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De la garantie des droits fondamentaux en République Démocratique du Congo. Cas de la province du Sud-Kivu

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par Dominique KAMWANGA KILIYA
Université de Kisangani, Centre Universitaire extension de Bukavu - Licence en Sciences Politiques et Administratives 2003
  

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Paragraphe 2 : Sur le plan politique

Le conflit armé de la R.D.C. avec son lot de violations des droits humains ont eu d'énormes conséquences sur le succès même de la rébellion et de différentes forces armées en présence dans la Province du Sud-Kivu et dans toute la partie orientale du pays. En effet, l'on a assisté à une illégitimation de la rébellion et à un renforcement de l'esprit nationaliste et patriotique, à la résistance et la méfiance vis-à-vis des actions et décisions des autorités rebelles.

En effet,  le déclenchement de la seconde guerre dite de « rectification » a été opéré dans un contexte tel que la population Congolaise en général, et celle du Sud-Kivu, en particulier, espérait déjà un changement socio-économique positif après la lutte armée qui mit fin à la dictature mobutienne. Selon Jean-Charles MAGABE144(*), ancien gouverneur de la Province du Sud-Kivu, la population de Sud-Kivu n'a jamais cru à la seconde « libération » parce que la prise du pouvoir de Monsieur Laurent-Désiré KABILA représentait un espoir qui renaissait déjà avec quelques réalisations socio-économiques ainsi que la promesse des élections présidentielles faite par le Chef de l'Etat. Les autorités rebelles n'ont donc pas convaincre le peuple sur le bien-fondé de leur rébellion.

Les violations des droits humains ont accentué, chez les populations Congolaises, ce sentiment de rejet de la rébellion ainsi que de tous leurs collaborateurs. Cette impopularité se manifestait notamment par la méfiance vis-à-vis des promoteurs de la guerre à savoir le R.C.D./Goma et leurs alliés. La population ne participait plus à des activités édictées par les hauts responsables rebelles. Ce qui fait qu'il n'a existé, durant toute la période de rébellion, aucun mécanisme mobilisateur capable de redynamiser la population145(*). Les populations Congolaises du Kivu se trouvaient ainsi devant des rebelles dont la quasi-totalité avait une mauvaise renommée. Ce qui impliquait automatiquement, pour le mouvement rebelle, un manque d'assise et de légitimité populaire pourtant nécessaire dans la poursuite de sa lutte146(*).

L'impopularité se traduisait concrètement par le fait que les populations des territoires occupés ne se retrouvaient pas dans la rébellion et ne cachaient plus leur hostilité. Dans la province du Sud-Kivu, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie et ses alliés, considérés comme promoteurs de la guerre dont les conséquences sont les violations des droits humains, n'ont eu de souteneurs que quelques individus désireux d'accéder à des postes jugés rémunérateurs en période de vaches maigres. L'une des raisons avancées sur la manifestation de cette hostilité est notamment celle du comportement des troupes sur le terrain. L'on n'a jamais vu, en effet, une armée s'adonner au pillage systématique d'un territoire à libérer, se plaire à massacrer la population à libérer, faire la chasse aux animateurs de la vie socio-économique, etc.147(*)

Chaque effet ayant aussi sa conséquence, nous pouvons souligner que cette impopularité implique la démonstration de la résistance populaire qui se manifestait notamment par la désobéissance civile, la méconnaissance de certaines autorités installées par la rébellion, la sympathie envers les bandes armées dites « Nationalistes », les « Mayi-Mayi ». En effet, au Sud-Kivu et dans les autres provinces occupées par les rebelles et leurs alliés, les gens ne se bousculaient pas pour participer aux manifestations politiques organisées par la rébellion. A plusieurs reprises, les responsables du Rassemblement Congolais pour la Démocratie ont été largement contestés et largement hués lors des meetings qu'ils organisaient, lors des cérémonies « officielles » ou lors des représentations quelconques.

