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La place de l'éducateur dans la relation parent - enfant

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par Aurélia Véquaud
IEPSCF Tournai - Educatrice Spécialisée 2007
  

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1. LA RELATION ÉDUCATEUR - ENFANT

Educateur

Parents

Enfants

Il est vrai qu'il y a un certain lien qui existe entre l'enfant et ses parents. Il existe cependant un lien entre l'enfant et l'éducateur, mais il y a toutefois une différence.

L'éducateur est là avec son bagage, avec son vécu, et l'enfant ne tirera profit que de certaines choses de l'éducateur. Il en est de même pour l'éducateur. Il y a certaines choses chez l'enfant qui parleront plus que d'autres à l'éducateur. C'est ce qui fait qu'on apprécie plus ou moins quelqu'un. La relation passera plus ou moins bien avec un jeune plutôt qu'un autre.

Le lien éducateur enfant se construit progressivement, pas à pas, à travers l'attention accordée à l'enfant. Le lien passe par un tas de choses, ce peut être un geste, une présence, une écoute. La relation éducative s'exerce différemment de celle des parents, tout simplement parce que pour l'enfant, l'éducateur reste un professionnel et n'occupe pas la même place subjective et symbolique. C'est-à-dire que l'éducateur n'appartient pas au cercle familial.

L'éducateur peut être sujet à des pulsions agressives c'est-à-dire en position projective. L'éducateur travaille généralement avec l'enfant au quotidien, c'est souvent sur nous que les enfants vont envoyer leur agressivité, leur incompréhension face au placement, leur solitude. En effet, chaque fois qu'un enfant s'adresse à moi, il projette ses attentes, ses peurs, ses espoirs, des soucis dus à son passé, mais aussi des fantasmes concernant son avenir.

Il existe différentes façons de travailler avec les enfants.15(*)

Il y a la relation directive ; c'est-à-dire que l'éducateur impose ses propres règles au groupe. On peut également l'appeler la relation autoritaire. C'est une relation à sens unique où l'adulte est prédominant. Les étapes de la tâche sont imposées au groupe ainsi que les techniques. Dans ce type de relation, on peut remarquer que les enfants jouent un rôle pour se conformer à ce que l'éducateur demande. Une certaine forme d'angoisse se développe ce qui va à l'encontre de la vraie personnalité de l'enfant.

Chloé est une jeune fille placée à l'institution depuis déjà quelques années. Elle grandit et commence à s'affirmer, à s'opposer. Nous sommes en conflit permanent avec elle, répond et veut continuellement avoir raison. Les disputes dégénèrent et montent sans cesse en pression. Avec l'équipe, nous avons donc décidé de réagir de façon plus autoritaire. « Tu ne veux pas faire ceci, alors tu montes dans ta chambre un point c'est tout »  il n'y a plus de discussion possible.

La relation non directive, c'est l'enfant qui décide, mais il y a quand même un cadre. L'éducateur fournit des matériaux variés et laisse le groupe travailler selon ses envies. L'enfant est placé au centre de l'éducation. Dans la relation non directive, on peut retrouver la technique du laisser-faire. Autrement dit, on ne propose rien à l'enfant ce qui le maintient dans un certain infantilisme car l'enfant ne se heurte jamais à un obstacle.

Thibaut est un petit garçon de 4 ans inscrit dans l'école ou je travaille. C'est un enfant assez dur qui refuse tout. La socialisation est difficile car il ne fait que mordre ou taper ses camardes de classe. La maîtresse et moi n'avons aucune autorité sur lui. A côté de cela, quant il est seul ou avec un adulte il peut être très attachant, du moment qu'on ne lui demande rien. Pour éviter d'être inlassablement en opposition avec lui, il nous arrive parfois de le laisser tranquille et il vaque à ce moment là à ses occupations et n'embête personne. Il ère dans la classe ce qui le maintient dans une forme d'infantilisme.

La relation démocratique, l'éducateur fournit la perspective des différentes étapes. L'éducateur suggère une activité par exemple, mais c'est le groupe qui décide. C'est le pouvoir à la majorité, il y a la notion de vote. La relation démocratique s'oppose à la relation autoritaire, elle s'établit lorsqu'il y a un rapport d'égalité.

Dans la classe maternelle où je travaille, en dernière partie d'après-midi, c'est activités manuelles. Je propose aux enfants en général trois activités différentes. De la peinture, du découpage et collage ou de la pâte à modeler. Je dispose le matériel sur trois tables différentes et les enfants font l'activité qui les intéresse. C'est eux qui choisissent.

Ces différentes attitudes, qu'elles soient directives, non directives ou démocratiques, ne sont pas permanentes. Selon les personnalités des enfants, nous réagiront différemment.

a) Un pôle identificatoire

L'éducateur est un pôle identificatoire pour l'enfant, qu'il soit homme ou femme, il offre à l'enfant « un autre » auquel il peut s'identifier. Selon Daniel Roquefort16(*) « ce n'est que dans un temps second que l'éducateur pourra jouer le rôle social dévolu à l'homme ou à la femme et offrir à l'enfant ou à l'adolescent un pôle identificatoire. » Autrement dit, c'est dans un deuxième temps qu'intervient cette identification imaginaire de l'enfant à l'éducateur. Car l'éducateur supporte la fonction parentale aux yeux de l'enfant placé.

L'éducateur est donc un pôle identificatoire dans le sens où il incarne le père et ou la mère. Ainsi, un éducateur incarnera de façon plus virile son côté masculin, une éducatrice, sera plus affective que d'autres. Dans certaines institutions, il y a des « couples éducatifs ». Lors de mon stage de troisième, j'ai pu observer ce comportement, c'est-à-dire que chaque enfant avait deux référents : Un éducateur et une éducatrice. L'un représente souvent la loi, fait respecter les règles, l'autre a pour mission de soigner, d'écouter les petites confidences. L'éducateur homme ou femme n'a pas le même impact sur les enfants. Ainsi, les différents éducateurs permettent à l'enfant d'offrir autant de pôles identificatoires.

Le pôle identificatoire de l'éducateur permet d'avoir une continuité éducative et relationnelle stable, servant de repère au sujet.

L'éducateur spécialisé est, pour partie, un transmetteur des limites posées par la société : les normes. Il sert de repère à la personne accompagnée. Par sa façon d'être ou d'agir, il indique au jeune ce qui est de l'ordre de l'admis ou du proscrit, il le guide.

Enfin, l'instauration d'une relation personnalisée fait entrer le professionnel dans une logique de suppléance parentale, dans la mesure où l'enfant va s'adresser à l'éducateur plutôt qu'à ses parents pour ses demandes et besoins. Nous exerçons en effet, un rôle d'écoute, d'observation et de guidance. Nous prenons vite une place importante dans l'univers de l'enfant, étant souvent sollicités pour répondre à ses besoins. Un enfant quand il nous demande quelque chose il nous demande en réalité de pouvoir compter sur nous à partir de la relation privilégiée qui peut s'être établie. Je pense notamment à la fonction de référent de l'éducateur.

b) T'es pas ma mère :

Jeanne a 10 ans et est placée en institution avec son petit frère Antoine. Jeanne est une jeune fille très intelligente, vive, très protectrice par rapport à Antoine, à du mal avec l'autorité et aussi très revendicatrice.

Pour comprendre la situation, il faut remonter un peu en arrière. Le père veut quitter le domicile conjugal. La maman, qui n'accepte pas la séparation d'avec le père de ces enfants, commet un acte qui met en danger son fils Antoine ; elle promène avec lui au milieu d'un carrefour avec une circulation intense. On ne connaît pas les intentions de la mère à ce moment. Tentative de suicide entraînant son fils avec elle ? Provocation à l'égard de son mari pour lui faire peur ? Mais la conséquence de cet acte est le placement des deux enfants à Notre Dame des Anges.

Les deux parents doivent se contenter tous deux de visites encadrées chaque mercredi après-midi durant quelques heures. A la fin du placement, les parents obtiennent chacun un droit de logement de leurs enfants un week-end sur deux en alternance.

Comme je l'ai dit, Jeanne avait du mal avec l'autorité. Elle se croyait suffisamment mûre pour décider. Elle bougonnait facilement si quelque chose lui était imposé. Et surtout réagissait fréquemment ainsi : «  T'es pas ma mère, t'as rien à me dire ». Ce à quoi nous répondions : «  Non tu as raison, c'est vrai, mais j'agis pour elle, comme elle le ferait pour toi. Ta maman voudrait que tu deviennes une jeune fille bien raisonnable et donc, elle ne te laisserait pas faire tout ce que tu désires » Elle recherchait des explications quant à sa situation familiale. Elle avait besoin de comprendre.

Dans le fond, elle n'avait pas tord. Nous ne sommes pas ses parents et nous ne remplaçons pas ses parents. Cette phrase, traduit pour moi, une souffrance. Elle souffrait de son placement et aspirait une amélioration dans la relation père-mère pour qu'enfin elle puisse rentrer chez elle. Elle voulait que ses parents retournent vivre ensemble «  comme avant ». De ce fait, elle ne voulait pas qu'on lui dise ce qu'elle doit ou ne doit pas faire. Elle ne voulait pas avoir affaire à des éducateurs, elle voulait ses parents. Elle avait du mal à accepter les remarques qui ne viennent pas de ses parents. « T'es pas ma mère, t'as rien à me dire » traduit le fait qu'elle nous en voulait d'être placée. C'est une façon de dire « je ne t'accepte pas en tant qu'adulte qui décide pour moi. »

Je pense que Jeanne éprouve de la colère. De la colère envers nous, pensant que nous sommes là pour remplacer ses parents. De la colère envers ses parents pensant qu'ils ne font rien pour la récupérer, son frère et elle. Elle ne comprenait pas car elle savait que la situation de ses parents s'était améliorée, le père avait une nouvelle compagne, la maman bénéficiait maintenant d'un droit de logement. Alors pourquoi ne pouvait-elle pas rentrer chez elle ?

Nous lui avons expliqué que ses parents étaient encore à l'épreuve pour le juge, qu'un retour en famille serait trop précoce et donc qu'il y aurait un risque de rechute pour la famille et par conséquent un deuxième placement pour les enfants. Jeanne connaissait les raisons de son placement « Maman a mis mon petit frère en danger » mais ne comprenait pas ce qui avait pu déclencher ce coup de folie de sa maman. Nous, éducateurs, ne savions pas et ne pouvions pas lui expliquer. On ne dit pas tout à une enfant de 10 ans. Il faut préserver l'image des parents.

Mais pour une enfant de 10 ans, c'est normal qu'elle ne comprenne pas ce qui lui arrive. Elle nous rend responsable d'être « encore » placée. Quand Jeanne nous dit : « t'es pas ma mère, t'as rien à me dire ! » elle nous exprime également sa colère, son incompréhension, son ras le bol.

* 15 Cours de didactique, première année.

* 16 Daniel Roquefort, Le rôle de l'éducateur, éd l'harmattan, 1995, page 82

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery