UNIVERSITE PIERRE MENDES FRANCE, GRENOBLE II
FACULTE DE DOIT
MASTER DE DROIT INTERNATIONAL PUBLIC ET
EUROPEEN
THEME DE
MEMOIRE
« Les initiatives
d'intégration en Afrique »
rédigé par :
Papa Lafatime
Sène
Année
universitaire : 2005/2006
TABLE DES MATIERES
I - L'historique du projet d'intégration africaine et
son évolution
A- Les tentatives d'intégration
régionale en Afrique
1- La multiplicité des fondements historiques et
théoriques inspirant l'intégration
régionale en Afrique
2- Les tentatives de regroupement
politique
B- La nature des obstacles freinant à
l'intégration régionale en Afrique
1- Les obstacles endogènes
2- Les obstacles liés à
l'histoire spécifique de l'Afrique
II - La recherche d'une intégration africaine par la
mise en place de
structures d'intégration diverses
A- Les communautés économiques
régionales, pilier de l'intégration
régionale
1- Le rôle des communautés
économiques régionales dans le processus d'intégration
régionale
2- L'enjeu de l'intégration
régionale face à la problématique du financement
B- Les organisations internationales
chargées de la gestion de politiques
sectorielles
1- La gestion intégrée des
bassins fluviaux
2- la prise en charge des défis
environnementaux dans un cadre régional
III - L'originalité d'une intégration
régionale réussie en Afrique :
le cas de l'Afrique de l'Ouest
A- L'exemple de la Communauté
économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
1- Les avancées en matière
d'intégration réalisées par la CEDEAO
2- Le cadre institutionnel de la CEDEAO
B- L'exemple de l'Union économique et
monétaire ouest africaine
1- Les réalisations de l'UEMAO
depuis sa création
2- Les perspectives de l'UEMAO
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
SITES INTERNET
La configuration actuelle de l'Afrique, qui compte dans son
ensemble 53 Etats
SIGLES
BCEAO......... Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest
AOF............ Afrique Occidentale française
UEMOA....... Union économique et monétaire Ouest
africaine
UMOA........ .. Union monétaire ouest africaine
CEDEAO.........Communauté économique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest
CEMAC..........Communauté économique et
monétaire des Etats de l'Afrique centrale
UMA ........... ... Union du Magreb arabe
CER...............Communauté économique
régionale
NEPAD...........Nouveau partenariat pour le développement
de l'Afrique
COMESA......... Marché commun de l'Afrique orientale et
australe
CEEAC...........Communauté économique des Etats de
l'Afrique centrale
CILSS..............Comité de lutte contre la
sécheresse au Sahel
OMVS ............Organisation pour la mise en valeur du fleuve
Sénégal
ABN .............. Autorité du basin du fleuve Niger
RIOB...............Réseau international des organisations
de bassin
CBLT...............Commission du bassin du Lac Tchad
IBN.................. Initiative du basin du Nil
RAOB.............. Réseau africain des organisations de
bassin
F. CFA............. franc de la Communauté
financière africaine
BAD............... Banque africaine de développement
ALENA ......... Accord de libre échange Nord
américain
UE ............... Union européenne
PCS................Prélèvement communautaires de
solidarité
TEC................Tarif extérieur commun
FCMV..............Fond de compensation de moins-values
FAIR............. Fond d'aide d'intégration
régionale
INTRODUCTION
Suite à la résolution 1514 de
l'Assemblée générale des Nations -Unies portant sur
l'octroi de l'indépendance aux peuples coloniaux, adoptée le 14
décembre 1960, la majorité des pays africains a
accédé à la souveraineté internationale avec un
très lourd handicap. En effet les frontières de ces derniers sont
toutes issues des décisions du concert européen qui, réuni
du 15 novembre 1884 au 26 février 1885 à l'invitation du
chancelier allemand Otto Von Bismark, décida la balkanisation,
communément appelée partage de l'Afrique. Ceci a fait que les
frontières internationales des Etats africains correspondent aux limites
administratives des anciennes colonies. On constate alors que la plupart de ces
nouveaux Etats sont de dimension modeste, tant sur le plan
démographique, territorial qu'économique. Enfermés dans
un carcan d'espace socio-économique étroit les Etats africains
se rendent compte de la nécessité de dépasser le cadre
de leur souveraineté nationale. Bien que de nombreux efforts aient
été fournis en faveur de l'unité africaine en
général, force est de constater que le chemin qui reste à
parcourir est encore long. Au niveau national, un grand nombre de pays
africains sont toujours la proie de crises politiques à
répétition. Sur le plan régional, certaines régions
de l'Afrique (les Grands Lacs) sont instables, phénomène qui
entrave leur développement économique. Au plan international,
l'Afrique doit fournir beaucoup d'efforts pour s'intégrer dans
l'économie mondiale. Face à cet état de fait, la
recherche d'une voie à même de relever le défi du
développement, dans un monde entièrement globalisé se fait
de plus en plus pressante. Dans une telle perspective, l'intégration
régionale apparaît comme la réponse la plus
adéquate, au-delà de l'Etat-nation post colonial.
La collaboration dans le cadre de l'intégration
régionale suppose la construction d'un espace géographique qui
aboutit à une interdépendance structurelle entre
différents Etats qui ont une proximité spatiale. Nous pouvons
alors dire que l'intégration régionale dépasse la stricte
intégration économique en ce sens qu'elle peut engager tous les
domaines de compétence étatiques et entraîner un certain
partage de souveraineté .Ce mécanisme, au regard de la taille
des pays africains, permettrait à ces derniers de faire ensemble ce qui,
à l'échelle d'un seul Etat, aurait été difficile,
voire impossible à réaliser. La création de l'Organisation
de l'Unité africaine en 1964 reflétait la sensibilisation des
responsables de l'époque au fait que la force de l'Afrique reposerait
sur la coopération panafricaine. Sur l'ensemble du continent, les
leaders politiques et les citoyens ont pris des mesures pour ouvrir et
transformer des économies centralisées, dynamiser le secteur
privé et créer des institutions qui peuvent appuyer la
stabilité politique et de favoriser le développement
économique. Des Communautés économiques régionales
sont à l'oeuvre aujourd'hui en Afrique de l'Ouest en Afrique de l'Est,
en Afrique du Nord, en Afrique centrale et en Afrique australe. Ainsi le
traité instituant la Communauté économique africaine
laisse entrevoir la possibilité d'une économie continentale. La
charte de l'Organisation de l'unité africaine et l'acte constitutif de
l'Union africaine définissent l'intégration régionale
comme l'un des piliers de l'unité africaine. Le plan de Lagos et
traité d'Abuja précisent les mécanismes
économiques, politiques et institutionnels permettant de
concrétiser cette aspiration. Le nouveau partenariat pour le
développement de l'Afrique (NEPAD) offre au continent africain un cadre
de développement global qui fait de l'intégration
régionale un des principaux objectifs du développement.
Les données statistiques montrent que les
mécanismes d'intégration contribuent à la
prospérité des pays membres. Il est démontré ainsi
que l'Accord de libre échange Nord américain a
considérablement augmenté l'investissement direct étranger
au Mexique et le (MERCOSUR) a eu le même effet en Argentine. D'ailleurs
que le poids de certains blocs telles que l'Union européenne (U.E) ou
l'ALENA, témoigne de la nécessité pour les pays africains
de se constituer en groupements régionaux. Ces impératifs ont
suscité une prise de conscience des leaders africains de
l'intérêt que présente l'intégration
régionale en tant que facteur apte à contribuer, non seulement
à leur développement économique, mais également
à leur intégration dans l'économe mondiale. Une telle
prise de conscience s'est traduite progressivement par la création de
multiples organisations internationales dont certaines s'apparentent
à des structures de coopération et d'autres qui revêtent la
forme d'organisations ayant pour finalité la réalisation de
l'intégration des différentes régions en Afrique.
Pour mieux se rendre compte de l'état de
l'intégration régionale en Afrique, il importe, au
préalable, de passer en revue l'historique du projet
d'intégration africaine et son évolution (I). Aujourd'hui
l'Afrique recherche son unité politique et son développement
économique par la création de structures d'intégration
multiples (II), mais parmi toutes ses régions, seule l'Afrique de
l'Ouest constitue, aujourd'hui, un exemple d'une intégration
réussie (III).
I- L'historique du projet
d'intégration africaine et son évolution
Selon Adotévi (anthropologue et philosophe
burkinabé), le regain d'intérêt que suscite
l'intégration en Afrique constitue la recherche d'une identité
culturelle et sociale dont les racines et la légitimité sont plus
fortes que celles proposée par les Etats actuels. Cependant
malgré les nombreuses tentatives qui ont été entreprises
(A), l'intégration régionale s'est toujours heurtée
à de nombreux obstacles (B).
A- Les tentatives multiples d'intégration
régionale en Afrique
L'intégration régionale en Afrique s'est
inspirée de fondements historiques divers (1) et a donné lieu, au
sortir des indépendances, à des expériences pratiques au
niveau politique (2).
1)- La multiplicité des fondements
théorique et historique inspirant
l'intégration régionale
en Afrique
Deux courants idéologiques ont dominé les
débats politiques et les tentatives gouvernementales concernant la
coopération et l'unité africaine: le panafricanisme et la
négritude.
Le panafricanisme avait pour objectif l'autodétermination
et l'unité africaine à travers un projet politique
très ambitieux. Dans son livre, « Africa must unite », Kwame
krumah (leader politique ghanaen) préconisait la réalisation de
l'unité africaine par la formation des « Etats-Unis
d'Afrique », une Afrique continentale. Son idée a donné
lieu à de nombreux débats qui n'ont pu aboutir qu'à la
réalisation de l'Organisation de l'unité africaine en 1963. Pour
Kwame Nkrumah le panafricanisme doit bannir non seulement les frontières
et limites coloniales, mais également les différences tenant aux
particularismes ethniques et linguistiques.
Si le panafricanisme s'est situé sur le terrain politique,
un autre courant de libération du continent africain pour son
unité s'était formé à Paris. La négritude
est née de la rencontre, notamment, entre Léopold Sédar
Senghor, Léon Gontran Damas, Aimé Césaire et Birago Diop.
La négritude est définie comme l' «ensemble des valeurs
culturelles du monde noir, telles qu'elles s'expriment dans la vie, les
institutions, et oeuvres des noirs ». Mais contrairement au
panafricanisme, la négritude a négligé la lutte politique
pour se situer sur le terrain culturel. C'est ainsi qu'elle a été
utilisée par Léopold Sédar Senghor pour dénoncer la
balkanisation de l'Afrique. Senghor soutenait le processus d'intégration
sur une base culturelle. Et ce fondement culturel remonte dans le passé
lointain de l'Afrique.
Avec ses 30 millions de km2, l'Afrique est le deuxième
continent de la planète après l'Asie. Outre les grands empires
comme le royaume de Koush et le royaume d'Aksoum qui ont vécu
respectivement en 500 avant Jésus Christ et au Ier
siècle après Jésus Christ, l'histoire de l'Afrique est
jalonnée par l'existence de différents empires qui englobaient de
grands ensembles territoriaux. En effet c'est au début du Veme
siècle de notre ère qu'émergea, par exemple, en Afrique de
l'Ouest l'empire du Ghana sur le site de Koumbi saleh. Fondé par le
peuple Soniké, cet empire étendait son hégémonie
sur l'actuel sud-ouest de la Mauritanie, du Mali et du Nord du
Sénégal .C'est à partir de 1078 que les Almoravides, venus
du Maroc, envahissèrent le Ghana. Les Almoravides seront chassés
par les Soussou du fouta Djalon, anciens vassaux du Ghana. Ils
détruisirent Koumbi Saleh en 1203. Mais très vite le roi Soussou
subit une défaite par le petit « Etat » kangaba
dirigé par le mandingue Soudiata Kéita, fondateur de dynastie
mandingue, qui parvint à unifier les clans d'une vaste région qui
allait devenir l'empire du Mali. A son apogée, autour de 1300, l'empire
était une confédération de trois
« Etats » alliés indépendants (Mali,
Mémo,Wagadan) et s'étendait à la place du Mali, du
Sénégal et de la Guinée actuels; ses grandes villes
étaient Djenné et Tombouctou. Au XlVeme siècle les
provinces vassales de l'empire du Mali se sont révoltées. Parmi
celles-ci, le SonghaÏ qui commença à s'agrandir autour de
Gao et conquiert Djenné en 1471. Le peuple SonghaÏ venu de la
région du Dundi, Nord-Ouest de Niger s'est étendu en remontant le
fleuve Niger au Vlleme siècle. C'est sous la dynastie Soni que le
SonghaÏ se lança à la conquête du Mali. Mais c'est
surtout la dynastie Askia qui permit à l'empire SonghaÏ
d'étendre son influence sur Tombouctou en évinça l'empire
du Mali pour ensuite.
En 1591 le Sultan du Maroc, Ahmed Al Mansour conquiert
l'empire du Mali.
Cette batail consacra la fin de l'empire SongaÏ mais aussi
le déclin des villes sahéliennes tandis que la création
des comptoirs commerciaux européens à Saint-Louis, à
Gorée, au Cape Coast d'Accra etc.., assurait le triomphe du commerce
atlantique.
C'est dans l'ambition de vouloir reconstruire les unités
territoriales d'antan que les leaders africains ont expérimenté,
dès les premiers jours des indépendances, des regroupements
politiques puis économiques afin de parvenir à une
intégration régionale et de façon plus globale à
l'unité africaine.
2) - Les tentatives de
regroupement politique
L'accession à l'indépendance avait ouvert de
nouvelles perspectives aux peuples africains qui se trouvèrent
partagés entre deux objectifs contradictoires, celui de l'unité
et celui de la construction de l'Etat-Nation. Ainsi malgré les
mouvements panafricanistes et la négritude, les nouveaux Etats
sacralisèrent leurs frontières par le biais d'une
résolution de Modibo Kéita, adoptée par l'Organisation de
l'unité africaine. Auparavant, à la fin des années 1960,
le débat sur la forme des futurs Etats indépendants suscitait de
profonds antagonismes au sein des classes politiques africaines.
En Afrique de l'Ouest, quatre Etats vont porter un projet de
constituer une fédération. Cependant sous la pression du
Général de Gaule et d'Houphouet Boigny, président de la
Côte d'Ivoire, le Dahomey (Bénin) et la Haute Volta (Burkina Faso)
vont se retirer du projet. L'union est alors réduite à un
tête à tête entre le Sénégal et Soudan (Mali).
Le 4 avril 1960, l'Assemblée fédérale va élire son
président en la personne de Léopol Sédar Senghor et un
chef de gouvernement, Modibo Kéita (futur président du Mali).
La fédération du Mali était née.
Ratification des accords de compétence entre le chef
du gouvernement de la fédération du Mali, Modibo
Kéita et le
Ministre d'Etat français, Louis Jacquinot
Modibo Kéita (assis) est applaudi
Debout à gauche: Jacques Foccart lisant son
discours par l'Assemblée fédérale qui vient de
l'élire
à droite : Léopold Sédar
Senghor
Assis de gauche à droite : Louis Jacquinot
Modibo Kéita
Mamadou Dia
Mais très vite des désaccords subsistèrent
entre les leaders de la fédération nouvellement instituée.
Dans la nuit du 19 au 20 août 1960, la fédération va
connaître son éclatement irréversible. Les
désaccords portaient sur cinq points :
1- Une différence de conception de l'expérience
fédérale :
Les soudanais voyaient en la fédération du Mali,
une étape vers un Etat unitaire, les sénégalais s'en
tenaient à l'idée d'une confédération plus
souple.
2- Un désaccord sur le type de relation avec la
France.
Partisan de l'africanisation des cadres de la
fédération, Modibo Kéita dénonçait la
présence de fonctionnaires français à certains postes de
responsabilité au sein de l'administration sénégalaise et
affirmait ouvertement ses sympathies pour le FLN pendant la guerre
d'Algérie, Senghor lui, était opposé à de telles
positions qui ne pouvaient que déplaire à la France.
3-Certaines initiatives politiques des soudanais étaient
considérées comme une immixtion dans les affaires
intérieures du Sénégal. Cette accusation concernait
notamment les contacts que Modibo Kéita avait noués avec les
chefs religieux locaux.
4- Les vues controversées à propos du choix du
futur président de la fédération dont l'élection
était prévue pour le 27aoùt 1960, les soudanais ne voulant
pas de Senghor à la tête de la fédération du Mali,
vont déployer de grandes manoeuvres politiques pour empêcher son
élection . Ils iront même jusqu'à susciter les candidatures
des sénégalais comme Mamadou Dia puis Lamine Gueye contre leur
chef de fil.
5- Les divergences portaient également sur la constitution
d'un marché commun et la création d'une grande zone
monétaire africaine ne se limitant pas seulement aux anciennes colonies
françaises.
D'autres expériences de ce type vont être
tentées mais sans grands succès. Le 1er mai 1959 fut
la date de la création de l'Union Ghana- Guinée entre deux pays
sans frontière géographique. Cette union sera
concrétisée par la nomination d'Ambassadeur au rang de
ministre-résident au conseil des ministres des deux Etats et par un
prêt de 10 millions de livres sterling du Ghana à la
Guinée. Le 24 décembre 1960, le Mali rejoint cette Union qui
devient Ghana- Guinée - Mali. L'Union qui n'a jamais fonctionné,
apparaissait plus symbolique que réelle; elle n'a pas été
dissoute non plus. Par ailleurs le projet de l'Union des Républiques
d'Afrique centrale n'a pas pu voir le jour à cause de l'hostilité
de la France et de Léon Mba (président du Gabon). Tout ce
balbutiement aboutit le 25 mai 1963 à la création, à Addis
Abéba, de l'Organisation de l'unité africaine, qui fut une
institution de coopération économique et de lutte politique au
niveau du continent africain dans son ensemble.
Telles sont l'essentiel des initiatives prises par les Etats
africains sur le plan politique pour créer les bases de
l'intégration régionale, qui s'est toujours heurtée
à des obstacles multiples.
B- La nature des obstacles
freinant à l'intégration régionale en
Afrique
Depuis l'accession des Etats africains à
l'indépendance, les leaders de ces derniers n'ont cessé
d'affirmer leur volonté de parvenir à une intégration
régionale à moyen et long terme. Nonobstant les engagements des
différents Etats africains, il faut constater que l'intégration
régionale butte sur des obstacles de nature endogènes (1), qui
n'occultent pas pour autant ceux liés à l'histoire
spécifique de l'Afrique (2).
1)- Les obstacles
endogènes allant à l'encontre de l'intégration
régionale en
Afrique
L'observation de la situation générale de l'Afrique
nous fait remarquer trois causes principales qui sont de nature à
freiner l'intégration régionale en Afrique :
- l'instabilité politique chronique.
- la multiplicité des organisations
internationales parfois concurrentes.
- la faiblesse du niveau de développement
économique.
Depuis les années 1960, les Etats du tiers-monde,
notamment africains, sont des foyers de tension et de déplacement de
population. Par exemple en 1993 on relevait dans le monde quatre zones
principales de tension (Europe, Asie, Amérique, Afrique) avec 28 Etats
dont la majorité se situait en Afrique. Ces tensions rendent
évidemment particulièrement instable les régions
concernées qui deviennent de ce fait des zones
déséquilibrées. Depuis 1948, selon un rapport de la banque
mondiale, il y a au moins, par pays en développement une tentative de
coup d'Etat tous les cinq ans; le record dans ce domaine est détenu par
l'Afrique. Il en résulte une crise politique sur fond de dictature de
violence et de rivalité régionales.
L'instabilité politique a ainsi tendance à devenir
un fait constant, bloquant le processus d'intégration. La prise de
conscience de cet état de fait a conduit les Etats de la
Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO),
pour ce qui concerne les tensions politiques, à conclure en 1977 des
traités multilatéraux de non agression et d'assistance mutuelle
en matière de défense et de sécurité.
En dépit de ces accords, on a relevé deux conflits
qui ont pu survenir entre le Mali et le Burkina en 1985, la Mauritanie et le
Sénégal en 1989. Par ailleurs la région des grands Lacs
connaît depuis les années 1990 une crise majeure qui implique sept
pays de la régions: la République démocratique du Congo,
le Zimbabwe, la Namibie, le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda, l'Angola.
Dans un deuxième point, il existe en Afrique une
pléthore d'organisations internationales, ce qui ne favorise pas
l'efficacité de ces dernières. En effet l'Afrique, dans son
ensemble, comptabilise plus d'une cinquantaine d'organisations internationales.
La multiplication de ces structures apparaît plutôt comme le fait
de la volonté des seuls chefs d'Etat, plutôt que celle des cadres
et des chercheurs africains. Ils ont semble- t- il obéi à leurs
principaux désirs qu'à une démarche d'efficacité
pour trouver une formule viable de regroupement des Etats vers leur
unité politique dans la diversité de leurs traditions. De ce fait
l'analyse des organisations internationales en Afrique montre une
prépondérance de la souveraineté nationale dans les
instances décisionnelles, qui se traduit par la supranationalité
de la Conférence des chefs d'Etat dans la prise de décision.
Comme la plupart des chefs d'Etat africains sont à la tête de
régime autoritaire, on se demande comment ils accepteraient d'être
soumis à une instance supranationale. Et pourtant dans leurs discours,
pendant les conférences officielles et dans les traités, ces
dirigeants politiques adhèrent à l'idée d'une plus grande
intégration tout en sapant le processus par leurs actions.
L'intégration étant d'abord un engagement politique, on ne peut
s'empêcher de nous interroger sur légitimité des
traités signés par des régimes autoritaires.
Le troisième facteur de blocage concerne le faible niveau
de développement économique. En effet la majorité des pays
africains sont classés parmi les pays les moins avancés (PMA).
Malgré cette relative homogénéité, les pays
africains engagés ensemble dans les processus d'intégration,
n'ont pas toujours le même niveau de développement
économique. Pour des raisons historiques et selon les
opportunités de la nature, ces Etats ne son pas dotés de la
même manière et ne possèdent pas les mêmes atouts et
les mêmes ressources naturelles et industrielles: apparaît ainsi un
clivage évident. Certains Etats sont pauvres et pratiquement
bloqués dans leur croissance tandis que d'autres sont relativement bien
pourvus (ZaÏre, Cote d'Ivoire, Afrique du Sud) et connaissent un
développement soutenu.
Cette disparité, qui a été en partie
à l'origine de la désintégration de l'Afrique occidentale
française (AOF) en 1957 au profit de pays bien dotés en
ressources naturelles et qui continuent de freiner le processus
d'intégration, est exacerbée par le passé colonial
spécifique de l'Afrique.
2) - Les obstacles liés
à l'histoire spécifique de l'Afrique
L'Afrique est le continent le plus fragmenté sur le plan
géopolitique et aussi le plus cosmopolite sur le plan de la
diversité de la population. Dans ce contexte la question
l'intégration est plus que jamais au coeur du « mal
africain » selon Joseph Ki Zerbo (historien camerounais). Le
rêve inassouvi de l'unité africaine se heurte malheureusement
à la pesanteur d'un espace éclaté dont l'histoire remonte,
pour l'essentiel, au XIXe, lors du partage colonial qui a façonné
la configuration des frontières des Etats actuels de l'Afrique. En effet
c'est durant la période mercantiliste que l'Afrique, pour la
première fois perdit totalement son autonomie, sa fonction essentiel
étant de fournir des esclaves aux plantations d'Amérique et des
matières premières à l'Europe occidentale (commerce
triangulaire). Les processus d'intégration interne, des peuples et de
construction de vastes ensembles, qui se développaient à
l'époque précoloniale, sont arrêtés au profit d'un
émiettement et d'un isolement des peuples. La conquête coloniale a
soumis par la force l'ensemble du continent africain, à l'exception de
l'Ethiopie et du Libéria à la domination européenne.
Ainsi les empires européennes s'efforcèrent de cloisonner les
territoires qu'elles conquièrent pour éviter la mainmise des
autres puissances concurrentes. Il en est ainsi, par exemple, dans chaque
espace conquis où l'objectif fut de réduire au maximum les
communications et les échanges entres les colonies françaises et
les deux ensembles anglais et portugais par une politique systématique
de réorientation des voies commerciales des capitales respectives de
chaque colonies vers la côte en direction des Amériques ou de
l'Europe. Du Nord au Sud de l'Afrique, Praia, Nouakchot, Dakar, Banjul, Bissau,
Conakry, Freetown, Monrovia, Abidjan, Accra, Lomé, Cotonou et Lagos,
soit 13 Etats sur 16 ont leur capitale sur la côte et leur
économie tournées vers l'Europe laissant l'arrière pays
dans l'abandon total .
Ce phénomène a abouti, par exemple, à la
réorientation du centre de gravité de l'Afrique de l'Ouest, de la
bouche du Niger vers l'Atlantique, créant ainsi un
déséquilibre durables entre pays côtiers comme la
Côte d'Ivoire ou le Ghana et les pays du centre enclavés comme le
Burkina - Faso. A cela s'ajoute les déséquilibres entre la
côte mise en valeur et l'intérieur abandonnés à
lui-même comme pourvoyeur de main d'oeuvre. On assiste par ailleurs
à une séparation des peuples qui appartenaient dans le
passé au même ensemble politique. Par exemple le peuple Ewe est
partagé entre le Togo français et le Ghana anglais, les Yoruba
entre le Nigéria et le Burkina tandis que les Haoussa sont de part et
d'autre de la frontière du Nigéria et du Niger. Cette situation
est encore plus poussée en Sénégambie, en particulier au
Sud où les Joola, les Manding et les Peuls appartenant dans le
passé à l'empire du Mali, sont partagés entre les deux
Guinées, la Gambie et le Sénégal. Pire encore, la Gambie
coupe le Sénégal en deux créant ainsi un
déséquilibre majeur entre le Sud et le Nord, ce qui est à
l'origine de la rébellion des Joola dans la région
sénégalaise de Casamance. En outre ces remparts expliquent les
difficultés de rapprochement entre la Guinée-Bissau et le
Cap-Vert. L'échec de leur tentative d'intégration est lié
à la distance socio-culturelle séparant les deux peuples en
raison de leur histoire coloniale particulière. En dépit des
liens historiques séculaires entre les deux pays, la politique
d'assimilation appliquée au Cap-Vert par le Portugal et l'utilisation de
fonctionnaires cap -verdiens en Guinée-Bissau ont créé
entre les deux populations une distance sociale qui a voué à
l'échec tout effort d'intégration .Il existe un parallèle
entre cet exemple et celui de la Gambie et du Sénégal. La crainte
de la domination d'un pays par un autre a constitué l'entrave principale
à l'intégration dans les deux cas (crainte de la domination de la
Guinée-Bissau par le Cap-vert dans le premier cas ; de la Gambie
par le Sénégal dans le deuxième cas).
Il faut préciser que les modifications de
frontières sont très rares durant la période coloniale,
les puissances européennes ayant dans l'ensemble consolidé les
conventions signées à la fin du XXe siècle pour
matérialiser les limites plus précises de chaque colonie. Avec le
mouvement des indépendances, les Etats actuels, héritiers des
frontières administratives, entrent dans un processus de construction de
l'Etat -Nation, qui entre aujourd'hui en crise. Au fur à mesure que les
colonisateurs européens détruisaient rapidement et
progressivement les anciens « Etats » africains et les
pouvoirs provinciaux et locaux, ils avaient mis en place des Etats très
centralisés qui recevaient des ordres de l'extérieur. Par
conséquent les Etats africains indépendants qui ont
été constitués à partir des années 1960, ont
maintenu les valeurs et traditions centralisatrices, notamment jacobinistes.
Ainsi les Etats post coloniaux se sont évertués à fonder
des Etats- Nations à travers un processus de destruction des
solidarités ethniques, régionales, locales, villageoise,
culturelles et autres au profit d'une Nation supposée être unique,
en utilisant officiellement la seule langue léguée par les
colonisateurs. Pour réaliser un tel projet, les Etats étaient
devenus tellement centralisés, qu'ils avaient supprimé toutes
velléité d'intégration en Afrique. Dans la pratique, la
constitution de l'Etat-Nation fut un échec, le centralisme a
plutôt constitué un frein redoutable à l'intégration
régionale, même si elle n'a pu empêcher les populations de
faire fi des frontières qui leurs sont léguées puis
entérinées par l'Organisation de l'unité africaine. Par
conséquent le blocage essentiel de l'intégration régionale
ne se réduit pas seulement à l'économie, il est d'abord
d'ordre politique et culturel. Partout en Afrique éclatent aujourd'hui,
les questions sociales et culturelles à travers la remise en cause des
pouvoirs politiques centralisateurs et autocratiques qui ont occupé la
scène politique depuis les indépendances et qui continuent
d'entretenir des relations fusionnelles avec les anciennes puissances
coloniales. Les crises actuelles montrent aussi avec évidence que les
populations vivent mal à l'intérieure des Etats -Nations et
posent avec acuité la gestion de cet héritage qui a fixé
des frontières aussi artificielles qu'arbitraires. Les crises touchent
aussi bien les grands Etats comme le Nigéria, le Congo, l'Angola, que
les petits Etats comme le Rwanda, le Burundi, la Sierra Léone, le
Sénégal ou la Guinée-Bissau. Ces crises ont des
répercutions sur le plan externe et reposent indirectement le
problème de la redéfinition des frontières sinon d'un
nouvel espace territorial, économique et culturel susceptible de
consolider la paix et la sécurité des populations.
Face à ces barrières multiples, les
communautés économiques régionales représentent un
palliatif pour réaliser une intégration régionale
fiable.
II - La recherche d'une
intégration africaine par la mise en place de
structures d'intégration
régionale diverses.
Dans le but de parvenir à une intégration globale,
les pays africains ont institué des Communautés
économiques régionales (A) et différentes structures
chargées de la gestion de politiques sectorielles (B) contribuant
à l'intégration régionale.
A - Les Communautés économiques
régionales, piliers de l'intégration
régionale en Afrique.
Les Communautés économiques régionales sont
censées créer des zones de libre échange, puis des unions
douanières pour finalement se renforcer et aboutir à un
marché commun couvrant l'ensemble du continent africain (1). Cependant
la politique du financement de ces C.E.R. constitue le maillon faible de ce
processus d'intégration régionale (2).
1)- Le rôle des Communautés
économiques régionales dans le processus
d'intégration
régionale.
Plus que toute autre région, l'Afrique a besoin
d'intégration sur tous plans pour promouvoir le développement
économique et de mettre en place les capacités et la
compétitivité requise afin de participer, comme, il se doit au
nouveau système commercial multilatéral. Renforcer
l'intégration permettrait à l'Afrique de devenir partie
intégrante de l'économie mondiale et d'échapper à
une plus grande marginalisation. Au cours des années 1990 une reprise
des efforts de l'intégration régionale a abouti, après
trente ans de balbutiement, à la création de la Communauté
économique africaine (CEA) sur la base du plan d'action de Lagos et du
traité d'Abuja de 1991. Le traité d'Abuja portant création
de la Communauté économique africaine consacre la volonté
de l'Afrique de ne pas être un continent composé de pays
individuels qui appartiennent à la catégorie des pays en
développement et plus particulièrement à celle des moins
avancés.
Actuellement diverses communautés
économiques régionales composent le paysage africain ; parmi
elles, sept forment les piliers de la Communauté économique
africaine :
1-Le Marché commun de l'Afrique de orientale et australe
(COMESA) : ses 20 membres (Angola, Burundi, Comores, République
Démocratique du Congo, Djibouti, Erythrée, Ethiopie, Kenya,
Madagascar, Malawi, Maurice, Namibie Ouganda, Rwanda Seychelles, soudan,
Swaziland, Zambie, Zimbabwe) comprennent tous les pays d'Afrique de l'Est
à l'exception de la Tanzanie
2-La Communauté des Etats sahélo - sahariens
(CEN-SAD) : ses 18 membres ( Bénin, Burkina Faso, Djibouti, Egypte,
Erythrée, Gambie, Libye, Mali, Maroc, Niger, Nigéria,
République Démocratique du Congo, Sénégal, Somalie,
Soudan, Tchad, Togo, Tunisie), sont répartis en Afrique de, l'Ouest,
Australe, du Nord
3- La Communauté économique des Etats de l'Afrique
de l'Ouest (CEDEAO) : ses 15 membres (Bénin, Burkina, Cap-Vert,
Côte d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée Conakry, Guinée
Bissau, Libéria), représentent l'ensembles de l'Afrique de
l'Ouest.
4- L'Union du Magreb arabe (UMA) : ses 5 membres
(Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie, Tunisie), représentent
l'ensemble de l'Afrique du Nord.
5- La Communauté des Etats de l'Afrique centrale
(CEEAC) : ses 11 membres (République Démocratique du Congo,
Sao Tomé et Principes, Tchad, Angola, Burundi, Cameroun, Gabon,
Guinée Equatoriale), couvrent l'ensemble de l'Afrique centrale.
6- L'Autorité intergouvernementale pour le
développement de la Corne de l'Afrique et de la partie Nord de l'Est,
qui compte 7 pays (
7- La Communauté de développement austral :
ses 14 membres couvrent l'ensemble de l'Afrique australe.
A travers ces structures, les dirigeants africains visent
à surmonter la fragmentation économique, à encourager la
diversification économique et à établir des liens
transfrontaliers. Pour réaliser ce projet, en tant que piliers de
l'Union africaine, les communautés économiques régionales
doivent passer par des étapes réparties sur trois
décennies (12) :
-1er étape 1994-1999 : renforcement des
Communautés économiques régionales existantes et
création de nouvelles communautés là où il n'en
existe pas
-2e étape 1999-2007: stabilisation des
barrières tarifaires et non tarifaires, des droits de douane et taxes
intérieures à leurs niveaux de mai 1994, harmonisation
progressive des politiques de mise en oeuvre de programmes multiples dans tous
les secteurs économiques, notamment l'agriculture, l'industrie, les
transports, les communications et l'énergie .
-3e étape 2007-2017 : consolidation des
zones de libre échange et des unions douanières grâce
à l'élimination progressive des barrières tarifaires et
non tarifaires et autres au commerce et adoption d'un tarif extérieur
commun.
-4e étape 2017-2019 :
Parachèvement de la coordination et l'harmonisation des politiques et
programmes dans le secteur en vue de la réalisation totale du
marché commun africain et de la communauté économique
africaine, avec l'ensemble des Communautés économiques
régionales .Cette étape devrait aboutir à la libre
circulation des personnes et à l'application des droits de
résidence et d'établissement au sein des communautés
économiques régionales.
-5e étape 2019-2023 : consolidation du
marché commun africain au niveau continental, aboutissement logique de
la quatrième étape.
-6e étape 2023 -2028 :
concrétisation de la vision de la communauté économique
africaine et réalisation d'une intégration économique,
politique, sociale et culturelle totale et des structures, aménagement
et fonction communes ,comprenant notamment la création d'une banque
centrale africain unique, d'un Parlement panafricain et d'une Union
économique et monétaire panafricaine .
En juillet 2003, l'Union africaine a remplacé
l'Organisation de l'unité africaine. L'Union africaine est censée
donner le second souffle au processus d'intégration de l'Afrique et
ancrer l'unité économique et politique. En vue
d'accélérer le processus, les pays africains ont récemment
adopté le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique
( NEPAD ), qui constitue l'une des initiatives les plus importantes de ces
dernières années .L'éradication de la pauvreté en
Afrique est l'objectif premier du NEPAD, qui cherche, entre autre, à
placer les pays africains individuellement et collectivement sur la voie de la
croissance et du développement durable, en mettant un terme à la
marginalisation du continent dans le processus de mondialisation. La promotion
de l'intégration régionale est l'une de ses priorités,
l'une d'elle étant notamment de combler la faiblesse des infrastructures
sur le continent. Ainsi plusieurs institutions et acteurs internationaux, tel
que la banque africaine de développement(BAD), la banque mondiale, la
commission économique pour l'Afrique, le programme des Nations-Unies
pour le développement, l'Union européenne, l'Agence des
Etats-Unis pour le développement international doivent apporter une
contribution et un soutien non négligeable à l'intégration
africaine .Une coopération permanente entre ces institutions , les
Communautés économiques régionales et l'Union africaine
est la clef de voûte d'une intégration
accélérée .
Une telle collaboration est nécessaire en ce qu'elle
permettrait de pallier les contraintes liées aux problèmes de
financement.
2)- L'enjeu de
l'intégration régionale face à la problématique
du financement des
CER
On s'accorde généralement à
reconnaître que les problèmes de financement sont le principal
frein à l'intégration de l'Afrique. Les Communauté
économiques régionales disposent de capacités et de
ressources limitées, d'où les écarts substantiels entre
les ambitions et la réalité.
En effet les ressources des C.E.R. proviennent essentiellement
des contributions des Etats membres, mais les montants versés restent
toujours en deçà des besoins budgétaires
escomptés. Par ailleurs les contributions extérieures jouent un
rôle non négligeable dans les opérations des C.E.R. Comme
on pouvait s'y attendre, les contributions acquittées ont
décliné au fil du temps et l'aide extérieure a fait
parfois défaut ou ne plus suffit plus pour répondre aux besoins
de fonctionnement.
Le financement des activités d'intégration
régionales, qui a pendant longtemps reposé sur le système
de contribution à partir des budgets des Etats membres, se traduisait
par la détermination des quotes-parts de leurs membres en fonction d'un
principe d'équité, en tenant compte de la capacité
contributive de chacun. Cette méthode peut se défendre mais, en
pratique, les pays rechignent à assurer la majeure partie du financement
du budget. Cet état de fait a causé l'effondrement de la
Communauté économique de l'Afrique de l'Ouest (CEAO) lorsque le
Sénégal et la Côte d'Ivoire ont refusé de verser les
montants qu'ils devaient à l'organisation. Par conséquent
l'expérience montre que ces systèmes ne parviennent pas à
couvrir les besoins financiers ou qu'elles ne sont plus viables avec le temps.
Il faut alors concevoir des systèmes concrets pour mobiliser des
ressources, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Dans cette perspective, des mécanismes d'autofinancement sont des moyens
envisagés. Ainsi bon nombre d'organisations internationales ont pris
l'initiative d'adopter des mécanismes de ressources propres comme
solution du problème de financement de l'intégration
régionale .Selon les organisations internationales, on parle de
mécanisme de « ressources propres » ou de
système de « financement autonome» (13). Le principe
d'instituer des mécanismes de ressources propres figure dans la plupart
des traités des C.E.R. A cet égard, le traité
révisé de la CEDEAO (article 72), le traité instituant le
marché commun de l'Afrique de l'est et de l'Afrique australe (article
168), le traité de la Communauté économique africaine
(article 82) et celui de l'UEMOA (artiicles 54 et 55), prévoient
formellement la mise en place de ressources propres qui doivent assurer
intégralement ou en partie le financement des projets et programmes
communautaires. Les mécanismes de ressources propres présentent
l'avantage de n'exercer aucune ponction sur les budgets nationaux.
Les prélèvements fiscaux communautaires constituent
le moyen auquel on a le plus recours pour assurer le financement des C.E.R. Ces
prélèvements communautaires basés sur la taxation des
produits provenant de pays tiers, sont de plus en plus adoptés par
divers CER africaines (CEDEAO- CEMAC- UEMOA). Ils sont utilisés par
l'Union européenne de puis 1971.
Un autre mécanisme de financement autonome de
l'intégration régionale consiste en la mobilisation de ressources
du secteur privé et du capital international. Ce système peut se
matérialiser à travers l'organisation de
« journées économiques » en faveur d'une CER
donnée. Ainsi la vente des droits à organiser ces rencontres
ainsi que le prélèvement d'un certain pourcentage sur les
recettes de telles manifestations constitue des ressources non
négligeables. De tels systèmes de financement sont fiables; ils
permettent des flux de ressources prévisibles et empêchent la
rétention des fonds par les Etats membres car les contributions sont
déposées dans des comptes d'une banque centrale, auxquels seule
l'organisation a accès.
Par ailleurs nous savons que la réussite de
l'intégration exige la mise en place de secrétariats dotés
de personnels et d'une assise financières solide .Donc les
Communauté économiques régionales (CER) doivent
établir des priorités pour leurs actions et se concentrer sur des
objectifs concrets et réalisables. Ce souci d'efficacité à
amener certains C.E.R. à assainir leur situation financière en
rationalisant leurs organes (UEMOA- CEDEAO- CEMAC -CEEAC COMESA).
Jusqu'à récemment, la question du financement de
l'intégration régionale en Afrique s'est surtout posée
pour le fonctionnement de la Communauté économique africaine et
des C.E.R .Avec la création de l'Union africaine, elle a pris une autre
dimension. L'éventail des besoins en matière de ressources va
au-delà de simples dépenses de fonctionnement nécessaires
à l'organisation des sommets des chefs d'Etat et de gouvernement, de
l'Assemblée panafricaine, du conseil exécutif, et du conseil
économique et social. Pour cela, il faut une stratégie qui tienne
compte des besoins à court, moyen et long terme de l'Union africaine,
des C.E.R mais aussi des organismes techniques subsidiaires. Ces entités
doivent être solidairement appuyées, car elles offrent des
avantages comparatifs qui complètent les activités que
mènent les C.E.R afin de favoriser l'avancement de l'Union africaine et
l'intégration régionale.
En raison de ces grands besoins d'argent, les institutions
financières prévues par l'acte constitutif de l'Union africaine
doivent être opérationnelles et viables. Il s'agit de la Banque
centrale africaine, du Fonds monétaire africain et de Banque africaine
d'investissement.
Dans le cadre de leurs actions, les Communautés
économiques régionales ont également mis en place des
institutions autonomes qui soutiennent leurs efforts d'intégration.
C'est dans cette optique que des structures chargées de la gestion de
politiques sectorielles ont été instituées.
B -Les organisations
internationales chargées de la gestion de
Politiques sectorielles
En raison de leurs avantages comparatifs, les organisations
spécialisées peuvent compléter les activités des
Communautés économiques régionales et font progresser
l'Union africaine et l'intégration régionale. Ces structures se
chargent d'assurer, en parallèle, une gestion intégrée des
bassins fluviaux (1) et prennent en charge, dans un cadre régional, des
défis environnementaux (2).
1)- La gestion
intégrée des bassins fluviaux
Au plan hydrographique, l'Afrique est traversée par de
très grands fleuves qui prennent leur source dans des régions
tropicales et coulent, selon l'hémisphère
considéré, vers le Nord ou le Sud en apportant des volumes d'eau
considérables dans des régions arides ou semi-arides. Le Nil, le
Congo, l'Okavango, le Niger, le Sénégal, qui sont les plus grands
fleuves d'Afrique, par exemple, empiètent sur plusieurs territoires
d'Etats différents. Ce pose dans un tel cas l'intérêt d'une
concertation pour la gestion des ressources hydrauliques dans un cadre
institutionnel. Ces dernières années, de nombreux pays ont
engagé de profondes réformes juridiques et institutionnelles afin
de s'orienter vers une politique de l'eau selon le mode de gestion
intégrée et sur la base des bassins versants. Dans cette logique,
un Réseau international des organisations de bassin (RIOB) a
été créé en 1994 pour faciliter la mise en commun
et la diffusion des bonnes pratiques de gestion intégrées des
ressources en eau à l'échelle du continent africain
(14). Cet organisme soutient la création, en son sein, de
« Réseaux régionaux » pour faciliter le partage
d'expériences entre pays voisins d'une même région et
développe des compétences communes et des projets de soutien
opérationnels. C'est également dans ce cadre qu'a
été créé en Juillet 2002, à Dakar le nouveau
Réseau africain des organisations de bassin (RAOB) avec pour
objectif de mettre en oeuvre les actions du programme associé par les
organismes de bassin transfrontaliers (voir annexe).
Les organisations de bassin ont joué un rôle
très important dans la prévention et la gestion des crises qui
ont secoué l'Afrique ces dernières années. De l'avis de M.
David Shinn, ancien ambassadeur des Etats-Unis en Ethiopie, l'initiative du
Bassin du Nil, aide les dix pays bordant le Nil à éviter les
conflits qui pourraient voir le jour au sujet de leurs droits en tant que
riverains du fleuve (15). Le Nil avec ses 6.570 kilomètres,
est le plus long fleuve du monde. Son bassin couvre 3,37 millions de km2. Les
pays riverains qu'il traverse sont le Burundi, la République
Démocratique du Congo, l'Egypte, l'Erythrée, le Rwanda, le
Soudan, le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie. Ces dix pays ont une population de
336 millions d'habitants. Ainsi les perspectives de croissance de cette
population intensifient encore la pression sur les ressources du Nil qui ne
sont infinies.
Dans une autre région de l'Afrique, l'Organisation pour la
mise en valeur du fleuve Sénégal (MVS) a continué
à fonctionner tout au long de la crise entre le Sénégal et
la Mauritanie .Pendant la période de rupture des relations
diplomatiques, elle a servi de cadre de dialogue entre les deux Etats. Par
ailleurs la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT) a pu servir comme premier
niveau d'arbitrage entre le Cameroun et le Nigéria à propos du
lac en question. L'Autorité de Bassin du Niger (ABN) continue, elle
aussi, de servir de cadre de dialogue entre le Mali et le Niger d'une part puis
le Niger et le Nigéria d'autre part.
En fait la multiplicité de projet de barrage, le haut
degré d'interdépendance des Etats et la réduction notable
de la disponibilité de l'eau, sont à l'origine des tensions,
voire des risques de conflits inter étatiques autour de la ressource en
eau. En effet c'est lors du dernier trimestre de l'année 1988 qu'a
commencé ce qui allait mener quelques mois plus tard à la plus
grave crise dans les relations entre le Sénégal et la
Mauritanie. Le barrage de Manantali venait d'être
réceptionné alors que celui de Diama était mis en service
deux ans auparavant. Des expulsions d'agro-pasteurs de part et d'autre des deux
pays débouchèrent très vite sur l'exhumation d'un vieux
conflit foncier relatif au tracé de la frontière entre les deux
Etats. Après des tueries et prises d'otages localisés, la tension
ne tardera pas à gagner tout le long du fleuve et les principales villes
des deux pays. Le bilan du conflit sera très lourd : outre les
dizaine de morts, près de 75000 sénégalais, 150000
mauritaniens durent être rapatriés au courant du premier semestre
de 1989 .Des milliers de population noires africaines de nationalité
mauritanienne furent déportés au Sénégal (
épuration ethnique) (16).
En juin 2000 les autorités mauritaniennes
accusèrent le président Wade du Sénégal qui venait
d'être élu d'avoir l'intention de remettre à l'ordre du
jour le projet de réhabilitation des vallées fossiles de son
prédécesseur, Abdou Diouf .Ce projet consiste à vouloir
dévier une partie du fleuve Sénégal pour alimenter un
réseau de vallées asséchés dans le centre Nord du
Sénégal. Du point de vue des dirigeants politiques
sénégalais, la remise en eau de ce réseau de cours d'eau
fossiles en particulier la vallée du ferlo qui se jette dans le lac de
Guier ( lac qui alimente la ville de Dakar en eau potable ) à Keur Momar
Sarr après avoir reçu une série de d'affluents, tous
aujourd'hui asséchés, permettrait de développer des
activités agropastorales dans la région sahélienne du
centre nord du Sénégal .La réaction du gouvernement
mauritanien à ce projet fut de donner un délai de 15 jours aux
ressortissants sénégalais pour quitter la Mauritanie. Le
président Wade annonça alors le gel du projet, ce qui fit baisser
la tension en attendant le prochain incident.
De la même manière, la crise
énergétique qui avait frappé le Ghana en 1998, suite au
déficit d'eau dans le Lac Volta, une partie de l'opinion publique et
même les dirigeants de ce pays avaient suspecté le Burkina Faso
d'avoir été à l'origine du problème. Certains ont
en effet pensé que la baisse du niveau d'eau dans le lac Volta
résultait d'un accroissement des prélèvements d'eau par le
Burkina sur les sections en amont de la volta blanche et de la volta noire
.Mais il s'est révélé que la cause de la plus
crédible de cette crise énergétique était la
variation et le changement climatique.
Dans un autre exemple le Nigéria qui a consenti
d'importants investissements hydro agricoles et énergétiques dans
la partie aval du fleuve Niger redoute aujourd'hui que la réalisation de
projet de barrages en amont du fleuve n'entraîne une baisse des
débits dans la partie nigériane du cours d'eau. C'est ainsi que
les autorités nigérianes ont manifesté à plusieurs
reprises leur inquiétude concernant tout projet hydraulique sur le
fleuve Niger qui entraînerait une réduction de plus de 10% du
volume d'eau reçu au Nigéria.
Au-delà du cadre strict des bassins versants, les Etats
africains s'engagent à traiter ensemble, dans un cadre plus global, les
problèmes liés à l'environnement.
2)- La prise en charge des défis
environnementaux dans un cadre
régional
Cinq ans après la création de l'Organisation de
l'unité africaine (OUA), le Comité africain sur la conservation
de la nature et des ressources naturelles fur institué à Alger,
en 1968. Le principal objectif de ce comité était d'encourager
l'action conjointe en faveur de la préservation, de l'exploitation et de
la mise en valeur des sols, de l'eau, de la faune et de la flore pour le bien
être présent et futur de l'humanité. Suite à la
rencontre d'Alger, l'ordre du jour environnemental, défini pour la
première fois en 1972, lors de la conférence de Stockholm sur
l'environnement, influença les politiques et les programmes de l'Afrique
dans ce domaine (17).
La huitième Conférence des ministres africains de
l'environnement (CMAE), qui s'est déroulée à Abuja en
avril 2000, a approuvé un programme dont l'une des décisions a
été l'établissement d'un rapport sur l'avenir de
l'environnement en Afrique. Cette mesure a été confirmée
lors du Comité interministériel qui s'est tenue à Malmo,
en Suède au mois de mai 2000. A partir de là, le
secrétariat de la CMAE, le bureau régional pour l'Afrique du
programme des Nations-Unies pour l'environnement, en collaboration avec la
division de l'alerte précoce et d'évaluation, ont entrepris un
travail dans ce sens.Le rapport envisage de relever les mesures politiques et
d'établir l'état de l'environnement en Afrique centrale, en
Afrique du Nord, en Afrique australe, en Afrique occidentale, en Afrique de
l'Est et dans les Iles de l'Ouest de l'océan indien, en choisissant
comme point de départ la conférence des Nations-Unies sur
l'environnement humain, de Stockholm (Suède) en 1972.
Dans les années 1970, la conférence de Stockholm a
grandement contribué à placer les préoccupations
environnementales au premier plan du débat social et politique sur
l'ensemble de la planète. Les conclusions de la conférence ont
permis de définir un programme moderne en faveur de l'environnement,
mais elles ont surtout revêtu une importance particulière pour
l'Afrique vu le contexte de l'époque. Tout d'abord elles stipulent
clairement qu'un environnement sain est un droit qu'il est impossible d'obtenir
tant que l'apartheid, la ségrégation raciale et la domination
coloniale persistent. Cet appel a connu un écho immédiat dans une
région qui se libérait des liens coloniaux et dont les
populations, en grande partie, doivent directement compter sur les ressources
naturelles pour trouver ses moyens d'existence.
L'Afrique est particulièrement vulnérable à
la variabilité du climat et au changement climatique. Les variations des
précipitations ont engendré des sécheresses et des
inondations ayant des conséquences désastreuses pour la
population et pour l'environnement. Outre son impact écologique, la
déforestation est également synonyme de perte de ressources
primordiales, situation provoquant la perte essentielle, de moyens d'existence
et de ressources d'énergie nécessaires pour les
communautés humaines.
La coopération internationale et l'intégration de
la gestion des ressources naturelles paraissaient donc nécessaires.
Ainsi les interventions entreprises par les pouvoirs publics africains en
réponse aux problèmes et aux défis environnementaux mis en
lumière lors des conférences successives sur l'environnement, de
la conférence de Stockholm (1971) au sommet de la Terre de Rio (1992),
en passant par la rencontre de Johannesburg (2000), se sont traduites par
divers accords régionaux.
C'est ainsi qu'en Afrique orientale, il a été
adopté le programme de préservation de la biodiversité,
l'initiative du bassin du Nil, le programme de conservation des zones humides,
la gestion intégrée de la zone côtière et le projet
pour l'environnement mondial en faveur du Lac Victoria.
En 1989, six pays africains frappés par la
sécheresse (Djibouti, l'Ethiopie, la Somalie, le Kenya, le Soudan et
l'Ouganda) créèrent l'Autorité intergouvernementale sur la
sécheresse et le développement afin de coordonner leurs actions
dans la corne de l'Afrique. Par la suite baptisée «Autorité
intergouvernementale pour le développement » (AIGD),
l'organisation s'élargit à l'Erythrée en septembre
1993.
Par ailleurs, il a été créé en 1973,
au lendemain des premiers épisodes de sécheresse, le
Comité de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS), qui
regroupe les Etats sahéliens suivants: le Burkina Faso, le Cap-Vert, la
Gambie, la Guinée Bissau, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le
Nigéria, le Sénégal et le Tchad (18).
L'institution a réussi à mettre en oeuvre des
programmes dits de première génération concernant des
domaines essentiels: l'agriculture pluviale et irriguée, les ressource
hydrauliques.
Le CILSS permet aujourd'hui aux Etats sahéliens
d'appréhender les problèmes de sécurité alimentaire
et la gestion des ressources naturelles à l'échelle
régionale et de proposer des mesures efficaces pour les résoudre.
C'est un acteur majeur dans le dispositif régional d'intégration,
au service de ses Etats membres. L'organisme est implanté sur trois
cites :
- Ouagadougou : abrite le secrétariat exécutif
et se charge de la direction et de l'administration de l'institut.
- Niamey : héberge le centre de l'agro-
météorologique du Sahel. Le centre constitue un outil
indispensable pour la détection précoce des risques
agro-alimentaires, qui nécessite la mise en oeuvre d'une gamme
étendue de moyens techniques (télédétection,
traitement de l'information).
- Bamako : abrite l'institut du Sahel ; c'est un centre
de recherche axé sur deux thèmes principaux
« population-développement » et
« recherche agro-socio-économique ».
Même si toutes les régions de l'Afrique n'ont pas,
pour l'instant atteint un stade d'intégration suffisant pour faire aux
défis de ce nouveau millénaire, certaines d'entre elles
pourraient servir d'exemple.
III - L'originalité
d'une intégration régionale réussie en
Afrique :
l'exemple de l'Afrique de l'Ouest
Contrairement aux autres blocs régionaux, à
savoir l'Afrique de du nord, l'Afrique de l'est, l'Afrique centrale, l'Afrique
de l'ouest a atteint un niveau d'intégration acceptable. Il existe sur
son aire géographique deux grandes organisations internationales, la
Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)
(A) et l'Union économique et monétaire des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (UEMOA) (B), qui sont à la fois concurrentes et
complémentaires tout en poursuivant les mêmes objectifs
d'intégration .
A - L'exemple de la Communauté
économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
Le traité de la CEDEAO prévoit l'institution,
à long terme, d'une union économique et monétaire.
Malgré les difficultés rencontrées, cette organisation
régionale a enregistré des progrès considérables en
matière d'intégration (1) grâce à la création
d'un cadre institutionnel adéquat (2).
1)- Les avancées en matière
d'intégration réalisées par la Communauté
économique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest
L'Afrique de l'Ouest, définie comme étant la
région couvrant le sahel, comprend 17 pays et s'étant sur
7.500.000 Km2 pour une population de 250 million d'habitants.
L'espace
géographique de la CEDEAO
Le but de la CEDEAO est de promouvoir la coopération et
le développement dans tous les domaines de l'activité
économique, particulièrement dans ceux de l'industrie, des
transports des télécommunications, de l'énergie, de
l'agriculture, des ressources naturelles, du commerce, des questions
monétaires, des affaires sociales et culturelles avec pour objectif
d'élever le niveau de vie des peuples de cette région de
l'Afrique, d'accroître et de maintenir la stabilité
économique, de renforcer les relations entre ses membres et de
contribuer au progrès et au développement économique du
continent africain.
Depuis la signature, le 25 mai 1975, du traité de la
CEDEAO, des changements notables sont intervenus en Afrique de l'Ouest, tout
comme l'environnement extérieur a considérablement
évolué. Le protocole sur la libre circulation des personnes,
adopté par la conférence des chefs d'Etat et de gouvernement en
1978, comprend l'abolition des visas, la mise en place d'un droit de
résidence et le droit d'établissement .Tout citoyen de la
Communauté, excepté celui entrant dans la catégorie des
immigrants au terme des lois et règlements en vigueur dans le pays
concerné, désirant séjourner dans un Etat membre pour une
période maximum de 90 jours, pourra entrer sur le territoire de ce Etat
membre sans avoir à présenter un document de voyage et de
certificats internationaux en cours de validité. Actuellement tous les
Etats membres ont aboli les visas et permis d'entrée. Dans le domaine
industriel, à ce jour 2627 produits industriels fabriqués par 897
entreprises de la communauté ont été agrées au
schéma de libéralisation des échanges. En plus les chefs
d'Etat et de gouvernement ont décidé que le tarif
extérieur commun de l'Union économique et monétaire ouest
africain soit étendue à l'ensemble de la CEDEAO, à la
suite d'études d'impact sur les économies et les finances
publiques des Etats non membres de l'Union économique ouest africaine.
Dans le cadre de la mise en application de cette décision, des mesures
nécessaires ont été prises pour parvenir à
l'adoption d'un tarif extérieur commun (CEDEAO/UEMOA), au cours de la
période 2005-2008. Cette préoccupation est née de la prise
de conscience que les marchés intérieurs des Etats membres pris
individuellement en raison de leur étroitesse étaient loin
d'être compétitifs, dans un environnement mondial marqué
par l'existence de grands blocs commerciaux.
Pour faciliter les échanges intra- régionaux, des
projets de construction de routes régionales, de développement de
liaison de télécommunication entre les Etats ont
été initiés. Par ailleurs les événements
intervenus dernièrement dans l'ensemble du paysage politique et
économique ouest africain ont contribué à lever
progressivement de nombreux obstacles à l'intégration. En effet
nous pouvons constater l'avènement de la démocratie dans la
plupart des pays de l'Afrique de l'Ouest et plus particulièrement aux
Sénégal et au Nigéria, ce dernier étant
l'économie dominante dans la région. Par ailleurs le
désengagement progressif de l'Etat et la prise de conscience du fait que
le secteur privé doit être le moteur de la croissance et de
l'intégration économique, ont facilité l'harmonisation
des programmes de la CEDEAO et de l'UEMOA dans le cadre de
l'accélération du processus d'intégration
régionale.
A ces objectifs économiques, l'organisation s'est adjointe
une dimension politique et militaire en se dotant d'une force d'interposition.
En effet depuis quelques années les Communauté économiques
régionales ont commencé à mettre en place des cadres
institutionnels et des mécanismes de maintien de la paix. Le
système le mieux conçu et le plus connu en Afrique c'est
certainement celui de CEDEAO. Le Groupe de contrôle de la
communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (ECOMOG),
est une force militaire d'interposition qui a été
constitué pour résoudre les conflits et maintenir la paix au sein
de la communauté. Des opérations en ce sens ont été
organisées au Libéria (1990-1999), en Sierra Léone (1997-
2000) et en Guinée (1998 -2000). L'écomog a été
créé en 1990. Il a pour mission principale de s'interposer dans
les combats, d'imposer la paix et de la maintenir. L'interposition dans les
combats se faits à la demande de tout gouvernement légalement
constitué pour empêcher qu'une situation ne
dégénère en anarchie ou lorsque des factions rebelles
tentent d'usurper le pouvoir ou de résister à l'autorité
du gouvernement légal .Ces missions visent à conclure un
cessez- le -feu entre les belligérants, à créer un climat
favorable aux négociations et à protéger les populations
civiles. Après avoir fait le bilan de cette force militaire dans le
règlement des conflits, les dirigeants de la CEDEAO ont
décidé, en 1998, de la maintenir en tant que future structure de
maintien de paix de la communauté. L'écomog agit sur instruction
des chefs d'Etat de ses pays membres.
Pour accélérer l'intégration en permettant
l'application de décisions supranationales, la CEDEAO s'est
appuyée sur un cadre institutionnel adéquat.
2)- Le cadre institutionnel de la
Communauté économique des
Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO).
La Communauté économique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest regroupe tous Etats de cette région à l'exception de la
Mauritanie qui s'est retirée le 26 décembre 1999. Elle a pour
mission de promouvoir l'intégration économique dans tous les
domaines, d'abolir à cette fin, les restrictions au commerce, de
supprimer les obstacles à la libre circulation des personnes, des
services et des biens, de réaliser l'harmonisation des politiques
sectorielles régionales. Ainsi devant la lenteur des progrès
enregistrés, certaines initiatives visant à redynamiser le
processus d'intégration ont été prises à partir de
1990. Par conséquent dès 1991, le sommet des chefs d'Etat et de
gouvernement avait reconnu la nécessité de procéder
à la révision du traité du 28 mai 1975, instituant la
CEDEAO et avait créé un comité chargé de faire des
recommandations dans ce sens.
Par la suite le traité révisé a
été adopté lors du sommet des chefs d'Etat, à
Cotonou en juillet 1992. Les pouvoirs des institutions communautaires sont
renforcés pour traduire la priorité qui est accordée
à l'intégration régionale. Le principe de la
supranationalité dans l'application des décisions a
été introduit. En outre il a été envisagé la
création, en plus des institutions déjà existantes, d'une
cour de justice de la communauté à la place du tribunal
communautaire, d'un Parlement et d'un Conseil économique et social.
L'article 6 du traité (révisé) instituant la CEDEAO
dispose : «Les institutions de la Communauté sont les
suivantes : La conférence des chefs d'Etat et
gouvernement
Le
conseil des ministres
Le
Parlement de la Communauté
Le
secrétariat exécutif
La
cour de justice de la communauté
Les
commissions techniques spécialisées
Le
conseil économique et social
Les institutions de la Communauté exercent leurs fonctions
et agissent dans les limites des pouvoirs qui leurs sont
conférées par le présent traité et par les
protocoles y afférents».
2-1Conférence des chefs d'Etat et de
gouvernement :
C'est l'organe suprême de la CEDEAO, qui a la
responsabilité de donner les principes directeurs et de contrôler
le fonctionnement de la communauté ainsi que de prendre toutes les
mesures afin de garantir le développement progressif et la
réalisation des objectifs de la communauté. Elle est
chargée de :
-définir la politique générale
et les principes directeurs de la communauté
-Assurer et coordonner les politiques
économiques scientifiques et sociales des Etats.
-Superviser le fonctionnement des organismes de la
communauté et de suivre la mise en oeuvre des objectifs de la
communauté.
-Préparer et adopter les règles de
procédure.
-Nommer le secrétariat exécutif.
-Soumettre à la cours de justice de la
communauté quand elle le juge nécessaire, toute instance
confirmée si un Etat membre ou institution de la communauté a
manqué d'honorer ses obligations ou si une institution de la
communauté a outrepassé ou a abusé les pouvoirs qui lui
ont été conférés aux termes du traité, par
une décision de l'Assemblée ou règlement du conseil.
-Demander à la cours de justice de la
communauté de donner un avis sur une question de
légalité.
-Exercer les pouvoirs qui lui sont
conférés aux termes du traité
La conférence se réunit au moins une fois par an en
séance ordinaire. Une séance extraordinaire peut être
organisée à la demande d'un Etat membre pourvu qu'une telle
demande soit soutenue par une majorité des Etats membres.
2-2 La Cour de justice :
Prévue dans les textes depuis 1991, la cours n'existe
réellement qu'à partir de 2001. En janvier 2005, lors du sommet
des chefs d'Etat réuni à Accra, au Ghana, il a été
adopté un amendement qui a introduit la possibilité pour les
individus de saisir directement la cour après épuisement de
toutes les voies de recours contentieuses ou arbitrales au niveau interne.
La compétence de la cour s'étend à
l'interprétation du traité.
Par ailleurs il est l'organe de contrôle juridictionnel
destiné à juger du respect par les Etats membres de leurs
engagements, à régler les différends et à
vérifier la légalité des actes des institutions
communautaires.
2-3 Conseil des ministres.
Il est composé du ministre des affaires de la CEDEAO ainsi
que d'un ministre désigné par chaque Etat membre. Le conseil est
chargé de formuler des recommandations à la conférence des
chefs d'Etat et de gouvernement sur les questions visant à la
réalisation des objectifs da la communauté. Il émet des
directives pour les affaires concernant la coordination et l'harmonisation des
politiques d'intégration économique, fait des recommandations
à la conférence des chefs d'Etat pour la nomination d'auditeurs
externes, prépare le règlement pour les employés et
approuve les structures d'organisation des institutions communautaires, peut
demander à la cour de justice de la communauté de donner un avis
sur des questions de l'égalité. Le conseil se réunit au
moins deux fois par an.
2-4 Le Parlement
Le parlement de la CEDEAO s'est réuni pour la
première fois en mai 2002, avec 115 députés
représentant tous leurs Etats respectifs à l'exception de la
Côte d'Ivoire (qui traverse une crise politique). Le Togo, le
Libéria le Cap-Vert, la Guinée Conakry, la Guinée Bissau,
le Bénin, la Gambie et la Sierra Léone ont chacun 5
députés; le Mali le Niger et le Sénégal ont chacun
6 députés; le Côte d'Ivoire a droit à 7
députés; le Ghana en a 8 et le Nigéria 35.
Le Parlement de la CEDEAO a son siège à Abuja, au
Nigéria ; il chargé du contrôle démocratique
des institutions de la communauté mais fonctionne en ce moment
qu'à titre consultatif.
2-5 Le conseil économique et social.
Il est composé des représentants des
différentes catégories d'activité économique et
sociale, il a également un rôle consultatif.
2-6 Secrétariat exécutif.
Le secrétariat exécutif est responsable de la mise
en oeuvre des décisions prises par la conférence des chefs d'Etat
et de l'application des règlements du Conseil. Son siège est
à Abuja, au Nigéria. Le secrétaire exécutif est
élu pour un mandat de 4 ans, est assisté de 4 fonctionnaires.
2-7 Commissions techniques spécialisées :
- Industrie, science et techniques
-Environnement, communication et tourisme
-Commerce, douane, fiscalité, statistique monnaie
-Affaires politique, judiciaire et juridique,
sécurité régionale et immigration
- Ressource humaine, information, affaire sociales et
culturelle
- Administration et finances
En plus de la CEDEAO, l'Afrique de l'Ouest compte sur son espace
géographique une organisation sous-régionale qui s'occupe,
notamment, de questions d'ordre monétaires.
B - L'exemple de l'Union
économique et monétaire Ouest africaine
Construite sur les ruines de l'ex-Communauté
économique de l'Afrique de l'Ouest (CEAO), qui se limitait à
maintenir le lien avec la France et à mettre en place la libre
circulation des capitaux, l'U.E.M.O.A., vise principalement les questions
d'ordre monétaires. Outre les réalisations accomplies depuis sa
création (1), cette organisation s'oriente de plus en plus vers de
nouvelles perspectives (2).
1)- Les réalisations de l'Union
économique Ouest africaine depuis sa
création.
L'intégration monétaire est un
élément essentiel de l'intégration régionale; elle
suppose une évolution à moyen ou long terme vers un
régime de taux de change fixe, les pays concernés finissent par
adopter une monnaie commune. L'Union économique et monétaire
ouest africaine est un cas d'espèce intéressant d'une
intégration monétaire, union complète en ce sens que ses
membres ont une monnaie commune et entièrement convertible, émise
par une banque centrale supranationale qui surveille les opérations
à partir d'un compte commun de devises. En tant que sous ensemble de la
CEDEAO, elle regroupe 8 Etats et couvre une superficie de 3.509.610 km2 avec
une population de 74 millions d'habitants. Elle a été
créée par le traité de Dakar du 10 janvier 1994 par les
chefs d'Etat et de gouvernement des sept pays d'Afrique ayant en commun l'usage
d'une monnaie unique, le franc CFA.
L'espace géographique de la `UEMOA,
sous ensemble de la CEDEAO
Le 2 mai 1997, la Guinée-Bissau est devenu le
huitième membre de l'Union
Celle-ci est dirigée par trois organes
principaux :
1-la Conférence des chefs d'Etat.
2-Le Conseil des ministres comprenant les ministres des finances
des différents pays membres.
3-la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'ouest (BECEAO):
C'est un institut d'émission monétaire avec un statut
d'établissement publique, commun au Etats de l'U.E.M.O.A .Il son
siège à Dakar.
Le succès de l'intégration monétaire de
l'UEMOA est intiment lié aux pouvoirs conférés à la
Banque centrale supranationale, qui doivent prévaloir sur ceux des
autorités nationales en matière monétaire et
financière. En contrepartie de cette cession de souveraineté
monétaire, les Etats membres bénéficient de politiques
monétaires stables, non inflationnistes et sont à l'abri des
considérations politiques. Les risques et le coût des
opérations en seront pour autant réduits, ce qui stabilisera
l'investissement et la croissance et encouragera l'intégration
économique des Etats de la sous-région. Ainsi l'UEMOA peut
offrir une possibilité d'investir sans risque de change, favoriser une
économie d'échelle grâce l'émission d'une monnaie
commune.
La BECEAO procède à une programmation annuelle des
besoins de crédits, pour l'Union et par pays membre, avant d'en
décider l'affectation. Statutairement les emprunts des gouvernements
auprès de la BECEAO sont limités à 20% de leurs
rentrés budgétaires de l'année précédente.
Les gouvernements sont libres d'emprunter sur le marché intérieur
ou à l'extérieure et sont tenus uniquement d'en aviser la Banque
centrale. En principe, chaque membre doit affecter 65% de ses réserves
de devises à un compte d'opération tenus par la banque et
établi au trésor français à Paris. Tout
déficit de balance des paiements d'un Etat membre est comblé par
les avoirs extérieurs des autres Etats membres. Si le bilan global du
compte d'opération baisse, on peut faire appel aux 35% restants des
réserves. Si cela ne suffit pas, un plan de « gestion de crise
» prend le relais. Cette indépendance a subi un coup
sévère avec l'avènement des programmes d'ajustement
structurels, qui ont entraîné une influence
étrangère considérable dans les politiques de la banque.
C'est ainsi que la dévaluation du franc CFA a été
décidée en 1994, ce qui expliquait le taux d'inflation
élevé au milieu des années 1990. Par la suite les taux ont
commencé à baisser grâce à la discipline
monétaire imposée aux Etats membres de Communauté. A
l'exception de la Guinée Bissau qui n'est devenu membre qu'en 1997, tous
les pays de l'UEMOA étaient parvenus à l'objectif fixé
à partir de la dévaluation, à savoir réduire
l'inflation à 3% en 2000.
C'est d'ailleurs dans le souci de limiter les difficultés
budgétaires des Etats que le traité de l'UEMOA a, en son article
58, institué un système transitoire de compensation de
moins-values de recettes douanières subies par certains Etats membres du
fait de la mise en place de l'union douanière. En application de ces
dispositions, le prélèvement communautaire de solidarité
(PCS) a été institué par l'article 16 de l'acte
additionnel N° 04/96 du 10 mai 1996 instaurant un régime tarifaire
préférentiel transitoire.
Du 1er juillet 1996 au 31 décembre 2004 le
montant du PCS reversé à l'Union par les Etats membres s'est
élevé à 178.349.475.216 francs CFA dont 33.296.871.940,
pour la période de janvier à décembre 2004. En 2004,
l'amélioration des recouvrements des produits du PCS s'est poursuivie,
à travers, notamment, des missions de vérification dans les Etats
membres et le renforcement de la communication entre la commission et les
autorités nationales. L'utilisation des recettes s'est traduite, entre
autre, par une dotation adéquate du Fonds de compensation des
moins-values (FCMV) de recettes douanières et du Fonds d'aide à
l'intégration régionale (FAIR) dont l'intervention est effective
depuis 2005.
Du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2004, les
produits du PCS reversés par les Etats membres de l'UEMOA ont
été utilisés pour un montant de 178.349. 475.216 francs
CFA se décomposant comme suit:
- dotation du Fonds de compensation des moins-values de recettes
douanières pour 111.937.028.219 francs CFA.
- dotation du Fonds d'aide à l'intégration
régionale pour 9.987.899.592 francs CFA
- dotation du Fonds de réserve pour 200.000.000 francs
CFA.
- financement des budgets de fonctionnement et
d'équipement des organes de l'Union au titre des années 1998-2004
pour 46.836.452.190 francs CFA.
- prêt à l'Etat nigérian pour 8.188.095.215
francs CFA.
- dotation partielle pour un montant de 1.200.000.000 francs CFA
du Fonds fiduciaire a été créé avec la FAO pour la
mise en oeuvre du programme régional spécial de
sécurité alimentaire.
Le traité UEMOA a prévu également la
compensation automatique de pertes de recettes douanières subies par les
Etats du fait de l'application du régime tarifaire
préférentiel. Au titre de l'année 2004, l'Union a
versé aux Etats membres, un montant compensatoire global de
24.797.011.654 francs CFA relatif à des déclarations de douane
de l'année 2004 et des années antérieures, ce montant
s'est réparti comme suit :
Bénin ............2.057.236.715 francs CFA
Burkina Faso.... 5.651.394.669
Côte d'Ivoire .....472.129.880
Guinée Bissau......125.710.454
Mali ...............5.709.952.089
Niger...............5.266.992.342
Sénégal ............2.958.487.745
Togo............... 2.555.107.760
Pour éviter une concurrence entre la CEDEOA et l'UEMOA,
les Etats qui ne sont pas membres de cette dernière ont accepté
d'harmoniser leurs politiques monétaires et budgétaires dans le
but de mettre en place une union monétaire au sein de la CEDEAO et de
jeter les bases d'une éventuelle fusion avec l'UEMOA. Dans le souci
d'accélérer le rythme de l'intégration, le Ghana et le
Nigéria ont lancé l'initiative « procédure
accélérée » visant la création d'une
deuxième zone monétaire dans la sous- région qui serait
dénommée «zone monétaire Ouest- africaine»
et qui regrouperait le Ghana, le Nigéria, la Gambie, le Libéria,
la Sierra Léone (tous pays anglophones à l'exception de la
Guinée Conakry). L'objectif de la zone ouest-africaine est d'harmoniser
les politiques macroéconomiques et de mettre en place une monnaie
commune, qui sera à court terme fusionnée avec celle l'UEMOA.
Dans une moindre mesure l'Union économique et
monétaire ouest-africaine étend son champ d'action.
2) - Les perspectives de l'Union
économique et monétaire ouest-africaine
Le traité de l'Union économique et monétaire
ouest-africaine prévoit de redynamiser la coopération avec
d'autres organisations régionales et sous-régionales. A ce titre
l'année 2005 a marqué le point de départ du renforcement
du processus de convergence avec la CEDEAO, notamment en matière de
schéma de libéralisation des échanges et des politiques
économiques. Sur ce dernier point, la coopération a
été intensifiée, à travers la poursuite des travaux
techniques sur l'harmonisation des produits intérieurs bruts et des
indices de prix à la consommation des Etats de la CEDEAO.
Par ailleurs la conduite des négociations de l'Accord de
partenariat économique entre l'Afrique de l'Ouest et l'Union
européenne fournira également un cadre de renforcement de la
coopération entre la Commission de l'UEMOA et le secrétariat
exécutif de la CEDEAO. De ce fait ces deux organes s'attachent à
la mise en oeuvre, avec l'appui de la communauté internationale, d'une
stratégie de réduction de la pauvreté. Ces diverses
perspectives sont à envisager, en liaison avec la poursuite des actions
prioritaires, notamment dans le domaine de la perception des
prélèvements communautaires de solidarité, de la mise en
oeuvre de programmes économiques et politiques sectorielles, ainsi que
de la communication. Leur réalisation nécessite un retour rapide
de la paix et de la stabilisation dans l'espace de l'Union d'où la place
prépondérante que l'union devra accorder à l'action
politique, dans la mise en oeuvre de son processus d'intégration.
La poursuite du renforcement institutionnel de l'UEMOA, qui
découle de l'impératif d'impulser une nouvelle dynamique du
processus d'intégration, devra se traduire par quatre
actions :
1- La première consistera à combler le retard en
matière d'utilisation des nouvelles technologies de l'information et de
communication, par la mise à niveau de l'équipement informatique
et conception d'un système efficace de gestion et de diffusion de
l'information au sein des organes et entre eux et ceux de
l'extérieur.
2- Le deuxième devra se traduire par la remise en place
d'une unité de programmation stratégique, en vue d'assurer un
meilleur suivi plus rigoureux des activités, une visibilité plus
accrue de la Commission de l'UEMOA en direction des différents
partenaires, une vision prospective et une plus grande efficacité dans
la recherche de financement.
3- La troisième s'articule autour de l'installation du
Parlement de l'Union, avec l'entrée en vigueur du Traité y
afférent. Dans l'attente de la ratification de cet instrument juridique,
la Commission a déjà entamé, en relation avec le
Comité inter- parlementaire, l'élaboration des textes
subséquents devant régir le fonctionnement du futur Parlement.
4- Le quatrième devra se matérialiser par l'amorce
des travaux en vue de la construction du siège de la Cour de justice et
de la Cour des comptes.
Les actions concrètes à réaliser dans le
cadre du programme économique régional ont été
déterminées à partir des programmes et politiques
sectoriels adoptés par les instances communautaires. Le tarif
extérieur commun (TEC), entrée en vigueur depuis le
1er janvier 2000, connaît une application globale
satisfaisante. Toutefois, certaines entraves non tarifaires persistent encore,
notamment les normes techniques imposées par certains Etats membres aux
produits communautaires. Par ailleurs la multiplication des barrières
routières et la perception de taxes illicites sur les corridors de
l'Union sont devenues des problèmes récurrents. Il appartiendra
à la l'union d'oeuvrer dans le sens de l'élimination des
dernières barrières persistantes.
CONCLUSION
L'intégration régionale est aujourd'hui au
centre des préoccupations sur le développement du continent
africain. Pour cela, il est important de renforcer les organisations qui ont ce
projet en charge. En moins d'un demi-siècle d'existence juridique, en
tant qu'Etats souverains, les Etats africains ont accompli des progrès
considérables dans la voie de l'intégration régionale.
Certains objectifs importants sont atteints, notamment la création de
zones de libre échange dans la plupart des communautés
économiques régionales. Certaines CER, plus avancées que
d'autres ont pu mettre en place la libre circulation des personnes et un tarif
extérieur commun (CEDEAO).
Ceci révèle le fait que l'intégration
régionale constitue l'une des stratégies les plus
crédibles pour résoudre les problèmes de
développement auxquels l'Afrique est confrontés étant
donné les insuffisances en terme de ressources et autres aspects
économiques de chaque pays. Un tel objectif nécessitera une
évolution approfondie des résultats obtenus dans ce domaine aux
niveaux national, régional et continental et un cadre institutionnel
solide. C'est dans ce cadre que le nouveau partenariat pour le
développement de l'Afrique (NEPAD) est venu rappeler et renforcer le
rôle de l'intégration régional dans la relance de la
croissance et du développement en Afrique. D'ailleurs un rôle
majeur a été accordé aux CER dans la mise en oeuvre du
partenariat.
Certes des efforts conséquents ont été
déployés en vue de la convergence économique et de la mise
en place de la Communauté économique africaine et de l'Union
africaine, mais des problèmes, des lacunes demeurent et devront
être pris en charge. Jusqu'à présent le volume du commerce
intra-africain reste faible et ne représente que 10% du volume total du
commerce en Afrique. Le coût élevé des activités
économiques, en particuliers les transports, l'insuffisance du commerce
régional constitue encore des entraves aux échanges. Principaux
acteurs de l'intégration régionale, les CER n'ont toujours pas
reçu de pouvoirs supranationaux requis pour assurer l'exécution
des décisions collectives et la convergence des politiques communes.
Elles doivent être rationalisées et habilitées à
agir au nom de leurs Etats membres. Le financement de l'intégration
régionale est une autre contrainte fondamentale qui se traduite par
l'insuffisance des ressources financières des CER et des programmes
d'intégration.
Cependant lentement mais sûrement, l'intégration
régionale en Afrique, berceau de l'humanité, continue son chemin.
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23-Pévenir les conflits et promouvoir la
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l'Ouest , par Madiodio NIASSE, Dr,coordonnateur régional, Zones humides
en eau, Bureau régional pour l'Afrique de l'Ouest de l'Union mondiale
pour la nature (Ouagadougou)
SITES INTERNET
http://www.afriqueweb.net/institutions/oua
http://www.africa-onweb.com/continent./index.html
http://www.mediaterre.org/afrique-ouest/redirect/76,5.html
http://www.afrika.com/article9620.html
http://un.org/french/ecosocdev/genef/afrec
http://sec.ecowas.int/sitecedeao/français
ANNEXES
1- Indice d'intégration régionale
2- Programme d'action du réseau africain des organisations
de bassins
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