Tel en est, par exemple, le cas lors des deux rassemblements populaires tenus, respectivement, au mois d'août 1998 pour l'explication des pourquoi de la guerre à la Grand-place de la poste et le 13 mars 1999 à la place Major Vangu dans la ville de Bukavu. Parler de la rébellion ou de la guerre lors des cérémonies où participe la population telles les collations des grades académiques, les participations aux conférences-débats ou colloques, les représentations aux activités socio-culturelles était considéré comme un tabou ou une provocation. Le mouvement rebelle était ainsi réduit au silence et ne s'exprimait le plus souvent que par la voie des ondes, à la Radio Télévision Nationale Congolaise considérée comme un instrument idéologique du mouvement rebelle.

Les responsables rebelles ont, eux-mêmes, pris acte de cette impopularité comme une des caractéristiques du Rassemblement Congolais pour la Démocratie parce qu'ils confirmaient l'incapacité de mobilisation de la masse populaire et d'un défaut d'adhésion à sa logique politico-militaire. Cet état des choses a conduit ainsi une frange de la population à ne plus avoir peur de dénoncer l'incapacité du R.C.D./Goma et ses alliés d'assurer la sécurité des territoires qu'ils contrôlaient148(*). Tels sont, à titre d'illustration, le message de Noël 2001 et Nouvel an 2002 du Mwami NGWESHE-XV WEZA-III, Pierre J-M. NDATABAYE Muhigirwa du 23 décembre 2001, dans lequel il dénonçait la prise en otage du peuple par quelques « politicailleurs » marquée par de tueries généralisées et de viols, de profanation et de pillage à grande échelle des richesses du pays, une association de malfaiteurs qui s'est liguée pour terroriser et intimider par des massacres et des tortures dont la violence est la seule voie de réussite dans la vie. Il ajoute que c'est la population Congolaises qui en est la victime malgré le raisonnement, en ce début du siècle de la nouvelle civilisation dénommée « mondialisation » que les promoteurs veulent nous la faire accepter selon leur règle de jeu.

Dans ses lettres ouvertes adressées au Président du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (au total 12 lettres) de 1999 à 2003, Monsieur Idésbald BYABUZE dénonçait tous les abus commis par le mouvement rebelle sur les populations Congolaises des territoires sous contrôle de la rébellion. Prenant pour cas deux d'entre elles (celle du 13 octobre 2001 qui est la cinquième et celle du 12 mars 2002, la douzième), signalons que l'auteur y mentionne les arrêtés du gouverneur de la Province du Sud-Kivu remplaçant les absents de leurs postes de travail suite à la décision des fonctionnaires de rester à la maison à cause de non paiement de leur prime et du refus du Rassemblement Congolais pour la Démocratie d'accepter l'envoi des arriérés de salaire promis par le Gouvernement de la république. Il y dénonce aussi les pillages, les viols, les meurtres et la traîtrise dont sont auteurs les rebelles en appelant le peuple à se rappeler à tout instant de ces pires maux qui lui sont infligés depuis le début de la guerre d'août 1998. Selon lui, en effet, la guerre a ramené Bukavu, en particulier et le Sud-Kivu en général, à l'âge de la pierre taillée et leurs habitants, de vrais australopithèques, des hommes ayant oublié les attributs de la modernité à cause des actes de barbarie, les uns les plus crapuleux que les autres tels que l'enterrement des femmes vivantes, les viols sadiques et sans considérations, les tueries par tous les procédés, etc.

La résistance et l'opposition à la rébellion se manifestait également par la dispersion des lettres anonymes ou des tracts appelant soit à des villes mortes, à des grèves généralisées ou encore l'interdiction de paiement de certaines taxes en faveur des autorités rebelles. Les exemples ci-après méritent d'être mentionnés en guise de preuve :

· Message du G.D.S.K. intitulé « Réveillez-vous peuple Congolais » dans lequel le groupe remercie la population pour avoir boycotté la rentrée scolaire, l'encourage à rester vigilante, ferme et fidèle malgré les intimidations, les tueries, met en garde les Congolais qui jettent la population dans la misère, la domination et promet l'échec du fait que le peuple prend conscience de la réalité des choses ; demande à la population de poursuivre la résistance et appelle aux services générateurs de recette de cesser toute perception et à la population de ne plus payer les taxes, aux fonctionnaires de ne plus perdre leur énergie pour un travail non rémunéré ; décrète, enfin la journée du 05 décembre 1998 ville morte en mémoire de tous les Congolais tombés sous les balles de la rébellion et de leurs alliés (à Kavumu, Kasika, Uvira et Bukavu). Le message date du 24 novembre 1998 à Bukavu ;

· Le Front Démocratique pour la Libération du Congo, dans son « Flash d'info » N° 001 de novembre 1998, affirme que le R.C.D. et ses alliés sont les principaux artisans de la misère du peuple. Il les avertit, à cet effet, que la colère de ce peuple assujetti n'est point contrôlable lorsqu'elle se déchaîne et que la vindicte de celui-ci arrivera tout en encourageant les amis de la résistance et d'alerte ;

· Les Nationalistes pour la résistance dans « Compatriote du Sud-Kivu : finis la peur, les intimidations et la terreur » appellent, quant à eux, à partir du 31 janvier 2000, à une grève générale des fonctionnaires, des agents de l'Etat, des privés et des services générateurs de recettes, des écoles et universités, des policiers et militaires, de tous les commerces sur toute l'étendue de la Province du Sud-Kivu ;

· Le Conseil de Sécurité de la Résistance locale du Sud-Kivu, dans son compte rendu de la réunion du 02 février 2000, écrivit une lettre ouverte aux Rebelles Congolais, à leurs alliés et à la Communauté Internationale. Dans cette lettre, le Conseil accuse les deux premiers cités à entretenir la misère de la population, le pillage des richesses, les massacres et tueries à grande échelle des innocents civils, des enlèvements, des exactions et autres barbaries perpétrés à Makobola, Kasika, Burhinyi, Mwenga, etc. Il indique, en outre, que les populations du Sud-Kivu ne resteraient pas indifférentes malgré les intimidations et promet d'autres actions de plus grande envergure en cas de surdité politique ;

· Le Parti de la Résistance Nationale, dans sa déclaration politique N°01/P.N.R./S-G/2002 du 10 janvier 2002 à Uvira, décréta aussi les dates de 16 et 17 janvier 2002 journées villes mortes de recueillement en guise de protestation contre la paupérisation des populations et en souvenir des compatriotes victimes des massacres de plus de 3,5 millions de civils innocents (Makobola, Sange, Kasika, Burhale, Izege, Kabare, Bunyakiri, Masisi, Beni, Butembo, Isiro, Kisangani, etc). Le Parti recommandait ainsi à toutes les couches populaires à rester en famille réfléchir sur le cycle infernal de violence dans le pays et envisager des solutions à court terme et à long terme pour la libération totale des consciences. Aux hommes politiques du R.C.D./Goma et à leurs alliés, il leur a été demandé de démissionner en bloc et demander pardon au peuple Congolais pour les préjudices subis par leurs actes ; aux Organismes Internationaux, en signe de compassion envers les populations meurtries, de focaliser leur aide humanitaire vers les territoires sous contrôle des « Mayi-Mayi » jusque là abandonnées à leur propre sort.

En plus, la résistance opposée par la population aux actions de la rébellion a rendu l'exécution de certaines décisions prises par les autorités rebelles difficile voire impossible. Aussi, la poursuite de la guerre impopulaire ponctuée par des violations flagrantes et massives des droits humains a renforcé le sens patriotique et l'esprit nationaliste dans les esprits des habitants du Sud-Kivu. Pendant la guerre, en effet, malgré la partition de fait de l'Etat Congolais, les populations des territoires sous contrôle de la rébellion, spécialement celles du Sud-Kivu, avaient plus tendance à la reconnaissance d'un seul gouvernement, à savoir, celui basé à Kinshasa, capitale de la R.D.C. et siège des institutions nationales149(*). C'est pour cette raison que tout le peuple Congolais a toujours prié pour la fin de la guerre et le recouvrement de l'intégrité territoriale de la R.D.C. à travers divers messages et actions des organisations de la société civile, les églises et les organismes internationaux. Tels sont les exemples des messages de Monseigneur Emmanuel KATALIKO, archevêque de Bukavu aux fidèles de Bukavu et aux hommes de bonne volonté du 05 décembre 1998, la Déclaration des Pasteurs des la Communautés membres des églises du Christ au Congo en ville de Bukavu du 21 décembre 1998150(*), le message du Cardinal Frédérique ETSOU à l'occasion de l'intronisation de son Excellence Monseigneur Charles MBOGHA Kambale, archevêque de Bukavu le 03 juin 2001, les messages de paix de la Société Civile du Sud-Kivu, à l'exemple de celui à l'occasion du 39e anniversaire de l'indépendance de la R.D.C. adressé le 16 juin 1999 aux présidents de la R.D.C. et du R.C.D.

Concernant la difficulté de l'exécution des décisions prises par les autorités rebelles, la plus importante a avoir été boycottée par la population du Sud-Kivu, pensons-nous, est celle liée à la mise en circulation de nouvelles plaques minéralogiques sur tout le territoire contrôlé par le R.C.D./Goma par la Décision N°001/R.C.D./CUPSG/2002 du 21 juillet 2002 et l'Arrêté Départemental N°077/DPFBP-RCD/JMEE/2002 du 23 juillet 2002. Dans la lettre numéro 519.02/1/97,en effet, l'archevêché de Bukavu a clairement donné sa position négative sur le changement desdites plaques en argumentant que cela pouvait attendre la réunification du pays du fait que la décision relevait entièrement des compétences de souveraineté, c'est-à-dire de la seule compétence du gouvernement de la République.

Aussi, l'église Catholique refusait qu'il soit imposé à la population de financer le « mouvement-parti ». Toujours à ce sujet, « Conscience Patriotique » a lancé des tracts sur lesquels on pouvait lire : « Toutes les couches sociales ont réagi et manifesté leur désaccord à l'égard de cette nouvelle manoeuvre de pillage et d'extorsion. Le R.C.D. n'administre rien ici, sauf piller, taxer et voler [...]. Refusons de prendre ces plaques trop exorbitantes et inutiles. Attendons le gouvernement issu des négociations en cours, un gouvernement d'union nationale qui, seul, est habilité à mettre en circulation de nouvelles plaques minéralogiques [...]. Acceptons de marcher à pieds, fermons nos activités si le R.C.D. nous y oblige et refusons une fois pour toute à enrichir les criminels et les traîtres qui ont déjà tué plus de 4 millions de Congolais ».

Sans avoir la prétention d'avoir énuméré toutes les conséquences socio-économiques et politiques qui paraissent innombrables, nous nous limitons à celles mentionnées ci-haut que nous considérons, personnellement, comme étant les principales. Dans la section qui suit, nous allons faire allusion aux différents mécanismes envisageables en vue de mettre fin aux violations des droits humains en R.D.C., en général, et dans la Province du Sud-Kivu, en particulier.

* 144 BAPUWA Mwamba, « Un transfuge dénonce l'occupation Rwandaise. Jean-Charles MAGABE, ancien gouverneur du Sud-Kivu, a fui la province occupée par la rébellion, qu'il accuse d'"assassinats et de pillages" », Jeune-Afrique Economie, du 16 au 29 Novembre 1998, pp.108-109.

* 145 Héritiers de la Justice (1998), Op. Cit., p.17.

* 146 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., p.113.

* 147 J - C. MAGABE, Op.Cit., p.4.

* 148 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., p.113.

* 149 I. BYABUZE Katabaruka, Lettre ouverte à Monsieur le Président du R.C.D./Goma sur les résultats partiels du dialogue intercongolais, N/Réf. : DOC. 12.Idé.B.K., du 29 mars 2002, Bukavu, p.4.

* 150 Rassemblement pour le Progrès, Op Cit., pp. 40 - 45.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry