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Effets et remise en cause des RTT en hôtellerie restauration

( Télécharger le fichier original )
par Anthony Durand
Université de Perpignan, Institut Jacques Maillot - Master 2006
  

Disponible en mode multipage

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SOMMAIRE

INTRODUCTION p.5

I / LA REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL p.6

A/ DEFINITION  p.6

1) La loi p.6

2) Le problème de la diversité des entreprises hôtelières p.6

3) Contraintes et possibilités des RTT pour différentes entreprises p.9

B/ HISTORIQUE DES LOIS ET ACCORDS DE REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL  p.10

C/ LES CONDITIONS PARTICULIERES D'APPLICATION DES RTT DANS LE SECTEUR DE L'HOTELLERIE RESTAURATION  p.13

1) Le contenu de l'accord sur les RTT des Hôtels Cafés Restaurants (HCR)

du 15 Juin 2001  p.14

2) Les conditions juridiques de l'application de l'accord p.15

3) Le Plan d'accompagnement de l'accord HCR  p.17

II/ LES EFFETS POTENTIELS DES REDUCTIONS DU TEMPS DE TRAVAIL  p.18

A) UN BOULEVERSEMENT POUR LES ENTREPRISES p.19

1) Les RTT : une relance du dialogue social dans l'entreprise ? p.19

2) les coûts induits par les RTT et les problèmes de compétitivité des entreprises  p.20

B) DEUX APPROCHES DIFFERENTES DE LA MISE EN PLACE DES RTT  p.21

1) Pour les grandes entreprises hôtelières : la transformation d'une contrainte en moteur de changement (ACCOR, ENVERGURE, HILTON .....)  p.21

2) Les 39 heures comme contrainte supplémentaire d'organisation : l'exemple des petites et moyennes entreprises d'hôtellerie restauration p.24

III / LES CONSÉQUENCES SOCIALES DES RTT : UNE FRANCE À PLUSIEURS VITESSES p.27

A) LES 35 HEURES IMPRÈGNENT LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE : LA FRANCE RYTHMÉE PAR LES RTT p.27 

B) LES 35 HEURES ONT-ELLES ACCENTUÉ LES TRAITS DE LA SOCIÉTÉ DE LOISIRS ? p.28

1) Développement de la société des loisirs : un phénomène ancien p.28

2) Les 35 heures ont accentué les inégalités p.29

C) LES RTT ONT RENFORCÉ LES LIGNES DE FRACTURE AU SEIN DU MONDE DU TRAVAIL  p.33

1) L'accentuation du clivage entre les salariés des PME et des grandes entreprises  p.33

2) Le renforcement des clivages entre les salariés au sein même de l'entreprise  p.34

3) Un problème important : l'évolution des rémunérations a été freinée p.36

4) Les 35 heure : une aubaine pour les femmes ? p.37

D) LES 35 HEURES GENERATRICE D'EXCLUSION ET DE REDUCTION DU LIEN SOCIAL  p.39

1) Les RTT facteur d'exclusion des salariés les moins performants  p.39

2) Les RTT facteur d'accroissement des clivages entre secteur public et secteur privé et entre bénéficiaires ou non bénéficiaires des RTT  p.39

IV/ REMISE EN CAUSES DES RTT p.40

A) LE DESASTRE ECONOMIQUE DES RTT  p.40

1) Dans de nombreux pays la durée de travail remonte  p.41

2) Doutes à l'origine, réflexes dirigistes ensuite  p.41

3) L'appréciation des chefs d'entreprise reste globalement négative  p.42

B) LES CONSEQUENCES SUR LES SALARIÉS  p.44

1) Le ralentissement ou le gèle des hausses de salaires  p.46

2) Les RTT sont égales à une montée du stress des salariés  p.47

3) Les Français les moins qualifiés pas satisfaits du passage aux RTT  p.47

4) Le constat d'une démotivation croissante  p.48

C) CONSEQUENCES SUR L'ECONOMIE DU PAYS  p.48

1) L'attractivité du territoire remise en cause  p.49

2) Des coûts exorbitants et des résultats faibles  p.50

3) Les RTT synonyme de régression sociale ? p.52

CONCLUSION p.55

ANNEXE 1 p.57

ANNEXE 2 p.61

ANNEXE 3 p.64

ANNEXE 4 p.66

BIBLIOGRAPHIE p.67

Remerciements

Tout d'abord, je tiens à remercier Madame Florence FERNANDEZ d'avoir accepté d'être ma Directrice de mémoire. Je la remercie tout particulièrement pour son aide, sa disponibilité ainsi que pour son écoute durant toute la durée de préparation de ce mémoire.

De plus, je tenais également à remercier Monsieur SCHEOU, pour le temps qu'il a su nous consacrer, afin de nous expliquer comment rédiger un mémoire. Et je le remercie aussi pour tous ses précieux conseils.

INTRODUCTION

Les RTT sont apparues à la fin du 20ème siècle remettre en question le temps de travail dans les sociétés modernes. Les réductions du temps de travail sont venues bouleverser une norme temporelle figée depuis 1936 sur un modèle issu de la société industrielle. Une nouvelle norme basée sur l'arythmie au moins autant que sur la quantité d'heures passées sur son lieu de travail, émerge et affaiblit le contrôle social du temps individuel par le poids de la norme collective. De ce point de vue, il est légitime de rapprocher les lois sur les RTT de celle de 1936 qui légalise les congés payés. Dans les deux cas, la législation vient organiser et généraliser une évolution des modes de vie. Elle donne des droits et restreint les inégalités. Elle induit de nouvelles égalités entre ceux qui avaient déjà accédé à des arrangements et ceux qui n'en bénéficiaient pas. Dans les 2 cas, même si aujourd'hui les nouvelles lois ont d'abord été votées pour aider à lutter contre le chômage, ceux qui en avaient eu l'idée, eux, partaient d'une vision très sociétale de la réforme.

Si la France est le seul pays où une telle loi a été votée, ce n'est pas le seul pays à se poser cette question. Chaque pays ayant sa propre culture, une loi européenne n'est toujours pas apparue. En France, les différentes lois votées pour parvenir aux réductions du temps de travail ont faits l'objet de nombreux débats, discussions tant pour leurs mise en oeuvres, leurs applications échelonnées que pour leurs effets sur le chômage....

Les RTT accélèrent et révèlent une mutation radicale de la société et de la place du travail dans notre vie et dans notre organisation sociale. En effets les loisirs, les vacances, la retraite le développement massif des transports en tout genre se sont révélés comme de puissant transformateurs de notre société, modifiant ainsi les pratiques sociale, les normes, les valeurs....

En outre, en matière de RTT, il n'existe pas de règles. Quelques heures de temps libre par semaine, une demi-journée, une journée tout les 15 jours ou une semaine de congès en plus, plusieurs systèmes cohabitent, parfois dans la même entreprise. Cependant, une constante fût observée : le gèle des salaires durant quelques années.

L'intérêt de ce mémoire est de s'intéresser, d'étudier et d'analyser les effets et les remises en causes des différentes lois sur la RTT et tout particulièrement dans le monde de l'hôtellerie restauration.

Comme nous avons pu le constater les lois sur les RTT ont fait et font encore beaucoup parler d'elles. En effet l'application de ses lois a commencé en 1997 et n'est pas encore tout à fait terminée aujourd'hui. Cette application a été préparée et appliquée non sans problème ; depuis le début certaines lois sont remise en cause, et de nouvelles apparaissent. Nous nous intéresserons tout particulièrement aux effets de la RTT ainsi qu'à sa remise en cause de plus en plus vive.

I / LA REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

A) DEFINITION :

Dans cette partie, nous nous intéresserons en premier temps à la loi Aubry qui a motivé les RTT et nous nous centrons un peu plus dans un deuxième temps sur les réalités propres au milieu de l'hôtellerie restauration.

1) La loi

Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, de nombreuses lois ont été adoptées en France afin de réduire le temps hebdomadaire de travail, la plus importante d'entre elles étant celle des 35 heures de Martine Aubry. Celle-ci a été adoptée afin de pallier à la hausse du chômage et contrer la politique de l'emploi. Le but des lois sur les RTT est de déclencher une hausse de l'embauche au sein des entreprises, mais la réduction du temps de travail suscite de nombreuses interrogations, comme par exemple :

· les effets sur l'emploi, les salaires, la productivité

· les impacts à long terme de la baisse du temps de travail sur le niveau du chômage

· en ce qui concerne les entreprises : est ce que les conditions de gains liés aux RTT sont supérieurs aux coûts qu'elle a pu engendrer ?

· l'amélioration de la qualité de vie des salariés compense t'elle d'éventuelles dégradations des conditions de travail ? ....

La réduction du temps de travail touche 3 acteurs qui ont des objectifs différents :

· L'Etat qui a pour objectif la diminution du chômage et la relance de l'emploi

· Les entreprises qui recherchent la flexibilité et la polyvalence de leurs salariés

· Les salariés qui ont une augmentation de leur temps libre mais pas de leur pouvoir d'achat

Dans sa configuration, le projet Aubry avait prévu un passage aux 35 heures au plus tard le 1er février 2000 pour les entreprises de plus de 20 salariés (art.1). Le projet de loi prévoyait que ce passage aux 35 heures serait négocié dans le cadre des branches et des entreprises (art.2).

Le passage aux 35 heures a été facilité par des aides de l'Etat dont la finalité était de favoriser l'emploi (art.3).

Les conditions d'obtention par les entreprises de ces aides étaient :

- appliquer une réduction de 10% de la durée du travail

- embaucher 6% d'effectifs supplémentaires,

- maintenir les effectifs constants pendant une durée minimale de 2 ans.

Le projet de loi Aubry offrait dans son article 4, la possibilité d'organiser la réduction du temps de travail sous forme de jours de repos pour toutes les heures effectuées au delà du quota légal.

Cependant, l'industrie hôtelière considère la loi inapplicable à son secteur d'activité ; la majorité des patrons voient d'un assez mauvais oeil ces réductions du temps de travail. Certains considèrent d'ailleurs ne pas être concernés par ces nouvelles dispositions.

Ils reprochent à cette loi d'une part de ne pas avoir de véritable corrélation entre la baisse du temps de travail et la baisse du chômage, mais surtout de ne pas tenir compte des horaires effectives actuelles de la profession. En effet, si comme le dit Alain Jacob, patron du cabinet de recrutement AJ Conseil en 2001, " le nombre d'heures est le facteur-clef d'enrichissement de l'entreprise et des employés de l'hôtellerie restauration ", il en est pas moins que les salariés travaillent en moyenne de 45 à 50 heures et qu'un passage aux 43 heures voir 39 heures paraîtrait déjà plus raisonnable !

Aussi, ils considèrent lourd de conséquence le remaniement du coût salarial : Gérard Fournier*, " nous n'avons rien chiffré parce que l'abaissement du temps de travail à 35 heures ne nous paraît pas viable dans nos professions. D'ailleurs, rien qu'en passant de 43 à 39 heures, la compensation du Smic augmenterait le taux horaire de 11.4%. Il nous faudrait alors trouver de la productivité, mais aussi augmenter de manière sensible nos prix affichés. Cela est impossible ! ".

Mais face à cet acharnement, on assiste à une véritable dualité du milieu : de plus en plus d'entreprises appliquent leurs propre conversions (souvent elles pratiquent les 39 ou 35 heures avec un système d'heures supplémentaires). Il s'agit le plus souvent de l'hôtellerie haut de gamme et de grosses unités parisiennes où les frais de personnel, on le sait, sont particulièrement élevés. Ils ont garantis un maintien des salaires et créé de nombreux postes. Ils représentent une réussite concluante de la mise en place de la loi et prouvent par leur expérience qu'une réorganisation partielle de la structure s'avère possible.

* Gérard Fournier : directeur de la politique social de chez ACCOR

2) Le problème de la diversité des entreprises hôtelières :

L'industrie hôtelière reste un domaine très vaste qui compte une multitude d'entreprises différentes, aux fonctionnements différents, aux structures variées, proposant des services multiples et divers... Selon son fonctionnement, chaque branche attend une réorganisation du temps de travail spécifique et propre à sa structure ainsi qu'a sa gestion : ceci débouche sur des accords de branche relatifs à la loi Aubry.

On trouve 3 grands types d'établissements en restauration :

- Les établissements gastronomiques

- Les établissements de collectivité

- Les établissements traditionnels

Les établissements gastronomiques ont pour spécificité d'avoir un ratio employé/client identique. Ici les heures ne se comptent pas et les semaines atteignent facilement 50 à 60 heures autant pour les cuisiniers que pour les serveurs. La rémunération connaît des écarts très importants : dans la même entreprise, un meilleur sommelier de France sera payé environ 2500 à 4000 € alors qu'un commis débarrasseur touchera juste le Smic. Cette disparité salariale et professionnelle rentabilise à peine une entreprise.

Les établissements de collectivité ont quand a eux une organisation méticuleuse des horaires s'apparentant aux entreprises classiques. Un minimum d'employés doit servir un maximum de couverts. Des salaires moyens sont repartis suivant la qualification de l'employé. Ce sont sûrement les seuls pour qui la RTT ne risque pas de poser de problèmes fondamentaux car elle dispose déjà d'une organisation stricte de son temps de travail.

Les établissements traditionnels sont composés en moyenne de 10 salariés. Basés sur une organisation classique voir familiale, les employés travaillent un maximum d'heures pour a peine rentabiliser l'entreprise. La polyvalence des employés est fréquente et leurs salaires sont bas. C'est pour ces entreprises que l'adaptation à la loi Aubry a été la plus dure et paraît encore difficile à appliquer aujourd'hui vu la diversité de ces établissements.

Toutes les modalités à négocier sont toutes fois les mêmes pour tous : la durée du travail, l'organisation du travail, la rémunération, les embauches, la sauvegarde des emplois. Mais elles ne sont pas réglées pour tous de la même manière.

3) Contraintes et possibilités des RTT dans le cadre des différentes entreprises :

Face à la diminution de la durée du travail, il est proposé 3 modes d'organisation :

· au quotidien, le passage de 39 à 35 heures correspond à une réduction de 48 minutes par jour (4h / 5j).

· hebdomadaire : réduction de 4 heures par semaine.

· annuel : le calcul de la réduction est réparti sur l'année. L'organisation au quotidien ou de façon hebdomadaire se justifie davantage pour des entreprises au régime régulier, de moyenne voir grande envergure où le roulement du personnel est plus aisé par leur nombre important.

Cependant, l'annualisation du temps de travail apparaît comme un réel changement et parfois une réponse pour des entreprises au régime saisonnier. L'annualisation ou la saisonnalité a pour objet de permettre à l'employeur de faire face aux variations de l'activité sans recourir aux heures supplémentaires en période de pointe ni au chômage partiel, lors des baisses d'activité. L'annualisation permet, en effet, une répartition irrégulière du temps de travail sur toute ou une partie de l'année. Dans les établissements saisonniers, elle se fera pendant la durée d'ouverture de l'établissement, si celle-ci est bien évidemment inférieure à 9 mois. Cette méthode permettra à l'employeur de ne pas payer d'heure supplémentaire en période de forte activité et de ne pas avoir en période creuse, recours au chômage partiel.

Concernent la rémunération, le sujet reste toujours épineux et en cours de négociation : se forçant de maintenir les salaires à valeur égale, quelques solutions ont été proposées. La meilleure solution serait une augmentation du taux horaire et non une indemnité compensatoire qui peut à terme disparaître et dont seraient exclus les nouveaux embauchés. On peut pense que ces derniers doivent être recrutés aux mêmes conditions que les salariés en place. Certains employeurs essaieront d'obtenir un gel total ou partiel des salaires pour les années à venir. D'une manière générale, il faut essayer d'obtenir le maintien du pouvoir d'achat, sachant que les aides de l'Etat à l'entreprise et les gains de productivité vont très vite amortir les coûts pour l'entreprise. Cette condition peut convenir à des entreprises moyennes mais elle reste trop risquée pour des établissements de prestige compte tenu du niveau déjà élevé des qualifications de ses employés et des charges salariales importantes. Dans ce cas la compensation du salaire peut se faire par le biais d'heures supplémentaires ou encore de congés augmentés.

Face aux problèmes de recrutement, Martine Aubry préconisa de faire 6% d'embauches pour 10% de RTT et 9% pour 15% de RTT. Cependant ce n'est pas évident dans la réalité : malgré l'aide de l'Etat, l'employeur essayera sûrement de réorganiser les différents postes de manière à éviter les lourdes charges d'un nouvel employé.

Malgré la loi Aubry, pour certains établissements, la réalité n'exclu donc pas la possibilité de licenciement ou de non recrutement...selon les possibilité de l'entreprise.

D'apparence simple et adaptable, la loi Aubry sur la RTT, ne l'est pas et promet beaucoup de complexité dans sa mise en oeuvre concrète. Comme nous le prouve certains établissements avant-gardistes sur ces nouvelles dispositions, la loi peut déboucher sur des fins positives et concluantes, mais pas sans leurre. Une adaptation spécifique et individuelle à chaque branche voir à chacun des établissements est nécessaire et incontournable pour mener à bien sa réalisation dans les règles de l'art. Séduisante par les valeurs sociales et économiques qu'elle soutient, la RTT ne pourra faire ses preuves dans le milieu hôtelier que si elle sait répondre à toutes ses contraintes. C'est à cet effort, que ce secteur d'activité, qui n'avait auparavant pas eut à subir les réductions antérieures au monde professionnel, doit se plier pour assurer la pérennité sociale et économique de ses hôteliers.

On pourra également se confronter à des nouveaux contrats précaires qui ne déboucheront jamais sur des CDI. Là encore, l'adaptation des lois sur le terrain est indispensable avec la prise en compte des aides financières. Si certains établissements en bonne santé peuvent recruter plus facilement, les petites structures devront réaménager les directives de chaque poste afin de les rendre plus productives pour un minimum de temps. La sauvegarde des employés est en général certaine, mais la structure hôtelière peut justement faire la demande de qualifications différentes qu'auparavant. Elle peut désormais avoir recours à un personnel plus spécialisé et plus efficace afin de rentabiliser cette réduction du temps de travail ou alors au contraire faire la demande d'un personnel plus polyvalent, sachant s'adapter plus rapidement à un certain nombre de tâches différentes. Cette proposition est envisageable dans les établissements dit traditionnels ou à petites structures qui ne disposent pas d'un régime régulier et- avantageux.

B/ HISTORIQUE DES LOIS ET ACCORDS DE REDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL :

Trois lois ont encadré la réduction du temps de travail jusqu'à 35 heures hebdomadaires, dans les entreprises, tout types d'activités confondues.

Si les deux premières lois, la loi du 11 juin 1996, dite Robien et la loi du 13 janvier 1998, dite Aubry I, n'étaient qu'incitatives, la loi du 19 janvier 2000, dite Aubry II, réduit la durée légale du travail dans tous les établissements de plus de 20 salariés. Les conditions de réduction du temps de travail dans le cadre de ces deux dernières lois sont détaillées ci-dessous.

Dans cette partie, nous ne parlerons pas de la loi Robien car elle a été abrogée par les lois Aubry.

La Loi du 13 juin 1998, dite Aubry I

La loi Aubry I incite les établissements à réduire leur temps de travail en créant ou préservant des emplois en contrepartie d'aides importantes.

Pour obtenir les aides, l'entreprise doit effectivement réduire son temps de travail d'au moins 10 %, ce qui lui permet d'atteindre une durée collective hebdomadaire de 35 heures. La loi Aubry I contenait deux volets : un offensif et un défensif.

Dans le cas du volet offensif, les entreprises s'engagent à créer des emplois, au moins 6 % (10 % dans le cadre de la loi Robien).

Le volet défensif, dans le cas où la réduction du temps de travail permet d'éviter un plan social et des licenciements économiques, donne accès également à ces aides.

L'aide est attribuée pour chacun des employés auquel s'applique la réduction du temps de travail ainsi que pour ceux nouvellement embauchés. Elle consiste en des avantages, sous forme de réductions de cotisations sociales patronales, forfaitaires et dégressives pendant cinq ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la réduction du temps de travail. L'aide est dégressive dans le temps pour inciter aux réductions du temps de travail rapides.

La sortie de ce système d'aides, dites incitatives, est assurée par la loi Aubry II.

La Loi du 19 janvier 2000, dite Aubry II

Pour les établissements de plus de 20 salariés, la seconde loi a mis en place de nouveaux allègements de cotisations patronales comprenant deux composantes :


· une aide pérenne et forfaitaire pour les entreprises aux 35 heures de 610 € par an et par salarié. (de 1998 au 1er janvier 2002).


· des allégements de charges sur les bas et moyens salaires de 2 670 € par an et par salarié au Smic, dégressifs pour des salaires plus élevés jusqu'à 1,8 fois le Smic.

Ces aides, dites structurelles, s'appliquent aux entreprises ne bénéficiant pas d'autres aides à la réduction du temps de travail, si l'entreprise a signé un accord majoritaire fixant la durée du travail à 35 heures sur la semaine ou à 1 600 heures sur l'année et comportant un certain nombre de clauses (durée du travail, nombre d'embauches prévues ou d'emplois préservés).

Par ailleurs, certaines entreprises sont non éligibles aux aides : c'est le cas des grandes entreprises publiques par exemple.

Les entreprises, bénéficiant déjà des aides incitatives, pouvaient bénéficier des allègements de charges sur les bas et moyens salaires, puis de l'aide pérenne quand les aides incitatives cessent.

Les différentes catégories d'entreprise passées à 35 heures

On distingue fin 2000, six types d'entreprises, parmi les entreprises de plus de 20 salariés, dont cinq réunissent des entreprises passées à 35 heures :


· Certaines entreprises sont restées à 39 heures malgré la réduction de la durée légale du travail et payent à leurs salariés des heures supplémentaires.


· Les entreprises « Robien »sont passées à 35 h avant juillet 1998 dans le cadre d'une convention Robien.


· Les entreprises « Aubry I »  aidées (volet offensif) : elles sont passées aux 35 heures entre juillet 1998 et janvier 2000. En plus d'allégements de charges, elles bénéficient d'abord d'aides incitatives, puis des aides structurelles. Elles sont contraintes légalement à réduire effectivement leur temps de travail de 10 % et à augmenter l'emploi de 6 %, dans un délai d'au plus un an après la réduction du temps de travail.


· Les entreprises « Aubry II » précurseurs : elles sont passées aux 35 heures avant janvier 2000 mais n'ont pas demandé les aides incitatives. Elles ne sont pas, à ce titre, soumises aux obligations de créations d'emploi des entreprises Aubry I aidées, ni à une réduction effective de la durée du travail de 10 %. Elles ont bénéficié également des aides structurelles à partir de janvier 2000.


· Les entreprises « Aubry II » : elles sont passées aux 35 heures après janvier 2000. Elles bénéficient d'aides structurelles et ne sont pas non plus soumises aux obligations légales de créations d'emploi et de réduction du temps de travail.


· Certaines entreprises réduisent leur temps de travail sans recevoir d'aides, soit parce qu'elles ne sont pas éligibles aux aides, soit parce qu'elles ne le demandent pas.

Un accord est majoritaire s'il est signé par une ou plusieurs organisations syndicales ayant recueilli, lors des dernières élections au comité d'entreprise ou des délégués du personnel, la majorité des voix ou s'il est approuvé par la majorité du personnel. Les entreprises de moins de 50 salariés peuvent appliquer par ailleurs un accord de branche étendu ou agréé.

Ce passage à 35 heures était suffisant pour recevoir les aides sans conditions supplémentaires sur la réduction effective du temps de travail à 10 %. Des entreprises ont pu ainsi afficher une durée hebdomadaire de 35 heures sans baisser effectivement leur temps de travail de 10 %. Pour cela, elles ont redéfini leur temps de travail en en excluant des pauses ou une sixième semaine de congés payés, auparavant comprises dans le calcul de leur durée du travail.

C/ LES CONDITIONS PARTICULIERES D'APPLICATION DES RTT DANS LE SECTEUR DE L'HOTELLERIE RESTAURATION :

Dans ce point, nous traiterons des conditions particulières qui s'appliquent à l'hôtellerie restauration en ce qui concerne les réductions du temps de travail.

Les organisations syndicales signataires de cet accord de branche et de la Convention collective des HCR de 1997 ont sollicitées son extension dès 1998 afin de rendre obligatoire son application à l'ensemble des entreprises de ce secteur.

Cet accord fût décisif pour la modernisation économique et sociale de ce secteur de toute première importance qui emploie plus de 600 000 salariés dans près de 200 000 entreprises dont la plupart ont moins de 20 salariés.

Cette activité est marquée par des contraintes d'horaires très fortes, avec actuellement une réglementation qui lui est propre de 39heures.

Le passage aux 39 heures dans les hôtels, cafés et restaurants s'est fait par étapes : depuis la date d'application de l'accord et jusqu'au 31 décembre 2003 ou au 31 décembre 2006 selon la taille de l'entreprise et en fonction de la durée du travail pratiquée.

En raison des particularités de ce secteur, le gouvernement a décidé d'aider ces entreprises :


· par une exonération totale des charges sociales sur les avantages en nature dont bénéficient les salariés du secteur. Cette mesure concerne l'ensemble de ces entreprises avec un effet rétroactif au 1er Janvier 2001


· en s'engageant à aider ces entreprises à supprimer le régime dérogatoire actuel de durée du travail spécifique à ce secteur - selon des modalités en cours de discussion - lorsqu'elles passeront de 43 h à 39 h.


· en prenant un décret dès l'extension de l'accord qui permettra l'accès aux aides prévues par la loi du 19 Janvier 2000


· en mettant en place dès à présent un plan d'accompagnement de cet accord. Celui-ci sera élaboré avec les organisations professionnelles signataires et associera les organisations syndicales


· des moyens vont être dégagés pour faire connaître l'accord et aider les entreprises à l'appliquer.

Tous les professionnels constatent que les durées de travail excessives, les conditions de travail insatisfaisantes, les rémunérations souvent peu encourageantes, font obstacle au recrutement et au maintien des salariés, notamment des jeunes, dans les entreprises de cette branche.

Il est indispensable que la branche de l'hôtellerie-restauration organise un dialogue social de qualité pour réussir sa modernisation.

1) Le contenu de l'accord sur les RTT des Hôtels Cafés Restaurants (HCR) du 15 Juin 2001 :

Cet accord s'est présenté comme l'avenant n°1 à la convention collective des HCR. Il entra en vigueur le premier jour du mois suivant son extension. Les principales mesures de l'accord sont regroupées en cinq titres liés à la réduction du temps de travail ainsi qu'un préambule important qui affirme la nécessité de prévoir une réduction du temps de travail dans le secteur, même si cette dernière doit s'effectuer par étape.

LE TITRE PREMIER de l'avenant établit un calendrier de réduction du temps de travail prévoyant différentes échéances suivant l'effectif des entreprises et la durée du travail appliquée à la date de signature de l'avenant.

· Entreprises appliquant une durée de 43 heures à la date d'application du présent avenant ou ayant réduit le temps de travail depuis le 13 juin 1998.

- Entreprise de plus de 20 salariés : à compter de la date d'application de l'avenant réduction à 41 heures puis réduction d'une heure par an du 1er janvier 2002 jusqu'au 31 décembre 2004, à terme des 39 heures.

- Entreprise de 20 salariés et moins : à compter du 1er janvier 2002 réduction à 41 heures puis réduction de deux heures tous les deux ans du 1er janvier 2004 jusqu'au 31 décembre 2006, à terme des 35 heures.

· Entreprises appliquant une durée de 39 heures à la date d'application de l'avenant à l'exception de celles ayant réduit le temps de travail depuis le 13 juin 1998.

- Entreprises de plus de 20 salariés : à compter de la date d'application de l'avenant réduction à 38 heures puis réduction d'une heure par an du 1er janvier 2002 jusqu'au du 31 décembre 2003, à terme des 35 heures.

- Entreprise de 20 salariés et moins : à compter du 1er janvier 2004 réduction à 37 heures puis à 35 heures au 31 décembre 2005.

LE DEUXIEME TITRE prévoit l'aménagement du temps de travail consécutif à sa réduction, sur une base annuelle ou saisonnière. Des modalités différentes sont prévues suivant que l'aménagement s'applique dans les entreprises de plus de 20 salariés ou dans les entreprises d'au plus 20 salariés. Ce titre traite également de la mise en place du cycle et de la réduction du temps de travail par l'octroi de jours ou de demi-journées de repos. Enfin un dispositif de compte épargne temps est instauré.

LE TROISIEME TITRE traite du temps de travail des cadres avec une définition pour chaque catégorie : cadres dirigeants, cadres intégrés et autres cadres. Ce titre prévoit également la définition et la mise en oeuvre de conventions de forfait. Le forfait jour est prévu pour un maximum de 213 jours.

LE QUATRIEME TITRE convient du principe de maintien de la rémunération à l'occasion de la RTT avec la mise en place d'un complément différentiel de salaire intégré dans le salaire de base. Il prévoit également la suppression des modalités de calcul du salaire spécifiques au HCR dès lors que les entreprises entreront dans le processus de réduction du temps de travail de droit commun. Enfin une grille de rémunération horaire brute pour chacun des cinq niveaux et trois échelons de la classification des emplois est proposée dans le cadre de l'avenant RTT.

LE CINQUIEME TITRE organise la commission paritaire de suivi conformément aux lois Aubry. Elle aura en charge d'étudier et d'évaluer sur le plan national l'impact économique et social de la réduction du temps de travail

LE SIXIEME TITRE définit le temps partiel et ses modalités d'application dans la profession, sont notamment précisés les points relatifs aux heures complémentaires, supplémentaires ainsi que le régime des coupures.

2) Les conditions juridiques de l'application de l'accord :

Elément essentiel du passage du secteur des HCR aux 39h, l'accord nécessite toutefois, un certain nombre de procédures administratives.

· l'extension :

L'extension consiste à rendre obligatoire, par arrêté ministériel, une convention ou un accord collectif de branche aux employeurs entrant dans son champ d'application professionnel et territorial mais non adhérents à l'une des organisations patronales signataires (articles L.133-8 à L.134-1 du code du travail)

L'extension présente un double intérêt :

- elle permet à tous les salariés d'un même secteur professionnel de pouvoir bénéficier des dispositions conventionnelles en matière de garanties sociales. La convention ou l'accord collectif ne s'applique en effet, avant l'extension qu'aux salariés dont l'employeur est adhérent au syndicat employeur signataire.

- elle unifie les conditions d'emploi et égalise les conditions de la concurrence entre les employeurs d'une même branche d'activité.

Certaines conditions doivent être réunies pour permettre l'extension : les organisations syndicales et patronales représentatives dans le champ d'application professionnel et territorial visé doivent avoir été convoquées aux réunions de négociation.

Le texte est transmis aux membres de la sous-commission des conventions et accords collectifs de travail de la Commission Nationale de la Négociation Collective. Il fait l'objet d'un avis préalable au Journal Officiel, d'une instruction administrative et d'une transmission des observations de l'administration aux membres de la sous commission avant l'examen en séance.

Cette sous-commission composée de représentants des salariés (CFDT, CGT, FO, CFTC, CGC), de représentants des employeurs (MEDEF, CGPME, UPA, UNAPL, FNSEA) et de représentants de l'administration se réunit environ tous les deux mois et rend un avis fondé sur les observations transmises par l'administration.

L'administration peut éventuellement proposer des observations qui visent à exclure de l'extension certaines clauses en contradiction avec les textes législatifs. En l'absence d'opposition des organisations syndicales ou patronales, l'arrêté d'extension est signé et comporte éventuellement les exclusions et réserves proposées par l'administration.

Lorsque le texte fait l'objet de deux oppositions motivées soit du côté des salariés, soit du côté des employeurs, le ministère doit consulter la sous-commission à la séance suivante sur la base d'un rapport détaillé, établi en réponse aux oppositions formulées. Le ministre décide alors, si les oppositions persistent, de maintenir ou non la décision d'extension, dès lors qu'elles sont suffisamment fondées, pour ne pas étendre le texte.

· le décret durée du travail :

La fixation des durées du travail prévues par l'accord nécessite un décret simple.

Le décret a repris l'échéancier prévu par l'accord RTT. Il prévoit une réduction progressive puis une suppression des durées dérogatoires dans le secteur. Il permet à tous les salariés d'être à 39h au plus tard au premier janvier 2007.

· le décret aides :

Le système d'aide public étant prévu pour des entreprises travaillant à 35h sans équivalence, il convient de prendre en compte la spécificité des HCR, les 39h et du nouvel accord conclu conformément à la loi de financement de la Sécurité sociale.

· Le décret SMIC hôtelier :

Le passage des entreprises à 39h nécessite également un aménagement du dispositif spécifique qui organise le système de Salaire minimum de croissance dans le domaine des HCR.

De plus, suite à un article paru dans le journal L'Hôtellerie, dans sa rubrique Juridique, du 6 janvier 2005, nous pouvons constater que les 2 arrêtés en date du 3 novembre publiés au JO du 1er janvier 2005 étendent et, par conséquent ont rendu obligatoires à toutes les entreprises des HCR l'accord du 13 juillet 2004 sur le temps de travail et l'accord du 2 novembre sur la prévoyance. Ces textes constituent des avenants à la convention collective. (cf. annexe 1)

Ces dispositions sont applicables depuis le 1er janvier 2005. La profession peut continuer à travailler sur la base de 39 h pour les petites entreprises et 37 heures pour les plus grandes qui sont passées aux 37 heures en 2002 selon le décret du 28 décembre 2001; mais en contrepartie, elle supprime le SMIC hôtelier (cf. annexe 2), accorde une semaine de congés supplémentaire et 2 jours fériés, réglemente le travail de nuit et met en place un régime de prévoyance.

3) Le Plan d'accompagnement de l'accord HCR :

Afin d'aider les entreprises à réussir le passage progressif à 39 heures selon les modalités fixées par l'accord collectif, un plan d'accompagnement a été mis en oeuvre, il comprend 3 volets :


· Une action de communication sur la réduction du temps de travail a eu lieu au cours du 2ème semestre 2001. Cette action a eu le soutien du secrétariat d'Etat au Tourisme.


· Une campagne d'information menée par les organisations signataires sur l'accord RTT et les mesures d'accompagnement dans les régions et les départements. Cette campagne a pri la forme de réunions d'informations, de remise de documents, de mise en place d'un service personnalisé (numéro vert, suivi des entreprises), de formation spécifique pour employeur et salarié. Le suivi de cette campagne comporte la collecte, l'analyse et la rediffusion des expériences d'aménagement et de réduction du temps de travail.

Elle a débutée juste après l'extension de l'accord. Les services de l'Etat ont apporté leur appui à sa réalisation.


· Des actions plus larges en faveur de la modernisation de la profession des HCR, s'appuyant sur la promotion d'initiatives régionales et locales.

Les organisations signataires et l'Etat ont renforcé leur coopération aux niveaux régional et départemental pour répondre aux difficultés de recrutement et essayer de les pallier, fidéliser le personnel, développer les compétences de la profession, améliorer les conditions de travail..... Un groupe de travail fut constitué au niveau national pour échanger sur les expériences locales déjà engagées (diagnostics des besoins, plans d'actions, engagements de développement de la formation...), inciter et accompagner la mise en place de nouvelles actions.

Le Secrétariat au Tourisme a demandé aux délégués régionaux au Tourisme de prêter leur concours à la mise en oeuvre de ce plan.

II/ LES EFFETS POTENTIELS DES REDUCTIONS DU TEMPS DE TRAVAIL 

Peu soucieuse des spécificités sectorielles, les réductions du temps de travail sont venues perturber les équilibres financiers et organisationnels, parfois fragiles, des entreprises. Le paysage économique a ainsi été profondément modifié par la mise en oeuvre des 35 heures, qui a obligé les entreprises à trouver des modes d'adaptation à la contrainte externe qu'a représentée la réduction du temps de travail. Malheureusement, toutes les entreprises n'étaient pas, de par leur taille et leur situation économique, dans la capacité d'absorber correctement le bouleversement des RTT.

Si certaines, bénéficiant le plus souvent de la taille critique nécessaire, ont su tirer profit d'une modification qui leur était imposée, d'autres ne sont toujours pas parvenues à résoudre la difficile équation entre réduction du temps de travail et maintien de leur compétitivité et de leurs résultats.

De la même façon, la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans le secteur de l'hôtellerie restauration a engendré de réelles difficultés d'organisation, et là encore, l'éclatement prédomine. Toutes les entreprises n'étaient pas égales face au passage aux 39 heures, certaines profitant de l'occasion pour procéder à des restructurations, d'autre subissant la réforme.

A) UN BOULEVERSEMENT POUR LES ENTREPRISES :

1) Les RTT : une relance du dialogue social dans l'entreprise ?

Au moment de la mise en place des RTT, les partisans de cette réforme avaient mis en avant, parmi d'autres, l'idée que celles-ci seraient un moyen de mettre fin à la situation de blocage du dialogue social qui perdurait à l'époque.

Quel bilan peut-on tirer à cet égard ?

Certes, la période de mise en place des RTT , ayant été marquée par une augmentation forte du nombre d'accords signés, une approche numérique pourrait faire croire en effet à une relance du dialogue social.

Mais en fait, les entreprises n'ont pas bénéficié du temps suffisant pour la signature d'un accord, alors que le temps requis était important puisqu'il convenait d'étudier au préalable les spécificités de toutes les catégories de salariés, de remettre à plat tous les processus de l'entreprise, et d'élaborer une vision stratégique et prospective des modifications.

Il apparaît donc, et contrairement à l'idée souvent invoquée, que les RTT n'ont qu'artificiellement relancé le dialogue social dans l'entreprise, puisque entreprises et partenaires sociaux ont été contraints de négocier. L'augmentation numérique des signatures d'accord n'est ainsi pas en elle-même le signe d'une relance du dialogue social dans l'entreprise, mais bien le résultat mécanique des négociations qui ont eu lieu, lesquelles, dans la quasi-totalité des cas, ont été très difficiles, que ce soit dans les grands groupes ou dans les PME.

En outre, il n'y a pas eu par la suite de capitalisation de la relance du dialogue social, du fait d'un certain nombre de freins, tenant notamment à la complexification considérable du code du travail ou à la division syndicale. A l'inverse, il semble même que les RTT aient joué un rôle dans le regain des conflits sociaux. Le nombre de jours de grève dans les entreprises a ainsi augmenté de 41% en 2000, les conflits ayant été en outre plus longs et mieux suivis.

Les bilans des conflits du travail, établis par la direction des relations du travail du ministère de l'emploi et de la solidarité, montrent que la réduction du temps de travail a pris une place grandissante dans les motifs de conflits, passant de 12% des motifs de conflits de 1996 à 1998, à 25 % en 1999 et 28,7 % en 2000. Au cours du deuxième semestre 1999 et du premier semestre 2001, la réduction du temps de travail est même devenue la première motivation aux conflits, avant même les revendications salariales.

