE OUATTARA

UFR : Communication, Milieu et Société

Département de philosophie

MENTION : PHILOSOPHIE

Spécialité : Esthétique & Philosophie africaine

Sujet :

Présenté par : Sous la direction de :

M. COULIBALY Sékou

M. DIAKITÉ Samba

Professeur Titulaire

Encadré par :

KOUMA Youssouf

Maître - Assistant

ANNÉE ACADÉMIQUE : 2014-2015

SOMMAIRE

SOMMAIRE I

DÉDICACE IV

REMERCIEMENTS V

PROPOS LIMINAIRES VI

INTRODUCTION 1

PREMIÈRE PARTIE : TERRORISME ET REPRÉSENTATIVITÉ 7

CHAPITRE 1 : DÉSAGRÉGATION IDENTITAIRE ET VIOLENCE TERRORISTE EN AFRIQUE 9

CHAPITRE 2 : CRISE DE LA REPRÉSENTATIVITÉ ET NAISSANCE D'UNE TYPOLOGIE NOUVELLE DE LA VIOLENCE EN AFRIQUE 17

DEUXIÈME PARTIE : STRATÉGIES GÉOPOLITIQUES ET ENJEUX DU TERRORISME EN AFRIQUE 25

CHAPITRE 1: TERRORISME ET STRATÉGIES GÉOPOLITIQUES 27

CHAPITRE 2 : TERRORISME EN AFRIQUE : ENJEUX POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES 37

TROISIÈME PARTIE : STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME EN AFRIQUE 59

CHAPITRE 1 : LUTTE CONTRE LE TERRORISME : REGARDS CROISÉS 61

CHAPITRE 2: VERS UNE AFRIQUE UNIFIÉE ET PACIFIÉE 68

CONCLUSION 75

BIBLIOGRAPHIE 79

TABLE DES MATIÈRES 87

DÉDICACE

À mon père, comme ma mère l'aurait voulu,

À Colonel-Major, HANIF Mohammed...

REMERCIEMENTS

Loin de nous sentir sous l'emprise d'un méthodisme aigu, nous tenons à vouer nos reconnaissances :

AuProfesseur Samba DIAKITÉ qui nous a appris qu'il faut « viser la lune pour enfanter des étoiles ». C'est alors le lieu pour nous de lui réitérer notre engagement dans la persévérance, dans la poursuite de nos ambitions mêmeles plus inespérées ;

AuProfesseur FIÉ Doh Ludovic et au Docteur KOUMA Youssouf, pour leurs conseils ;

À Kouyaté Mahamoudpour son soutien matériel et financier ;

À tous ceux qui, amis, famille, connaissances, de près ou de loin, nous ont soutenu durant cette recherche, tous ceux qui pensaient avoir faire leurs devoirs ou avoir manqué de le faire.

Merci.

PROPOS LIMINAIRES

Cette étude vise à analyserles fondements et les enjeux du terrorisme en Afrique et ses implications géopolitiques. Nous voulons donc, à travers les rivalités de pouvoirs et leurs représentations sur l'espace africain, appréhender les violences terroristes. S'il est évident que la géopolitique, servant à organiser les territoires, « est d'abord un savoir stratégique étroitement lié à un ensemble de pratiques politiques et militaires »1(*), elle peut donc aider dans l'analyse des violences en Afrique. Il s'agit principalement, en nous servant d'approches géopolitiques, de comprendre les fondements des crises sur les territoires africains et plus particulièrement de l'analyse des facteurs favorables à l'expansion de la menace terroriste. Cependant, il nous semble impérieux, d'entrée de jeu, de lever certaineséquivoques sur la notion de terrorisme qui est devenue un lieu commun où chaque acteur individuel ou collectif de la vie sociale en use abusivement.

D'entrée de jeu, faut-il signifier qu'il nous sera difficile de trouver une réponse consensuelle qui clôt le débat sur la définition du concept de terrorisme. Cela, parce qu'il existe une pluralité de terrorismes et dont chacun, selon le champ d'analyse et l'objectif visé, peut admettre une définition toute différente. « La notion n'a évidemment qu'une généralité trompeuse : elle nait au croisement de discours antagonistes qui se la dispute en l'interprétant chacun à leur manière, nous dit Yves Michaud. C'est pourquoi, poursuit-il, le mot violence [terroriste] veut tout dire en même temps jamais la même chose. D'où son apparente polysémie2(*) ».

Autrement dit, pour Yves Michaud, aucune définition du concept de terrorisme ne pourrait faire l'unanimité ; en ce sens que parlant de terrorisme, chacun y va avec ses convictions, ses attentes et ses préjugés. Sitant est que la notion de terrorisme est polysémique et qu'elle admet selon « les auteurs Schmid et Jongmanqui en avaient recensé dans le début des années 1980, pas moins de 109 définitions différentes du terrorisme »3(*), la question qui nous semble alors la plus adéquate est celle-ci : à quoi fait-on allusion lorsqu'on parle de terrorisme en Afrique ? Reformulée de la sorte, cette question va nous amener, dans un premier temps, à délimiter notre champ d'analyse et à un second niveau, à apprécier le concept de terrorisme dans un langage africain.

Pour ce faire, notons que nonobstant la difficulté à définir conventionnellement le terrorisme, faut-il signifier que toutes les formes de terrorisme ont un caractère commun : la maximisation de la terreur hors des normes juridiques. Terrorisme, ici, s'oppose donc au droit. Parlant de ce contexte de hors-norme juridique en rapport à la définition de terrorisme, on pourrait penser avant tout,à une macroscopie de la bestialité humaine, à l'oeuvre de bandits des temps nouveaux, au rapport de domination de l'homme par l'homme, aux politiques d'exploitation systématique, à la traite négrière, aux travaux forcés, au colonialisme, qui, au demeurant, tardent à s'effacer des mémoires. Cette forme toute particulière de terrorisme dont est victime le continent africain, fait penser que le terrorisme s'adapte, se déterritorialise et se ré-territorialise. C'est bien cela une sorte de géoterrorisme. C'est-à-dire une approche spatio-temporelle de ce que peut être le terrorisme, chacun se le représentant selon ses réalités et selon la densité de ses convictions.

S'il est ainsi évident que le géoterrorismen'est pas favorable à une définition universelle de ce qu'est le terrorisme, une dimension ontologique de l'acte terroriste, quant à elle, apparaissant avec la biotechnologie, peut tout de même prétendre à cet universalisme. Aux côtés des formes multiples de l'acte terroriste, se développe une forme insidieuse, peu médiatisée de terrorisme que le spécialiste camerounais de la bioéthique André TsalaMbani nomme le terrorisme ontologique. Il s'agit selon lui, d'une forme non moins horrible et crapuleuse

orchestrée par l'industrie biotechnologique au travers des techniques procréatiques telles que le diagnostic préimplantatoire (DPI), la recherche consommatrice d'embryon, le clonage humain et la cybernanthropologie ou la biotique, qui menacent de faire voler la nature humaine en éclats4(*).

On comprend qu'avec Mbani, la menace de la disparition ou de l'extraversion de la nature humaine est bien réelle,s'agissant de terrorisme ontologique du fait qu'il s'attaque à l'essence de l'homme lui-même. Cependant, en quoi cette dimension biotechnique relèverait-elle du terrorisme ? En réponse à cette interrogation, Mbani ajoute que la biotechnique est une menace mortelle contre la nature humaine et qu'en cela donc, la biopolitique se doit d'exercer « un contrôle plus strict sur les usages de la science et de la technologie à l'effet de conjurer cette apocalypse programmée »5(*). Pour lui, le terrorisme ontologique se résume en des attentats biotechnologiques projetés contre la nature humaine et qui sont en parfaite cohérence avec l'idéal de la posthumanité qui, lui-même présente des germes idéologiques nihilistes et évolutionnistes. C'est donc bien évident que soit pris en compte, parlant de terrorisme, l'ontologie. Et Mbani fait bien de nous le rappeler. Mais nous ne traiterons pas de ce cas qui échappe ou qui peut échapper à la subjectivité. Nous chercherons plutôt à comprendre le terrorisme, comprendre n'étant pas le fait de justifier mais de chercher à penser l'impensable selon les mots de Jacques Semelin6(*).Toutefois, de quel type de terrorisme s'agira-t-il principalement dans ce travail de recherche ?

Nous nous intéresserons d'abord auterrorisme d'Etat. Cela s'explique par le fait que cette sorte de terrorisme est bien présente en Afrique depuis les indépendances et nous y reviendrons dans notre développement. Il est l'exercice d'un État totalitaire qui use de façon excessive de son monopole,prétendulégitime, pour estropier des populations sans défense, pour leur imposer des idéaux. Il réside dans l'utilisation de la terreur, par une État, comme moyen de gouverner sa population. En cas de révolte de la part des populations lésées, le Léviathan7(*)réprime. Cela s'oppose, dans sa manifestation, au "contrat social"hobbesienqui stipule une abdication d'une partie des libertés individuelles en échange de la protection de l'État. Nous y reviendrons.

Nous chercherons également à comprendre le terrorisme en Afrique à partirdes relations inter-États qui semblent impacter son avènement. Pour preuve,disons que les stratégies de domination, qui se manifestent à travers la course au nucléaire et les alliances inter-États, constituent l'une des motivations du terrorisme. Le but se résume en le maintien sous oppression des paysen quête d'autosuffisance alimentaire par les Nations développées dont les armes sont de plus en plus sophistiquées. Ces nations puissantes exercent une sorte de dictat sur ces pays pauvres qui ne peuvent que se soumettre à leurs exigences. En ne garantissant que quelques interventions militaires dans ces pays qui ne finiront pas de sitôt avec des conflits tous azimuts, les puissances armées, se servant de leur droit au véto qu'ils se réservent jalousement, décident en lieu et place des autres Nations, de leur mode de vie.

Le droit de véto, dont disposent seulement cinq États au monde (la Chine, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et la Russie) sur les 15 membres du conseil de sécurité, estla forme la plus perceptible de cette expression de la terreur. L'Organisation des Nations-Unis (O.N.U), dans toutes ses composantes, n'est rien d'autre qu'une politique qui vise à faire accepter aux États, leur assujettissement aux vouloirs des pays ayant droit de véto. Et, seuls ces pays décident des conditions de possession du nucléaire, symbole d'une domination stratégique, de la puissance. Ce droit, dont disposent ces superpuissances, est l'expression d'une violence qui s'exprime sous la forme de privation et d'intervention en terres étrangères, souvent même sans y être invitées.

En somme, il apparait de ce constat que la possession du nucléaire, en vue de tenir en alerte l'opinion internationale sur l'ampleur du dégât que l'onest capable de provoquer, ne vise qu'une et une seule chose : être craint partous. Nousy reviendrons dans l'analyse géostratégique des relations internationales.

Notre analyse portera singulièrement sur le terrorisme en tant qu'événement majeur du XXIe siècle et perçu de façon générale, après les événements du 11 septembre 2001 contre les États-Unis, comme un agi crapuleux et horrible mené par des groupes dits islamistes, motivés par des convictions identitaires et/ou idéologiques.

L'identité ici, nous intéresse à plus d'un titre. Pourles tenants de cette mouvance terroriste, en effet, il s'agit, se fondant sur des prétextes idéologiques, de discréditer aux yeux de l'opinion publique, l'Occident et sa civilisation qu'ils jugent de favoriser la perversité à travers des notions de liberté et de démocratie. Leurs méthodes : soit l'assassinat politique, soit les attentats ou la méthode de frappes aveugles8(*)qui ont pour but, le meurtre arbitraire de victimes innocentes et impartiales. Il s'agit là de guerres non conventionnelles prenant parfois l'apparence d'une révolution et ayant pour objectif de saper le moral d'une nation ou d'un groupe de personnes, de banaliser la mort. Ces violences peuvent être soit l'acte d'un individu particulier (dans ce cas on parle de terrorisme individuel : perpétré par des rebelles ou des anarchistes), soit celui d'une organisation ou d'un groupe de personnes (on parle alors de terrorisme organisé, provoqué par des groupes défendant des idéologies).

Mais comment le terrorisme, tel que perçu à partir du 11 septembre 2001, comme l'oeuvre d'islamistes radicaux, est-il parvenu à troubler la quiétude des sociétés africaines ? Comment en sortir ? Telle est la visée de cette étude.

INTRODUCTION

L'Afrique est à brut à des mutations sociales de tout genre. Génocide, rébellion, mutinerie, famine, insécurité, sont, hélas, une culture de mode pour les contemporains. De plus en plus, « l'homme loup », tel que décrit par Thomas Hobbes dans le Léviathan, s'avère une triste réalité en Afrique. Car, il n'est plus d'un simple truisme d'affirmer que les espaces géographiques d'Afrique sont en proie à des violences tous azimuts. Mais, comment ne pas comprendre cet état de fait, si davantage, l'autre n'est pas considéré comme un être à-part, distinct, qui a sa part et qui a les mêmes droits que soi ? À dire vrai, au coeur des instabilités sociales en Afrique, se trouve un arrière fond identitaire. Si on en est arrivé là, c'est justement parce que l'Afrique ne semble pas s'accommoder avec l'éthique de la diversité et avec la configuration politique que l'Occident lui a imposée. Ce qui cause de véritables problèmes d'adaptation autour desquels, philosophes, sociologues, historiens, hommes politiques se réunissent et tentent, chacun selon sa compétence, de trouver une solution qui éradiquerait, ou du moins, contribuerait à contenir les chocs que cela suscite.

Tout naturellement, à scruter de près cette réalité, on se rend à l'évidence que « Si la violence fait problème pour la philosophie, c'est parce que son déchainement nie les pouvoirs de la conscience et du langage, et donc, la capacité même de philosopher »9(*). Ce qui revient à dire que la violence dans le monde et plus particulièrement en Afrique est à justifier dans un état d'esprit autre que celui de l'éclairage de la raison et du dialogue intercommunautaire. Ce défaut de communication met à mal les rapports entre groupes humains et donne lieu à des actes de violences se présentant sous plusieurs formes.

Énoncer ainsi la problématique du terrorisme en rapport avec la géopolitique en Afrique (comme relevant d'un défi sécuritaire à relever) témoigne du déficit des consciences et des langages africains10(*) à solutionner raisonnablement, les différends. C'est dire également que cette problématique se veut une réponse au double questionnement du rejet de la violence et de l'affirmation des vertus des actes d'agressivité comme manifeste apparent de la libération. Cependant, si la violence a donné à la démocratie sa lettre de noblesse, force est de constater qu'elle entraine un certain affaiblissement social. On peut alors se demander pourquoi tant de violences en l'Afrique si tant est que ces violences ruinent davantage nos sociétés. Énoncer cette préoccupation, c'ests'interroger sur le rapport des actes terroristes à la géopolitique en Afrique. Cela est nécessaire, en ce sens que s'il est évident que toute philosophie, est avant tout, une géophilosophie, alors la réflexion sur l'insécurité en Afrique, s'avère, à plus d'une approche, une exigence philosophique pour nous africains.

Il est évident que différentes politiques (accords de paix, mise en place de structures de lutte commune contre la violence etc.), en vue de l'éradication de l'insécurité, ont été mises sur pied. Mais les résultats de ces investigations ne semblent pas fonctionner correctement eu égard à l'insistance des crises un peu partout en Afrique. Il revient alors, selon Habermas, « à la philosophie de diagnostiquer les maux de la société en termes de défauts de communication »11(*) si tant est que les révoltes en Afrique sont à percevoir comme un défaut de communication.

Qui plus est, si l'on y prend garde, avec cette montée vertigineuse de la terreur et de la violence souvent occasionnée par « la conquête et la conservation du pouvoir (...) l'Afrique sera [sinon qu'elle l'est déjà] le théâtre des affrontements fratricides »12(*). Dire cela, revient avec Yekoka, à situer la responsabilité du politique et des collectivités territoriales dans la violence et dans le terrorisme en Afrique. C'est si bien vu que si nul n'agit raisonnablement, si les rapports deviennent conflictuels du simple fait que tous se considèrent distincts les uns des autres et qu'au nom de cette distinction, l'on ne parvient pas à communiquer, cela ne peut qu'occasionner l'animosité entre individus.

C'est pourquoi, écrira Samba Diakité, la philosophie se doit de faire une critique sans complaisance de la gestion des pouvoirs en Afrique afin de demeurer dans la proximité de la question [sécuritaire] si tant est que la question [de la sécurité régionale] est la question qui conduit l'Afrique tout entière au progrès, au développement13(*).

Ce qui interpelle dans ce cas, c'est que face à cette curieuse politique de développement, il revient aux philosophes de se pencher sur la question de la sécurité régionale afin de contenir les nombreux dégâts matériels et humains causés par les actes de violences sur le sol africain. Ainsi, s'inscrivant dans une perspective de la philosophie de la guerre, une analyse philosophique sanscomplaisancedes fondements de ces actes ignobles, prend tout son sens.

Toutefois, sans vouloir restreindre les causes des violences en Afrique à des questions identitaires ou purement politiques et idéologiques, nous souscrivons à l'idée selon laquelle « c'est le rejet de l'ouverture aux peuples qui se saisit à partir de la Différence et des particularités »14(*). Ce refus de la différence, sans oublier l'économie et le politique, doivent être analysés en rapport avec la violence terroriste en Afrique. C'est pourquoi, nous convenons avec Giovanna Barradori lorsqu'elle écrit que par les principaux arguments avancés relatifs à la terreur et au terrorisme « la philosophie doit donc se mobiliser, car elle peut à l'évidence apporter une contribution unique au moment de cette délicate articulation du géopolitique »15(*).

Cela dit, il nous semble opportun l'analyse critique des questions les plus pressantes que posent la violence terroriste en Afrique. Ce qui justifie le choix de notre sujet reformulé comme suit : « terrorisme et géopolitique en Afrique : sens et contresens ». Autrement, nous voulons, à travers cette étude, analyser la problématique du terrorisme dans son interaction avec les rivalités de pouvoirs sur les territoires africains.

Notre intention reste celle de l'appréhension de la violence terroriste en Afrique dans son rapport aux rivalités de pouvoirs. Au-delà doncde la diversité des approches, les documents que nous avons consultés, sans avoir pour intentionde justifier ou de condamner le terrorisme, mais dans une dynamique de regards croisés, nous permettent une intellection de ce phénomène. Le but, c'est de promouvoir le vivre en commun : que les différences ne constituent plus d'obstacle à l'harmonie sociale ; que plus jamais les jeux d'intérêts ne soient des avatars pour l'équilibre de la société. En d'autres termes, nous voulons, dans cette analyse, comprendre le terrorisme en Afrique à travers ses fondements, ses objectifs et ses enjeux afin de limiter les dégâts humains que ce phénomène suscite.

À partir de là, le problème que nous entendons résoudre se décline comme suit : la violence terroriste est-elle la conséquence de stratégies de domination à partir des rivalités de pouvoirs et de territoires sur l'espace africain ? De toute évidence, cela parait logique. Cependant, quels sont les fondements du terrorisme en Afrique ? Relève-t-il de simples crises de la représentativité ou d'enjeux liés à des stratégies géopolitiques ? Comment le terrorisme,devenant un enjeu géopolitique pour l'Afrique, peut-il être éradiqué, ou du moins, atténué ?

Somme toute, cette étude se propose d'être un diagnostic du terrorisme dans son rapport avec les rivalités politiques en Afrique. Pour y parvenir, l'utilisation concomitante des méthodes phénoménologique et herméneutique s'avère nécessaire.

En termes de méthode, nous voulons également rompre les amarres avec l'attitude qui consiste à philosopher autour d'un auteur (en l'interprétant) ou encore autour d'une école philosophique (dans rares de cas). Nous avons décidé de penser les fondements d'un phénomène nouveau(le terrorisme en Afrique) dans un vocabulaire purement africain. Et ce, sans rattacher forcément cette étude à un auteur donné ou à une école philosophique spécialiste de la question. Cela, non pas parce qu'une réflexion sur le terrorisme en Afrique est inédite, mais parce que l'actualité de ce sujet (la saisie d'un phénomène évolutif) nous impose de l'analyser non pas seulement dans les livres, mais aussi bien dans la réalité quotidienne des peuples qui en payent les frais. Cette exigence nous force à l'analyse de la question en rompant avec la méthode classique de notre Unité de Formation et de Recherche (UFR). Bien évidemment, nous illustrerons nos points de vue en faisant appel, sans cesse, à certains philosophes selon que besoin se fera sentir. Et c'est justement en cela que les méthodes sociocritique et herméneutique dont nous ferons usage prendront leur sens : l'interprétation de certains textes et faits sociaux qui contribuent à la compréhension du phénomène.

Toutefois, nous ne prétendrons pas que notre travail clore le débat sur la problématique du terrorisme en Afrique. Cela s'avère quasi impossible, voire prétentieux. Néanmoins, nous tenterons de traiter de la question en ne prenant en compte que ses fondements et ses enjeux ; après quoi, nous montrerons des voies qui pourraient aider à la pacification de l'espace africain et à minimiser le risque de la perpétuation des attaques terroristes en Afrique. C'est dire autrement que notre travail se soumettra à trois articulations, à savoir : la recherche des fondements de la violence terroriste, le dévoilement des enjeux politico-idéologiques en rapport aux stratégies géopolitiques et enfin la recommandation de stratégies de la lutte contre le terrorisme en Afrique.

PREMIÈRE PARTIE : TERRORISME ET REPRÉSENTATIVITÉ

Nous parlons de terrorisme aujourd'hui encore en Afrique comme d'un sujet de méfiance ou comme d'un tabou autour duquel l'on se doit d'observer le silence. Pourtant, aussi sensible que parait la notion de terrorisme, elle mérite d'être appréhendée surtout dans nos sociétés africaines qui semblent bien parties pour abriter ce phénomène dont la mondialisation est plus efficace que certaine. « Le syndrome de phobie islamiste »16(*) est bien réel autant en Occident qu'en Afrique. Pire, « les ralliements à l'EI continuent par ailleurs en zones de turbulence en Afrique et particulièrement au sahel »17(*) nous dira Hanif. De quoi s'agit-il réellement, le terrorisme en Afrique ?

CHAPITRE 1 : DÉSAGRÉGATION IDENTITAIREET VIOLENCE TERRORISTE EN AFRIQUE

Parler de désagrégation identitaire en rapport à la violence terroriste en Afrique, c'est questionner l'impact des effritements ethniques, culturels, religieux, sur l'avènement de la terreur qui tend à se transformer en système ; c'est montrer le lien étroit entre crises internes et violence terroriste. C'est, cherchant les causes profondes des nasses identitaires, faire incursion dans les fondements du terrorisme en tant que manifestation de crise de la représentation. Il s'agit, enfin, de démontrer que le terrorisme se nourri de dénis de reconnaissance.

D'ailleurs, c'est, en examen des conditions des guerres dites justes et injustes,ce que Walzerénonce : «  Nous justifions notre conduite ; nous jugeons celle des autres »18(*). Ce qui revient à dire que tout le monde se dédouane en inculpant l'autre au sujet des agis déplacés comme l'acte terroriste, par exemple. Quiest au juste terroriste si tout le monde tend à se justifier ? Qui envahit l'autre ? Qui est authentique et qui est cet autre, l'étranger ? Ces préoccupations, dans une société africaine ayant déjà du mal à s'identifier à une culture, à un groupe, à une opinion religieuse, méritent d'être posées. S'agit-il de parler de l'autre en tant qu'individu ou en tant que collectivité ? Dans tous les cas, c'est l'Identité qui est en cause. Ce par quoi, on identifie et on reconnait quelqu'un, son étiquette.

Contre toute attente, l'identité ou l'identification obéit à un principe de classification et de "clan-nification" qui a pour finalité, le rejet systématique de l'autre. « Il s'agit dans la rue ou en rase campagne, d'identifier un groupe ou un individu. Ami ou ennemi ? Qui déclares-tu que tu es ? Comment t'appelles-tu, de quelle appartenance sors-tu, au nom de qui t'avances-tu vers moi ? »19(*)L'identification, dans pareil circonstance, vise à isoler l'individu, à le saisir dans son appartenance ethnique, sociale ou même religieuse, à connaitre ses motivations afin de se rassurer qu'il constitue une menace ou un appui. On constate, pourtant, qu'en Afrique, cette sorte de désagrégation identitaire est en vogue. L'exemple le plus efficient, mais qui semble vouloir se faire passer anonymement, est celui de la croyance religieuse.

On identifie l'individu afin de lui coller une étiquette pour s'en rapprocher ou pour s'enméfier. En cela, imaginons un instant la conception que l'on se fera d'un musulman dans une société qui se méprend sur le terrorisme, faisant passer l'acte terroriste exclusivementpourdes manifestations de groupes islamistes. Le non musulman, parce que convaincu de ses préjugés, voit désormais en n'importe quel musulman, un potentiel terroriste. Son statut de fervent musulman fait de lui un être suspect, à-part. Ce qui semble d'ailleurs logique puisqu'à l'opposé, l'islamiste crée des fossés en présentant les autres (non-musulmans) comme des personnes n'ayant pas droit de vivre. C'est fort de cela qu'on pourrait expliquer aujourd'hui la montée du sentiment terroriste en Afrique. Qu'en est-il réellement ?

I. De la crise de la reconnaissance à la guerre entre identités

Il n'est plus d'une simple lapalissade que les sociétés africaines sont victimes de désagrégations identitaires qui ont pour corollaire, nombre de fois, des guerres tribales, ethniques ou religieuses. Du déni identitaire individuel, on en arrive à la création de scission entre individus. La négation induisant le manque d'amour et d'amitié envers l'autre, implique et justifie l'écart entre son agi et les normes sociales.Et cela, simplement, écrit l'auteur deLa réification, parce que

nous tendons à ne percevoir les autres hommes, dit Axel Honneth, que comme des objets dépourvus de sensibilité. Nous perdons l'aptitude, poursuit-il, à comprendre directement les expressions comportementales des autres personnes comme autant d'incitations à réagir de façon appropriée20(*).

La réification ou la chosification dont est victime l'individu apparait, pour ainsi dire, comme le fondement des frustrations qui occasionnent les crises. La mésinterprétation, l'incompréhension de l'autre, conduisant au dénigrement de celui-ci par la revalorisation de soi, conduitinéluctablementà la guerre entre identités. Samba Diakité, à travers son article "L'autre et sa langue : la langue du refus", le dit sans ambages lorsqu'il écrit« néantiser [...] l'Autre, c'est refuser sa culture ; c'est ne pas l'admettre comme un substrat humain ; c'est lui refuser toute appartenance à l'Humanité »21(*). Cet écart de conduite qu'est le refus d'appartenance à l'humanité dont l'on fait preuve vis-à-vis de son semblable, justifie la mise à mal de la stabilité sociale. Pourrait-on asserter, dès lors, que désagrégation identitaire est synonyme de crises en Afrique ou du moins, qu'elle en est le moteur. À preuve, nombre de conflits dont ont été victimes des sociétés africaines, trouvent leurs justifications dans les crises identitaires.

De surcroît, le conflit chronique, dont parle Honneth dans La lutte pour la reconnaissance, n'est, au fond que la manifestation d'une crise de la reconnaissance individuelle au sein d'une même société. Au fait, dans une société pluraliste, « les rapports d'estime sociale sont l'enjeu d'une lutte permanente, dans laquelle les différents groupes s'efforcent sur le plan symbolique de valoriser les capacités liées à leur mode de vie particulier et de démontrer leur importance pour les fins communes »22(*).Ici, l'estime sociale apparait comme la condition indispensable à la reconnaissance de l'importance des capacités et des qualités del'autre dans la construction d'une société commune.

Toujours est-il quel'estime de soi, qui implique le respect de l'autre, demandela confiance des autres dans une dynamique de solidarité entre les particularités. Cela s'avère nécessaire dans la mesure où la solidarité entre membres d'une même communauté reste « conditionnée par les relations d'estime symétrique entre sujets individualisés (et autonomes) »23(*).C'est justement cette estime de soi, la confiance en l'autre, quisemble faire défaut aux populations africaines. La crise de la reconnaissance survient lorsque, pour un intérêt particulier, un groupe se proclame le plus habilité à décider du sort de tous les autres. Elle est la manifestation d'un mépris, du rabaissement d'un individu ou d'un groupe d'individus à qui l'ontend à ne reconnaître aucun droit. L'exemple qui illustre cela, c'est bien le cas libyen. Au-delà du simple affrontement entre Tripoli (dominé par des islamistes) et Tobrouk (dominé par des laïcs fidèles à Mouammar Kadhafi), les ressortissants du sud de la Lybie (Touaregs, Toubous) reprochent aux autorités de Tripoli de les marginaliser. Le rapport entre cette crise inter-libyens, parmi tant d'autres crises en Afrique,etle terrorisme réside en le fait que la première a servi de support au second.

La marginalisation qui, provoquant des remous, caractérise l'effondrement de la reconnaissanceetest synonyme de trouble social en Afrique. C'est alors le lieu, ici, d'établir un lien entre mépris identitaire et les facteurs socioculturels des violences terroristes puisque les différentes représentations se nourrissent des convictions socioculturelles.

II. Des facteurs socioculturels du terrorisme en Afrique 

À bien observer, les sociétés africaines contemporaines dans leur déploiement phénoménal, on s'aperçoit de la prédominance de la violence ; en ce sens qu'elles se laissent gouverner par les conflits. Au fait, dans ces sociétés, les acteurs sociaux (constituant la figure centrale des rapports sociaux), se trouvent parfois dessaisis de leur capacité à instruire, jusqu'à son terme, le procès de la société ; ou encore interviennent-ils pour que ce procès ne puisse s'énoncer dans les termes où il était défini jusqu'alors. C'est dire que les violences relèvent du projet humain de vivre ensemble ou de l'ultime spasme d'un mouvement social qui a échoué. Face à cet échec régulier du projet de vivre en communauté, la question du terrorisme en Afrique peut donc ne pas être étonnante. Reste à savoir tous les facteurs socioculturels qui contribuent à son avènement. En outre, le terrorisme serait-il inhérent à la configuration des sociétés africaines ? Autrement, l'Afrique aurait-elle du mal à adopter raisonnablement les cultures étrangères24(*) et les principes du vivre en commun ? Ou tout simplement, l'état de pauvreté des sociétés africaines justifierait-il le taux de criminalité en Afrique ?

En Afrique, lorsqu'on parle de criminalité, on pense avant tout, à ces milliers de bras valides qui, peut-être parce que n'ayant pas reçu de formations efficientes capables de leur garantir des emplois stables, sont à la merci des idéologues tous azimuts. Venus pour la plupart des campagnes pour tenter leurs chances, ces jeunes sont confrontés, dès leurs arrivées, aux dures réalités urbaines : manque de travail qui implique le manque d'argent et ses revers. Faut-il alors reculer ou faut-il braver les obstacles dans l'espérance de l'intervention d'une divinité généreuse ? Le plus souvent, le second choix s'impose à ces aventuriers. C'est justement à partir de cet instant que les « FreedomFighters barbus »25(*)parviennent à les récupérer et à en faire des jihadistes.

Il est donné de constater que les populations africaines sont majoritairement pauvres. Et, du fait de leur pauvreté, elles développent un esprit de mendicité et d'assistance qui semblent trouver satisfaction auprès des catalyseurs ou idéologues de tout bord ou acabit. Ces idéologues s'activent autour d'une catégorie de personnes socialement et financièrement influentes. Ils constituent la classe moyenne pieuse telle que décrite par Kepel etcherchent à bouleverser les principes sociaux établis. Le passage suivant de Gilles Kepel prend alors son sens :

Mais le sentiment d'expansion irrésistible qui galvanise alors cette idéologie et les mouvements qui s'en réclament est basé sur des fondements sociaux extrêmement fragiles. L'alliance entre la jeunesse urbaine pauvre et les classes moyennes pieuses, scellée par les intellectuels qui élaborent la doctrine islamiste, résiste mal à des affrontements de longue haleine contre les pouvoirs établis26(*).

Bien que résistant difficilement aux affrontements contre les pouvoirs établis, cette nouvelle alliance, entre bourgeois et jeunesse en quête de pain quotidien, favorise le développement de la criminalité et, par devers, croît l'effectif des jihadistesau grand désarroi des populations livrées à elles-mêmes. Cette alliance - constituant un canal pour les moudjahidines, puisque fortement marquée par le recrutement de jeunes gens - s'explique à la suite de Kepel et avec Frédéric Encel, par la misère économique qui est perçue comme un facteur aggravant les violences sociales et la criminalité.

Basée sur le manque de ressource financière et sa quête, la criminalité chez la jeunesse africaine y trouve alors son fondement. L'on est donc tenté de répondre,par anticipation, à la question : "pourquoi y'a-t-il terrorisme en Afrique ?" par la formule ci-après : il y a terrorisme en Afrique parce qu'il y règne une misère croissante. S'affirmant ainsi, l'on peut être taxé d'établir une corrélation abusive entre pauvreté et criminalité. C'est pourtant cela, un exercice auquel il ne faut pas s'attarder, il semble. La pauvreté n'est pas une condition suffisante pour justifier le terrorisme. Pour preuve, « tous les gens pauvres ne basculent pas dans la barbarie, et à l'inverse la position de nanti ne garantit en rien d'y échapper »27(*). Bien d'autres facteurs, tels que la psychanalyse28(*)et l'endoctrinement, pourraient illustrer, au mieux, les motivations aux massacres. L'apocalypse du 11 septembre 2001 est édifiante. Selon Encel, bien que l'économique favorise l'extension

non seulement des violences sociales et de la criminalité au sein d'une société, mais du bellicisme d'un régime politique qui recrutera à loisir de pauvres hères pour ses troupes d'invasion ou de répression, elle n'explique pas à elle seule le phénomène, contrairement à l'idée que nombre de militants tiers-mondistes cherchent à imposer29(*).

Les États ont beau accroître leurs revenus et améliorer leur balance commerciale, ils ne sont pas à l'abri de la violence. La croissance économique, pour Encel, n'est qu'un plus,une condition nécessaire mais pas suffisante pour le maintien ou le renforcement d'un état de paix ; mêmesi le manque de capital constitue une gangrène et une menace pour le maintien de l'ordre social. C'est alors reconnaitre à la fois, bien que l'énonçant différemment, avec Kepel et Encel que la condition sociale, économique défavorable des africains peut justifier la vulnérabilité des sociétés à la criminalité et donc à l'insécurité.

Cependant, si tant est que la condition économique ne suffit pas, à elleseule, à expliquer la criminalité en Afrique, à quoi faut-il alors s'en tenir ? C'est alors qu'on cherchera à saisir d'autres fondements sociaux des violences et plus particulièrement des violences terroristes en Afrique. La configuration des sociétés serait-elle alors en déphasage avec la paix ?

En amont, il faut signifier que toutes les sociétés, sans en avoir forcément conscience, développent une certaine dynamique sociale qui, si on n'y prend garde, finit par mettre à mal la stabilité. On pourrait même parler de la nature ou de l'habitude humaine qui est de développer une sorte de rapport conflictuel entre individus ou entre groupes d'individus. Il s'agit de la constitution de groupes ou de sous-groupes au sein même de nos démocraties dites tolérantes ou laïques. Et ces regroupements, parce qu'encourageant la radicalité de l'antagonisme amis-ennemis, aboutissent à détours sinueux, des circonvolutions sociales complexes, des circonstances politiques favorables au massacre. C'est justement ce que décrit Jacques Semelin, en ces termes :

Les dynamiques sociales qui peuvent conduire au « nettoyage ethnique » et au génocide sont d'ailleurs à l'état latent dans les cours de récréation de nos écoles ou les quartiers de nos cités. (...) les jeunes n'ont-ils pas tendance à se constituer en « clans », en bande, avec ce fort sentiment d'appartenance : « nous » contre « eux » ? Et nos aspirations religieuses ne se fondent-elles pas sur une recherche fondamentale de pureté contre un monde perçu comme impur ? » Les logiques des violences qui aboutissent au massacre s'appuient sur tout cela30(*).

Pour Semelin en effet, les violences sociales proviennent en partie d'une configuration sociale inadaptée aux principes de la laïcité.

En aval, Semelinreconnait qu'aucune société, qu'aucun peuple n'est prédestiné au massacre. Il faut donc une volonté politique pour qu'advienne le massacre. Il revient alors aux sociétés africaines de se repenser, de rectifier déjà l'habitude des enfants dans les cours de récréation de nos écoles en inculquant certaines valeurs du vivre ensemble afin d'en faire des citoyens de demain.

L'économie, certaines habitudes érigées en mode de vie,semblent contribuer à la mise en marche de réseaux de violences. Ces violences, souvent apparaissant sous la tutelle de rivalités tribales, servent au terrorisme de support en ce qu'ils constituent une raison suffisante pour s'adonner à la violence. Mais, le manque de capital, les habitudes que l'on développe depuis l'enfance, à savoir la formation de groupuscules pour affronter l'adversité, suffisent-ils pour justifier le terrorisme en Afrique ?

CHAPITRE 2 : CRISE DE LA REPRÉSENTATIVITÉ ET NAISSANCE D'UNE TYPOLOGIE NOUVELLE DE LA VIOLENCE EN AFRIQUE

L'être social n'est pas rebelle par nature. En ce sens, les révolutions sont des événements antisociaux qui sont l'indice d'un mécontentement extraordinaire vis-à-vis de telle ou de telle forme de société. Les révolutions ne surviennent pas au hasard. La révolution n'est acceptable que dans une société qui subit des changements de structure radicaux et qui a besoin d'autres mutations31(*).

Cela dit, on peut attester que le terrorisme est l'expression d'une identité sociale ou communautaire en perdition, refoulée, occultée, et dont le moment terroriste serait l'indice d'un retour en pleine surface. Ce faisant, le terrorisme semble n'être que la seule issue possible lorsque toutes les pistes ont été exploitées. À savoir, des négociations, des itinéraires de révolte ou de révolutions. En fait, la révolte, en termes de soulèvement, d'opposition contre l'autorité préétablie, vise un changement brusque et violent dans la politique et le gouvernement d'un État. À la différence des terroristes, les révoltés se font entendre, revendiquent publiquement des droits. À titre d'illustration, l'on se souviendra, du célèbre discours del'ex-président burkinabé, Thomas Sankara à l'ONU,durant lequel il précise, parlant de la révolution, qu'  

Il nous fallaitdonner une âme idéologique aux justes luttes de nos masses populaires mobilisées contre l'impérialisme monstrueux. À la révolte passagère, simple feu de paille, devrait se substituer pour toujours, la révolution, lutte éternelle contre toute domination. D'autres avant moi ont dit, d'autres après moi diront à quel point s'est élargi le fossé entre les peuples nantis, et ceux qui n'aspirent qu'à manger à leur faim, boire à leur soif, survivre et conserver leur dignité. Mais nul n'imaginera à quel point, le grain du pauvre a nourri chez nous, la vache du riche !(...) l'esclave qui n'est pas capable d'assumer sa révolte, ne mérite pas que l'on s'apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s'il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d'un maître qui prétend l'affranchir. Seule la lutte libère (...) Gloire éternelle aux peuples qui décident de s'affirmer pour leur dignité.32(*)

De ce point de vue, on peut dire qu'en Afrique, les révolutions surviennent le plus souvent, suiteau désir de possession des biens, à l'exclusion, à la mauvaise gouvernance, à l'état critique du développement, et à la crise de la représentativité notamment. C'est principalement sur ce dernier moteur de révolte que porteral'examendes troubles sociaux en Afrique. Il s'agit de questionner en direction des effets du désir de représentativité dans la gestion des territoires africains, dans la mise à mal des rapports interhumains. Mais avant, à quoi renvoie la notion de représentativité ?

Deux approches nuancéesnous intéressent parlant de représentativité. Elle désigne une attitude et une proportion. En tant qu'attitude, la représentativité désigne la lucarne offerte à un groupe pour s'exprimer ou pour agir. Comme telle, elle peut s'entendre en termes de pouvoir législatif conféré à un ou des représentant(s), des syndicats ou tout autre regroupement né de la volonté délibérée des individus dans la poursuite d'un intérêt commun. En tant que proportion significative, la représentativité désigne le taux, le pourcentage d'un groupe de personnes dans un groupe plus vaste. Par ailleurs, elle est, selon Fernand Braudel et Encel comme on peut le lire dans Horizons géopolitiques,

une perception collective identitaire présente sur des « temps longs », c'est-à-dire sur des siècles ou de dizaines de siècles. C'est la façon dont un peuple, une partie de celui-ci ou des milieux ou cercles plus restreints, perçoivent et véhiculent leur histoire collective, leur(s) territoire(s), les histoires, identités ou territoires des Autres.33(*)

Il s'agit là de concevoir la représentation comme une perception identitaire à la fois collective et individuelle. Elle, la représentativité, peut être mise en rapport du coup avec la démographie qui permettra deconnaitrela place accordée ou non à tel ou tel autre groupe ethnique.

Dans son déploiement en tant que blâme, remontrance ou crime, la représentativité relève d'une dimension victimaire. C'est principalement dans cette approche que nous analyserons la crise de la représentation en Afrique avec ses conséquences sur la stabilité sociale. La représentation est-elle un problème en soi ? N'est-ce pas qu'en vérité, la pluralité ethnique est au fondement même des représentations en Afrique et, par dévers, des révoltes qui aboutissent au terrorisme ?

I. De la crise de représentativité aux violences terroristes

La représentativité entretien un rapport très étroit avec la démographie. En tant qu'analyse scientifique de l'importance numérique d'une société et de la densité géographique des liens de parenté, de la condition physique, de la race, des croyances dans cette même société, la démographie apparait parfois comme une force contre la stabilité sociale.À preuve, alors qu'elle se veut une toponymie(étude de l'origine des noms de lieu) ou une maitrise des populations pour une meilleure distribution des ressources, la démographie sur l'espace africain, dans son désir de spécifier les liens de parenté, devient le lieu d'expression du primat, de la suprématie de certains peuples sur d'autres. Cette réalité pose de véritables problèmes liés à la représentativité qui constituent de réelles préoccupationsphilosophiques.

En effet, la représentativité, dans le sens de la proportion, devient problématique dans la mesure où le taux de représentants de certains groupes ethniques ou de certaines appartenances sociales, parce qu'élevé, joue en la faveur de ceux-ci au grand désarroi des autres sous-groupes. Alors, les identités locales fortes et enracinées, pouvant servir de futurs leviers séparatistes ou sécessionnistes,frisent les rapports sociaux et donnent lieu, par la suite, à des soulèvements populaires de la part des minorités qui aspirent à une revalorisation, mieux,à une reconnaissance. Cela dit, suite à une faible proportion ouune quasi-absence d'une communauté dans la gestion des affaires politiques, par exemple, engendrant frustration et dégoût, les minorités opprimées, trouvent des moyens pour exprimer leur mécontentement. Elles procèdent par des soulèvements populaires conduisant aux actes violents ou guerre de sécession. C'est le cas de la révolte touareg au nord-Mali qui illustre au mieux cette réalité. Jean Fleury dira au sujet de la situation au Mali que

le poids des ressentiments ethniques dûs[dus] au passé est particulièrement lourd et ne saurait être négligé. La colère des « sudistes » contre les anciens esclavagistes du Nord et des nordistes contre leur maintien dans la misère par les autorités originaires de Sud est à l'origine des problèmes actuels34(*).

En effet, la minorité touareg malienne, privée de certains privilèges et commodités (tels que l'accès à l'eau potable, à l'éducation efficiente, à l'électricité, pour ne citer que cela) indispensables au développement de leurs zones, s'érige, en une bande armée et politique pour se faire entendre. Son but à travers cette séparation d'avec l'État malien, c'est de bâtir une société touareg nouvelle quiréponde au mieux aux exigences locales. Autrement dit, la révolte contre l'État malien menée principalement par des avant-gardistes touaregs, à l'instar de bien d'autres révoltes, résultant de mauvaise gouvernance ou de crise de la représentativité, est une réalité qui justifie la menace terroriste en Afrique.

Au pire des cas, lorsqu'on en arrive à une représentation des hommes, la représentation donne lieu à des violences asymétriques35(*)visant l'extermination peu ou proudes groupes à grande influence que l'on se sait incapable d'affronter directement. Ainsi, le désir de représentativité -en termes d'isolement de communauté au sein d'un ensemble plus vaste - occasionne des ségrégations ethniques ou religieuses. Pourtant, les sociétés africaines sont majoritairement bâties sous ce modèle de représentationà la fois ethnique ou culturelle et religieuse. Au fait, dans le cas précis de la représentation en termes de remontrance des uns contre les autres, dans des sociétés africaines à démographie mixte, on se représente l'autre avec dédain, méfiance. Cela augmente le risque de crises ou de guerres au sein de ses sociétés.

On comprend donc que « Les pays dans lesquels le groupe ethnique le plus important représente 45 à 90 % de la population, se trouvent confrontés à un risque de guerre civile de moitié supérieure aux autres »36(*). Cela simplement parce que l'ethnie majoritaire voudra faire de sa supériorité numérique un prétexte pour s'imposer aux autres à travers sa langue, sa culture. Les pratiques culturelles qui prédominent dans ces sociétés et qui tendent à être le style de vie, du fait de leur non-applicabilité à toutes les couches sociales, finissent par créer des tensions entre " I-dentités". On assiste alors à une crise identitaire née de celle de la représentativité.

Aussi, voudrons-nous insister sur le type de représentation que constitue la négativation de l'autre, de ses croyances, de son origine, de sa culture. Cette représentation vise à nier à l'individu une originalité, une authenticité au point de ne le considérer comme un sous-homme. On comprend mieux ce fait lorsqu'on lit Encel parlant de la belligérance entre israéliens et sociétés arabes moyen-orientales. Pourlui, en effet,

Rien n'est moins anodin que les représentations croisées et souvent mimétiques des juifs israéliens et des arabes palestiniens : les premiers se représentent les seconds comme des arabes, les seconds se représentent des juifs comme des membres d'une religion et non d'un peuple. Ce fossé abyssal de perception identitaire de l'Autre grève pour l'heure toute chance de paix durable37(*).

À partir de cette analyse de la situation israélo-palestinienne d'Encel, on peut dire que le fossé abyssal de représentation identitaire et religieuse,qui ne met,jusque-là, en marge aucune société, peut justifier les menaces terroristes en Afrique. Les mouvements anti-balakaen Centre-Afrique, l'ex-Bokoharamqui s'est converti en État Islamique en Afrique de Ouest (E.I.A.O), ne sont autres que la manifestation de représentations identitaires et religieuses. Mais, à dire vrai, le problème de la représentativité n'est-il pas contenu dans celui même de la pluralité ethnique en Afrique ?

II. Pluralité ethnique, un problème majeur en Afrique

La pluralité ethnique, ladifférence entre groupes ethniques,est-elle, pour l'Afrique une richesse au sens où Saint-Exupéry l'entend ? Autrement, la différence comme source de richesse tient-elle toujours dans une Afrique génocidaire, fratricide, tribale? Mais, en quoi est-il réel que la pluralité ethnique constitue-t-elle, pour l'Afrique, une aubaine ?

D'un point de vue afro-optimiste, la pluralité ethnique, plus qu'un simple avantage pour l'Afrique, constitue l'essor de cette société. Elle est l'épine dorsale de tout progrès social car, garante de l'harmonie sociale. Comment cela peut paraître autrement si la beauté d'un tapis réside dans la pluralité de ses couleurs, s'il en va ainsi de l'humanité selon l'auteur de Aspects de la civilisation africaine38(*) ? Comment ne pas comprendre du coup la portée et l'actualité de la différence-richesse Saint-exupéryennedans la configuration sociale africaine ? Dire cela, c'est reconnaitre que la pluralité ethnique est un avantage pour nos sociétés africaines. Telle que pensée, la pluralité ethnique donne à l'humanité tout son éclat, tout son sens et sa consistance dans la mesure où« D'une manière générale, la diversité ethnique et religieuse réduit le risque de conflit »39(*) selon les rapports de la Banque Mondiale. Bien que cela, prévient la Banque Mondiale,

une diversité ethnique plus restreinte peut cependant poser problème. Si dans une société pluriethnique, le groupe le plus important forme une majorité absolue, le risque de guerre civile augmente d'environ 50%. Or près de la moitié des pays en développement présentent cette caractéristique40(*).

Qui plus est, à en croire les résultats des recherches de la Banque Mondiale, la diversité ethnique et religieuse relève d'une double dimension : l'une civilisatrice, et l'autre déshumanisante. Elle est à la fois un avantage pour le maintien de l'ordre social dans, rares des cas, et une mésaventuredansla recherche de la paix pour nombre de sociétés africaines. En tant que facteur contribuant à l'harmonie sociale, la pluralité se veut respect scrupuleux des normes juridiques, politiques, socioéconomiques. Elle se veut ainsi conservatrice des droits de l'individu aux valeurs de liberté (avec ses exigences) et du bonheur.

Dans son versant déshumanisant, la pluralité ethnique est à concevoir dans une logique de négation de la diversité. On dira dans ce cas que si tu diffères de moi, si tu n'es pas moi41(*), donc tu n'es pas avec moi, alors tu es l'autre et donc tu es contre moi. Les auteurs de Qui a peur du tiers monde ?, expliquent mieux ce fait.

Pour eux, « En fait, l'expérience nous enseigne qu'il n'est pas facile pour un individu de trouver d'autres points de vue que ceux qui sont les plus communément acceptés par la société, le groupe ou la culture auxquels il appartient »42(*).Du coup, surgit le massacre culturel. Mais comment à partir de telle tautologie autour de l'ethnie arrive-t-on au massacre des identités, aux suicides, au terrorisme ?

Le terrorisme passe toujours par l'identification d'un adversaire social, d'un référent dont il tire sa légitimé et d'un ensemble de principes qui en assurent la cohérence et les limites temporelles. Dans une perspective réaliste, il semble d'une évidence que là où il y a diversité, il y a nécessairement divergence, discordance en termes d'antagonisme. Cela parait assez logique pour que l'homme, dans sa volonté de se réaliser, cherche sans cesse à convertir l'autre afin de voir en cet autre, sa propre image, son reflet. Cette volonté partagée de conversion et de reconversion de l'autre est au fondement des antagonismes dans nos sociétés africaines pluriethniques.

Qu'il s'agisse de la diversité ethnique ou religieuse, l'un des problèmes majeurs de l'Afrique est bien la non maitrise de la différence-richesse dont parlait Saint-Exupéry et à sa suiteAmadou Hampaté Ba. Est-ce à dire ici que si l'homme était un, si la diversité n'était pas efficiente, il n'y aurait pas de trouble ? Suffirait-il alors d'être une société mono-culturaliste pour éviter les troubles ? La nature humaine n'est-elle pas, au fond, violente ?

En réalité, la diversité ethnique qui encoure la diversité des croyances, n'est qu'une condition, elle-mêmeinsuffisante,du déploiement de la violence en Afrique. Elle joue sa part en tant que moteur de revendications sociales tous azimuts. Donnant lieu parfois à des frustrations liées à la négation de certains groupes ethniques, la pluralité des ethnies en Afrique est le foyer de belligérances apparaissant parfois comme le manifeste d'une crise de la reconnaissance. On peut justifier l'avènement du terrorisme en Afrique dès lors par le fait que des groupes, de cultures, se sentant lésés dans la configuration de la société, décident de régler leurs comptes avec des moyens apparemment anodins, mais manifestement puissants ; apparaissant ainsi une nouvelle forme de guerre.

Cependant, quel que soit le rôle de la pluralité ethnique dans l'avènement de cette forme de guerre qu'est le terrorisme en Afrique, ne relèverait-t-ilpas, enclair, d'une stratégie géopolitique et des enjeux politiques et idéologiques qu'il conviendrait d'interroger ?

DEUXIÈME PARTIE : STRATÉGIES GÉOPOLITIQUESET ENJEUXDU TERRORISME EN AFRIQUE

D'Yves Lacoste, on retiendra que « l'articulation des connaissances relatives à l'espace est un savoir stratégique, un pouvoir »43(*).Cette assertion fait dépendre l'espace d'un souci de stratégie. Mais qu'est-ce que la stratégie ? Cette question va nous permettre, pour pasticher cette formule que nous tenons de Michel Serres dans La guerre mondiale, à forer un trou aveugle que les égoutiers nomment regard, et ce regard sera porté vers l'implication des stratégies géopolitiques dans la propagande et dans la lutte contre le terrorisme en Afrique. En d'autres termes comment les stratégies géopolitiques contribuent-elles au développement des violences terroristes en Afrique ? Comment ces limites peuvent-elles être érigées en avantages ?

CHAPITRE 1: TERRORISME ET STRATÉGIESGÉOPOLITIQUES

Il faut signifier, d'ores et déjà, la pluralité de définitions du concept de stratégie. Le plus souvent, le terme s'apparente à la doctrine d'une institution militaire ou d'un État, à une théorie, à une science ou à une analyse. En tant que théorie, la stratégie consiste en la mise en place d'un dispositif visant à dissuader un adversaire pendant le conflit ou à le dissuader d'une éventuelle initiative de conflit. En cela, la lecture d'EdwardLuttwaks'avère opportune. Pour lui, en effet, « "Si tu veux la paix, prépare la guerre" (...) "La meilleure défense, c'est l'attaque" »44(*).Ici, la stratégie se conçoit en termes de conduite et de conséquences des relations entre humains dans le contexte d'un affrontement armé effectif ou éventuel. « L'exemple le plus évident de cette règle est toute la conception de la « dissuasion nucléaire »si bien assimilée aujourd'hui par tout un chacun... Se tenir prêt à attaquer est la preuve que l'on nourrit des intentions pacifiques45(*)

Cela dit, la stratégie nous apparait, à la suite de Luttwak, comme « L'art de la dialectique des volontés employant la force pour résoudre leur conflit. »46(*)Cette conception du stratège américain Luttwakfait de la stratégie le domaine de l'activité pratique de « la plus haute direction militaire et politique, de commandement suprême et du grand quartier général ». Elle accompagne les États et leurs forces armées à la guerre et dans la défense de leurs territoires. La stratégie peut ainsi s'accommoder avec la notion de géopolitique en ce sens qu'elle stipule « un déploiement particulier des forces, mais encore le sort des territoires exposés au danger »47(*).Cela est également du ressort de la géopolitique entendue comme « l'analyse des rivalités de pouvoir (toute sorte de pouvoir) sur du territoire ».48(*)Et, s'il est évident que la géopolitique cherche à identifier les acteurs et les enjeux de pouvoirs au sein d'une zone donnée, cela revient à la présenter avant tout comme une nouvelle forme de gestion et de sécurisation des États, mais également comme une politique de prévention et de rectifications des ambitions politiques.

À ce titre, la géopolitique en tant que la science de l'État - État en tant qu'organisme géographique ou comme entité dans l'espace - observe fermement l'unité étatique et veut contribuer à la compréhension de la nature de l'État. Cela laisse entrevoir son objet en tant qu'étude des interactions entre l'espace géographique et les rivalités de pouvoirs qui en découlent. La géopolitique est le terrain de manoeuvre de la puissance locale, régionale ou mondiale. Son but n'est pas seulement de décrire et d'analyser des enjeux et conflits « objectifs », elle traite des conflits relatifs à des territoires. La stratégie géopolitique stipule que « l'emploi éventuel de la force suppose la connaissance préalable du milieu dans lequel les unités doivent agir ainsi que la nature de la menace »49(*).Christian Bouquet explique mieux cela. Pour lui, la géopolitique se donne pour mission « une lecture commentée et critique des événements qui ont précipités le pays dans le désastre »50(*).Il s'agit, pour le signifier autrement avec Yves Lacoste, non seulement de

cet ensemble de représentations cartographiques et de connaissances très variées envisagées dans leur rapport à l'espace terrestre et aux différentes pratiques du pouvoir formant un savoir clairement perçu comme stratégique ou comme instrument de pouvoir51(*),

maisd'uneintellectiondes rivalités de pouvoir sur les territoires. Dès lors, la notion de stratégies géopolitiques permet d'illustrer les rapports de forces, les jeux d'intérêts, existants sur des espaces géographiques et pour analyser les relations inter-États. Disons aussi que la stratégie géopolitique concernelarelation entre les Nations basée sur l'échange, le commerce, la globalisation. Ce qui est contredit par la mise en séquences des nations caractérisée par la défense des intérêts égoïstes, la compétitivité entre les Etats. La stratégie géopolitique prend ainsi une apparence communautariste et une application marquée par le jeu d'intérêts économiques égoïstes. Ce qui justifierait le terrorisme comme guerres d'intérêts économiques et géographiques.

Si la stratégie géopolitique suppose donc l'intellection des rapports de forces- étatiques (en ce qu'elle est l'apanage des États) et militaires(en ce qu'elle est l'art de la dialectique utilisant la force pour résoudre les conflits) - comment comprendre son implication dans le phénomène du terrorisme en Afrique ? Si le prix de la paix est la guerre, s'il faut prévenir une éventuelle attaque par le surarmement, comment expliquer l'avènement du terrorisme en Afriqueet celamalgré l'implication de la plus grande et de la plus puissante armée mondiale (en ce jour) les États-Unis, dans la lutte contre le terrorisme mondial ? Sûrement, les rivalités politiques en Afrique en sont pour quelque chose.

I. Rivalités politiques et émergence du terrorisme en Afrique

Le terrorisme, il convient de le signaler, est caricaturé voire manifesté dans la mentalité populaire. Du terrorisme, tout le monde a ses convictions, ses attentes et ses aspirations. Mais au-delà de l'être-là-immédiat de cet acte, de son immédiateté, quelque chose de fondamental se manifeste. C'est que le terrorisme, en tant que l'expression de la terreur censée durer et perdurer, peut se justifier par la recherche du bonheur du plus grand nombre et parait pour ainsi dire, comme un acte salvateur, ou mieux, de salut face à certains systèmes archaïques ou totalitaristes qui subordonnent les libertés individuelles et collectives. La violence advient lorsque l'État fait de la domination sa fin dernière, lorsqu'il tient le citoyen par la crainte52(*).

Dans ce contexte, on s'aperçoit que le terrorisme ne nait pas ex-nihilo. Il pourrait être le produit d'une mauvaise gouvernance, de l'exploitation abusive de l'homme par son semblable, d'un sentiment de ras-le-bol collectif ou individuel. Cela ne donne-t-il pas à penser autrement ? Bien évidemment. Car, parler du rapport des citoyens à la politique,comme contribuant à l'avènement du terrorisme, revient, avant tout, à présenter le terrorisme comme un préalable au contrat social ou comme le manifeste de la rupture de ce contrat, le plus important demeurant la valorisation de l'humain.

Mais, quelle est cette revendication humaniste ou humanisante qui met paradoxalement et vraisemblablement fin à de nombreuses vies humaines, à travers une violence indescriptible ? Serait-ce la manifestation de l'agressivité humaine ou celle de sa préférence de la guerre à la paix ?

Qu'il s'agisse de violence d'un État qui cherche à asseoir sa suprématie, de la bestialité ou d'une révolution contre l'État pour établir une justice, la violence terroriste, à l'instar de toute autre sorte de violence, ne saurait tout de même être salutaire. Elle engendremisère et désespoir même si elle demeure, pour certains, une lucarne appropriée. On comprend dès lors l'auteur de Paix et guerre entre les nations53(*)lorsqu'il dit que nul Homme n'est assez dénué de Raison pour préférer la guerre à la paix. Qui plus est, dans une logique terroriste,« nul ne sait avec qui négocier »54(*)car les normes juridiques du contrat s'ébranlent face à « la barbarie vengeresse »55(*). Les rivalités politiques peuvent justement être analysées en Afrique sous l'angle d'une barbarie vengeresse se présentant sous la forme flagrante d'une rupture du contrat mais également du lien social. La raison, simplement parce que l'accession au pouvoir politique semble le seul moyen légal offert aux dirigeants et à leurs alliés, de se venger d'une domination ou d'une quelconque injustice qu'ils auraient subir pendant que la gestion des affaires revenait à d'autres groupes. Et, comme on peut le voir chez Habermas, « en mettant fin au compromisde l'État social, on fait resurgir les crises qu'il avait permis de contenir.»56(*)

Autrement dit, la barbarie vengeresse qui rompt les compromis sociaux en Afrique occasionne la résurgence sous diverses formes de crises qui auraient pu être évitées dans un cadre régulé autour d'un État-nation. C'est dire et reconnaitre que les rivalités de pouvoirs politiques au sein de nos pays africains défavorisent le maintien de la paix par des tendances à la « désintégration sociale ». À coup sûr, on en arrive à un recrutement de mercenaires étrangers ou locaux pour des desseins « politiques de « démantèlement » qui portent préjudice à la solidarité sociale et mettent la stabilité démocratique de la société à rude épreuve. »57(*)

Ainsi, au-delà de tout cliché médiatique ou de toute méprise, on comprend icicomment les rivalités de pouvoirs en Afrique donnent lieu au terrorisme sous la forme de mercenariat avec pour seule ambition, la destitution du pouvoir ou sa mise en cause. Cette même réalité,entermes de désintégration sociale, peut être l'oeuvre d'un tyran cherchant à monopoliser le pouvoir. On parle alors du terrorisme d'État exercé par l'Etat, qui use de façon excessive de son monopole de la violence légitime.Il peut également désigner, le fait par ce tyran, afin d'obtenir une période de transition et échapper aux normes juridiques ou constitutionnelles, de faire croire à l'idée d'une instabilité.

À ce sujet, Michel Walzer écrit « Terroriser des individus ordinaires est avant tout l'oeuvre de la tyrannie, comme l'a dit Aristote : « Le premier but des [tyrans] et la fin qu'ils poursuivent est de briser le moral et la force de leurs sujets »58(*). « Ils cherchaient à détruire le moral des civils. »59(*) Autrement dit, par la terreur, les dirigeants politiques parviennent à leurs fins. Ils créent un état d'esprit, une psychose dont le but est de saper le moral des citoyens. Du coup, dans cette ambiance de psychose, d'incertitude, craignant plutôt pour leur survie qu'un contrôle de budget, les populations se dispensent des audits au grand plaisir des despotes. On peut donc être tenté de croire que les moyens politiques déployés dans le traitement du terrorisme répondent au mieux aux seules ambitions politiques.

On peut dès lors se demander, quels intérêts a-t-on à abriter chez soi le terrorisme ?Comment expliquer, le fait par un État, de s'auto-assaillir ? Est-ce, ce fait, prémédité ? Assurément, il relève de la non-maitrise de ce qu'il convient d'appeler chez Yves Lacoste, la description méthodologique des espaces, tant sous les aspects « physiques », que sous leurs caractéristiques économiques, sociales, démographiques, politiques. C'est-à-dire que la méconnaissance de l'espace qu'est la géographie conduit inéluctablement à son envahissement par des regroupements d'individus en inharmonie avec la stabilité.

De ce point de vue, on peut justifier la présence de terroristes sur les sols africains par bien d'aspects, au-delà de la simple volonté d'autodestruction des leaders africains. Il peut s'agir d'une mauvaise appréhension de son espace. Ainsi, la carte en tant que « la production des officiers pour les officiers »60(*),c'est-à-dire en tant qu'instrument de guerre, doit intéresser l'appareil d'État « pour le contrôle et l'organisation des hommes qui peuplent son territoire et pour la guerre.»61(*)De la sorte, la carte apparait aux yeux d'Yves Lacoste comme un « tactique », c'est-à-dire une stratégie pour contenir les violences, un moyen de domination indispensable, de domination de l'espace.

Les rivalités politiques doivent, dans un tel contexte, porter sur la maîtrise de stratégies impliquant une certaine connaissance politique et mathématique de l'aire géographique sur laquelle on entend exercer sa domination. Ce qui implique la maîtrise parfaite de la zone d'influence et par revers, à avoir une influence sur d'éventuel mouvement de révolution ou d'attaque tel le cas du terrorisme aujourd'hui. L'on rivalise le pouvoir en Afrique à des fins personnelles en oubliant, du reste, les exigences que cela comporte. Ce qui justifie d'ailleurs, le fait par les prétendant à la magistrature suprême de nos États, de se faire parrainer par les puissances occidentales « en droit ? » de choisirqui62(*) doit gouverner63(*).Il s'agit là, d'une géostratégie de la mainmise occidentale sur les affaires africaines : l'autre nom du néocolonialisme.

II. D'une géopolitique néocolonialiste à la guerre asymétrique

Par géopolitique néocolonialiste, nous entendons parler du rapport des peuples africains, censés jouir de leur indépendance qui n'est pourtant que formelle, aux fils et petits-fils de colonisateurs. Il s'agit, de tenter une intellection de la géopolitique à partir du passé africain. Cela parce que, « comme toujours, seule une bonne connaissance de l'histoire permet d'éclairer les problématiques géopolitiques. Remontons donc aux sources du mal africain, l'isolement, la traite des Noirs et la colonisation »64(*)pour y situer la cause profonde du terrorisme en Afrique comme un aspect de ce mal africain. Cela permettra de reconsidérer la géopolitique en termes de jeu d'intérêts économiques et géographiques pour les puissances occidentales. Le sous-sol africain demeurant riche en ressources naturelles profitables au monde entier, le colonialisme ne fait que commencer.

Le contexte des rivalités coloniales, celui de mondialisation et de globalisation, continue d'affecter la relation de l'espace géographique et la politique. Ainsi, la géopolitique des nations, prenant en compte l'espace politique international, serait devenue mondiale. Et, c'est justement à travers cette dernière caractéristique qu'il faudrait scruter de près les enjeux géopolitiques du terrorisme en Afrique. La prise en compte de la diversité des acteurs géopolitiques, nationaux et internationaux, opérant en Afrique et par ricochet des intérêts complexes, est à la base des engagements des uns auprès des autres, surtout dans le combat pour le siège présidentiel. Ceci nous oblige à l'examen de la géopolitique de l'espace mondial comme élément de trouble en Afrique. Car, comme le précise Philippe Défarges, la décolonisation de l'Afrique subsaharienne et les différents mouvements d'émancipation nationale, « initialement porteurs d'un formidable espoir, le plus souvent captés par des idéologues ou des aventuriers féroces, débouchent finalement sur des États qui, dans une très large mesure, restent inféodés aux puissances européennes »65(*).On peut comprendre la géopolitique, dans ce contexte, sous l'angle d'un puzzle planétaire dans la mesure où

Des années 1960 aux années 1990, l'Afrique subsaharienne s'installe dans une ère post-ou, plus exactement, néocolonialisme, dans l'exacte mesure où ces États « indépendants » tenus pour la plupart par des tyrannies tropicales (Sékou Touré en Guinée, Bokassa en République centrafricaine), restent subventionnés par l'ancienne métropole (principalement la France)66(*).

Comme dans le colonialisme, l'Africain semble ne pas encoreavoir droit à la parole ou du moins, il semble ne pas avoir le pouvoir de décider par soiet pour soi. Le leader africain ne semble qu'être un ambassadeur occidental de bonne volonté. Il est un représentant ou défenseur des intérêts des grandes puissances qui en assure son maintien. Cela s'explique par plusieurs facteurs entre autres, la dépendance économique. « En raison des finances catastrophiques ou d'une situation sociale déplorable, des gouvernements privilégieraient un traité de paix ou, à tout le moins, une politique pondérée en matière de défense »67(*).

C'est dire que les pays africains, en raison de leur carence économique, sont tenus de se plier aux vouloirs des puissances armées contre une protection armée dont ils se sentent incapables eux-mêmes d'assurer. Hanif dira plutôt que « Moyen orient et Afrique demeurent principaux détenteurs d'énergie que les USA nécessitent »68(*).Ce qui fait du Moyen orient et de l'Afrique, des zones stratégiques pour les puissances énergétiques, C'est-à-dire pour les États-Unis et les pays occidentaux, en ce que le sous-sol africain contient des richesses propices à leur maintien. C'est justement à ces fins que nos États sont sous la mainmise impérialiste.

Ainsi, se fermant les yeux sur la famine et sur la sous-alimentation de leurs populations, nombre d'États africains, à l'image du « cas nord-coréen », poursuivent « une ruineuse politique d'acquisition de missiles balistiques »69(*) et d'autres instruments de guerre censés garantir la stabilité sociale. Contre toute attente, le plus souvent, cette course à l'armement ne vise nullement la défense du territoire sinon qu'elle vise la pérennisation au pouvoir et le despotisme. Cela débouche incontestablement sur des révoltes sous diverses formes.

Comment alors ne pas comprendre cet état de fait si tant est que les régimes politiques en Afrique se veulent majoritairement despotiques dans des sociétés en proie à la misère ? Cette interrogation fait allusion à deux faits majeurs : d'un côté la menace de la paix occasionnée par l'état de pauvreté des populations et de l'autre, la soif de pouvoir des despotes, caractérisée par leur « ruineuse politique » de surarmement. C'est donc reconnaitre, avec le géopolitologue Frédéric Encel qu'

Incontestablement, l'augmentation du niveau de vie est de nature à favoriser la volonté de paix. Ou, pour inverser la logique, celui qui vit constamment dans la misère aura peu à perdre et, oracles fanatiques aidant, ira plus facilement grossir les rangs des soudards ou des terroristes que celui qui parvient à bâtir pour son foyer des conditions de vie décentes70(*).

Établissant ainsi la corrélation entre pauvreté et la barbarie, Encel se veut relativiste. Malgré la pluralité des exemples qui illustrent à travers l'Afrique le rapport pauvreté-barbarie, il admet que même l'aristocratie, la classe bourgeoise « ne garantit en rien » d'être acteur de violence.

Cela dit, il est évident qu'une politique nationale, se détournant du bien-être social, peut occasionner des violences sociales, mais aussi aggraver la criminalité au sein de nos sociétés africaines. On peut donc élaborer la formule selon laquelle, le taux de violence en Afrique est à justifier par le taux de familles défavorisées sans toutefois ignorer que ces violences sont occasionnées par les plus nantis qui se servent des pauvres comme maillons. Il en va de même des rapports entre pays riches et pays pauvres. Comment comprendre cela si ce n'est qu'à partir des jeux d'intérêts qui caractérisent les rapports interhumains et inter-nations sur des espaces géographiques divers. Les enjeux politiques et idéologiques semblent donner raison du terrorisme en Afrique. Mais quels sont donc ces enjeux politiques et idéologies qui structurent le terrorisme en Afrique ?

CHAPITRE 2 : TERRORISME EN AFRIQUE : ENJEUX POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES

Parler du terrorisme en tant que phénomène social complexe, diffus, de grande portée, revient à analyser le rapport des humains dans une sphère géographique donnée. C'est, « observer son évolution, le jeu de ses différentes composantes, et ses relations avec son environnement - tant dans les pays concernés au premier chef qu'avec les sociétés et les États d'Occident »71(*). C'est donc à bon escient que nous juxtaposons terrorisme et géopolitique pour une analyse philosophique de l'insécurité en Afrique. Cela s'avère nécessaire au point que se référant aux concepts clés de la géopolitique, à savoir les frontières et la souveraineté, les rapports de forces et la puissance, les opinions publiques et les représentations, la guerre et la paix, on réalise qu'elle entretient, à défaut de l'occasionner, de véritables rapports avec le terrorisme.

À preuve, parlant des discours du président malien par intérim Diaconda Traoré, après l'annonce de démission de l'ex-président Amadou Toumani Touré dit ATT le 08 avril2012, Jean Fleury a pu rapporter ce qui suit : « Nous n'hésiterons pas à mener une guerre totale et implacable pour recouvrer notre intégrité territoriale. Le Mali restera un et indivisible. Ce sera le même drapeau, les mêmes joies, les mêmes peines, le même Mali. »72(*)

À lire cela, on s'aperçoit que la défense de l'intégrité territoriale relève d'un véritable enjeu stratégique dans la lutte contre le terrorisme. On peut donc supposer que la violence terroriste persiste au Mali à cause de l'opiniâtreté des groupes rebelles touareg et Ansar-ed-Dine contrariée par la volonté des décideurs politiquesà maintenir l'unité du territoire malien malgré. A y voir de près, le terroriste semble choisir son site. Le nord-Mali, une zone reconnue pour sa richesse en ressources minières, constitue l'enjeu du combat entre ressortissants du nord, aidés par des bailleurs contre le reste du territoire. Cela fait penser à une lutte géostratégique, l'enjeu restant l'exploitation des mines. Le pétrole est l'un des enjeux économiques qui explique une mainmise des grandes puissances sur son flux et la fluctuation du prix du baril. Ce facteur est non moins important pour expliquer l'expression incontrôlée de la violence et de son répondant, le terrorisme qui vit, se nourrit et évolue au rythme de la consolidation des intérêts.

En plus desenjeux géostratégiques, miniers, et si, dans une approche phénoménologique, interprétative, on se proposait d'appréhender le terrorisme en Afrique comme relevant de la manifestation de la revanche états-uniennesur son indignation suite aux attentats du 11 septembre 2001 ?Comment soutenir cela si ce n'est par l'analyse de l'impérialisme américain ?Comment une Nation militairement et économiquement puissante, quasi-inégalable, peut-elle être victime d'une attaque terroriste autant médiatisée sans que le monde entier n'en paye de frais ?

« De quoi s'agit-il ? »73(*)S'enquiert Hanif. Et comme pour se répondre, il ajoute, « Il s'agit, selon moi, d'un ultime soubresaut de l'Islam face à la tentative américaine d'instauration d'un nouvel ordre mondial »74(*).Sans ambages, il pourrait s'agir de ne laisser plus personne en marge de la terreur ressentie par les américains lors de l'attaque du 11 septembre que Gilles Kepel qualifie de « provocation d'ampleur démesurée ».

En fait, le terrorisme peut êtreanalysé, aujourd'hui encore, comme la disparition de l'ordre l'économique mondiale qui a prévalu depuis la guerre froide et qui permet de mettre en exergue le principe de précaution qui consiste à équilibrer la terreur et la force entre les grandes puissances (États-Unis, ex-URSS). Depuis la guerre froide, ces grandes puissances détiennent le monopole de la violence. Ajouté à la simple rivalité entre Nations fortes, l'intérêt politico-économique, étant au centre des relations internationales, y est pour assez dans la prolifération de la terreur. Les acteurs de l'attaque terroriste de septembre 2001 devraient y penser.

Pour Gilles Kepel, en effet, cette provocation a suscité « une répression gigantesque dont les populations civiles afghanes seraient les victimes puis à capitaliser autour de la solidarité attendue des musulmans du monde envers leurs frères bombardés une réaction de grande ampleur »75(*).Cela dit, après l'épisode afghan, toujours dans une logique de riposte, les États-Unis continuent la répression après cette provocation apocalyptique du 11 septembre. Et, du fait de la fraternité entre musulmans, cette répression ne met en marge aucune communauté musulmane. Elle concerne principalement la société civile afghane76(*) mais aussi et surtout tout pays du monde abritant des musulmans susceptibles d'une solidarité avec les frères bombardés. Il s'agit là de l'émergence, de la promotion de nouvelles formes de nationalisme d'inspiration religieuse au Moyen-Orient et de sa riposte.

Le but de cette répression, en inversant les rôles de victime et d'acteur de violence, c'est de terroriser au maximum les populations musulmanes du monde islamique afin « d'identifier sa cible avec précision, l'isoler et la mettre hors d'état de nuire »77(*). On pourrait alors comprendre politiquement, la présence sous plusieurs formes, de la violence sur des territoires africains renommés pour leurs implications dans la religion musulmane. C'est dire que les violences terroristes dans les pays du sahel78(*) s'expliquent par la continuation de « la chasse aux sorcières » et aux groupes affilés au régime terroriste du milliardaire et chef de file d'origine saoudienne Oussama Ben Laden. Car, après avoir « enchainé échec sur échec », « l'acteur terroriste aurait tenté alors de devenir le catalyseur d'un mouvement social ayant pour vecteur le vocabulaire du jihad contre les impies qui avaient envahi la terre d'islam et y massacraient les musulmans.»79(*)

Le faisant, les catalyseurs incitent « les musulmans du monde à entrer dans un cycle de solidarité et de radicalisation anti-occidentale qui aurait facilité la conquête du pouvoir par les militants islamistes partout où cela était possible.»80(*)Ce fait semble se résumer en une sorte de dressage spirituel des musulmans contre l'impérialisme occidental. En cela, la répression s'avère si nécessaire que si elle parvenait à isoler la cible et à  « la mettre hors d'état de nuire en limitant au minimum les ravages de la guerre parmi les populations civiles transformées en autant de boucliers humains par ceux qui se dissimulaient en son sein »81(*), les sociétés autant occidentales qu'africaines retrouveraient une stabilité digne de leurs rangs.

On pourrait dès lors comprendre que parlant de terrorisme en Afrique, nous pouvons dire que hors de toute vision catastrophiste répandue dans certains médias occidentaux comme à « l'enthousiasme barbus », il s'agit des ricochets du rapport de force entre le régime islamiste de Ben Laden (se présentant sous ses différentes formes) et l'intolérable riposte des États-Unis impérialistes.

Mieux que cette approche, la rencontre entre le terrorisme et la géopolitique peut être perçue comme systématique en ce que les intérêts politico-économiques sont au centre de l'économie mondiale et des relations internationales. Et c'est justement sous l'angle de jeu d'intérêts que le terrorisme doit être compris. Il est une guerre d'intérêts étatsuniens contre le monde entier. À titre d'illustration, Jean-Luc Porquet, rapportant les propos de Georg Bush père, écrira ce qui suit : « Une guerre se gagne ou se perd sur le terrain de l'opinion publique. Il faut convaincre (...) que le conflit qui se prépare est nécessaire à nos intérêts ; enfin qu'il s'agit d'un évènement inéluctable et d'une initiative morale. »82(*). Il s'agit là de présenter le terrorisme comme un complot, un jeu qui consiste à faire croire à l'opinion, ce qui n'est pas essentiel.

Cependant, la riposte contre le terrorisme en tant que menace demeure, dans une certaine logique walzerienne, un sujet à justifier dans la mesure où cette riposte peut être teintée d'empressement dans l'interprétation des actes de violences comme « signes d'une hostilité belliqueuse ». Selon Walzer, ces actes « peuvent représenter une tentative de restreindre et de circonscrire un différend »83(*). D'où, il précise, « la nécessité morale de rejeter toute attaque de nature purement préventive qui n'attend pas pour riposter que l'adversaire se soit livré à des actes délibérément hostile »84(*) au risque de se voir renversée, la tendance ; la victime devenant le bourreau et le bourreau s'érigeant en victime. En cette critique de la méthode préventive contre la menace ou la provocation terroriste, Walzer voit un moyen pour éviter un certain nombre de « rodomontades auxquelles les dirigeants politiques se livrent volontiers» et ne représentant en rien, « une menace en soi »85(*).

De ce qui précède, il apparait clairement que le terrorisme, du fait qu'il a un fondement politique, sa résolution se doit d'être politique. Toutefois, la lutte politique contre les menaces terroristes doit se soumettre à une nécessité morale qui en délimite les effets.

Par ailleurs, comment juger des actes terroristes et à qui sont-ils réellement dressés ? Il est évident, au miroir des conceptions de Michael Walzer, que le terrorisme relève d'une injustice occasionnée par les leaders politiques. On ne juge, dans ce contexte, de la "terroricité" d'un acte que par rapport à sa portée politique, que par le sentiment qu'éprouve le public face à l'assassinat d'une personnalité politique. On peut donc dire que la source du terrorisme est politique. C'est ainsi que le terrorisme - sous sa présentation de l'après seconde guerre mondiale, mené par des révolutionnaires qui étaient toutefois considérés comme des terroristes malgré le grand écart entre « les actes de violence qu'ils commettaient » et le terrorisme aujourd'hui - était perçu sous la forme « d'assassinats politiques »86(*). Et comme tel, selon Walzer, il revient à cette classe de personnes, de payer les frais des attaques révolutionnaires pour les « causes politiques malfaisantes » ou pour l'exécution « de lois considérées comme injustes ». On peut lire, à ce propos, dans son ouvrage philosophique intitulé Guerres justes et injustes, les mots suivants :

Car, nous jugeons l'assassin par rapport à sa victime et, quand la victime ressemble à Hitler, par exemple, nous avons tendance à louer l'acte de l'assassin, même si nous ne lui donnons pas le nom de soldat. La seconde catégorie est moins problématique : les citoyens ordinaires, qui ne sont pas engagés dans une cause politique malfaisante - c'est-à-dire qui ne sont ni les responsables ni les exécutants de lois injustes -, se trouvent à l'abri d'une attaque, qu'ils soutiennent ou non ces lois87(*).

Cette sorte de terrorisme révolutionnaire admet une stratégie militaire qui consiste, en temps de guerre, à éviter l'engagement avec l'armée ennemie. Toutefois, selon Walzer, les terroristes de l'après seconde guerre mondiale, les révolutionnaires, font une distinction, qui a une signification morale, entre les gens que l'on peut tuer et ceux que l'on ne peut pas tuer. Cette distinction entre les catégories que l'on peut tuer et celles qu'on ne peut pas tuer, semble conférer au terrorisme une dimension militaire voire morale.

D'ailleurs, c'est cette dimension morale qui semble prendre une toute autre ampleur quant à la manifestation contemporaine de ce qu'on pourrait nommer aujourd'hui, une révolution banditisée, revendiquée nombre de fois, selon les médias, par des groupes terroristes se réclamant de la religion islamique. Le terrorisme en Afrique a-t-il pour finalité le politique ou l'idéologique ?

I. Des enjeux politiques de la violence terroriste

Parlant de la situation politique en Côte d'Ivoire, Christian Bouquet dénonce la non franchise dans les relations internationales en ces termes : « L'observation de la situation ivoirienne laisse généralement aux politologues une impression mitigée : les événements, les enjeux, les motivations, les alliances, ne sont jamais parfaitement clairs sans être pour autant totalement obscurs »88(*). Ici, le subjectivisme humain est mis en avant. Il apparait clairement que chaque initiative humaine vise avant tout des intérêts égoïstes. D'où l'ambigüité des alliances inter-États. Nous voulons, à travers l'analyse de la compétitivité entre nationsetle projet d'un nouvel ordre social, justifier les enjeux politiques du terrorisme.

1. La compétitivité entre États, une aubaine d'expansion du terrorisme

Pourquoi la lutte contre le terrorisme devient de plus en plus difficile en Afrique et dans le monde ? La défense des intérêts individuels des nations aurait-elle pris le pas sur l'enjeu sécuritaire ? Pourquoi le terrorisme est-il devenu en Afrique un enjeu géopolitique majeur ? Paradoxalement au projet de paix proféré sur nos médias, comment comprendre la tactique de l'acquisition des armes dans ces pays qui abritent le terrorisme ? Comment des pays militarisés et sous haute surveillance des armées étrangères, peuvent-ils être assaillis par des terroristes si ce n'est dans l'intérêt égoïste de quelques individus ?

Toutes ces préoccupations n'ont qu'un seul et même référentiel : il s'agit d'un enjeu économique et géostratégique. C'est-à-dire que les révoltes grondantes sont généralement en rapport avec l'intention inavouée de chaque partenaire, de chaque multinationale à s'offrir un meilleur pas des revenus miniers, pétroliers.

En effet, malgré l'affirmation tous azimuts du socialisme africain, l'Afrique demeure plus que jamais divisée. Les organisations africaines (U.A, CEDEAO, etc.) restent pantoises et impuissantes devant les graves crises politiques et sociales africaines. Les exemples sont légions : les guerres civiles du Rwanda, en Côte d'Ivoire, au Burundi, au Libéria, au Congo, etc. ne trouvent des débuts de solution que par les accords en dehors de l'Afrique. L'entente et l'union entre les africains demeurent une chimère, l'entraide, un vain mot89(*).

Cette analyse faite par Samba Diakité résume et dénonce la duperie et les complots contenus dans les rapports que les États africains entretiennent.

Qui plus est, il y a, dans le terrorisme en Afrique, une sorte de prolifération de l'économie de contrebande fortement inspirée de la vente de la drogue, des armes qui profitent aux multinationales. Ce commerce prend des proportions grandissantes et inimaginables et voit se développer des cartels sponsors de groupes armés et de guérillas défendant des intérêts sociopolitiques et surtout économiques et stratégiques. Ces jeux d'intérêts économiques, géopolitiques et stratégiques sont favorables à l'émergence de la violence politique et terroriste en Afrique. Allant à l'extrême, les jeux d'intérêts prennent le visage d'une exploitation minière et de toute autre ressource naturelle pouvant servir aux grandes puissances de quoi assurer leur maestria.

Il est d'un truisme que le pétrole constitue un enjeu économique majeur qui induit la mainmise de grandes puissances sur la maitrise de son flux. Cela y va de la gestion des territoires à forte production de pétrole, des rapports qu'entretiennent les décideurs politiques de ces territoires avec les multinationaux. Comme le signifiait Nkrumah, « l'exploitation de ces mines va sans doute commencer dans une atmosphère de concurrence aiguë »90(*). L'exemple du partenariat91(*) entre l'Arabie-Saoudite et les États-Unis est efficient. L'enjeu pétrolier - parmi tant d'autres facteurs favorables à un certain climat d'expression incontrôlée de la violence et son couronnement le terrorisme - est à redéfinir dans la marche vers la paix en Afrique.

Les jeux d'intérêts égoïstes conduisent nos sociétés vers le gouffre sans possibilités pour elles de s'en détourner. La liberté cesse pour nos États lorsque commencent les abus. Le terrorisme, dès lors, dans son déploiement phénoménal comme manifeste de jeux d'intérêts entre l'Afrique et les néocolonialistes, est soit salué, soit hypocritement condamné par des nations qui représentent pourtant la caution morale et financière de l'acte terroriste. Cette ambigüité de la nature de l'acte terroriste en tant que jeu et principe moral en appelle à ses dimensions politique et éthique. Le terrorisme soulève une préoccupation politique en ce qu'il est le fait des humains, éthique en ce sens qu'il abîme les conditions du vivre ensemble suite à des tensions idéologiques.

2. Du projet d'un nouvel ordre social aux violences terroristes

Pour Derrida et Habermas, la logique terroriste répond à une exigence sociale liée à la nature même de l'emploi systématique de la terreur. Au-delà du simple massacre, du vandalisme, le terrorisme ne vise-t-il pas un projet identitaire sans pareil ? Au demeurant, on pourrait croire que le terrorisme vise l'unification du genre humain autour de principes vitaux universels. C'estla négation de la négation identitaire. Comment cela peut paraître autrement si l'essence de la terreur est la négation de la différence, si on ne tue pas pour le simple acte de tuer mais pour contraindre des entités différentes  à se confondre, à s'uniformiser? PourHabermas notamment,

Quant à l'essence de la terreur, elle ne consiste pas dans l'élimination physique de quiconque est perçu comme différent, mais dans l'éradication de la différence au sein d'une population, à savoir de son individualité et de sa capacité à agir de façon autonome92(*).

L'autonomie de l'individu, bien que mise en exergue dans ce passage, est contrariée par la négation de la différence qui structure la société. Elle est du coup déjà conditionnée par des principes antérieurs à elle. S'il en est ainsi, on peut dire que le terrorisme vise l'unification de la société autour des idéaux mono-culturalistes. Confondre la pluralité dans l'unité, tel est le projet social inavoué du terrorisme. De fait, il vise une redéfinition de l'identité.

D'ordinaire, les révoltes politiques - apparaissant sous la forme de rébellion, de génocide ou sous toutes autres formeset perçues comme des actes terroristes parce que se dressant contre les institutions étatiques - sont l'oeuvre d'organisations politiques. Elles naissent pour la plupart des injustices et des rapports de dominations dont elles se présentent comme la révolution. Elles sous-tendent à rappeler aux dirigeants que« toute politique s'inscrit dans son temps, s'entreprend dans ce temps qu'on sait devoir s'achever »93(*), sa vocation, du reste, étant de produire des effets positifs qui durent et non qui perdurent. Cependant, la condition pour qu'éclate la violence entre groupes humains, est que

dans un tel contexte, des leaders d'opinion, qu'ils détiennent ou non le pouvoir politique, proposent une lecture de cette situation et affirment : « voici ce qui nous arrive, voici qui est responsable de notre malheur. Ce sont "eux" qui sont la cause de nos souffrances. Il faut absolument nous en débarrasser. Nous vous promettons qu'ensuite tout ira mieux. Vous n'avez qu'à nous soutenir, plus : nous rejoindre, pour que nous en finissons avec cette peste94(*).

Nous convenons avec Semelinlorsqu'il entend fonder ici, les origines des violences politiques en l'endoctrinement, en les dires haineux de certains opposants politiques. Dans un contexte africain, c'est véritablement ce type de dire politique, cachant un intérêt égoïste pour le pouvoir politique, qui occasionne les rivalités de pouvoirs sur les espaces. On en vient à mobiliser toute une population afin qu'elle se sente opprimée lorsque l'on est humilié. Et, de ce rapport, le catalyseur politique et ces populations, parlant désormais de la même chose, forme un et un seul corps. Il devient l'homme de la situation sans qui, plus rien ne reste à espérer. On assiste à un front entre idéologues politiques, avec même parfois l'appui de certains corps de l'État (police ou l'armée), chacun ayant pour ambition le contrôle du pouvoir politique.

Combien sont-ils, les pays africains, qui n'ont pas connu, hélas, cette expérience ? Loin de nous le besoin de réveiller en les sud-africains les souvenirs d'un apartheid qui traine à s'effacer des mémoires ouen d'autres peuples l'angoisse degénocides quisévirent partout en Afrique. Pour nous, l'enjeu de la violence, dans une telle logique, reste politique en ce qu'il s'agisse soit du partage de pouvoirs, soit, tout simplement, du renversement de la tendance qui prévaut. Par ricochet, les violences terroristes en Afrique naissent de troubles politiques et visent l'instauration de nouvel ordre social et politique. Il s'agit de la volonté des peuples, avec à leur tête des catalyseurs, de mettre un terme à une injustice sociale, à un déséquilibre ou à un mode de gouvernement jugé ou reconnu pour son despotisme. Les mouvements récents « y'en a marre »95(*) au Sénégal, au Burkina et dans bien de pays africains en sont efficients. Seulement, dans bien de cas, ces révoltes donnent lieu à l'émergence de violences terroristes sous des formes les plus inattendues.

À preuve, suite au printemps arabe96(*) ou à l'èredes révolutions arabes marquées par la chute, après une guerre civilemilitarisée, enLybie97(*), du régime de Kadhafi, le terrorisme prend une autre envergure et se repend de plus en plus en Afrique. On pourrait même croire que

Les récentes révoltes populaires maghrébines ne sont, certes, pas conçues ni contrôlées par les islamistes radicaux. Mais il apparait, [et nous y croyons] clairement qu'AQMI cherche à explorer le chaos, qui accompagne inévitablement ce genre de soulèvements populaires, pour mettre à exécution sa nouvelle stratégie et amorcer, ainsi, son « reflux » au nord, vers la Tunisie et la Lybie, dans un premier temps, et demain - peut-être - vers d'autres pays de la région menacés par la contagion de la révolte populaire98(*).

Le terrorisme en Afrique peut s'expliquer par l'échec du printemps arabe. C'est d'ailleurs ce qui pourrait expliquer que la révolte touareg au Mali (initialement une lutte pour la reconnaissance) visant l'établissement d'un nouvel ordre social, donne lieu, à la suite de la Lybie, à une guérilla : Al-Qaïda au Maghreb Islamique contre le peuple malien, non !Disons plutôt contre le monde entier. De ces contresens des révolutions politiques, l'enjeu politique se transforme, on pouvait s'y attendre, en desenjeux idéologiques.

III. Des enjeux du terrorisme dans son versant idéologique

Au-delà de toute spéculation autour des violences terroristes, force est de reconnaitre que l'idéologie constitue au terrorisme ce qu'est l'âme au corps humain. Liés, il est impossible pour l'un de survivre sans l'autre. L'idéologie perçue comme l'âme et l'acte terroriste comme le corps, on en vient à la déduction suivante: nulle violence terroriste sans un fond idéologique. Et, dans la majeure partie des cas, parlant de terrorisme aujourd'hui, l'idéologie s'apparente à ce qu'il convient de nommer une guerre de civilisations. Comment expliquer cette lutte entre civilisations ? Mais avant, que faut-il donc entendre par civilisation ? Sans détour, on peut la définir comme l' « ensemble des caractères propres aux sociétés évoluées »99(*), ces caractères étant la technique et la culture. Une telle définition réductionniste de la civilisation au seul lien entre la technique et la culture laisse les pays africains en général, en marge de la civilisation du fait de leur absence sur la sphère technologique.

Il conviendrait, dans ce cas, de redéfinir le mot « civilisation » pour mesurer sa portée sur l'Afrique. En cela, il nous convient, outre l'aspect technique de la civilisation, de la définir comme le caractère de ce qui meuble la vie culturelle et matérielle d'une société humaine donnée. De ce point de vue, là où il y a des humains, on peut sous-tendre à une civilisation en termes de mode de vie. On parlera alors aisément de civilisation africaine, occidentale, arabe ou américaine, chacune ayant ses spécificités. On peut se permettre même d'opposer civilisation à la barbarie si tant est que la violence est l'oeuvre de barbares. Mais comment comprendre le terrorisme en Afrique comme relevant d'une guerre entre civilisations ?

1. Du paradoxe de l'islamisme à la prétention à une Afrique islamisée

L'islam est-il en guerre en Afrique ? Autrement dit, le terroriste en Afrique est-il musulman ? Cela paraît visible. Sinon, comment comprendre que les mouvements terroristes, en Afrique, se proclament défenseurs de la charia ? Mais quelle est cette charia qui, dans son déploiement, semble ignorer les préceptes de l'islam ? Alors qui sont-ils, les terroristes en Afrique et que défendent-ils réellement ? Telles sont les questions que nous traiterons dans la suite de notre étude.

Du terrorisme comme manifestation du fanatisme religieux, on n'en dira jamais assez. Notre souci, c'est de lever toute équivoque sur la notion de terrorisme religieux dans une Afrique culturellement animiste. Car, si le terrorisme est motivé par la croyance religieuse, il ne devrait pas faire de ravages dans un continent qui n'est religieux que par accident, que par emprunt.

Cependant, faut-il croire que le terrorisme en Afrique apparait chichement ? Ou bien faut-il alors croire qu'il est l'oeuvre d'organisations musulmanes ? Cette seconde préoccupation semble plus évidente. Car, tous les attentats récents en Afrique sont revendiqués par des organisations dites islamistes. On se rappellera des différents attentats revendiqués par l'État Islamique, par des filiales d'Al-Qaïda, en occurrence Boko haram et AQMI.

Se proclamant défenseurs de la « théocratie musulmane » détruite par l'Occident »100(*) et soucieux de la préservation de la morale sociale, les combattants pour l'État Islamique s'insurgent contre l'éducation et le mode de vie occidental. À leurs yeux, l'éducation et les cultures occidentales favorisent le « laisser-faire » et le « laisser-aller » qu'impliqueraient les notions de liberté et de démocratie dont « les révolutions française et américaine se sont faites les porte-paroles »101(*).

Pourtant, là où il y a religion, il y a contrainte, il y a « soumission à la volonté de Dieu »102(*). Dans un tel contexte, le terrorisme se dresse contre le concept de « Lumières », entendue comme un élément de l'histoire, le siècle de l'affirmation de la démocratie et de la séparation des pouvoirs politiques et religieux. De là, on peut dire qu'être terroriste, c'est refuser d'avoir « le courage de se servir de son propre entendement »103(*) refusant du reste, les principes de laïcité. C'est, ne pas parvenir à se défaire des lèches du pouvoir religieux dans une société humaine structurée autour de la rationalité. En cela, on pourra lire dans les dialogues respectifs entre Jacques Derrida et, Jürgen Habermas avec Giovanna Borradori les mots suivants :

 L'idéologie explicite des terroristes qui ont commis les attentats du 11 septembre contre les tours jumelles et le Pentagone [on peut le penser pour les terroristes en Afrique] est le rejet d'une modernité et d'une laïcité du type de celle qui, dans la tradition philosophique, est associée au concept des Lumières.104(*)

Cela laisse croire que les laudateurs du terrorisme sont d'une espèce toute autre que l'espèce humaine. Sans pitié ni ressentiments, ils agissent de la façon la plus démesurée. Ils se font craindre et ils sont craints. Ainsi, « pour instaurer la terreur, ces actions sont voulues dures ; pour ne pas dire cruelles »105(*). Cela apparait d'ailleurs à leurs yeux comme signe de victoire. À en croire l'ampleur des dégâts humains causés par les attaques terroristes à travers le monde et la psychose qui s'installe. Doit-on, dans ce contexte, concevoir que l'islam suppose négation des « Lumières » ?

Envisager le contraire, cela reviendrait à nier l'ampleur du slogan des terroristes qui est « Il n'y a de dieu que Allah et Muhamed est son messager »106(*) ou « Allah Akbar »107(*). Cette phrase, prise dans son contexte théologique, amène à ne pouvoir identifier le terroriste que par son appartenance à la religion musulmane. Autant on ne reconnait un moine que par son accoutrement, le terroriste, dans ce cas, n'est reconnaissable que par son témoignage à l'Unité d'Allah et non par l'arme qu'il utilise encore moins par l'ampleur de la terreur qu'il crée.

La traduction de l'extrait d'un document trouvé par le FBI dans les bagages des pirates de l'air du 11 septembre 2001 est révélatrice. On peut lire, tout le long du chapitre consacré à l'interprétation de ce document par Gilles Kepel, les phrases suivantes par lesquelles, l'on est parvenu à motiver les djihadistes de l'attentat du 11 septembre :

Quand tu embarqueras dans (A)108(*), au moment où tu y mets ton pied, avant d'y pénétrer, fais les invocations et les prières, et rappelle-toi bien que c'est une guerre qui est en voie. Et comme il a dit - sur lui la bénédiction et le salut - : « Matin et soir sur la voie d'Allah valent mieux que ce bas monde et tout ce qu'il contient ». Puis occupe-toi de remémorer constamment Allah. Il a dit - qu'il soit exalté - « Ô vous qui croyez, quand vous faites face à une troupe, soyez résolus et remémorez beaucoup Allah - ainsi vous réussirez peut-être »... Alors invoque Allah (...) n'aie pas peur et demande à Allah qu'il te confère le martyre de face et non dans le dos, sois patient, endurant. Ensuite chacun d'entre vous doit se préparer à remplir son rôle de façon qu'Allah en soit content et serrer les dents comme l'ont fait les pieux ancêtres - qu'Allah les ait en Sa miséricorde - avant de s'engager dans la bataille. Au moment du corps à corps, frappe comme les braves qui ne veulent pas retourner en ce bas monde, crie « Allah akbar » car ce cri fait entrer l'effroi dans le coeur des infidèles109(*).

Ce récit laisse clairement percevoir à quel point l'endoctrinement au nom d'Allah et du Prophète est une triste réalité dans le milieu terroriste. L'invocation d'Allah dans le mal en se serrant les dents, c'est-à-dire en agissant sans pitié et sans remords selon ce passage, témoigne de l'adhésion probable du Dieu110(*) musulman au terrorisme sous toutes ses formes. Car, cette incitation à la violence et à la haine, telle que décrite par le passage ci-dessus, n'a nulle autre motivation que l'obtention de l'amitié d'Allah qui se matérialise par l'accession du djihadiste aux « jardins du paradis ornés de leurs plus beaux ornements » avec la présence massive des houris revêtues de leurs plus belles parures, le réclamant en disant : « Viens, ô ami d'Allah »111(*).

C'est dire que la fin du terrorisme est l'islamisation du monde. Et, c'est justement au nom de cette prétendue amitié avec Allah, obtenue en voulant imposer un islam nouveau, que le djihadiste doit trouver satisfaction. En cela, il ne discute pas les ordres des catalyseurs mais les écoute et obéit à ce qui se dit.

Cependant, ce qui se dit, bien que voulant se fonder sur et même par les écrits coraniques ou les propos rapportés du Prophète Muhammad (Mahomet) - sur lui la bénédiction et le salut112(*) - est teinté de fanatisme, de mésinterprétation subjective. C'est dire, que les discours sur des écrits coraniques au sujet du terrorisme, bien que se voulant révélateurs, pourraient prêter à de mauvais commentaires et ne justifier que la position de celui ou celle qui discourt. Sinon, comment Dieu113(*) peut-il, lui-même, être incitateur de la violence ? Dieu a-t-il vraiment besoin que des individus « égarés » se battent pour lui ou même en son nom ? N'est-ce pas qu'au fond se cache une réalité toute autre?

Pourtant, à en croire à Jean Fleury, le but de tout mouvement terroriste est l'application de la charia114(*). Et cela, il le démontre bien à travers l'occupation de certaines zones maliennes par des acteurs terroristes d'Aqmi et d'Ansar ed-Dine. Pour Fleury, en effet, après avoir pris possession des villes de Tombouctou, de Gao, de Kidal, « la charia est immédiatement imposée »115(*). Ainsi, l'enjeu des terroristes islamistes reste la promotion de la charia.

Mais quelle est cette charia qui appelle à la haine, au massacre, au vol et au viol ? Quelle est cette drôle d'organisation dite islamique qui détruit les lieux de culte, les mosquées, les médersas ? D'ailleurs, et si le terrorisme n'avait pas de chose en commun avec l'islam ? Et si au fond, les commanditaires terroristes ne cherchaient qu'à se faire des alliés, à toucher les coeurs des « chevaux de Dieu », des «fou[x] d'Allah »116(*) afin de les dresser contre la paix sociale ?

À scruter de près, Islam et terrorisme sont diamétralement opposés. On demandera alors pourquoi même au Moyen-âge, il y eut des combats qui opposaient musulmans et non musulmans appelés « jihad » ou guerre sainte. La réponse est toute simple : le jihad sous sa forme médiévale, mené par le Prophète de l'Islam et ses compagnons, visait l'instauration d'une certaine justice sociale telle que la liberté de culte notamment. Cependant, ce combat dont on a tendance à confondre aujourd'hui au terrorisme, le « jihad », n'est plus de notre temps. L'adhésion à l'islam n'est plus comme dans les premières heures de son apparition. Les dogmes, suivre sans questionner, écouter sans comprendre et agir pour obtenir l'amitié d'Allah semblent alors avoir un autre sens aujourd'hui. On pourrait même croire que le siècle des Lumières, si cher aux Occidentaux, peu ou prou, est impulsé par le Coran sans que cela ne paraisse comme l'éloge de cet écrit canonique. Les versets coraniques ci-après sont révélateurs: « Je ne suis pas adorateur de ce que vous adorez. Et vous n'êtes pas adorateur de ce que j'adore. A vous votre religion, et à moi ma religion » (109 :4-6).117(*)

À travers ces versets de la sourate 109 du Coran parmi tant d'autres, il apparait clairement que l'Islam est pour la liberté de culte, la liberté de croyance etcette différence de foi, ne devait pas susciter de problème majeur encore moins susciter le terrorisme. Le terrorisme est une action condamnée par l'Islam. « C'est pourquoi, Nous avons prescrit que quiconque tuerait une personne non coupable d'un meurtre ou d'une corruption sur terre, c'est comme s'il avait tué tous les hommes » (5 : 32).Combien sont-ils, pourtant, les victimes des agis terroristes ? Indénombrables ! Faut-il alors croire que l'acteur terroriste est musulman ? Cela parait difficile à le prouver.

Comment, à partir de là, comprendre le fait, par un individu se réclamant de la religion musulmane, de tuer à démesure des innocents ?Cela ne demande-t-il pas, de prime à bord, à distinguer le jihad du terrorisme aujourd'hui si tant est que l'acte terroriste consisteà tuer, à ne massacrer rien que pour tenir en alerte l'opinion publique d'éventuel acte similaire ?Car, en effet, le jihad, entermes de guerre autorisée en islam, ou comme la permission aux musulmans de faire la guerre au moyen-âge, de répondre à l'attaque, semble ne s'insurger que contre les injustices avérées. Et ce, dans le strict respect des droits que l'islam reconnait à l'homme ; notamment le droit à la vie. Le terrorisme peut donc sembler avoir sa justification loin de l'islam.

Ne faut-il pas croire qu'au fond, le terrorisme relève d'un abus discriminatoire tendant à discréditer l'opinion islamique ? N'est-ce pas le terrorisme, le fondement d'une guerre de civilisation ?

2. Terrorisme en Afrique, une guerre de civilisations ?

La philosophie antique représente, avec le judéo-christianisme, le socle majeur sur lequel s'est formée la civilisation occidentale moderne. Dire cela, c'est avant tout,intuitionner la différence de taille qui existe entre un Occident "civilisé" et une Afrique traditionnellement animiste. Car, dans une approche historique, on aperçoit, en général, une terre africaine neutre, sans religion sinon fétichiste et animiste parce que « sans civilisation »118(*). La colonisation apparait pour ainsi dire comme le lieu de civilisation des peuples africains avec pour corollaire, l'adoption brusque du mode de vie occidental au désarroi des cultures endogènes et des croyances antérieures au christianisme en Afrique, notamment l'Islam. Du coup, s'opère une lutte pour la conversion ou la reconversion des peuples africains en des croyances exogènes qui tendent à troubler l'ordre social. La civilisation occidentale, ayant pour crédo la liberté de l'individu, semble ne pas s'accommoder avec la morale sociale préétablie et basée, dans la majorité des cas sur les espaces africains, sur le collectivisme.

Dès lors, les libertés individuelles, dans leurs désaccords avec les normes sociales, se présentent comme le point d'encrage d'une guerre entre civilisations occidentales et certaines valeurs africaines à inspiration diverse. Ainsi, « l'acteur terroriste aurait tenté alors de devenir le catalyseur d'un mouvement social ayant pour vecteur le vocabulaire du jihad contre les impies qui avaient envahi la terre d'islam et y massacraient les musulmans »119(*). On assiste, pour ainsi dire, à « la résurgence d'un fanatisme médiéval »120(*) qui prend en solidarité le peuple musulman en le dressant contre toute autre valeur. C'est le début de la nouvelle forme de guerre liée à la civilisation en Afrique. (Nous reconnaissons cependant, que la guerre entre civilisations ne date pas d'aujourd'hui même si nous reconnaissons qu'elle a pris une tout autre allure aujourd'hui. Ce qui nous importe, c'est le rapport du terrorisme aux civilisations en Afrique aujourd'hui).

On pourra alors justifier la montée vertigineuse de mouvements terroristes tels que Boko haram, AQMI, par la tendance des civilisations à ne pouvoir s'accommoder, à coexister. C'est au fond, la manifestation de la tendance de chacune de ses cultures à s'imposer comme universelle. C'est cette triste réalité que décrit Gilles Kepel dans son Jihad, lorsqu'il écrit, parlant de la transmission des images sur le terrorisme dans les médias,

 ...où l'on aperçoit immanquablement des barbus enturbannés brûlant des drapeaux américains et brandissant des portraits de Ben Laden, par-delà les groupes paramilitaires nés en leur sein, spécialisés dans le massacre... leur capacité de mobilisation de masse fait question dans [le continent africain] épuisé par les luttes internes et dont la cohésion même résisterait difficilement à une nouvelle fuite en avant dans le radicalisme religieux121(*).

Ce passage fait l'évaluation des rapports de forces entre l'impérialisme américain et le mode de vie d'un monde arabo-musulman tenace. Dans une telle perspective, le terrorisme en Afrique doit-être évalué sous l'angle d'un rapport de force entre pays "civilisés" en quête d'alliés.

De ce point le vue, Boko haram, par exemple, s'affilant à l'État Islamique, peut paraitre comme la forme islamisée de la riposte à une relation antérieure qui a prévalue entre « nègres » et colonisateurs ou entre « barbares » et « missionnaires ». À en croire le contenu du code noir se présentant comme la lettre de noblesse de la mission civilisatrice, une telle lecture des rapports peut prendre son sens. En voici un extrait :

Tous les esclaves, qui seront dans nos îles, seront baptisés et instruits dans la religion Catholique, Apostolique et Romaine... Interdisons tout exercice public, d'autre religion que celui de la religion C. A. et R. ; voulons que les contrevenants soient punis comme rebelles, et désobéissants à nos commandements ; défendons toutes assemblées pour cet effet, lesquelles nous déclarons conventicules, illicites, séditieuses, sujettes à la même peine, qui aura lieu même contre les maîtres qui les permettront, ou souffriront à l'égard de leurs esclaves122(*).

Et comme pour conclure, on peut lire ce qui suit : « et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous y avons fait mettre notre scel (sceau). » On peut alors croire à la persistance de ce type de rapport « esclaves-maîtres » à travers l'impérialisme et la mainmise occidentale dans les affaires africaines que des groupes dits « rebelles » ou « terroristes » contestent sous la houlette d'un islamisme radical aujourd'hui encore. Le terrorisme, sans prétendre limiter sa finalité à des volontés impérialistes, peut, tout de même, se comprendre à travers la fermeté de chacune des civilisations judéo-chrétiennes et musulmanes à s'imposer au reste du monde.

S'il est vrai « Que celui donc qui veut qu'il devienne croyant et celui qui veut qu'il devienne mécréant » (18 : 29), ou qu'il n'y a : « Nulle contrainte en la religion. La droiture a été distincte de l'égarement » (2 : 256), la lutte pour la reconnaissance, tant chez les civilisations arabes que judéo-chrétiennes, n'a nullement de fondement religieux sinon qu'elle est idéologique ; l'idéologie comprise dans son sens le plus péjoratif possible.

À moins qu'on admette que civilisation arabo-musulmane est égale à l'Islam et que la civilisation occidentale est synonyme du Christianisme, la guerre entre civilisations n'implique guère celle des religions. C'est justement cette confusion que déplore ZeinabAbdelaziz lorsqu'elle écrit,

les orientalistes, en général, leur oeuvre allant de pair avec le colonialisme et les missionnaires, s'ingénient à avilir l'Islam, quitte à avoir recours à la calomnie sans vergogne et à la falsification pour l'implantation de leurs planifications d'acculturation ; les auteurs occidentaux, dans la grande majorité, ont cédé le pas au fanatisme ecclésial, dans un rythme frénétique, qui va s'accélérant, depuis le début de l'expansion islamique jusqu'à nos jours, car vraiment peu nombreux sont ceux qui usèrent d'impartialité ou de bienveillance ; les auteurs arabes ou musulmans, prenant la contre-offensive, surchargent leurs textes d'émotivité, de détails et de parenthèses123(*).

C'est dire, à la suite de Zeinab Abdelaziz,que les occidentaux, d'une part, sous l'emprise de leur conviction religieuse et faisant l'éloge du christianisme, rendent abjecte la religion ou la civilisation islamique. D'autre part, des défenseurs de la civilisation musulmane travaillent à détruire ces thèses qui tendent à s'imposer comme vérité absolue.

Or, le débat, selon Zeinab, est ailleurs. Il s'agit d'appréhender le terrorisme sous l'angle d'une hégémonie les rapports entre les Nations et non entre les religions. Cela ne revient-il pas à concevoir le terrorisme comme une affaire politique, un phénomène socialen attente de résolutions politiques adéquates ? S'il est difficile de trouver au terrorisme, un fondement universel, n'est-il pas, tout de même, envisageable d'indiquer des stratégies de lutte contre ce phénomène ?

TROISIÈME PARTIE : STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME EN AFRIQUE

En termes de lutte contre le terrorisme, il n'existe pas de stratégie qui soit universellement valable. À bien d'égards, la lutte contre le terrorisme peut donner lieu à une forme plus aigüe de terrorisme en ce sens que cette lutte énonce expressément un cadre hors normes juridiques. Elle peut provoquer, se faisant, une scission sociale et accroître du coup l'effectif des terroristes. À preuve, la fermeture de mosquées salafistes ordonnée en France (au nombre de 80 mosquées et plus)124(*) par les décideurs politiques de ce pays afin de réduire le risque d'attaques terroristes peut paraître un frein au principe de la laïcité et de la liberté de culte tant promues par les sociétés de droits. Cette stratégie de lutte, même si elle est efficace, peut camoufler un désir profond de racisme qui se manifeste à travers un système de stigmatisation d'une couche sociale. Toutefois, faut-il, au nom des droits de l'homme, donner libre cours aux pulsions, permettre le laisser-faire et faire fi de tout projet de lutte contre la violence terroriste ?

Toutefois, il nous semble impératif, dans le cas africain, d'insister sur deux aspects : l'éducation et ses implications et l'éthique, et cela, pour deux raisons fondamentales. L'une des raisons est le fait que le terrorisme relève d'une crise de l'éducation en Afrique (et cela s'explique) et l'autre motivation est due au fait que la violence terroriste suppose l'échec de la négociation. La question est donc de savoir si l'éducation, la palabre, la tolérance, sont, en elles seules, une condition suffisante pour le maintien de la paix sur l'espace africain. Comment alors reconstruire une société africaine pacifique et pacifiée si ce n'est par le moyen de l'éducation, de l'intégration, d'une éthique de la diversité ?

CHAPITRE 1 : LUTTE CONTRE LE TERRORISME : REGARDS CROISÉS

En termes de stratégies de lutte contre le terrorisme en Afrique, on pense avant tout à la multiplication des armes et à l'augmentation des effectifs militaires. Cela s'avère utile bien qu'insuffisant. Car, la caractéristique de la stratégie terroriste est de permettre, par les moyens techniques les plus inimaginables, de contourner et de passer en ridicule les dispositifs militaires et sécuritaires dont les moyens techniques sont reconnus sophistiqués. De sorte, alors que les nations accourent vers le surarmement voire la détention du nucléaire afin de rendre inviolables( ?) leurs territoires, l'arme de l'acteur terroriste vient, quant à elle, porter la terreur, la violence, et le message de la mort au coeur même de ces territoires.

Faut-il alors toujours miser sur la nécessité de reconfigurer l'armée ou les armées africaines dans la lutte contre le terrorisme ? Oui et non à la fois. Oui il le faut si et seulement si le terrorisme se réfère à un groupe d'individus bien localisés comme c'est le cas au nord du Mali ou au Sénégal où des individus, au nom d'idéologies contraires aux normes sociales, tendent à en instituer de nouvelles au prix de la mort des citoyens. Non, cela s'avère insignifiante dans le cas d'attaques terroristes insidieux ou perfides en plein coeur de nos villes sous très médiocre surveillance.

Dans tous les cas, l'accroissement de nos effectifs militaires, l'augmentation de systèmes de sécurités, le contrôle des immigrations n'énoncent-ils pas l'éducation de la masse et l'éthique de la discussion comme le lieu de redressement des facteurs qui conduisent au terrorisme en Afrique ?

I. L'éducation de la masse, un impératif

Faut-il Éduquer ou [accepter de] périr ? Joseph Ki-Zerbo avait-il l'intuition, en écrivant son livre Éduquer ou périr, du phénomène du terrorisme ? Ou biensimplement nous interpelle-t-il sur ce que risquent les sociétés africaines si elles se détournent de l'éducation ? Assurément ! C'est quoi alors éduquer ? S'agit-il d'un slogan politique à proprement parler ou d'un système, d'une fonction de reproduction qui garantisse aux Etats africains un progrès sans heurt ?

L'éducation relève à la fois d'un aspect intellectuel et psychologique ou moral. En tant qu'ensemble de principes, sa perception varie selon la conception que l'on se fait de l'homme et de sa destination, du modèle de citoyen et de société que l'on veut bâtir. Ainsi, de Rabelais qui voulait « une tête bien pleine », à Montaigne qui opte pour « une tête bien faite » ; d'un Rousseau naturaliste défendant que le spectacle de la nature doive inspirer à l'âme humaine les principes primaires de la morale, à Auguste Comte qui mise inversement sur le rôle de la société dans la formation de l'esprit par le bon sens, l'éducation apparaît comme un impératif.

Toutefois, le but de l'éducationreste et demeure à nos yeux, l'instruction et l'adaptation sociale de l'individu afin de lui permettre de former un jugement libre et personnel. C'est justement dans ce versant, dans cette inclinaison en tant que facteur de liberté et d'expressivité individuelle quela notion d'éducation nous intéresse. Car, sous cet angle, elle apparait comme le lieu de promotion de ce qu'on est convenu de nommer aujourd'hui encore la liberté (d'expression, de croyance, d'agir) de l'individu.

Mêlant, dans les programmes scolaires et universitaires, l'éducation -entendue comme moteur de la laïcité - à laformation initiale, nos systèmes éducatifs pourront désormais se sentir aptes à relever le défi du dialogue interculturel. On comprend, d'un tel avis, Ki-Zerbo lorsqu'il écrit, « Rependre l'éducation de base, c'est faire campagne pour libérer les esprits en liquidant "la résignation" »125(*).Car, justement, la résignation, perçue comme cet abandon de soi à un destin fatal au nom duquel l'on renonce à ses droits ens'adjugeant les libertés des autres, est au coeur du phénomène de terrorisme en Afrique et par extension, dans le monde. L'éducation s'avère dès lors une lucarne de liquidation non seulement du fatalisme, mais aussi du fanatisme et du suivismepolitique par quoi, on pourrait justifier les violences terroristes dans nos États.

Anémier l'éducation, l'ignorer ou l'abâtardir, c'est ainsi accepter de se soumettre à toute sorte de danger dont le terrorisme dans sa dimension vengeresse et croissante. Il faut donc éduquer ou accepter de périr. Cependant, le projet d'éducation de masse en Afrique est contrarié par l'inadéquation de la volonté d'éduquer aux moyens déployés pour le réussir. Ces moyens sont à la fois d'ordre économique et culturel. Le type de formation influant en Afrique est principalement basé sur des normes occidentales, sur des valeurs en parfaite harmonie avec le judéo-christianisme. Du coup, on assiste à une uni-polarisation de la croyance et du mode de vie des populations ayant accès à "l'école de blanc". Ce qui n'est d'ailleurs pas favorable à la laïcité.

L'éducation à la laïcité, enAfrique, devientalors comme une mission quasi impossible puisqu'elle apparaît comme la continuation de la mission civilisatrice telle qu'apparue et comprise à la suite du Révérend Père, Placide Tempels dans sa Philosophie bantoue. Par cet évangéliste en effet, on apprit que l'alphabétisation du nègre n'était qu'un canal par lequel l'on pouvait mieux assurer l'aliénation culturelle de celui-ci. L'instruction dans une telle approche, constitue, signale Samba Diakité, la « Recherche d'une pédagogie nouvelle dans l'entreprise de christianisation des bantous »126(*).

C'est pourtant, à des distinctions près, cettemême école occidentale qui constitue aujourd'hui encore, le lieu de fierté de l'africain et le modèle d'alphabétisation par excellence de la quasi-totalité de nos sociétés africaines contemporaines. C'est dire donc que le type d'éducation en Afrique, bien que sele proclamant, est en déphasage et ne saurait se présenter comme un prototype de la laïcité. Car elle ne promeut que les valeurs occidentales. Il faut donc, pour pallier ou remédier aux effets corolaires d'un tel système, l'adapter aux réalités d'une Afrique pluraliste. À savoir, joindre aux anciens systèmes éducatifs, un type nouveau d'éducation endogène qui prenne en compte à la fois le mode de vie africain et celui des autres peuples avec qui l'on partage l'humanité, que ceux-ci soient chrétiens, juifs, musulmans ou tout autre.

C'est ici le lieu de formuler le voeu d'une société africaine qui s'intègre à travers l'uniformisation de son système éducatif. Cela s'avère si nécessaire que la différence du type de formation du citoyen changeant d'un territoire africain à un autre, désolidarisant ainsi les peuples, doit être vue autrement pour le bonheur de l'espace africain. L'éducation, si elle est revue et rendue effective en Afrique, peut garantir la réalisation du mieux-être et du mieux-vivre qui caractérise le politique humain. Elle constitue le point de départ de toute considération de l'autre qui aboutit inéluctablement sur une éthique de la discussion comme moyen de résolution des différends en Afrique.

II. La palabre, de l'argument de la force à la force des arguments

Qu'est-ce que la palabre ? S'agit-il d'un lieu ou d'une pratique sociale ? En quoi pourrait-elle être utile dans le règlementdes conflits en Afrique ? Constitue-elle une stratégie de lutte contre le terrorisme en Afrique ? Si cela est évident, comment donc, à partir dela palabre, les sociétés africaines pourraient-elles s'accommoder avec la culture de la paix ?

Selon Jean-Godefroy Bidima, « La palabre présente l'originalité de combiner - le plus souvent avec le bonheur - le code et le réseau. La palabre est une parole « donnée à », « adressée à »127(*).En tant que code et réseau, elle est le lieu de donation et de mise en scène de la parole visant à acquérir la vérité sur un fait, pour en juger, punir ou dédommager. C'est le lieu de règlement des conflits de tout genre et de tout ordre. En tant que « mise en scène, mise en ordre et mise en paroles »128(*), elle est non seulement un échange de paroles mais aussi un drame social, une procédure et des interactions humaines »129(*). C'est dire que la palabre établit un lien d'appartenance commune à une valeur : celle de l'échange, de la discussion franche et sincère. Comme telle, elle désigne un lieu où s'affrontent les particularismes, « le même et l'autre » avec pour but ultime, de favoriser l'harmonie sociale et le vivre-ensemble.

Somme toute, il appert que dans le cadre de la lutte contre le terrorisme en Afrique, une juridiction ludique, théâtrale et rhétorique, peut constituer le point de départ dans l'acheminement vers la stabilité. Ainsi, peut-on en déduire, que « l'acheminement vers la parole »130(*), à travers la palabre, peut paraitre « l'acheminement vers la paix perpétuelle »131(*). La parole apparait pour ainsi dire, comme le point de départ d'un cadre juridique africain dans la gestion des conflits et comme l'une des grilles de lecture de la situation politique en Afrique.

Qui plus est, la prison, en tant que lieu de détention, de correction ou de privation de liberté, sous sa forme la plus commune, n'est pas populaire dans la société africaine traditionnelle. À la différence de la prison occidentale, la palabre constitue pour l'africain le lieu de règlement, d'avertissement ou d'emprisonnement de l'individu ou des individus ; emprisonnement compris dans le sens de la sanction ou de l'amende infligée au fautif pour réparation des dégâtscausés. Comment alors, de fait, de la discussion inter-communautés, ne pas parvenir à solutionner le terrorisme en Afrique en tant que fait majeur suscité par un défaut de langage africain à solutionner les différends ?

Dans une logique habermassienne, la palabre ou la discussion est une garantie pour le maintien de l'harmonie sociale. Cependant, l'éthique de la discussion nécessite un cadre d'échange fondé sur des normes morales et qui valorise les individus dans leurs particularités. Dans un tel cadre, la dignité de chaque acteurse doit d'être instaurée. Ainsi, les morales qui accompagnent l'éthique de la discussion permettent non seulement de faire

valoir l'inviolabilité des individus en exigeant l'égal respect de la dignité de tout un chacun ; mais elles protègent dans la même mesure les rapports intersubjectifs de reconnaissance réciproque par lesquels les individus se maintiennent comme membres d'une communauté. A ces deux principes complémentaires ; correspondent les principes de justice et de solidarité132(*).

Il apparait clairement que l'éthique de la discussion qui fait de la morale son fondement veille à la non-violation de l'individu, préserve l'intégrité morale de celui-ci et en appelle à la solidarité entre les individus. Il va donc s'en dire,si le terrorisme en Afrique s'explique par un défaut de langage entre africains, que ce langage n'est pas fondé sur des normes éthiques et ne vise nullement à « garantir une formation de la volonté telle queles intérêts de tout un chacun puissent être mis en évidence sans que soit déchiré le tissu social qui lie objectivement chacun à tous »133(*).

De là, on peut supposer que les imbroglios et les crises de la reconnaissance qui conduisent au terrorisme peuvent se solutionner à partir de la procédure de la formation discursive de la volonté qui prend en compte les rapports internes entre d'une part, « l'autonomie d'individus insubstituables » et d'autre part « leur enchâssement dans des formes de vie intersubjectivement partagées »134(*).L'éthique de la discussion telle que perçue avec Habermas vise à n'en point douter, « une communauté de communication idéale en vue de la vie bonne »135(*).

Cependant, une telle communauté de communication idéale en vue d'une vie agréable ne nécessite-t-elle pas un espace de vie-commune, harmonieuxet pacifié ?

CHAPITRE 2: VERS UNE AFRIQUE UNIFIÉE ET PACIFIÉE

Comment vivre et comment bien vivre (?) est une préoccupation au coeur du politique humain. L'aspiration de l'homme à un climat de paix est la manifestation palpable de ce sentiment de bien vivre. Comment alors pouvoir réaliser l'idéal du bien-vivre si ce n'est qu'au prix d'une volonté partagée de paix. Comment s'accommoder avec les fondamentaux de paix et échapper aux violences terroristes qui mettent à rude épreuve, les sociétés africaines déjà si mal parties si l'on se réfère au titre de l'ouvrage136(*) de René Dumont ? On peut, par anticipation, miser sur l'intégration et sur une éthique de la diversité pour garantir tant soit peu, un mieux-être. Car, le signale Fié Doh Ludovic,

Chacun des pays africains étant limité dans sa capacité à réaliser la paix, la stabilité, le développement durable et l'amélioration du niveau de vie de ses populations, l'intégration semble l'une des voies indiquées pouvant conduire à l'apaisement des tensions et à la réduction des effets induits de la guerre137(*).

Si tant est qu'aucun pays en Afrique ne peut se suffire à lui tout seul, ne vaut-il pas mieux pour ces pays d'aller à l'intégration ? Maisen quoi ces indicatifs constituent-ils des stratégies dans la lutte contre les violences terroristes en Afrique ?

I. D'une politique d'intégration africaine efficiente à la paix régionale

Les pays africains encouragent et devaient davantage encourager l'immigration. Il est prouvé, l'immigration constitue une force pour les États. Cependant, dans ce tournant de la montée en puissance de mouvements terroristes qui met en branle les principes du vivre-ensemble en société, l'hospitalité des peuples africains mérite d'être redéfinie en termes de stratégie de lutte contre le terrorisme. Car, en effet, si pour l'observateur  le simple port du voile par des collégiennes musulmanes en France a pu déclencher un débat national qui exprime la percée de mouvements islamistes au sein de la jeune génération d'enfants d'immigrés, que reste à espérer d'une Afrique à frontières perpétuellement ouvertes ?Le chaos assurément ! Et cela parce que le pluriel des sociétés, s'agissant du terrorisme bien entendu, s'accommode d'un terrorisme au singulier.

C'est dire en cela que l'immigration est un facteur favorable à l'expansion de la révolution islamiste. Reconnaitre cela, c'est donc dire, par rapprochement, que le flux d'occidentaux vers l'Afrique, le taux d'immigrés des pays mondialement reconnus pour leurs implications dans ce système de rapport de forces ne met pas nos États à l'abri d'un éventuel terrorisme. Cela s'observe d'ailleurs. L'immigration stipule une ouverture aux autres en vue du bonheur de tous. Mais l'immigration, a beau être un avantage pour nos États, peut, si elle ne s'accommode pas avec une éthique, conduire au chaos.

La défense des intérêts particuliers n'est nullement favorable au pluralisme. L'objectif du pluralisme est de rapprocher les particularités autour des référentiels du collectivisme. On ne peut pas vivre dans une société close. D'un tel point de vue, peut-on penser que l'intégration suppose-t-elle la négation des particularités ou la suppression de la compétitivité entre nations ? Absolument pas ! Elle est favorable aux particularités, à la compétitivité certes, mais s'oppose à l'exclusion. Elle mise sur la valorisation du savoir-faire, du savoir-être collectif. Elle suppose le vivre-ensemble basé sur un minimum de droits, sur un minimum de solidarité et de tolérance.

D'un tel avis, l'Afrique doit s'unir pour lutter efficacement contre le terrorisme. Elle doit unir ses particularités, ses forces et ses convictions, les intégrer. Cette union ou unité africaine implique avant tout, l'octroi de pouvoirs aux instances internationales (surtout dans les prises de décisions) marqué par une rectification du sens accordé à la souveraineté de nos États. Ce qui, au-delà de tout cadre de compétitivité, encouragerait une citoyenneté africaine qui entremêlera les actions individuelles de lutte contre les violences sociales de tout ordre. De sorte, la convergence des aspirations à la paix, dénotant d'un intérêt géopolitique commun, d'une dynamique cosmopolitique, aboutit à l'avènement de « la paix perpétuelle dont on ne peut se flatter de se rapprocher continuellement »138(*). Cette paix « perpétuelle » ne saurait cependant s'acquérir que par la création de dispositif militaire sous régional qui garantisse à chacun des territoires africains, une infirme garantie de stabilité. Car, on peut le lire chez Rawls, « la coopération sociale doit toujours viser un bénéfice mutuel »139(*).

En fait, face au terrorisme en Afrique, les États ne disposent que de faible moyen pis, quelques fois inapproprié. Ainsi, le projet d'une quelconque réforme ou reconfiguration d'une éventuelle armée panafricaine stipule, et on peut le lire dans Philosophy in a time of terror140(*) que « Lorsqu'une telle communauté aura été instituée, une violation des droits dans n'importe quelle partie [...] sera perçue partout ailleurs »141(*).Ce qui fait de l'intégration une exigence pour la garde et la sauvegarde des sociétés africaines. C'est d'ailleurs en ce communautarisme qu'on trouvera un des fondements de la paix internationale selon Gandhi. Pour Gandhi, en effet, la solidarité, telle qu'on l'aperçoit dans les familles, doit s'étendre à l'humanité toute entière pour garantir une paix durable. Car, telle dans une famille,

La cohésion des nations est faite de la réciprocité d'égards qui existe entre citoyens. Un jour, il faudra étendre à l'univers entier cette entente nationale, de la même manière qu'on a su élargir aux dimensions de tout un pays la solidarité qui a toujours caractérisé la famille142(*).

Cela est possible parce que « l'humanité est une ». Pour Gandhi donc, il faut rendre universelle certaines expressions culturelles et sociales qui contribueraient au mieux au renforcement d'une entente nationale ou internationale. Bâtie sur des fondamentaux tels que le droit, la solidarité et la tolérance, l'intégration est favorable à l'épanouissement des particularités. Le droit qui accompagne l'intégration sociale en constitue un médium approprié. Aller à l'intégration en Afrique, pour nous, c'est avant tout, restant soi-même, s'ouvrir à l'autre dans un souci de promotion des valeurs juridiques et sociales. Au-delà, c'est de bâtir une armée africaine forte et capable de mettre hors d'état de nuire, les sociétés à la fois économiquement faibles et militairement insignifiantes. L'intégration dans la lutte contre le terrorisme et/ou contre toute autre sorte de violence, passe d'abord par la promotion de la justice, de la solidarité et de la tolérance.

II. Vers une éthique de la diversité comme gage de développement durable

L'éthique de la diversité est le lieu d'expression ou de légitimation des différences entre individus de différents bords. Elle fait allusion à l'homme dans ses dimensions anthropologique et cosmopolite. En tant que citoyen du monde, l'éthique de la diversité fera comprendre à l'homme « qu'il est la source des problèmes qui le tourmentent mais qu'il est aussi la solution »143(*) à son problème. C'est donc faire appel à l'homme en tant qu'être libre de ses agis et de ses croyances, à situer sa responsabilité dans ce qui lui arrive et le mettre face à son devenir.

L'éthique de la diversité se présente, pour le signifier autrement, comme une éthique de la cohabitation, du vivre-ensemble. Puisque « le respect de la diversité des cultures est un préalable nécessaire à la compréhension et à la solidarité entre les peuples »144(*).

Cependant, l'éthique de la diversité implique-t-elle nécessairement le développement ? En quoi serait-elle efficace dans la lutte contre le terrorisme en Afrique ?

Il est évident qu'en Afrique, le terrorisme, dans son rapport à la géopolitique, s'enracine dans les rivalités politiques qui, elles aussi, s'inscrivent dans une dynamique de dérives identitaires. L'identité, elle-même, obéissant à des normes, à des idéologies, on assiste dès lorsàdes conflits entre règles ou morales particulières, toutes se croyant originales. Dans une telle atmosphère, l'éthique de la diversité se présente comme l'instance de régulation des différends.

 C'est pourquoi, soutient Samba Diakité, l'Afrique doit changer en opérant une critique sans complaisance de sa culture, en changeant ses institutions pour réaliser ses nouvelles aspirations (...). Il faut, poursuit-il, désormais, que survienne une transformation profonde des structures de la vie culturelle, politique et sociale145(*).

Cela implique la présence de personnes ayant la capacité d'une réévaluation des modes de penser, des manières de vivre et d'agir au sein d'une même sphère géographique. Cela contribuera au mieux, à l'étouffement ou à l'abolissement de ce que nous convenons d'appeler à la suite de Samba Diakité, la « stagnation dans les cercles de l'enfer »146(*). Puisque toute société est amenée à évoluer, cette évolution ne doit laisser en marge les normes préétablies. C'est justement à cela que l'éthique de la diversité travaille. Elle stipule que « Larecherche et la défense de la plénitude d'une identité ne doivent guère mener à mépriser ou à nier l'identité de l'autre. Revendiquer son identité ou la valoriser, c'est reconnaitre en substance, sans le dire vraiment, l'identité de l'autre et s'obliger à l'accepter comme telle »147(*).

Autrement, l'éthique de la diversité, comme gage d'une harmonie sociale qui garantisse la paix sociale, préconise un cadre d'affirmation, de revalorisation des identités, sans heurt, puisque, selon Diakité, toute culture désireuse de s'affirmer admet l'idée de pluralisme culturel ou du moins, la sonde. La reconnaissance de l'autre s'avère du coup un impératif dans la constitution d'une société en quête de stabilité ou en fuite de phénomènes tels le terrorisme. L'éthique de la diversité implique du coup, celle du pluralisme culturel qui est au fondement des crises ou guerres civiles en Afrique.

Or, comme nous l'avons indiqué en large dans les paragraphes précédents, le terrorisme en Afrique, en tant que faits politiques et idéologiques se nourrissant des imbroglios ou désagrégations identitaires, peut se résoudre par cette éthique de la diversité que nous décrivons le long de ce passage. S'il est d'une évidence que le terrorisme en Afrique résulte d'un déficit langagier à résoudre les différends, la question reste alors de savoir si une éthique de la diversité, si la gestion du problème lié aupluralisme sont une condition suffisante pour le maintien de la paix et donc, du développement tant attendu de l'Afrique. Sans détour, cela apparait évident.

Car, les innombrables crises ou guerres en Afrique, qu'elles soient d'origine identitaire, politique ou idéologique, rétrogradent ces sociétés et transforment leurs luttes en une quête de la survie ou d'autosuffisance alimentaire.S'il en est ainsi, éthiciser les pratiques culturelles par, notamment, la promotion de la diversité apparait comme une solution médiane (et non jamais suffisante) à la restauration d'un nouvel ordre social basé sur la représentativité, sur la solidarité entre identités et sur la tolérance qui conduisent inéluctablement à une paix sociale. Aussi, éthiciser, c'est accepter de bâtir une société pluraliste féconde en droit et qui favorise un cadre d'échanges consensuels.

Toutefois, il faut éviter d'avoir une société pluraliste dépourvue de toute norme sociale. Car, une telle société ressemble (rait) à une société amorphe, hybride. Le pluralisme va donc avec la sacralité, la normativité. Il s'agit de donner au pluralisme une légitimation charismatique fondée sur des normes, sur des valeurs africaines comme le règlement des conflits par la palabre, l'éducation de base, les initiations, le respect scrupuleux de soi et de l'autre, le respect de sa signature (orale ou écrite) ou de ses engagements. Les différences culturelles deviennent, dès lors, pour pasticher Samba Diakité, des réalités indéniables qui, au lieu de nous diviser, nous rassemblent, dans certains cas, nous évitent des conflits. Il nous importe alors « de reconnaitre nos propres différences, notre authenticité et notre originalité. [Mais au-delà], il importe plus de reconnaitre celles de l'autre et de chercher à les comprendre »148(*).

Dans une approche de diversité culturelle, de pluralisme, « la différence doit devenir une valeur qui nous particularise plutôt que de nous diviser. Elle nous permet de voir l'originalité de l'autre à travers le prisme de notre originalité. Cela entraine une ouverture envers l'autre »149(*). Il s'agit là de la constitution ou de la codification de l'identité en termes d'élément du post-nationalisme qui intègre pluralité culturelle et cohésion sociale.

CONCLUSION

Le terrorisme en Afrique a-t-il effectivement un sens qui lui confère sa légitimité ? Cela parait évident. Le terrorisme apparait en Afrique comme une main invisible qui pousse les peuples à des révoltes en vue d'une société émancipée basée sur des principes de bonne gouvernance, de déférence et de reconnaissance mutuelle. Comme tel, sa légitimité relève de la volonté des citoyens à vouloir instaurer un nouvel ordre social contre les normes anciennes qui ne correspondent en rien aux exigences sociétales. On peut donc en conclure qu'il y a terrorisme en Afrique parce que soit, le peuple dit rebelle ou terroriste aspire à un meilleur traitement, une reconnaissance de la part des gouvernants, soit pour revendiquer ou déplorer une situation déshumanisante quelconque.

Quant aux contresens des révoltes, ils s'expliquent par les récupérations de ces mouvements originairement légitimablesvoire excusables par des hommes politiquesou religieux pour en faire la baquette magique de la promotion de leurs idéaux.

Durant notre parcours, nous nous sommes attelé à montrer les fondements et les enjeux (stratégiques, politico-idéologiques) de la violence terroriste en Afrique. Notre démarche argumentative visait à répondre à la question de savoir si la violence terroriste est la conséquence de stratégies de domination à partir des rivalités de pouvoirs et de territoires sur l'espace africain. Dans la pratique, il en ressortle résultat suivant : la question du terrorisme en Afrique est à saisir au-delà du simple rapport entre citoyens d'un même espace et entre États. Elle est fondamentalement basée sur le jeu d'intérêts stratégique, économique ou pétrolier, identitaire ou culturel, juridique et idéologique.

Le terrorisme relève d'enjeux identitaires dans la mesure où la représentativité dans les sociétés africaines est déficitaire. Il relève d'un a priori identitaire qui se manifeste à partir de revendications sociales sous la forme de rébellion armée, de révolte, ou d'attentat suicide. Comme tel, le terrorisme apparait pour prétendre rehausser l'humain en dignité et en liberté, la question n'étant pas de savoir si le terroriste, dans son agi, répond aux normes juridiques et conventionnelles. Cela relève de secret de polichinelle. L'acteur terroriste réclame son identité ou la recommande aux autres. C'est ici le lieu d'établir une corrélation entre quête de l'authenticité et les violences terroristes en Afrique. Qui plus est, la recherche de l'authenticité conduit à la réification, à une crise de reconnaissance. Cette chosification est une condition suffisante pour justifier les violences terroristes en Afrique.

Aux côtés de l'aspect de la représentativité, le terrorisme est motivé par des enjeux stratégiques, politiques et idéologiques. En tant que facteur politique, il vise soit la défense d'intérêts égoïstes des multinationaux, soit le renouveau social. La compétitivité entre États autour des retombées pétrolières, frontalières, et la course aux armements illustrentau mieux les rapports entre les nations. La dimension du renouveau social qui alimente le terrorisme s'explique par deux aspects très distincts : l'un visant la redynamisation de la gestion sociale et l'autre visant la négation de la négation identitaire, autres aspects de la guerre entre civilisations. On nommera cela la guerre entre la civilisation arabo-musulmane basée sur des principes coraniques, sur les dits du prophète et le mode de vie Occidental influencé par la religion judéo-chrétienne. C'est la confrontation entre deux modèles de civilisation : la démocratie occidentale qui n'est rien d'autre que la « démocratie de l'argent, par l'argent et pour l'argent jugée diabolique par le « Coran » et terreur djihadiste jugée barbare par la « Démocratie »150(*). Chacun justifie sa conduite en inculpant l'autre.

Il parait s'agit, selon Mohammed Hanif, d'un ultime soubresaut de l'Islam face à la tentative américaine d'instauration d'un nouvel ordre mondial. La particularité réside dans le fait que les Américains agissent par tous les moyens (légaux et illégaux, avouables et inavouables, directs et retors, accords et compromissions,...) pour réaliser leur objectif et ce depuis 1945 (au moins !)151(*).

Dans ce climat de rivalités territoriales, de négativité et d'affirmation, de rejet et de réification de l'autre, il nous semble opportun de proposer des stratégies de lutte contre le terrorisme dans un langage purement africain. Procéder ainsi, c'est dire que les facteurs qui justifient les violences terroristes en Afrique se résument en un défaut de langages africains à maintenir l'harmonie sociale. Que faire ?

Pour nous, la lutte contre le terrorisme en Afrique passe par, et nécessairementpar, une éducation de masse comme préalable à toute stratégie. L'éducation apparait, pour ainsi dire, comme l'épine dorsale de toute entreprise de maintien de la paix. Elle est la condition d'une intégration africaine efficiente. Cela dit, elle doit s'accompagner d'une éthique de la diversité comme gage de développement durable. C'est donc reconnaitre l'importance de la palabre ou de l'éthique de la discussion dans l'acheminement vers l'émergence tant escomptée des pays africains dans un climat de paix.

Le rapport du terrorisme à la géopolitique en Afrique, tel que décrit le long de ce travail, justifie nos hypothèses de recherche. À savoir que la violence terroriste a des origines identitaires et des enjeux politiques et idéologiques. Nos recherches ont démontré que la violence terroriste suppose une crise de la reconnaissance et qu'elle répondàdes exigences purement politiques et idéologiques.

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5- LARUE (Charles), « Qu'est-ce que la géopolitique? in http://les-yeux-du-monde.fr/ressources/15708-quest-ce-la-geopolitique, consulté le 24 février 2015 à 10h14.

6- « Le Code Noir des Colbert » (mars 1685), http:// perso.wanadoo.fr/yekrik.yekrak/. Consulté le 12 décembre 2012 à 7 h 40 minutes GMT.

7- N'DRI (Diby Cyrille), « Pour une éthique de la bonne gouvernance en Afrique » in Cahier du Cerleshs, revue de Lettres, Sciences Humaines et Sociales, n°36, Ouagadougou, juin 2010.

8- SANKARA (Thomas), « Message du président du Conseil National de la Révolution, à la 39ème session de l'Assemblée Générale de l'ONU », New-York, 4 octobre 1984, in www.cabson.com consulté le 18 février 2012.

9- YEKOKA (Jean Félix), "Violence politique et terrorisme au Congo Brazzaville entre 1959 et 2002" article, in http//: www.librairie.fes.de, consulté le 24/02/2015 à 11h13mn.

10- ZEINAB (Abdelaziz), Aperçus sur : l'Islam, le Qur'an, le jihâd, le terrorisme, in http:// www.way-to-allah.com, consulté le 01 août 2015 à 22 h 27.

TABLE DES MATIÈRES

SOMMAIRE III

DÉDICACE IV

REMERCIEMENTS V

PROPOS LIMINAIRES VI

INTRODUCTION 1

PREMIÈRE PARTIE : TERRORISME ET REPRÉSENTATIVITÉ 7

CHAPITRE 1 : DÉSAGRÉGATION IDENTITAIRE ET VIOLENCE TERRORISTE EN AFRIQUE 9

I. De la crise de la reconnaissance à la guerre entre identités 10

II. Des facteurs socioculturels du terrorisme en Afrique 12

CHAPITRE 2 : CRISE DE LA REPRÉSENTATIVITÉ ET NAISSANCE D'UNE TYPOLOGIE NOUVELLE DE LA VIOLENCE EN AFRIQUE 17

I. De la crise de représentativité aux violences terroristes 19

II. Pluralité ethnique, un problème majeur en Afrique 22

DEUXIÈME PARTIE : STRATÉGIES GÉOPOLITIQUES ET ENJEUX DU TERRORISME EN AFRIQUE 25

CHAPITRE 1: TERRORISME ET STRATÉGIES GÉOPOLITIQUES 27

I. Rivalités politiques et émergence du terrorisme en Afrique 29

II. D'une géopolitique néocolonialiste à la guerre asymétrique 33

CHAPITRE 2 : TERRORISME EN AFRIQUE : ENJEUX POLITIQUES ET IDÉOLOGIQUES 37

I. Des enjeux politiques de la violence terroriste 43

1. La compétitivité entre États, une aubaine d'expansion du terrorisme 43

2. Du projet d'un nouvel ordre social aux violences terroristes 45

II. Des enjeux du terrorisme dans son versant idéologique 48

1. Du paradoxe de l'islamisme à la prétention à une Afrique islamisée 49

2. Terrorisme en Afrique, une guerre de civilisations ? 55

TROISIÈME PARTIE : STRATÉGIES DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME EN AFRIQUE 59

CHAPITRE 1 : LUTTE CONTRE LE TERRORISME : REGARDS CROISÉS 61

I. L'éducation de la masse, un impératif 62

II. La palabre, de l'argument de la force à la force des arguments 64

CHAPITRE 2: VERS UNE AFRIQUE UNIFIÉE ET PACIFIÉE 68

I. D'une politique d'intégration africaine efficiente à la paix régionale 68

II. Vers une éthique de la diversité comme gage de développement durable 71

CONCLUSION 75

BIBLIOGRAPHIE 79

TABLE DES MATIÈRES 87

SUJET : TERRORISME ET GÉOPOLITIQUE EN AFRIQUE : SENS ET CONTRESENS 

RÉSUMÉ :La violence terroriste est-elle la conséquence de stratégies de domination ou celle de rivalités expansionnistes de pouvoirs sur l'espace africain ? Sans louvoiement, elle s'apparente aux deux aspects à la fois. Cependant, la question du terrorisme en Afrique est à saisir au-delà du simple rapport entre États. Naissant sous les cendres de révoltes populaires tous azimuts, le terrorisme africain doit son succès à deux aspects dont l'un est purement interne et l'autre, interne et externe à la fois.

Le premier aspect - induit par le mépris identitaire, la crise de la représentativité et par les inégalités territoriales au sein d'un même espace géographique - se veut un projet de reconstruction d'une société nouvelle, bâtie sur la base de la reconnaissance mutuelle et de la redistribution équitable des ressources du pays.

Le second aspect, celui des relations internationales, constitue le fil conducteur de la violence terroriste en Afrique. Comment ne pas comprendre cela lorsque la compétitivité entre les nations est l'ultime unité de mesure du développement avec ses enjeux économiques, politiques et idéologiques ?

MOTS-CLÉS : Terrorisme, géoterrorisme, stratégie géopolitique, rivalités territoriales, crise de la reconnaissance, radicalisme, éthique communicationnelle.

TOPIC: TERRORISM AND GEOPOLITICS IN AFRICA: SENSE AND MISINTERPRETATION

ABSTRACT: Is terrorist violence the consequence of strategies of domination or that of expansionist rivalries powers in African? With no doubt, it is similar to both aspects. However, the issue of terrorism in Africa is to grasp beyond the mere relationship between States. From the ashes of all-out popular revolts, African terrorism owes its expansion to two aspects; one being purely internal and the other both internal and external.

The first aspect is developed through the scorn identity, the crisis of representation and territorial inequities within the same geographical area. It is considered to be a reconstruction project of a new society that is built upon the basis of mutual recognition and the rational distribution of national resources.

The second aspect is that of international relations. It is the leading factor of terrorist violence in Africa. How can we misunderstand that though the competitiveness between nations is the main measuring unit of development with its economic, political and ideological challenges?

KEYWORDS: Terrorism, geoterrorism, geopolitical strategy, territorial rivalries, crisis recognition, radicalism, communicative ethics.

* 1 Yves LACOSTE, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, Paris, La Découverte, 1985, p.10.

* 2 Yves MICHAUD, Violence et politique, Paris, Gallimard, 1987, p.10.

* 3Emilie ROBERT, « L'État de droit et la lutte contre le terrorisme dans l'Union européenne : Mesures européennes de lutte contre le terrorisme suite aux attentats du 11 septembre 2001 », Law. Université du Droit et de la Santé - Lille II, 2012. French. < NNT : 2012LIL20001>, < tel-00730914>, Thèse d'État, p.36.

* 4 André Liboire TSALA MBANI, Biotechnologies et Nature Humaine, Vers un terrorisme ontologique, Paris, L'Harmattan, 2007, p. 11.

* 5 F. FUKUYAMA, La fin de l'homme. Les conséquences de la révolution biotechnique, Paris, La table Ronde, 2002, p. 15. Cité par André TSALA MBANI, op.cit, p. 13.

* 6 Jacques SEMELIN, Purifier et détruire, Usage politique des massacres et génocides, Paris, Seuil, 2012, quatrième de couverture.

* 7Cette expression désigne selon Thomas Hobbes, le monstre symbolisant la force, le pouvoir, le mal. Son ouvrage le Léviathan est rendu célèbre pour avoir montré les origines du despotisme dans la disposition naturelle de l'homme à être « un loup pour l'homme ». S'opposant à la monarchie de droit divin », Hobbes fait reposer l'absolutisme sur un contrat par lequel les individus confèrent tous leurs droits à un seul souverain.

* 8 Michael WALZER, Guerres justes et injustes, Paris, Gallimard, 2006, p. 362.

* 9 Gérard DUROZOI et André ROUSSEL, Dictionnaire de Philosophie, Paris, Nathan, 2009, p. 367.

* 10 Ici, les langages africains représentent la palabre. Dans les sociétés traditionnelles africaines encore, le mode de résolution des différents reste l'arbre à palabre. Une sorte de juridiction structurée autour de la chefferie, de la doyenneté et du conseil des sages.

* 11 Jacques DERRIDA et Jürgen HABERMAS, Le « concept » du 11 septembre, Dialogue à New-York (octobre-décembre 2001) avec Giovanna Barradori, Paris, Galilée, 2004, p. 82.

* 12 Jean Félix YEKOKA,- "Violence politique et terrorisme au Congo Brazzaville entre 1959 et 2002" article, in « Terrorisme et piraterie : De nouveaux enjeux sécuritaire en Afrique Centrale », Presses Universitaires d'Afrique, Yaoundé - Cameroun, consulté le 24/02/2015 à 11h13mn.

* 13 Samba DIAKITÉ,- Politiques africaines et identité, des liaisons dangereuses, Québec, Différence Pérenne, 2014, p. 31.

* 14 Samba DIAKITÉ,- "Yacouba Konaté et l'Afrique : la cure de soi ou l'éternel retour du kilikan-sosso" in Autour de l'oeuvre de Yacouba Konaté, Abidjan, Balafons, 2011, p. 57.

* 15 Jacques DERRIDA et Jürgen HABERMAS, op. cit, p. 11.

* 16 Mohammed HANIF, Le journal d'un moudjahid de l'Etat Islamique, (Penser le radicalisme dans le monde actuel), Québec, Différence Pérenne, 2015, p. 29.

* 17Idem, p. 30.

* 18 Michael WALZER, op.cit.,Paris, Gallimard, 2006,p. 36.

* 19 Michel SERRES, La guerre mondiale, Paris, Poche-Le Pommier, 2011, p.89.

* 20 Axel HONNETH, La réification, Petit traité de Théorie critique, Paris, Gallimard, 2007, p. 80.

* 21 Samba DIAKITÉ, "L'autre et sa langue : la langue du refus", article, paru dans « Rubrique Politique », 28 janvier 2007, http// : www.contrepointphilosophique.ch, consulté le 03 mars 2014 à 8 h 21 GMT.

* 22 Axel HONNETH, La lutte pour la reconnaissance, Trad. Pierre Rusch, Paris, Les éditions du CERF, 2000, p. 154.

* 23Idem, p. 157.

* 24 Notamment occidentale et arabo-musulmane qui ont une forte influence sur le mode de vie des peuples africains. Les énumérer, c'est donner le soupçon de leur contribution à l'avènement des tensions qui conduisent au terrorisme en Afrique.

* 25 Gilles KEPEL, Jihad, Expansion et déclin de l'islamisme, Paris, Gallimard, 2003, p.27.

* 26Idem, p.28.

* 27 Frédéric ENCEL, Horizons Géopolitiques, Paris, Seuil, 2009, p.26.

* 28Sigmund FREUD et Albert EINSTEIN, «Pourquoi la guerre ? » (1933), version numérique par Vincent Magos, in http://www.squiggle.be/index.php, consulté 24/07/2013. Dans cette correspondance avec Albert Einstein, Sigmund Freud parle, chez l'homme, d'instinct de mort comme étant ce qui le pousse à la guerre.

* 29Idem, p. 27.

* 30 Jacques SEMELIN, Purifier et détruire, Usage politique des massacres et génocides, Paris, Édition du Seuil, 2012, p. 28.

* 31Chalmers JOHNSON, Déséquilibre social et révolution, Paris, Nouveaux Horizons, 1972, pp. 73-74.

* 32 Capitaine Thomas SANKARA, « Message du président du Conseil National de la Révolution, à la 39ème session de l'Assemblée Générale de l'ONU », New-York, 4 octobre 1984, in www.cabson.com consulté le 18 février 2012.

* 33 Frédéric ENCEL, Horizons géopolitiques, Paris, Édition du Seuil, 2009, p. 65.

* 34 Jean FLEURY, La France en guerre au Mali. Les combats d'AQMI et la révolte des Touaregs, Abidjan, Frat Mat, 2014, p. 109.

* 35 Le groupe de mots : guerre asymétrique, selon Clausewitz, pourrait désigner une nouvelle forme de violence ne se soumettant à aucun droit. On pourrait ajouter que ce qui distingue l'acte terroriste d'une guerre ordinaire, c'est plus sa logistique, la diversité de ses acteurs, son anarchisme que tout autre facteur. Cela pour la bonne raison que le terrorisme est cette forme d'affrontement non règlementé, où les adversaires ne partagent ni les mêmes armes, ni les mêmes terrains d'affrontement encore moins la même stratégie. Du coup, les stratèges les plus attitrées, les armes les plus puissantes s'avèrent presqu'inutiles et vaines face à l'arme insignifiante de l'acteur terroriste.

* 36Banque Mondiale, Briser la spirale des conflits, guerre civile et politique de développement, Traduit de l'américain par Monique Berry, Paris, Nouveaux Horizons, op.cit., p. 79.

* 37 Frédéric ENCEL, op.cit., p. 67.

* 38 Amadou HAMPATÉ BÂ, Aspects de la civilisation africaine, Paris, Présence africaine, 1972.

* 39Banque Mondiale, op.cit., p. 79

* 40 Banque Mondiale, Idem, p. 80.

* 41 Le « moi » est à saisir ici comme l'identité d'un ensemble, comme une appartenance sociale, ethnique culturelle ou religieuse.

* 42Jean Yves CARFANTAN& Charles CONDAMINES, Qui a peur du tiers monde ?, Paris, Seuil, 1980, p. 167.

* 43 Yves LACOSTE, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, op. cit.,p. 11.

* 44Edward N. LUTTWAK, Le paradoxe de la stratégie, Trad. Marc Saporta, Paris, Éditions Odile Jacob, 1989,quatrième page de couverture.

* 45Idem, p.12.

* 46Ibidem, p. 308.

* 47Ibidem, p. 163.

* 48 Yves LACOSTE, De la géopolitique aux paysages,Paris, Armand Colin, 2003, cité par Christian BOUQUET, op.cit., p. 13.

* 49 Jean FLEURY, La France en guerre au Mali, op. cit, p. 118.

* 50 Christian BOUQUET, Géopolitique de la Côte d'Ivoire, Le désespoir de Kourouma, 2è édition, Paris, Armand Colin, 2008, p. 9.

* 51 Yves LACOSTE, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, op.cit.,p. 14.

* 52Spinoza, Traité théologico-politique, Paris, Gallimard, 1965, p. 329.

* 53 Raymond ARON, Paix et guerre entre les nations, Paris, Calmann-Lévy, 2004.

* 54 Michel SERRES, op.cit, p.87.

* 55Idem, p.97.

* 56 Jürgen HABERMAS, Après l'État-nation, Une nouvelle constellation politique, Paris, Pluriel, 2013, p. 29.

* 57Idem, p.31.

* 58 ARISTOTE, La politique, cité par Michael WALZER, op.cit, p. 363.

* 59 Michael WALZER, op.cit, p. 363.

* 60Yves LACOSTE, La géographie, ça sert, d'abord, à faire la guerre, op. cit, p. 11. Initialement, la carte est un instrument de guerre. Elle est destinée à la maitrise de territoires donnés, à l'exploitation de ces territoires. La bonne maîtrise de l'espace garantie une bonne posture pour les guérillas.

* 61Idem.

* 62 Faisant allusion à l'individu du choix des occidentaux.

* 63 Sur tel ou tel espace africain.

* 64 Philippe Moreau DEFARGES, La géopolitique pour les nuls, Paris, First-Gründ, 2012, p. 219.

* 65 Philippe Moreau DEFARGES, op. cit., Paris, First-Gründ, 2012, p.p. 221-222.

* 66Idem, p. 222.

* 67 Frédéric ENCEL, op.cit, p. 25.

* 68 Mohammed HANIF, op. cit, p. 32.

* 69 Frédéric ENCEL, op. cit,Paris, Seuil, 2009, p.26.

* 70Idem.

* 71 Michael WALZER, op. cit, Paris, Gallimard, 2006, p. 20.

* 72 Jean FLEURY, La France en guerre au Mali, Les combats d'AQMI et la révolte des Touareg, op. cit., p. 98.

* 73 Mohammed HANIF, op. cit., Québec, Différence Pérenne, 2015, p. 10.

* 74Idem.

* 75 Gilles KEPEL, op. cit., Paris, Gallimard, 2003, p. 17.

* 76 Du fait que le régime des Talibans ait accordé l'asile en Afghanistan à celui qui, le premier, se félicitait de l'attentat du 11 septembre, Oussama ben Laden. Aussi, aux dits de Gilles Kepel, «le Jihad afghan a une importance cardinale dans l'évolution de la mouvance islamiste à travers le monde. Il en devient la cause par excellence, à quoi s'identifient tous les militants, modérés ou radicaux. » p.26.

* 77 Gilles KEPEL, op. cit., p. 17.

* 78 Les pays sahéliens sont majoritairement islamisés en dépit de l'admission de la laïcité de certains d'entre eux. L'on pourrait alors les suspecter d'avoir succombés à l'appel à la mobilisation autour des afghans pour contrer les offensives des États-Unis et de leurs alliés « Alliance du Nord » fait par « commandeur des croyants » de « l'Émirat islamique d'Afghanistan » le mollah Mohammed Omar.

* 79 Gilles KEPEL, Op.cit,Paris, Gallimard, 2003, p.18.

* 80Idem.

* 81Ibidem.

* 82 Jean-Luc PORQUET, Jacques Ellul, L'homme qui avait (presque) tout prévu, Paris, Le cherche-Midi, 2003, p. 143.

* 83 Michael WALZER, op. cit, p. 173.

* 84Idem, p. 172.

* 85Ibidem.

* 86Michael WALZER, op.cit.,Paris, Gallimard, 2006,p.364.

* 87Idem, p. 365.

* 88 Christian BOUQUET, op.cit.,Paris, Armand Colin, p.13.

* 89 Samba DIAKITÉ, Philosophie et contestation en Afrique. Quand la différence devient un différend, op. cit.,p. 360.

* 90Kwame NKRUMAH, Le néo-colonialisme, dernier stade de l'impérialisme, Paris, Présence Africaine, 1973, p. 99.

* 91 Ce partenariat stipule une politique de quota contre une protection armée entre les États-Unis (puissantes armées) et l'Arabie-Saoudite (territoire riche en pétrole) ; Faute de quoi, il est certain, ce pays, à l'instar de bien d'autres pays arabes producteurs de pétrole, ne connaitra point la paix. Est-ce donc dire que les États puissamment armés sont favorables ou conditionnent le terrorisme ? Nous ne saurons le trancher.

* 92Jacques DERRIDA et Jürgen HABERMAS, op.cit., Paris, Galilée, 2004, p. 28.

* 93Frédéric ENCEL, op.cit., Paris, Seuil, 2009,p. 25.

* 94 Jacques SEMELIN, op.cit., p. 33.

* 95 Inspiré d'une chanson de Tiken Jah Fakoly et un sentiment de ras-le-bol général, suite au projet de loi sénégalais, aux délestages, aux coupures électriques incessantes, que des jeunes adoptent ce slogan en fin février 2011, sous la houlette de jeunes rappeurs de Keur Gui (Thiat et MalalTall) et de journaliste (Cheikh Fadel Barro), comme signe de ralliement et de contestation du despotisme de Abdoulaye Wade, par ailleurs président du Sénégal. http:// m.slateafrica.com/5137 pour en savoir plus. Le mouvement prend de l'ampleur en Afrique surtout que l'espace africain est sous domination de régimes despotiques. Les partisans de ce mouvement le considèrent comme « les sentinelles de la démocratie » en Afrique.

* 96 Le monde arabo-musulman a connu en 2011, un mouvement de révolte sans précédent. S'opposant aux modalités de gouvernements autoritaires auxquelles elles sont soumises depuis des décennies, le printemps arabe part de la Tunisie vers l'Égypte puis atteint plusieurs pays du Maghreb et du Moyen-Orient.

* 97 Reconnu comme l'un des sept pays (Cuba, l'Iran, L'Irak, la Lybie, la Coré du Nord, le Soudan la Syrie) qui soutiennent le terrorisme dans le monde selon Bruce Hoffman dans La mécanique terroriste, Paris, Nouveaux Horizons, 2002, p.237.

* 98Atmane TAZAGHART, AQMI, Enquête sur les héritiers de Ben Laden, préface de Roland Jacquard, Abidjan, FRAT MAT, 2011, p. IV.

* 99 Didier JULIA, Dictionnaire de la philosophie, Madrid, Larousse, 2011, p. 44.

* 100 Mohammed HANIF, Journal d'un Moudjahid de l'État Islamique, Penser le radicalisme dans le monde actuel, Québec, Différence pérenne, 2015, p. 10. Telle que décrite dans cet ouvrage, il s'agit pour la Oumma musulmane, le monde musulman, de se repositionner dans un monde sous forte influence des vainqueurs de la seconde guerre mondiale, qui tendent à bouleverser l'ordre de toutes les autres sociétés vers la démocratie. « L'Islam doit réagir aux extrémismes vécus quotidiennement de par le monde », conclura Hanif.

* 101 Jacques DERRIDA et Jürgen HABERMAS, op. cit., p. 38.

* 102 Mohammed HANIF, op.cit., p. 11. L'Islam signifie littéralement soumission.

* 103 La réponse de Kant à la question : Qu'est-ce que les Lumières ?

* 104Jacques DERRIDA, Jürgen HABERMAS, op.cit., Paris, Galilée, 2004, pp.37-38.

* 105 Mohammad HANIF, op.cit., p. 11.

* 106 La calmatchaada, la profession de foi musulmane. Elle est la « clé » d'entrer dans la religion musulmane, celle du paradis. Cependant, son mérité ne réside pas dans sa prononciation sinon dans la foi qui accompagne ce geste. Selon les écrits coraniques, quiconque prononce la calmatchaada « La illahaillalaMuhamad rasulula » comme son dernier témoignage, est éligible pour le Paradis.

* 107 Allah est Grand.

* 108 Avion. En arabe (T), initiale, selon toute vraisemblance, de « ta'ira » selon Gilles KEPEL.

* 109 Gilles KEPEL, op. cit., Paris, Gallimard, 2003, pp. 719-720.

* 110 Comment comprendre cela si selon Mohammed HANIF dans son Journal d'un Moudjahid de l'État Islamique, « l'Islam émane du même Dieu que celui décrit par le Torah et la Bible » ?

* 111 Giles KEPEL, op.cit., p. 720.

* 112 Eulogie du Prophète Mahomet

* 113 Qu'il s'agisse du Dieu chrétien ou musulman.

* 114 Lois, commandements islamiques qui régissent la vie religieuse, politique et sociale dans certains États musulmans.

* 115 Jean FLEURY, La France en guerre au Mali, Les combats d'AQMI et la révolte des Touareg, op.cit., p.99.

* 116 Selon les mots d'Atmane TAZAGHART dans, AQMI, Enquête sur les héritiers de Ben Laden au Maghreb et en Europe, op.cit.

* 117 Essai de Traduction du Coran avec la Translittération phonétique en caractère latins, Traduit et revu par Ahmad Harakat, Marseille - France, Dar El-Fikr, Sourate 109, « Les infidèles » Pré-hégirien, 6 versets.

* 118 Faisant allusion à Hegel.

* 119 Gilles KEPEL, op. cit., p. 18.

* 120Idem, p.19.

* 121 Gilles KEPEL, op.cit.,Paris, Gallimard, 2003,p. 16.

* 122 Le Code Noir des Colbert (mars 1685) - http://perso.wanadoo.fr/yekrik.yekrak/-, Art 2 et suivant. Consulté le 12 décembre 2012 à 7 h 40 minutes GMT.

* 123Zeinab ABDELAZIZ, « Aperçus sur : l'Islam, le Qur'an, le jihâd, le terrorisme », in http://www.way-to-allah.com, consulté le01 août 2015 à 22 h 27 min.

* 124 France 24, Emission télé « Le débat », sujet du jour : "Terrorisme en France, L'islam radical dans le viseur", diffusé le mercredi 01 juillet 2015 à 22h.http// : m.france24.com/20150701-le-debat-terrorisme-isere-yassin-salhi-France-organisation-de-l-etat-islamique-hebdo-hyper-casher-partie1.

* 125 Joseph KI-ZERBO, Éduquer ou périr, Édité par UNICEF, Paris, Harmattan, 1990, p. 65.

* 126 Samba DIAKITÉ, Philosophie et contestation en Afrique, Quand la différence devient un différend, Bouaké, IRDA, 2014, p. 204.

* 127 Jean-Godefroy BIDIMA, La palabre, Une juridiction de la parole, Paris, Michalon, 1997, p.p. 9-10.

* 128Idem, p.11.

* 129Ibidem, p. 11.

* 130 Martin HEIDEGGER, Acheminement vers la parole, Paris, Gallimard, 1976.

* 131Emmanuel KANT, Vers la paix perpétuelle, Essais philosophiques, trad. J. Darbellay, Paris, PUF, 1974.

* 132 Jürgen HABERMAS, De l'éthique de la discussion, Trad. Mark HUNYADI, Paris, Flammarion, 2013, pp. 20-21.

* 133Idem, p. 22.

* 134Ibidem, p. 23.

* 135 Jürgen HABERMAS, De l'éthique de la discussion,op.cit.., p. 23.

* 136 René DUMONT, L'Afrique noire est mal partie, Paris, Éditions du Seuil, 1969.

* 137 Ludovic Doh FIÉ, "De l'intégration africaine : contribution à la prévention et à la gestion des conflits", in « Notre Afrique. Revue ivoirienne de l'intégration africaine », N°001, premier trimestre 2009, p. 20. Consulté le 02 juillet 2015 à 02h 06minutes.

* 138 Emmanuel KANT, Vers la paix perpétuelle, Essais philosophiques, trad. J. Darbellay, Paris, PUF, 1974, p. 111.

* 139 John RAWLS, « Les libertés de base et leur priorité » in André BERTIN, DA SILVEIRA, Pablo et POURTOIS, Hervé (eds.) Libéraux communautariens, Paris, PUF, 1997, p. 181.

* 140 Titre original de Le « concept » du 11 septembre, Derrida et Habermas, Op.cit.

* 141 Jacques DERRIDA, Jürgen HABERMAS, Op.cit., p. 15.

* 142 GANDHI, Tous les hommes sont frères, Vie et pensées du Mahâtmâ Gandhi d'après ses oeuvres, Paris, Gallimard, 1969, pp. 203-204.

* 143 Samba DIAKITÉ, Politiques africaines et identités, Des liaisons dangereuses, op.cit. p. 103.

* 144 Guy Adjété KOUASSIGNAN, Afrique : révolution ou diversité des possibles, Paris, l'Harmattan, 1985, p.5.

* 145 Samba DIAKITÉ, Identités et reconnaissance, l'Afrique en sursis, Québec, Différence Pérenne, 2014, pp. 45-46.

* 146Idem, 4ème de couverture.

* 147 Samba DIAKITÉ, Identités et reconnaissance, l'Afrique en sursis, op. cit., p. 48.

* 148 Samba DIAKITÉ, Politiques africaines et identités, Des liaisons dangereuses, op.cit., p. 109.

* 149Idem.

* 150 Mohammed HANIF, op. cit., Québec, Différence Pérenne, 2015, p. 21.

* 151Idem, p. 10.






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