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Michel Foucault ,Psychiatrie et médecine

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par David Labreure
Université Paris 1 panthéon sorbonne - Ma??trise 2004
  

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III: LA SOLUTION PSYCHANALYTIQUE?

Les rapports de Michel Foucault avec la psychanalyse n'ont pas toujours été très explicites ni toujours bien compris. La psychanalyse peut être considérée comme une forme de dépsychiatrisation dans la mesure où le pouvoir est transféré hors de l'espace asilaire. Il est déplacé et reconstitué dans un espace (le cabinet du psychanalyste) spécialement aménagé. Avec Foucault on parlera donc de « dépsychiatrisation » pour évoquer la manière dont la psychanalyse a permis d'envisager une sortie du monde thérapeutique, ou plutôt un nouveau type de relation thérapeutique, pure, dégagée de toute contrainte autoritaire et rendant possible un nouveau champ de soins :une relation dans laquelle le malade ne serait plus un objet sous le regard objectif du médecin qui serait le seul détenteur de la vérité scientifique ,mais qui serait plutôt quelque chose de dynamique,d'enrichissant. La position foucaldienne à l'égard de la psychanalyse n'a jamais été très claire : « Profondément ennuyé » par son expérience personnelle de psychanalysé, critique à son égard sur la question des rêves dans son Introduction à Rêve et Existence de Binswanger, il semble en reconnaître les mérites face à un certain type de psychiatries et de tenter de rétablir par ce biais un certain dialogue avec la déraison. Dans Histoire de la folie à l'âge classique, Foucault reconnaît même qu'il faut « être juste avec Freud »187(*).Jacques Derrida dans Penser la folie, Essai sur Michel Foucault interprète cette formule comme étant une forme de résistance à la tentation d'assimiler Freud à la psychopathologie : Foucault reconnaît au grand psychanalyste autrichien la vertu d'avoir essayé de refaire parler la folie à une époque où elle semblait définitivement réduite au silence par la psychiatrie. Tout l'effort de Foucault, au cours de ces quelques lignes, semble aller dans le sens d'une sorte de réhabilitation de la psychanalyse, à tempérer toutefois...C'est néanmoins tout le mérite de la psychanalyse d'avoir essayé de rétablir quelque chose, comme une sorte d'expérience interactive avec la folie, déjà présente à l'âge classique sous la forme du délire .Freud a cerné une autre forme de sens de signification et non un sens perdu qu'il s'agirait de retrouver. La folie apparaît désormais comme une « prodigieuse réserve de sens »188(*) .L' expérience psychanalytique est fondamentalement celle du langage : « Le langage est la structure première et dernière de la folie » ; c'est l'articulation de la folie au langage qui l'exprime, qui la « dit » qui permet d'établir ce jeu de ressemblances avec l'époque classique. Freud, affirme-t-il, nous a libérés de la stratégie des quakers (Tuke) consistant à faire accepter à chaque malade la responsabilité (et la punition qui en est la conséquence logique) de sa maladie, ou encore des approches françaises, parallèles, avec lesquelles l'asile d'Esquirol ou de Pinel « devint un instrument d'uniformisation morale, où l'on fait comprendre aux fous qu'ils ont transgressé les critères éthiques universels ».Freud, d'après Foucault, a démystifié toutes les structures asilaires, en isolant l'importance de cette composante essentielle : la relation qui s'instaure entre patient et médecin : « Elle [la psychanalyse] a permis de voir que l'internement n'était pas la meilleure forme thérapeutique »189(*). Sans Freud, tout ce qui faisait le sens de l'expérience classique de la folie, c'est-à-dire celle-ci prise comme langage aurait pu disparaître. Toutefois, l'expérience psychanalytique a ses limites : « Mais il (Freud) a exploité en revanche la structure qui enveloppe le personnage médical ; il a amplifié ses vertus de thaumaturge.»190(*) .La psychiatrie du XIX ème siècle semblait ainsi contenir en germe des éléments de psychanalyse et ,au final, « la psychanalyse n'est pas une coupure totale et radicale par rapport à la psychiatrie ».Beaucoup d'éléments de la psychanalyse proviennent ainsi des techniques élaborées en psychiatrie.Si Freud avait donc très bien compris que le noeud essentiel de la maladie mentale se situait dans la relation du médecin avec son patient, il n'a en revanche pas su fournir une thérapeutique dans laquelle la relation de pouvoir serait totalement absente. Foucault ira même jusqu'à dire que la psychanalyse ne pourra donc réellement comprendre l'essence de la maladie mentale : « La psychanalyse peut dénouer quelques unes des formes de la folie ; elle demeure étrangère au travail souverain de la déraison »191(*) .De plus, la psychanalyse n'a pas véritablement remplacé la psychiatrie : Beaucoup de gens sont ou restent internés ; il y a plutôt cohabitation entre les deux. En outre, ces deux pratiques ne sont pas seules au monde : Foucault note qu'il existe d'autres formes d'  « orthopédie médicale » telles que la psychothérapie ou la psychiatrie communautaire. Au final, deux idées semblent se détacher à propos de la psychanalyse :

- d'une part la psychanalyse a permis, effectivement, d'adresser des critiques à la pratique psychiatrique en proposant une autre forme de traitement que l'internement

- d'autre part, la psychanalyse n'est toutefois pas une rupture radicale avec la psychiatrie et a entre autres amplifié le rôle du médecin thaumaturge défini au XIX ème siècle.

* 187 Michel Foucault, Histoire de la folie, TEL Gallimard, Paris, 1961 (-1972), p.428.

* 188 Michel Foucault, « La folie absence d'oeuvre » in Dits et Ecrits volume 1 et 2, Quatro Gallimard, Paris, 1994, p. 441.

* 189 Michel Foucault, « Folie, une question de pouvoir » in Dits et Ecrits volume 1 et 2, Quatro Gallimard, Paris, 1994, p.1529.

* 190 Michel Foucault, Histoire de la folie, TEL Gallimard, Paris, 1961 (-1972), p.529.

* 191 Michel Foucault, Histoire de la folie, TEL Gallimard, Paris, 1961 (-1972), p.632.

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