Nous ne pouvons que nous faire l'écho des propos de M. Ernest-Antoine Sellière*, qui a déclaré que « la mise en place des 35 heures a été une épreuve. Elle a créé de la tension et de la complexité sociales dans les entreprises »

2) les coûts induits par les RTT et les problèmes de compétitivité des entreprises :

Les coûts induits par les RTT sur les entreprises sont très importants, et d'autant plus problématiques qu'ils se maintiennent pour la plupart avec le temps.

Les surcoûts salariaux, en premier lieu, ont eu un poids certain, bien que différent en fonction de la taille de l'entreprise. Ainsi, M. Jean-François Roubaud*, a indiqué que « pour les grandes entreprises, le coût salarial n'a pas été extrêmement important, un peu plus de 1 %, en raison de l'effet d'aubaine dont n'ont pas profité les petites entreprises. Elles supportent, pour leur part, une augmentation de salaire de quelque 15 %, ne serait-ce qu'en raison du réalignement des SMIC et des augmentations mathématiques auxquelles il a bien fallu procéder, dès lors que les 35 heures ont été payées 39. Certes, un allègement des charges a été prévu par M. Fillon, mais il n'a compensé que partiellement le coût de l'alignement des SMIC pour les petites entreprises. Tout ceci me conduit à dire que nous sommes vraiment le seul pays au monde à consacrer autant d'argent à empêcher les gens de travailler ! 

En outre, l'abaissement de la durée légale du travail, cumulé au plafonnement des heures supplémentaires, a eu pour conséquence de rationner l'offre de travail, ainsi que, du même coup, les capacités de production des entreprises qui se trouvaient en période de croissance de leur activité. De plus, les négociations, mobilisant pendant de longs mois une partie conséquente de l'encadrement pour les grandes structures, le chef d'entreprise lui-même dans les petites structures, ont eu des coûts certes difficiles à quantifier, mais incontestables et relevés, d'ailleurs, par l'ensemble des personnes interrogées par la mission. Les RTT ont de plus entraîné pour les entreprises des surcoûts organisationnels en deçà de la négociation, du fait de la complexification de la gestion de leur personnel (gestion des absences et non plus des présences, allongement du traitement de la paye du fait des RTT et surtout de la multiplicité des SMIC) et de la désorganisation de certaines entreprises.

Lorsque les entreprises étaient suffisamment solides, les surcoûts engendrés par les RTT ont pu être absorbés, par l'augmentation de la productivité, une réelle modération salariale, voire plus rarement par une augmentation des tarifs consécutive à une innovation ou à une image de marque particulièrement forte.

De plus, si dans l'ensemble les grandes entreprises ont mieux réussi à tirer partie des RTT , elles se sont au total simplement contentées de « limiter les dégâts ».

M. Ernest-Antoine Sellière* : Président du Mouvement des Entreprises De France

M. Jean-François Roubaud* : le président de la Confédération Générale des PME

Mais, malheureusement, les surcoûts induits par les RTT n'ont pas toujours pu être compensés par une augmentation des tarifs ou par la modération salariale, ce qui a mis beaucoup d'entreprises en péril, comme cela a été attesté lors des différentes auditions ou déplacements, notamment à la CCI de Reims, où un responsable d'une PME Hôtelière en situation de redressement judiciaire a exposé longuement les difficultés supplémentaires qu'avaient créées pour lui les RTT.

B) DEUX APPROCHES DIFFERENTES DE LA MISE EN PLACE DES RTT :

Comme l'indique un rapport de commission, « du point de vue des entreprises, les RTT a été un exercice imposé dans la grande majorité des cas et ne relève donc pas d'un choix délibéré pour un grand nombre ». Conscients des conséquences de cette mesure sur le tissu économique français, les pouvoirs publics avaient toutefois mis en place des dispositifs d'aides ; ceux-ci ne se sont cependant pas révélés suffisants pour compenser la lourde contrainte imposée aux entreprises dans leur gestion financière et organisationnelle. Conscients aussi des risques pesant spécifiquement sur les PME et les TPE, les pouvoirs publics avaient de plus mis en place un dispositif spécifique à ces entreprises, qui ne leur a malheureusement pas toujours permis de faire face et n'a pas empêché l'accroissement des inégalités entre grandes et petites entreprises.

Ce n'est pas une surprise ; dès la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail, de nombreux observateurs avaient alerté le Gouvernement sur les dangers qu'il y avait à imposer une réduction du temps de travail de manière uniforme et impérative.

Ainsi dans un rapport publié dès 1999, le Centre des jeunes dirigeants estimait que « la loi, centrée sur la réduction obligatoire du temps de travail, ne fait que changer une norme et ne tient pas compte de la diversité qui existe entre les entreprises et qui ne fait que s'accroître ».

Quelque années plus tard, il est malheureux de constater que ces analyses étaient fondées. Si les stratégies de gestion du choc externe qu'ont représenté les RTT ont été diverses et étalées dans le temps, selon que les entreprises ont ou non choisi de bénéficier des dispositifs incitatifs de la loi Aubry I, il n'en demeure pas moins que la réduction du temps de travail a eu de lourdes conséquences pour l'organisation et la gestion des entreprises, quels que soient leur taille et leurs secteurs d'activités.

Globalement, il apparaît que si les grandes entreprises ont été à même de profiter du passage aux 39 heures pour négocier une meilleure organisation du travail et ainsi augmenter leur productivité, les petites et moyennes entreprises ont, à l'inverse, le plus souvent été dans l'incapacité de tirer partie de la négociation sur la réduction du temps de travail, qui s'est ainsi révélée pour elles une lourde contrainte supplémentaire, parfois même un handicap.

Par ailleurs, quelle que soit la réussite ou non du passage aux 39 heures pour les entreprises, la RTT a dans tous les cas induits des coûts de gestion et des pertes de compétitivité pour l'ensemble des entreprises.

Des stratégies diverses de gestion des RTT :

Comme l'a indiqué un rapport (M. Rouilleault*), « vis-à-vis de la réduction du temps de travail, la diversité est la règle ». En effet, ce rapport recense les multiples cas de figure qui peuvent se présenter au regard de la situation des entreprises face au passage aux RTT.

Alors qu'un tout petit nombre d'entreprises avaient réduit le temps de travail à 35 heures ou moins avant 1996, certaines se sont inscrites dans le cadre de la loi de Robien, dans sa version offensive ou défensive, d'autres l'ont fait à partir du second semestre 1998 dans celui de la loi Aubry I, de façon offensive ou défensive ou même sans bénéficier des aides qu'elle prévoyait, ou à partir de début 2000 dans le cadre de la loi Aubry II. D'autres enfin ont procédé à l'application directe d'un accord de branche.

Une fois passées aux 35 heures, les entreprises avaient à leur disposition la possibilité de jouer sur trois paramètres pour préserver leur propre équation économique : les allègements de charges conditionnés à la réduction du temps de travail, l'amélioration de leur organisation et la modération salariale.

Suivant qu'elles ont ou non été dans la capacité de jouer sur un ou plusieurs de ces paramètres, les entreprises ont anticipé ou non le passage aux 35 heures et plus ou moins bien réussi à absorber le choc qu'elles ont constitué pour elles.

1) Pour les grandes entreprises hôtelières : la transformation d'une contrainte en moteur de changement (ACCOR, ENVERGURE, HILTON, BARRIERE.....) :

Bien que les responsables des grandes entreprises aient été, dans l'ensemble, hostiles au passage aux 39 heures, ceux-ci, faisant preuve de pragmatisme, ont pour la plupart cherché à tirer le meilleur parti des dispositifs législatifs, du point de vue des aides incitatives et de celui des possibilités de flexibiliser le travail.

Contrairement aux PME, les grandes entreprises ont eu les moyens financiers de bénéficier des conseils nécessaires tant pour comprendre une législation, on l'a vu, particulièrement complexe, que pour trouver les solutions à mettre en oeuvre pour permettre une nouvelle organisation du travail.

M. Rouilleault* : Directeur général de l'Agence Nationale pour l'Amélioration des Conditions de Travail

En outre, elles ont bénéficiées de par l'importance de leurs effectifs, d'une taille suffisante pour envisager des réorganisations de travail, par la modulation du temps de travail et l'augmentation de l'utilisation de la durée des équipements. En permettant de jouer sur la suppression des temps morts, la réduction du temps de travail a été pour les grandes entreprises l'occasion de flexibiliser la production, que ce soit pour des raisons de variations saisonnières d'activité ou d'urgence, et ainsi permis de mettre en oeuvre un mode d'organisation plus compétitif. En mettant fin au modèle traditionnel de l'horaire collectif, les négociations ont abouti à l'invention de formes diverses d'aménagement du temps de travail : horaires variables, travail en équipe, travail par roulement, modulation du temps de travail, ou encore raccourcissement de la journée de travail, octroi de journées ou demi-journées de RTT, compte épargne temps....

Pour la plupart des grandes entreprises, la mise en place des 39 heures a ainsi eu de réels impacts en termes de flexibilité. Comme l'indique le rapport Rouilleault, les grands groupes, qui ont soit négocié un accord-cadre, soit dans chaque établissement, ont tous lié la question de la réduction du temps de travail à celle de son aménagement.

Il convient, toutefois, de ne pas surestimer le bénéfice de l'apport des 39 heures aux grandes entreprises. Si celles-ci ont été en mesure de tirer le meilleur parti de cette législation, il n'en demeure pas moins que la réduction du temps de travail a été vécue comme une entrave supplémentaire à leur bonne marche.

En effet, il demeure un domaine où les RTT semblent avoir laissé une trace profonde dans les grandes entreprises. Il apparaît que les RTT ont initiées une déstabilisation néfaste de l'encadrement. Les chefs d'entreprise, à leur grand étonnement, se sont trouvés confrontés à une démobilisation de leurs cadres dans l'hôtellerie restauration, qui ont souhaité bénéficier des 39 heures au même titre que l'ensemble des salariés. La situation a été d'autant plus délicate que, dans la mesure où l'encadrement était soumis au champ d'application de la loi, les entreprises n'ont eu d'autre choix que de négocier sur la durée de travail des cadres.

Ainsi, l'on est passé, en quelques années, d'une situation où les cadres étaient parfois soumis à une durée du travail communément jugée excessive, à une situation où ils cumulent désormais cinq, voire six ou sept semaines de congés payés, et leurs journées de réduction du temps de travail, qui peuvent dépasser 20 jours annuels.

En revanche, n'oublions pas que pour les grands groupes, cité ci-dessus, la politique de recrutement fut booster par les RTT. Ceux-ci constituent un avantage de taille au niveau du recrutement et par rapport à leurs concurrents.

2) Les 39 heures comme contrainte supplémentaire d'organisation : l'exemple des petites et moyennes entreprises d'hôtellerie restauration :

Le passage aux 39 heures a été particulièrement difficile pour les PME et les TPE du secteur de l'hôtellerie restauration en particulier, car ils n'étaient pas vraiment armés pour un tel bouleversement.

Les raisons de cette situation sont multiples. Ces entreprises n'ont pas facilement accès aux conseils et experts capables de les accompagner pour préparer ce passage dans les meilleures conditions possibles, le dispositif d'appui conseil prévu par la loi Aubry n'offrant pas toujours la garantie de trouver un interlocuteur compétent.

L'organisation de la négociation a été particulièrement complexe. Le dialogue social y est généralement insuffisant, voire inexistant, freinant de ce fait les possibilités de négociation. Par ailleurs, leurs dirigeants ont du mal à connaître et à maîtriser les différents outils d'aménagement du temps de travail existants.

Ces entreprises souffrent du manque de disponibilité de l'encadrement, trop occupé par le quotidien de l'entreprise, alors que les cadres ont un rôle crucial à jouer pour accompagner la RTT. Enfin, ces entreprises ne disposent pas d'une interchangeabilité des personnes suffisante pour permettre que la réduction du temps de travail se traduise par des embauches compensatrices et ont du mal à trouver sur le marché du travail les compétences dont elles ont besoin du fait de la pénurie de main-d'oeuvre dans ce secteur d'activité.

Les lois Aubry elles-mêmes avaient pris implicitement acte de la nécessité de traiter différemment les PME et de ne pas les contraindre à passer aux 35 heures dans les mêmes conditions que les grandes entreprises. Les plus petites d'entre elles, celles employant moins de 20 salariés, ont bénéficié d'un régime particulier, marqué par un report du passage à 39 heures des modalités de négociations spécifiques pour l'obtention des allègements de cotisations sociales, et le maintien du droit existant en matière de repos compensateur.

Malgré ces adaptations, les difficultés d'application de la réduction du temps de travail aux petites entreprises expliquent que leurs dirigeants aient fait preuve d'attentisme et n'aient pas anticipé le passage aux 39 heures. 

Force est malheureusement de constater que la levée de bouclier que les 39 heures avaient provoquée dans le monde de l'hôtellerie restauration des PME lors de leur mise en oeuvre était justifiée : à quelques rares exceptions près, pour les petites et moyennes entreprises, et en tout premier lieu les plus petites d'entre elles, les 39 heures ont été un véritable séisme, bouleversant des équilibres économiques souvent fragiles et introduisant encore de la rigidité dans la gestion quotidienne

En 2003, une enquête a été réalisée sur les conditions de mise en oeuvre des 39 heures, laquelle semble significative. Ainsi, à la question : « pourquoi votre entreprise n'applique-t-elle pas les 39 heures », les entreprises hôtelières ont, à 44 %, mis en avant l'inadaptation à l'activité des entreprises.

Pourquoi ne pas appliquer les 35 heures ?

C'est trop compliqué à mettre en oeuvre en termes d'organisation

11%

C'est inadapté à l'activité de l'entreprise

44%

C'est un coût trop élevé pour l'entreprise

11%

C'est impossible de recruter pour remplacer les heures perdues

22%

Cela ne correspond pas à une demande des salariés

22%

L'entreprise préfère payer des heures supplémentaires

11%

Autres raisons

56%

Les sondés pouvant répondre à plusieurs questions

Source : Enquête SVP (Cabinet de Conseil en Management) 2003

Etude sur 142 entreprises en France, (20 Grandes entreprises, 54 PME, 68 TPE)

Concernant la réduction du temps de travail, l'enquête relève que certaines entreprises préfèrent afficher un horaire de 39 heures, et une pratique d'heures supplémentaires. Elles semblent vouloir afficher leur opposition à une loi inadaptée aux contraintes de leur secteur d'activité.

Il ressort toutefois que la quasi-totalité des entreprises hôtelière a accompli un abaissement du niveau moyen des horaires. Parmi les multiples explications figure notamment le souci de limiter les abus par peur des contrôles, de respecter la contrainte du contingent d'heures supplémentaires et enfin de tenir compte de la tendance générale des RTT et de son incidence sur la paix sociale dans l'entreprise.

Pour celles qui n'ont pas opté pour les 39 heures, l'argument majeur avancé est la menace, ressentie par leurs salariés, d'une réduction des salaires. C'est également la garantie d'augmentation future de ceux-ci, d'autant plus appréciée par les salariés qu'elle intervient dans un contexte général de modération, sinon de pur blocage, des rémunérations dans les entreprises ayant procédé aux RTT. La satisfaction de cette attente permet de conserver les salariés, en tout cas le noyau dur du personnel. L'enquête note, toutefois, que les choix qui ont été faits à un moment donné peuvent changer avec l'évolution de la conjoncture et du taux de chômage, que ce soit vers un retour aux 43 heures ou un passage aux 39 heures, dans un égal souci d'attractivité.

Concernant la complexité de la loi, l'étude relève qu'elle a été parfois rendue inaccessible aux dirigeants de PME mais aussi aux salariés. Le manque de formation juridique, l'inexpérience en matière de négociation et l'insuffisance des conseils ont contribué à ce rejet. Certains principes de base de la loi étaient méconnus, comme l'accès direct aux aides prévu dans l'accord de branche. Il s'agissait pourtant de clés pour l'accès aux aides.

En outre, le fait de négocier un accord d'entreprise a pu être perçu comme une contrainte par les dirigeants. Certaines entreprises craignaient de devoir adopter des mesures qui ne leur convenaient pas. Il en est ainsi des modalités des RTT adoptées par les entreprises passées aux 39 heures sans accord : sachant que les salariés voulaient obtenir des jours de RTT, elles n'ont pas négocié car elles estimaient que les jours qu'elles auraient dû accorder seraient devenus source de perturbation dans leur organisation et de baisse nette de production. Cette situation leur a permis dans de nombreux cas de mettre en place des RTT journalière, qui a permis de maintenir ou de limiter la baisse de production avec un effectif constant. Le rejet de la négociation permettait aussi de préserver l'avenir.

Il convient, cependant, de relativiser ce refus de négocier. En effet, étant souvent le prolongement de la structure familiale qui fut à l'origine de leur création, les petites entreprises d'hôtellerie restauration se caractérisent par une relation directe avec le personnel. L'employeur reste au contact du personnel et les relations de « donnant-donnant » sont le quotidien, tout comme la recherche de compromis sans nécessairement se référer aux règles légales.

Enfin, le motif essentiel de non-recours aux aides, y compris dans les entreprises qui remplissaient la plupart des conditions juridiques prévues par la loi tient aux incertitudes sur l'emploi. Les dirigeants préfèrent renoncer aux aides publiques plutôt que s'engager sur un niveau d'emploi qu'ils ne maîtrisent pas. Les trois lois sur les RTT avaient pourtant, comme on l'a vu, atténué progressivement cette obligation. D'ailleurs, dans l'échantillon étudié, peu de créations d'emplois ont été réalisées, que les entreprises soient ou non passées aux 39 heures.

Ecarts creusés entre entreprises de moins de 20 salariés et les autres, augmentation des tensions et du nombre de salariés mécontents, problème du contingentement des heures supplémentaires, difficultés de recrutements : la situation qui résulte aujourd'hui de la mise en place de la réduction du temps de travail dans les PME et les TPE, nombreuses en hôtellerie restauration est pour le moins préoccupante.

III / LES CONSÉQUENCES SOCIALES DES RTT : UNE FRANCE À PLUSIEURS VITESSES

Indiscutablement, les RTT ont imprimé une marque profonde sur la société française. Certes, le développement de la société des loisirs ne date pas des RTT , mais, rythmé par la réduction du temps de travail, notre pays semble accorder une place grandissante aux loisirs, devenus une préoccupation majeure. Cet engouement ne cache toutefois pas de fortes disparités, car si les 35 heures ont accru la place des loisirs, elles ont dans le même temps creusé encore les inégalités entre ceux qui y ont accès et les autres.

De fait, il apparaît malheureusement, à l'évidence, que les 35 heures ont été à l'origine d'un accroissement considérable des inégalités entre Français : inégalités de temps et de conditions de travail au sein d'une même entreprise et entre entreprises, mais aussi inégalités dans la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, accentuées par la pratique de la modération salariale, inégalités enfin entre bénéficiaires des 35 heures et « les oubliés » (en hôtellerie restauration par exemple) des RTT. Il en résulte un renforcement des lignes de fracture au sein du monde du travail d'autant plus porteur d'inquiétude pour l'avenir que les 35 heures ont, dans le même temps, été génératrices d'exclusion et de réduction du lien social.

Concernant la relation de l'individu à son travail, enfin, s'il n'est pas discutable que le travail demeure une référence et un moyen d'intégration dans la société, il n'en demeure pas moins que la quasi-totalité des personnes auditionnées par la mission a relevé une distension du lien entre les salariés et l'entreprise, se manifestant tant par une démotivation croissante que par une montée de l'absentéisme, notamment pour raisons médicales. Cette situation est sans doute liée à l'intensification des conditions de travail et à l'exigence de polyvalence qui ont résulté des 35 heures et qui ont eu un impact quelle que soit la place du salarié dans la hiérarchie de l'entreprise. Les cadres n'ont ainsi pas été épargnés par l'intensification de leurs conditions de travail, qui est accompagné, comme pour l'ensemble des salariés, d'un stress et d'une pression supplémentaires.

A) LES 35 HEURES IMPRÈGNENT LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE : LA FRANCE RYTHMÉE PAR LES RTT :

Amorcé depuis le début du 20ème siècle, le phénomène d'accroissement de la place des loisirs dans notre société a été accéléré par la mise en place des 35heures, qui ont libéré encore du temps libre.

On aurait pu s'attendre à une amélioration de l'accès aux loisirs pour les personnes qui en étaient le plus privées. Malheureusement, il n'en a rien été. Loin de développer leurs activités politiques, associatives ou syndicales, les Français se sont repliés sur leurs activités privées traditionnelles, au bénéfice notamment de la famille.

Plus encore, dans un contexte de dégradation des conditions de travail, les journées de réduction du temps de travail ont souvent été vécues comme un moyen de récupérer d'une activité professionnelle de plus en plus intense.

Enfin, là encore, les inégalités ont été accrues, puisque les 35 heures ont accentué les disparités dans l'accès aux loisirs.

On assiste en outre aujourd'hui à une véritable « RTT-isation » de la société française, marquée par une dilatation des temps sociaux et un repli indiscutable sur la sphère privée et individuelle, ainsi que par un bouleversement, qui ne va pas dans le sens du progrès, de notre organisation sociale.

B) LES 35 HEURES ONT-ELLES ACCENTUÉ LES TRAITS DE LA SOCIÉTÉ DE LOISIRS ?

1) Développement de la société des loisirs : un phénomène ancien

Autrefois réservé à l'élite et à la classe dirigeante, les loisirs ont connu tout au long du 20ème siècle une lente mais sûre démocratisation, amorcée dès 1936 avec la loi sur les congés payés et la semaine de 40 heures. Mise un temps entre parenthèses durant les années noires de 1940 à 1945, la société de loisirs se développe à nouveau dès la fin de la seconde guerre mondiale. Pour faire face à la reconstruction, la loi du 25 février 1946 autorise les patrons à avoir recours à 20 heures supplémentaires par semaine. Mais les événements de Mai 1968 relancent à nouveau la baisse de la durée du travail, les accords de Grenelle promettant notamment la mise en oeuvre d'une politique progressive de réduction de la durée du travail en vue d'aboutir à la semaine de 40 heures effectives. La loi du 16 juillet 1976 instaure par la suite un repos compensateur au-delà de 44 heures hebdomadaires. En 1978, la négociation interprofessionnelle échoue suite à la proposition patronale d'annualisation du temps de travail, et de fixation tant de la durée maximale hebdomadaire à 50 heures que du contingent d'heures supplémentaires à 280 heures. En 1981, la durée hebdomadaire du travail est portée à 39 heures. L'année suivante, les lois Auroux obligeront les entreprises à négocier annuellement la question de la durée et de l'organisation du temps de travail, sans forcement aboutir a un accord.

Résultant de la croissance économique des Trente Glorieuses, le processus de baisse tendancielle de la durée du travail contribue à dégager du temps hors travail, dont l'importance croissante explique en partie le développement d'une civilisation des loisirs de masse. Les années 60 puis les années 70 voient ainsi la montée en puissance d'une économie liée tant aux loisirs qu'au tourisme.

Tandis que le secteur primaire perd en importance, se développe une économie tertiaire, au sein de laquelle les services liés à la personne et à son entretien occupent une place prédominante.

Comme l'a souligné le sociologue Jean Viard, sur la période 1992-2000, la croissance moyenne annuelle a été de 1,6 % contre 3,1 % pour la croissance du secteur des loisirs et de la culture et 9 % pour le secteur de la communication. Ces deux secteurs ont donc connu une expansion nettement plus rapide que celle de la moyenne des consommations. Parallèlement, sur la période 1986-1999, le temps quotidien consacré aux loisirs est passé de 3 heures 07 minutes à 3 heures 35 en moyenne. Ce phénomène est d'autant plus marqué que la distinction entre les différents temps : temps de travail et temps libre, temps quotidien, temps hebdomadaire et temps mensuel, s'estompe progressivement.

La société française est marquée aujourd'hui par la consommation tant de loisirs que d'éducation, de culture et de vacances, qui représente une part conséquente du budget des ménages (près de 9 % de leur budget total, dont la moitié pour les dépenses culturelles). En se développant, les loisirs se sont uniformisés, au profit de la télévision, grande bénéficiaire de ce mouvement : en 2001, la presque totalité des ménages vivant en France métropolitaine étaient équipés d'un téléviseur couleur, et 70 % d'entre eux possédaient un magnétoscope. Ce média, diffusant une culture certes accessible à tous mais standardisée, s'est taillé de fait la part du lion dans l'utilisation du temps libre

Les rapports entre temps de travail et temps de loisirs sont donc radicalement différents de ce qu'ils ont pu être par le passé. En 1800, le travail représentait près de 50 % de la vie éveillée contre 10 % pour le temps libre ; il en représente aujourd'hui 12 % contre 30 % pour le temps libre. Les proportions sont radicalement inversées. Alors qu'autrefois les temps libres, et au premier rang d'entre eux le repos dominical et les jours fériés, avaient pour objet de permettre aux travailleurs de se reposer, ceux-ci ont totalement changé de nature. Les temps libres sont aujourd'hui des temps pour soi, déconnectés de toute relation avec l'occupation professionnelle, recentrés sur les goûts et les besoins privés, sur la sphère intime.

2) En leur donnant encore plus de place, les 35 heures ont accentué les inégalités d'accès aux loisirs :

Alors qu'en 1936, la réduction du temps de travail était dictée par le souci de donner du temps libre aux travailleurs, les lois Aubry avaient pour objectif premier non pas l'accroissement du temps libre mais le partage du travail. Cependant, l'impact attendu sur l'accroissement de loisir en résultant était un élément qui avait été pris en compte.

Augmentant encore le temps disponible, les lois sur les 35 heures ont-elles pour autant amélioré la situation des Français quant à l'accès aux loisirs ? Il apparaît malheureusement à l'analyse que si la réduction du temps de travail a eu un effet réel sur la consommation de loisirs, elle a par là même accentué les inégalités d'accès qui caractérisent cette consommation et créé une déception à la hauteur des attentes suscitées.

Malheureusement : un impact limité sur les départs en vacances

Concernant les voyages, les 35 heures ont introduit des modifications réelles mais limitées. A la demande du secrétariat d'Etat au tourisme, le Centre de recherches pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC) a réalisé en 2002 une étude sur l'incidence des 35 heures sur le comportement de départ des Français, dont il ressort que si les 35 heures n'ont pas modifié le volume global des départs des Français, elles ont toutefois joué sur la façon de partir. Entre 2001 et 2002, les départs des Français ne se sont pas globalement accrus. En revanche, la structure des vacances a été modifiée par la réduction du temps de travail. Un cinquième des bénéficiaires des RTT ont ainsi déclaré avoir bénéficié de vacances plus longues, en accolant des jours de RTT aux congés légaux ; 12 % ont déclaré être partis en week-end grâce à la RTT, et 9 % avoir fait des départs supplémentaires « à la journée ». Deux phénomènes apparaissent clairement.

D'une part, les 35 heures ont permis une désynchronisation des flux, en facilitant les départs au dernier moment, le décalage sur la semaine des départs et des arrivées ceux-ci n'ayant plus forcément lieu comme auparavant le vendredi soir ou le samedi matin et le dimanche et l'étalement des congés sur l'ensemble de l'année. Les 35 heures ont, d'autre part, donné un coup de fouet aux séjours de proximité, dans les régions de résidence, et favorisé le commerce, les parcs de loisirs et les visites culturelles lors d'excursions ponctuelles.

Evolution de la fréquence des séjours depuis les RTT

(en %)

 

Week-ends et séjours courts

Séjours longs

Plus souvent

Inchangé

Moins souvent

Plus souvent

Inchangé

Moins souvent

Cadres

49,9

43,4

1,3

28,5

68,7

0,9

Professions 

intermédiaires

32,7

56,3

1,8

15,9

76,5

1,1

Employés et ouvriers

20,3

60,6

2,9

9,7

75,8

1,3

Source : La réduction du temps de travail, des politiques aux pratiques - La Documentation française - juin 2003

Comme nous pouvons le constater, seulement les cadres partent en week-end ou courts séjours plus souvent, alors que pour les employés et les professions intermédiaires la situation n'a pas beaucoup changée.

Ces modifications de comportement n'ont toutefois pas eu, comme on aurait pu l'espérer, d'incidence majeure sur l'économie touristique. Comme l'a justement fait remarquer M.André Daguin*, « est-ce que les 35 heures ont eu une influence sur la fréquentation des hôtels et restaurants ? C'est un jeu à somme nulle. Les petites auberges à une heure ou une heure et demie de voiture des grandes villes ont connu des week-ends plus fréquentés. Dans le même temps, les hôtels des grandes villes perdaient une ou deux nuitées. Au final, cela s'est compensé. »

De fait, les départs supplémentaires générés par les RTT se sont concrétisés par des séjours en famille ou chez des amis (dans des hébergements non-marchand) pour 15 % des bénéficiaires des RTT interrogés. En outre, l'accroissement supplémentaire de temps libre résultant des 35 heures n'a finalement que peu profité aux départs en voyage, qui sont en queue des occupations citées par les bénéficiaires des RTT.

Les personnes interrogées selon une étude du Ministère du Tourisme en Novembre 2005 déclarent en effet avoir affecté leur surcroît de temps disponible au repos (47 %), à la famille et aux enfants (45 %), au bricolage et au jardinage (41 %), aux amis (34 %), au shopping (33 %), à la télévision (31 %), aux tâches domestiques et ménagères (27 %), aux sorties (23 %) et aux activités sportives (20 %) bien avant les voyages (16 % des citations).

Seules activités moins souvent citées que les voyages : les activités artistiques et créatives (11 %) et surtout les activités associatives (10 %), dont les promoteurs de la réforme attendaient pourtant un regain.

Un impact décevant sur l'hôtellerie & les loisirs

Au-delà des simples départs en vacances, c'est l'ensemble des activités de loisirs, d'hôtellerie, de para-hôtellerie et de restauration qui auraient pu être dynamisées par les 35 heures. Or, tant les observateurs que les études relèvent d'une part que les habitudes en terme d'occupation de temps libre n'ont pas été modifiées, et d'autre part que les inégalités d'accès aux loisirs qui préexistaient ont encore été accrues.

Alors qu'elles auraient pu créer un mouvement général d'engouement pour les loisirs, les 35 heures ne se sont en réalité pas traduites par une modification en profondeur de la pratique des loisirs.

En effet, les conditions de mise en oeuvre des RTT, s'accompagnant d'une intensification du travail et d'exigences accrues en matière de flexibilité, ont dans bien des cas provoqué des situations de stress et de fatigue, parfois dramatiques. De ce fait, loin d'utiliser la réduction du temps de travail pour se divertir, les salariés l'ont consacrée le plus souvent au repos, faute de moyens. Ce phénomène a été souligné à maintes reprises.

M. André Daguin* : président de l'Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie 

En outre, les 35 heures ont eu pour effet pervers d'accroître encore les inégalités dans le temps libre qui sont en France aussi fortes que les inégalités de revenus.

· première inégalité : les RTT n'ont été réellement libératrices de temps libre que pour les salariés qui ont bénéficié de journées ou demi-journées de RTT. A l'inverse, ceux pour qui elles se sont traduites par une réduction de quelques minutes de l'horaire de travail quotidien n'en ont tiré aucun bénéfice pour leurs loisirs.

· s'y ajoute une seconde inégalité, qui réside dans la réalité de la contrainte économique, laquelle a pesé lourdement pour nombre de salariés. En effet, la modération salariale accompagnant la mise en oeuvre des 35 heures qui ont ainsi été en grande partie supportées par les salariés, et au premier chef les plus modestes d'entre eux n'a pas permis aux ménages les moins fortunés de tirer bénéfice de l'accroissement de leur temps libre au profit de leurs loisirs. Ceci explique sans doute en partie l'appréciation sans équivoque selon laquelle 44 % des personnes soumises aux 35 heures seraient prêtes à « renoncer à leurs jours de RTT en contrepartie d'une hausse de salaire » (selon un article de la Confédération Française Démocratique du Travail 2003).

Loin d'augmenter les loisirs pour tous, les 35 heures ont donc créé encore de nouvelles inégalités.

Force est de constater que ce sont en fait les personnes qui partaient déjà le plus qui ont accru leur départ grâce aux 35 heures, à savoir les cadres et les Franciliens. Alors que 16 % de la population est partie en vacances et au moins quatre fois en week-end en 2002, population que le CREDOC qualifie de « privilégiés du départ », les « habitués du non-départ », qui n'ont bénéficié ni de week-end, ni de vacances depuis deux ans, représentent plus du tiers de la population : « retraités, bas revenus et non diplômés y sont surreprésentés. Chez eux, finalement, les RTT n'ont eu guère d'effet en matière de tourisme ».

C) LES RTT ONT RENFORCÉS LES LIGNES DE FRACTURE AU SEIN DU MONDE DU TRAVAIL :

Quelle a été l'influence de la réduction du temps de travail sur l'évolution des conditions de travail au sein de l'entreprise ?

L'impact de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail n'est ni uniforme ni univoque. Les conséquences des 35 heures sur les conditions de travail dans l'entreprise sont ainsi diverses et fonctions de divers paramètres se cumulant tels que la taille de l'entreprise, sa bonne ou mauvaise santé économique, et la place des salariés dans la hiérarchie. Ainsi les 35 heures ont-elles en fait accentué les lignes de clivage qui leur préexistaient entre, d'une part, petites et grandes entreprises, et, d'autre part, cadres et non cadres. Au total, il est indéniable qu'il existe des gagnants et des perdants des 35 heures.

1) L'accentuation du clivage entre les salariés des PME et des grandes entreprises :

Un constat s'impose : la réduction du temps de travail a malheureusement encore creusé le fossé séparant les salariés des petites entreprises et ceux des grandes.

Un premier clivage a été institué entre les entreprises passées aux 35 heures et celles n'y étant pas passées, qui sont essentiellement des très petites entreprises. Une hiérarchie entre les entreprises, fonction de l'état de la réduction du temps de travail, s'est instaurée dans l'esprit des demandeurs d'emploi : tous les chefs d'entreprises interrogés par la mission ont constaté que l'existence ou non d'un accord sur la réduction du temps de travail est devenue la question principale des candidats à l'embauche, que ceux-ci postulent à des postes d'ouvriers ou à des postes de cadres.

Par ailleurs, lorsque des accords ont été négociés dans les PME, ceux-ci ont été le plus souvent beaucoup moins favorables aux salariés que ceux conclus dans les grandes entreprises.

Au-delà du fossé entre grandes et petites entreprises, les RTT ont également accru les différences au sein de ces dernières : celles passées aux 35 heures disposent aujourd'hui d'un avantage comparatif comparable à celui que les grandes entreprises détiennent sur l'ensemble des PME.

De fait, si les 35 heures n'ont pas créé les difficultés d'attractivité des PME, elles sont toutefois venues renforcer le clivage qui existait déjà entre les salariés des grandes entreprises, bénéficiant d'avantages sociaux (oeuvres sociales, formation...), et professionnels (mobilité, possibilité d'évolution,...), et ceux des petites et moyennes entreprises, pénalisés à la fois par des rémunérations et des avantages sociaux plus faibles et une durée du travail plus élevée.

Or, cette situation est préoccupante, dans la mesure où, dans les années à venir, les PME vont être confrontées à des difficultés de recrutement encore supérieures à celles, pourtant considérables, qu'elles connaissent actuellement.

2) Le renforcement des clivages entre les salariés au sein même de l'entreprise :

Ayant accentué le clivage entre salariés des petites et grandes entreprises, les RTT ont en outre accru également les clivages au sein même de l'entreprise, en n'ayant pas la même incidence selon la place que les salariés occupent dans la hiérarchie.

Les cadres sont-ils les grands gagnants des RTT ?

Les 35 heures ont fragilisé la catégorie de cadres et dégradé leurs conditions de travail. Longtemps caractérisés par un temps de travail très élevé et par leur zèle, les cadres ont toujours plus travaillé que les autres salariés. La période qui a précédé la mise en oeuvre des 35 heures était d'ailleurs celle d'une grande tension entre les cadres et les entreprises au sujet même de leur durée de travail.

Alors qu'ils avaient jusque-là toujours considéré qu'ils n'avaient pas à compter leur temps, les cadres ont commencé à revendiquer un contrôle plus strict de leurs horaires au tournant des années 1990. Touchés eux aussi par le chômage alors qu'ils s'étaient pleinement dévoués à l'entreprise, les cadres se sont sentis trahis : « avant les années 1990, les cadres vivaient leur relation à l'entreprise comme une relation de confiance ».

En contrepartie d'une stabilité de l'emploi, les cadres acceptaient de travailler pour l'entreprise sans compter leur temps. Cette relation a été fortement déstabilisée, lorsque les cadres ont découvert que les entreprises pouvaient les licencier sans aucune hésitation, et bien souvent dans un but purement financier, soit pour accroître la valeur du capital, soit pour assurer une meilleure rémunération aux actionnaires

De ce fait, lors de la mise en place des 35 heures, les cadres se sont montrés, dans leur grande majorité, très attentifs à ne pas être lésés par rapport à l'ensemble des salariés. Malgré un certain scepticisme quant au changement que la réduction du temps de travail était susceptible d'apporter sur leurs propres conditions de vie, tant personnelles que professionnelles, malgré aussi la crainte d'une dévalorisation, les cadres ont été porteurs d'une revendication forte et extrêmement claire : celle de bénéficier, à l'instar des autres salariés, des modalités de réduction du temps de travail.

Par ailleurs, il n'est pas rare, comme l'ont souligné à maintes reprises les personnes auditionnées, que les cadres aient du mal à bénéficier de toutes leurs journées de réduction du temps de travail, même si la période d'adaptation terminée, le nombre de journées non prises tend à décroître. A cet égard, il est regrettable que les formules d'épargne de ces temps de repos non utilisés ne soient pas plus développées.

Toute la tâche d'organisation des équipes et de l'activité de l'entreprise repose avant tout sur les cadres, qui subissent donc sa plus grande lourdeur avec la réduction du temps de travail.

Les 35 heures : un facteur de fragilisation des salariés du bas de l'échelle et de ceux des petites entreprises :

La réduction du temps de travail s'est traduite dans la grande majorité des entreprises par une pression accrue sur les travailleurs, créant une intensification des conditions de travail pour l'ensemble des catégories de salariés. Mais si les cadres ont été le plus souvent à même de compenser cet accroissement par une plus grande liberté dans l'organisation de leur travail, la flexibilisation a souvent rimé pour les salariés les moins qualifiés et les moins bien placés dans l'entreprise avec un accroissement des contraintes professionnelles exercées sur eux, sans réelle compensation en termes de dégagement de temps personnel, alors même que la modération salariale est venue obérer leur pouvoir d'achat.

La fragilisation des salariés du bas de l'échelle a donc pris la double forme d'une intensification des conditions de travail et d'un frein à l'évolution des rémunérations de ces salariés.

L'intensification des conditions de travail :

Les 35 heures ont ainsi fragilisé encore la position des salariés les moins favorisés dans l'entreprise, et accru un peu plus les clivages existant entre les différentes catégories de salariés. Pour les plus fragiles d'entre eux, plus que le temps libéré, c'est la nature des règles relatives aux délais de prévenance et au choix des journées de réduction du temps de travail qui apparaissent importantes ; or, les salariés les moins bien placés dans l'échelle hiérarchique ainsi que dans les petites entreprises n'ont pas toujours été en mesure de négocier ces règles à leur avantage.

Dans bien des cas, les salariés ont vu disparaître des tolérances, qui leur semblaient acquises, sur les temps de pause informels (pause « café », pause déjeuner un peu plus longue que prévue,...). Les employeurs, contraints à se montrer sourcilleux, ont développé une intolérance à ce genre de pratiques, pourtant essentielle aux bonnes conditions de travail de leurs employés.

La modulation des horaires a pu de ce fait se traduire pour certains salariés par une véritable tyrannie exercée par le temps de travail sur le hors travail.

Les 35 heures ont donc été un facteur aggravant des difficultés préexistantes. L'intensification des conditions de travail a été d'autant plus durement ressentie que les travailleurs étaient ou non formés, en bonne santé, contraints par leur vie familiale, bien placés dans la hiérarchie de l'entreprise.... Pour celui qui a dû faire face à un accroissement de sa charge de travail sans bénéfice en termes d'amplitude horaire, voire même au contraire avec des contraintes d'organisation accrues du fait de la modulation des horaires, les 35 heures ont pu devenir source, au mieux de mécontentement, et au pire de souffrance.

3) Un problème important : l'évolution des rémunérations a été freinée :

Outre la dégradation des conditions de travail et d'articulation entre vie professionnelle et vie privée, les 35 heures se sont accompagnées d'une modération salariale qui a pesé sur tous les salaires, mais dont les effets se sont faits le plus fortement ressentir sur les plus bas d'entre eux.

Certes, le phénomène de la modération salariale ne date pas des 35 heures : la désindexation des salaires sur l'inflation, cumulée à la montée du chômage, ont été à son origine. Toutefois, comme l'a montré une étude récente de l'INSEE, ce processus a été accentué à partir de 1998 par la mise en place des 35 heures. De fait, pour compenser la réduction du temps de travail, la plupart des accords ont posé le principe d'une modération des salaires dans les deux années suivant leur signature.

L'INSEE souligne que les salaires du secteur des services, nets de cotisations sociales et déflatés des prix à la consommation, ont connu des évolutions particulièrement dynamiques entre 1996 et 2000 (+ 8,2%). Plusieurs facteurs ont contribué à ce résultat : la baisse des cotisations salariales, le recul de l'inflation et la hausse du niveau de qualification. Néanmoins, l'INSEE met en évidence le « contexte de modération salariale liée à la réduction du temps de travail »

Si elle rappelle que pour 90 % des salariés, la réduction du temps de travail n'a entraîné aucune perte de salaire (une compensation étant réalisée sous la forme d'une hausse du salaire horaire ou d'une prime spécifique incluse dans le salaire de base), l'INSEE souligne que cette compensation s'est, pour plus de la moitié des salariés concernés par un accord de réduction du temps de travail, accompagnée d'un gel ou d'une augmentation moindre des salaires pendant une durée moyenne de deux ans.

Par ailleurs, l'INSEE met en évidence « un resserrement des bas salaires vers le SMIC», notamment parce que si « les salariés rémunérés au niveau du SMIC ou des garanties mensuelles de rémunération ont leur pouvoir d'achat garanti par des mécanismes de revalorisation, ce n'est pas le cas des salariés rémunérés légèrement au-dessus des minima légaux, qui ont vu leur salaire freiné par les accords de modération salariale liée à la RTT

Enfin, l'étude de l'INSEE fait apparaître que « la réorganisation du travail liée à la RTT a entamé certaines primes ». En effet, la modération salariale n'a pas porté seulement sur le salaire de base, mais s'est également traduite dans les rémunérations annexes et en particulier sur les primes. La part des primes dans la rémunération globale a ainsi diminué entre 1999 et 2000, surtout pour les ouvriers pour lesquels elle est passée de 13,9 % en 1999 à 12,7 % en 2000. Cette diminution a concerné surtout les primes liées aux contraintes de poste. En effet, à activité et à structure de qualification données, « les entreprises passées aux 35 heures » ont attribué en 2000 moins de primes de contrainte de postes que les entreprises restées à « 39 heures » ». Cette limitation des primes a surtout concerné les ouvriers, pour lesquels ce type de primes est une composante importante de la rémunération. De même souligne l'INSEE, « l'annualisation et la modulation du temps de travail ont entraîné la transformation de certaines heures supplémentaires en heures prises en compte dans la durée légale, ce qui a induit un manque à gagner pour les ouvriers et les employés

4) Les 35 heures : une aubaine pour les femmes ?

La mise en place des RTT a suscité de fortes attentes auprès de la population salariée féminine, traditionnellement demandeuse d'une amélioration de la conciliation entre les contraintes de la vie professionnelle et celles de la vie privée. Cette aspiration à un meilleur équilibre de vie était en effet présente dans l'esprit des lois sur les 35 heures. Qu'en est-il exactement aujourd'hui ? Les femmes ont-elles retiré un bénéfice personnel et professionnel de la mise en place de la réduction du temps de travail ?

Les problématiques féminines ne semblent pas avoir été spécifiquement prises en compte lors des négociations sur la réduction du temps de travail, ce qui est regrettable, dans la mesure où il y avait là matière à une réflexion sur la façon de modifier le caractère sexué de la division du travail, les femmes n'occupant pas les mêmes postes que les hommes, du fait notamment d'une disponibilité professionnelle jugée insuffisante, et d'améliorer la position des femmes dans l'entreprise. L'influence de cette réforme sur la place des femmes dans l'entreprise est sujette à discussion.

D'une part, l'impact des RTT sur la conciliation entre vie privée et vie professionnelle est globalement jugé positif par les femmes qui travaillent, puisqu'elles étaient 61% à constater une amélioration en mai 2001. Toutefois, au-delà de ce résultat global, les opinions divergent fortement en fonction de la place des femmes dans la hiérarchie de l'entreprise et de la catégorie socioprofessionnelle à laquelle elles appartiennent. Si les femmes cadres constatent une amélioration à 72,5 % de leur vie quotidienne - contre 8 % constatant une dégradation, et 19,5 % aucun changement -, seules 40,2 % des femmes non qualifiées font le même constat, alors qu'elles sont 20,4 % à ressentir une dégradation et 39,5 % à ne voir aucun changement.

Mais ces disparités sont encore plus fortes concernant l'impact des RTTsur l'évolution des conditions de travail.

Evolution des conditions de travail selon le sexe et la catégorie socioprofessionnelle

(en %)

 

Catégorie socioprofessionnelle

Conditions de travail

 

Amélioration

Sans changement

Dégradation

Hommes

Cadre

29,2

42,9

27,9

Intermédiaire

30,9

40

29,1

Qualifié

24,3

47,3

28,4

Non qualifié

24,2

48,5

27,4

Ensemble

27

44,8

28,3

Femmes

Cadre

42,4

39,3

18,4

Intermédiaire

21,3

50,9

27,8

Qualifié

25,2

49,2

25,5

Non qualifié

20,9

43,7

35,4

Ensemble

25,1

47,7

27,2

Ensemble

26,4

45,6

28

Source : RTT et Modes de Vie - DARES 2004

Suite à cette étude, nous pouvons constater que 29,2% des hommes cadres ainsi que 42,4% des femmes cadres ont constaté une amélioration de leurs conditions de travail depuis la mise en oeuvre des RTT.

Ainsi, bien que les femmes soient plus nombreuses que les hommes à se déclarer satisfaites des RTT, elles ne constituent toutefois pas un groupe homogène, et les clivages entre les différentes catégories de salariés se reproduisent au sein de la population féminine. Au-delà de la satisfaction des femmes cadres, qui étaient celles qui souffraient le plus, avant la mise en place des RTT, d'un manque de temps pour leur vie personnelle, demeure la déception des autres femmes salariées, et notamment des femmes non qualifiées, pour qui les 35 heures sont finalement venues introduire plus de contraintes que de souplesse, tant dans la vie au travail que dans la vie privée. Ces dernières ont en effet subi de plein fouet les contraintes de la flexibilité, qui s'est souvent soldée pour elles par une désarticulation de leurs différents temps de vie, alors même que leur temps de travail est fortement contraint par les impératifs de la vie familiale et domestique.

En effet, la modulation du temps de travail est source d'une irrégularité particulièrement préjudiciable pour les femmes qui ont, dans leur grande majorité, même si les choses évoluent pour les jeunes générations, la charge de l'organisation de la vie familiale.

D) LES 35 HEURES GENERATRICE D'EXCLUSION ET DE REDUCTION DU LIEN SOCIAL :

La réduction du temps de travail est génératrice d'exclusion au moins à deux niveaux. D'une part, en comprimant les heures disponibles, et en poussant les salariés à être de plus en plus productifs, les RTT ont fermé la porte de l'entreprise aux personnes les moins performantes car les responsables d'entreprise sont à la recherche des salariés les plus productifs avec une rentabilité horaire la plus importante possible.

D'autre part, elles ont accru encore les différences de statuts entre salariés de la fonction publique et du secteur privé d'un côté, et bénéficiaires de la réduction du temps de travail et ceux n'en bénéficiant pas, de l'autre.

1) Les RTT facteur d'exclusion des salariés les moins performants :

Si les salariés les plus performants ou employés par des structures « solides » ont pu tirer leur épingle du jeu, il n'est pas sûr que ce soit le cas des personnes les plus précaires, qui ont du mal à trouver leur place dans des entreprises où les salariés sont de plus en plus soumis à des impératifs de performance et de rentabilité. Si cette situation n'est évidemment pas uniquement due aux 35 heures, celles-ci ont toutefois encore augmenté la pression, au détriment d'un certain rôle social et intégrateur de l'entreprise.

2) Les RTT facteur d'accroissement des clivages entre secteur public et secteur privé et entre bénéficiaires ou non bénéficiaires des RTT :

Les RTT ont encore accru les clivages au sein du monde du travail entre secteur public et secteur privé. En effet, le contraste entre secteur marchand et fonction publique s'est pour le moins consolidé, dans la mesure où la RTT au sein des fonctions publiques d'Etat et territoriale s'est faite selon la modalité la plus favorable pour les salariés, à savoir l'octroi de jours de RTT, en l'absence quasi-totale de réorganisation pouvant être à l'origine de contraintes nouvelles. Le même type de contraste existe aussi entre ceux qui bénéficient des 35 heures et ceux qui n'en bénéficient pas.

Il existe en effet, les oubliés des RTT. Seulement 60 %. des personnes travaillant dans le secteur marchand sont concernées par les 35 heures : il y a donc 40 % des actifs dans le secteur marchand, à l'instar des chefs de PME qui ont dû travailler plus pour compenser les RTT accordée aux salariés, qui ont pour la plupart, du fait du sentiment de devoir payer les 35 heures aux autres, développé une certaine amertume risquant d'aboutir à un véritable communautarisme social.

Dans une enquête publiée en juin 2003, le magazine Liaisons sociales remarquait que « la France carbure aux deux-temps. Il y a ceux qui partent en congé ou en week-end prolongé et ceux qui les regardent partir. ». Les auteurs notaient, à juste titre, que « l'exaspération des exclus des 35 heures est aujourd'hui perceptible » et que « la goutte d'eau des 35 heures a fait déborder le vase des rancoeurs accumulées par les salariés des petites entreprises et par la vaste galaxie de tous ceux qui travaillent à leur compte «.

IV/ REMISE EN CAUSES DES RTT

A) LE DESASTRE ECONOMIQUE DES RTT :

Dès maintenant nous savons qu'il s'agissait bien d'une décision marquée par très peu de préparation, l'absence d'expérimentation et le mépris des conséquences.

PREMIERE IDEE FAUSSE : Les 35 heures sont dans la continuité de la tendance de la baisse de la durée du travail.

Les économistes montrent que dans ce domaine rien n'est linéaire. Sans compter que la situation de l'emploi ne s'y prêtait pas. On a en fait oublié :

· que la France avait déjà une des durées du travail les plus faibles

En 1997, avec 1605 heures de travail par an par salariés, la France travaillait déjà moins que 14 pays de l'OCDE* dont certains réputés pour un grand pragmatisme social comme la Suède, la Finlande ou l'Islande. Ainsi, les Etats-Unis, travaillaient 15 % de plus, le Japon, 16 %, l'Australie 16 %, le Mexique 20 %, la République tchèque, 29 % et la Corée 52 %.

· que la France est de surcroît un des pays qui fait le moins travailler sa population en âge de travailler, les jeunes et les plus âgés notamment.

OCDE* : Organisation de Coopération de Développement Economique

Les jeunes prolongent leurs études, les quinquagénaires partent en préretraite, Ainsi de 1981 à 2000, le taux d'activité des Français de 20 à 24 ans est passé de 72,8 % à 51,2 %. Celui des Français de 60 à 64 ans de 34 à 14,5 %. Le taux d'activité des 55-59 ans est lui aussi un des plus bas de l'OCDE. Le taux d'activité globale, des 15-64 ans, n'est lui que de 68,6 % en 2000.

1) Dans de nombreux pays la durée de travail remonte :

La Suède, (dans le hit parade traditionnel des avancées sociales) a le palmarès de la hausse de la durée du travail.

Sur la période 1991-1997, la durée annuelle du travail a augmenté dans 7 pays de l'OCDE (Australie, Canada, Finlande, Mexique Nouvelle-Zélande, Suède, Etats-Unis). La Suède a le palmarès avec 6,2 % de hausse sur la période. Depuis cette date, 5 autres pays de l'OCDE ( Suisse, République tchèque, Espagne, Islande et la Corée) ont rejoint cette tendance haussière.

En la matière, il n'y a donc pas un « retard » national à rattraper, au contraire. En France, il y a eu également des contre-tendances, avec augmentation du temps de travail, de 1938 jusqu'à la fin des années 50, à cause du réarmement, de la reconstruction et de la croissance. Dans tous les pays, et donc en France, le travail constitue une valeur essentielle de notre société.

Vouloir le contrôler consiste à substituer l'Etat au citoyen. Or, c'est à lui seul de décider. L'honneur de la société est de lui offrir de multiples opportunités.

2) Doutes à l'origine, réflexes dirigistes ensuite :

En 1991, à un congrès de la CFDT, Martine Aubry prend la parole en disant : « J'ai bien compris qu'ici pour se faire applaudir, il faut parler de la réduction du temps de travail. Eh bien, vous allez être déçus. Je ne crois pas qu'une mesure généralisée de réduction du temps de travail créerait des emplois. Il n'y a pas de solution miracle. » A peine élu, Jospin annonce que : « le slogan des 35 heures payées 39 n'est pas le nôtre. Il serait antiéconomique. » Dans Libération, le 26 septembre 1997, Dominique Strauss-Kahn déclare « Nous n'avons jamais dit 35 heures payées 39. Ce serait détruire des emplois à coup sûr. »

Martine Aubry : « les 35 heures, on les a promises. On est bien obligé de les faire. ». Au conseil national du PS, du 27 septembre 1997, Jospin : « Si les 35 heures devaient venir tout de suite et être payées 39, le coût ne serait pas supportable pour les entreprises. Ce serait donc une mesure antiéconomique. Mais, si le passage aux 35h, devait entraîner une baisse de salaire, ce serait une mesure antisocialiste et une faute politique. »

En France la durée du travail a toujours été fixée par la loi (L.212-1). Les études commandées seront très optimistes car basées sur des méthodes qui étaient à cette époque déjà largement connues comme non pertinentes. D'ailleurs, les responsables hiérarchiques des auteurs le signaleront très nettement voire courageusement. L'OFCE* écrit en 1997 : "la réduction de la durée du travail est indissociable d'une baisse des revenus des salariés en place". L'OFCE écrit en 1998 : "l'impact sur l'emploi est maximal lorsque la réduction de la durée du travail se fait à coût inchangé pour l'entreprise ».

Les patrons des services d'études sont particulièrement prudents estimant que les travaux effectués ne sont cependant pas des prévisions. Jean-Paul Fitoussi le président de l'OFCE en 1998 : "Confronté à cette radicale nouveauté, il n'est pas d'autre méthode pour le chercheur que de procéder par hypothèses, dont chacune est forcément simplificatrice et dont la conjugaison conduit à un résultat fragile

Ainsi, la réduction obligatoire du temps de travail était dans l'état de la France en 1997, une décision politique qui ne pouvait qu'affaiblir l'économie et la capacité future à créer des emplois. Examinons maintenant comment dans leur application immédiate les 35 heures furent reçues par ceux qui sont trouvés directement concernés.

3) L'appréciation des chefs d'entreprise reste globalement négative :

Pour la première fois, le Ministère de l'Emploi et de la Solidarité, en avril 2002, publie une enquête réalisée par la DARES auprès des entreprises pour connaître leur opinion sur les 35 heures. Les employeurs passés aux 35 heures trouvent que la RTT est négative au plan économique, notamment au regard des coûts salariaux, des coûts de gestion de l'organisation, de la rentabilité, du respect des délais et de la réactivité. Toutefois, l'impact est positif pour la durée d'utilisation des équipements, la production et la polyvalence des salariés. Ceux qui jugent positif l'impact de la RTT sur la situation économique globale de leur établissement n'emploient que 5 % des salariés, contre 28 % pour ceux qui le jugent négatif.

OFCE* : Observatoire Français des Conjonctures Economiques

Les impacts économiques de la RTT sur les établissements d'hôtellerie restauration, peut-on envisager un lien entre les RTT et la dette ? 


Etude réalisée sur des établissements de 5 salariés ou plus, ayant réduit la durée du travail avant février 2001. Source : DARES

En outre, 58 % des entreprises hôtelières connaissaient des difficultés de recrutement au sommet de la croissance (janvier 2001 DARES) et encore 35 % aujourd'hui. Ces problèmes sont connus depuis longtemps. Ainsi, dès 2000, la DARES, après analyse de données recueillies auprès de 18 entreprises ayant signé un accord « Robien » ou « Aubry » a recensé 3 grandes difficultés :

· gains de productivité difficiles,

· annualisation pesante,

· modération salariale dégradant le climat social de l'entreprise.

D'autres éléments confirment ces difficultés. Fin 2001, 55 % des entreprises de moins de 20 salariés considéraient que la RTT aura un effet négatif sur leur activité. En outre, d'après une enquête de la CGPME, 36 % des chefs d'entreprise estiment que l'application des RTT a dégradé le climat social de leur entreprise, 66 %, que leur entreprise a perdu en compétitivité.

Elle rappelle également que cette mesure oblige les entreprises à intégrer 157 pages nouvelles de textes de loi, décrets et autres règlements, qu'aucun droit à l'expérimentation n'est accordé et finalement que la loi du 19 janvier 2000 remplaçant celle du 13 juin 1998, invalide de nombreux accords précédemment passés.

