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La recevabilité des requêtes devant la cour de justice de la CEMAC

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par Apollin KOAGNE ZOUAPET
Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) - Master en Relations Internationales, option Contentieux International 2010
  

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B- Les « armes tactiques » du juge : La stratégie jurisprudentielle de la CJCE.

Antérieure à la CJC, la CJCE revêt un intérêt certain pour l'étude de la juridiction communautaire de N'djamena non pas seulement parce qu'elle a servi de modèle aux concepteurs de la CJC, mais également parce que sa jurisprudence révèle un rôle prépondérant dans l'édification de la Communauté qu'il est à souhaiter pour les pays d'Afrique centrale.

La Cour de justice des Communautés européennes, comme la Cour de justice communautaire de la CEMAC, est compétente pour appliquer et interpréter les traités et les actes pris par les institutions communautaires. A cet égard, elle fait preuve d'un dynamisme particulier s'efforçant de donner aux dispositions de droit communautaire un maximum d'effet. En recourant à des méthodes d'interprétation positive, fondées sur les finalités des traités, elle participe d'une manière constructive au développement du processus d'intégration européenne. Il s'agit toujours pour la juridiction communautaire européenne de faire prévaloir la logique permanente de la construction communautaire sur les défaillances contingentes de la volonté politique, de donner la priorité à l'intention globale et objective des Etats sur leurs réticences conjoncturelles, d'assurer la réalisation effective des finalités incluses dans le système des traités malgré la carence des institutions communautaires ou des gouvernements nationaux. La même démarche se trouve dans l'effort entrepris par la CJCE pour développer une «  jurisprudence valorisée303(*) », destinée à compenser le déficit démocratique des communautés, en renforçant la protection des justiciables. L'accroissement des garanties juridictionnelles des sujets de l'ordre juridique communautaire apparait en effet, comme la seconde ligne de force de la stratégie jurisprudentielle mise en oeuvre par le juge. L'extension des conditions et des effets de l'applicabilité directe, la portée reconnue aux mécanismes de renvoi préjudiciels, l'élargissement de la recevabilité des recours en annulation, l'introduction dans le contentieux communautaire des principes tels que la sécurité juridique ou la confiance légitime, se présentent comme autant d'illustrations d'une politique interprétative cohérente, orientée vers l'amélioration de la protection des droits des particuliers à l'égard des actes communautaires comme des mesures nationales304(*).

Le rappel de l'existence d'un ordre juridique propre apparaît ainsi comme le premier élément du raisonnement qui a amené le juge communautaire européen à l'élargissement des conditions de recevabilité des particuliers. L'assimilation du traité à une constitution a été la conséquence des développements considérables, dans le système des sources du droit communautaire des « principes généraux du droit » et, tout particulièrement parmi eux, des droits fondamentaux destinés à protéger les personnes. L'on sait en effet qu'aujourd'hui, grâce à la jurisprudence de la CJCE, dont l'action s'est trouvée, d'une certaine façon, entérinée par les traités de Maastricht et d'Amsterdam, il existe dans le système juridique communautaire une protection des droits de la personne aussi complète que celle que l'on peut trouver dans n'importe quel Etat membre de l'Union européenne ou dans la convention européenne des droits de l'homme305(*). En effet les traités communautaires n'énoncent pas un éventuel droit au juge au niveau national. C'est par le détour des principes généraux du droit que la CJCE a forgé sa propre jurisprudence sur le droit au juge, instrument de mise en oeuvre effective et uniforme du droit communautaire. Dans l'arrêt Simmenthal, la Cour souligne que l'obligation de faire prévaloir l'effectivité de la norme communautaire pèse sur tout juge qui « a, en tant que organe d'un Etat membre, pour mission de protéger les droits conférés aux particuliers par le droit communautaire »306(*). En vertu du partage de compétences qui existe entre la Communauté et ses Etats membres, ces derniers jouissent d'une grande liberté quant à l'organisation de leur système procédural et contentieux. Toutefois, selon une jurisprudence communautaire bien établie, d'une part, pour la mise en oeuvre des droits fondés sur le droit communautaire, les Etats membres doivent mettre en place des procédures qui ne soient pas moins favorables que celles visant à la sauvegarde des droits fondés sur des dispositions nationales, c'est le principe du traitement national ; d'autre part, en vertu du principe d'effectivité, ces procédures ne doivent pas être de nature à rendre « pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice de ces droits que les juridictions nationales ont l'obligation de sauvegarder307(*) ». Cette dernière formule montre toute l'importance que la Cour de justice attache à l'accès à la justice nationale en tant que moyen d'assurer le respect du droit communautaire308(*).

Devant son prétoire, la Cour de justice des communautés européennes suit le même raisonnement en affirmant clairement que « les instruments internationaux concernant la protection des droits de l'homme peuvent également fournir des indications dont il convient de tenir compte dans le cadre du droit communautaire309(*) ». On ne s'étonnera pas alors que le juge Puissochet, après avoir affirmé en 1996 que « tout se passe comme si la convention européenne des droits de l'homme était l'une des sources formelles du droit communautaire », puisse aujourd'hui énoncer sans ambages que la Cour de justice des communautés « applique directement la convention européenne des droits de l'homme310(*) ».

L'une des principales « armes » du juge communautaire est également la motivation. On sait l'importance de la motivation d'exposition pour emporter la conviction quant à la cohérence rationnelle et à la certitude juridique d'une décision de justice. Or à cet égard, affirme le professeur Denys Simon,

« la rédaction des arrêts de la Cour de Luxembourg constitue un modèle du genre : l'abandon du style discursif au profit de la forme syllogistique confère aux sentences de la Cour la majestueuse rigueur des déductions logiques, faisant apparaître l'interprétation comme la seule légitime ; l'appel fréquent au raisonnement par enthymème, c'est-à-dire au syllogisme dont la majeure est sous-entendue, permet au juge de masquer sa part de création incluse dans la détermination des prémisses de sa déduction, et de faire apparaître sa démarche comme un enchainement nécessaire des syllogismes irréfutables. En outre, la Cour n'hésite pas à faire appel au « raisonnement par accumulation » pour renforcer la valeur convaincante de sa démonstration, en particulier dans les hypothèses où la multiplication des arguments permet de pallier leur relative faiblesse intrinsèque311(*) ».

* 303 Simon Op. Cit. p.767.

* 304 Ibid.

* 305 P. Manin « L'influence du droit international sur la jurisprudence communautaire », Droit international et droit communautaire. Perspectives actuelles, SFDI, colloque de Bordeaux, Paris, Pedone, 1999, p.160.

* 306 Cité par Dutheil de la Rochère Op. Cit. p.129.

* 307 CJCE, 16 décembre 1976, Rewe et Comet, aff. 33/76 et 45/76 ; 27 mars 1980, Denkavit Italiana, aff. 611/79 ; 9 novembre 1983, San Giorgio, aff. 199/82.

* 308 Dutheil de la Rochère Op. Cit. p.129.

* 309 Aff. Nold c/ Commission Op. Cit.

* 310 F. Sudre « L'apport du Droit international et européen à la protection communautaire des droits fondamentaux », Droit international et droit communautaire. Perspectives actuelles, Op. Cit. p.160.

* 311 Simon Op. Cit. pp.768-769.

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