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Processus d'externalisation en Grande-Bretagne et privatisation de la sécurité: Quels rapports, quels enjeux ?

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par Hugues de Bonnières
Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr -  2007
  

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b) Quelles options en définitive ?

Pourquoi rien n'a été fait depuis le Green Paper ? Sorti en 2002, avant la deuxième guerre en Irak, il annonçait des problèmes qui se sont effectivement révélés dans le Golf. Dans les faits, le Royaume-Uni est d'une certaine manière en guerre, ce qui ne lui laisse peut être pas beaucoup de temps pour s'occuper de mettre en place une organisation de contrôle des SMP, une pour le contrôle des contrats passés au titre du

PFI, etc. Cependant, si la régulation, comme nous serions tentés de le croire, est un réel avantage pour le gouvernement, pour l'Etat, pourquoi tarde-t-il à répondre au phénomène des SMP ? Est-il possible de prendre le contre-pied de cette question et de dire que le gouvernement n'a pas, en réalité, la volonté de réguler les SMP ? En effet, tous les obstacles à la réglementation des sociétés privées constituent une gêne pour l'Etat : les délais engendrés par l' enregistrement ou l' octroi d' une licence, les coûts d'un organisme de contrôle, la transparence nécessaire, tout cela pourrait en fait ne pas être absolument du goût de l'Etat.

Il s' agit donc, d' une part, de repenser le problème des SMP comme si elles n' étaient que des sociétés sous contrat avec le MoD, au titre de la PFI par exemple, et d'autre part de trouver une solution qui satisferait toutes les parties : gouvernement, SMP, etc.

Considérer les SMP comme des entreprises tout à fait normales aurait des conséquences délicates du point de vue du droit et de la morale. Ce serait, nous l'avons dit, faire de l' usage de la force un marché, un bien, que l'on pourrait vendre ou acheter. Une fois de plus, privatiser la force, usage régalien par excellence, serait un progrès dans la manière qu' on les Etats de gérer leurs relations internationales, de protéger leurs intérêts, selon la tradition économique libérale. Mais certains pensent que privatiser l'usage de la force, même de manière limitée et encadrée, reviendrait à diminuer le pouvoir et la souveraineté étatique. Si l'on confie à une société le pouvoir d'agir par la force, même dans un but juste et honorable, comment ensuite réaffirmer le rôle de l'Etat ? Se pose ici le problème de la légalité de l' externalisation. S' il est évident que tout est légal dans l'externalisation, la sous-traitance et l'emploi par un gouvernement de « contactors » civils, le phénomène met en exergue les limites du droit sous sa forme actuelle, qu'il soit international, privé, ou de la guerre.

Nous connaissons les textes en vigueur concernant les mercenaires, notamment la Convention Internationale contre le Recrutement, l'Utilisation, le Financement et l'Instruction des Mercenaires, adoptée par l'ONU le 4 décembre 1989 (Cf. Annexe IV). La définition d'un mercenaire qui nous est donnée par cette convention est très restrictive et énonce plusieurs critères cumulatifs qui sont très rarement satisfaits :

«Le terme "mercenaire" s'entend de toute personne:

a) Qui est spécialement recrutée dans le pays ou à l'étranger pour combattre dans

un conflit armé;

b) Qui prend part aux hostilités essentiellement en vue d'obtenir un avantage personnel et à laquelle est effectivement promise, par une partie au conflit ou en son nom, une rémunération matérielle nettement supérieure à celle qui est promise ou payée à des combattants ayant un rang et une fonction analogues dans les forces armées de cette partie;

c) Qui n'est ni ressortissante d'une partie au conflit, ni résidente du territoire contrôlé par une partie au conflit;

d) Qui n'est pas membre des forces armées d'une partie au conflit; et

e) Qui n'a pas été envoyée par un Etat autre qu'une partie au conflit en mission officielle en tant que membre des forces armées dudit Etat. » 25

Dès lors, il devient très difficile de faire valoir cette déclaration, de l' appliquer et de sanctionner les contrevenants. Il est intéressant de noter que les employés de SMP peuvent facilement être considérés comme des mercenaires, si l' alinéa e) ne les excluait pas de la définition, bien que ce point soit très limite au regard de la loi : en effet, les employés civils d'entreprises ne font pas partie des forces armées, alors qu'il sont cependant mandatés par un Etat.

Ainsi, au vu des difficultés que pose l' externalisation, et les contraintes liées à l' application d' une réglementation, il est permis de se demander si réglementer un tel secteur est véritablement un bon choix.

A ce sujet, la Suisse a tenue une conférence internationale à Montreux fin novembre 2006, afin de réfléchir sur un cadre juridique international au sujet de l'activité des SMP. Directeur du droit international public au ministère suisse des Affaires Etrangères, Paul Seger nous explique que « le nombre de ces entreprises s'est multiplié dans le monde entier, au point de devenir un phénomène international. De plus en plus d'Etats recourent à ce genre de milices privées et d'entreprises de sécurité. C'est pourquoi nous pensons que c'est le moment de rappeler leurs obligations internationales aux Etats qui mandatent ce genre d'entreprises. Notre objectif est de

25. Le texte intégral de la convention est disponible en français sur le site de la Croix-Rouge : http://www.icrc.org/dih.nsf/FULL/530?OpenDocument, visité le 19 septembre 2006.

définir quelques normes juridiques communes au niveau international applicables dans ces situations. Nous voulons rappeler aux Etats qu'ils ont des obligations. Il est faux de dire que les entreprises privées de sécurité opèrent dans un désert juridique. Les réglementations internationales comptent de multiples règles en matière de droit humanitaire et de droits de l'homme. Il n'est pas question d'interdire ces sociétés, mais nous aimerions améliorer les pratiques en développant, sur la base des obligations existantes, des recommandations et des indications pour aider les Etats à assumer leurs responsabilités en matière de respect du droit international humanitaire et des droits humains. Le but n'est pas nécessairement une convention internationale parce que ce serait trop difficile. >> 26

La Suisse semble avoir compris que l'activité des SMP ne peut être interdite, que l'enjeu n'est donc pas, contrairement aux premières propositions du Green Paper britannique de 2002, dans l'interdiction, mais bien dans la réglementation. L'aspect international de la réflexion semble effrayer la plupart des gouvernements, mais la présence du Comité International de la Croix-Rouge (CICR) montre bien que les choses semblent évoluer dans leurs perceptions au niveau international.

Cependant, face aux difficultés annoncées et rencontrées dans les faits, de nombreux gouvernements semblent penser de plus en plus que la mise en place d'une règlementation ne soit plus la meilleure des options.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore