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Le NEPAD ou l'ère de la conditionnalité intériorisée

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par Julien Vlassenbroek
Université de Louvain-La-Neuve (UCL) - Diplôme d'études spécialisées en études du développement 2005
  

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4. Evaluation sommaire

Après avoir très succinctement dressé le portrait robot du NEPAD, on va à présent tenter d'en réaliser une brève évaluation en s'appuyant sur la littérature, dorénavant assez consistante, disponible sur le sujet.

Il ne s'agit pas ici de procéder dans une perspective normative, le but n'étant pas de condamner ou d'encenser le NEPAD per se mais bien de mettre en avant les éventuelles forces et faiblesses de ce document. Le fait est que si l'on s'en réfère aux publications à prétention scientifique, une compilation du matériel disponible concernant ce plan livre une balance avec un plateau plus garni du côté `faiblesses' que du côté `forces' - un constat qui ne vaut pas par contre pour la littérature `officielle' comme on le verra par la suite -.

Ce n'est donc pas d'une position idéologiquement marquée de ma part mais bien d'une tentative de refléter la tendance générale des considérations académiques sur le NEPAD dont j'ai pris connaissance qu'est issu le déséquilibre quantitatif entre les deux parties qui suivent.

4.1. Les forces potentielles

Dans un article consacré aux liens entre NEPAD et développement durable31(*), d'ailleurs assez critique vis-à-vis de ce dernier, Ji Kang Kim, chercheuse au CIPS (Centre for International Political Studies de l'Université de Pretoria), dégage néanmoins des grandes lignes de force de ce « Nouveau Partenariat » : tout d'abord, elle relève le fait qu'il y soit formellement reconnu que l'Afrique a désormais besoin de prendre son destin en main, de compter sur elle-même pour réaliser son développement et qu'à ces fins, le texte se concentre sur les moyens de renforcer les facultés des peuples africains à peser sur les décisions et de construire une Afrique autonome ; ensuite, Kim évalue le fait que soit reconnue l'importance prégnante des priorités établies au niveau national pour établir des plans de développement dans plusieurs domaines (lutte contre le HIV/SIDA, développement des technologies de la communication, accès aux marchés, etc.) comme un des principaux aspects positifs du document ; enfin, le fait que la plupart des objectifs du NEPAD soient calqués sur l'agenda des organisations multilatérales32(*) constitue potentiellement un `plus' puisque cela devrait logiquement faciliter la coopération en vue d'atteindre ceux-ci. Ainsi de nombreux auteurs s'accordent pour dire que « one of NEPAD's strenghts is its timeliness with repsect to key donors in the OECD and G8 »33(*).

L'intérêt de cet extrait de l'article de Kim est qu'il offre une vision synthétique de la plupart des éléments généralement évalués comme les points forts du document qui fait l'objet de la présente étude.

Et si les aspects mentionnés ci-dessus ne semblent pas se distinguer par leur caractère innovateur, Alex De Waal juge qu'il s'agit là d'un élément qui renforce le NEPAD plus qu'il ne le dessert : « What's new about NEPAD ? In many respects, not much - and this is one of its strengths. Africa doesn't need new paradigms; what it needs is a proper application of lessons already learned, and a replication and broader application of existing best practices. NEPAD's leaders like to say that what's new is the `political will' behind the initiative »34(*).

Et cet engagement à fournir un volontarisme politique se concrétise d'ailleurs dans le document par les innombrables références et promesses de soumission aux impératifs de la bonne gouvernance que ce soit sur le plan politique ou économique. Et c'est ici que se situe ce que la plupart des analystes décrivent comme le principal atout du NEPAD, son innovation la plus marquante, à l'instar de Jephthah Gathaka et Smokin Wanjala, par exemple, pour qui « the only way in which NEPAD can be said different from other initiatives is taht, for the first time, it acknowledges the fact that poor political leadership characterised by human rights violations, economic mismanagement, and corruption is the cause of the African problem »35(*), ou encore de Ross Herbert qui considère que « the aspect of NEPAD with the greatest potential to change Africa's image and the dynamics of development is its promise to deliver good governance »36(*). Il faut dire que ce dernier concept est dans l'air du temps.

En effet, non seulement des auteurs comme Kempe Ronald Hope37(*), Feng38(*) ou Tavares et Wacziarg39(*) se sont attelés récemment à démontrer l'existence d'une corrélation entre pratiques démocratiques et de bonne gouvernance d'une part, et ce qu'ils désignent comme des performances économiques synonymes de développement (taux de croissance positif, hausse des revenus, libéralisation économique,...) d'autre part mais plus fondamentalement, il est généralement admis, dans le sillon d'Alfred Zack-Williams, que la bonne gouvernance (et plus précisément la consolidation démocratique) est une condition sine qua non du développement : « no democracy, no development »40(*). Ce courant académique est à la fois la source et le reflet d'un contexte idéologique international fortement marqué par cette idée de corrélation bonne gouvernance/développement. Ainsi, dans son rapport annuel, Kofi Annan, le Secrétaire général des Nations Unies, écrivait-il : « good governance is perhaps the single most important factor in eradicating poverty and promoting development »41(*), suivi dans cette voie par le Secrétaire exécutif de l'UNECA, M. Amoako d'après qui « good governance is essential for the political and economic transformation of Africa »42(*). Comme on le voit, l'allégeance aux impératifs de la bonne gouvernance exprimée dans le NEPAD apparaissait comme inévitable à tout plan de développement digne de ce nom sous peine d'obsolescence vis-à-vis de la communauté internationale.

Mais au-delà de la déclaration de principes contenue dans le plan, ce qui suscite généralement l'enthousiasme des observateurs, c'est plutôt la décision prise par le Comité de mise en application du NEPAD de contrôler le respect des critères démocratiques et de bonne gouvernance à travers l' « African Peer Review Mechanism » (APRM), version africaine du « Peer Review System » (ou « système de surveillance par les pairs », soit un système de contrôle systématique et mutuel des performances des Etats en matière de gouvernance par les autres Etats) mis en place par l'OCDE il y a de cela 40 ans.43(*)

Ainsi pour Hope, ce ne sont pas les articles concernant la volonté d'améliorer la gestion politique et économique de l'Afrique mais bien l'APRM qui constitue « the most innovative - and critically significant - aspect of the NEPAD ». L'auteur dresse d'ailleurs un portrait plus qu'élogieu de cet instrument institutionnel qu'il décrit comme « a bold and imaginative attempt to launch a total war on the endemic problems of bad governance, unsustainable development and overwhelming poverty that have been confronting Africa for several decades »44(*).

Cet enthousiasme, qui frôle la naïveté, n'est cependant pas partagé par tous, même parmi les auteurs les plus convaincus par l'utilité de l'APRM. Alex De Waal considère par exemple que ce mécanisme constitue certes un instrument qui détient le potentiel de démarquer réellement le NEPAD des plans précédents mais seulement à condition que la qualité et la crédibilité de l'APRM soient garanties, ce qui reste encore à accomplir.45(*)

Richard Ilorah émet également un avis bienveillant mais prudent à l'égard de ce mécanisme dont il relève surtout qu'il devrait fournir à l'Union Africaine un moyen d'enfin imposer des règles strictes à ses membres à condition que cet organisme parvienne à élaborer des standards de gouvernance économique et politique clairs, permettant une analyse objective des performances des gouvernements africains.46(*)

* 31 J. Kim, « Africa Sustainable Development and the Establishment of NEPAD », African Institute of South Africa, Pretoria, 5 décembre 2003, url: http://www.ai.org.za/electronic_monograph.asp?ID=15

- Version PDF disponible sur www.up.ac.za, url:www.up.ac.za/academic/cips/Publications/ Africa's%20sustainable%20development%20and%20NEPAD.pdf

* 32 Aspect qui est également envisagé comme une faiblesse par le même auteur en ce qu'elle est un indice de l'inféodation des rédacteurs du plan aux desideratas des bailleurs de fonds.

* 33 A. De Waal, « What's new in the `New Partnership for Africa's Development'? », International Affairs, vol. 78, n°3, Londres, juillet 2002, p. 469.

* 34 Id., p. 465.

* 35 J. Gathaka et S. Wanjala, « Kenya and NEPAD », in H. Melber, R. Cornwell, J. Gathaka et S. Wanjala, The New Partnership for Africa's Development (NEPAD) - African Perspectives, Nordiska Afrikainstituet Discussion Paper n°16, Uppsala, 2002, p. 18.

* 36 R. Herbert, « Implementing NEPAD : A Critical Assessment », in R. Culpeper (éd.), Africa Report: Assessing the New Partnership, North-South Institute, Ottawa, 2002, p. 108.

* 37 K. R. Hope, « From Crisis to Renewal: Towards a successful Implementation of the New Partnership for Africa's Development », African Affairs, vol. 101, n° 404, Oxford, juillet 2002, pp. 387-402.

* 38 Y. Feng, « Democracy, Governance, and Economic Performance : Theory and Evidence », MIT Press, Cambridge, 2003.

* 39 J. Tavares et R. Wacziarg, « How Democracy Affects Growth », European Economic Review, vol. 45, n° 8, août 2001, pp. 1341-1378.

* 40 A. B. Zack-Williams, « No democracy, no development: Reflections on Democracy and Development in Africa », Review of African Political Economy, vol. 28, n° 88, juin 2001, pp. 213-223.

* 41 United Nations, « Annual Report of the Secretary-General on the Work of the Organization », doc. A/53/1, United Nations, New-York, 1998, p. 13; texte complet disponible sur http://www.un.org/Docs/SG/Report98/con98.htm

* 42 K. Y. Amoako, « Perspectives on Africa's Development », United Nations, New York, 2000, p. 155; texte complet disponible sur http://www.uneca.org/eca_resources/publications/books/perspectives_on_africa_s_development/default.htm

* 43 K. R. Hope, Sr., « Toward Good Governance and Sustainable Development: The African Peer Review Mechanism », Governance, vol. 18, n° 2, Londres, avril 2005, p. 289.

* 44 Id., p. 306.

* 45 A. De Waal, op. cit., pp. 471-472.

* 46 R. Ilorah, « NEPAD : The Need and Obstacles », African Development Review, vol. 16, n° 2, septembre 2004, Oxford, pp. 237-240; texte complet disponible sur http://www.blackwell-synergy.com/doi/abs/10.1111/j.1017-6772.2004.00090.x

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote