RESUMÉ
La corruption dans la juridiction pénale des Cayes est
de plus en plus menaçante, et l'obligation de respecter le droit
à la liberté de la personne demeure un défi dans ladite
juridiction. Cet état de fais nous pousse à réaliser une
étude qualitative étude sur l'impact de la corruption sur le
droit à la liberté de la personne dans la juridiction des Cayes.
Son objectif est de démontrer que la corruption constitue une entrave au
droit à la liberté de la personne dans la juridiction des Cayes.
La question est par conséquent la suivante : La corruption
constitue- t-elle une entrave au respect du droit à la liberté
de la personne dans la juridiction des Cayes ?
Pour répondre à la problématique, nous
avons affirmé que la corruption constitue une entrave au droit à
la liberté de la personne dans la juridiction des Cayes.
En l'occurrence, pour tester cette hypothèse nous
avons fait une littérature autour de la corruption et le droit à
la liberté de la personne. Puis, une investigation clandestine dont les
résultats obéissent à l'analyse par la théorisation
ancrée. Fort malheureusement, les réponses
récoltées montrent qu'il existe divers formes et divers types de
corruptions dans les institutions judiciaires Cayenne. Pire, a cause cette
corruption le droit à la liberté de certains justiciables est
parfois menacé ou privé en dehors des normes établies par
la loi. Pour finir, nous avons suggéré à l'Etat
haïtien de faire une réforme institutionnelle au sein de l'ULCC et
de mettre en application de l'article 19 de la loi sur la prévention
et répression de la corruption de 2014 dans les institutions judiciaires
Cayenne.
INTRODUCTION GENERALE
L'indépendance d'Haïti en 1804 marque un point
culminant dans l'apogée du droit à la liberté de la
personne à travers le monde. La fin de la captivité, de la
torture, de l'oppression et de l'esclavage dans la première
république libre noire a permis au monde entier de voir les
idéaux d'égalité et de liberté (Helg, 1991).
Pourtant, au lendemain, les premières manifestations de
la corruption ont vite prit naissance. Le nouvel Etat militaire a
distribué des terres et de l'argent de l'Etat comme pots de vin à
des officiers et à des proches (Institut numérique, 2012). A
croire notre père d'indépendance, Jean Jaques Dessalines, il
fallait : « plumez la poule, plumez la poule mais
évitez qu'elle ne crie ». Cela voulait dire que nous savons
que vous êtes en train de détourner l'argent de l'Etat, mais
attention que l'on vous surprenne (Hérold, Avril 2014, p.1).
Dans cet intervalle, ce phénomène a
progressivement infesté notre histoire. A titre d'exemple:
Le 1 er juillet 1904 il y a eu le procès de la
consolidation. C'était une action en justice entreprise par
l'administration publique haïtienne contre des hauts commis de l'Etat pour
avoir dilapidé le trésor publique. Mais c'était en vain,
beaucoup des présumés coupable ont fui le pays. En plus, des
bateaux de guerre française et allemande ont fait pression de
bombardement pour libérer des étrangers impliqués dans les
malversations au jour même de l'assise criminelle. En dépit de
tout, le 25 décembre 1904, le tribunal a rendu un verdict qui a
condamné Vilbrun Guillaume Sam aux travaux forcés à
perpétuité, Tancrède Auguste et Cincinnatus Leconte ont
eu 15 ans de prison (le national, 2019).
Ensuite, le 4 novembre 1975 s'est enchainé le
procès des timbres. C'était une affaire de contrefaction et de
commerce de faux timbre au sein de l'administration publique. Dans le cadre de
cette poursuite, huit personnes dont un ministre du gouvernement ont
été mises aux arrêts. Le 10 septembre 1975, le tribunal a
condamné Frantz Leroy à 7 ans de travaux forcés pour usage
de faux, Guy Leroy et René Exumé à 3 ans de travaux
forcés pour complicité. Ils ont été aussi
condamnés à verser chacun, une amende de 14000 et 30000 dollars
de dommages intérêts. Mais, les condamnés sont sortis de
prison peu de temps après. D'autres n'y ont jamais été et
les amendes et dommages-intérêts n'ont jamais été
versés (le nouvelliste, 2018).
Avec le temps, la corruption a envahi toutes les fibres du
tissu social. C'est-à-dire, elle s'est installée dans tous les
secteurs d'activités, en passant par le commerce, la santé,
l'éducation, la diplomatie, la politique et notamment la justice. Elle
est donc devenue un état normal dans la vie quotidienne (Unité de
Lutte Contre la Corruption, 2007).
De nos jours, Haïti est même placé comme
étant le pays le plus corrompu du caraïbe (Transparency
International, 2019). En effet, la corruption à colonisée la
balance judiciaire haïtienne. Elle est devenue l'institution le plus
corrompu du pays, avec un taux de 81% (Unité de Lutte
Contre la Corruption, 2007). L'allégorie de la justice aux yeux
bandés n'est plus fiable aux yeux de l'opinion publique. La magistrature
est manipulée par le gouvernement et des groupes économiquement
puissants (Unité de Lutte Contre la Corruption, 2015).1(*)
À part la dépendance de la justice
haïtienne, le déficit des procédures et des moyens
d'enquêtes qui constituent les carences structurelles de notre
chêne pénal, certains officiers judiciaires exploitent le
côté tragique de ces carences en utilisant le service public
judiciaire comme fonds de commerce. Par exemple, des greffiers sollicitent des
pots de vin et d'autres formes de paiements qui sont purement illicites. En cas
de refus, le dossier du concerné reste dans les tiroirs ou disparaissent
tout bonnement (Réseau National de Défense des Droit Humains,
2015).2(*) À croire
Me Rony Bien-Aimé, représentant de l'assistance
légale : « Le dispositif de jugement qui permet
d'avoir l'ordre de libération d'un détenu ou d'un accusé
est la chose qui disparait le plus facilement et un détenu qui n'a aucun
greffier ou magistrat dans sa poche pour le suivi de son dossier dans les
tribunaux haïtien est totalement foutu. Si on ne trouve pas de dossier, il
est possible qu'il soit incarcéré pour le restant de ses
jours ». Pourtant, les greffes représentent le poumon de
l'appareil judiciaire et les magistrats sont des garants du respect et de la
mise en oeuvre du droit à la liberté de la personne (le
nouvelliste, 2017).
En conséquence, de l'autre côté des
barreaux, une peur intense de la prison poussent des détenues à
accepter de négocier la célérité de leur dossier
(MINUJUSTH, 2019). Il existe même des cas où un magistrat3(*) autorise un prévenu
déjà incarcéré à se rendre à la
banque vue retirer la somme de 49 500 dollars américain pour arroser les
parquetiers, avec la garantie de sa relaxation. L'affaire MadsenClervoyant dans
la juridiction de Gonaïves en mars 2015 qui a salit l'image de l'appareil
judiciaire haïtien illustre fort bien cette pratique (Réseau
National de Défense des Droits Humains, 2015, p.7).
Ces actes constituent, une violation de l'article 7 de la
convention interaméricaine des droits de l'homme, ratifiée par
Haïti le 18 août 1979 ; Ensuite, des articles 24, 24-1, 24-2, 24-3,
25-1, et 26 de la constitution haïtienne du 29 mars 1987 ; puis, de
l'article 9 de la déclaration universelle des droits de l'homme du 10
décembre 1948, qui dispose que : « nul ne peut
être arbitrairement arrêté, détenu ni
exilé» ; enfin, de l'article 9 du pacte international relatif aux
droits civils et politiques, ratifié par Haïti le 6 février
1991, protégeant l'individu contre les arrestations arbitraires.
Par ailleurs, depuis le 14 Mai 2007, Haïti a
ratifié la convention des Nations Unies contre la corruption
adoptée par l'assemblées générale des Nations
Unies. Puis, le 9 mai 2014 l'Etat a adopté une loi portant
prévention et répression de la corruption. Alors, pourquoi
jusqu'à date aucune condamnation pour corruption n'est connu au sein de
la justice ?
Depuis le 8 septembre 2004, l'État a pris un
décret pour créer une unité de lutte contre la corruption
(l'ULCC). Ensuite, le 13 novembre 2007 l'Etat a aussi adopté une loi
créant le conseil supérieure du pouvoir judiciaire (CSPJ), une
institution qui a pour mission le contrôle disciplinaire de la
magistrature. Alors, pourquoi la corruption persiste-t-elle encore dans
notre système judiciaire ?
Le 20 novembre 2017, Me Frantz Badette juge et juge
d'instruction au tribunal de première instance des Cayes a
été révoqué pour corruption (Conseil
Supérieur du Pouvoir Judiciaire, 2017). Ensuite, Me Yvon Pradel,
substitut au parquet Tribunal du Première Instance des Cayes a aussi
été révoqué pour corruption et comportement
attentatoire à la dignité de la magistrature (Mémorandum
du CSPJ, 2019 ; le nouvelliste, 2019), le lundi 15 Janvier 2018, des avocats du
barreau des Cayes ont même dus procéder à une fermeture
forcée du Tribunal de Première Instance (TPI) de la ville. Ceci
dans le cadre d'une protestation contre la corruption qui est devenue
irrépressible dans la juridiction des Cayes (Réseau National de
Défense des Droits Humains, 2018, p.10). En plus, la clameur publique ne
cesse de décrier les faits de corruption dans la justice pénale
Cayenne. Le fléau est même devenu empiriquement observable dans
ladite juridiction, les magouilles, les sollicitations des pots-de-vin et les
malversations sont devenues des moyens d'enrichissement de certains agents
publics. Il est donc clair que la corruption existe dans la justice Cayenne,
mais est-ce que c'est isolé ou bien structurelle ? Qui est
impliquée ? Comment se manifeste-t-elle ? Comment
influence-t-elle les décisions judiciaires ?
En somme, « La corruption
constitue-t-elle une entrave au respect du droit à la liberté de
la personne dans la juridiction des Cayes ? »
C'est cette question qui guidera notre travail et que l'on tentera de
répondre tout au long de notre étude.
Nous proposons donc comme hypothèse, que
« la corruption constitue une entrave au respect du droit
à la liberté de la personne dans la juridiction des
Cayes ».
En l'occurrence, cette étude servira donc à
démontrer la relation qui existe entre la corruption et le non-respect
du droit à la liberté de la personne dans la juridiction des
Cayes.
Puis, les résultats de cette recherche serviront du
même coup à ouvrir le champ à d'autres chercheurs
intéressés dans ce domaine.
Puis, la pertinence et l'intérêt de cette
étude résident dans le fait qu'elle démontrera que le
droit à la liberté de la personne en Haïti est aussi
sapé de manière volontaire,a l'opposé des autres travaux
de recherches qui avancent toujours des arguments matérialistes (loi
inadaptée, manque de moyen, carence de fonctionnaire...), et que les
violations du droit à la liberté de la personne sert à
satisfaire les intérêts des auteurs chargés de le faire
respecter.
Compte tenu de cela, il convient premièrement de
faireune revue de littérature sur la corruption, le droit à la
liberté de la personne et de la justice pénale haïtienne.
Puis en second plan,nous allons présenter le cadre
méthodologique, l'enquête et lesrésultats de cette
recherche.
* 1Il est à
remarquer comme faiblesse que ce rapport de l'ULCC n'a pas pu dévoiler
les groupes économiquement puissants qui manipulent la magistrature
haïtienne.
* 2Il est à
remarquer que ce rapport n'a pas illustré des exemples de greffiers qui
y sont impliqués
* 3C'était le
chef du parquet de Gonaïves, Me EnorckGénéGenelus, il a
été révoqué mais pourtant il n'y a jamais eu de
poursuite judiciaire contre lui.
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