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Disparités régionales en matière de scolarisation en Guinée


par Mamadou Dian Dilé Diallo
Université Yaounde II - DESS 2003
  

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2.1.5. Les facteurs liés à l'offre scolaire

La proximité des infrastructures éducatives, mais aussi leurs équipements, leur accessibilité financière, les qualifications du corps enseignant, etc. sont autant des facteurs qui peuvent influencer la propension des familles ou des parents à envoyer leurs enfants à l'école. Comme le souligne (LANGE M. F., Cent cinquante ans de scolarisation au Togo : bilan et perspective, 1991)(LANGE, 1991), si la scolarisation est caractérisée par la volonté que les ménages ont d'inscrire leurs enfants à l'école, elle dépend aussi et surtout de la capacité que l'État a d'offrir des écoles et des maîtres.

C'est surtout au niveau de l'explication des inégalités sexuelles d'accès à l'école qu'intervient bien souvent la question de la distance à l'école : de crainte de les exposer à des agressions physiques ou morales, les parents évitent d'envoyer les filles dans des écoles distantes du lieu d'habitation (KOBIANE J. F., 2002). « Les filles qui ne peuvent se libérer facilement des tâches domestiques disposent de moins de temps que les garçons à consacrer à leur scolarité. Dès lors, le parcours d'une longue distance pour aller à l'école par la fatigue supplémentaire ainsi que la perte de temps qu'il constitue pour les devoirs scolaires ou le loisir, facilite la déscolarisation quand il ne décourage pas tout simplement la scolarisation de la fille »(BAZZI-VEIL, 2000).

ALDERMAN& al. (1996) cités par (KOBIANE J. F., 2002) mettent également en évidence, dans le contexte du milieu rural Pakistanais, que la disponibilité des institutions scolaires est l'un des facteurs déterminants de l'accès des filles à l'école et de leurs performances scolaires.

C'est à juste raison donc que l'offre d'éducation constituait la toile de fond de la conférence de Jomtien (1990). « La déclaration et le cadre d'action de Jomtien partent de l'hypothèse que si l'offre est satisfaisante (sur les plans de quantité, de la localisation et de la qualité), enfants et adultes iront à l'école et l'objectif de l'éducation pour tous sera atteint »(HALLAK, 1994, cité par (PILON & YARO, 2001).

2.1.6. Les facteurs socio-démographiques 

2.1.6.1. Le sexe de l'enfant 

« On aime les filles pour ce qu'elles sont et les garçons pour ce qu'ils vont être »2(*) (..., 1821).

Le fait que les filles soient moins scolarisées que les garçons en Afrique subsaharienne est un phénomène bien connu. Beaucoup voient dans ce phénomène l'influence des pesanteurs socioculturelles. Selon (ORIVEL, 1994), la discrimination faite aux filles varierait quelque peu selon les aires culturelles. Elle est plus forte en Afrique francophone et progresse légèrement moins vite vers l'Afrique anglophone.

Les facteurs socioculturels seraient responsables de la sous scolarisation des filles constatée en Afrique subsaharienne; à cause notamment de la conception traditionnelle affectant la femme aux activités domestiques, la précocité des mariages pour les jeunes filles, le statut « d'étrangère » de la fille, etc. (PILON & YARO, 2001).

Pour MUNGAH (1993), cité par (WAKAM & BENZA, 2001) la marginalisation dont sont victimes les femmes en matière de scolarisation tire ses fondements dans le processus de socialisation et d'éducation familiale, qui met plus l'accent sur la dépendance que sur la réussite scolaire des filles.

Les entretiens réalisés sur ce sujet au Mali par (GUEYE & al., 1993)sont illustratifs des perceptions quant à l'utilité de scolariser les filles : « une fille qui a été à l'école sera tentée d'oublier les règles de conduite vis-à-vis de son mari auquel elle doit respect, obéissance et soumission » (homme khassonké), « quand tu envoies une fille à l'école, souvent elle devient inapte pour les travaux ménagers, c'est une perte » (femme peule).

Pierre COCO (1977), cité par(QUENUM, 1998) rapporte que chez les Yoruba « envoyer les filles à l'école, c'est les jeter dans les bras des instituteurs qui en feront des objets de plaisir et déclineront toute responsabilité en cas de grossesse. Or nombre de ces filles sont déjà promises à de braves fermiers entièrement dévoués aux `beaux- parents'... ».

L'étude de (BONINI, 1998) sur les stratégies éducatives du peuple Masaï du Kenya est aussi révélatrice de cette discrimination faite aux filles : « si la scolarisation des garçons peut avoir certaines retombées positives sur l'unité familiale, celle des filles est en général considéré comme inutile, ne pouvant profiter à la famille. En effet, chez les masaï, patrilinéaires et à résidence virilocale, les filles sont amenées à quitter le foyer parental pour aller vivre dans le boma de leur mari (ou de leur beau-père) dès leur mariage.... Les connaissances que la jeune fille aura accumulées durant sa scolarité ne pourront donc être d'aucun profit à ses parents mais bénéficieront en revanche à sa belle-famille au côté de qui elle réside désormais. Les parents perdent alors le bénéfice de la scolarisation de leur fille sans que cette éducation ait un impact positif sur le mariage lui-même. Par conséquent, à cause du futur mariage de leur fille et du départ qu'il provoque, les parents qui attendent certaines retombées du passage à l'école de leurs enfants préfèrent généralement y envoyer les garçons. Pour autant, ils n'opposent pas de fortes résistances à la scolarisation des filles au primaire qui pour inutile qu'elle soit, n'est pas considérée à ce stade du moins, comme nuisible... ».

Aussi, « c'est sous la condition que la mise à l'école d'une fille ne porte pas atteinte au devenir et au statut de ses frères que les choix scolaires s'effectueront. Le temps de la scolarité, le type d'école ou de filière doivent ainsi être considérés comme des choix sociaux et économiques déterminés autant par le fait d'être de sexe féminin que d'être en concurrence au sein de la famille avec des enfants de sexe masculin » (LANGE & al, 1998).

Cette discrimination à l'égard des filles reste de mise même chez certaines personnes instruites et patrilinéaires. « Si j'ai des problèmes d'argent, je donnerai plus de chance aux garçons même si ça ne marche pas fort par ce qu'ils sont appelés à me remplacer(...). Chez nous en pays Adjoukourou, la femme est appelée à vivre ailleurs, nous la considérons comme l'oiseau qui est toujours parti. Le garçon représente le `palmier', celui qui doit vivre sur le patrimoine des parents » (homme ivoirien, chef comptable d'une entreprise, cité par (PROUTEAU, 1998).

Les structures familiales jouent aussi un rôle déterminant dans la scolarisation des filles. Le type de famille (monoparentale, monogamique, polygamique), sa taille et sa composition, de même que la taille et la composition de la fratrie de la fille interviennent dans les chances d'une fille de bénéficier d'une éducation scolaire (LANGE & al, 1998).

(BOP, 1997) affirme que la détérioration des services publics constatée en Afrique se répercute en premier lieu sur la situation des fillettes, du fait qu'elles constituent l'essentielle de la main d'oeuvre féminine.(LANGE & al, 1998)ont montré qu'au lieu que l'indépendance financière et économique de certaines femmes ne se fasse aux dépens des hommes, elle se construit en premier lieu grâce à l'exploitation de la main-d'oeuvre enfantine féminine. Ceci pour la simple raison que « les femmes sont de plus en plus nombreuses à exercer des activités salariées ou informelles tout en maintenant une fécondité élevée, qui en raison des modèles idéologiques dominants, demeure en fait la seule valeur sociale reconnue aux femmes ».(AGBOGAN, 2003)trouve par exemple qu'au Togo : « c'est à Lomé (région la plus scolarisée du pays) que les disparités sexuelles sont les plus importantes. Les garçons de 6-11 ans ont presque quatre fois plus de chance de fréquentation scolaire que les filles ». Ce résultat contredit le constat d'ensemble fait par (LANGE M. F., 2000). Constat selon lequel « les régions aux taux de scolarisation les plus faibles sont aussi souvent les régions où les inégalités sexuelles en matière de scolarisation sont les plus élevées ».

Au niveau global, la proportion des filles dans le total des enfants scolarisés en Afrique se chiffrait à : 38 % en 1970, 42 % en 1980, 44 % en 1985 et 45 % en 1990. A ce rythme de croissance, il faudra encore vingt ans pour parvenir à l'égalité totale entre filles et garçons (ORIVEL F., 1994). Pour l'(UNESCO, 2001), si « l'augmentation du niveau général de participation paraît conduire à une réduction des disparités entre filles et garçons. Mais cela n'est pas toujours le cas. En effet, certains pays ayant pourtant des niveaux de scolarisation relativement élevés (supérieurs à 75 %) connaissent des fortes inégalités entre les sexes (cas de l'Angola, du Cameroun, du Bénin, de la Côte d'Ivoire, des Comores, du Libéria et du Togo) ».

Les années 1990 auront été celles où les institutions internationales et les États ont accordé plus d'attention à la scolarisation des filles. Mais « pour nombre d'acteurs internationaux, l'augmentation de la scolarisation des filles procède davantage d'une vision utilitariste sachant que les filles d'aujourd'hui seront les femmes, les mères de demain que d'une question éthique posée en termes de droit fondamental à l'éducation qui implique la réduction des inégalités » (PILON & YARO, 2001). (LANGE & al, 1998)pour sa part a pu écrire : « persuadés que certaines entraves au développement de l'Afrique résident dans une croissance démographique trop rapide due à une très forte fécondité des femmes qui s'explique par leur faible niveau d'éducation scolaire, certains décideurs posent comme préalable au développement, un niveau minimum d'instruction féminine, par ailleurs jamais clairement quantifié.... Si certaines institutions internationales comme l'UNICEF, insistent sur le droit fondamental des enfants à l'éducation, en y incluant celui des filles) d'autres raisonnent plutôt selon le schéma classique de l'utilitaire où la scolarisation des filles est une nécessité pour assurer la baisse de la fécondité des femmes, pour améliorer le niveau sanitaire des populations (et réduire la mortalité infantile) et plus accessoirement, pour permettre l'implication des femmes dans le domaine économique ».

* 2citée par J. Remy NGONON, Radio Siantou, Yaoundé (septembre 2002)

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