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Recomposition des rapports ville - campagne en Ile de France: exemple de la zone maraichère de Cergy

( Télécharger le fichier original )
par Ibrahim HESSAS
Université Paris X (nanterre) - Master I Géographie et améngement (mondialisation et dynamiques rurales comparées) 2006
  

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Université Paris X (Nanterre) Institut National Agronomique de Paris - Grignon

(INAPG)

Recomposition des rapports ville - campagne en Ile de France :
Exemple de la zone maraîchère de Cergy.

Mémoire de première année Master :
Mondialisation et Dynamiques Rurales Comparées.

Présenté par Ibrahim HESSAS

Composition du jury :

Mme Monique POULOT : Maître de conférence (Université Paris X) M Jean Paul CHARVET : Professeur (Université Paris X)

Septembre 2006.

SOMMAIRE :

INTRODUCTION : 1

RAPPELS METHODOLOGIQUES : 9
PREMIERE PARTIE :

L'AGRICULTURE EN ILE DE FRANCE : DE LA PRISE EN COMPTE SPATIALE A
LA CONSIDERATION FONCTIONNELLE

1. LA PRISE EN COMPTE DE L'ESPACE AGRICOLE DANS L'AMENAGEMENT REGIONAL EN ILE DE

FRANCE : 13

2. VERS L'INTEGRATION FONCTIONNELLE DE L'ACTIVITE AGRICOLE EN ILE DE FRANCE : 19

DEUXIEME PARTIE :
LA ZONE MARAICHERE DE CERGY : UN ESPACE AGRICOLE URBAIN

1. UNE POSITION PARTICULIERE : AU CENTRE DE LA VILLE NOUVELLE DE CERGY PONTOISE. 24

2. UN ESPACE SOUS FORTES CONVOITISES URBAINES : 29

2.1. La zone maraîchère : un espace ouvert : 30

2.2. La zone maraîchère : un espace de sport et de loisirs : 33

2.3. La zone maraîchère : un espace de liaisons : 35

2.4. La zone maraîchère : un espace habité : 36

2.5. La zone maraîchère : un lieu de décharges sauvages : 38
TROISIEME PARTIE :

L'AGRICULTURE DE LA ZONE MARAICHERE : UNE ACTIVITE FAIBLEMENT
INTEGREE DANS L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE

1. PRESENTATION DE L'AGRICULTURE DE LA ZONE MARAICHERE DE CERGY : 40

2. PEU D'ECHANGES AVEC L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE : 50
3. LES TENTATIVES D'INTEGRATION URBAINE DE L'AGRICULTURE PAR L'AGGLOMERATION DE CERGY PONTOISE : 54

3.1. Les mesures de protection de l 'agriculture en zone maraîchère : 54
3.2. L 'intégration dans un circuit de recyclage de déchets urbains : une tentative

échouée. 56

QUATRIEME PARTIE :

LES BASES DU RAPPROCHEMENT VILLE - AGRICULTURE EN ZONE
MARAICHERE DE CERGY

1. DE NOUVEAUX ROLES URBAINS POUR L'AGRICULTURE : 59

1.1. Un rôle social : de l'emploi agricole pour une main d'oeuvre urbaine : 59

1.2. Les tags : pressions urbaines, ou appropriation citadine de l 'agriculture : 60

1.3. Le rôle patrimonial et paysager : 62

2. LES CONDITIONS DU RAPPROCHEMENT VILLE - AGRICULTURE : 63

2.1. La reconstruction du dialogue agriculteurs - agriculteurs : 64

2.2. Le renforcement du contact agriculteurs - citadins : 65

2.2.1. L 'obstacle : un recul des clients sur les marchés forains : 65

2.2.1.1. Les légumes attirent de moins en moins d'acheteurs : 68

2.2.1.2. Les marchés forains n 'attirent plus les clients : 70

2.2.2. La clé du déblocage : un rôle actif pour les agriculteurs : 72

2.2.2.1. Tenir compte des attentes des citadins : 72

2.2.2.1.1. Envers les produits agricoles : des légumes frais à des prix abordables : 72

2.2.2.1.2. Envers l'espace agricole : 75

2.2.2.2. Renforcer l'image de l'agriculture au sein de la société : 76

2.2.2.2.1. L 'agriculture : une activité capable de satisfaire les attentes de la société : 76

2.2.2.2.2. Redéfinir le métier d'agriculteur par ses points positifs : 77

2.2.2.3. Convaincre les citadins de maintenir l'agriculture francilienne : 79

CONCLUSION : 81
LISTE DES ILLUSTRATIONS

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

Introduction :

Le phénomène de la périurbanisation est né en France à la fin des années 1960, c'est vers 1967 - 1968 que l'engouement pour la maison individuelle reprend une nouvelle vigueur quarante ans après les lotissements de l'entre les deux guerres. Hormis quelques franges qui se développent en continuité avec l'urbanisation existante, il s'agit d'une croissance urbaine détachée de la ville mère dont l'essentiel s'effectue à des distances plus ou moins grandes sous la forme d'îlots urbains en plein milieu rural (Steinberg, Desert et Metton, 1991).

L'essor de la périurbanisation a conduit à la naissance d'un espace à contours non précis dans lequel se mêlent l'urbain et le rural avec des proportions plus ou moins significatives selon que l'on se positionne proche de la ville ou de la campagne. Il se caractérise principalement par de fortes migrations domicile - travail permises par le développement de l'automobile et du réseau routier et autoroutier et par l'accès à la propriété rendu plus facile grâce aux systèmes de crédits à la consommation et des prix du foncier plus abordables en s'éloignant du centre ville. Toutes ces caractéristiques ont abouti à la mise en place d'un espace particulier qui n'est ni ville ni campagne mais qui regroupe les caractéristiques des deux espaces : le périurbain. C'est un non lieu où l'agriculture a été peu à peu désorganisée. Aujourd'hui, ces franges rurales / urbaines changent de sens. La forme urbaine recherchée inclut dorénavant des espaces ouverts, et notamment des espaces cultivés, dont la permanence à proximité du bâti est devenue une condition essentielle de la qualité du cadre de vie (Fleury, 2004).

La part de plus en plus marquante de cet espace dans la répartition des infrastructures, des activités et de la population a conduit l'INSEE à réviser son système de découpage du territoire français ; un découpage en aires urbaines qui tient compte des nouvelles caractéristiques de ces nouveaux espaces (notamment les migrations domicile travail) est proposé en 1996. En s'appuyant sur les résultats du recensement de la population de 1999, ce zonage classe désormais 14930 communes comme périurbaines (soit 41% de l'ensemble des communes françaises), elles concernent près de 179792 Km² (soit 33% du territoire) et plus de 12,25 millions d'habitants (soit 21% de la population), les zones rurales correspondent au territoire de 18535 communes (soit 51% des communes), 320171 Km² (soit 59% de la surface totale de la France) et 10,5 millions d'habitants (soit 18% de la population), le reste étant classé en zone urbaine (INSEE, 2000). En 1999, 73% de la population française métropolitaine vit dans les 361 aires urbaines et 56% dans les 73 aires de plus de 100000 habitants (Bessy - Pietri, 2000), entre 1990 et 1999, la population a augmenté de 1,03% dans

les couronnes périurbaines, de 0,42% dans les banlieues et de 0,12% dans les villes - centres pour l'ensemble des aires urbaines. La progression de la population du centre vers la périphérie caractérise 19 aires de plus de 100000 habitants. Ce phénomène résulte d'un fort excédent des arrivées sur les départs ce qui confirme la vigueur de la périurbanisation (INSEE, 2000).

L'étalement urbain s'effectue par l'artificialisation des sols qui touche annuellement 55000 ha de terres agricoles (Boisson, 2005). Sa progression est inégalement répartie selon les zones concernées, entre 1992 et 2001, elle a augmenté de 14% en zones périurbaines, de 12% en zones urbaines et de 10% en zones rurales (Agreste, 2002). A partir de ces chiffres, il ressort que la perte irréversible des terres agricoles concerne avant tout les espaces périurbains. Dans ces derniers, l'agriculture utilise encore 10,3 millions d'ha avec 231000 exploitations contre 16,7 millions d'ha avec 375000 exploitations en zones rurales et seulement 1,6 millions d'ha avec 57000 exploitations dans les zones urbaines (Boisson, 2005, Agreste, 2002). En France métropolitaine, 84% du territoire reste encore occupé par l'agriculture et la forêt (Boisson, 2005).

Si l'artificialisation des sols agricoles peut être aujourd'hui plus ou moins freinée à travers les documents d'urbanismes (schéma directeur, ou encore POS et PLU) qui peuvent parfois rétablir définitivement la destinée agricole à certains de ces espaces les sécurisant ainsi de toute pression foncière, la proximité urbaine pose encore de sérieux problèmes à l'activité agricole dans ces lieux particuliers du contact ville - campagne ; vols, dégradations, difficultés d'accès aux parcelles et problèmes de circulation pèsent aujourd'hui sur les agriculteurs des espaces périurbains. Néanmoins, la proximité urbaine permet aux agriculteurs de commercialiser directement leurs produits et de tirer une marge bénéficière plus importante de leur travail, le contact avec les citadins les place aussi dans une position de privilégiés leur permettant d'ajuster leurs modes de travail et leurs productions selon les demandes locales. Avec le contact ville - campagne extrêmement fort dans ces espaces, l'agriculture s'adapte et porte des caractéristiques spécifiques : une agriculture périurbaine s'identifie et se met en place (Poulot et Rouyres, 2005). A travers cette agriculture périurbaine, c'est tout le concept de « campagne périurbaine » proposé par Jean Renard qui s'exprime désormais comme composante à part entière d'une nouvelle typologie des campagnes européennes, il se défini avant tout par la forte disparition de l'agriculture ou sa spécialisation (Renard, 2002). L'émergence de réseaux dédiés au maintien de l'agriculture des milieux périurbains (Purple en Europe, Terre en ville en France) confirme l'existence de la spécificité de l'agriculture périurbaine, elle témoigne aussi de la préoccupation de plus en plus importante des pouvoirs

publics et des Etats concernant ce type d'agriculture, aujourd'hui le maintien de cette activité mobilise de grandes régions urbaines européennes.

Dans ce mouvement, l'Ile de France tient un rôle actif pour maintenir l'agriculture sur son territoire. Après la reconnaissance d'une destiné agricole à ses espaces de cultures définitivement exprimée dans le SDRIF de 1994, c'est le maintien de l'activité agricole qui préoccupe les différents acteurs de l'aménagement régional. Si l'espace agricole ne change que peu notamment grâce aux efforts consentis pour maîtriser l'étalement urbain, l'agriculture recule sur le territoire régional à une vitesse touj ours soutenue.

L'enquête sur la structure des exploitations agricoles réalisée par le ministère de l'agriculture à l'automne 2005 fixe à - 3,1% le rythme annuel de disparition des exploitations agricoles franciliennes pour la période 2000 - 2005. Ce taux s'est stabilisé depuis 1988 à une valeur proche de - 3% (pour une moyenne nationale de -3,9%). En 2005, la région compte 5600 exploitations (soit environ 1500 exploitations de moins qu'en 2000) dont 4200 unités professionnelles, en cinq ans, 14% des exploitations franciliennes ont disparu. Ce recul est différemment ressenti selon les départements, il est plus fort en petite couronne (-30%) et plus faible en Seine - Et - Marne (-10%), les autres départements enregistrent des baisses intermédiaires (-18% pour les Yvelines et l'Essonne, -17% pour le Val d'Oise).

Le recul des exploitations en nombre s'est accompagné par la poursuite de leur agrandissement, 39% ont plus de 100 UDE (contre 33% en 2000). Les exploitations appartenant à l'OTEX grandes cultures sont celles qui se maintiennent le mieux, toutes les autres catégories reculent, notamment les unités de cultures spéciales qui ont perdu 29% de leur effectif (contre seulement 9% pour les grandes cultures). Dans un contexte d'augmentation des charges et de pression foncière, seules les exploitations les plus performantes et les plus aidées au niveau communautaire résistent (Agreste, 2006).

Le constat demeure alarmant malgré les engagements forts et solennels de la région en faveur de son agriculture, le maintien de cette activité sur le territoire francilien réclame aujourd'hui des mesures plus adaptées au contexte global mais surtout aux spécificités locales de chaque espace agricole. Ces mesures doivent non seulement tenir compte de l'opinion francilienne de plus en plus importante dans le débat sur l'avenir de l'agriculture régionale (Charvet, 2003), mais aussi de celle des agriculteurs eux-mêmes car c'est à eux qu'incombe la continuité et la transmission de ce métier pour les générations futures sans compromettre leurs intérêts et ceux de la société actuelle, les agriculteurs doivent jouer un rôle actif. Les gestes du « refaire campagne » doivent considérer les att entes de toutes les parties concernées par

l'agriculture francilienne tout en veillant à répondre aux sollicitations de l'ensemble de la société régionale (Poulot et Rouyres, 2005).

Jean Paul Charvet résume les conditions du maintien d'une agriculture viable en Ile de France, il propose des voies pour une durabilité économique et sociale de cette activité. Il s'agit de garantir l'accès aux espaces agricoles et de sécuriser les productions, de valoriser davantage la situation en zone périurbaine et de procurer des revenus suffisants et mieux assurer les successions à la tête des exploitations. Les agriculteurs qui auront un accès commode à leurs exploitations, vont pouvoir mettre en place des cultures qui seront sécurisées des pressions urbaines, il pourront ensuite commercialiser eux-mêmes leurs produits afin de récupérer une grande partie de la plus value (perçue par les agents économiques). L'exercice de production peut s'accompagner par des formations en marketing afin d'optimiser les conditions de commercialisation, la mise en place de démarches de qualité permet de justifier les prix proposés notamment pour les catégories sociales les plus aisées. Au-delà de la simple production alimentaire, les agriculteurs peuvent développer d'autres activités en lien avec la ville dans le cadre de la multifonctionnalité de l'agriculture (accueil de groupes, entretien et gestion des paysages), en communiquant sur leurs apports à la société régionale, ils peuvent justifier les soutiens qui leur sont apportés leur garantissant des revenus supplémentaires (Charvet, 2003).

D'autres chercheurs, notamment à l'Ecole Nationale Supérieur du Paysage de Versailles, considèrent qu'à moyen et à long terme, l'agriculture périurbaine n'existera que sous forme d'une agriculture urbaine1. Son nouveau rôle sera la production de paysage, la défense de l'environnement et la promotion de la biodiversité et de l'harmonie sociale. Elle reste touj ours une activité économique, mais sa production ne sera plus identifiée aux seules denrées agricoles ; en devenant multifonctionnelle, elle devient une composante spatiale et sociale des territoires urbains (Donadieu et Fleury, 1997, Donadieu, 2004, Fleury, 2004).

Il ressort ainsi que la place de l'agriculture en Ile de France reste garantie par sa capacité à intégrer fonctionnellement les projets urbains et à devenir pleinement urbaine, cette destiné ne peut sans doute s'accomplir dans des délais courts car elle nécessite des ajustements profonds qui s'opèrent non seulement du côté de l'agriculture elle-même qui doit assumer sa multifonctionnalité mais aussi de la part de la société entière notamment pour rémunérer les aménités qui découlent des nouvelles fonctions de cette activité. En attendant, l'enjeu est de la maintenir viable pour qu'elle puisse atteindre ce stade ultime d'intégration

1 - Il s'agit de l'agriculture des périphéries urbaines qui s'oriente vers les nouveaux besoins urbains (Donadieu et Fleury, 1997)

totale dans les projets urbains où l'agriculture est considérée comme un outil d'urbanisme, une infrastructure naturelle d'intérêt public, capable d'organiser durablement le territoire des cités puisque le développement de la ville aux dépends de l'agriculture n'est pas inéluctable (Donadieu, 1998).

Ce travail propose de vérifier les conditions de la réintégration de l'agriculture en ville notamment lorsqu'elle se trouve entièrement contenue dans l'espace urbain, ce positionnement qui concerne de plus en plus d'espaces agricoles suffit-il pour que l'agriculture accède à une forme urbaine à travers la mise en place de rôles fonctionnels avec la ville ?

De telles problématiques deviennent intéressantes à aborder en Ile de France où les rapports ville - campagne sont en perpétuelle recomposition.

Rappels méthodologiques :

Ce travail se divise en trois grandes parties, la première basée essentiellement sur une recherche bibliographique a pour objectif de retracer les principaux moments forts qui ont conduit à l'émergence de l'agriculture comme préoccupation régionale en Ile de France, l'objectif étant de montrer l'ascension de l'agriculture dans les problématiques d'aménagement régional ; après la reconnaissance et la fixation d'une destiné agricole à une vaste partie de l'espace francilien, c'est le maintien de l'activité agricole qui devient une nécessité pour l'aménagement du territoire en Ile de France.

Dans la seconde partie, il s'agit d'analyser les adaptations du fonctionnement de l'espace agricole lorsqu'il est maintenu au milieu urbain notamment en terme d'interactions qu'il peut développer avec son entourage urbain proche, l'objectif est de montrer le degré et les voies d'intégration de ce type d'espace dans les milieux urbains. Pour cela j'ai choisi un espace agricole homogène nommée « zone maraîchère de Cergy » dont la localisation géographique permet d'introduire dans l'analyse les conséquences des actions et des décisions prises lors de l'élaboration des orientations à l'aménagement régional (villes nouvelles, ceinture verte régionale) ; Le chevauchement de plusieurs échelles (communale, agglomération nouvelle, régionale...) complique davantage la problématique d'intégration urbaine de cet espace et permet de rendre compte de la complexité de la gestion de certains espaces agricoles franciliens (ou autres) se trouvent dans des contextes similaires.

Cette partie est basée essentiellement sur un travail de terrain qui consiste en un diagnostic territorial complet de la zone d'étude dans le but de repérer les différents usages et servitudes en place qui, même lorsqu'elles paraissent secondaires pour certaines d'entres elles, peuvent contribuer inéluctablement à expliquer le fonctionnement actuel de la zone maraîchère.

Pour mener mon diagnostic, j 'ai effectué, plusieurs visites et passages sur le terrain au cours desquels j 'ai recensé, noté, photographié et schématisé toutes les composantes spatiales présentes sur cette zone et dans ses alentours immédiats. Au-delà de mes observations personnelles, les récits et les explications qui m'ont été données par les différents acteurs rencontrés ont appuyées mes remarques sur le fonctionnement de chacune de ces composantes et de toute la zone maraîchère.

La troisième partie de ce travail propose d'analyser les effets de ce positionnement urbain de l'espace agricole sur la capacité de l'agriculture qui s'y pratique à s'intégrer dans le milieu urbain et à participer aux projets de la ville en développant des relations fonctionnelles

avec celle - ci. Cette partie qui représente aussi l'essentiel de mon travail, est menée en réalisant deux enquêtes de terrain :

La première consacrée aux agriculteurs a pour objectif de connaître les principales préoccupations de ces derniers en insistant sur leurs propres attentes vis-à-vis de la société en générale et francilienne en particulier. Pour cela, j 'ai établi un questionnaire qui reprend les principales difficultés de l'agriculture des milieux périurbains. Les questions choisies reprennent ainsi largement les problématiques du voisinage urbain (foncier, relations avec la ville,...), mais aussi de la capacité des agriculteurs à valoriser leur proximité à la ville (choix des cultures, modes de commercialisation)2.

Une fois sur le terrain, et dès les premiers contacts avec les agriculteurs, je me suis rendu compte que leurs interventions restent principalement focalisées sur certaines problématiques (rémunération du travail agricole, revenus, commercialisation des produits...) sur lesquelles les agriculteurs répondent avec beaucoup de précision en prenant le temps nécessaire. Sur les questions relatives au fonctionnement de leurs exploitations (rotation, gestion du personnel,...) les réponses sont souvent rapides et peu précises. Au bout de quelques entretiens, j 'ai donc choisi de laisser s'exprimer les agriculteurs sur les sujets qu'ils jugent plus urgents à traiter. Des simples questions - réponses, mon enquête s'est transformée en de véritables entretiens plus approfondis et plus longs durant lesquels la parole est principalement laissée aux agriculteurs qui s'expriment et orientent leurs interventions selon les thèmes qui les préoccupent le plus : ce sont ces thèmes que j 'ai considérés par la suite comme leurs principales attentes vis-à-vis de la société.

Le dépouillement des résultats de ces entretiens directs avec les agriculteurs, m'a orienté dans l'élaboration du questionnaire destiné pour la seconde enquête que j 'ai réalisée auprès des citadins3. Ni la sécurisation du foncier, ni les pressions urbaines ne semblent préoccuper pour autant les agriculteurs de la zone maraîchère, en revanche, ils témoignent tous d'une grande inquiétude quant aux débouchés de leurs productions au point où leurs attentes vis-à-vis de la société tournent exclusivement autour de ce thème toutefois exprimées sous diverses formes.

La seconde enquête a pour objectif de rechercher les réponses des citadins aux principales demandes que leur adressent les agriculteurs. Elle m'a permis de proposer mon questionnaire à un échantillon de 90 personnes dont 79 ont répondu et 11 n'ont pas souhaité s 'exprimer.

2 - Voir questionnaire destiné aux agriculteurs en annexe.

3 - Voir questionnaire destiné aux citadins en annexe.

Les individus interrogés sont rencontrés sur les six quartiers qui composent la commune de Cergy dans lesquels ils sont soit résidents soit travailleurs. Ceux qui ont répondu sont âgés entre 17 et 80 ans avec une plus forte représentation de la catégorie d'âge 20-60 ans (plus de 90% des individus), cette catégorie est aussi la plus concernée par l'achat des produits alimentaires en général et des légumes en particulier.

Graphe 01 : Les catégories d'âge des personnes interrogées.

45%

40%

35%

30%

25%

20%

15%

10%

5%

0%

10_20 20_ 30 30_ 40 40_ 50 50_ 60 60_ 70 70_ 80
Classe d'âge (années)

3%

41%

19% 21%

Nombre total d'individus = 79 (100%)

10%

5%

1%

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Les entretiens sont directs, ils se sont effectués de deux façons : soit en abordant les gens dans les rues et les lieux de passages (trottoirs, places publiques,...), soit, directement sur leurs lieux de travail afin de pallier le problème d'indisponibilité exprimé par une partie des personnes rencontrées. Cette deuxième façon d'enquêter, qui a le plus contribué à l'avancement de mon investigation, présente cependant le risque de causer des désagréments pour les personnes interrogées sur leur lieu de travail (Poste, commerces, pharmacies, administrations, université, écoles...). Afin de minimiser les non - réponses, j'ai proposé après explication de l'objectif de mon travail de laisser mon questionnaire aux gens, pour qu'ils puissent avoir le temps de réflexion nécessaire et répondre tranquillement dans un délai raisonnable : cette méthode permet d'éviter des réponses courtes et moins réfléchies puisque les délais de réponses sont choisis par les enquêtés ; en revanche, et au-delà de sept jours sans réponse, je considère que la personne n'a pas souhaité s'exprimer.