Par ailleurs, il est intéressant de noter que pour assurer le passage à l'euro, les banques, les établissements de crédit, les sociétés de gestion et les entreprises d'investissement ont dû obtenir une dérogation sur la durée du travail. Le temps de travail a pu aller jusqu'à 52 heures hebdomadaires.

Suite à certaines études de la DARES, nous pouvons constater que les négociations sont une fois sur deux conflictuelles. Dans 15 % des cas, cela va jusqu'à la grève ou le débrayage, dans 7 %, l'entreprise a connu un épisode revendicatif sans arrêt de travail (manifestation, pétition, etc.), et dans 24 % les manifestations de mécontentement étaient du type « rumeur ».

Lorsque l'on regarde les statistiques, les grèves ou manifestations sont plutôt l'apanage des plus grands établissements, surtout quand ils sont dotés d'une représentation syndicale ancienne. Ainsi, moins de 3 % des salariés des établissements employant moins de 50 personnes ont connu une grève lors des négociations sur les RTT contre 18 % de ceux qui travaillent dans de plus grandes unités. Ces négociations ne semblent pas profiter au mouvement syndical. En effet, employeurs comme salariés estiment que les syndicats ne sont pas utiles à la mise en place de la RTT. Le mandatement dans les entreprises ne s'opère qu'à la fin de la négociation. Heureusement, à l'issue des négociations, le climat social semble s'améliorer.

La mise en oeuvre des dispositifs Aubry ne s'est pas effectuée sans difficulté. Ainsi, fin 2001, seulement 23 % des PMI de moins de 20 salariés étaient prêtes pour le passage aux 39 heures. L'Observatoire du dialogue social ne dit rien d'autre. Il a interrogé en mars 2000 plus de 400 DRH. Il semble que ce soit les plus petites structures qui s'inquiètent le plus des conséquences des RTT.

B) LES CONSEQUENCES SUR LES SALARIÉS :

Les salariés connaissent une réelle baisse du temps de travail. Compte tenu du calendrier de la baisse de la durée légale, les grandes entreprises sont à cette date davantage engagées dans un processus de réduction du temps de travail que les petites.

Ainsi, sept salariés sur dix ont alors connu une réduction de leur durée du travail en dessous de 1 650 heures dans les entreprises de plus de 500 salariés, contre un sur dix dans celles de 10 à 19 salariés..

La diminution de la durée effective du temps de travail de la catégorie majoritaire de salariés est apparemment source de nouvelles tensions :


Etude réalisée sur des établissements de 5 salariés ou plus, ayant réduit la durée du travail avant février 2001.Source : DARES

Avis des salariés sur leurs conditions de travail en entreprise :


Part des salariés travaillant dans une entreprise dont la durée collective moyenne est inférieure ou égale à 1 650 heures par an. Source : enquête ACEMO annuelle de la DARES.

Aussi, à la fin de l'année 2000, plus de deux ans et demi après le vote de la première loi « Aubry », les RTT concernent près d'un salarié sur deux. Sur un champ de 15,1 millions de salariés potentiellement concernés dans les secteurs concurrentiels, environ 7,6 millions travaillent dans des entreprises déjà passées à 35 heures. Cela touche toutes les catégories professionnelles. Ainsi, d'après une enquête de fin 2001, en France, 46 % des managers ont droit à la RTT et en profitent et 33 % y ont droit mais ne peuvent la mettre en pratique.

Les salariés à temps partiel semblent désavantagés. En effet, la durée du travail des salariés qui restent à temps partiel baisse plus fréquemment dans les entreprises passées à 35 heures que dans celles restées à 39 heures.

1) le ralentissement ou le gèle des hausses de salaires :

Les rémunérations sont à terme touchées par les lois Aubry. Sept accords sur dix prévoient une compensation salariale. Dans la quasi-totalité des cas, elle est intégrale pour l'ensemble des salariés. Peu la limite à certaines catégories, et envisage une compensation partielle ou encore n'en prévoie aucune. Cependant, un quart des accords reste muet sur ce sujet. Près de trois accords sur dix prévoient l'évolution future des salaires, il s'agit alors sept fois sur dix d'un gel plutôt que d'une modération.

En cas de gel, les négociateurs précisent le plus souvent la période pendant laquelle les rémunérations seront bloquées : elle va, en général, de un à trois ans, et dans plus de la moitié des cas le gel est de deux ans.

D'autres éléments montrent que les augmentations sont bien prisonnières des RTT. D'après l'enquête du Cabinet Hay Management, les dépenses effectives affectées aux augmentations de salaires diminuent. Sur l'ensemble des entreprises concernées, on observe également une augmentation moins importante des salaires de base, la différence avec les autres étant de l'ordre de 1 % sur deux ans.

On constate de même une forte diminution des heures supplémentaires dans les entreprises passées au 35 heures. Fin 2000, le nombre moyen d'heures supplémentaires par salarié est en nette diminution dans les établissements Aubry. Alors qu'il était avant RTT comparable à celui des autres établissements, d'environ 4 heures par trimestre, la baisse est de 2,0 heures du 4ème trimestre 1998 au 4ème trimestre 1999, alors que dans les établissements restés à 39 heures, à structure par taille et secteur identique, le recul est de 0,2 heure. La mise en oeuvre de dispositifs de modulation des horaires et les nouvelles organisations du travail associées aux RTT permettrait ainsi de réduire le volume d'heures supplémentaires, par rapport à celui pratiqué auparavant.

Ce point sur les salaires est fondamental. Avant 1997, les Français plébiscitaient les hausses de revenus. C'est ce que montre l'évolution du partage des gains de productivité. Ceux-ci sont passés de 4 % en 1970 à 2 % en 1995. En début de période il était donc possible de réduire de 2% le temps de travail par an et d'augmenter le pouvoir d'achat par tête de 2%.

Dans le milieu de la décennie 1990, on observait une stagnation de la durée de travail annuelle effective et donc un gain par tête de 2% l'an, traduisant le fait que dans une période où la productivité horaire donc les gains de rémunération du travail baissent, le pouvoir d'achat est préféré aux loisirs. Une étude du CREDOC montre également que les deux tiers des salariés privilégient encore le pouvoir d'achat au temps libre.

2) Les RTT sont égales à une montée du stress des salariés (cf. annexe 3) :

Les conditions de travail se dégradent. On pense, par exemple, aux « pointeuses ou badgeuses » pour les cadres ou aux décomptes auto-déclaratifs que les entreprises mettent en place pour répondre aux lois Aubry I et II. Une majorité de salariés a moins de temps pour les mêmes tâches, est plus stressée dans son travail, a de nouvelles tâches en plus de son travail, et effectue un travail moins soigné.

Les conditions de travail se dégradent pour 44,8 % des hommes et 47,7 % des femmes. C'est d'autant plus marqué que les qualifications sont faibles. Le rapport Viard* donne des éléments de réponse à ce constat. Il relève des différences de modalités de RTT selon les statuts et en particulier une inégalité d'accès aux journées et aux demi-journées. Deux extrêmes apparaissent. D'un côté, les ouvriers sont très nombreux à n'avoir qu'une réduction journalière du temps de travail alors que d'un autre, les cadres supérieurs bénéficient exclusivement de jours de vacances et de demi-journées.

3) Les Français les moins qualifiés pas satisfaits du passage aux RTT :

Le rapport Viard, constate que la RTT a développé des effets positifs sur la vie quotidienne des salariés (plus de temps libre, week-end libéré). Des pratiques nouvelles se créent. Des vacances plus fréquentes et moins longues : les professionnels du tourisme profitent de la RTT. De son la DARES confirme l'évolution dans une enquête de début 2000 : 59 % des salariés à temps complet ayant connu une RTT ont constaté une « amélioration de leur vie quotidienne », 13 % ont constaté une « dégradation », 28 % n'ont pas constaté de changement. Les cadres sont plus satisfaits (66 %). Quant aux conditions de travail, 26 % ont constaté une « amélioration », 28 % ont constaté une « dégradation ». Les salariés estiment que la mise en place de la RTT a entraîné d'abord, une exigence de polyvalence accrue (48 %), moins de temps pour les mêmes tâches (42 %), plus de stress au travail (32 %) et de nouvelles tâches en plus (23 %). Les salariés les plus satisfaits sont ceux qui bénéficient d'une ½ journée ou d'une journée à prendre régulièrement. Il faut constater une dégradation de la vie quotidienne pour 20,4 des emplois féminins non qualifiés. Les faibles revenus sont clairement mois favorisés par ces dispositifs. Par exemple, les parents travaillant encore 39 heures et voulant passer à temps partiel sont obligées de diminuer leur temps de travail à 28 heures pour bénéficier de l'Allocation parentale d'éducation (APE) au lieu de 32 heures auparavant.

D'autres problèmes demeurent trop peu évoqués comme le travail illégal, l'économie souterraine qui risque d'augmenter. Les salariés disposent en effet de temps libre, mais avec une diminution de leurs heures supplémentaires, ils voient leur pouvoir d'achat diminuer. Au total, les Français ont un jugement réaliste sur cette mesure. Selon un sondage, 62 % des français pensent que les RTT ont un impact plutôt négatif sur l'économie. 38 % estiment que la vie quotidienne a été améliorée grâce à ce dispositif.

Un dernier sondage est particulièrement éclairant : 76 % des français souhaitent l'assouplissement des 35 heures et la possibilité pour les entreprises de recourir davantage aux heures supplémentaires, ne serait-ce que pour pouvoir le cas échéant, « travailler plus pour gagner plus ». (articles de la Cfdt 2004)

Le rapport Viard* : Jean Viard : Directeur de Recherche au centre d'étude de la vie politique Française

4) Le constat d'une démotivation croissante :

Au-delà de l'accroissement de l'absentéisme, les auditions et visites auxquelles la mission a procédé ont mis en lumière un phénomène de démotivation grandissante. Contrairement à ce à quoi l'on aurait pu s'attendre, les  RTT, bien qu'elles aient dégagé plus de temps pour la vie personnelle des salariés, n'ont pas augmenté leur motivation par rapport à leur travail ou à l'entreprise. Bien au contraire, il semble qu'elles aient contribué à démobiliser les personnels.

Un premier constat s'impose. En dévalorisant le rapport entre le travail effectué et la rémunération, la réduction du temps de travail a jeté le doute sur le lien entre travail et salaire

Ces effets pervers ont de plus été amplifiés par l'arrivée sur le marché du travail de nouvelles générations, dont le rapport à l'entreprise est différent de celui de leurs aînés, y compris chez les cadres : ceux-ci sont accusés de n'avoir « ni la culture de l'entreprise, ni la motivation nécessaire. Souvent, leur objectif, quand ils arrivent, est d'en faire le moins possible , et ainsi de ne pas être capable de prendre la mesure des enjeux actuels auxquels l'entreprise en France et les entreprises françaises dans le monde, ont à faire face : « ceux qui donnent la primauté à une organisation de vie tranquille s'installeront dans les sociétés qui auront, hélas, probablement à les licencier un jour, parce qu'elles n'auront pas le niveau d'activité qui justifie qu'elles réussissent dans la compétition mondiale ».

Un nouveau phénomène qui peut nous inquiéter, celui du développement du licenciement à la demande du salarié, qui veut pouvoir profiter du régime indemnitaire avant de retrouver un emploi. Bien qu'elle ne concerne qu'une partie limitée des salariés, celle assurée de retrouver un emploi quand elle le souhaite, cette manifestation supplémentaire d'un déni de la valeur du travail et de l'entreprise n'en est pas moins néanmoins réelle ; elle a de fait été relevée par nombre des personnes.

C) CONSEQUENCES SUR L'ECONOMIE DU PAYS :

D'abord le chômage a peu baissé alors que c'était le premier objectif de la mesure. Avec 9,2 % de chômage, la France est l'avant dernier élève de la classe européenne. Son taux de chômage est de 1,6 points plus élevé que la moyenne européenne. Depuis Juin 1997, 8 pays européens ont réduit plus fortement le chômage que la France. Actuellement plus de la moitié des pays européens connaît une situation de plein emploi, leur taux de chômage étant inférieur ou égal à 5 %. Il y a donc de véritables exemples à méditer. Les remèdes au sous-emploi sont à chercher hors de nos frontières, pas dans notre corpus idéologique national.

1) L'attractivité du territoire remise en cause :

Depuis 1997, on assiste à une accélération des délocalisations et à une chute très sévère de l'attractivité du territoire. Plus précisément, lorsque l'on regarde les palmarès en terme d'accueil d'investissements étrangers, la France recule sensiblement. De 1970 à 1998, la France et le Royaume-Uni se disputaient la première place de pays européen d'accueil. Devant eux, au sein de l'OCDE ne figurait que les Etats-Unis. Depuis 1999, le recul est plus net, cette année là, la Suède et l'Allemagne sont passées devant. En 2000, pour les investissements directs en provenance de l'étranger, la France est revenue au 7ème rang, derrière les Etats-unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Union Belgo-luxembourgeoise, le Canada et les Pays-Bas. A l'inverse, en 2000, au sein des pays de l'OCDE, la France devient le deuxième pays investisseur à l'étranger, derrière le Royaume-Uni, et précède les Etats-Unis. Elle était au troisième rang en 1999 et au quatrième en 1998. Avant cela, son rang oscillait entre le 4ème et le 6ème, les pays la précédant étant suivant les années, les Etats-unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Japon, et les Pays-Bas.

Le recul de l'accueil des investissements étrangers en France montre que l'attractivité du territoire français baisse. L'accélération plus importante que chez ses partenaires de l'internationalisation des entreprises françaises le confirme.

L'étude publiée le lundi 24 juin 2002 par le cabinet Ernst & Young ne dit rien d'autre. L'enquête réalisée auprès de 200 dirigeants mondiaux, entre les 13 et 27 mars, montre que quatre décideurs sur dix estiment que la situation de la France s'est dégradée en 2001 "en tant que site d'implantation et de développement". Seul un tiers voit une amélioration se profiler dans les trois prochaines années. Résultat : moins d'une entreprise interrogée sur deux prévoit de s'y implanter ou d'y développer ses activités. "Les responsables des implantations internationales remettent en question la capacité de la France à être un site stratégique", souligne le document. Les intentions déclarées sont inquiétantes : 43 % des dirigeants américains envisagent de délocaliser une partie de leurs activités françaises vers un autre pays européen. Tout comme près de 20 % des entreprises européennes et françaises. Ces délocalisations envisagées ne sont pas forcément totales ou industrielles. Elles peuvent concerner une plate-forme logistique, un siège social, un département comptable... "

Que manque-t-il à la France pour être plus attractive ?

Les points favorables : la qualité de vie, la fiabilité de ses infrastructures de transport et de télécommunications, la qualité de ses scientifiques, son implantation au centre de l'Europe. Les points défavorables : L'environnement législatif, les coûts salariaux, les charges fiscales des entreprises, la faible flexibilité du droit du travail, la lourdeur de ses réglementations

2) Des coûts exorbitants et des résultats faibles :

Les administrations ont évalué la création d'emploi dans une fourchette de 200 à 300 000. Elles ont sous-estimé les effets d'aubaines (les emplois de toute façon créés), les effets de ralentissement de la croissance du à une rentabilité et une compétitivité décrues qui in-fine vont diminuer les carnets de commande. Elles ne prennent pas en compte également les destructions d'emplois dues à l'augmentation du SMIC et au relèvement des prélèvements.

Ainsi, Pour Pierre Cahuc*, qui commentait les chiffres d'une étude similaire de la DARES, il y a deux années, « il n'existe aucune raison sérieuse de penser que ces chiffres signifient que la réduction de la durée du travail a créé des emplois. Tout d'abord, les entreprises embauchent en permanence. Il y a environ 4 millions d'embauches chaque année en France. Les embauches réalisées grâce à la loi Aubry ne représentent donc au mieux que 3 % de celles observées traditionnellement. Le marché du travail est caractérisé par un intense processus de réallocation de la main-d'oeuvre qui implique qu'un surplus d'embauches ne se traduit pas nécessairement par un accroissement de l'emploi, car les sorties de l'emploi sont pratiquement aussi nombreuses et plus fluctuantes que les embauches.

Certes, la loi Aubry contraint les entreprises qui signent les accords à maintenir leur effectif pour une durée minimale de deux années. Cependant, l'extrême variabilité des effectifs des entreprises ne peut que susciter des doutes sur la possibilité de respecter systématiquement de tels engagements. Comment les entreprises confrontées à des difficultés imprévues vont-elles pouvoir honorer leurs engagements ?

Ensuite, chaque année, une proportion significative des entreprises a un effectif qui croît dans des pourcentages supérieurs à ceux imposés par la loi Aubry lors de la signature d'accords prévoyant des accroissements d'effectifs. Il est donc hautement vraisemblable qu'une forte proportion des embauches effectuées dans le cadre de la loi Aubry aurait été réalisée de toute façon. D'autre part, nul ne peut exclure que des emplois soient détruits, à terme, par le poids du financement de la loi Aubry. »

Les économistes de la Fondation Concorde* proposent, avec toutes les réserves nécessaires, une évaluation comparée des effets sur l'emploi et les finances publiques de la baisse des charges et de la réduction du temps de travail, à dépenses publiques égales. Une hypothèse favorable sur la création brute d'emploi aux environs de 225 000 par la réduction du temps de travail ne débouche en réalité que sur 50 000 emplois.

En effet, il faut y soustraire la destruction d`emplois due aux financements et à l'enchérissement du coût du SMIC. La mesure coûterait environ 11 Milliards d'euros.

De la même manière, par une autre mesure structurelle, la baisse des charges sur les bas salaires (franchise ou ristourne), serait plus efficace avec 250 000 emplois nets. Pour cette mesure l'effet brut est plus grand et les atténuations sont plus faibles.

M. Pierre Cahuc : Prix du meilleur jeune économiste français de 2001

Fondation Concorde : lobby de 1800 membres, elle met en place un cercle de réflexion « pour faire de la France le pays le plus prospère d'Europe » 

Le bilan est donc clair. En net, 11 Milliards d'euros permettent de créer 50 000 emplois par la RTT et 250 000 par les baisses de charges. Ne pouvait-on pas le prévoir ?


Suite à cette étude, nous pouvons constater que les salariés ont de moins en moins de temps pour effectuer une même tâche et qu'ils sont de plus en plus stressé au travail.

Le coût des RTT pour les finances publiques:

Le Sénat a particulièrement suivi la question du financement de la réduction du temps de travail. C'est grâce à lui, que le grand public sait que les 35 heures induisent un coût exorbitant 11 milliards d'euros en 2000, 15 milliards d'euros en 2001, environ «30 milliards d'euros à terme et qu'il n'avait pas été prévu par le gouvernement et ses services ». « Ceux-ci, au contraire, avaient élaboré un scénario affichant la neutralité de la réduction du temps de travail sur les finances publiques, dès lors que les régimes sociaux, au nom de la théorie des « retours » financiers des RTT, contribuaient au financement de ce dispositif. Le gouvernement aurait donc élaboré des projets de loi, devenues les « lois Aubry », avant de connaître précisément la façon d'assurer le financement du dispositif qu'il proposait, les premières prévisions sur le coût des 35 heures se révélant en effet totalement erronées.

Ainsi, au final, avec quelques années de recul, il est clair que notre pays a réussi « l'exploit » de prélever chaque année des dizaines de millions d'euros sur la richesse nationale pour contribuer a ralentir notre capacité a créer cette même richesse..

Nous sommes, constatons-le avec tristesse, un des derniers pays au monde, le seul parmi les pays développés, encore sous la menace de telles folies idéologiques.

3) Les RTT synonyme de régression sociale ?

Tout le monde va perdre. Le pouvoir d'achat et la rentabilité des entreprises sont touchés négativement, la création d'emploi est au mieux très faible, les salariés sont démotivés. Des doutes très forts s'installent sur l'avenir de la France.

En poussant la France vers un équilibre bas - Durée raccourcie du travail effectué, peu d'emploi, salaires plus faibles que ce qu'ils auraient pu être, service de plus basse qualité, perte de compétitivité , c'est tout le pays qui s'est recroquevillé.

Comment sortir de cette impasse :

L'assouplissement du système des RTT est une nécessité absolue pour les entreprises qui ne sont pas passées à 39 h (91 % des entreprises employant 51 % des salariés), et une soupape indispensable pour celles qui ont adopté un horaire collectif à 39 heures et qui ne pourraient y rester. Deux sujets sont plus prioritaires : les possibilités de souplesse dans l'organisation du travail et la maîtrise de son coût, coeur de la compétitivité et donc de l'emploi en France.

Avec la loi Aubry, la durée du travail hebdomadaire moyenne ne peut dépasser 35h. Au-delà il s'agit d'heures supplémentaires, qui sont très réglementées. Ce type de contrainte est d'autant plus dommageable que persiste des difficultés de recrutement notamment dans l'hôtellerie restauration. La première priorité est bien l'accroissement du contingent d'heures supplémentaires, desserrant ainsi la contrainte physique sur l'activité des entreprises, et permettant aux salariés de « travailler plus pour gagner plus ».

En ce qui concerne leur prix, la majoration pour heure supplémentaire entre 35 et 39 heures devrait être fixée durablement à 10 % (comme pendant la période transitoire d'un an prévue par la loi Aubry) et portée à 25 % au-delà des 39 heures (comme dans la période précédant la loi Aubry). Cela ne consisterait qu'à respecter la signature des partenaires sociaux, bafouée par la deuxième loi Aubry qui, contrairement à ce qui était annoncé à l'occasion de la première, n'a pas pris en compte les dispositions arrêtées par les accords de branche.

Il est notamment indispensable d'assouplir le régime des heures « complémentaires » (ce sont les heures supplémentaires des salariés à temps partiel), en ne limitant pas à l'excès leur nombre. C'est très important, notamment pour le monde du commerce. Les assouplissements précédents permettent à une entreprise de gagner en souplesse afin de mieux répondre aux variabilités dans les commandes qu'elles reçoivent. Cependant, ces assouplissements ne permettent nullement ni de réduire le coût du travail, ni même d'atténuer les surcoûts liés à l'application des Lois Aubry. Le surcroît d'heures supplémentaires effectuées sera dûment payé.

Le retour à un seul SMIC doit se faire au plus vite. Il est impératif qu'il ne s'accompagne ni de perte de revenus pour les salariés, ni d'accroissement des coûts pour les entreprises. Au-delà, la sagesse est de séparer SMIC et politique, en confiant l'évolution du SMIC à une commission indépendante qui procéderait à sa revalorisation régulière, avec des critères objectifs, incluant le souci du pouvoir d'achat, les gains de productivité, les effets de la revalorisation sur l'emploi.

A plus long terme, une réflexion sur le profil des charges pourrait être lancée. Un profilage optimisé permet de faire de la redistribution sans toucher le coût du travail, élément clé de la compétitivité. La redistribution redevient bien alors du ressort de la société dans son ensemble représenté par le gouvernement et non plus du ressort des entreprises. L'idée d'un impôt négatif pourrait être étudiée dans ce cadre.

La rapidité avec laquelle le gouvernement choisit de faire cette convergence doit être neutralisée avec un dispositif de baisse de charge compensateur afin que le coût du travail en France ne s'accroisse pas ce qui aurait un effet désastreux au niveau des moins qualifiés. Le dispositif de baisse de charges doit donc être revu. Inciter à la baisse du temps de travail étant un non-sens économique et social, il est indispensable de découpler ces baisses de la durée du travail sans qu'aucune entreprise n'y perde. L'autre passif du gouvernement socialiste en ce qui concerne l'emploi est la loi dite de modernisation sociale. Il est impensable, de conserver une législation de circonstances sur les licenciements, sous peine de continuer à décourager l'investissement et l'emploi en France.

Travail dévalorisé, pouvoir d'achat dégradé, désintérêt des élites pour notre pays

Les différents points abordés montrent qu'il s'agit bien d'une régression sociale. Retenons que les RTT ont aussi dégradé les conditions de travail de ceux pour qui elles étaient instituées, les plus modestes : les ouvriers et les employés non qualifiés réduisant de surcroît à court et moyen terme leur pouvoir d'achat. Pour une autre catégorie de salariés, l'aspiration naturelle à plus de loisirs, en particulier pour les cadres peut prendre des proportions peu compatibles avec les réalités d'une économie ouverte sur le monde ? Nous prenons tous le risque de devenir tous des consommateurs au pouvoir d'achat déclinant.

Il se trouve un autre aspect non quantifiable, assez souvent nié ou minimisé par ceux qui nous gouvernaient et ceux qui nous gouvernent, car dérangeant, c'est la montée d'« intérêt des élites », entrepreneurs et créateurs, pour notre pays. La réputation d'une bureaucratie administrative défavorable aux entrepreneurs, les 35 heures obligatoires, loi de modernisation sociale, toute cette atmosphère aux conséquences les plus graves. Mois après mois, les Français découvrent avec inquiétude les effets multiples et décalés de ces politiques : des usines qui ferment, d'autres qui partent, et peu ou pas de créations pour les remplacer.

C'est aussi le résultat de ce mouvement invisible qui voit les détenteurs de capitaux, les porteurs de projets, s'installer chez nos voisins plus accueillants. Il est temps de revenir à plus de bon sens et à plus d'ambitions pour les Français. Notre premier objectif, au-delà de la mise à plat de ces 35 heures, devrait être de réintégrer deux groupes d'exclus victimes des dérives idéologiques: ceux dit "d'en haut" les familles fortunées, les entrepreneurs et les créateurs de valeurs qui se sont depuis plusieurs années installés à l'étranger pour y vivre et travailler librement. Ils sont aujourd'hui des milliers. Il faut les inciter à rentrer au pays et avoir le courage de prendre les mesures nécessaires pour qu'ils participent ici chez eux à notre prospérité. Dans le cas contraire si nous renonçons, d'autres partiront et nous n'aurons alors que peu de chance de réinsérer dans le monde du travail le deuxième groupe d'exclus, ceux dit "d'en bas", ceux qui souffrent du chômage et de la pauvreté.

CONCLUSION

Les réduction du temps de travail en France depuis le milieu des années 1990 est le fruit de la confrontation des intérêts de trois acteurs : l'Etat, les employeurs et les salariés dont les objectifs sont différents. Le premier a tenté une audacieuse politique de réduction du temps de travail sous une forme inégalée dans le monde. Elle devait servir un objectif macro-économique de réduction du chômage. Les seconds (les employeurs) ont réagi diversement à la contrainte que constituait à leurs yeux la fixation d'une nouvelle durée légale du travail. Les 35 heures ont été pour le patronat l'occasion d'une grande remise en question. Enfin, les salariés, dont l'attente à l'égard de la RTT était inégale, ont, eux aussi, dû faire valoir leurs intérêts lors de sa mise en place, notamment à travers le processus de négociation intense qu'a favorisé la loi.

Le résultat de cette confrontation est hétérogène. Dans un certain nombre de cas, il semble qu'un équilibre ait pu être trouvé entre les aspirations des uns, la volonté politique de l'autre et les besoins des troisièmes. Ainsi, lors des travaux sur la RTT menés au Commissariat général du plan en 2001, une grande entreprise de l'agro-alimentaire se montrait très optimiste sure les effets de la RTT en termes de performances économiques et en termes de bien-être des salariés. Mais dans d'autres situations, la RTT a été menée de façon plus chaotique, soit parce que la négociation était de moins bonne qualité, soit parce que le rapprochement des intérêts était moins facile. Les employeurs n'ont pas tiré parti de la RTT pour effectuer des gains de productivité ou encore la flexibilité qu'ils ont mise en place à cette occasion a détérioré quelque peu les conditions de travail et de vie de leurs salariés.

Cette hétérogénéité des situations est toujours aussi grande aujourd'hui puisque seule la moitié des salariés a connu une baisse sensible de sa durée effective de travail. La RTT n'a constitué un important changement dans les conditions de travail et de vie que pour la moitié seulement du salariat français. La situation des très petites entreprises est encore incertaine : les outils classiques d'organisation du temps de travail y sont mal ou totalement inadaptés. Les actions collectives conduites par différentes Agences Régionales pour l'Amélioration des Conditions de Travail (ARACT) soulignent la présence de difficultés mais aussi de potentialités pour autant que les questions touchant à la nature des prestations, d'organisation du temps de travail, de polyvalence, de temps partiel ou de regroupement d'employeurs soient discutées.

Les contrastes ressortent fortement selon les situations : les établissements qui ont bénéficié des aides incitatives de l'Etat (lois Robien et Aubry I) se distinguent par des appréciations nettement plus positives sur l'impact économique de la RTT, même si le bilan sur la situation économique globale est jugé plutôt négatif. La transformation d'un choc en opportunité s'explique par différents facteurs : ces entreprises étaient des pionnières, partisanes de la baisse du temps de travail, qui ont choisi d'anticiper la RTT et surtout, qui ont bénéficié d'aides généreuses de l'Etat.

L'accompagnement de l'accord et les ajustements à termes sont aussi des facteurs de succès au niveau de l'entreprise car l'environnement économique se modifie vite.

Par ailleurs, les principaux effets attendus, et, effectivement produits par la RTT semblent aujourd'hui en très grande partie révolus. En effet, c'est seulement lorsque la réduction de la durée effective du travail est importante que des emplois peuvent être crées ou sauvegardés. Par conséquent, les effets positifs sur l'emploi observés sous les lois Robien et Aubry I sont affaiblis depuis le passage à la loi Aubry II. Les principaux apports de la RTT à la politique de l'emploi semblent donc bien derrière nous.

Enfin, aussi bien au niveau micro-économique qu'au niveau macro-économique, les conditions à réunir pour la réussite de la RTT sont très exigeantes. Il a en effet fallu que les entreprises effectuent de très importants gains de productivité. De tels gains ne sont pas réalisables partout et durablement : seules les entreprises les plus grandes ont pu atteindre ce résultat. La mise en place de la RTT dans les plus petites structures ne pourra pas donner lieu à de tels gains en efficacité. Autre condition de succès, l'aide de l'Etat a été très importante en début de période et pour les entreprises pionnières. Les assouplissements apportés (Loi Fillon) réduisent, au contraire, le caractère volontariste de l'intervention publique en faveur de la RTT, les entreprises sont un peu plus libre de gérer les heures supplémentaire. Enfin, la troisième condition de la réussite de la RTT au niveau de chaque entreprise mais aussi sur le plan macro-économique peut être trouvée dans la modération salariale. Cette dernière permet d'expliquer le succès d'opérations de RTT dans des entreprises qui connaissaient par ailleurs plutôt une situation de croissance. Elle fait aussi partie des conditions macro-économiques qui ont été à l'origine des créations d'emploi de la première phase de la RTT. Mais la modération, outre le fait qu'elle peut réduire la satisfaction des salariés à l'égard du processus de RTT, risque d'aboutir à terme à l'expression de revendications salariales difficiles à satisfaire pour les entreprises.

annexe 1

6E SEMAINE DE CONGÉS PAYÉS, SUPPRESSION DU SMIC HÔTELIER

LES TEXTES SONT APPLICABLES À PARTIR DU 1er JANVIER 2005

Deux arrêtés en date du 30 décembre publiés au Journal officiel du 1er janvier 2005 étendent et, par conséquent, rendent obligatoires à toutes les entreprises des CHR l'accord du 13 juillet sur le temps de travail et l'accord du 2 novembre sur la prévoyance. Ces textes constituent des avenants à la convention collective des CHR. Une grande majorité des dispositions sont applicables à partir du 1er janvier 2005.

La profession peut continuer à travailler sur la base de 39 heures, mais en contrepartie, elle supprime le Smic hôtelier, accorde une semaine de congés supplémentaire et 2 jours fériés, réglemente le travail de nuit et met en place un régime de prévoyance. Les partenaires sociaux avaient décidé que les dispositions de ces accords ne seraient applicables que dans le mois suivant la publication de l'arrêté d'extension. Faute d'avoir pu publier les textes avant le 31 décembre 2004 dans le Journal officiel, le Premier ministre a publié un décret le 1er janvier 2005 pour rendre obligatoires le décret sur le temps de travail dans les CHR ainsi que les 2 arrêtés qui étendent les 2 avenants à la convention collective obligatoire et ce, à partir du 1er janvier 2005.

Les entreprises concernées
Sont concernées les entreprises comprises dans le champ d'application de la convention collective des CHR du 30 avril 1997, qui sont répertoriées aux codes NAF suivants :
55.1A Hôtels avec restaurant
55.1C Hôtels de tourisme sans restaurant
55.1 E Hôtels préfecture
55.3A Restaurants et cafés-restaurants
55.4A Cafés-tabac
55.4B Débits de boissons
55.5D Traiteurs organisateurs de réceptions
92.6A Bowlings
Mais cet avenant ajoute un secteur d'activité qui n'était pas prévu par la convention collective : les discothèques dont le code Naf est 55.4C.
Cet avenant concerne non seulement les entreprises situées en France métropolitaine, mais aussi dans les Dom (Guyane, La Réunion, la Martinique et la Guadeloupe).

Confirmation de la durée du travail à 39 heures dans les CHR
La durée du travail est maintenue à 39 heures dans les CHR, sauf pour les entreprises qui avaient dû réduire le temps de travail à 37 heures en 2002 et qui doivent donc conserver cette durée du travail.

Sont donc considérées comme des heures supplémentaires les heures effectuées à partir de la 40e pour les entreprises à 39 heures et à partir de la 38e pour les entreprises à 37 heures.
L'avenant prévoit que les 4 premières heures ne donnent lieu qu'à une majoration de 15 %. Soit de la 40e à la 44e heure. Puis les 4 suivantes sont majorées de 25 % et les suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Contingent d'heures supplémentaires

Le contingent d'heures supplémentaires utilisable sans avoir recours à l'autorisation de l'inspection du travail est fixé à :

· 180 heures par an pour les établissements permanents

· 45 heures par trimestre civil pour les établissements saisonniers
Durées maximales du travail
Les temps de présence au travail ne peuvent être supérieurs aux durées suivantes :
Durée maximale journalière
Cuisinier :    11 h 00
Autre personnel :    11 h 30
Veilleur de nuit :    12 h 00
Personnel de réception :    12 h 00
Durées maximales hebdomadaires
Moyenne sur 12 semaines :
48 heures pour les entreprises à 39 heures
46 heures pour les entreprises à 37 heures
Absolue :   
52 heures pour les entreprises à 39 heures
50 heures pour les entreprises à 37 heures

Temps d'habillage et de déshabillage

Le temps d'habillage et de déshabillage n'est pas considéré comme du temps de travail. Mais lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, par le règlement intérieur ou par le contrat de travail, et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire à ces opérations doit faire l'objet de contreparties. L'avenant proposait plusieurs formes de contreparties, parmi lesquelles le blanchissage. Mais l'arrêté du 30 décembre rappelle que ces contreparties ne peuvent être données que sous forme de repos ou financières. Faute de contrepartie définie dans l'entreprise, le salarié bénéficie de 1 jour de repos supplémentaire qui lui sera accordé ou payé. Le texte posait en condition d'avoir 1 an d'ancienneté pour pouvoir bénéficier de ces contreparties, mais l'arrêté a annulé cette condition, qui n'est pas légale.

Aménagement du temps de travail

L'avenant vient préciser les modalités pratiques en annexes des différents aménagements du temps de travail sous la forme de :

·Modulation du temps de travail

·Organisation du temps de travail sous forme de cycle

·Aménagement sous forme de jours ou demi-journées de repos

· Temps partiel modulé

Une semaine de congés payés supplémentaire

L'avenant prévoit l'octroi de 6 jours de congés payés supplémentaire, à raison de 0,5 jour par mois de travail effectif. Ce qui donne 6 jours ouvrables ou 5 jours ouvrés.
En pratique, les salariés auront donc droit à 6 semaines de congés payés par an. Par contre, les salariés qui ont déjà des jours RTT ou d'autres jours conventionnels ne bénéficieront pas de ces 6 jours en plus.

Ces droits à congés supplémentaires se comptabilisent à partir de la première période de référence suivant l'extension du présent avenant. La période de référence commence du 1er juin au 31 mai de l'année suivante. Les salariés vont donc commencer à comptabiliser ces jours à partir du 1er juin 2005 jusqu'au 31 mai 2006, et ils pourront commencer à les prendre à partir du 1er mai 2006.

Mais les salariés en CDD comme les saisonniers pourront en bénéficier dès la saison d'été 2005 mais au prorata de leur temps de travail. Un saisonnier qui travaille 4 mois pendant la saison d'été pourra bénéficier de 4 fois 0,5 jour de congés supplémentaires, soit 2 jours en plus de ces congés payés. Contrairement aux congés payés, les employeurs ont la possibilité de donner ces 6 jours ou de les payer. 

Deux jours fériés supplémentaires

La convention collective des CHR prévoit déjà l'octroi de 3 jours fériés en plus du 1er mai. L'avenant prévoit que les salariés bénéficieront de 2 jours fériés supplémentaires selon le calendrier suivant :

· Un jour férié supplémentaire à partir du 1er juillet 2006

· Un autre jour férié supplémentaire à partir du 1er juillet 2007.
Ce qui fait qu'à terme, les salariés bénéficieront de 5 jours fériés en plus du 1er mai. 

Définition des trois catégories de cadres et salaires minimums


Trois catégories de cadres sont définies, les cadres dirigeants, autonomes et intégrés.
Un cadre dirigeant est celui auquel sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une large indépendance dans l'organisation de son emploi du temps. Il n'est pas soumis à la réglementation sur le temps de travail. Mais ce cadre doit avoir une rémunération minimum mensuelle qui ne peut être inférieure à 1,5 fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale, soit 2 516 x 1,5. Ce qui donne un salaire mensuel moyen de 3 774 E.

Un cadre autonome relève du niveau 5 de la grille de classification. Il bénéficie d'une large autonomie dans l'organisation de son emploi du temps. Il peut être conclu des conventions de forfait sur la base de 217 jours par an. Ce cadre ne peut avoir un salaire inférieur au plafond de la Sécurité sociale, soit 2 516 E.
Un cadre intégré est soumis à la durée collective du travail de l'entreprise. Il est possible de conclure une convention de forfait avec une référence horaire qui inclut les heures supplémentaires.
L'avenant prévoit en outre une indemnité de départ à la retraite majorée pour les cadres. En effet, un cadre bénéficie d'une indemnité égale à 1 mois de salaire après 5 ans d'ancienneté et 2 mois après 10 ans d'ancienneté, quand la convention collective n'accorde qu'un demi-mois pour 10 ans d'ancienneté.

Réglementation du travail de nuit

Conformément aux dispositions de la loi du 9 mai 2001 qui réglementent le travail de nuit, l'avenant prévoit des contreparties au travail de nuit.
Rappelant les dispositions de l'article L.213-1-1 du Code du travail, l'avenant précise que tout travail entre 22 heures et 7 heures est considéré comme un travail de nuit.
Est considéré comme travailleur de nuit celui qui accomplit pendant la période de nuit entre 22 heures et 7 heures :

· Soit au moins 2 fois par semaine selon son horaire de travail habituel, au moins 3 heures de son travail effectif quotidien

· Soit au moins 280 heures de travail effectif dans la plage horaire de nuit pour les établissements permanents sur l'année civile

· Soit sur une période d'un trimestre civil : 70 heures pour les établissements saisonniers ou les salariés saisonniers des établissements permanents

Durée maximale journalière
Cuisinier :    11 h 00
Autre personnel :    11 h 30
Veilleur de nuit :    12 h 00
Personnel de réception :    12 h 00
Pour les entreprises à 39 heures qui souhaitent faire travailler leurs salariés plus de 9 heures par jour et 8 h 30 pour les entreprises à 37 heures, il doit être accordé à ces salariés des périodes de repos d'une durée au moins équivalente au nombre d'heures effectuées par jour au-delà des ces limites de 9 heures et 8 h 30. Ce repos peut être cumulé et pris dans les plus brefs délais.

Durées hebdomadaires
Moyenne sur 12 semaines :    
48 heures pour les entreprises à 39 heures
46 heures pour les entreprises à 37 heures
Absolue :
52 heures pour les entreprises à 39 heures
50 heures pour les entreprises à 37 heures

Contrepartie au travail de nuit

L'avenant définit des contreparties au travail de nuit. Il prévoit des compensations en repos compensateur qui seront calculées par trimestre civil selon les modalités suivantes : 1 % de repos par heure de travail effectuée pendant la période de nuit, soit de 22 heures à 7 heures. En sachant que pour les salariés occupés à temps plein et présents toute l'année au cours de cette période, le repos compensateur est forfaitisé et correspond à 2 jours de repos par an. C'est l'employeur qui choisit quand donner ces 2 jours de repos supplémentaires en tenant compte des besoins de la clientèle.

Suppression du Smic hôtelier

Jusqu'à présent, la suppression du Smic hôtelier (c'est-à-dire ne plus déduire la valeur de la demi-nourriture dans le salaire espèces) était optionnelle pour les employeurs. Ce choix était effectué pour les employeurs qui souhaitaient bénéficier de la prime Sarkozy dans son montant maximum de 114,40 E par mois et par salarié.
Depuis le 1er janvier 2005, tous les employeurs ont l'obligation de supprimer le Smic hôtelier. Leurs salariés au Smic vont donc bénéficier d'une augmentation de 67,32 E de leur salaire brut.

L'Hôtellerie Restauration n° 2906 Hebdo 6 janvier 2005

ANNEXE 2

Suppression du Smic hôtelier et une semaine de congés payés en plus

L'Umih et le GNC ont signé avec trois syndicats salariés (CFTC, CGC et FO) jeudi 1er juillet les grandes lignes du projet d'avenant à la convention collective qui doit donner lieu à un accord définitif qui sera entériné et signé mardi 13 juillet prochain. La profession peut continuer à travailler sur la base de 39 heures mais, en contrepartie, elle supprime le Smic hôtelier, accorde une semaine de congés supplémentaire et deux jours fériés, et met en place un régime de prévoyance.

Le projet d'accord conclu entre l'Umih et le GNC avec 3 syndicats salariés n'est pas passé inaperçu, l'information ayant largement été relayée dans la presse écrite et dans les journaux télévisés. Mais le projet définitif doit être encore signé par les partenaires sociaux mardi prochain. Même si Bernard Luminet, représentant de la CGC, déclare «être fier d'avoir signé cet accord dans la profession», il reconnaît que «sans le coup de pouce et la pression exercée par les ministères des Finances et du Travail sur les employeurs, rien n'aurait été possible» : il n'en reste pas moins prudent. En effet, mardi 6 juillet au matin, les 3 organisations salariées ont fait une déclaration commune dans laquelle elles annoncent : «Nous voulons rappeler également aux organisations patronales signataires que ce `relevé de décisions' devient caduc le 13 juillet au soir, et qu'à la moindre filouterie de dernière minute, à la moindre virgule de travers dans le texte définitif qui dénaturerait notre accord sur le fond, ils assumeront toutes les conséquences de notre retrait.»


Pour André Daguin, président de l'Umih, la signature de cet accord a pour premier objectif de clarifier la situation des entreprises des CHR sur trois problèmes principaux, qui étaient en suspens. «La durée du travail est désormais fixée à 39 heures dans les CHR, il faut rappeler que le décret qui fixait cette durée dérogatoire pour la profession doit prendre fin au 31 décembre 2004. Nous avons donc confirmé cette durée du travail pour la profession. Nous avons réglé le problème du travail de nuit en le définissant, ce qui permettra à tous les hôtels de cesser d'être en infraction en faisant travailler ces veilleurs plus que ce qu'autorise la loi et qui n'était pas adapté à nos entreprises. Nous avons aussi réglé le problème du temps partiel en adaptant ce type de contrat à la spécificité de nos métiers et pour permettre d'avoir une coupure de 5 heures au lieu de 2 heures. Ensuite, il faut faire attention aux effets d'annonce : quand on parle d'une augmentation de salaire de 11 %, il faut rappeler que l'augmentation du Smic était déjà de 5,8 %, et en supprimant le Smic hôtelier cela correspond à une augmentation supplémentaire de 5,2 %. On ne peut pas vouloir continuer à faire travailler nos salariés sur la base de 39 heures sans les payer en conséquence. On ne peut pas se plaindre de ne pas trouver de salariés sans rien faire pour rendre la profession plus attractive.»

Une partie des organisations patronales très mécontentes...

La CPIH, la Fagiht et le Synhorcat avaient présenté en commun leur propre texte lors de la mixte paritaire, mais celui-ci n'a pas retenu l'attention des syndicats salariés. En raison des propositions faites de part et d'autre qu'ils jugeaient déraisonnables, ils ont quitté rapidement la table des négociations.

Pour Didier Chenet, président du Synhorcat, il s'agit d'un accord injuste. «De nombreuses petites entreprises ne pourront pas suivre et vont disparaître. Les allégements de charges ne pourront pas couvrir en totalité ces coûts supplémentaires pour les entreprises. Ces mesures vont représenter une augmentation de la masse salariale de 8 à 10 % : les allégements de charges ne compenseront pas cette hausse et cela se traduira par une perte de 3 à 4 point de marge nette. Quand on regarde la rentabilité de nos entreprises et ce qu'elles laissent en marge nette... attention danger ! Si le texte est confirmé, nous nous opposerons à son extension», conclut-il.

Quant à Jacques Jond, président de la Fagiht, il dénonce «la politique de surenchère pratiquée par les syndicats salariés» : Nous étions prêts à accepter la suppression du Smic hôtelier, ce qui représentait une augmentation de 11 % pour 40 % des salariés, mais nous ne voulions pas donner plus de 2 à 3 jours de congés en plus. Cet accord va profiter uniquement aux salariés, au détriment des entreprises. 21 % des hôtels saisonniers ont disparu depuis 10 ans, et cet accord va accélérer le processus.» Pour Jean-François Girault, «les petites entreprises vont avoir rapidement des problèmes. En effet, cet accord va être applicable dès l'année prochaine avec les congés payés, alors que le dispositif d'aide à l'emploi prendra fin au 31 décembre 2005.»

... de même chez les salariés

Ce projet est loin de faire l'unanimité chez les salariés, la CDFT et la CGT ayant elles aussi, un peu plus tard dans la soirée, quitté la table des négociations et refusé de valider ce projet. Pour la CFDT, «ce texte, même s'il comporte des acquis tels que l'abandon du Smic hôtelier et la mise en place d'un régime de prévoyance, laisse encore beaucoup de zones d'ombre qui pourraient se traduire par des inégalités de traitement entre les salariés.»

Les principales dispositions qui ont été négociées

Le 1er juillet au soir, l'Umih et le GNC ont signé avec trois organisations salariales (CFTC, CGC, FO) un `relevé de décisions' qui doit être rédigé pour en préciser les modalités, afin de donner lieu à un accord définitif qui doit être signé mardi 13 juillet prochain. Accord qui devra ensuite être étendu pour être rendu obligatoire à tous les employeurs de la profession. Nous vous proposons ici les grandes lignes du projet d'accord.

< Confirmation de la durée du travail à 39 heures dans les CHR
On prend en compte les heures supplémentaires à partir de la 40e heure. Ces heures seront majorées de 15 % pour les 4 premières, de 25 % pour les 4 suivantes et de 50 % pour les autres.

< Suppression du Smic hôtelier

Les employeurs des CHR qui ont l'obligation de nourrir leur personnel doivent accorder 2 repas par jour, mais avec le mécanisme du Smic hôtelier, la prise en compte de la moitié des repas dans le salaire espèces disparaît.

Ce qui va entraîner une augmentation de 6 % du salaire. Avec l'augmentation du Smic au 1er juillet, cela représente une augmentation de 11 % des salaires au Smic dans la profession.

< Une semaine de congés payés supplémentaires

L'accord prévoit l'octroi de 6 jours de congés payés supplémentaires, à raison de 0,5 jour par mois de travail effectif. Les salariés auront donc droit à 6 semaines de congés payés par an. Par contre, les salariés qui ont déjà des jours de RTT ou autres ne bénéficieront pas de ces 6 jours en plus.

< Deux jours fériés supplémentaires

en plus des trois déjà accordés par la convention collective).

< Majoration pour le travail de nuit

Définition du travailleur et travail de nuit dont la plage horaire est définie de 22 heures à 7 heures du matin. Nouvelles durées maximales journalières de travail pour le veilleur de nuit, qui sont fixées à 12 heures.

Pour les salariés qui travaillent la nuit, 2 jours de repos supplémentaires et 1 jour pour les travailleurs du soir.

< Mise en place d'un régime de prévoyance à 0,80 %

Cette nouvelle cotisation sera répartie à parts égales, entre l'employeur et le salarié.

< Disposition sur le temps partiel

Conformément à la loi, un temps partiel est inférieur à 35 heures. Mais l'accord prévoit qu'il ne peut être inférieur à 24 heures, avec une seule coupure par jour, mais qui peut être de 5 heures.

< Définition des trois catégories de cadres

Un cadre dirigeant doit avoir au minimum un salaire inférieur à 1,5 du plafond mensuel de la Sécurité sociale, soit aujourd'hui un salaire supérieur à 3 714 e (plafond Sécu : 2 476 x 1,5)

Un cadre autonome ne peut avoir
un salaire inférieur au plafond de la Sécurité sociale, soit 2 476 e.
Un cadre intégré soumis à la durée collective du travail de l'entreprise bénéficie en outre d'indemnité de départ à la retraite supplémentaire. zzz66f

L'Hôtellerie Restauration n° 2880 Hebdo 8 juillet 2004

ANNEXE 3

OPTIMISER L'EFFICACITÉ DE VOTRE PERSONNEL

Comment limiter le stress professionnel

Le stress peut être à l'origine d'absences répétées, d'accidents du travail, de maladies professionnelles. Pistes d'action pour limiter ce risque.
Par Carole Gayet, information juridique.

La liste des facteurs professionnels exposant au stress est longue. Selon les personnes, l'impact de ces facteurs pourra être différent. Ces facteurs peuvent être liés à la tâche à accomplir (charge de travail, répétition...), à l'organisation du travail (inadaptation des horaires de travail aux rythmes biologiques, à la vie sociale et familiale, comment faire vite et bien), aux relations de travail, à l'environnement physique et technique (bruit, chaleur...) ou à l'environnement socioéconomique de l'établissement (concurrence, compétitivité...).

Plus de 1 travailleur sur 2 déclarent travailler dans l'urgence et pour 1 travailleur sur 3, les relations avec les supérieurs hiérarchiques sont source de tensions.
Les symptômes du stress peuvent être physiques (douleurs, troubles du sommeil, etc.), émotionnels (sensibilité et nervosité accrues, etc.), intellectuels (erreurs, oublis, etc.), comportementaux (agressivité, isolement...).

Les réactions physiologiques pour faire face à une situation de stress peuvent être néfastes pour l'organisme. Les principales pathologies liées au stress sont les maladies cardiovasculaires, la dépression et les troubles musculo-squelettiques. Les effets du stress peuvent générer des absences répétées, être à l'origine d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle. Ils peuvent conduire à une inaptitude, que sera amené à prononcer le médecin du travail. Il s'en suivra une obligation de reclassement à votre charge. À défaut, vous serez contraint de prononcer le licenciement pour inaptitude.


Les conséquences du stress au travail sont lourdes pour le salarié et l'employeur, la prévention de ce risque est donc indispensable. À cette fin, nous vous proposons des pistes pour identifier ce risque et le prévenir. zzz60m

Les questions à se poser...

... Des pistes d'action

Votre personnel de cuisine est énervé, crispé ?

Bien définir les tâches de chacun.

Le personnel a-t-il du mal à faire face aux coups de feu ?

Bien définir les procédures d'organisation.

Vos salariés se bousculent ?

Organiser le travail pour anticiper et s'adapter aux fluctuations de l'activité.

Il y a de la casse ?

Veiller à bien coordonner salle et cuisine.

Votre personnel de salle fait d'incessants allers-retours en cuisine ?

 Prévoir des zones de passage des plats cuisine-salle.

Le personnel de salle a des difficultés à mémoriser les commandes, fait fréquemment des erreurs ?

Bien définir les modalités d'identification des plats.

Pour vous aider, n'hésitez pas à faire appel à votre Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), au médecin du travail, au service prévention de votre Cram (Caisse régionale d'assurance maladie) ou à l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS).

Que dit le Code du travail ?

Le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés de l'établissement (L.230-2).

L'Hôtellerie Restauration n° 2967 Hebdo 9 mars 2005

ANNEXE 4

Jean-François Girault, président de la CPIH

"Non à 35 heures, oui à 39 heures avec des aides"

Deux mois après sa prise de fonction officielle à la tête de la CPIH, Jean-François Girault revient pour nous sur son refus de signer la RTT. Interview express.

Propos recueillis par S. Soubes

L'Hôtellerie :
Votre prédécesseur à la tête de la CPIH était favorable à la signature des textes ramenant le temps de travail dans la profession à 35 heures en 2007 si l'Etat s'engageait sur des aides spécifiques pour les CHR. Lors des élections, vous aviez annoncé que vous étiez contre le projet tout en acceptant l'idée de réfléchir une nouvelle fois aux propositions. Votre position est-elle aujourd'hui définitive ?

Jean-François Girault :

Effectivement, Roland Magne avait émis l'idée de signer l'accord de RTT qui ramènerait le temps de travail à 35 heures au 1er janvier 2007. Accord signé depuis par la CFDT et la CGT. Après avoir été élu à la tête de la CPIH, j'ai, en interne, organisé plusieurs réunions pour savoir si nous devions signer ou pas. Malheureusement, nous nous sommes rendu compte que le projet, en l'état, n'était pas du tout applicable pour les petites entreprises que je représente. Les retards de publication du décret sur l'exonération des charges sur les avantages en nature nous ont aussi mis mal à l'aise. En outre, les trois quarts des professionnels que nous avons interrogés ont répondu défavorablement aux 35 heures. Je ne veux pas entraîner la profession dans quelque chose qu'elle ne pourra pas tenir. En ce qui me concerne, je pense que la profession peut passer de 43 heures à 39 heures, si cette réduction du temps de travail est assortie d'aides réelles. En revanche, la profession ne peut en aucun cas absorber 35 heures, même à terme. Ce n'est matériellement pas faisable.

L'Hôtellerie
Avez-vous, comme vous l'aviez évoqué, renoué un dialogue avec l'Umih ?

Jean-François Girault :

Oui, j'ai repris contact avec l'Umih mais aussi avec la Fagiht. Nous mettons actuellement en place un plan d'action national concernant la TVA. Nous voulons donner aux responsables départementaux des outils leur permettant d'aller discuter avec leurs élus. Je pense que l'unité syndicale est de nouveau envisageable et que celle-ci devrait permettre à nos adhérents d'avoir une ligne directrice générale, sachant, et j'insiste à ce sujet, qu'il n'est aucunement question de fusion entre la CPIH et l'Umih.

...................

L'HOTELLERIE n° 2724 Hebdo 28 Juin 2001

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES :

Le temps de travail en Europe : organisation et réduction : colloque, 7-8 décembre 1994, Dusseldorf sous la direction de Reiner Hoffmann et Jean Lapeyre (1995)

La durée et l'aménagement du temps de travail dans l'Union européenne : actes du colloque organisé par la Confédération européenne des cadres, Luxembourg, 30 novembre 1995

Le travail: quel avenir ? Pierre Boisard, Daniel Cohen, Mireille Elbaum.présentation d'Olivier Mongin (1997)

Vers une économie plurielle : un travail, une activité, un revenu pour tous Guy Aznar, Alain Caillé, Jean-Louis Laville propos recueillis et mis en forme par Inouk Faugère (1997)

Réduction du temps de travail: que faut-il croire ? sous la direction de Jean-Pierre Chanteau et Denis Clerc ; avec Hugues Bertrand, Alain Lebaube, Jacques Lesourne... (1997)

Le partage du travail dossier constitué par Dominique Méda (1997)

Le guide pratique des 35 heures de Gilbert Cette (1998)

Le partage du travail : bilan et perspectives sous la direction de Hervé Defalvard et Véronique Guienne (1998)

Le retour du travail David Alis, Michèle Amiel, Anne-Françoise Bender... (1999)

La RTT, Que sais-je ? n° 3666

L'Aménagement du temps de travail, Que sais-je ? n°3134

TEXTES DE LOI :

Loi Aubry I et Loi Aubry II

Loi Fillon

Convention Collective des Hôtels Cafés Restaurant

Avenants de la Convention Collective

Journal Officiel, accords des HCR 1er Janvier 2005

ETUDES :

Enquête SVP « Pourquoi ne pas appliquer les 35 Heures » 2003

Documentation Française « La RTT, des politiques aux Pratiques » Juin 2003

« Est-ce que les 35 heures ont eu une influence sur la fréquentation des Hotels Restaurants » André Daguin 2003

Etude de l'INSEE « Evolution des rémunération a-t-elle été freinée » 1999

DARES « RTT et modes de vie » 2004

OCDE « Durée du travail en Europe » 1997

Rapport Viard « Effets des RTTsur le vie des salariés » 2002

SITES INTERNET :

Site CFDT : « 800 00 salariés toujours privés de RTT » 16 octobre 2003

« HCR, des patrons qui plaident pour la RTT » 2004

Site UMIF : « RTT : le Conseil d'Etat annule l'extension de l'accord » 26 février 2003

Site de L'Hôtellerie :

« 6ème semaine de congés payés, suppression du SMIC Hôtelier » n°2906 du 6 janvier 2005

« Comment limiter le stress professionnel » n°2964 du 9 mars 2005

« Non aux 35 heures, oui aux 39 heures avec aides » n°2724 du 2 juin 2001

«  HCR : gouvernement et patrons font un nouveau bras d'honneur au premier syndicat de salariés de la branche ! » du 27 octobre 2005

ARTICLES DE PRESSE :

L'Expansion Dossier Haro sur les 35 heures « Faut-il brûler la RTT ? » du 24 septembre 2003

Magasine Marketing « « Les 35 heures, favorables au tourisme ? » magazine n°51 du 1er juin 2000

Politis « Loi Fillon : une régression sociale sans précédent » 17 octobre 2002







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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams