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Yield-management et comportement des consommateurs - le cas des compagnies aériennes


par Guillaume Monnin
Université Paris 1 - Panthéon-Sorbonne - Master Marketing, vente parcours études de marché et décisions marketing 2019
  

Disponible en mode multipage

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    YIELD-MANAGEMENT ET IMPACTS SUR LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS

    LE YIELD-MANAGEMENT DES COMPAGNIES AERIENNES

    Mémoire de recherche

    Directeur de mémoire : Présenté par :

    Mathieu SALVADORE Guillaume MONNIN

    REMERCIEMENTS

    Je tiens à remercier toutes les personnes qui m'ont accompagnées durant la rédaction de ce mémoire.

    En particulier, je tiens à remercier Monsieur Simon REGNIER, Monsieur Jean-François LEMOINE et Monsieur Stéphane MAGNE pour leur pédagogie et leurs enseignements dans le cadre du cours de Techniques d'enquête en management qui m'ont permis d'apprendre et maîtriser les bases de l'étude qualitative et de l'étude quantitative, ainsi que de nombreux concepts que j'ai pu réutiliser au cours de mes recherches pour ce mémoire, et évidemment la prise en main du logiciel SPSS.

    Je remercie également Monsieur Alexandre STEYER pour son cours de Recherche en management et MonsieurRaouf ZAFRI pour son cours d'Expertise statistique en marketing. Ces deux cours m'ont permis de bien assimiler les différents tests statistiques et leurs méthodes d'utilisation, ce qui m'a grandement aidé pour la rédaction de ce mémoire.

    Je remercie aussi mes amis et camarades pour leurs conseils et leur relecture finale : Mina ARKOUB, Clément ASSERAF,Alexandra BOCCHETTA et Agathe DIGHIERO, sans oublier les 107 répondants à mon questionnaire, qui m'ont permis de récolter de nombreuses données nécessaires à mon étude.

    Enfin, je remercie mon directeur de mémoire Monsieur Mathieu SALVADORE pour ses conseils pour la restructuration de mon travail.

    Table des matières

    1. INTRODUCTION 3

    2. REVUE DE LITTERATURE : LE YIELD-MANAGEMENT, DEVELOPPEMENT, PRINCIPE, OBJECTIFS 5

    2.1. EMERGENCE DU YIELD-MANAGEMENT 5

    2.1.1. Le développement du transport aérien civil 5

    2.1.2. Le tournant de la fin des années 1970: Air Deregulation Act 5

    2.1.3. Définitions du Yield-management 6

    2.2. PRINCIPE DU YIELD-MANAGEMENT 6

    2.3. LES CHAMPS D'APPLICATION DU YIELD-MANAGEMENT 7

    2.4. LES LEVIERS DU YIELD-MANAGEMENT DANS LE TRANSPORT AERIEN 8

    2.4.1. Le pricing 8

    2.4.2. La prévision de la demande 9

    2.4.3. La gestion des capacités 9

    2.4.4. La gestion du surbooking 10

    2.5. YIELD-MANAGEMENT ET PERCEPTION DU CONSOMMATEUR 10

    2.5.1. L'équité 10

    2.5.2. Les facteurs modérateurs 11

    3. ETUDE QUANTITATIVE SUR LA PERCEPTION ET LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS FACE AU YIELD-MANAGEMENT 12

    3.1. LES HYPOTHÈSES 12

    3.2. CONSTRUCTION DU QUESTIONNAIRE 14

    3.3. ANALYSE DES RÉSULTATS 14

    3.3.1. L'échantillon 14

    3.3.2. Analyses univariées sur la perception du yield-management 16

    3.3.3. Analyses multivariées 24

    3.4. VALIDATION DES HYPOTHÈSES 30

    4. CONCLUSION 32

    Références bibliographiques 33

    Annexes (questionnaire)

    INTRODUCTION

    Avant de commencer, il me semblait important de justifier mon choix du thème et du sujet. Passionné depuis tout jeune par l'aviation en général, ce mémoire représentait l'opportunité pour moi de mettre en relation mon domaine d'études, le marketing, avec le secteur qui me fascine. De plus, il me semblait intéressant d'étudier les politiques tarifaires et les méthodes de fixation de prix des billets d'avion.

    Nous nous sommes toujours demandés comment était-il possible de payer un prix totalement différent de celui de notre voisin pour un siège offrant exactement les mêmes services. Que ce soit pour une chambre d'hôtel, un billet d'avion ou de train, le prix peut varier selon la date à laquelle on a acheté le billet, notre profil de consommateur, etc. Au-delà de la simple loi de l'offre et de la demande, cette différence est en fait due au yield-management, une technique d'optimisation du revenu pour les entreprises, qui induit des variations de prix selon différents critères, autres que la simple classe de voyage (économique, affaire, première...) et les services proposés (bagages, repas à bord,..). L'objectif pour l'entreprise est de maximiser sa recette générée, parfois au détriment du consommateur. De nos jours, le yield management est au coeur des politiques tarifaires des compagnies aériennes, mais il est également présent dans d'autres entreprises de service (hôtels, locations de voiture...). Nous allons dans ce mémoire nous intéresser à cette technique en nous concentrant sur le transport aérien civil, et donc aux différents aspects du yield-management utilisé par les compagnies aériennes.

    Au cours de ce mémoire nous allons donc nous interroger sur la perception du yield-management par les consommateurs (qui sont donc ici les passagers), en cherchant à déterminer si ces techniques qui déterminent les politiques tarifaires des compagnies aériennes influent sur le comportement des clients, et comment ces derniers comprennent ce qui se cache derrière le prix d'un billet d'avion.

    Nous verrons dans un premier temps l'émergence et les principes de base du yield-management, puis nous étudierons la place centrale du client dans ces mécanismes à travers les leviers de ces pratiques et le traitement de leur perception dans la littérature. Puis, à travers une étude quantitative, nous chercherons à déterminer comment le yield-management impacte le comportement, la compréhension et la perception du consommateur.

    1. REVUE DE LITTERATURE : LE YIELD-MANAGEMENT, DEVELOPPEMENT, PRINCIPE, OBJECTIFS

    2.1. EMERGENCE DU YIELD-MANAGEMENT

    2.1.1. Le développement du transport aérien civil

    Le premier vol commercial a lieu en 1914 en Floride entre Saint-Petersburg et Tampa, sur un appareil pouvant transporter un passager. La première traversée de l'Atlantique sans escale a lieu en 1921 et entrouvre la porte au développement de l'aviation civile, qui peine cependant à se démocratiser entre les deux guerres et reste un moyen de transport réservé aux plus aisés. La fin de la seconde guerre mondiale marque un tournant avec des progrès techniques fulgurants et l'apparition de nombreuses nouvelles lignes aériennes. Au cours des années 1950, les avions à turbopropulseurs puis à réaction succèdent aux moteurs à pistons permettant une augmentation sensible de la vitesse des avions. Le transport aérien se démocratise de plus en plus et devient accessible à un grand nombre de voyageurs. Cependant, la plupart des compagnies aériennes restent étatiques et la concurrence dans le secteur est faible voire inexistante. Il faut attendre la fin des années 1970 pour voir la dérégulation du transport aérien intervenir, d'abord aux Etats-Unis, avant de se répandre en Europe et ailleurs à la fin des années 1980.

    2.1.2. Le tournant de la fin des années 1970:Air DeregulationAct

    L'émergence du yield-management est étroitement liée à la déréglementation du secteur aérien aux Etats-Unis à la fin des années 1970. Le 24 octobre 1978, Jimmy Carter, le 39e président des Etats-Unis, signe le AirlineDeregulationActafin de déréglementer le transport aérien ce qui conduit à la suppression du contrôle du gouvernement sur le marché aérien, permettant l'introduction de nouvelles compagnies aériennes, une augmentation du nombre de vols et une diminution des tarifs due à cette nouvelle concurrence accrue. Sans le yield-management, afin de conserver des parts de marché, la solution des compagnies aériennes face à une situation de forte concurrence qu'elles n'ont jamais connue auparavant serait de déclencher une guerre des prix. Mais ce comportement s'avère néfaste à moyen et long terme. C'est ainsi qu'est apparu le yield-management,issu des travaux académiques de LITTLEWOOD du début des années 1970. La logique d'optimisation du remplissage de l'avion laisse place à une logique de maximisation des revenus générés par le total des sièges vendus, quel que soit le taux de remplissage final de l'appareil. Cela suppose des variations de prix adaptées à la demande.

    2.1.3. Définitions du Yield-management

    Le terme «yield» désigne le revenu par siège et par mile (1 mile 1,6 kilomètres). Le yield-management est donc littéralement la gestion de la recette créée par siège et par mile. Les définitions du yield-management se sont multipliés durant les années 1980 et 1990. Selon DAUDEL et VIALLE (1989), c'est «l'ensemble de techniques au service d'un principe : la gestion des capacités en vue de la maximisation du revenu global d'une entreprise de services». Pour SMITH et al (1992), c'est «un processus d'allocation du meilleur service au meilleur client et au meilleur moment». Selon la définition de JAUNCEY et al (1995) le yield-management (ici appliqué à l'hôtellerie) est «la maximisation du revenu par chambre reposant sur une manipulation structurée des tarifs, afin de prendre en compte des schémas prévus de demande». DONAGHY et al (1997) définissent le yield-management comme «une technique de maximisation du revenu qui vise à augmenter le rendement net par une prévision d'allocation de la capacité disponible concernant des segments de marché prédéterminés à un prix optimal». Pour JONES (2000) «le yield-management est un système destiné aux propriétaires de l'entreprise afin de maximiser la profitabilité par un management évolué, en identifiant les potentialités de segments de marché, en évaluant leur valeur, en fixant des prix, en créant des règles de réduction de tarifs et de déplacement pour établir un processus avancé de réservations, et en contrôlant l'efficacité de ces règles ainsi que leur mise en oeuvre».Les définitions du yield-management évoluent au fil des années et deviennent de plus en précises: on en retiendra finalement deux: celle d'AUTISSIER (2000) qui le traduit par «management du rendement et le définit comme « une politique qui cherche un meilleur rendement possible pour chaque unité de capacité disponible». Enfin, celle de LEGOHEREL et POUTIER (2017), pour qui le yield-management est «une forme sophistiquée de gestion de l'offre et de la demande par l'action simultanée sur les tarifs et sur la capacité disponible».

    2.2. PRINCIPE DU YIELD-MANAGEMENT

    Selon LEGOHEREL et POUTIER, le yield-management repose sur un principe de forte variation tarifaire adaptée au contexte de marché: intensité de la demande, type de demande, actions des concurrents, etc. Une segmentation de la clientèle est nécessaire: on va distinguer les clients «à haute contribution» ou «affaires», c'est à dire les passagers prêts à payer plus cher leur billet, ce sont généralement les hommes d'affaires ou les travailleurs voyageant pour leur entreprise, et les autres clients dits «loisirs», plus généralement des touristes qui n'ont pas des moyens aussi élevés. Ainsi, une compagnie utilisant le yield-management va faire varier ses prix de manière plus ou moins importante au cours de sa campagne de réservation. Deux sièges présentant les mêmes services peuvent coûter du simple au double selon que l'on achète son billet longtemps avant (earlybooking) ou quelques jours avant. C'est l'hypothèse Earlybird, aussi appelée règle de LITTLEWOOD, selon laquelle les passagers à faible contribution réservent avant les passagers à contribution élevée.

    2.3. LES CHAMPS D'APPLICATION DU YIELD-MANAGEMENT

    Le yield-management n'est pas applicable à toutes les entreprises de services. Seules les entreprises remplissant certaines conditions particulières semblent pouvoir réellement profiter des techniques du yield-management. Nous allons présenter ces conditions et les illustrer en les appliquant au secteur de l'aérien:

    - Des produits périssables: des biens/services qui n'ont plus aucune valeur une fois une date limite dépassée. C'est le cas d'un siège d'avion: s'il est invendu au moment du départ, il ne peut pas être stocké et remis en vente pour plus tard. Sa recette est simplement perdue.

    - Une demande fluctuante: une demande qui évolue selon la période de l'année. Dans le cas des billets d'avion, la demande va, par exemple, être beaucoup plus forte l'été car c'est une période de vacances pour la majeure partie de la population.

    - Une capacité de production fixe: on ne peut adapter la production facilement, l'ajustement présente un coût élevé. Par exemple, on ne peut pas augmenter la capacité d'un avion une fois que toutes les places ont été vendues.

    - Un service de réservation: le produit peut être vendu à l'avance via un service de réservation. C'est le cas depuis longtemps dans l'aérien, et encore plus depuis le développement d'internet

    - Une possibilité de segmentation par les prix: on segmente la demande selon certaines caractéristiques du consommateur. Dans le cas des compagnies aériennes, il s'agit ici des deux types de clientèle que l'on a vu auparavant (haute contribution/basse contribution).

    - Des coûts variables unitaires très faibles: ces coûts (dans l'aérien, il s'agit des coûts supportés par la compagnie liés à l'occupation d'un siège supplémentaire par un passager: nourriture, boisson, nettoyage) doivent représenter moins de 20% du coût total (coûts variables + coûts fixes, ces derniers étant liés au personnel, à l'entretien des avions, au prix du kérosène, etc.).

    Ainsi, en tenant compte de ces contraintes, on retient que le yield-management n'est profitable qu'à certaines entreprises de services: en particulier les compagnies aériennes ou de transports en général, les chaînes d'hôtels, les entreprises de location de voiture ou encore les parcs d'attraction.

    2.4. LES LEVIERS DU YIELD-MANAGEMENT DANS LE TRANSPORT AÉRIEN

    2.4.1. Le pricing

    a) Le prix

    Une partie du yield-management consiste à différencier le prix d'un même service pour maximiser le revenu de l'entreprise. Il s'agit donc d'adapter le prix selon différentes autres variables, mais également à l'inverse, le prix peut être l'outil utilisé pour contrôler la demande. Le prix est étroitement lié à la capacité de la compagnie aérienne à segmenter son marché

    b) La segmentation du marché

    La segmentation de marché est au coeur des pratiques de yield-management. C'est ce qui va permettre de proposer une tarification différenciée et de maximiser le revenu global. Dans l'aérien, la base de la segmentation de marché est la création de différentes classes de voyage (Economy, Premium Economy, Business, Première), elles-mêmes composées de sous-segments de marché, généralement les clients «loisirs» (faible contribution) et les clients «affaires» (haute contribution). Tous les clients n'ont pas les mêmes attentes par rapport aux prestations proposées. P. LEGOHEREL et E. POUTIER définissent 4 règles que doit respecter la tarification différenciée:

    - La sensibilité au prix: les segments de clientèle doivent être le reflet des différents niveaux de sensibilité au prix. Un client à haute contribution est moins sensible aux variations de prix qu'un client à faible contribution.

    - L'étanchéité entre les segments: le client ne doit pas trouver de solutions pour échapper à son segment et à la tarification qui lui est associée. Par exemple, un client dit «affaires» ne doit pas avoir accès à un tarif réservé à la classe «loisirs». Pour cela, la compagnie aérienne impose des contraintes liées au moment de l'achat du billet; les tarifs «loisirs» sont disponibles à l'avance, et les prix augmentent quand on se rapproche de la date du départ. Ainsi, comme un homme d'affaires est très souvent contraint de réserver son billet peu de temps à l'avance, il n'aura pas accès aux tarifs avantageux et ne pourra pas s'échapper de son segment.

    - La flexibilité: il faut conserver une flexibilité forte des tarifs pour pouvoir s'adapter aux imprévus, liés au marché ou à la concurrence

    - La dégressivité: «un client prêt à payer un tarif ne doit jamais payer moins». Il ne faut pas que les écarts de prix entre les différents tarifs soient trop élevés, de sorte que le surcoût (pour le consommateur) ne soit pas trop important si un client est attiré par les services du tarif supérieur.

    c) Connaissance du marché et de la concurrence

    Il faut toujours que les compagnies aériennes étudient les évolutions du moment des prix dans le secteur afin de ne pas proposer un prix s'éloignant trop de celui de ses concurrents ou de la tendance du marché. Si le prix est trop élevé par rapport aux concurrents, il y a des chances de laisser des sièges vides au départ car les passagers «loisirs» auront choisi un tarif plus avantageux chez une compagnie concurrente. Si le prix est trop bas par rapport aux concurrents, il y aura un écart entre le revenu généré par les ventes et le revenu qui aurait pu être généré si le prix proposé avait été optimal.

    2.4.2. La prévision de la demande

    On cherche à prévoir la demande totale du vol ainsi que les comportements d'annulation et de non-présentation. Pour faire ces prévisions, on étudie:

    - Les historiques de réservations (par jour, par saisonnalité, par classe tarifaire, etc.) et les historiques de go-show (présentation sans réservation).

    - Les historiques d'annulations et de no-show (non-présentation d'un client réservé) sur les mêmes critères.

    - Les informations sur la concurrence et les prix pratiqués.

    Pour SPECKLING (2001), on combine ces historiques avec des données estimées par des lois de probabilités. Par exemple, Lufthansa estime la demande de passagers avec des lois normales. La compagnie scandinave SAS estime les passagers no-show avec une loi binomiale approximée par loi normale.

    2.4.3. La gestion des capacités

    La gestion des capacités va correspondre à la répartition des sièges dans les différentes classes de réservation. Celle-ci dépend à la fois de la qualité des prévisions de demande et de la recette attendue par classe de réservation. L'objectif est de favoriser les classes à plus haute contribution afin de maximiser la recette totale du vol. Cependant, il y a un arbitrage à faire, car tous les passagers ne sont pas des clients à haute contribution. Le risque, à vouloir trop favoriser la classe à haute contribution, est de laisser des sièges vides au départ car on aura proposé un prix trop élevé trop tôt. A l'inverse, si on favorise trop les clients à faible contribution, tous les sièges seront remplis mais on n'aura pas possiblement un manque à gagner, car certaines places auraient pu être prises par des clients prêts à payer plus cher.

    2.4.4. La gestion du surbooking

    La plupart des compagnies aériennes actuelles pratiquent des politiques de surbooking : elles mettent en vente un nombre de billets légèrement supérieur au nombre de places réellement disponibles dans l'avion car elles anticipent des annulations ou des no-show. Cette méthode est efficace et permet aux compagnies de contrer un manque à gagner lié à ces sièges qui seraient laissés vides sans ces anticipations, mais qui sont finalement très souvent occupés. Cependant, les anticipations des compagnies aériennes étant basées sur des outils probabilistes, il arrive parfois qu'un passager ayant réservé se retrouve débarqué de son vol, si la compagnie a envisagé plus d'annulations et de no-show qu'il n'y en a réellement. Cette situation est très couteuse pour la compagnie : à la fois financièrement, les indemnisations offertes au passager sont très élevées afin de remédier au préjudice subi, mais aussi au niveau de l'image et la notoriété, car ce type d'incident est généralement très mal reçu par le client. D'après ALLOUCHI (2010), la moyenne de passagers débarqués pour cause de surbooking est 12 pour 10000 passagers transportés, pour les compagnies européennes.

    2.5. YIELD-MANAGEMENT ET PERCEPTION DU CONSOMMATEUR

    2.5.1. L'équité

    La perception de la pratique du yield-management par les consommateurs dépend de leur manière d'évaluer l'équitabilité du prix auquel ils font face. KAHNEMAN et al (1986) présentent l'équité d'un point de vue double, à la fois du consommateur et de l'entreprise, dans la théorie du dual entitlement. Elle prône que les consommateurs ont droit à un prix de référence afin de déterminer si le prix qu'ils ont en face d'eux est équitable. Cette équitabilité perçue dépend aussi du profit que reçoit la firme. Si ce profit est jugé raisonnable, le prix est perçu comme équitable par les consommateurs, ce qui n'est pas le cas quand la firme utilise l'augmentation du prix pour s'enrichir. Selon CAMPBELL (1999), une augmentation du prix est acceptable et équitable pour le client si elle est liée à une augmentation des coûts de production, et non à une volonté délibérée d'accroître ses profits. Cependant, la plupart des consommateurs ne parvient pas ou ne cherche pas à comprendre la structure de coûts d'une firme. Ils se fient donc à leurs expériences de consommation ou aux prix du marché et de la concurrence pour déterminer si un montant est équitable ou non.

    2.5.2. Les facteurs modérateurs

    Selon HIKKEROVA (2011), il y a trois facteurs autres que le prix de référence qui impactent la perception du yield-management par le consommateur :son information et habitude de la pratique, le résultat en termes de prix pour le consommateur, et le mode de présentation de la pratique de yield-management par l'entreprise.

    Il est démontré que plus un individu est exposé à ces pratiques, plus il les accepte : par exemple, au tout début des années 1990, le yield-management est beaucoup mieux accepté dans le secteur de l'aérien, où il est désormais ancré, que dans le secteur de l'hôtellerie où il est à ses débuts (HIKKEROVA, 2011). A la fin des années 1990, une nouvelle étude montre que la pratique est désormais pareillement perçue dans les deux secteurs (CAMPBELL, 1999). Un individu plus habitué va savoir comment profiter de ces pratiques pour bénéficier d'un prix avantageux (en achetant son billet au plus tôt par exemple).

    La perception de la pratique par le consommateur dépend aussi du résultat en termes de prix. Selon McGUIRE et al (2006), le yield-management est perçu plus équitable par le client dans une situation où il est favorisé (c'est-à-dire qu'il profite d'un prix plus bas que le prix normal : par exemple on lui présente un prix comme étant une réduction) que quand il est défavorisé (il paie plus cher que le prix normal).

    Enfin, la perception de l'équité est aussi impactée par la manière selon laquelle est présenté le prix. Un même prix est accueilli de meilleure manière s'il apparaît comme une réduction, et de moins bonne s'il apparaît comme une augmentation (KIMES et WITRZ, 2002).

    3. ETUDE QUANTITATIVE SUR LA PERCEPTION ET LE COMPORTEMENT DES CONSOMMATEURS FACE AU YIELD-MANAGEMENT

    De nombreuses études qualitatives relatives au comportement des consommateurs face au yield-management ayant déjà été réalisées, nous avons décidé de réaliser une étude quantitative afin de vérifier à plus grande échelle des comportements observés dans la littérature et dans certaines études qualitatives.

    3.1. LES HYPOTHÈSES

    Pour établir les hypothèses, nous nous sommes appuyés à la fois sur les éléments de la littérature que nous avons mentionné dans la partie 1, mais également sur les verbatim (répertoriés ci-dessous) tirés d'une étude exploratoire (entretiens semi-directifs) portant sur 53 répondants et menée par BREDA, GIANNELLONI et SELMI.

    Tableau 1: Verbatim de l'étude exploratoire

    Il ressort de ces verbatim que les répondants comprennent globalement l'intérêt qu'on les entreprises à employer ces pratiques de yield-management. Ils semblent saisir les enjeux économiques qui se cachent derrière ces méthodes. Cependant, ils soulèvent des questions de dimension éthique quant à ces pratiques, qui sont qualifiés d'inéquitables, déloyales, discriminatoires ou encore compliquées à comprendre. Enfin, la plupart des personnes interrogées trouvent des avantages à ces politiques de prix, qui peuvent permettre de saisir des bonnes affaires, et qui sont qualifiées de justifiées dans certaines situations. Ainsi nous pouvons établir un certain nombre d'hypothèses, réparties dans 4 thématiques.

    Thème 1: Compréhension des pratiques de yield-management

    ? Hypothèse 1: Les pratiques de yield-management sont comprises par la majorité des consommateurs, qui entendent que ces dernières sont nécessaires pour la compagnie aérienne.

    ? Hypothèse 1.1: Les voyageurs réguliers assimilent et comprennent mieux

    les pratiques de yield-management que les voyageurs occasionnels.

    ? Hypothèse 1.2: Les voyageurs occasionnels peuvent se sentir davantage discriminés ou lésés par les pratiques tarifaires dues au yield-management.

    ? Hypothèse 1.3: Les clients anticipent l'achat de leurs billets dans le but de profiterdeprix bas.

    Thème 2: Ethique et yield-management

    ? Hypothèse 2: Même s'ils arrivent à les comprendre, les consommateurs trouvent les pratiques de yield-management injustes.

    Thème 3: Acceptation des pratiques

    ? Hypothèse 3.1 : Les consommateurs acceptent beaucoup plus facilement les pratiques de yield-management lorsqu'elles leurs sont favorables.

    ? Hypothèse 3.2 : Les consommateurs réclament plus de transparence de la part des compagnies aériennes à propos de leurs politiques de prix.

    Thème 4: Impact du yield-management sur la fidélité des passagers

    ? Hypothèse 4 : Les pratiques de yield-management ne sont pas un élément déterminant de la fidélité des clients à la compagnie aérienne.

    3.2. CONSTRUCTION DU QUESTIONNAIRE

    A partir de ces hypothèses, nous avons construit un questionnaire en quatre parties:

    - La première partie est destinée à une série de questions sur les habitudes des clients au moment d'acheter leurs billets d'avions et de voyager, afin de les familiariser avec le thème et catégoriser les répondants (en séparant par exemple les voyageurs réguliers et les voyageurs occasionnels, ceux qui achètent leurs billets à l'avance et ceux qui achètent au dernier moment). Ce sont des questions fermées avec un nombre réduit de réponses possibles.

    - La deuxième partie est une mise en situation avec des exemples de différenciations tarifaires suite à des variations de prix dues à des pratiques de yield-management. Il y a deux scénarios, le premier où la différenciation tarifaire qui s'applique est défavorable au répondant et le second où elle profite au répondant. L'objectif est double: familiariser le répondant avec le yield-management, et déterminer si la perception du répondant est différente en fonction de si la variation tarifaire qui s'applique lui est favorable ou non. On utilise des échelles de Likert pour mesurer le degré d'accord du répondant avec les affirmations.

    - La troisième partie porte sur la perception, la compréhension et l'opinion générale des répondants quant au yield-management. On utilise une fois de plus des échelles de Likert, et six affirmations tirées de l'étude exploratoire (que l'on a reformulées).

    - La dernière partie porte sur les informations personnelles du répondant: son sexe, son âge, sa catégorie socioprofessionnelle et son domaine d'études.

    3.3. ANALYSE DES RÉSULTATS

    3.3.1. L'échantillon

    Le questionnaire a été diffusé sur les réseaux sociaux pendant une semaine, et voici les principales tendances qui ressortent de l'échantillon, composé de 107 répondants.

    Graphique 1: Répartition des CSP dans l'échantillon

    Parmi ces 107 répondants, nous avons eu 78 femmes et 28 hommes (un « autre »), pour une écrasante majorité d'étudiants (autour de 75%), ce qui était plutôt attendu, car nous n'avions que les réseaux sociaux comme moyen de diffusion large. Ainsi, la moyenne d'âge est située entre 23 et 24 ans.

    Graphique 2 : Fréquence de voyages en avion des répondants

    En ce qui concerne les habitudes de voyages des répondants, nous avons un échantillon assez homogène. 49,5% des 107 répondants prennent l'avion moins de 3 fois par an (nous les qualifierons de «voyageurs occasionnels»), et parmi les 50,5% restants (que nous qualifierons de «voyageurs réguliers»), près d'un tiers d'entre eux prennent l'avion plus de 7 fois par an.

    60% de nos répondants réservent leurs vols plus de 3 mois avant leur départ, et 3 répondants sur 4 n'ont aucun programme de fidélité chez une compagnie aérienne ou une alliance. Pour 51,4% de notre échantillon, le premier facteur qui détermine le choix du billet d'avion est le prix, au-delà de la durée totale du voyage (nombre d'escales) et du choix de la compagnie aérienne.

    3.3.2. Analyses univariées sur la perception du yield-management

    Nous avons soumis le scénario suivant aux répondants:

    Les blocages successifs de votre université conduisent à sa fermeture et à l'annulation des cours pour les deux prochaines semaines. Libre comme l'air, vous décidez donc avec vos amis de vous offrir quelques jours de vacances, et de planifier un voyage pour Lisbonne. Le vol aller est dans 3 jours et il ne reste que très peu de billets d'avion en vente au départ de Paris: vous devez donc chacun payer 210€, bagage en soute non inclus. Dans l'avion (vous n'êtes pas à côté de vos amis), vous discutez avec votre voisin qui vous apprend qu'il n'a payé que 85€ pour des services similaires, en ayant réservé son billet 6 mois avant vous.

    Nous avons ensuite soumis 8 affirmations où le répondant devait exprimer son degré d'accord grâce à des échelles de Likert (1= Absolument pas, 5= Absolument). Voici les résultats.

    Graphique 3: «Vous trouvez cette situation juste moralement«

    La situation est jugée plutôt juste moralement ou absolument juste moralement par 49 personnes sur 107.

    Graphique 4 : «Vous trouvez cette situation inacceptable«

    Elle est jugée inacceptable ou absolument inacceptable par seulement 16,8% de l'échantillon.

    Graphique 5: «Vous trouvez cette situation normale«

    La situation est a minima plutôt normale pour plus de 70% des répondants.

    Graphique 6 : "Vous trouvez cette situation injustifiée«

    La situation n'apparaît pas injustifiée par la majorité de l'échantillon.

    Graphique 7 : "Vous êtes satisfait de la politique tarifaire de cette compagnie aérienne«

    Globalement, les répondants n'ont pas d'avis tranché quant à leur satisfaction vis à vis de la politique tarifaire sous-jacente à ce scénario.

    Graphique 8 : "Vous comprenez la politique tarifaire de cette compagnie aérienne«

    La politique tarifaire qui consiste à proposer des prix beaucoup plus élevés à l'approche de la date du vol est majoritairement comprise par l'échantillon (69,2%).

    Graphique 9 : "Vous voyagerez à nouveau avec cette compagnie aérienne«

    Une grande partie des répondants ne se prononce pas sur cette affirmation, cependant 50,4% d'entre eux affirment être favorable à voyager à nouveau avec cette compagnie aérienne, malgré le prix élevé.

    Graphique 10 : "Vous recommanderez cette compagnie aérienne autour de vous«

    De même, les répondants ne tranchent pas réellement.

    Tableau 2 : Statistiques descriptives de la situation 1

    En somme, la situation décrite, bien qu'elle ne soit pas favorable au consommateur, est perçue de manière assez positive par la plus grande partie de l'échantillon, qui la juge plutôt juste moralement, tout à fait normale et compréhensible. Cependant, les répondants restent majoritairement neutres sur les questions de la satisfaction vis à vis de la politique tarifaire, la fidélité envers la compagnie aérienne et concernée et la recommandation.

    Nous avons soumis ensuite un nouveau scénario aux répondants, où cette fois le consommateur profite d'un tarif avantageux lié à la saisonnalité :

    Vous êtes en train de planifier vos prochaines vacances au Mexique et consultez le site internet d'une compagnie aérienne proposant des vols depuis Paris. Vous souhaitez partir au milieu du mois de juin et constatez que le prix d'un vol aller à 7:30 du matin pour vos dates préférentielles est 290€. Par curiosité, vous recherchez sur le même site le même itinéraire en rentrant une date au hasard au début du mois d'août. Cette fois, le vol est à 15:30 et le prix du billet est 520€.

    Nous avons ensuite proposé les 8 mêmes affirmations, et de même nous avons mesuré le degré d'accord des répondants grâce à des échelles de Likert.

    Tableau 3 : Statistiques descriptives de la situation 2

    En observant les graphiques de la situation 2 (qu'il n'est pas nécessaire de remettre ici tant ils sont similaires à ceux de la situation 1), et en comparant à première vue les moyennes des deux situations pour chaque affirmation, nous remarquons que les résultats sont relativement similaires à ceux observés lors de la situation précédente. Nous pouvons supposer qu'il n'y a pas de différence significative dans la perception du yield-management entre une situation où le consommateur obtient un prix relatif plus faible et une situation où le consommateur est contraint de payer un prix élevé. Nous verrons si cette supposition se confirme lors des analyses multivariées.

    Nous analysons désormais les réponses aux questions générales sur la perception du yield-management. Les répondants, grâce aux deux mises en situation, étaient déjà familiarisés avec la pratique au moment de répondre à ces questions. On utilise à nouveau des échelles de Likert avec les mêmes mesures du degré d'accord (1 = Absolument pas, 5 = Absolument).

    Graphique 11 : «D'une manière générale, un service devrait toujours être vendu au même prix, les pratiques des compagnies aériennes sont donc discriminatoires«

    Globalement, les répondants ne sont pas d'accord avec le terme «discriminatoire» ni avec le fait qu'un service devrait toujours être vendu au même prix.

    Graphique 12 : « D'une manière générale, ces pratiques sont bénéfiques aux consommateurs car elles permettent de faire des bonnes affaires »

    Cette fois-ci, les répondants sont plutôt d'accord avec l'affirmation et près de 47% d'entre eux voient la possibilité de faire des bonnes affaires grâce au yield-management.

    Graphique 13 : « Les compagnies aériennes devraient être plus transparentes quant à leurs pratiques tarifaires »

    Les avis sont très tranchés cette fois-ci, la majorité de l'échantillon s'accorde à dire que les compagnies aériennes devraient être plus transparentes quant à leurs pratiques tarifaires.

    Graphique 14 : « Il est normal de faire payer plus cher à ceux qui achètent leur billet au dernier moment »

    On ne peut pas réellement dégager de tendance suite à cette affirmation, chacun des cinq degrés d'accord se rapprochant de 20% de fréquence.

    Graphique 15 : « Ces pratiques sont injustes et ne devraient pas être autorisées, car la compagnie aérienne qui le fait vole de l'argent aux clients »

    Moins d'un quart des répondants seulement estiment qu'il faudrait limiter voire interdire les pratiques de yield-management.

    Graphique 16 : « Ces pratiques sont compréhensibles car elles permettent aux compagnies aériennes d'optimiser leurs ventes »

    Majoritairement, les répondants comprennent le pourquoi de ces pratiques sur les prix, ce qui coïncide avec les réponses enregistrées sur les deux scénarios précédents.

    Tableau 4: Statistiques descriptives des affirmations générales sur la perception du yield-management

    3.3.3. Analyses multivariées

    Dans un premier temps nous réalisons un test d'ANOVA à un facteur avec le logiciel SPSS afin de déterminer si la fréquence de voyage en avion de nos répondants détermine leur perception et leur compréhension du yield-management. La fréquence, variable qualitative à quatre modalités (moins de 3 fois par an; entre 3 et 7 fois par an; entre 7 et 11 fois par an; plus de 11 fois par an) sera utilisée en variable facteur. Les variables dépendantes seront certaines des affirmations dont on a évalué le degré d'accord des répondants grâce à des échelles de Likert. On utilisera ainsi 5 variables pour évaluer la perception (les affirmations suivantes: «Vous trouvez cette situation juste moralement», «Vous trouvez cette situation inacceptable» pour les deux situations décrites, et l'affirmation générale «D'une manière générale, un service devrait toujours être vendu au même prix, les pratiques des compagnies aériennes sont donc discriminatoires») et quatre variables pour évaluer la compréhension (l'affirmation suivante «Vous comprenez la politique tarifaire de cette compagnie aérienne» pour les deux situations décrites, et les affirmations générales «D'une manière générale, ces pratiques sont bénéfiques aux consommateurs car elles permettent de faire des bonnes affaires» et «Ces pratiques sont compréhensibles car elles permettent aux compagnies aériennes d'optimiser leurs ventes»).

    Tableau 5 : ANOVA à un facteur sur le lien entre la fréquence de voyage en avion et la perception du yield-management

    Tableau 5 : ANOVA à un facteur sur le lien entre la fréquence de voyage en avion et la compréhension du yield-management

    Nous ne remarquons aucune relation significative entre notre variable qualitative et nos neuf variables métriques (Sigest toujours supérieur à 0,05). Nous ne pouvons donc pas affirmer que la fréquence de voyages en avion influe sur la perception ou la compréhension des pratiques de yield-management. Pour nous en assurer, nous transformons notre variable qualitative à quatre modalités en variable à deux modalités («voyageurs occasionnels» pour ceux qui prennent l'avion moins de trois fois par an, et «voyageurs réguliers» pour les autres) et nous appliquons sur SPPS un test t de comparaison de moyennes sur échantillons indépendants.

    Tableau 5 : Test t de comparaison de moyennes entre la fréquence de voyage en avion et la perception du yield-management

    Tableau 6 : Test de t de comparaison de moyennes entre la fréquence de voyage en avion et la compréhension du yield-management

    Sur la base de ces deux tableaux, nous pouvons observer des différences dans les réponses des deux groupes. Comme attendu, les voyageurs occasionnels ont plus de mal à comprendre les pratiques tarifaires des compagnies aériennes (tableau 6), la moyenne pour les 4 variables étant plus basses que pour les voyageurs réguliers. Cependant, en ce qui concerne la perception des pratiques, les moyennes des deux groupes sont non seulement beaucoup plus proches en termes numériques, mais vont parfois à l'encontre des hypothèses formulées. Par exemple, il ressort que les voyageurs réguliers voient davantage la situation 2 comme inacceptable (2,39) que les voyageurs occasionnels (2,28). Cependant, tout cela reste à confirmer, car la significativité de ces écarts n'a pas encore été étudiée.

    Tableau 7 : Test de significativité du test t de comparaison de moyennes entre la fréquence de voyage en avion et la perception du yield-management

    Tableau 8 : Test de significativité du test t de comparaison de moyennes entre la fréquence de voyage en avion et la compréhension du yield-management

    Une nouvelle fois, la significativité de nos observations ne peut être affirmée, Sigétant bien au-dessus de 0,05.

    Afin d'étudier le lien d'association entre d'une part la recherche de prix bas et d'autre part l'anticipation de l'achat des billets, nous effectuons sous SPSS un test du Khi-2. Notre première variable est déterminée par la question «Habituellement, lorsque vous achetez vos billets d'avion: (vous privilégiez)» et où le répondant doit choisir le facteur qui influe le plus sur son choix entre le prix du billet, la durée du voyage, et la compagnie aérienne sélectionnée. Notre seconde variable est tirée de la question «Vous avez l'habitude de prévoir vos voyages:» où le répondant a le choix entre 4 modalités allant de «très à l'avance (je réserve mon billet plus de 6 mois avant le départ)» à «au dernier moment (je réserve mon billet moins de deux semaines avant le départ)».

    Tableau 9 : Test du khi-2 sur le lien d'association entre la recherche de prix bas et l'anticipation de l'achat des billets

    Le test n'est pas significatif à 5%. Il n'y a donc pas de lien entre la date de réservation et la recherche de prix bas.

    Enfin, nous pouvons tester grâce à un test t sur échantillons appariés sous SPSS la différence de perception du yield-management en fonction de si la situation est favorable au consommateur ou non. Nous nous appuyons une fois encore sur le degré d'accord des répondants avec les affirmations proposées, mesuré par des échelles de Likert et sur la base des deux situations du questionnaire (pour rappel, le scénario 1 est défavorable au consommateur qui paie un prix de dernière minute, donc plus cher, et le scénario 2 est favorable au consommateur qui paie un prix moins cher car son billet d'avion est acheté pendant une période creuse).

    Tableau 10: Test t sur échantillons appariés de la différence de perception du yield-management en fonction de la situation

    Ainsi, la situation 1 apparaît plus juste moralement, plus acceptable, plus normale, et plus justifiée que la situation 2. Cependant, le consommateur semble plus satisfait de la politique tarifaire dans la situation 2 et il est davantage susceptible de recommander la compagnie aérienne.

    Tableau 10: Test de significativité du test t sur échantillons appariés de la différence de perception du yield-management en fonction de la situation

    Mais les différences de perception constatées entre les deux situations ne sont significatives que dans deux cas (Sig est inférieur à 0,05), qui sont contradictoires: le consommateur est davantage satisfait de la politique tarifaire de la compagnie aérienne dans la situation 2, mais il est globalement plus enclin à voyager à nouveau avec la compagnie aérienne de la situation 1 (alors qu'il a payé un tarif élevé dû à son achat de dernière minute).

    3.4. VALIDATION DES HYPOTHÈSES

    Grâce aux analyses univariées et multivariées des réponses du questionnaire, nous pouvons désormais confirmer ou infirmer les hypothèses élaborées au préalable.

    Thème 1: Compréhension des pratiques de yield-management

    ? Hypothèse 1.1: Les pratiques de yield-management sont comprises par la majorité des consommateurs, qui entendent que ces dernières sont nécessaires pour la compagnie aérienne.

    Cette hypothèse est validée. Que ce soit dans la situation 1 ou 2, les répondants sont près de 70% à répondre 4 ou 5 sur l'échelle de Likert à l'affirmation «Vous comprenez la politique tarifaire de cette compagnie aérienne», pour une moyenne de 3,86. De plus, dans la section sur les questions générales, les répondants sont majoritairement plutôt d'accord voire absolument d'accord avec les affirmations «D'une manière générale, ces pratiques sont bénéfiques aux consommateurs car elles permettent de faire des bonnes affaires» et «Ces pratiques sont compréhensibles car elles permettent aux compagnies aériennes d'optimiser leurs ventes». On peut affirmer que les pratiques sont comprises et assimilées par les consommateurs.

    ? Hypothèse 1.2: Les voyageurs réguliers assimilent et comprennent mieux les pratiques de yield-management que les voyageurs occasionnels.

    Cette hypothèse n'est pas validée. Nous avons vu qu'il n'y avait pas de différence significative entre les voyageurs réguliers et les voyageurs occasionnels en termes de compréhension des pratiques de yield-management.

    ? Hypothèse 1.3: Les voyageurs occasionnels peuvent se sentir davantage discriminés ou lésés par les pratiques tarifaires dues au yield-management.

    Cette hypothèse n'est pas validée. Les voyageurs occasionnels ne se sentent pas plus discriminés par les pratiques de yield-management que les voyageurs réguliers.

    ? Hypothèse 1.4: Les clients anticipent l'achat de leurs billets dans le but de profiter de prix bas.

    Cette hypothèse n'est pas validée. Il n'y a pas de relation significative entre la date d'achat du billet et le choix des prix bas (relativement à la durée du voyage ou au choix de la compagnie aérienne).

    Thème 2: Ethique et yield-management

    ? Hypothèse 2: Même s'ils arrivent à les comprendre, les consommateurs trouvent les pratiques de yield-management injustes.

    Cette hypothèse n'est pas validée. Les pratiques de yield-management sont jugées assez justes par l'échantillon, que ce soit pour les affirmations liées aux deux situations ou à l'affirmation générale «Ces pratiques sont injustes et ne devraient pas être autorisées, car la compagnie aérienne qui le fait vole de l'argent aux clients».

    Thème 3: Acceptation des pratiques

    ? Hypothèse 3.1: Les consommateurs acceptent beaucoup plus facilement les pratiques deyield-management lorsqu'elles leurs sont favorables.

    Cette hypothèse n'est pas validée. Les réponses aux deux situations ont démontré que l'acceptation et la perception des pratiques tarifaires sont indépendantes du fait qu'elles soient favorables ou non au client. Cependant, les répondants sont significativement plus satisfaits de la politique tarifaire de la compagnie aérienne dans la situation où le prix est plus faible.

    ? Hypothèse 3.2: Les consommateurs réclament plus de transparence de la part des compagnies aériennes à propos de leurs politiques de prix.

    Cette hypothèse est validée. C'est l'affirmation qui obtient la moyenne la plus élevée sur l'échelle de Likert (4,16). Les répondants sont très majoritairement en faveur de plus de transparence de la part des compagnies aériennes sur leurs pratiques tarifaires, ce qui pourrait favoriser l'acceptation du yield-management par tous les voyageurs.

    Thème 4: Impact du yield-management sur la fidélité des passagers

    ? Hypothèse 4: Les pratiques de yield-management ne sont pas un élément déterminant de la fidélité des clients à la compagnie aérienne.

    Cette hypothèse est validée. Dans les deux scénarios, la plupart des réactions sont neutres à l'affirmation «Vous voyagerez à nouveau avec cette compagnie aérienne». On peut élargir ce constat à l'affirmation «Vous recommanderez cette compagnie aérienne autour de vous».

    CONCLUSION

    Ainsi, à travers cette étude nous avons pu nous rendre compte que les pratiques de yield-management des compagnies aériennes sont globalement ancrées dans l'esprit des consommateurs, qui en ont conscience, les comprennent et tentent parfois d'en tirer profit, en anticipant l'achat de leurs billets par exemple. Ces pratiques étant apparues il y a plus de 40 ans, les consommateurs ont eu le temps d'en prendre l'habitude, et donc la perception globale de ces pratiques tarifaires est plutôt bonne. Si l'équité de ces pratiques est remise en question dans la littérature, notre échantillon accepteces pratiques, même lorsqu'elles leur sont défavorables et les poussent à payer un prix plus cher. Cela peut s'expliquer par le fait que notre échantillon est majoritairement jeune et étudiant (dont le quart font des études d'économie, de gestion ou de commerce), et a donc plus de facilités à se positionner du point de vue de l'entreprise. La compréhension de ces pratiques amène les consommateurs à adapter leurs comportements : ainsi, la majorité de l'échantillon réserve ses billets d'avion plus de trois mois avant la date du départ en ayant conscience que les prix augmentent au fur et à mesure que le vol approche. Cependant notre étude comporte des limites : l'échantillon très jeune est peut-être un facteur explicatif de la facilité de compréhension et d'acceptation du yield-management. De plus, de nombreuses hypothèses n'ont pas pu être validées, comme l'idée que le consommateur accepte beaucoup plus facilement une situation de variation tarifaire qui lui est favorable. Le yield-management ne semble pas non plus être une variable déterminante de la fidélité du consommateur envers la compagnie aérienne. Ainsi, il serait peut-être intéressant, dans un futur travail de recherche, de s'intéresser plus en profondeur aux facteurs qui pourraient impacter les comportements de fidélité et même d'ambassadeur d'un consommateur envers une compagnie aérienne, en prenant un échantillon beaucoup plus équilibré en termes de tranches d'âge.

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    ANNEXES

    Le questionnaire






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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"