Une fois les questionnaires récupérés, la saisie puis l'analyse des données a permis de dresser un portrait du monde agricole tel qu'il est perçus par les citadins ainsi que les comportements de ces derniers vis-à-vis de l'agriculture (espace, activité et productions) : Certaines réponses peuvent être apportées aux différentes attentes des agriculteurs.

Enfin une dernière partie sous forme de propositions en vue d'un rapprochement entre agriculteurs et citadins, résume les principales conditions permettant à l'agriculture de tenir compte des évolutions de la société qui l'entoure. A travers les attentes des agriculteurs et les réponses des citadins, une série de mesures est proposée dans l'objectif de rapprocher les agriculteurs des citadins autour des préoccupations soulevées des deux camps. Dans cette partie qui s'adresse aux agriculteurs, l'importance est donnée à la fonction nourricière de l'agriculture car c'est la principale fonction dans laquelle se reconnaissent encore les agriculteurs : c'est dans leur mission de nourriciers que ces derniers peuvent facilement accepter de fournir des efforts supplémentaires.

Première partie :

L'agriculture en Ile de France : de la prise en compte spatiale à la considération
fonctionnelle.

1. La prise en compte de l'espace agricole dans l'aménagement régional en Ile de France :

La considération de l'espace agricole par les documents d'aménagement régional de l'Ile de France s'est faite d'une façon graduelle et tardive. Elle n'est devenue effective qu'après 83 ans des premières réflexions sur l'aménagement du territoire dans cet espace devenu la région Ile de France.

Jusqu'au milieu des années 1970, les schémas d'aménagement mis en place s'intéressaient beaucoup plus à l'organisation de l'expansion urbaine de la région parisienne, extrêmement forte notamment entre les deux guerres et après la seconde guerre mondiale, l'espace agricole été alors considéré comme une « réserve foncière » en attente d'urbanisation, de préférence la moins coûteuse pour l'Etat et les collectivités.

C'est ainsi que le PADOG de 1960 qui sépare les « zones urbaines » des « zones rurales » par un périmètre d'agglomération rigoureusement tracé en préconisant une reconstruction de la ville sur la ville, autorise par dérogation les constructions au-delà de ces limites et même sur des terrains non affectés à l'urbanisation à l'intérieur de ce périmètre4. Ces autorisations de construire sont délivrées par la CARP5 à condition que l'équipement des terrains soit pris en charge par le demandeur et non par les finances publiques. Les motivations des instigateurs de ce schéma sont plus la limitation des coûts de l'étalement urbain que la préservation de l'espace rural et agricole. Par ses préoccupations urbanistiques, le PADOG s'aligne largement sur ses prédécesseurs schémas d'urbanisation de la région parisienne. Dans le plan d'extension de Paris édité en 1911, qui se donne comme cadre d'extension le département de la Seine, les réflexions sont orientées vers l'amélioration de la circulation et la reconversion d'îlots insalubres en espaces libres. Son successeur de 1939 (appelé Plan Prost Dausset) qui s'applique à la région comprise dans un rayon de 35 Km autour de Notre Dame, donne la

4 - Paul Delouvrier estime que « deux tiers des demandes de dérogations pour construire ont été faites dans les zones rurales en dehors du périmètre délimité par le PADOG »

5 - Comité supérieur d'Aménagement et d'organisation générale de la Région Parisienne : elle est instituée par le gouvernement Poincaré auprès du ministre de l'intérieur par décret du 24 mars 1928 et succède à la commission d'aménagement et d'extension du département de la Seine instituée en 1925; selon J Bastié, ce fut le point de départ de toute l'oeuvre d'aménagement de la région parisienne.

Figure 01 : Le périmètre de la ceinture verte de la région d'Ile de France.

Zone d'habitat collectif

Espaces boisés 0 10 Km

Limites de la ceinture verte Source : IAURIF, 1995.

Zone d'habitat individuel

N

priorité à la lutte contre l'extension des lotissements par l'interdiction de construire au delà d'un périmètre d'agglomération (sauf par dérogation de la CARP) et au renforcement du réseau routier par la création de 3300 Km de voies nouvelles ; il préconise, en outre, des réserves « d'espaces libres publics et privés » et une limitation des hauteurs des immeubles selon les communes (Bastié, 1964 et 1984). Si le PADOG a le mérite d'être le premier schéma d'aménagement de la région parisienne à la considérer en sa globalité avec comme objectif la limitation de son extension en « tâche d'huile », le SDAURP qui lui a succédé en 1965, présente des idées révolutionnaires pour la région en ayant comme objectif la limitation de son extension en « doigts de gants » notamment par l'instauration du principe d'extension en ville nouvelles construites sur des « terrains neufs » séparées de l'agglomération. La limitation de l'urbanisation des vallées que promulgue ce schéma a suscité sa révision au cours des années 1970 et son remplacement par le Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région d'Ile de France (SDAURIF) de 19766.

Il s'agit enfin du schéma qui apporte un premier souffle aux espaces naturels par l'instauration de la notion de « trame verte » et de « zones naturelles d'équilibre ». Ce schéma a également supprimé trois villes nouvelles sur huit initialement prévues, à savoir celle du Vexin, de Mantes sud et de Meaux sud.

Depuis, l'intérêt grandissant qu'a pris l'espace agricole dans l'aménagement régional s'est traduit par la mise en place de projets spécifiques visant le maintien de ce type d'espaces notamment dans les périmètres contenus entre les villes nouvelles et entre celles - ci et l'agglomération parisienne. C'est dans cette logique qu'un projet d'envergure régionale est conçu au début des années 1980, puis mis en place en 1987 sous l'appellation de ceinture verte régionale.

Située à une distance comprise entre 10 et 30 Km du centre de la capitale, le projet de départ (de 1982) recouvre le territoire de 359 communes avec 264700 ha de superficie (près du quart de la surface régionale) et un tiers de la population régionale à 1404 habitants/Km². Entre 1987 et 1990, la zone d'étude de la ceinture verte a été agrandie vers l'extérieur pour englober la totalité des villes nouvelles, et pour inclure, au Nord, la pleine de France comprise dans le cercle des 30 Km ; elle s'étend désormais sur un espace total d'environ 300000 ha et comprend 410 communes avec un peu plus de 5 millions d'habitants (soit 1 667habitants/Km²). Si elle concerne tous les départements de la région (sauf Paris), elle se

6 - Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme de la Région d'Ile de France (le district est remplacé par le conseil régional d'Ile de France le jour même d'approbation de ce schéma).

situe essentiellement, pour 85% de sa surface, dans les quatre départements de la grande couronne (IAURIF, 1995).

Ce projet qui reprend les dispositifs du SDRIF de 1976, présente l'ambition d'ouvrir de nouveaux espaces de loisirs, en particulier, pour les fins de semaine, de maintenir l'agriculture dans les zones périurbaines et de maîtriser le front urbain en évitant l'extension en tâche d'huile de l'agglomération (AEV, 1987). Jusqu'en 1990, 37456 ha d'espace verts ont été ouverts au public dans le périmètre d'intervention de la ceinture verte.

Tableau 01 : Les espaces ouverts au public par le projet de la ceinture verte (jusqu'en 1990).

Type d'espaces

Surface en hectares

Petite couronne

Grande couronne

Total ceinture verte

Verts de proximité

881

2470

3351

Parcs

779

2545

3324

Forestiers

3584

26771

30319

Spécifiques

61

260

321

Terrains non aménagés

37

104

141

Espaces verts total

5306

32150

37456

Population en 1990

1765750

3283680

5049430

Espaces verts (m²/habitant)

30

98

74

Source : IAURIF, 1995.

Dans son rapport publié en 1987, l'agence des espaces verts de la région d'Ile de France voit en la mise en place de la ceinture verte une priorité régionale dont l'urgence se justifie par la nécessité de ralentir la consommation des espaces agricoles qui s'effectue à une vitesse impressionnante : 84900 ha ont été soustraits à l'agriculture, aux bois et aux forêts entre 1970 et 1986 (soit une moyenne de 5660 ha par année).

Tableau 02 : Les espaces agricoles et forestières en Ile de France avant la ceinture verte.

Années

Surfaces en milliers d'hectares

SAU

peuplerais

Bois et forêts

Territoires
agricoles non
cultivés

étangs

Territoire non
agricole
(sauf paris)

1970

658,0

13,0

261,2

48,7

2,0

213,0

1975

628,2

14,2

261,5

36,8

1,9

253,4

1980

619,0

14,3

260,1

17,0

1,9

284,2

1985

610,2

14,2

258,1

15,7

1,0

286,4

1986

609,3

14,2

258,0

15,8

1,0

287,0

Source : DRAF/ AEV, 1987.

Afin d'atteindre ses objectifs, la ceinture verte propose de mener des stratégies adaptées à l'état de l'espace agricole concerné : elle prévoit de réintroduire l'agriculture avec une double fonction d'accueil du public sur les espaces agricoles « dégradés » et propose de favoriser la fonction de production de l'agriculture sur les espaces agricoles « non dégradés ». Afin de maintenir l'agriculture, le projet propose de la mettre à l'abri des agressions urbaines (comme toute autre activité économique), notamment par des protections physiques (clôtures) ainsi que par le maintien d'espaces tampons entre ces espaces et la ville (AEV, 1987).

Bien que la croissance spatiale de l'agglomération parisienne s'est considérablement ralentie entre 1982 et 1990 (2100 ha par an contre 4400 ha pour la période 1975 - 1982), la consommation de l'espace agricole est restée de mise, elle s'effectue aussi par l'installation d'infrastructures, d'équipements et de zones d'activité économique ainsi que par l'ouverture d'espaces au public puisque plus de 2100 ha des espaces boisés ou cultivés ont été consacrés à la création d'espaces verts publics, de jardins familiaux, de terrains de sports et de loisirs de plein air (IAURIF, 1995). En revanche, c'est l'essor de l'habitat individuel qui semble le facteur le plus dévastateur des espaces agricoles, la consommation d'espace se trouve ainsi directement liée à l'importance relative de ce type d'habitat dans les constructions puisqu'il mobilise 80% de l'espace d'habitat alors qu'il n'offre que 28% de logements : le rapport des densités est supérieur à 10, c'est-à-dire qu'un logement individuel consomme dix fois plus d'espace qu'un appartement (Merlin, 2003).

Pour l'IAURIF, la disparition d'une majeure partie des 70000 ha d'espaces agricoles du projet de la ceinture verte est à prévoir d'ici 2015, dans le cas où la croissance urbaine de la région conserve la même répartition géographique, c'est-à-dire essentiellement dans le périmètre de la ceinture verte ; toutes les entités agricoles seront amputées avec la disparition complète de certaines d'entres elles, car au-delà de la stricte superficie d'urbanisation, celle-ci entraîne une destruction plus large (IAURIF, 2002). La proximité des constructions et la multiplication des voies de communication rendent les conditions d'exploitation difficiles ; les exploitants ayant un parcellaire éclaté sur plusieurs endroits, souffrent de l'allongement des temps de parcours pour les engins agricoles volumineux et lents qui doivent emprunter les axes de la circulation générale dans une région où le trafic est très dense jusqu'à des heures avancées de la nuit. D'ailleurs et devant l'ampleur de ce problème, un grand nombre d'agriculteurs de l'Ile de France souhaite la séparation des circulations (Poulot et Rouyres, 2005).

Graphe 02 : La répartition de l'urbanisation francilienne (1982 /1999).

Hors ceinture
verte
(27%)

En ceinture
verte
(73%)

Source des données : IAURIF (2002)

Cette expansion urbaine sur le territoire de la ceinture verte, est intervenu au moment où s'effectue le ralentissement progressif de l'urbanisation des villes nouvelles ; ces dernières n'ont pu absorber que 30% de l'urbanisation de la ceinture verte, les deux tiers restants étant principalement effectués sur les autres espaces constitutifs de cette ceinture qui sont majoritairement tenus par l'agriculture. Ainsi, la part des villes nouvelles dans l'urbanisation de la ceinture verte est passée de 36% entre 1982 et 1994 à 21% entre 1994 et 1999 (soit une diminution de 15%), tandis que la part de la ceinture verte dans l'urbanisation totale de l'Ile de France est passée de 70% à 80% (soit une augmentation de 10%) pour la même période (IAURIF 2002).

Dans les schémas directeurs, c'est au milieu des années 1990 que l'espace agricole est explicitement pris en compte d'une façon définitive par le SDRIF de 1994.

Ce schéma qui oriente les aménagements de la région à l'horizon 2015, exprime enfin l'engagement solennel de la région d'Ile de France à reconnaître l'espace agricole comme une composante essentielle et à part entière du territoire régional : les espaces agricoles, qui lorsqu'ils sont pris en compte, sont laissés en blanc « réserves foncières » par ses prédécesseurs, apparaissent finalement en légende du document accompagnant ce schéma avec le qualificatif « agricoles ».

Le SDRIF qui attribut à l'espace rural la valeur d'une « ressource rare » promulgue « la reconstruction de la ville sur la ville » afin d'économiser l'espace rural dans la couronne rurale et d'épargner la ceinture verte (Poulot et Rouyres, 2005) ; il préconise de modérer

davantage sa consommation en limitant à 1750 ha la surface à prélever annuellement hors infrastructures (soit une économie de 30% par rapport à la période précédente). Sur ce point, la mise en place d'un outil spécifique de suivi de la consommation des espaces agricoles est proposée. C'est à ce titre que les outils des services de l'Etat (direction régionale de l'équipement, direction régionale et interdépartementale de l'agriculture et de la forêt) et de l'IAURIF sont mis en commun au sein d'un groupe baptisé OCEAN7. Le SDRIF est le premier schéma directeur régional à affirmer la vocation économique et patrimoniale de l'agriculture. Il donne la priorité à l'activité agricole dans l'espace rural, y compris par rapport à certaines exigences environnementales (IAURIF, 2003). Il préconise aux collectivités de garantir des espaces agricoles cohérents, suffisamment étendus pour assurer des conditions satisfaisantes d'exploitations (Poulot et Rouyres, 2005) ; les surfaces retenues sont de l'ordre de 50 ha en agriculture de serre ou horticulture, 300 ha en agriculture spécialisée ou maraîchage, 2000 ha en agriculture de plaine ou grandes cultures. En conséquence, il prononce le caractère intangible des espaces jaunes « à l'intérieur de leurs limites historiques et naturelles ». La priorité est donnée à la préservation de la couronne rurale avec un développement modéré des bourgs et villages, et la création de parcs naturels régionaux.

2. Vers l'intégration fonctionnelle de l'activité agricole en Ile de France :

Après la prise en compte de l'espace agricole dans les schémas d'aménagement de la région d'Ile de France définitivement entérinée par le SDRIF de 1994, vient la reconnaissance de l'activité agricole et de ses rôles potentiels pour la région. L'émergence de cette prise de conscience de la place que pourrait prendre l'agriculture dans le milieu urbain a accompagné la reconnaissance de la multifonctionnalité de l'activité agricole.

Cette prise de conscience qui s'est traduite par une volonté de préserver non seulement l'espace agricole mais aussi l'activité agricole elle-même dans les milieux urbains n'est pas propre à l'Ile de France. On la retrouve aussi dans d'autres régions françaises, européennes et mondiales. Des réseaux d'agriculture urbaine ont ainsi vu le jour associant diverses régions qui partagent comme point commun la présence de l'agriculture à proximité ou à l'intérieur de leurs espaces urbains : RUAF8 au niveau mondial, PURPLE9 au niveau européen et réseau

7 - Observation de la Consommation d'Espaces Agricoles et Naturel, constitué depuis 1997 sous le pilotage de la préfecture de la région.

8 - Ressource Center on Urban Agriculture and Food.

9 - Peri Urban Regions Platform Europe.

Terre en ville en France, sont autant de réseaux qui relient différentes régions prônant le maintien et le développement de l'agriculture urbaine et périurbaine sur leurs territoires.

L'avenir de l'agriculture périurbaine préoccupe le conseil régional d'Ile de France depuis 2000. La région s'est alors engagée dans le projet Sustainable Open Space (SOS) et dans le cadre du programme communautaire international « Interreg IIIB », permettant une réflexion commune des régions de l'Europe du Nord Ouest sur les espaces ouverts périurbains. Les efforts de la région en faveur de la mise en commun des différentes expériences conduites dans d'autres régions ayant la même préoccupation pour leurs agricultures, s'ont couronnés par sa participation à la création du réseau PURPLE, puis en organisant l'assemblée constituante de ce réseau à Paris (avril 2005) : la région d'Ile de France devient alors un acteur explicitement actif dans la voie de maintien de son agriculture urbaine à côté de sept autres régions européennes10.

Le réseau PURPLE est né à la suite d'une conférence tenue en octobre 2004 à La Haye (Pays-Bas) sur le thème de « la ville et la campagne, vers un nouvel équilibre » et qui a réuni plusieurs gouvernements régionaux néerlandais ainsi que le comité des régions européennes. Les débats ont été suivis par quelques 300 participants provenant de plus de 20 pays. Ils ont notamment abordé les thèmes de la position de l'agriculture dans le développement durable des territoires et de la production alimentaire.

Afin de mettre en application ses engagements, la région d'Ile de France soutient avec l'Etat les programmes agri-urbains qui associent agriculteurs, Etat et collectivités locales. Il s'agit de démarches volontaires de développement initiées par les différents acteurs concernés (agriculteurs, élus, collectivités, conseil régional, Etat, société d'agriculture et des arts) dans le but de répondre aux attentes des collectivités et des populations locales vis-à-vis des espaces agricoles en terme de maintien de la qualité du cadre de vie, du paysage et de l'accueil, mais aussi de préserver les espaces et les activités agricoles et mettre en place les conditions foncières et économiques de leur développement afin de permettre à ces espaces de jouer leur rôle d'équilibre et de gestion des territoires (IAURIF, 2005). A travers ces actions, l'agriculture s'implique entièrement dans la gestion des espaces urbains et périurbains : elle devient fonctionnellement intégrée dans la ville.

10 - Le réseau PURPLE comporte huit régions européennes : l'Ile de France, la Catalogne (Espagne), les Flandres (Belgique), le Sud Est Anglais (Grande Bretagne), la Basse Silésie (Pologne), la Moravie (Tchéquie), le Limbourg (Pays- Bas), Randstadt (Pays- Bas).

Tableau 03 : Les dix projets agri - urbains de l'Ile de France.

Projet

Initiation

Porteur du projet

Programme
d'action

Centre Essonne

Elus et agriculteurs

Association pour le plateau agricole de
Centre Essonne

Non

Cergy

Agriculteurs, SAA,
Conseil régional

Association d'agriculteurs et des
citadins de la plaine de Cergy

Non

Marne -et - Gondoire

Collectivité

Communauté d'agglomération de
Marne -et -Gondoire

Elaboré (2001)

Plateau Briard

Collectivité

Communauté de communes du plateau
Briard

Elaboré (2005)

Rambouillet

Etat (PDD)

Commune de Rambouillet

Non

Plateau de Saclay

Agriculteurs, SAA,
Conseil régional

Association la terre et la cité

Non

Sénart

Agriculteurs, SAA,
Conseil régional

Association les champs de la ville

Non

Triangle Vert

Collectivité

Association du triangle vert des villes
maraîchères du Hurepoix

Elaboré (2004)

Vernouillet

Collectivité

Association pour le développement de
l'agriculture périurbaine à Vernouillet
et ses environs

Elaboré en
(2005)

Plaine de Versailles

Agriculteurs, SAA,
Conseil régional

Association patrimoniale de la plaine de Versailles et du plateau des Alluets

En cours (en 2005)

Source : IAURIF, 2005.

Au-delà des engagements, le conseil régional soutient trois filières prioritaires qui sont l'élevage (relance des races locales d'agneaux et de volailles, charte de pension à la ferme pour les activités équestres...), les productions végétales (information et suivi des producteurs, développement des filières grandes cultures-élevage, qualité et commercialisation...), l'horticulture (mise à disposition de la station d'expérimentation de l'APREHIF11 pour réaliser des travaux de recherche financés par l'Etat et la région).

Son aussi encouragées les initiatives individuelles et collectives de reprise d'exploitation (recensement des exploitations sans successeurs, aide à l'installation en agriculture périurbaine de 3000 à 12000 €), la certification assurance qualité pour les entreprises agroalimentaires (prise en charge jusqu'à 50% du coût TTC de la démarche), la modernisation des entreprises (à travers le PRIMHEUR12 pour améliorer la compétitivité des exploitations maraîchères, arboricoles et les pépinières (Conseil régional d'Ile de France,2006).

11 - Association Professionnelle Régionale pour l'Expérimentation Horticulture ornementale et en pépinière en Ile de France.

12 - Programme Régional pour l'Initiative en Maraîchage et horticulture dans les Espaces Urbains et Ruraux.

Deuxième partie :

La zone maraîchère de Cergy : un espace agricole urbain.

Au fil de l'histoire, les orientations de l'aménagement du territoire régional en Ile de France ont produit le maintien d'un certain nombre d'espaces agricoles disposés en îlots à l'intérieure de l'agglomération qui demeurent gérés par l'agriculture bien qu'ils soient entièrement enclavés par l'urbanisation. Si l'absence de données chiffrables sur le nombre de sites et les surfaces agricoles concernées, on peut néanmoins estimer qu'ils se localisent pour leur majorité dans le périmètre de la ceinture verte. Tandis que certains de ces espaces sont aujourd'hui sérieusement menacés par l'urbanisation, d'autres jouissent au contraire du privilège d'être maintenus agricoles au moins jusqu'en 2015 dans le SDRIF de 1994, puis par des schémas d'aménagements locaux (schémas directeurs, PLU), dès lors, il devient intéressant d'analyser le fonctionnement de ce types d'espaces réservés pour l'agriculture dans les milieux urbains, ainsi que l'organisation de cette activité en rapport avec sa localisation urbaine.

La zone maraîchère de Cergy illustre un exemple parmi d'autres de ce type d'espaces agricoles urbains, c'est un terrain d'environ 80 ha de superficie localisé sur le périmètre de la commune de Cergy au centre de l'agglomération de Cergy Pontoise (Nord Ouest de l'agglomération parisienne). Le site qui occupe l'une des boucles de l'Oise, apparaît sous forme d'une « banane » avec un côté convexe (Sud) limité par ce cours d'eau et un côté concave (Nord) limité, pour sa majeure partie, par le bois de Cergy.

Par sa localisation géographique particulière, cette zone conjugue plusieurs aspects propres à l'aménagement régional de l'Ile de France ; l'extension de l'agglomération parisienne en « doigts de gants » suivant les fonds de vallées et son impact sur les orientations décidées aux différents schémas directeurs qui se sont succéder en vue de la contenir, l'émergence de la préoccupation environnementale ainsi que l'apparition des nouvelles attentes de la société vis-à-vis de l'agriculture, sont autant d'événements qui ont marqué la zone maraîchère de Cergy.

Le positionnement de cette zone au centre géographique de l'agglomération de Cergy Pontoise échappe à la localisation habituelle d'un quelconque territoire périurbain se situant plutôt aux alentours des espaces urbanisés d'une façon extérieure à un centre d'agglomération le plus souvent bâti. Il s'agit là de la particularité de cet espace périurbain que l'on pourrait qualifier d'urbain par sa situation et qui, comme beaucoup d'espaces ouverts de la ceinture verte, continu d'être géré par une agriculture maraîchère témoin des vestiges d'une ceinture

Echelle : 1/100000 Source : I HESSAS. 2006.

Menucourt Vauréal

Figure 02 : La zone maraîchère de Cergy : un espace agricole urbain.

Cergy

Courdimanche Saint-Ouen-

L 'Aumône

Boisement Eragny-

Jouy- Neuville - Sur- Oise

Le Moutier Sur - Oise

Puiseux - Pontoise

Osny

Pontoise

78 93

92 94

91

Agglomération de Cergy Pontoise

95

77

maraîchère qui jusqu'au milieu du 20ème siècle alimentait encore le marché parisien en divers produits agricoles (Phlipponneau, 1956). En comparaison avec cette agriculture en ceinture maraîchère qui - à son époque - était urbaine puisqu'en échange de l'approvisionnement de Paris, elle recyclait les déchets urbains de cette ville (Donadieu et Fleury, 1997), la localisation urbaine de l'agriculture de la zone maraîchère au sein de l'agglomération de Cergy Pontoise ne lui suffit pas pour devenir pleinement une activité urbaine c'est-à-dire jouir de relations fonctionnelles avec la ville qui l'entoure ; aujourd'hui encore d'autres facteurs freinent l'intégration de cette activité dans les projets urbains de la ville.

La ville nouvelle de Cergy Pontoise dont la création sur des champs agricoles a été marquée par des expulsions d'agriculteurs ayant abouti à leur exclusion du projet urbain de départ, est aujourd'hui amenée à redéfinir la place de l'agriculture sur son territoire pour accéder à un développement cohérent qui associe développement socioéconomique et cadre de vie : l'agriculture pourrait ainsi retrouver sa place en ville à travers sa capacité à jouer d'autres rôles plus bénéfiques pour l'agglomération que celui de son approvisionnement en denrées alimentaires désormais assuré par la grande distribution.

Par ailleurs, rattrapée par son histoire, cette zone illustre la difficulté, voire l'impossibilité, du dialogue ville - agriculture si les agriculteurs eux-mêmes n'ont pas été préalablement associés au projet urbain qui, même lorsqu'il parvient à concrétiser ses objectifs souhaités en terme de population, d'emplois et d'infrastructures, n'obtient que peu ou pas l'adhésion des agriculteurs : quarante ans après, la ville nouvelle demeure ce projet qui leur a été imposé et qui a été mené sans leur consentement ; les agriculteurs continuent de la considérer en inadéquation avec leurs préoccupations, même s'ils ne la voient plus comme une menace pour leur activité.

1. Une position particulière : au centre de la ville nouvelle de Cergy Pontoise.

On ne peut comprendre le fonctionnement de la zone maraîchère si l'on ne tient pas compte de son histoire et des circonstances qui l'ont conduit à son positionnement actuel au centre de l'agglomération de Cergy Pontoise. Comme tous les espaces agricoles de l'agglomération cergypontaine, la zone maraîchère est antérieure à la ville nouvelle. C'est cette création urbaine « de toutes pièces » qui lui a procuré son positionnement particulier « au centre de l'espace urbain de l'agglomération ».

Photo 01 : Le site de la ville nouvelle avant l'urbanisation (non datée).

Limite de la zone maraîchère

Source : vue aérienne réalisée par Alain Perceval N° 3450/ IAURIF N° 4374

Figure 03 : Le centre de la ville nouvelle de Cergy Pontoise en 1999.

Boisement Jouy-Le-Moutier

Courdimanche

Puiseux Pontoise

Vauréal

Cergy

Osny

Neuville- Sur- Oise

Pontoise

Source : IAURIF, 2005.

Entre la ville nouvelle et l'espace agricole de Cergy une histoire douloureuse marquée par l'expropriation et l'expulsion des agriculteurs qui occupaient le site ; de vives tensions ont ainsi longtemps opposé agriculteurs et artisans de cette ville convaincus de la pertinence de leur choix et déterminés à mettre en oeuvre leurs plans au non de l'aménagement de la région parisienne.

C'est en 1965 que la volonté d'étendre l'agglomération parisienne en villes nouvelles a été adoptée et concrétisée par le SDAURP. Dès son arrivée à la tête du district de Paris, Paul Delouvrier avec l'aval du Général De Gaule a précipité la révision du PADOG qui gérait jusqu'alors l'extension de l'agglomération parisienne. Cette révision a été justifiée par l'inadéquation de la restructuration de l'agglomération parisienne autour des « points forts » de sa banlieue (que propose ce schéma) avec la volonté de répondre aux besoins criants en logements et en équipements provoqués par la croissance parisienne : Delouvrier estimait que la limitation foncière du PADOG est trop ardue pour dégager en temps voulu l'espace constructible exigé par la croissance démographique, et que le périmètre d'agglomération imposé céderait sous la pression de celle - ci ; il a donc opté pour une extension urbaine discontinue en « terrains neufs », polarisée par des « villes nouvelles » voisines de l'agglomération, mais séparées de celle - ci.

Pour choisir ces sites, deux contraintes ont orienté l'équipe de Delouvrier : d'une part la surestimation de la croissance démographique de la population régionale lors des projections faites pour l'an 2000 ; et d'autre part, la présence d'axes tangentiels favorables à l'urbanisation de part et d'autre de Paris et qui reprenaient les infrastructures déjà mises en place. La première contrainte, qui a abouti à l'exclusion des vallées jugées trop étroites pour contenir le surplus de la population13, a justifié l'orientation des constructions et des infrastructures vers des endroits les plus loin des vallées à chaque fois que cela est possible,

La décision de placer ces villes sur des terrains vierges de toute urbanisation a suscité, pour l'AFTRP, d'importants achats fonciers dans le but de constituer l'assiette propre à chacune des villes. Ces achats n'ont pas toujours été faciles à mener, ils ont été accompagnés par de nombreuses difficultés dictées le plus souvent par l'état de la propriété foncière, avec une importance relativement variables selon le site concerné ; ainsi, contrairement au foncier de la ville nouvelle d'Evry (appartenant à quatre propriétaires) ou celui des grandes exploitations céréalières de Trappes, la domination de la petite et moyenne exploitation

13 - Paul Delouvrier a confirmé qu'il serait peut être tenté par les vallées si les chiffres qui lui ont été fournis sur l'accroissement démographique de la région parisienne été moins élevés.

maraîchère a rendu les acquisitions plus difficiles à mener sur le site de Cergy Pontoise (Scherrer, 1989).

D'après le témoignage de Bernard Hirsch (alors chargé des études de la ville nouvelle de Cergy Pontoise en 1965), le périmètre retenu englobe un total de 10000 ha dont près de la moitié ont été acquis. Le terrain est extrêmement morcelé et comporte plus de 3000 parcelles avec de petites propriétés tenues par plusieurs centaines de propriétaires. Environs 40 cultivateurs pratiquent des cultures de plein champ sur des exploitations de 15 ha en moyenne avec des systèmes de vente sur les marchés de la banlieue parisienne ; la proximité de Paris est donc un élément important de l'équilibre économique des exploitations : la reconversion des agriculteurs évincés devra se faire à proximité.

En règle générale, les exploitants ne possèdent pas les terres qu'ils cultivent, ils les louent soit à des membres de la famille, soit à d'autres propriétaires. Ceux-ci tirent de très faibles revenus du fermage (quelques quintaux de blé à l'hectare) et les organisations agricoles s'entendent pour éviter toute revalorisation.

L'expropriation qui est une aubaine pour les propriétaires leur permettant de mobiliser leur capital pour l'investir dans des conditions plus avantageuses, est une perturbation parfois catastrophique pour les cultivateurs décidés de continuer leur activité ; pour ces derniers, une reconversion sur d'autres terrains est nécessaire. A cause de l'inclinaison des terrains vers le Nord, les 500 ha acquis et aménagés par la caisse des dépôts au Perchay (15 Km en direction de Rouen) ont été refusés par les agriculteurs (le sol gèle en hiver et les récoltes sont tardives en été), ces derniers ont choisi de rester à Cergy qui bénéficie de situation unique pour les cultures maraîchères (le versant est exposé au Sud, le sol est sableux et ne retient pas l'eau) : le bras de fer avec les responsables de la construction de la ville nouvelle est déclanché.

A plusieurs reprises, les exploitants ont menacé de sortir leurs fusils comme en 1967 lorsqu'ils ont décidé de bloquer le chantier de la préfecture en réclamant 250 ha (la moitié de Cergy). Après plusieurs négociations et arbitrage de la justice, 160 ha ont été sauvegardés pour le reclassement des agriculteurs. L'Etat s'est engagé à débloquer les crédits nécessaires pour financer les travaux d'irrigation, et les agriculteurs ont reçus une indemnité d'éviction de 2,7 francs/m² avec une somme supplémentaire de 400000 francs pour les exploitations de petite taille. En définitive, les quarante familles d'agriculteurs ont partagé plus d'un milliard d'anciens francs comme réparation du préjudice subi dans leurs exploitations sans compter les indemnités beaucoup plus substantielles versées pour le paiement des terrains (Hirsch, 1990)14

14 - Bernard Hirsch fut aussi le premier directeur de l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle, son témoignage est publié par la presse des ponts et chaussées en 1990.

C'est donc avec la création de la ville nouvelle de Cergy Pontoise que l'affectation définitive de la zone maraîchère pour l'agriculture a été officiellement décidée. Au départ, cet espace été réservée pour faire une plaine de jeux aux futurs habitants de la ville nouvelle, les aménageurs l'ont cédé par la suite à l'agriculture car il leur a permis de reclasser 20 exploitants. La zone maraîchère doit ainsi sa survie à la ville nouvelle de Cergy Pontoise qui, en se construisant sur la pleine de Cergy, l'a volontairement contourné. Edifiée en « fer à cheval » autour d'anciennes sablières devenues « les étangs », cette ville s'est ensuite retrouvée contenant un coeur vert sans que cela soit parmi ses objectifs15.

Cette position centrale de la zone maraîchère est particulièrement intéressante puisque elle échappe au traditionnel schéma d'un étalement urbain des villes qui veut que le centre ville soit urbanisé et que la ville s'étende ensuite sur sa campagne avoisinante; alors que ce fut le cas à l'échelle régionale où la ceinture maraîchère décrite par Michel Phlipponneau dans les années 1950 s'efface progressivement devant l'avancée urbaine de la ville de Paris sur sa banlieue d'une façon centrifuge, on constate à l'échelle de la ville nouvelle de Cergy Pontoise (qui est entièrement contenue dans l'agglomération parisienne) un processus inverse de cet expansion urbaine autours de la zone maraîchère de Cergy : l'espace bâti s'est étalé en entourant la zone maraîchère d'une façon centripète ; aujourd'hui encore la partie centrale de l'agglomération cergypontaine demeure non bâti.

Ce positionnement d'espace agricole en « coeur vert » entouré d'espaces bâtis n'est cependant pas propre à la zone maraîchère dans la ville nouvelle de Cergy Pontoise, à une échelle d'observation plus importante, la Randstad (Pays-Bas) présente une organisation spatiale similaire. Il s'agit néanmoins d'un projet planifié à l'échelle de la région qui reprend le concept de la ceinture verte francilienne avec une forme inversée (IAURIF, 1995).

Afin de maintenir sa vocation agricole, la zone maraîchère a suscité des aménagements particuliers. Les terrains ont été relevés avec l'installation d'un réseau de drainage sur 7 ha, une mise en place d'un réseau d'irrigation ce qui a permis une restructuration parcellaire.

Pour les travaux hydrauliques, dont le coût s'est élevé à 800000 F, les agriculteurs ont bénéficié d'une subvention du ministère de l'agriculture de plus de 50%.

Par ailleurs, les propriétaires fonciers se sont associés afin de gérer les aménagements de la zone agricole. Ils ont assuré plusieurs actions :


· Création des voieries dont l'entretien est à la charge de la commune,

15 - Deux propositions ont été avancées lors de la création de la ville nouvelle de Cergy Pontoise, la première en forme plus linéaire étirée vers le nord en pénétrant dans le Vexin, et la deuxième en forme moins linéaire que les aménageurs de l'époque appelaient en fer à cheval et qui est finalement retenue.

· Maîtrise d'oeuvre du réseau d'irrigation,

· Participation à la mise en place des clôtures du côté du bois de Cergy.

Le financement leur provient de plusieurs sources : Indemnités d'expropriation pour les terrains agricoles, indemnités de la SNCF pour son emprise (ligne du RER), subventions du ministère de l'agriculture (pour le réseau d'irrigation). Pour le reste, les propriétaires ont souscrit des emprunts, dont les remboursements rentrent dans les charges fixes de l'exploitation.

Entre 1975 et 1980, la SAFER a intervenu pour acquérir et aménager un lotissement agricole de 7,5 ha partagé en 12 lots de 5000 à 7000 m² sur lesquels 5 jeunes agriculteurs se sont installés16. Occupé à l'origine par la vigne, le secteur en question a accueilli par la suite plusieurs carrières de sable. Quand elles se sont arrêtées, elles ont laissé beaucoup de trous qui servaient souvent de décharges provoquant des nuisances aux agriculteurs voisins. Ces derniers ont demandé à la SAFER d'acquérir et d'aménager cet espace pour l'agriculture.

Les travaux effectués qui ont permis de viabiliser ce secteur dégradé par les exploitations de carrières, ont consisté en un déboisement, un nivellement avec apport de terre pour l'implantation des serres froides, un équipement en eau et électricité et la pose de clôtures à cause de la proximité du bois de Cergy (IAURIF, 1992)

2. Un espace sous fortes convoitises urbaines :

Urbaine par sa localisation, la zone maraîchère semble aussi devenir urbaine de point de vue de son fonctionnement. En effet, les divers usages et utilisations urbaines suscités par sa localisation géographique particulière, ont permis à cet espace de jouer pleinement le rôle d'un quelconque territoire urbain, puisqu'ils témoignent de la mise en place de divers liens fonctionnels avec l'agglomération de Cergy Pontoise.

Ces usages sont parfois en compétition, voire en complète contradiction entre eux mais aussi vis-à-vis de sa destiné de base qui demeure la production agricole. Ainsi, pour chaque groupe d'utilisateurs, ce site semble évoquer une fonction particulière qui répond à ses besoins; si on se permet, malgré tout, de garder l'appellation de « zone maraîchère » pour désigner ce territoire, il serait judicieux de parler de « zone(s) maraîchère(s)» dès lors que ce même espace est perçu suivant une multitude de considérations.

16 - Le lotissement reste le seul endroit dans la zone agricole où il est possible de construire, les bâtiments de France exigent toutefois des réglementations quant à la qualité architecturale des habitations et des hangars.

2.1. La zone maraîchère : un espace ouvert :

Dans un contexte de mise en concurrence, d'emblée sans merci, imposée par la mondialisation, la compétition entre les villes se joue désormais aussi sur leur capacité à procurer aux habitants et aux entreprises un meilleur cadre de vie, lequel demeure pour une grande partie dépendant de la présence du « non bâti » à proximité voire à l'intérieur des tissus urbains : les espaces ouverts deviennent une composante stratégique de l'attractivité de plusieurs villes régionales, notamment par les fonctions qu'ils peuvent assurer en constituant des espaces pour le développement de certaines activités « récréo - touristiques » disait Christopher R. Bryant à propos de la place des espaces ruraux périurbains et de l'environnement dans le développement régional (Christopher R. Bryant, 2005). Plus que jamais, ces espaces, qui ne doivent plus être considérés comme des réserves foncières mais en tant que parties non construites des villes (Guy Poirier, 2001), font partie intégrante des espaces urbains, les distinguant selon la place relative qu'ils occupent en leur sein.

A Cergy Pontoise, l'important rôle paysager que joue la zone maraîchère dans la constitution d'une continuité entre le bois de Cergy et la base de loisir des étangs, qui permet à l'agglomération de garder un « coeur vert », semble peu reconnu car il est moins mis en avant.

Ainsi sur la carte officielle de la ville, notamment celle éditée par la communauté d'agglomération en Janvier 2006, les espaces agricoles, dont fait partie la zone maraîchère, sont colorés en jaune clair sans aucune explication en légende dans laquelle tous les autres espaces constitutifs de l'agglomération sont repris d'une façon assez exhaustive. En revanche, les chemins d'exploitations encadrants ces espaces agricoles, trouvent toute leur place sur cette carte et dans sa légende avec le qualificatif de « chemins ruraux ». Si l'on considère cette désignation, on comprend que les espaces agricoles continuent, implicitement, d'être considérés comme étant « ruraux » malgré leur positionnement en milieu urbain.

La zone maraîchère n'apparaît donc nullement en légende de ce plan officiellement adopté pour Cergy Pontoise17, plus encore, elle se voit amputer de sa partie Ouest physiquement séparée d'elle par le boulevard de l'Hautil ; cette partie est représentée en vert clair(interprété en légende comme « espaces verts, parcs, jardins, parcs urbains ») se distinguant ainsi nettement du reste de l'espace agricole de l'agglomération (représenté en jaune clair sans aucun renvoi en légende). L'attribution d'une destiné non agricole à cette

17 - Il est d'ailleurs affiché au rez-de-chaussée de l'immeuble abritant le SAN, et présenté gratuitement aux visiteurs de celui-ci.

partie de la zone maraîchère classée « partiellement urbanisable » par le SDRIF de 1994, témoigne de la vision que les autorités de l'agglomération se font de l'espace agricole : les instigateurs du SDRIF qui ont délibérément classé certains espaces comme partiellement urbanisables, ont laissé aux élus locaux une marge de manoeuvre dans le choix des espaces à urbaniser leur permettant ainsi d'affirmer leur volonté politique en terme de préservation de l'agriculture (IAURIF, 2005).

Les espaces ouverts qu'inventorie ce plan de l'agglomération cergypontaine se scindent en deux groupes : le premier représenté en vert foncé (repris dans la légende par le qualificatif « d'espaces boisés ») se distingue d'une seconde entité composée d'une multitude d'espaces à nomenclature assez variée mais regroupés en une seule catégorie représentée en vert clair et reprise dans la légende sous l'appellation « d'espaces verts, parcs, jardins et parcs urbains ».

L'analyse de ce plan est d'une importance considérable lorsqu'on s'intéresse à la recomposition des rapports ville - agriculture en milieu urbain. Etant à la fois officiel, disponible, bien diffusé et offert gratuitement, ce plan cumule plusieurs avantages lui procurant l'accessibilité requise pour qu'il touche de près le public plus que les autres documents d'aménagement (POS ou PLU, schéma directeur...) qui demeurent généralement plus réservés18. Les informations qu'il véhicule bénéficient ainsi des conditions idéales pour se répandre efficacement parmi les citadins qui le prennent comme référence puisqu'il émane des autorités officielles de l'agglomération : conséquences, ce public, déjà fortement citadin par son mode de vie (notamment les jeunes), et pour qui ce plan occulte la présence d'espaces agricoles sur l'agglomération cergypontaine, ne peut guère constater l'existence d'une activité agricole au sein de la ville ; ce plan ne contribue donc pas à rétrécir le fossé séparant l'agriculture des citadins, bien au contraire, il ne peut que concourir à son élargissement.

En se référant à ce plan, tout laisse croire que l'espace agricole est considéré comme « réserve foncière » en attente d'urbanisation rappelant ainsi la position qu'ont eu longtemps les documents d'aménagement de la région parisienne à l'égard de ce type d'espace à l'échelle régionale.

L'une des raisons principales qui ont fait de l'espace agricole un espace secondaire, voire inintéressant, pour l'agglomération peut provenir d'une surestimation de la présence d'un meilleur cadre de vie défini par l'existence de nombreux espaces verts et parcs urbains sur son territoire : l'agglomération de Cergy Pontoise considère qu'elle a déjà donné pour le

18 - Ces documents sont payants au moment où ce plan est proposé gratuitement au niveau de toutes les mairies de l'agglomération.

cadre de vie et les espaces ouverts et verts, puisqu'elle estime que son image « d'agglomération verte » est suffisamment manifestée même au-delà de son propre périmètre, notamment à travers son engagement comme « ville porte » du Parc Naturel Régional du Vexin créé justement pour la contrecarrer et pour éviter son extension sur les plateaux du Vexin français en 1995 (Da Lage, 1996). Elle aurait donc tendance à ne plus juger utile de fournir des efforts supplémentaires qui auraient pour but de sauvegarder et de mettre en avant l'espace agricole qu'elle possède.

Par ailleurs, le besoin en espace ouvert et vert au sein même de cette agglomération ne se fait pas ressentir au point où la majeure partie de ses citoyens la considère comme ville verte (88% des habitants) (CA Cergy Pontoise, 2005); on peut donc comprendre que les espaces agricoles n'apportent pas de satisfaction particulière aux habitants de l'agglomération ni à leurs élus puisqu'ils se trouvent déjà satisfaits en espaces verts existants qui couvrent plus de 2000 ha (soit 1/4 de sa surface totale) : il y'a là une véritable concurrence qui oppose espaces verts et espaces agricoles et qui se joue désormais sur l'attraction d'opinions favorables à leur maintien, cette situation confirme le « principe paysagiste » évoqué par Pierre Donadieu et André Fleury qui est susceptible, dans certains cas, d'éliminer l'agriculture de l'espace urbain quitte à en reproduire certaines formes pittoresques ou symboliques dans les parcs ou les cités (Donadieu et Fleury, 1997). Face à une multitude de choix possibles, il n'est donc pas évident que l'agriculture soit l'alternative au bâti dans les milieux urbains et périurbains : jardins, espaces verts, forêts...., sont autant de concurrents potentiels pour l'agriculture dans ces espaces. A partir de là, on peut conclure que le statut de l'espace agricole dans l'agglomération cergypontaine est largement tributaire de la capacité de l'agriculture à montrer elle-même son utilité pour justifier son maintien en milieu urbain.

Au centre de l'agglomération, la commune de Cergy considère davantage son espace agricole dans ses documents officiels ; ainsi le manuel « Cergy pratique 2005 » édité par la ville de Cergy dont l'objectif est de présenter la ville d'une façon exhaustive et facilement compréhensible aux citoyens, rappelle que sur ses 1460 ha de surface totale, la ville de Cergy comporte 535 ha d'espaces ouverts (soit près de 37% de son territoire) parmi lesquels les surfaces agricoles sont comptabilisées pour les 160 ha qu'elles couvrent (Ville de Cergy, 2005). Les réflexions exposées par ce document qui sont accessibles à un large public puisqu'il est gratuitement distribué dans les points d'informations (CIDJ, accueil, hall de mairie...), illustrent bien l'image que se fait la ville de Cergy de son espace agricole et implicitement la volonté de diffuser cette image au sein de ces habitants afin qu'ils l'adoptent à leur tour.

Graphe 03 : La part de l'agriculture dans l'espace ouvert à Cergy.

Espaces verts urbains 25%

Coteaux verts
bordants
l'Oise 9%

Base de loisirs 28%

l'espace ouvert total à Cergy = 535 ha

Surfaces boisées 9%

Surfaces
agricoles 28%

Source des données : La ville de Cergy (2005)

A partir de l'analyse de ces documents, on arrive facilement à comprendre la tournure que prend la recomposition des rapports ville - agriculture à deux échelles territoriales et administratives différentes qui sont l'agglomération cergypontaine et la commune de Cergy. Au moment où l'espace agricole cergypontain demeure peu montré par les instances de l'agglomération à ses habitants, la ville de Cergy exprime une véritable intégration de son espace agricole dans ses espaces ouverts tout en continuant de le qualifier d'agricole : moins reconnue à l'échelle de l'agglomération cergypontaine, la zone maraîchère trouve une considération particulière au sein de la ville de Cergy où elle est perçue avant tout comme un espace ouvert au même titre que le reste des espaces verts et boisés que la commune comporte sur son territoire. Cette considération illustre l'une des principales possibilités d'intégration de l'agriculture dans les milieux urbains, en l'occurrence sa capacité à gérer et à entretenir des espaces ouverts à moindres coûts pour la municipalité.

2.2. La zone maraîchère : un espace de sport et de loisirs :

La zone maraîchère est traversée par un réseau de routes et de chemins d'exploitation goudronnés, larges de quatre mètres en moyenne qui forment en continuité avec les chemins de randonnés aménagés dans le bois de Cergy, un réseau de pistes plus important dans lequel

la tranquillité des lieux appelle à venir en profiter pour y pratiquer du sport de plein air (jogging, marche, vélo...), les « sportifs » attirés par le calme de l'endroit ne se contentent pas d'utiliser les principaux chemins qui encadrent les exploitations agricoles; ils n'hésitent pas à emprunter les chemins secondaires qui traversent les parcelles cultivées.

Ces routes et chemins d'exploitation sont essentiels pour le fonctionnement de la zone maraîchère car au delà du fait qu'ils sont les seuls axes permettant la circulation des engins agricoles, ils jouent également un rôle important lors des labours. En effet et par souci d'utiliser entièrement les surfaces de leurs parcelles, les agriculteurs labourent celles-ci jusqu'aux abords de ces chemins (sans laisser de bandes de séparation non labourées), techniquement et afin d'y parvenir, notamment lorsque le sens du labour est perpendiculaire aux chemins d'exploitation, c'est sur ces derniers que les agriculteurs effectuent les virages nécessaires pour labourer dans le sens inverse ; ces chemins acquirent ainsi un rôle fonctionnel les intégrant parfaitement aux exploitations durant la période du labour. La coïncidence des labours de printemps avec de belles journées ensoleillées, idéales pour les promenades et les sports de plein air, suscite de forts usages de ces chemins ; ils se trouvent sollicités à la fois par les agriculteurs et par les sportifs et les promeneurs créant ainsi des conditions de conflits d'usage accrus au cours de cette période.

Bien que ces sportifs et promeneurs sont de plus en plus nombreux à fréquenter la zone maraîchère (surtout pendent les journées ensoleillées), leur présence ne semble pas pour autant gêner les agriculteurs dans leur travail ; « on a aucun problème avec eux, au contraire, lorsqu 'ils viennent avec leurs enfants, ça nous fait plaisir car ils leur font découvrir notre travail » estime un agriculteur. Loin de causer une gêne à l'activité agricole, ces visiteurs constituent donc un maillon important dans la communication et le rétablissement des rapports entre agriculteurs et citadins en zone maraîchère. Il faut évidement tenir compte du fait que par leur dimension, leur localisation et les cultures qu'elles accueillent, les parcelles agricoles de cette zone n'offrent pas de conditions propices à la pratique de rodéo en plein champs (comme ce fut le cas pour certaines exploitations céréalières situées en périphéries urbaines dans des endroits moins surveillés) ; à l'inverse de leurs homologues de la zone maraîchère, quelques exploitants que j 'ai rencontrés dans le Vexin français, souffrent de véritables problèmes et dégradations que leur causent ces sports mécaniques.

2.3. La zone maraîchère : un espace de liaisons :

Au centre de la ville nouvelle, la zone maraîchère a hérité d'une localisation de carrefour. Délimitée par l'Oise (au Sud), le bois de Cergy (au Nord) qui donne sur un habitat collectif (quartier des Touleuses et des châteaux brûloirs au Nord, quartier des Maradas au Nord - est), et un habitat pavillonnaire (au Nord - ouest) assurant une transition vers la base de loisirs des étangs (à l'Ouest). Le site est traversé par deux voies de communications : la ligne A du Réseau Express Régional (RER) qui traverse aussi l'Oise et qui reste aérienne vers la partie Est de la zone maraîchère, une voie rapide à double sens (boulevard de l'Hautil) qui traverse l'Oise par un pont surélevé (d'une quinzaine de mètres environs) isolant ainsi la zone maraîchère de sa partie Ouest. A ces deux principales voies, s'ajoute une voie navigable que constitue l'Oise riche d'un important port (port de Cergy) et de nombreux clubs nautiques agrippés sur ses bords. Enfin, la totalité de la zone maraîchère est encadrée par un réseau de voies et de chemins d'exploitation fortement utilisé par de nombreux usagers (sportifs, promeneurs, services municipaux...) mais aussi par les simples habitants des périphéries de la zone maraîchère.

Loin d'être un espace isolé, le territoire de la zone maraîchère joue un rôle non négligeable dans la desserte de l'agglomération (notamment par le transport de marchandises à travers l'Oise) sans oublier la desserte totale des habitations installées sur les bords de l'Oise pour lesquelles la traversée de la zone maraîchère est toutefois incontournable pour rejoindre les autres quartiers de l'agglomération.

En plus de toutes ces liaisons qui permettent la circulation d'individus et des marchandises, la zone maraîchère permet aussi un autre type de desserte particulièrement lié à la présence d'habitations sur son territoire : elle est traversée par de nombreuses lignes électriques et téléphoniques qui rattachent ces habitations aux réseaux urbains.

Les supports de ces lignes qui sont des poteaux en bois ou en ciment, présentent des emprises au sol qui ne sont pas négligeables notamment autours des poteaux électriques. Bien qu'ils bordent majoritairement les pistes et les chemins d'exploitation, certains sont installés par endroits au milieu même des parcelles cultivées. Dans ces cas, ils sont susceptibles de constituer une gêne permanente aux agriculteurs qui doivent les éviter lors des labours en cédant un espace non exploité (près de 12 m²) autour de chaque poteau. Tandis que l'espace est justement une denrée rare en zone maraîchère, ces pylônes font perdre aux exploitants plusieurs mètres carrés de leurs champs qu'ils ne peuvent plus cultiver, sans oublier la perte de temps que provoque le détour de ces poteaux lors des différents travaux aux champs.

Photo 02 : L'emprise au sol des poteaux électriques sur les parcelles cultivées.

Bois de Cergy Voie du RER A

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

2.4. La zone maraîchère : un espace habité :

En dehors des maisons construites sur le lotissement aménagé par la SAFER (appartenant à des agriculteurs), la zone maraîchère abrite aussi un certain nombre de constructions pavillonnaires qui jouxtent les exploitations agricoles en longeant la première boucle de l'Oise. Ces habitations qui sont, pour certaines d'entres elles, à quatre mètres des parcelles cultivées, sont séparées de celles - ci par les routes d'exploitation. Elles sont plus concentrées vers la partie Ouest de la zone maraîchère où elles forment un demi cercle Nord Sud délimitant celle - ci.

Par leur connexions aux différents réseaux urbains (réseau d'égouts, d'eau, d'électricité et de téléphone), elles ont suscité davantage de servitudes pour la zone maraîchère (emprise au sol des lignes électriques et téléphoniques), ainsi que des utilisations liées au fonctionnement de la vie quotidienne de leurs habitants (passages de facteurs, collectes d'ordures ménagères...).

Photo 03 : La zone maraîchère de Cergy, un espace habité.

Boulevard de l'Hautil

Bois de Cergy

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

En zone maraîchère la rareté de l'espace constructible a imposé une disposition spatiale particulière à ces habitations. Ces dernières respectent en effet un alignement bien droit suivant le tracé de la route qui les sépare des parcelles cultivées tout en occupant au maximum l'espace contenu entre cette route et l'Oise ; au moment où la partie Nord de la zone maraîchère (la plus proche des constructions de la ville nouvelle) reste épargnée par les constructions, c'est par les bords de l'Oise que le bâti s'introduit et s'installe au voisinage des espaces cultivés de la zone.

L'espace bâti en zone maraîchère n'est cependant pas exclusivement occupé que par ces habitations, la surélévation de la ligne du RER et le boulevard de l'Hautil a suscité des constructions en béton (murs, ponts) qui cernent totalement la zone comme pour rappeler l'omniprésence de la ville dans ce coint de tranquillité.

Les habitants de la zone maraîchère entretiennent des relations de bon voisinage avec l'agriculture : par leur proximité, ils jouissent du privilège de s'approvisionner directement en légumes frais chez les agriculteurs pour lesquels ils constituent l'essentiel de la clientèle concernant la vente à la ferme.

2.5. La zone maraîchère : un lieu de décharges sauvages :

La localisation originale de la zone maraîchère, à la fois à l'écart mais pas trop éloignée des quartiers urbains de l'agglomération, a engendré des conditions favorables au développement de dépôts sauvages de déchets. Ces nombreuses « poubelles » à ciel ouvert trouvent refuge dans les bords de l'Oise avec des proportions plus ou moins faibles selon que l'endroit soit plus ou moins entretenu par son propriétaire : c'est d'ailleurs sur les terrains non clôturés que divers emballages (cannettes, bouteilles, bacs...), déchets électroménagers et autres, sont déposés.

Photo 04 : Décharge sauvage en zone maraîchère de Cergy.

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Si les bords de l'Oise les plus visibles et les plus proches des espaces cultivés accueillent plutôt des déchets liés plus à la fréquentation du site par des passants occasionnels, l'espace laissé entre la voie du RER et l'Oise qui est moins visible à partir de la zone maraîchère, est plutôt un endroit prisé pour déposer des déchets plus importants et de nature différentes (pneus, gros appareils électroménagers). Même si les bords de l'Oise demeurent de loin les plus touchées par ces décharges, notamment celles directement liées au voisinage urbain, d'autres endroits de la zone maraîchère ne sont pas complètement épargnés ; l'espace en pente généré par la surélévation du boulevard de l'Hautil connaît à son tour, mais d'une

Echelle : 1/10000

Neuville- 02

Sur - Oise Eragny-

Sur- Oise

Figure 04 : La zone maraîchère de Cergy : un espace fortement convoité.

03

06

04

Cergy Pontoise

(N° des photos obtenues)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

07

façon moindre, l'accumulation de déchets plus résiduels (sacs plastiques, cannettes et bouteilles de soda...) liés cette fois - ci à la fréquentation de ce boulevard.

Troisième partie :

L'agriculture de la zone maraîchère : une activité faiblement intégrée dans
l'agglomération de Cergy pontoise.

1. Présentation de l'agriculture de la zone maraîchère de Cergy :

Parmi toutes les utilisations de la zone maraîchère, l'activité agricole demeure de loin la plus imposante. Sur la totalité de son espace, 13 exploitations agricoles pratiquent essentiellement des cultures maraîchères avec une forte présence de la plasticulture (plus de 2,5 ha de serres), le matériel agricole est géré en CUMA et l'approvisionnement en semences et divers intrants s'effectue via la coopérative agricole de Cergy.

Le mode de faire valoir pratiqué est mixte (fermage - directe) avec la prédominance du fermage compte tenu de l'état du foncier : celui - ci est très morcelé à cause du morcellement de la propriété. Ainsi 102 personnes physiques ou morales (car l'agglomération et la commune de Cergy sont aussi propriétaires de certaines parcelles) se partagent une surface d'environs 824607 m² divisée en 111 parcelles formant 63 propriétés. Ce sont de petites propriétés appartenant le plus souvent à plusieurs propriétaires : 41 d'entres elles ont moins d'un hectare (dont 19 avec moins d'un demi hectare), elles occupent une surface totale de 20,8 hectares répartie sur 48 parcelles qui appartiennent à 67 propriétaires. 10 propriétés ont des surfaces comprises entre un et deux hectares, elles représentent une surface totale de 15 hectares répartie sur 22 parcelles appartenant à 19 propriétaires. 7 propriétés ont des surfaces entre 2 et 5 hectares, elles occupent une surface totale de 24 hectares répartie sur 28 parcelles appartenant à 12 propriétaires. Enfin, 3 propriétés ont entre 6 et 9 hectares. Elles occupent une surface totale de 22,4 hectares répartie sur 12 parcelles appartenant à 4 propriétaires.

Selon le nombre de personnes par propriété, on peut distinguer cinq catégories de propriétés foncières en zone maraîchère :

Une première catégorie avec une surface totale de 372312 m² (soit 45% de la surface exploitable de la zone maraîchère) représente 29 propriétés foncières. Elle regroupe les propriétés appartenant chacune à une seule personne et concerne 29 propriétaires. La seconde est la plus importante en terme d'étendue spatiale puisqu'elle couvre une surface totale de 402387 m² (soit 49% de la surface exploitable de la zone maraîchère) et représente 27 propriétés foncières. Elle regroupe les propriétés appartenant à deux personnes chacune et concerne 54 propriétaires.

Ces deux premières catégories qui peuvent être rassemblées en un seul groupe concentrent 94% de la surface cultivable de la zone maraîchère. Un second groupe qui concerne les 6% restants rassemble les trois dernières catégories de propriétés foncières : les propriétés appartenant à trois, à quatre et à cinq personnes qui s'étendent respectivement sur 231 67m², 1 9842m² et 683 9m² (soit 3%, 2% et 1% de la surface cultivable de la zone maraîchère).

Tableau 04 : L'état du foncier agricole en zone maraîchère de Cergy (Juin 2006).

Propriétaires par propriété (nombre)

1

2

3

4

5

Propriétés (nombre)

29

27

2

2

1

Propriétaires (nombre)

29

54

6

8

5

Parcelles (nombre)

48

56

3

2

1

Propriétaires par parcelle (nombre)

0,60

0,96

2

4

5

Surface totale (m²)

372312

402387

23167

19842

6899

Surface par parcelle (m²)

7756,5

7 185,48

7722,33

9921

6899

Surface par propriétaire (m²)

12838,34

7451,61

3861,16

2480,25

1379,8

 

Source : Données cadastrales de la commune de Cergy, 2006.

La rareté de l'espace en zone maraîchère a contraint certains exploitants à rechercher d'autres emplacements plus loin pour agrandir leur SAU.

Selon que les agriculteurs cultivent ou non des parcelles en dehors de la zone maraîchère, l'organisation de leurs exploitations ainsi que leurs stratégies semblent se présentées différemment ; dès lors un critère de typologie des exploitations selon la localisation de leurs parcelles permet de distinguer deux types d'exploitations :

Le premier type « type A » regroupe les exploitations dont la totalité des parcelles cultivées est exclusivement localisée en zone maraîchère. Ce sont des exploitations de surface moyenne de 8 ha avec des parcelles qui sont soit regroupées en un seul endroit ou réparties sur plusieurs endroits de la zone. Dans ce type qui concerne près de 60% des exploitations de la zone maraîchère, les stratégies mises en oeuvre par les exploitants consistent en l'élargissement maximal de la gamme des productions à proposer aux clients. Sur ces exploitations, les parcelles de cultures sont très nombreuses mais de faible surface car l'enjeu est de cultiver pour une même période le maximum d'espèces légumières. Le mode de commercialisation utilisé est la vente sur les marchés forains, la vente à la ferme qui exige des coûts supplémentaires (mise en place d'installations pour l'accueil des clients, publicité...) ainsi que la vente à Rungis, ne sont pas pratiquées puisque les investissements sont réduits à

leur minimum et les volumes traités sont très faibles. Ces exploitations sont gérées par une seule personne (l'agriculteur) qui peut dans certains cas déléguer la gestion de la production à un agriculteur chef. Sur ces exploitations, le nombre d'ouvriers à l'hectare est le plus important avec une main d'oeuvre agricole le plus souvent salariée permanente.

Tableau 05 : La main d'oeuvre salariée sur une exploitation de 9 ha « type A ».

5

Type de contrat

Salariés

Nombre

Temps complet

Ouvriers maraîchers

2

 

1

 

1

Temps partiel

Vendeuses

1

Salariés (Total)

 
 

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Sur ce type d'exploitations qui sont exclusivement maraîchères, plusieurs espèces légumières coexistent durant la même période avec une rotation pratiquée à trois échelles différentes : Ces exploitations sont souvent divisées en quatre blocs de parcelles (B1, B2, B3, B4) dont seulement trois blocs participent à la rotation annuelle (B1, B2, B3), le quatrième bloc (B4) consacré à la plasticulture reste en dehors de celle-ci. La première année, le bloc (B3) est laissé au repos et les deux blocs (B1et B2) sont cultivés. L'année suivante, le bloc (B3) est mis en culture par les espèces cultivées sur le bloc (B1) qui accueil à son tour les cultures portées l'année précédente par le bloc (B2) alors que celui-ci est mis au repos durant la seconde année. C'est ainsi que chaque année, un des trois blocs est laissé au repos. Cette rotation qui s'effectue à l'échelle des blocs de parcelles n'est pas la seule sur les exploitations, des rotations sont aussi pratiquées à l'échelle des parcelles cultivées au sein de chaque bloc ; par ailleurs, deux types de rotations s'effectuent à deux échelles différentes sur le quatrième bloc (B4), la première qui se déroule entre les serres permet de ne pas cultiver successivement la même culture dans la même serre, tandis que la seconde qui s'effectue à l'intérieur de la serre permet de ne pas succéder la même culture sur la même parcelle.

Ces différentes rotations jouent un rôle capital dans l'entretien de la productivité des exploitations en zone maraîchère car elles permettent d'utiliser au maximum la surface de l'exploitation tout en protégeant la fertilité du sol avec des économies en fertilisants et en traitements.

Figure 05 : Les rotations sur une exploitation agricole de type A.

CON

AUB

B1

LAI OIG

AIL

CHO

HAR

TOM

B4

COU

HER

B2

Bloc de parcelles

RAD

HER

CAR

Parcelle au repos
Nouvellement

Labourée

B3

Entrée

Serre Clôture

Chemins d'exploitation :

Primaires

Secondaires Tertiaires

Les cultures :

Quatre niveaux de rotation :

AIL : ail

AUB : aubergine CAR : carotte CHO : chou

CON : concombre COU : courgette HAR : haricot HER : herbes LAI : laitue OIG : oignon RAD : radis TOM : tomate

Premier niveau (blocs de parcelles) Deuxième niveau (parcelles de culture) Troisième niveau (entre les serres) Quatrième niveau (dans la serre)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Un deuxième type d'exploitations « type B » regroupe les exploitations ayant l'essentiel de leur surface en dehors de la zone maraîchère ; les parcelles cultivées se répartissent sur plusieurs communes différentes et les limites d'exploitations dépassent ainsi largement les limites administratives communales voire départementales. 40% des exploitations de la zone maraîchère sont concernées par cette définition, elles ont des surfaces plus importantes (45ha, 80ha...) dont seulement 8 ha en moyenne sont localisés sur la zone maraîchère avec la même organisation que celle des exploitations de type A.

Sur ces exploitations, la gestion n'est pas assurée par un seul agriculteur, la responsabilité est partagée soit avec un associé dans le cadre d'une forme sociétaire (par exemple en GAEC), soit avec la conjointe. A l'inverse des exploitations du type A, celles appartenant à ce groupe ne sont pas exclusivement maraîchères ; elles consacrent une grande partie de leur SAU aux grandes cultures et à l'arboriculture pour certaines d'entres elles. Néanmoins, leurs parcelles cultivées en zone maraîchère restent entièrement réservées au maraîchage.

Les stratégies mises en oeuvre par les exploitants ont pour objectif de fournir des produits de grande qualité (en bio par exemple) et en quantité suffisante pour la vente directe (sur les marchés forains et à la ferme) mais aussi pour le marché de gros à Rungis. Les moyens engagés sont plus importants (serres chauffées, cultures hors sol, publicité). Ces exploitations sont celles qui souffrent le plus de leur position périurbaine ; si les exploitants du type A estiment que la ville nouvelle ne leur procure ni des avantages ni des inconvénients, ceux appartenant à ce groupe n'évoquent que des points négatifs du voisinage urbain (vols, dégradations...). L'éparpillement de leurs exploitations sur plusieurs communes éloignées leur pose également des problèmes de circulation et de gestion de leur travail (temps de déplacement important entre les différentes parties de leurs exploitations).

Tableau 06 : Comparaison entre deux exemples d'exploitations (type A et type B).

Critères

Exploitations

 

Type B

Localisation des parcelles : communes (département)

Cergy (95)

Cergy (95), Osny (95),
Menucourt (95),
Andrésy (78)

Cultures
Surface
(ha)

Légumes

9

20

 

0

54

 

0

1

SAU totale (ha)

9

75

Nombre d'UTH

4,5

5

Nombre d'exploitants sur l'exploitation

1

2

Systèmes de vente

Marchés forains

Marchés forains, Rungis,
vente à la ferme

Stratégie de production mise en oeuvre

Gamme plus large +
Quantités faibles

Qualité élevée + Quantités
importantes

 

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Le passage d'une exploitation de type A vers un type B se fait par l'agrandissement de SAU qui nécessite en plus de la capacité économique à réaliser des investissements supplémentaires, une présence d'une ou de plusieurs autres personnes afin de partager le surplus de travail que suscite ce type d'exploitation. Le partage de la gestion de l'exploitation semble ainsi un facteur déterminant l'accession d'une exploitation vers un type B ou au contraire son reclassement en type A qui sous entend l'abondant d'une partie de sa SAU : Il est beaucoup plus difficile à un exploitant de gérer seul une exploitation de type B. Pour ce type d'exploitation, le rôle de la conjointe est déterminant ; ainsi, l'incapacité de travailler de la conjointe d'un agriculteur de type B, a contraint celui-ci à abandonner ses parcelles localisées en dehors de la zone maraîchère, puis à céder toute son exploitation agricole en anticipant son départ à la retraite. En janvier 2006, ses parcelles situées en zone maraîchère ont été reprises par un autre exploitant qui les gère en type A, l'agriculteur en question a été réintégré dans la nouvelle exploitation en tant que salarié.

L'intervention des conjointes peut être d'une façon complète pour certaines exploitations de type B : c'est le cas d'une exploitation spécialisée en bio où la femme, étant associée à son époux, effectue toutes sortes d'opérations que suscite leur mode de production (binage, désherbage manuel, récolte...) et de gestion de l'exploitation (comptabilité, calendrier

cultural, orientation des ouvriers maraîchers...) mais aussi de commercialisation puisqu'elle assure deux marchés par semaine avec l'aide de son fils.

Sur d'autres exploitations, les femmes n'effectuent pas directement des travaux aux champs, elles interviennent dans la vente notamment sur les marchés et à la ferme et/ou par des rôles de « secrétaires » pour leurs époux (comptabilité, remplissage de formulaires et déclarations...). Enfin, pour certaines exploitations, la participation de la femme à l'activité agricole est inexistante ; ce sont des cas particuliers où la conjointe est dans l'incapacité de participer à l'activité agricole suite à une maladie ou à son âge avancé.

La main d'oeuvre féminine n'est pas représentée par les seules épouses des exploitants en zone maraîchère, les filles de certains d'entres eux participent également d'une façon très active au fonctionnement des exploitations (travail administratifs, marchés...). Par ailleurs, un exploitant a engagé une vendeuse spécialement pour les marchés.

Le recours à la main d'oeuvre salariée est toutefois inévitable dans le cas des cultures maraîchères exigeantes en travail manuel, surtout lorsqu'il s'agit de faibles surfaces où la rentabilité économique ne justifie pas une moto mécanisation compte tenu des faibles volumes traités.

Dans les milieux périurbains ou urbains, la rareté d'une main d'oeuvre agricole qualifiée est un véritable handicap pour l'agriculture. A l'unanimité, tous les exploitants agricoles que j'ai rencontrés m'ont fait comprendre qu'il devient de plus en plus difficile pour eux de recruter car les citadins voient en l'agriculture un travail difficile et peu rémunérateur. Dans ces circonstances, la prolongation des heures de travail pour les ouvriers est très fréquente ; comme leurs patrons chefs d'exploitation, ces ouvriers ont souvent des journées longues avec des heurs supplémentaires qui ne sont pas touj ours bien rémunérées.

L'ampleur de cette rareté de main d'oeuvre agricole en nombre et en qualification constitue un sérieux problème pour les exploitants car non seulement ils sont obligés de fournir plus d'heures de travail sur leurs exploitations, mais aussi de consacrer plus de temps à l'orientation de leurs ouvriers qui ne sont pas souvent qualifiés pour le travail agricole. En zone maraîchère, les conséquences sont très perceptibles ; à défaut d'une main d'oeuvre abondante et qualifiée pour le travail agricole, les exploitants recrutent sans avoir le choix de sélectionner les candidats. Aujourd'hui, tous les ouvriers agricoles engagés sur les exploitations sont d'origine étrangère (essentiellement des maghrébins), habitant soit l'agglomération de Cergy Pontoise, soit la proche banlieue parisienne. En plus de leur faible qualification, des difficultés de communication exploitant - ouvriers (liées notamment à leur faible compréhension de la langue française) ne facilité pas le travail des exploitants.

Sur certaines exploitations, il existe une véritable distinction des postes de travail : deux ouvriers assurent les travaux relatifs à la production, deux autres le transport tandis que un ou deux ouvriers assurent la commercialisation sur les marchés avec l'exploitant. Sur d'autres les postes sont plus polyvalents : l'ouvrier maraîcher peut assurer le transport, et le chauffeur participe à la vente sur le marché avec le chef d'exploitation.

La vente sur les marchés forains est pratiquée par tous les agriculteurs de la zone maraîchère qui mettent en valeur leur proximité de l'important bassin de consommation de l'agglomération parisienne. Les marchés les plus privilégiés sont ceux de Paris et de la proche banlieue ; sur ces marchés, les clients sont beaucoup plus sensibles à la fraîcheur et à la qualité des produits qu'ils n'hésitent pas de rémunérer même à des prix plus élevés. La recherche d'une clientèle qui soit prête à rémunérer toujours plus les produits, est donc le critère le plus déterminant dans le choix des marchés forains pour les agriculteurs de la zone maraîchère : La distance (marché - exploitation), qui semble influencer la majorité des producteurs de l'Ile de France (IAURIF, 2004), n'intervient que peu dans le choix du marché à pratiquer. D'ailleurs, aucun de ces producteurs ne commercialise ses produits sur les marchés de Cergy ou de Pontoise malgré leur proximité immédiate.

L'IAURIF dans son Atlas rural et agricole de l'Ile de France, estime que la vente sur les marchés de détail est un débouché important pour les exploitations spécialisées de la région. Les producteurs présents sur les marchés viennent principalement des zones maraîchères et arboricoles d'Ile de France. Ils ont développé un système de production qui leur permet de proposer une large gamme de produits de saison (plus de dix voire de trente variétés de légumes ou petits fruits). Parallèlement, quelques producteurs ont une offre plus spécialisée : salades, oignons, pomme de terre. Ils disposent d'atouts indiscutables avec une offre de produits locaux frais et de saison. La vente sur les marchés est souvent considérée comme le seul moyen de valoriser une production, en particulier pour les petits producteurs qui ne sont pas concurrentiels sur le marché de gros. 25% des exploitations commercialisent leurs fruits et légumes uniquement sur les marchés (IAURIF, 2004).

En Ile de France, ils existent entre 600 et 700 marchés forains (IAURIF, 2000) dont 78 sont implantés dans Paris intra-muros (les Echos, 2005). Ce sont majoritairement de petits marchés puisque 65% ont moins de 50 forains et 35% ont moins de 20 forains (la taille moyenne régionale étant de 50 forains par marché) ce qui constitue une situation préoccupante pour la région puisque les petits marchés ont souvent du mal à se tenir (IAURIF, 2000).

Au-delà de l'avantage économique qu'ils sont susceptibles d'apporter aux agriculteurs (notamment la récupération d'une marge bénéficière nettement plus importante que celle qu'ils perçoivent en cas de vente à des intermédiaires), les marchés forains offrent également une occasion particulière pour la rencontre entre citadins et agriculteurs en Ile de France. Ces marchés acquièrent un rôle décisif dans le processus de réintégration sociale de l'agriculture puisqu'ils forment des vitrines idéales sur le monde agricole et des interfaces sociales actives avec le milieu urbain : à défaut de se rendre sur les champs, c'est dans ces marchés que les citadins peuvent nouer et entretenir d'éventuels contacts directs avec les producteurs de leur région.

La vente à la ferme, sensée contribuer à rétablir le lien avec la société urbaine, ne semble pas séduire les agriculteurs, elle n'est d'ailleurs pratiquée que par une seule exploitation gérée en GAEC dont l'essentiel de la production est vendue sur les marché d'Ile de France et à Rungis ; tous les vendredis entre 16 heure et 19 heure, les clients peuvent ainsi se rendre au siège de l'exploitation pour s'approvisionner en différents légumes produits sur place et mis à leur disposition sur des étalages placés sous un abri avec affichage des variétés et des prix des produits. Ce type de vente qui permet à l'exploitant de réaliser une marge bénéficiaire plus importante puisqu'elle lui évite les coûts des déplacements, reste stagnée malgré les efforts consentis afin d'attirer plus de clients (distribution de publicité dans les boites aux lettres, informations et fidélisation des clients), « nos clients sont majoritairement des habitués, de temps en temps on reçoit des nouveaux mais qui ne reviennent pas souvent et d 'ailleurs même les habitués se font parfois rares», affirme cet agriculteur en insistant sur le fait que ce sont majoritairement des habitants des quartiers voisins « notre problème est qu 'on arrive pas à séduire d'autres clients même si on essaye de ratisser large par nos publicités », fortement convaincu qu'il a fait tout le nécessaire pour développer ce type de vente sur son exploitation, cet agriculteur estime qu'il ne peut pas faire plus : « aujourd'hui je consacre plus de 20% de mon temps de travail pour la vente de mes produits et je ne peux pas faire plus que ça compte tenu du temps énorme de travail que je doit consacrer à la production », lorsque je l'ai interrogé à propos de ce que les clients lui réclament le plus, il m'a répondu : « les gens trouvent que le vendredi après midi ne les arrange pas, mais les autres jours j 'ai beaucoup de choses à faire, et c 'est le seul créneau dans lequel je peux me permettre cette vente ; les débuts de semaine les gens achètent moins, le samedi je fais les marchés forains, et le dimanche je me repose ». A travers le témoignage de cet agriculteur, on comprend bien que le sort de la vente à la ferme ne dépend pas uniquement de la volonté des exploitants d'adopter ou pas ce type de vente selon l'organisation de leur travail, mais tributaire aussi, et d'une

façon plus importante, des disponibilité des clients qui ne sont pas forcement en adéquation avec les créneaux horaires et les jours choisis pour réaliser cette vente. Même intéressés par l'achat direct de légumes sur les producteurs, l'inadéquation des disponibilités des clients avec celle des agriculteurs est la principale entrave au développement de la vente à la ferme, sans efforts et compromis de part et d'autre, ce type de vente ne connaîtra pas le succès qu'on attend de lui en Ile de France. Cet agriculteur que j 'ai réussi d'interviewer dans sa serre entrain d'élaguer ses concombres et dont les propos ont mûrement enrichi ma réflexion, ne voit aucune issue particulière à cette problématique, « vous savez, j 'ai 55 ans et j 'ai décidé d 'arrêter bientôt l 'activité agricole car je ne peut plus fournir d 'efforts supplémentaires pour gagner juste le SMIC !...», me confiât-il à la fin de notre entretien.

En Ile de France, la vente à la ferme demeure toutefois peu pratiquée et ne représente qu'un faible volume ; 21% des exploitants tous secteurs confondus font de la vente directe contre 15% au niveau national. Ce sont essentiellement des arboriculteurs, des horticulteurs, des pépiniéristes et des maraîchers. Ce débouché est cependant en régression par rapport à 1988, quand 29% des exploitants vendaient directement aux consommateurs. Le recul de l'agriculture spécialisée et des productions animales ainsi que le durcissement des normes sanitaires, expliquent cette baisse, même si la demande du consommateur est touj ours présente (IAURIF, 2004).

D'une façon plus originale, un agriculteur exploitant à Cergy Ham, a aménagé un local sur la place de l'indépendance à Cergy village qu'il a entièrement dédié aux produits de son exploitation, les clients qui sont essentiellement habitants du village, y trouvent légumes, oeufs, lapins, plantes en pots... etc. Il s'agit d'un système de vente directe des produits de la ferme qui s'effectue plus loin de celle-ci et plus proche des clients ; ces derniers peuvent ainsi bénéficier des avantages que leur confère l'achat direct chez le producteur sans en subir l'inconvénient du déplacement jusqu'à la ferme. Par ailleurs, ce type de vente directe s'effectuant toute la semaine (puisque le local reste ouvert du matin au soir et tous les jours), permet de pallier le problème des disponibilités des clients : ceux-ci peuvent s'y rendre pour s'approvisionner tous les jours et à tout moment de la journée.

Plus détaché encore du marché cergypontain, un agriculteur spécialisé en bio a développé un système de vente entièrement adapté à une clientèle parisienne plus aisée ; tous les samedi matin, il tient un stand sur le marché biologique des Batignolles dans le 1 7ème arrondissement de Paris. En plus des clients qui achètent occasionnellement ses légumes, les abonnés reçoivent chaque semaine un panier de légumes biologiques de saison contre un paiement mensuel. Les paniers préparés à l'avance, sont de deux dimensions « gros » et

« moyens », et les légumes sont soit produits sur son exploitation soit achetés sur d'autres agriculteurs biologiques à hauteur de 5% des quantités vendues.

2. Peu d'échanges avec l'agglomération de Cergy Pontoise :

L'intégration de l'agriculture de la zone maraîchère dans l'agglomération de Cergy Pontoise peut se mesurée à travers la présence ou l'absence d'échanges entre cette activité et la ville qui l'entoure. Ces échanges peuvent prendre différentes formes notamment économiques et sociales.

Sur le plan économique, les exploitants de la zone maraîchère réalisent peu d'échanges avec l'agglomération de Cergy Pontoise. En amont, ils s'approvisionnent, pour la majeure partie de leurs intrants, à la coopérative agricole de Cergy dont le siège est localisé à Cergy village contre le paiement d'un droit d'adhésion annuel qui leur permet d'obtenir des réductions importantes sur les prix d'achats. Cette association de producteurs n'est pas habilitée à réaliser des bénéfices par la vente aux agriculteurs, les faibles profits qu'elle réalise de temps à autres (2000 euros en 2005) sont aussitôt redistribués sur ses adhérents. En revanche, elle réalise 20% de son chiffre d'affaire par la vente aux particuliers non agriculteurs (jardiniers ou autres amateurs), pour cette part de son budget, elle est redevable de charges comme tout autre établissement à activité commerciale. Son responsable, que j 'ai rencontré sur place, considère qu'à l'avenir la coopérative travaillera de moins en moins avec les agriculteurs et de plus en plus avec les particuliers, d'ailleurs, la part de ces derniers dans le budget pour l'année 2006 est susceptible de passer à 25% soit une augmentation de 5% par rapport à sa part en 2005 ; « ce qui nous permettra de faire tourner la baraque ! ». Par sa proximité immédiate, cette coopérative procure un gain de temps énorme aux agriculteurs facilitant ainsi leur travail en zone maraîchère de Cergy (ils ne sont plus obligés de parcourir de grandes distances en traversant la ville pour s'approvisionner). Par ailleurs et en dehors des différents intrants qu'elle leur fournit, cette coopérative est aussi un lieu de rencontre pour les agriculteurs (le seul pour la plupart d'entre eux), ils y découvrent les nouveaux produits, les nouvelles techniques, des conseils et des suggestions qu'ils ne peuvent pas forcement trouver ailleurs : au-delà du simple approvisionnement, cette coopérative joue un rôle sociale important pour les agriculteurs en leur permettant au moins d'avoir ce lieu commun dans lequel ils peuvent s'échanger expériences, idées mais aussi matériels et services puisqu'un espace d'affichage leur permet de publier leurs petites annonces. Vue sous cet angle, la

coopérative apporte donc d'innombrables services aux agriculteurs de Cergy, néanmoins elle favorise une concentration de l'agriculture dans l'espace « zone maraîchère - Cergy village » l'isolant ainsi davantage du reste de la ville nouvelle puisque les agriculteurs, à force de ne développer des liens qu'avec cet ancien village, n'y trouvent aucune utilité à la ville nouvelle quant à l'accomplissement de leur travail : en amont, l'activité agricole se trouve indépendante de la ville nouvelle, elle est concentrée dans le territoire formé par la zone maraîchère et l'ancien village de Cergy qui demeure complètement écarté, voire fermé, pour l'essentiel de la population de l'agglomération cergypontaine. L'isolement de l'agriculture de la zone maraîchère est favorable à davantage d'éloignement entre la société et l'agriculture de l'agglomération. Les conséquences sont déjà perceptibles puisqu'un nombre important de citadins, notamment les plus jeunes que j 'ai rencontrés, ignorent complètement l'existence d'activité agricole à Cergy Pontoise. Pour Bertrand Hervieu, cet éloignement conduit à long terme à l'ignorance et à l'incompréhension vis-à-vis du monde agricole (Hervieu, 2001). Il estime dans une conférence qu'il a animé au Québec que : « Nous sommes devenus des sociétés urbaines, des sociétés éloignées de la production végétale et de la production animale. Nous n 'avons jamais si bien mangé et nous n 'avons jamais aussi peu su ce que nous mangions. C'est un processus d'abstraction complètement passionnant d'un point de vue sociologique parce qu 'il est possible de le décliner sur la terre, sur le métier et aussi sur l 'alimentation. D 'une certaine fa çon, notre alimentation n 'a jamais été aussi abstraite, ce qui veut dire qu 'il faut être parfois extraordinairement savant pour arriver à véritablement comprendre comment ce qui est dans notre assiette a pu être construit, fabriqué, sauvegardé, conservé, chauffé... avant d'être digéré ! C'est un élément d'éloignement qui crée les conditions d'une sorte d'incompréhension, parce que l 'ignorance est forcement mère de l 'incompréhension. Si l 'on veut évidement effacer ces choses, cela passe d 'abord par la connaissance et par la compréhension ». (Bertrand Hervieu, 2001).

En aval, les agriculteurs de la zone maraîchère ne vendent aucun de leurs produits sur les quatre marchés forains que comporte l'agglomération de Cergy Pontoise, « la demande des clients de Cergy Pontoise n 'est pas adaptée à la qualité des produits que nous proposons ; nous produisons du haute gamme tandis qu 'ils recherchent plutôt les bas prix », m'a répondu un agriculteur qui préfère pratiquer d'autres marchés d'Ile de France.

Tableau 07 : Les marchés forains de l'agglomération de Cergy Pontoise.

Commune

Emplacement du marché

Jours et période du marché

Cergy

Quartier Saint Christophe

Mercredi et Samedi matin

 

Dimanche matin

Pontoise

Place de l'Hôtel de ville

Samedi matin

 

Jeudi matin

 

Source : La ville de Cergy, 2005.

D'après ce témoignage, l'absence de liens commerciaux entre l'agriculture de la zone maraîchère et l'agglomération de Cergy Pontoise peut donc s'expliquée principalement par l'inadaptation des gammes de produits de cette agriculture aux demandes des cergypontains. Les produits fournis s'orientent beaucoup plus vers une clientèle prête à rémunérer chère leur qualité, ce qui est moins le cas de la population de Cergy Pontoise.

Selon une étude de l'INSEE, il s'agit d'une population plus modeste que celle de l'ensemble de la région puisque son revenu annuel médian est de 16700 € par unité de consommation (UC) (contre 17400 € en Ile de France). Au sein de l'agglomération nouvelle, ce revenu est le plus élevé à Neuville - Sur - Oise (23000 €), et le plus faible à Cergy et Saint - Ouen - l'Aumône où la moitié des habitants déclarent moins de 14000 € par ans.

La part de la population dépendante du RMI est de 2,4% à Cergy Pontoise comme en Ile de France. Cependant, au sein de l'agglomération, cette part varie de 0,1% à Neuville - Sur - Oise à 3,5% à Cergy, Pontoise et Saint - Ouen - l'Aumône. La population dans ces trois communes présentent également des taux de chômage les plus élevés (13,3% à Saint - Ouen - l'Aumône, 12,1% à Cergy et 12% à Pontoise), les autres communes présentent des taux relativement moins élevés (10,4% à Osny, 9,7% à Jouy - Le - Moutier, 9,4% à Eragny, 9,2% à Vauréal, 6,4% à Courdimanche et à Neuville - Sur - Oise, 6,2% à Menucourt et 3,8% à Puiseux - Pontoise). Ce taux est de 10,9% pour toute la ville nouvelle contre 11,6% en Ile de France. Si la population active francilienne est à 91,5% salariée, ce chiffre atteint 95,2% à Cergy Pontoise.

Tableau 08: La composition de la main d'oeuvre salariale à Cergy Pontoise.

Catégories professionnelles

Cergy Pontoise

Il de France

Employés

33%

30%

Professions intermédiaires

27%

25%

Ouvriers

20%

18%

Cadres, professions intellectuelles

15%

21%

Artisans, commerçants, chefs d'entreprises

3%

5%

 

Source : INSEE, 2004.

Les marchés forains de la ville nouvelle sont adaptés à la clientèle qui les fréquente. A l'intérieur de leur ambiance de « Souk » où se côtoient des produits de différentes natures, les étalages des fruits et légumes sont occupés plutôt par des revendeurs qui s'approvisionnent généralement à Rungis et qui proposent des prix adaptés aux faibles budgets des ménages.

Photo 05 : Revente de fruits et légumes sur le marché de Cergy Saint Christophe (Cergy).

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Une des pratiques les plus courantes dans ces marchés s'apparente à un système de « soldes » qui s'effectue en générale vers la fin du marché : les légumes sont proposés dans des paniers ou des sacs plastics et vendus en volume et non pas au poids. Cette pratique garantie aux commerçants d'écouler le maximum de leur marchandise et permet aux clients de faire leurs achats à des prix très avantageux.

La concurrence des prix rude entre ces marchés forains et la grande distribution a contribué à l'éviction des producteurs locaux du marché des fruits et légumes de l'agglomération.

3. Les tentatives d'intégration urbaine de l'agriculture par l'agglomération de Cergy Pontoise :

3.1. Les mesures de protection de l'agriculture en zone maraîchère :

La vocation agricole de la zone maraîchère est définitivement reconnue par les documents d'urbanisme et d'aménagement. Que ce soit dans le schéma directeur de l'agglomération cergypontaine ou dans le plan locale d'urbanisme de la commune de Cergy, le caractère d'espace agricole est maintenu pour cette zone qui ne peut par conséquent être affectée à d'autres usages. La non constructibilité de la zone maraîchère met son agriculture à l'abri de toute spéculation de la part des propriétaires fonciers. Primordiale mais non suffisante au maintien de l'activité agricole, cette sécurisation foncière doit s'accompagner dans les milieux périurbains par des mesures concrètes sur le terrain qui doivent maintenant viser la sécurisation du travail des agriculteurs contre les vols et les dégradations. Dans certaines communes comme à Vernouillet, une des mesures prises consiste à mettre en place des brigades montées de surveillance (Poulot et Rouyres, 2005).

Afin de réaffirmer sa volonté de protéger l'agriculture en zone maraîchère, l'agglomération de Cergy Pontoise a procédé par l'installation de plaques signalétiques aux abords des parcelles cultivées avec des messages rappelant aux utilisateurs de la zone maraîchère de « respecter le travail des agriculteurs ». Ces plaques qui portent aussi l'inscription de « zone maraîchère protégée », n'offrent aucune protection réelle puisqu'elles ne font que rappeler aux passants de « ne pas emprunter les chemins d'exploitation et de tenir leurs chiens en laisse » tout en les invitant à respecter les cultures « fruits du travail des agriculteurs ». Elles s'adressent donc aux habitants de la zone maraîchère et aux promeneurs qui ne sont pas les véritables auteurs des dégradations, puisque les parties qui souffrent le plus

des dégâts, sont les plus éloignées des habitations de la zone maraîchères et les moins propices pour la promenade (climat d'insécurité, tags...) ; Par ailleurs, l'emplacement de ces plaques dans la partie Ouest de la zone maraîchère est en contradiction avec la localisation des dégradations qui sont essentiellement concentrées vers sa partie Est.

Ainsi, la tentative de protection de l'agriculture en zone maraîchère à travers ces plaques, ne semble adaptée ni aux types de dégradations subies, ni à la logiques de leurs auteurs.

Photo 06 : Des plaques pour protéger l'agriculture en zone maraîchère de Cergy.

Bois de Cergy

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Enfin, la mise en place de ces plaques signalétiques qui ciblent les usagers non agriculteurs de cet espace puisqu'elles ne seraient pas nécessaires si la zone maraîchère était exclusivement réservée aux agriculteurs, révèle implicitement la reconnaissance d'une multifonction de la zone maraîchère de la part de l'agglomération de Cergy Pontoise. Celle-ci sous-entend l'existence d'autres usages en dehors de l'activité agricole pour la zone maraîchère.

Il est évident que pour protéger efficacement le travail des agriculteurs en zone maraîchère, seule une stratégie de protection bien établie et qui prend en compte les caractéristiques propres à cette zone, est susceptible de se montrer utile. Un tel travail doit

d'abord commencer par une identification et un diagnostic précis des dégradations constatées afin de trouver les solutions et les méthodes de protection appropriées.

3.2. L'intégration dans un circuit de recyclage de déchets urbains : une tentative échouée.

L'utilisation d'engrais urbains par l'agriculture n'est pas un fait nouveau en Ile de France ; durant les siècles précédents, le fumier provenant des animaux entretenus à Paris a joué un rôle capital dans l'organisation et le maintien des systèmes de production agricole de banlieue : les producteurs qui disposaient de quantités touj ours plus importantes d'engrais urbains peuvent étendre et intensifier leurs cultures spéciales sans faire d'élevage ; ainsi, l'existence des cultures maraîchères autours de Paris n'est pas sans rapport avec la présence de nombreuses cavaleries (M Phlipponneau, 1956). A cette époque (du 1 3ème au 1 9ème siècle), la dépendance des cultures de banlieue vis-à-vis des engrais urbains été très forte au point où elle a encouragé certains agriculteurs, comme ceux d'Aubervilliers, à produire des engrais verts dans leurs exploitations pour s'affranchir de cette emprise parisienne (Turek et Roy, 1992).

Dans les années 1990, l'agglomération de Cergy Pontoise se voulant exemplaire en matière d'environnement, a mis en place une filière globale de recyclage des déchets ménagers baptisée « Auror'Environnement » qui s'organise autour du fonctionnement d'un ensemble d'équipements de gestion des déchets ménagers composés de:

· 5 déchetteries et plus de 300 points d'apports volontaires,

· 1 dispositif de collecte sélective pour l'ensemble des habitations de l'agglomération,

· 1 unité d'incinération d'une capacité de 160000 tonnes /an qui contribue au chauffage de 30000 équivalant/ logements,

· 1 centre de tri de 12000 tonnes/ an pour les journaux - magazines et les emballages ménagers,

· 1 centre de tri de 60000 tonnes/ an pour les déchets industriels banals et les encombrants,

· 1 unité de compostage qui traite 13000 tonnes/ an de déchets verts et de déchets fermentescibles.

Situé sur la commune de Saint - Ouen - l'Aumône, le centre principal de traitement permet non seulement de traiter les déchets (journaux, magazines, emballages) pour Cergy

Pontoise mais aussi pour le syndicat intercommunal de Taverny (8 communes), soit 280000 habitants en tout. Pour la seule agglomération ce sont 90% des déchets ménagers qui sont traités et valorisés grâce à cette filière.

Les déchets végétaux sont déposés dans les cinq déchetteries de Cergy Pontoise, puis collectés et acheminés au centre de compostage. Il s'ajoute à cela et depuis 1998, le ramas sage direct des résidus de préparation de repas et ceux du jardinage qui permet de récupérer près de 100 Kg de déchets fermentescibles par habitant/an : au total 17000 tonnes de déchets sont collectés chaque année.

Comme les nombreuses entreprises d'espaces verts et de jardinerie, les exploitations agricoles de la zone maraîchère de Cergy participent activement à l'approvisionnement de cette filière en déchets végétaux. Pour le faire, la mairie de Cergy a aménagé un espace sous la voie du RER A élevée en zone maraîchère : il s'agit d'un espace bien clôturé avec portail se fermant à clé et dont la surface est cimentée au sein duquel les déchets sont disposés séparément selon leurs nature. Les feuilles et les débris organiques sont regroupés dans un même quartier, tandis que les déchets non dégradables sont déposés dans une benne remorquable, les légumes détériorés, quant à eux, bénéficient d'une place particulière qui leur est réservée avec plaque signalétique.

Jouissant d'une bonne accessibilité, ce site permet aux agriculteurs de déposer les déchets issus de leurs exploitations (légumes détériorés ou invendus, restes de végétaux,...) à n'importe quel moment de la journée, il bénéficie d'ailleurs, d'une bonne appréciation de la part des exploitants puisqu'il leur permet d'éliminer gratuitement leurs déchets. Les agriculteurs peuvent y déposer, en plus des déchets végétaux, leurs déchets non fermentescibles (films plastiques, caisses, emballages de produits phytosanitaires). A leur tour, les entreprises de jardinerie ainsi que les services municipaux, peuvent y déposer les résidus d'entretien des jardins et parcs urbains (feuilles et débris végétaux) ; le tout étant par la suite récupéré et amené au centre de compostage de la filière.

A travers ce système, le partenariat imaginé entre la ville nouvelle et l'agriculture en zone maraîchère ne s'est pas entièrement accompli. En effet, force est de constater que par peur de contaminer leurs cultures, les agriculteurs de la zone maraîchère n'ont pas voulu adopter le compost que leur propose la filière car ils le considèrent comme une source potentielle de maladies des cultures. Ce risque est tellement pris au sérieux que même le responsable de la coopérative agricole de Cergy, qui fait aussi office de conseiller auprès des agriculteurs, n'hésite pas de le rappeler : il est vecteur de maladies cryptogamiques qui, en cas

d'utilisation de ce terreau, sont susceptibles de contaminer les cultures. Aujourd'hui, seuls les espaces verts de l'agglomération font encore usage de ce compost.

De son côté, Auror'Environnement explique que le procédé de compostage adopté (fermentation des déchets en milieu fermé à 60°C avant d'être broyés à trois reprises puis humidifiés et aérés, pour enfin subir des traitements chimiques afin d'éliminer les odeurs désagréables de la fermentation), continue de fournir, toutes les cinq semaines, 3000 tonnes de terreau pour 6000 tonnes de déchets traités.

A l'heure où je rédige ce paragraphe19, le dépôt de la zone maraîchère connaît une accumulation non négligeable de végétaux et de débris déposés qui forment des tas avec un stade de fermentation assez avancé, ce qui témoigne de leur long séjour sur place et de la lenteur dans leur acheminement vers le centre de compostage : une saturation des entrepôts de la filière en stocks de compost non écoulés, pourrait en être la cause de ce ralentissement.

En attendant, les conséquences négatives de la fermentation des végétaux dans ce dépôt commencent à menacer sérieusement le fonctionnement et la stabilité de la zone maraîchère : les odeurs indésirables que dégage cette fermentation atteignent, par des vents Sud (assez fréquents dans cet espace), la rive gauche de l'Oise sur laquelle se trouve des habitations et un restaurant qui n'hésite pas d'imputer la baisse de sa clientèle en grande partie à la présence de ces odeurs.

A long terme, cette initiative qui a voulu intégrer l'agriculture dans une dynamique environnementale urbaine, n'aura pas les effets attendus. Bien au contraire, n'ayant pas su montrer le rôle positif que pourrait assurer l'agriculture au sein de la ville, cette expérience a provoqué l'effet inverse en mett ant cette activité en conflit avec son voisinage de l'autre rive de l'Oise.

19 - Mai 2006.

Quatrième partie :

Les bases du rapprochement ville - agriculture en zone maraîchère de Cergy :

1. De nouveaux rôles urbains pour l' agriculture :

1.1. Un rôle social : de l'emploi agricole pour une main d'oeuvre urbaine :

Le rôle social de l'agriculture en ville prend forme dès lors qu'elle satisfait des besoins sociaux émanent de la population urbaine. Si pour une certaine catégorie sociale l'agriculture est appelée à satisfaire des demandes en terme d'entretien d'espaces ouverts, de gestion des paysages qu'elle conjugue avec des productions de qualité, d'autres catégories lui réclament encore fortement sa fonction nourricière et sa capacité à fournir des postes d'emploi. Dans certains cas, cette activité constitue un dernier recours pour des populations en mal d'intégration dans le marché du travail urbain, de nouvelles bases du rapprochement ville - agriculture peuvent se mettre en place.

En zone maraîchère de Cergy, la majorité des ouvriers agricoles qui constituent l'essentiel de la main d'oeuvre nécessaire au fonctionnement des exploitations (ouvriers maraîchers, chauffeurs, vendeurs sur les marchés), sont résidents des nouveaux quartiers construits avec la ville nouvelle de Cergy Pontoise.

Cette agriculture qui demeure isolée de l'agglomération en terme d'échanges économiques, retrouve ainsi - à travers ce flux humain de main d'oeuvre - un véritable lien social avec la ville. Bien que les chefs d'exploitations agricoles de la zone maraîchère continuent de considérer que la ville nouvelle ne leur procure « que ses inconvénients », on est ici plutôt en présence d'un avantage de leur rapports avec la ville.

Compte tenu des profils des ouvriers qui occupent ces emplois agricoles, ce partenariat acquiert une dimension sociale importante pour l'agglomération nouvelle.

En effet, ces ouvriers cumulent pour la plupart d'entre eux, d'innombrables handicaps minimisant leurs chances d'accéder à un emploi urbain20. De l'autre côté, les chefs d'exploitations agricoles de la zone maraîchère souffrent d'un énorme manque de main d'oeuvre capable de mener les différentes tâches agricoles sur leurs exploitations ; le

20 - voir Troisième partie, § 1 : présentation de l'agriculture de la zone maraîchère de Cergy.

responsable de la coopérative agricole de Cergy n'a pas manqué de me le rappeler « notez bien ceci, il y 'a un manque énorme de main d 'oeuvre en agriculture, les jeunes préfèrent les bureaux ; conséquence, les agriculteurs sont obligés de faire plus d 'heures de travail », à ce sujet, un agriculteur m'a confié que le coût de la main d'oeuvre pour son exploitation est de 80% des coûts de production « je dois donc la rentabiliser, est puisqu 'elle est de plus en plus rare, je suis obligé de faire plus d 'heures de travail que n 'importe quel autre travailleur par semaine». On comprend donc facilement qu'un partenariat gagnant - gagnant s'est finalement mis en place entre la ville et l'agriculture de la zone maraîchère, il est de nature sociale pour l'agglomération et économique pour l'agriculture.

1.2. Les tags : pressions urbaines, ou appropriation citadine de l'agriculture :

La coexistence de l'agriculture avec d'autres usages de la zone maraîchère suscite des interactions et des rapports qui sont parfois marqués par une compétition accrue notamment lorsqu'il y'a concurrence pour certains objectifs partagés ; ainsi les tagueurs qui semblent, comme les agriculteurs, conscients de la bonne exposition que la ligne A du RER est susceptible de leur procurer, exploitent vivement cette opportunité au risque de compromettre gravement le travail des agriculteurs. Ces derniers voulant, à leur tour, profiter de l'exposition pour afficher leur pratique de vente à la ferme, ont placé leurs serres avec des panneaux publicitaires dans des endroits bien visibles à partir du RER, ils ont ainsi offert aux tagueurs de formidables supports pour se montrer à leur façon.

L'ampleur de ce phénomène est très perceptible dans certains endroits de la zone maraîchère, ainsi dès qu'un nouveau plastique est mis en place, il est vite gagné par des tags de différentes formes (j 'ai même repéré des plastiques tagués sur près de 20 % de leur surface bien avant que leur mise en place sur les serres ne soit complètement achevée), une fois tagués, les plastiques deviennent opaques et voient leur capacité d'effet de serre, recherché en plasticulture, chuter. Le préjudice pour les agriculteurs est d'ordre multiple; il est d'abord agronomique (retard de croissance des cultures concernées avec le surplus que cela induit en travail et en apports d'intrants suite à l'opacité des plastiques), mais aussi commercial car vecteurs d'une image négative de la zone maraîchère (image d'insécurité) puisque les tags sont susceptibles de dissuader d'éventuels clients qui, en les voyant, renoncent de se rendre sur place pour s'approvisionner en légumes frais. A cela s'ajoute des dommages collatéraux

se produisant au moment même de la mise en place des tags (piétinement des cultures, endommagement des clôtures...).

Photo 07 : Des serres taguées en zone maraîchère de Cergy.

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

En analysant la localisations et la disposition des tags, on s'aperçoit qu'elles répondent à une logique bien particulière: tous les tags sont orientés suivant un angle qui leur permet au maximum d'être vus à partir du RER. Le lien entre l'emplacement des tags et leur visibilité à partir du train s'établit facilement puisqu'ils ne couvrent que les surfaces les plus visibles des serres les plus proches de cette voie de transport. Plus loin de celle - ci, les serres ne portent aucun tag ; plus justifiant encore, les surfaces non exposées des serres même très proches du RER, demeurent indemnes de toute forme de tags. On constate ainsi que les motivations des tagueurs ne résident pas dans la volonté de dégrader les serres car, si c'était le cas, ils auraient pu taguer aussi des serres qui ne sont pas visibles du train, voire conjuguer d'autres types de dégradations avec les tags (par exemple déchirer les plastiques...) : la présence des tags ne constitue donc pas une réponse aux atteintes au pays age et à l'environnement que les serres évoqueraient aux citadins en illustrant un certain productivisme de l'agriculture, elle n'est pas non plus une forme gratuite de pression urbaine sur l'agriculture, elle représente par contre

une tendance à l'assimilation de cet espace à un espace urbain ce qui illustre une appropriation citadine de l'activité agricole. Un rôle particulier se dessine pour l'agriculture en zone maraîchère ; celui de fournir le support d'expression à une certaine catégorie sociale (les tagueurs).

Si les exploitants ont choisi d'ignorer ces tags, le plus touché d'entres eux continu de lutter seul contre ce phénomène. Conscient de l'importance de la visibilité à partir du RER pour les tagueurs, il a procédé par la mise en place d'un film plastique vert en attendant que grandissent les arbres qu'il a planté pour camoufler les tags.

1.3. Le rôle patrimonial et paysager :

L'une des principales voies pour la reconsidération de l'agriculture dans les milieux urbains réside dans sa capacité à participer à la construction d'une identité territoriale, car audelà du paysage, les agriculteurs apportent aux périurbains des enseignements qui leur permettent de s'enraciner dans leur territoire de résidence (Charvet, 2003).

Compte tenu de l'origine multiple de leurs habitants, les villes nouvelles ont plus que jamais besoin d'exploiter tous ce qui est susceptible de contribuer à la construction d'une identité commune sur leurs territoires. Dans ce contexte, l'activité agricole pourrait jouer un rôle non négligeable dans la mise en place de liens entre les populations citadines et leur territoire commun ; toutefois, l'exploitation de ce rôle territorial de l'activité agricole doit souvent passer par des démarches de patrimonialisation de l'agriculture (Fleury et Serrano, 2002). Celles-ci interviennent lorsque l'agriculture est protégée non pas pour son rôle nourricier mais parce qu'elle est considérée comme faisant partie du patrimoine identitaire de la ville, dans ce cas, divers outils peuvent être utilisés selon les composantes des milieux concernés.

La création de zone de protection du patrimoine urbain et paysager (ZPPAUP) est un moyen très approprié pour la protection des espaces contenant à la fois des paysages ouverts (forêts, espaces cultivés...) et des constructions (monuments historiques, village ancien...).

Il s'agit d'un outil juridique créé par la loi du 7 janvier 1983 qui se matérialise par un document contractuel ne pouvant s'élaborer qu'avec la volonté de la municipalité après enquête d'intérêt publique et en concertation avec l'Etat. La décision finale appartient au préfet de la région qui s'entoure des conseils d'une instance juridique et scientifique (la commission régionale du patrimoine et des sites). La ZPPAUP s'impose ensuite aux

particuliers et l'architecte des bâtiments de France a pour mission de vérifier que les démarches d'autorisation des travaux soient conformes aux dispositions de la ZPPAUP (ministère de la culture, 2006).

A l'initiative de la municipalité de Cergy un projet de ZPPAUP est créé en 1999, il est mis en application en 2000.

La phase de diagnostic a permis de repérer les espaces publics et paysagers qui sont considérés comme constituants de la mémoire de la commune de Cergy. Le village de Cergy, Ham ainsi que les bords de l'Oise, les coteaux, les étangs, le bois de Cergy et la zone maraîchère, au total 532 ha ont été choisis pour être protégés. Trois grands secteurs ont été définis :

1. Les secteurs urbains, susceptibles d'accueillir des constructions (village ancien, port de Cergy et ses abords, maisons isolées et constructions maraîchères)

2. Les secteurs naturels (espaces boisés et coteaux, grands enclos - comme le parc de la Maison Gérard Philipe, espaces de transition - comme les vergers et les terrains de cultures)

3. Les secteurs de projets, comprenant des espaces aussi bien bâtis que naturels, ils sont destinés à des aménagements spécifiques comme l'axe majeur ou la place de l'église Saint Christophe (ville de Cergy, 2004).

Au moment où la zone maraîchère demeure pour les agriculteurs un lieu d'exercice de leur métier sur lequel ils ont installé des serres, des clôtures et d'autres moyens de productions, elle accède à un statut de patrimoine culturel et paysager prescrit par la ville : une fois de plus la fonction nourricière de l'agriculture se trouve écartée par d'autres priorités urbaines, le maintien de l'activité agricole en zone maraîchère doit désormais tenir compte de toutes ces revendications citadines qui la chargent de la préservation et la transmission du patrimoine culturel et paysager aux générations futures.

2. Les conditions du rapprochement ville - agriculture :

Si le maintien de la destiné agricole de l'espace en milieux urbains peut dans une large mesure s'effectuer à travers les documents d'urbanisme (type PLU), le maintien de l'activité agricole elle-même passe inexorablement par l'entretien de la viabilité économique des exploitations agricoles (Charvet, 2003). La sécurisation foncière et contre les vols et dégradations doit s'accompagner par une sécurisation économique qui nécessite d'assurer la

rémunération des actes de production agricole. Celle-ci passe par le renforcement des liens économiques entre l'agriculture et son entourage urbain immédiat car c'est d'abords avec celui-ci que l'activité agricole partage la gestion de son espace, il faut donc réfléchir à des stratégies qui permettent aux agriculteurs et aux citadins de définir des projets communs en convergeant mutuellement leurs objectifs. Cependant, la voie qui consiste à faire des agriculteurs des jardiniers pour les citadins que les agriculteurs eux même refusent est à exclure. Plusieurs chercheurs rejettent aussi cette logique, ils proposent de considérer les agriculteurs avant tout comme les nourriciers du monde et non d'abords des jardiniers (Hervieu, 1993, Pisani, 2004). Dès lors toute stratégie favorable à l'intégration fonctionnelle de l'agriculture d'abords pour son rôle nourricier dans les milieux urbains se trouve autorisée. Toutefois de telles initiatives qui demandent l'engagement volontariste de toutes les parties concernées passent par un certain nombre d'étapes clés du rapprochement ville - agriculture.

2.1. La reconstruction du dialogue agriculteurs - agriculteurs :

Les agriculteurs de la zone maraîchère sont unanimement d'accord sur leur fort individualisme ; en effet, le même propos « ici, c 'est chacun pour soi ! » revient le plus souvent accompagné de « c'est vraiment regrettable » chez la majorité des agriculteurs rencontrés. A travers leurs propos, ils m'ont fait comprendre qu'il est devenu très difficile aujourd'hui de se mettre d'accord pour éventuellement construire des projets communs. Selon ces agriculteurs, les raisons de cette situation résident dans « l'égoïsme » qu'expriment certains d'entres eux à chaque fois qu'ils voulaient s'associer autour d'objectifs communs.

Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il paraît fort probable que des querelles très fortes existent et s'alimentent entre les exploitants au point même de compromettre leurs intérêts. Les conséquences de ces mésententes constituent des obstacles énormes à l'aboutissement de projets qui visent d'associer les agriculteurs même dans le cas où ils émanent de l'extérieur, c'est ainsi que la proposition d'association enclenchée avec Auchan de Cergy a été vouée à l'échec, un agriculteur explique les raisons « c 'est parce qu 'on n 'a pas su se mettre d'accord sur l 'organisation du stand qui nous a été proposé à l 'intérieur du magasin Auchan, que ce dernier a annulé son contrat avec nous ». Selon cet agriculteur, l'enseigne leur a demandé d'animer leur stand pendent six jours dans la semaine et de ne jamais le laisser vacant pour des raisons commerciales, et puisqu'ils n'étaient que trois agriculteurs à vouloir participer à l'expérience, ils étaient obligés de consacrer deux jours par semaine chacun pour assurer la

relève et la continuité du stand, « avec le boulot qu 'on a sur nos exploitations, c 'est impossible de s 'absenter deux journées entières, le problème est que les autres [agriculteurs] ne voulaient pas y participer : on a fini par arrêter ». La seule exploitation qui a continué de travailler avec l'enseigne, après la résiliation des autres, n'a résisté que six mois, son responsable m'a alors confié : « je me suis rendu compte que je devenait, petit à petit, un employé chez Auchan, j'ai donc décidé d'arrêter ». Selon d'autres propos que j'ai recueillis auprès d'autres agriculteurs bien informés sur la situation : Auchan était très exigeant vis-à-vis des agriculteurs, notamment sur la qualité des produits, « une tomate abîmée, c 'est la caisse refusée ! », les agriculteurs ne pouvaient plus suivre. Ces arguments concernant les exigences strictes de l'enseigne de distribution me paraissent les plus explicatifs de l'échec de ce partenariat puisque l'exploitation, qui a pu résister pendant les six mois de l'expérience, est la plus avancée en terme de qualité de produits par rapport aux autres exploitations de la zone maraîchère ; son avancée est rendu possible par une maîtrise technique sans commune mesure dans les autres exploitations de la zone (serres chauffées, irrigation par goûte à goûte, cultures hors sol).

Le manque d'organisation collective des agriculteurs est considéré par l'IAURIF comme un des trois points faibles des espaces agricoles résiduels entièrement enserrés au sein de l'urbanisation dans lesquels se classe la zone maraîchère de Cergy. L'encouragement de cette organisation collective est un préalable pour toute reconnaissance des agriculteurs dans des projets urbains (IAURIF, 2002).

2.2. Le renforcement du contact agriculteurs - citadins :

2.2.1. L'obstacle : un recul des clients sur les marchés forains :

A l'unanimité, les agriculteurs rencontrés expriment tous le souhait de voir les gens « revenir faire leurs courses sur les marchés » afin qu'ils puissent vendre les produits de leurs exploitations. Selon eux, la baisse des ventes est une conséquence directe du recul de la clientèle sur les marchés qui s'effectue dans un climat de changements profonds dans les modes de vie et de consommation de la société. Particulièrement adaptée à ces évolutions, la grande distribution exerce une attraction sans précédent sur les consommateurs (adaptation aux horaires de travail, adaptation des gammes de produits proposés).

Dans ce contexte de grande concurrence, les marchés forains sont de moins en moins fréquentés, l'existence d'un décalage entre leur activité et les aspirations de la société est de plus en plus perceptible par les agriculteurs ; ils n'hésitent pas à exprimer leur sentiment que les évolutions de la société ont malheureusement pris des orientations qui vont plus à l'encontre de leurs attentes « aujourd'hui, les gens préfèrent les sandwichs et les plats cuisinés, nos clients sont souvent des habitués, le renouvellement de la clientèle pose un véritable problème au maintien de nos activités sur les marchés », explique un exploitant. Convaincu que les agriculteurs ne peuvent plus fournir d'effort supplémentaire, cet agriculteur estime que « c 'est aux citadins de faire le pas s 'ils veulent maintenir l 'agriculture, ils peuvent commencer par se rendre souvent sur les marchés pour acheter nos produits ».

Garantir les débouchés à leurs productions est la préoccupation la plus partagée par les agriculteurs de la zone maraîchère, les problèmes les plus directement liés au contact urbain (vols, dégradations et autres) passent au second degré dès qu'ils évoquent les difficultés rencontrées pour la commercialisation de leurs productions. Un ouvrier maraîcher m'a confirmé que son employeur fait de plus en plus recours à la destruction des légumes non vendus qui reviennent des marchés ; contrairement aux revendeurs qui pratiquent couramment la baisse des prix afin d'écouler leurs marchandises surtout à la clôture des marchés, les agriculteurs préfèrent détruire les légumes non vendus afin de garder les prix à leur niveau acceptable.

La crainte de ne pas pouvoir écouler leurs productions n'est pas une préoccupation propre aux agriculteurs de la zone maraîchère, ni à ceux de la région d'Ile de France, les chambres d'agricultures ont montré à travers une études menée en 2004 que c'est la principale préoccupation des agriculteurs au niveau national.

Dans cette étude, treize chambres départementales d'agriculture ont mené deux enquêtes auprès de 565 agriculteurs, d'une part, et de 140 agents de développement agricole, d'autre part ; l'objectif étant de hiérarchiser les préoccupations des agriculteurs et de préciser leurs attentes en matière de services afin de produire des méthodes et d'outils pour les conseillés et les agriculteurs pour faire face aux nouvelles exigences de la PAC.

Publiés en 2006, les résultats de cette enquête, qui a couvert la majeure partie du territoire national, confortent les remarques que j 'ai retenu à propos de la part des débouchés de leur production dans les principales attentes des agriculteurs recensées en zone maraîchère de Cergy.

Graphe 04 : La vente de leurs produits, principale inquiétude des agriculteurs français.

Charges opérationnelles

Organisation du travail

Qualité des produits

Transmission

Image du métier

Relations hum aines

Techniques

Organisation administrative

Foncier

Prix- débouchés

15%

10%

5%

0%

Orientation du système Temps de travail

Contrôles

Réglem entation

Trésorerie- endettement Charges de structure

Pérennité
Investissement

Source des données : Chambres d'agriculture (2003)

Devant la rareté de la clientèle de plus en plus ressentie sur les marchés, les agriculteurs deviennent très vulnérables à la concurrence que leur exercent les produits importés de l'étranger et qui saturent le marché avant même que les produits locaux soient mis en vente. Il n'hésitent pas d'exprimer le sentiment d'être sacrifiés au nom des échanges internationaux et de l'élargissement de l'Europe ; ainsi en mai 2005 certains agriculteurs que j 'ai rencontrés dans le Vexin français quelques j ours avant le référendum sur la constitution européenne, m'ont explicitement signifié à l'époque qu'ils sont à la base contre tout élargissement européen et par conséquent, ils voteront « Non » par crainte d'être envahi par des produits venant de l'Est ! Une année après, les agriculteurs de la zone maraîchère entretiennent les mêmes craintes vis-à-vis des produits étrangers en leur imputant leurs difficultés actuelles à écouler leurs propres produits. En réalité, et c'est ce que j 'ai compris à travers leurs arguments, la présence, elle-même, des produits étrangers sur les marchés locaux ne dérange pas les agriculteurs, en revanche, ce qui leur pose problème c'est de ne pas pouvoir les concurrencer notamment sur les prix ; l'une des principales explications de cette impuissance réside, selon ces agriculteurs, dans l'élévation excessive des charges en Ile de France plus qu'ailleurs ; la périurbanisation qui met les citadins géographiquement proche de l'agriculture expose cette activité au regard att entif des consommateurs, les agriculteurs doivent fournir plus d'efforts physiques et financier car en plus de la production proprement dite, ils doivent veiller à montrer une bonne image auprès des citadins. C'est une situation qui

devient de plus en plus contraignante tandis que les producteurs étrangers à la région continuent de travailler dans des conditions entièrement ignorées par les franciliens qui ne peuvent juger que l'état du produit final qui leur est proposé (d'ailleurs avec une qualité qui n'a rien à envier à celle des produits franciliens), « en plus de leurs prix bas, ils deviennent de plus en plus bons en terme de qualité, on parle d'Ile de France, énorme bassin de consommation, il ne faut pas croire, ce n 'est pas pour nos produits ! », reconnaît un agriculteur.

Si le retour des citadins sur les marchés forains demeure pour les agriculteurs le signal le plus significatif en faveur du maintien de leur activité en Ile de France, les tendances actuelles des franciliens à déserter les marchés continuent d'aller à l'encontre des attentes des producteurs (notamment maraîchers). Les raisons de ce désaccord qui sont liées, pour une grande partie, à l'ajustement des modes de consommation sur les modes de vie urbains, prennent des apparences multiples dans la société.

2.2.1.1. Les légumes attirent de moins en moins d'acheteurs :

La première explication au recul de la clientèle sur les marchés est donnée par la baisse de la part des légumes crus dans les achats des franciliens ; seul 2,53% des individus interrogés confirment s'approvisionner en légumes crus tous les jours, 8,86% d'entre eux les achètent moins d'une fois par semaine (soit parce qu'ils ne s'occupent pas des achats de légumes dans leur foyer, soit du fait qu'ils ne les achètent qu'occasionnellement).

Graphe 05 : Le nombre d'achats de légumes par semaine.

Au moins une fois (56,96%)

Moins d'une fois (8,86%)

Tous les
jours
(2,53%)

Au moins deux fois (16,46%)

Au moins trois fois (1 5, 19%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Ces attitudes vis-à-vis des légumes ne sont pas propres aux franciliens, elles sont les résultats de profondes vagues de changements qui ont secoué l'ensemble de la société française les quarante dernières années (Chambres d'agriculture, 2003). L'achat des légumes crus est en partie lié à la pratique de la cuisine dans les ménages, or, les couples cuisinent peu chez eux et le nombre de repas pris hors domicile est important (de l'ordre de trois par semaine) ; ils est plus élevé chez les cadres supérieurs, les jeunes de moins de 25 ans et les urbains, en revanche, les agriculteurs, les habitants des communes rurales et les français âgés de plus de 65 ans, ont une moyenne de consommation hors foyer très faible. Par ailleurs, l'augmentation du nombre de ménages en raison de décohabitations, divorces, individualisme qui s'est accompagnée par la diminution du nombre de personnes par foyer (3,2 personnes en 1960 et seulement 2,4 en 2000 avec 31% des ménages constitués d'une seule personne) est plutôt favorable aux repas hors domicile et à l'achat de plats préparés, les légumes frais trouvent peu d'acheteurs.

Même si les achats de légumes sont peu fréquents chez les franciliens, ils demeurent plus ou moins réguliers puisqu'ils confirment les acheter au moins une fois par semaine (56,96% des réponses). Cette régularité est intéressante à signaler car elle témoigne de la continuité d'un certain mode de vie (par exemple cuisiner chez soi) qui n'est pas totalement effacé par le rythme de vie urbaine : les changements du comportement de la société ne sont pas entièrement en contradiction avec l'existence d'une agriculture dans les milieux

périurbains et urbains, reste à cette activité d'adapter ses comportements et ses relations avec la ville en suivant ces nouveaux modes de vie.

2.2.1.2. Les marchés forains n'attirent plus les clients :

La baisse des clients sur les marchés forains s'explique aussi par la concurrence que leur exerce la grande distribution, les super et les hyper marchés sont majoritairement adoptés par les individus interrogés pour effectuer leurs achats de légumes (56,96% des réponses contre seulement 30,38% d'entres eux qui préfèrent encore les marchés). L'achat à la ferme ne séduit que peu de citadins (5,06% des réponses obtenues). Si l'on croise ces résultats, avec ceux obtenus concernant la fréquence d'achats de légumes, il ressort que non seulement les citadins n'achètent pas assez souvent les légumes, mais qu'ils préfèrent, davantage, les grandes surfaces lorsqu'ils souhaitent les acheter. La vente directe qui permet aux agriculteurs de mettre en valeur leur proximité urbaine (à la ferme et sur les marchés), n'attire que 35,44% des clients.

Graphe 06 : Les lieux d'approvisionnent en légumes.

Marchés forains (30,38%)

Chez les
agriculteurs
(5,06%)

Autres (7,59%)

Grandes surfaces (56,96%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Les raisons pour lesquelles les citadins sont peu attirés par les marchés forains sont multiples :

En tête des explications données, vient l'inaccessibilité des marchés forains qui concerne 31,6% des réponses obtenues. Elle s'explique soit par l'inexistence de marchés près

des circuits de déplacements habituels des franciliens (mauvaise répartition des marchés), soit par l'inadaptation des horaires et des journées de tenue des marchés qui coïncident le plus souvent avec les horaires de travail de la plupart des gens. Un grand nombre de clients est ainsi rendu non disponible sur les marchés à cause de leur inaccessibilité.

L'une des solutions avancées réside dans l'adaptation des horaires de tenue des marchés forains à celle de la clientèle ; ainsi le marché d'Anvers (20ème arrondissement de Paris) est désormais ouvert chaque vendredi entre 15h et 20h30 pour permettre aux retardataires de remplir leurs paniers. Comme celui-ci, cinq autres marchés d'après-midi ont été créés par la municipalité afin de répondre aux évolutions des modes de vie (Les échos, 2005).

En second lieu, ce sont les prix pratiqués jugés relativement plus élevés qui expliquent la faible attractivité des marchés forains (21,52% des réponses). Enfin, la carence en gammes de produits proposés dissuade 17,72% des personnes interrogées de se rendre sur les marchés, suivi du sentiment que les produits vendus sont de mauvaise qualité (8,36% des réponses). Toutefois, 5,06% des individus interrogés trouvent que de simples raisons personnelles empêchent les gens de se rendre sur les marchés forains, tandis que 15,19% des individus interrogés n'ont aucune explication précise à la baisse des clients sur les marchés forains.

Graphe 07 : Les marchés victimes de leur inaccessibilité.

Raisons personnelles

Pas de contraintes
précises

Produits de mauvaise
qualité

Marchés moins
accessibles

40

30

20

10

0

Produits trop chers

Manque de produits

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

2.2.2. La clé du déblocage : un rôle actif pour les agriculteurs :

Dans l'ensemble de leurs démarches vers la reconquête des citadins, les agriculteurs tiennent un rôle central en intervenant d'une façon active car ils sont initiateurs puis porteurs de leurs stratégies qui ne deviennent efficaces que lorsqu'elles sont construites sur des bases complémentaires entre elles et préalablement réfléchies à s'exécuter simultanément.

2.2.2.1. Tenir compte des attentes des citadins :

Afin de reconquérir les franciliens, les stratégies à mettre en oeuvre par les agriculteurs doivent tenir compte des opinions des citadins sur l'activité agricole. L'efficacité de telles stratégies dépend en grande partie de leur capacité à détecter dans des délais raisonnables les principales attentes de la société. Elles supposent un suivi continuel de l'évolution des attentes de la société qui interpelle l'agriculture pour plusieurs de ses composantes.

2.2.2.1.1. Envers les produits agricoles : des légumes frais à des prix abordables :

Les critères de sélection des légumes adoptés par les citadins traduisent indirectement ce que ces derniers attendent recevoir des agriculteurs ; Ainsi, le classement des trois premiers critères de choix de légumes permet de hiérarchiser ces demandes selon leur importance pour les citadins. Les résultats obtenus montrent que la plupart des personnes interrogées sélectionnent leurs légumes d'abord pour leur fraîcheur puis leur prix et sans aucun autre critère.

Graphe 08 : La fraîcheur, premier critère de sélection des légumes.

La qualité d'accueil

Aucun critère

La présentation

L'origine géographique

40

60

20

0

Le prix

Les conditions de production

La fraîcheur

1 er Critère 2ème Critère 3ème Critère

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Ces résultats ouvrent une voie à la construction de la stratégie que doivent mener les agriculteurs pour reconquérir la clientèle francilienne. En effet, la fraîcheur des produits (qui évoque aussi leur qualité organoleptique puisque c'est essentiellement d'une façon visuelle, voire au toucher, que les clients évaluent la fraîcheur des légumes), est facilement maîtrisable par les agriculteurs franciliens qui possèdent un ensemble d'atouts favorables (savoir faire, proximité des marchés, conseils...).

Pour contribuer à l'élaboration de cette stratégie, j 'ai souhaité éclairer les agriculteurs sur certains préalables à prendre en compte, comme par exemple l'analyse des comportements les plus probables que les clients sont susceptibles d'adopter lors de leurs achats de légumes. Afin d'atteindre mon objectif, j'ai effectué, dans un premier temps, des regroupements au sein des trois premiers critères de sélection des légumes qui m'ont été exprimés par les personnes interrogées. Les deux critères « présentation des produits » et « accueil du vendeur ou de la vendeuse » ont été regroupés sous un seul critère : de marketing. Par ailleurs, deux autres critères « conditions de production » et « origine géographique » ont constitué à leur tour un seul critère : de production ; « la fraîcheur », « le prix » et « aucun critère », sont maintenus en tant que trois critères à part entière.

Une seconde étape de cet exercice a été consacrée ensuite à la constitution des catégories de comportements par croisement des groupes de critères suivant touj ours les trois premiers critères de sélection de base exprimés par les enquêtés. Au terme de cette étape, cinq

catégories de comportement ainsi que leurs poids dans l'ensemble des comportements probables, ont été identifiés suivant un classement des groupes de critères retenus.

Graphe 09 : Les catégories de comportements des clients pour sélectionner les légumes.

Groupes de critères correspondants
(1 er-2ème-3ème)

Marketing - Production - Fraîcheur

Aucun - Marketing - Prix

Production - Aucun - Production

Prix - Fraîcheur - Marketing

Fraîcheur - Prix - Aucun

46%

4%

8%

17%

25%

0% 10% 20% 30% 40% 50% Part dans les com portements probables (%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Les résultats de ces regroupements montrent qu'il est plus judicieux d'adopter des stratégies qui mettent en valeur la fraîcheur des légumes puis de faire des efforts sur les prix si les agriculteurs souhaitent exercer une attraction vis-à-vis des clients étant donné que ces derniers auront tendance à 46% à sélectionner les légumes d'abord pour leur fraîcheur puis leur prix. Dans le cas où l'on souhaite plus d'efficacité à la démarche, les agriculteurs peuvent aussi faire des efforts de marketing, en soignant en plus de la fraîcheur et du prix des légumes, la présentation de ces derniers (emballage pratique, visibilité sur les marchés...) mais aussi l'accueil que réserve la personne vendeuse aux clients qui assure 25% de chances supplémentaires à la réus site de leur stratégie ; pour y parvenir, un énorme travail commercial s'impose pour mettre le maximum d'avantages du côté des agriculteurs franciliens dans leur reconquête des clients.

Par ailleurs, l'effort des agriculteurs aussi indispensable qu'il soit n'est cependant pas suffisant s'il n'est pas accompagné du concours des populations ciblées ; aujourd'hui, le consentement des citadins et des agriculteurs et la convergence de leurs motivations vers les mêmes objectifs sont deux préalables à l'aboutissement de tout projet conjointement défini par ces deux partenaires.

2.2.2.1.2. Envers l'espace agricole :

Les définitions que proposent les citadins pour l'espace agricole renvoient implicitement à ce que ces derniers attendent de ce type d'espaces, elles traduisent aussi l'image que les citadins perçoivent ou conçoivent de l'agriculture des milieux urbains et périurbains.

Les résultats obtenus montrent que 27,85% des personnes interrogées n'ont choisi aucune des définitions proposées, contre 72,15% qui ont choisi au moins une définition. Les personnes qui ont répondu considèrent l'espace agricole d'abord comme espace vert puis en tant qu'espace de production agricole.

Graphe 10 : La définition de l'espace agricole périurbain d'après les citadins.

Aucun avis (27,85%)

Vert (25,32%)

Rural (3,80%)

De détente
(5,06%)

Vide (6,33%)

De production
(22,78%)

Urbain (8,86%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Ces réponses montrent que les citadins recherchent plus la capacité de l'espace agricole à constituer un espace vert (25,32% des réponses), avec toutefois, la persistance à grandeur presque égale de sa capacité nourricière ; celle-ci ne s'élimine donc pas avec l'apparition de nouvelles attentes de la société. Une part importante des citadins continue de considérer l'espace agricole comme un espace de production (22,78% des réponses).

La prise en compte des attentes des citadins doit être accompagnée par un travail de communication envers toute la société ; au-delà de la simple satisfaction des demandes des citadins, les agriculteurs doivent explorer toutes les voies les conduisant à consolider l'estime que leur porte déjà la société.

2.2.2.2. Renforcer l'image de l'agriculture au sein de la société :

L'une des principales voies sur lesquelles doivent s'engager les agriculteurs est l'entretien d'une image positive de leur activité auprès de la société ; ils doivent sans complexes communiquer sur les points positifs qu'ils peuvent apporter à la population d'Ile de France.

2.2.2.2.1. L'agriculture : une activité capable de satisfaire les attentes de la société :

Un des points forts que l'agriculture doit consolider pour renforcer son image auprès des citadins, résulte de sa capacité à satisfaire les besoins de la société francilienne que celleci lui reconnaît déjà largement. Cette question de la satisfaction des besoins de la société par les agriculteurs, passionne la plupart des individus interrogés : 79,77% d'entre eux ont voulu y répondre contre 20,23% qui n'ont pas souhaité s'exprimer car ils n'ont pas d'avis précis sur le sujet.

Parmi ceux qui ont répondu, près de deux tiers pensent que les agriculteurs répondent bien aux besoins de la société (63,29% des réponses). En revanche, 16,46% estiment que, pour plusieurs motifs, les agriculteurs ne répondent pas aux attentes de la société, les raisons évoquées peuvent être regroupées en deux catégories :

Le premier groupe affiche un sentiment selon lequel les agriculteurs ont fait délibérément le choix de ne pas satisfaire ces attentes, les personnes interrogées estiment que les agriculteurs ne tiennent pas suffisamment compte de l'environnement et des risques sanitaires qui entourent leur travail, ils ne fournissent pas assez de produits de qualité (sans utilisation d'intrants chimiques tel les produits bio). Par ailleurs, ces personnes n'hésitent pas à imputer l'élévation des prix des légumes aux producteurs agricoles.

La deuxième catégorie de réponses, qui traduit touj ours un sentiment d'insatisfaction vis-à-vis du travail des agriculteurs, justifie cette fois-ci leur incapacité de répondre aux besoins de la société même s'ils veulent parfois le faire, les arguments avancés pour ce type de réponses s'articulent autour du fait que les producteurs ne sont plus en mesure de décider de leur façons de travailler vis-à-vis de la société puisqu'ils sont eux-mêmes sous l'influence des institutions, notamment européennes, et des grands groupes agroalimentaires, parmi ces explications qui placent les agriculteurs plutôt en victimes de tout un système, il ressort néanmoins un type d'arguments plus distingués qui stipule que si les agriculteurs ne peuvent

plus répondre aux besoins de la société, c'est parce que cette dernière est de plus en plus exigeante à leur égard et que, dans tous les cas, il est impossible de la satisfaire.

Il faut rappeler que même lorsqu'ils n'ont aucun contact avec des agriculteurs, les personnes interrogées pensent à 22,78% que ces derniers répondent biens aux attentes de la société, toutefois ce taux peut atteindre sa valeur maximale de 40,51% des réponses lorsque, d'une façon ou d'une autre, les personnes interrogées ont déjà rencontré des agriculteurs ; les personnes qui n'ont aucun contact avec les agriculteurs et qui pensent malgré tout que ces derniers ne répondent pas aux besoins de la société sont très minoritaires, ils ne constituent que 5,06% de l'ensemble des personnes interrogées.

2.2.2.2.2. Redéfinir le métier d'agriculteur par ses points positifs :

La plupart des personnes interrogées jugent le travail des agriculteurs difficile (87,34% des réponses). Cette difficulté est argumentée le plus souvent par la quantité de travail que doivent fournir les agriculteurs et sa pénibilité suite au travail physique nécessaire, il s'ajoute à cela les forts investissements et la subordination aux aléas climatiques et économiques du moment.

Graphe 11 : L'appréciation du travail agricole par les citadins.

Difficile (87,34%)

Facile (12,66%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Un croisement des résultats obtenus concernant l'état du contact des personnes interrogées avec les agriculteurs, et ceux obtenus concernant leur appréciation du travail agricole, montre une surreprésentation des citadins qui ont un contact avec les agriculteurs et

qui considèrent le travail de ces derniers difficile (56,96% des réponses), et une sous représentation de ceux n'ayant aucun contact avec les agriculteurs et qui considèrent le travail agricole facile (5,06% des réponses). Par ailleurs, les citadins qui considèrent le travail agricole difficile, même s'ils n'aient aucun contact avec les agriculteurs, sont beaucoup plus nombreux que ceux qui ont un contact avec les agriculteurs et qui considèrent leur travail facile, leurs effectifs sont respectivement de 30,38% et 7,59% des réponses obtenues.

Graphe 12 : L'état du contact des personnes interrogées avec les agriculteurs.

Prés ence
de
contact
(64,56%)

Absence
de
contact
(35,44%)

Source : Travail de terrain (Mai 2006)

Le contact avec des agriculteurs s'effectue soit à travers des membres de la famille qui, dans certains cas, sont agriculteurs, soit lors des vacances plus ou moins régulières en campagne, ou par voisinage sur les lieux d'habitation (notamment pour les habitants de Cergy village) voire par de simples contacts client - vendeur sur les marchés forains.

Bien que ces contacts demeurent, pour la plupart des citadins, moins réguliers voire occasionnels, ils permettent néanmoins des échanges entre les deux mondes qui, même lorsqu'ils ne s'inscrivent pas dans la durée, témoignent de la persistance du cordon ombilical reliant l'agriculture à la société urbaine.

Quelles que soit leur intensité, il est important de maintenir ces échanges, voire de les encourager, puisqu'ils rendent possible l'établissement des bases d'une communication agriculteurs - citadins en milieu urbain et périurbain. Par ailleurs, même lorsqu'ils ne débouchent pas sur de véritables projets communs, ils permettent au moins aux agriculteurs de confronter la réalité de leur travail avec les attentes des citadins, et à ces derniers de se

faire une opinion (la plus précise) sur l'agriculture en général et les efforts des agriculteurs en particulier.

2.2.2.3. Convaincre les citadins de maintenir l' agriculture francilienne :

Bien que les personnes interrogées semblent à 64,56% avoir des contacts avec des agriculteurs et pensent à 63,29% que ces derniers répondent biens aux besoins de la société, ils ne sont que 40,51%, parmi les 53,16% qui ont souhaité s'exprimer sur la question, à penser qu'il est possible de maintenir une agriculture en Ile de France, 12,66% pensent que ce maintien n'est pas possible (ce qui est proche des 16,46% des personnes interrogées qui estiment que l'agriculture n'est pas en adéquation avec les attentes de la société).

Le contact agriculteurs - citadins qui permet au moins d'établir une certaine reconnaissance et une compassion envers les agriculteurs pour leurs sacrifices fournis, n'est pas pour autant suffisant pour convaincre les franciliens de penser, voire de souhaiter, le maintien de l'agriculture en Ile de France ; en effet, parmi ceux qui pensent qu'il n'est plus possible de maintenir cette activité, certains souhaitent même sa disparition du territoire régional ! Ils argumentent leurs points de vue par le fait que la proximité urbaine de l'agriculture francilienne est favorable à l'exposition directe des cultures légumières aux différents polluants d'origine urbaine, pour ces gens, « les légumes produits par l 'agriculture francilienne pourraient constituer des vecteurs potentiels pour les multiples polluants urbains qui sont susceptibles de porter dangereusement atteinte à la santé de leurs consommateurs ». Pour ces citadins la proximité urbaine de l'agriculture est considérée comme négative, voire néfaste, pour l'image de cette activité en Ile de France, par ailleurs, on peut comprendre à travers ces craintes d'ordres sanitaires, qu'une partie des citadins n'attendent aucune satisfaction particulière de la part des agriculteurs, puisque ils sont conscients de l'incapacité de ces derniers à répondre à leurs préoccupations : ils les invitent donc simplement à quitter les espaces urbains et périurbains les plus proches des villes.

Le deuxième argument que j 'ai recensé auprès des détracteurs du maintien de l'agriculture en Ile de France résulte plutôt d'une préoccupation sociale, l'agriculture francilienne est perçue ici comme une activité immobilisante de vastes espaces régionaux au moment où la crise du logement atteint son paroxysme, pour les défenseurs de cet argument, « l 'agriculture est incompatible avec les besoins de la société en terme d 'habitations, il est donc souhaitable que

celle - ci libère le plus d'espaces possible pour que la construction de logements soit en adéquation avec les besoins de la société régionale ».

Face à ces arguments qui reflètent l'émergence d'un souhait de la disparition de l'agriculture de l'Ile de France, car elle n'est plus compatible avec les attentes actuelles de la société, les partisans de son maintien expliquent leur points de vue par le fait que « c 'est grâce à cette agriculture que les gens arrivent à se nourrir, ont doit donc la maintenir quels que soient les coûts ».

Cet argument qui revient le plus souvent (hormis chez ceux qui souhaitent le maintien de cette agriculture sans vouloir argumenter leur choix), affirme la place prépondérante que conserve la fonction « nourricière » de l'agriculture, même si elle génère aussi d'autres satisfactions (ici fourniture d'espaces verts) en milieux urbains. Par ailleurs, la coexistence de ces « multi attentes » des citadins envers l'agriculture, met en évidence la non substitution des fonctions de cette activité entre elles : l'apparition de nouvelles attentes vis-à-vis de l'agriculture ne produit donc pas la disparition des demandes traditionnellement émises à l'égards de cette activité, une partie assez importante de la société continue avant tout d'espérer de l'agriculture qu'elle lui produit sa nourriture.

Le désir de maintenir une agriculture en Ile de France qui émane de la société francilienne, annonce la mise en place progressive de nouveaux rapports ville - campagne basés sur la protection et le maintien de cette activité dans les milieux urbains et périurbains.

Aujourd'hui, scientifiques, élus, responsables, ou simples citoyens affichent tous une volonté de participer à ce maintien selon les intérêts que leur procurent leurs fonctions respectives au sein de la société. Force est de constater que des problématiques socioéconomiques sont toutefois susceptibles de faire émerger des accusations envers cette activité en milieu périurbain puisqu'elle est perçue en concurrence avec les besoins les plus urgents des populations (logement par exemple), ces populations ne peuvent pas souhaiter son maintien. Il faut donc essayer de comprendre davantage leurs motivations afin de trouver des solutions concertées car même si leur avis est pour le moment plutôt opposé au consensus qui s'est installé pour le maintien de cette activité, il reflète néanmoins une autre vision de la problématique de l'agriculture en Ile de France qui met en évidence l'interférence des problèmes sociaux urbains avec l'agriculture qu'il faut prendre en compte. En effet, si le maintien de cette agriculture paraît aujourd'hui comme une évidence pour les chercheurs, les élus et les responsables, le simple citoyen est loin d'être convaincu puisqu'il n'y voit pas d'intérêt particulier l'encourageant à fournir d'efforts supplémentaire que cela exigerait. L'enjeu pour l'agriculture est de convaincre l'ensemble des citadins sur les multiples services

qu'elle est encore susceptible de leur procurer afin de gagner leur adhésion aux projets de son maintien : elle doit se montrer utile pour les citoyens comme elle l'a fait auparavant pour les chercheurs, les élus et les aménageurs.

Conclusion :

Les rapports ville campagne en Ile de France sont en voie de recomposition. Celle -ci s'effectue essentiellement autour de la reconsidération de l'agriculture qui continue avec les forêts d'occuper et de gérer 76% du territoire régional au moment où les franciliens perçoivent encore leur région très fortement urbanisée (Poulot et Rouyres, 2005). L'éloignement progressif du monde agricole est caractéristique des sociétés dont les modes de vie sont de plus en plus urbains. Cet éloignement va à contre courant de l'essor de la périurbanisation qui par définition met géographiquement les citadins touj ours plus proches des espaces agricoles.

L'exemple de la zone maraîchère de Cergy montre que même dans les cas extrêmes où l'agriculture se trouve entièrement contenue dans l'espace urbain, ses échanges avec la ville qui l'entoure peuvent s'avérés faibles voire même inexistants. Ainsi, le maintien de l'espace agricole péri ou intra urbain ne suffit - il pas pour maintenir l'agriculture qui ne peut exister durablement dans ces milieux que par son aptitude à développer des liens fonctionnels avec la ville. Des facteurs historiques, sociaux et économiques définis localement pour l'espace urbain concerné, influencent considérablement la mise en place de ces liens.

La participation des agriculteurs à la construction de l'espace urbain de départ est déterminante puisqu'elle pose des préalables à l'entente ville - agriculture facilitant l'intégration de cette activité dans les projets urbains le moment venu ; ainsi, l'exclusion des agriculteurs dans et par le projet de la ville nouvelle de Cergy Pontoise explique le climat de méfiance qui persiste entre l'agriculture et l'agglomération actuelle vouant à l'échec toute tentative de réintégration urbaine de cette activité au sein de la ville. Par ailleurs, les caractéristiques sociales de l'espace urbain en contact direct avec l'agriculture dicte des modalités de la mise en place de ces liens, elles peuvent soit constituer un inconvénient majeur ou au contraire le moteur principal des rapports fonctionnels ville - agriculture ; compte tenu des charges plus importantes dans les milieux urbains et périurbains, les produits agricoles proposés à des prix élevés sont en inadéquation avec les attentes des populations qui ont une moindre capacité économique à les rémunérer : les agriculteurs de la zone maraîchère

préfèrent ainsi parcourir des distances plus importantes pour se rapprocher de Paris afin d'écouler leur production, les marchés de l'agglomération sont abandonnés car fréquentés par les populations à faibles revenus installées avec la ville nouvelle. Parce qu'elle a su s'adapter même aux budgets les plus modestes, la grande distribution assure désormais le ravitaillement de cette population en produits agricoles, la concurrence des prix qu'elle exerce avec les revendeurs sur les marchés forains de l'agglomération réduit les chances de l'agriculture à réinvestir ces marchés.

L'analyse des tentatives de réintégration de l'agriculture en ville nouvelle de Cergy Pontoise met en évidence l'importance de la cohérence des objectifs des projets urbains en oeuvre avec les stratégies de l'agriculture concernée : tandis que l'agglomération réclame avant tout à l'agriculture qu'elle lui préserve un cadre de vie à travers l'entretien et la gestion de l'espace considéré comme vert, et plus récemment, de participer à la constitution d'une identité patrimoniale pour la ville, l'agriculture de la zone maraîchère souhaite plutôt pouvoir vendre ses productions à des citadins de moins en moins intéressés par les marchés forains.

La réintégration urbaine de l'agriculture est possible, reste à définir les modalités et les voies de sa mise en place. Dans l'attente de la rémunération de ses nouvelles fonctions, la consolidation de son rôle nourricier reste un moyen efficace puisque c'est dans ce dernier que se reconnaît encore l'agriculture : la reconversion des agriculteurs en jardiniers est à la fois refusée par plusieurs chercheurs et par les agriculteurs eux-mêmes. Les stratégies visant la reconquête des marchés urbains sont à encourager, toutefois, elles requièrent le maintien de la clientèle citadine sur ces marchés. De ce fait, les agriculteurs doivent s'activer dans cette voie en explorant toutes les opportunités y compris celles qui relèvent du marketing et de la communication ; ils doivent adapter leurs politiques de production et de commercialisation aux populations ciblées.

Compte tenu de la nature des interactions de l'agriculture avec les sociétés des milieux urbains et périurbains (difficultés de circulation, vols et dégradations, vente directe des productions) il est plus raisonnable de favoriser les relations de l'agriculture avec la population citadine de ses voisinages immédiats cars c'est avec elle que cette activité partage la gestion de son espace ; les stratégies à adopter doivent ainsi tenir compte des caractéristiques de chaque espace urbain concerné par l'agriculture en question. Même si l'on se permet encore d'évoquer l'espace périurbain lui reconnaissant une certaine homogénéité, les stratégies de maintien de l'agriculture dans ces espaces ne deviennent efficaces que si elles sont définies à partir des données propres à chaque contexte : les agricultures périurbaines qui soulèvent des problématiques adaptées à chaque situation, doivent être considérées à une

échelle plus locale sans, pour autant, exclure les analyses globales à des niveaux d'observation plus élevés.

Lorsque ces stratégies sont réfléchies dans le sens de maintenir l'activité agricole viable à travers le rétablissement de ses liens avec la ville, elles deviennent durables notamment dans le cas où l'agriculture se trouve déjà urbaine par sa localisation : étant déjà très sollicitée par de multiples usages urbains (expression, sports, promenades), l'agriculture doit accélérer son intégration en ville afin d'éviter qu'elle reste en décalage avec la forte assimilation de son espace par les populations urbaines. Elle peut commencer par s'engager dans des voies de son rapprochement avec les citadins, celles -ci s'effectuent principalement par la considération de leurs attentes ainsi que par la consolidation de son image auprès de la société urbaine.

Liste des illustrations :

Figures :

Figure 01 : Le périmètre de la ceinture verte de la région d'Ile de France 12

Figure 02 : La zone maraîchère de Cergy : un espace agricole urbain 20

Figure 03 : Le centre de la ville nouvelle de Cergy Pontoise en 1999 22

Figure 04 : La zone maraîchère de Cergy : un espace fortement convoité 36

Figure 05 : Les rotations sur une exploitation agricole de type A 40

Graphes :

Graphe 01 : Les catégories d'âge des personnes interrogées 08

Graphe 02 : La répartition de l'urbanisation francilienne (1982 /1999) 15

Graphe 03 : La part de l'agriculture dans l'espace ouvert à Cergy 30

Graphe 04 : La vente de leurs produits, principale inquiétude des agriculteurs français 64

Graphe 05 : Le nombre d'achats de légumes par semaine 66

Graphe 06 : Les lieux d'approvisionnent en légumes 67

Graphe 07 : Les marchés victimes de leur inaccessibilité 68

Graphe 08 : La fraîcheur, premier critère de sélection des légumes 70

Graphe 09 : Les catégories de comportements des clients pour sélectionner les légumes 71

Graphe 10 : La définition de l'espace agricole périurbain d'après les citadins 72

Graphe 11 : L'appréciation du travail agricole par les citadins 74

Graphe 12 : L'état du contact des personnes interrogées avec les agriculteurs 75

Photos :

Photo 01 : Le site de la ville nouvelle avant l'urbanisation (photo non datée) 22

Photo 02 : L'emprise au sol des poteaux électriques sur les parcelles cultivées 33

Photo 03 : La zone maraîchère de Cergy, un espace habité 34

Photo 04 : Décharge sauvage en zone maraîchère de Cergy 35

Photo 05 : Revente de fruits et légumes sur le marché de Cergy Saint Christophe 50

Photo 06 : Des plaques pour protéger l'agriculture en zone maraîchère de Cergy 52

Photo 07 : Des serres taguées en zone maraîchère de Cergy 58

Tableaux :

Tableau 01: Les espaces ouverts au public par le projet de la ceinture verte (jusqu'en 1990) 13

Tableau 02: Les espaces agricoles et forestières en Ile de France avant la ceinture verte 13

Tableau 03: Les dix projets agri - urbains de l'Ile de France 18

Tableau 04: L'état du foncier agricole de la zone maraîchère de Cergy (juin 2006) 38

Tableau 05: La main d'oeuvre salariée sur une exploitation de 9 ha « type A » 39

Tableau 06: Comparaison entre deux exemples d'exploitations (type A et type B) 42

Tableau 07: Les marchés forains de l'agglomération de Cergy Pontoise 49

Tableau 08: La composition de la main d'oeuvre salariale à Cergy Pontoise 50

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Annexes :

1. Questionnaire destiné aux agriculteurs

2. Questionnaire destiné aux citadins

Questionnaire destiné aux agriculteurs :

Questionnaire N° : / / Réalisé le : / ____/ ____/ _____/

Commune de : / /

1- Vous êtes : Un homme Une femme

2- Votre âge (année de naissance) : / /

3- Vous êtes exploitant(e) agricole depuis au moins :

5 ans 10 ans 20 ans

Plus de 20 ans

Moins de 5 ans

4- Vous êtes actuellement en :

EARL GAEC CUMA Autre :

5- Vous exploitez des parcelles sur les communes de :

6- Actuellement la superficie totale de votre exploitation est de : / / Ha,
Dont l'essentiel est localisé:

En zone maraîchère, Nombre de parcelles: / /

Hors zone maraîchère, Commune(s) de: / /

7- Depuis le début de votre activité agricole, votre superficie totale : A augmenté suit à :

A diminué suit à :

N'a pas changé

8- Votre principale production est :

Les grandes cultures:

Le maraîchage, essentiellement de : .

Autres :

9- Sur votre exploitation, vous pratiquez également : De la céréaliculture

Du maraîchage

De l'élevage

De l'horticulture

De l'arboriculture

Autres cultures, élevage :

10- Quelles sont les cultures que vous pratiquez cette année : En zone maraîchère :

 
 

C1

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C2

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C3

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C4

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

 

Hors zone maraîchère :

 
 
 

C1

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C2

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C3

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

C4

 

Surface (ha), nombre de parcelles :

/

/

Autres :

11- Dans votre exploitation réalisez-vous des opérations :

D'emballage

De conservation

De transformation

Autres :

12- Avez-vous un label ou autres signes de qualité ? Oui Non

Si oui le(s) quel(s)?

13- Sur votre exploitation, engagez- vous des ouvriers : Oui Non

Si oui, sont-ils :

Permanents

Saisonniers pour les mois de :

Autre :

14- Quelle est pour vous la part de ces modes de commercialisation: Vente à la ferme / /

Les marchés / /

Rungis / /

Autres :

15- Vos principaux clients sont : Des particuliers Des Industries Agro-alimentaire

Des coopératives Des revendeurs

Des enseignes de distribution, lesquelles :

Autres :

16- Ils sont essentiellement localisés:

Sur votre commune

Dans la ville nouvelle de Cergy Pontoise

En Ile de France

Hors Ile de France

Autre :

17- Négociez - vous avec vos clients ?

Oui Non

Si oui, vous leur demandez :

De rémunérer la qualité de vos produits à des prix élevés

D'acheter plus en quantité

De valoriser vos produits (publicité, rencontre avec les consommateurs....) Autres:

18- Vos clients vous réclament :

Des efforts sur la qualité

De diversifier vos produits

De baisser les prix

Autres :

19- Exercez-vous d'autres activités sur votre exploitation ? Oui Non

Si oui lesquelles ?

Restauration depuis :

Chambres d'hôte depuis :

Accueil de groupes depuis :

Autres :

20- Est-ce que l'agriculture est votre seule activité ? Oui Non

Si non quelle est votre deuxième activité ?

Industrie, veuillez préciser votre métier:

Commerce, veuillez préciser votre métier: .

Artisanat, veuillez préciser votre métier:

Transport, veuillez préciser votre métier:

Autres métiers: .

21- Etes-vous en contact avec d'autres agriculteurs de la région ?

Oui Non

Si oui dans quel cadre ? Et pour quel objectif ?

Association pour

Coopérative pour .

Syndicat pour

Cercle pour

Rencontre à l'occasion de

Autres :

22- La proximité de la ville est pour vous :

Un avantage

Un inconvénient

Sans effets

Pouvez- vous nous dire pourquoi ?

23- Selon vous, Que faut - il faire pour maintenir l'agriculture en Ile de France ?

Que doivent faire les citadins?

Que doivent faire les agriculteurs ?

24- Avez - vous autres choses à ajouter ?

MERCI DE VOTRE PARTICIPATION

Questionnaire destiné aux citadins :

Questionnaire N° : / / Réalisé le : / ____/ ____/ _____/

Commune de : / / Quartier de : / /

1- Vous êtes : Un homme Une femme

2- Votre âge (année de naissance): / /

3- Vous habitez : La commune de / /, quartier de / /, depuis / /

4- Votre secteur d'activité est : Le tourisme, précisez le poste : Le commerce, précisez le poste : L'industrie, précisez le poste : Le transport, précisez le poste : Autres précisez:

5- Par semaine, vous achetez des légumes au moins

Trois fois Deux fois Une fois Tous les jours
Autres précisez:

6- Vous les achetez habituellement :

Directement chez les agriculteurs situés à : Sur le(s) marché(s) situé(s) à:
Dans une grande surface qui est:

Autres précisez :

7- Selon vous, pourquoi les gens n'achètent pas souvent leurs légumes sur les marchés forains ?

8- Lorsque vous achetez vos légumes, vous les sélectionnez selon d'abords (faites un classement) :

Leur provenance géographique

Leurs conditions de production

Leur fraîcheur

Leur prix

Leur présentation (emballage pratique, légumes bien nettoyés et sains...) La qualité d'accueil du vendeur (ou de la vendeuse)

Aucun critère

Autres

précisez :

...

9- Avez - vous déjà rencontrer des agriculteurs ? Oui Non

Si Oui

A quel endroit:

A quelle occasion:

Combien de fois:

Autres précisez:

10- Pour vous, le métier d'agriculteur est : Difficile

Facile

Autres précisez:

Pourriez - vous nous dire pourquoi ?:

11- Pensez - vous que les agriculteurs répondent bien aux besoins de la société ? Oui Non

Pourriez - vous nous dire pourquoi ?:

12- Pour vous, l'espace agricole à Cergy est d'abord?

Un espace vide

Un espace vert

Un espace de détente

Un espace de production agricole

Un espace urbain

Un espace rural

Autres précisez: Pourquoi?

13- Pensez - vous, qu'il est possible de maintenir une agriculture en île de France? Ne sais pas

Non, pourquoi ?:

Oui, comment?:

14-Avez - vous autres choses à ajouter ?:

MERCI DE VOTRE PARTICIPATION






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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault