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Etude de la conséquence en français contemporain: Le cas de trois oeuvres d'Emile Zola

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par Lysette Nanda
Université de Yaoundé I - DEA de langue française 2006
  

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2.2. La locution tel...que comparatif

D'un point de vue syntaxique, la locution conjonctive tel...que est analysable en deux morphèmes : le morphème tel et la conjonction que. Hors système corrélé, le lexème tel a deux valeurs. Il est soit adjectif, soit pronom. Comme pronom, il désigne quelqu'un de façon indéterminée, d'où l'appellation traditionnelle pronom indéfini que lui attribue la grammaire ; et comme adjectif qualificatif, il exprime l'indétermination. C'est cet aspect qui nous intéresse dans notre étude. Le nom est présenté par tel dans sa valeur la plus générale, ce qui le rapproche de l'article indéfini un toutefois avec une nuance : il donne un semblant d'identité au nom. Comme tout adjectif qualificatif, le lexème tel participe à la construction de la valeur référentielle du nom auquel il est incident, c'est-à-dire qu'il désigne une qualité liée au substantif, sans pourtant préciser la nature de cette qualité. C'est pour cela que Chevalier et alii (1964 :278) disent qu'il fonctionne comme un proadjecif qualificatif. Dans le cas de tel, l'opération de détermination référentielle ne peut se faire qu'au moyen des marques ou repères qui sont soit contextuel, soit énonciatif.

En repérage contextuel, le morphème tel peut référer soit au contexte antérieur, soit au contexte postérieur comme il est question dans [7] :

7a. Un jour, après lui avoir promis formellement dix mille francs, il avait osé se présenter les mains vides, à l'heure convenue. Un tel manque de parole, tant de gentillesses perdues, la jetèrent dans une rage de grossièretés. Elle était toute blanche. (Na, p.402).

7b. Jamais un tel gala n'avait mis en l'air la grande maison patriarcale et

cossue. (Ge, p426).

Il ne construit aucune valeur référentielle du nom manque de [7a]. Avec tel, l'indétermination est moins forte ; dans l'énoncé susmentionné, tout se passe comme s'il y avait une sélection de la valeur référentielle du nom auquel tel est incident. Il s'agit d'un manque particulier, unique, parmi tous les manques possibles, cependant tel ne détermine pas avec netteté l'occurrence, qui est appropriée, du nom. Dans l'énoncé [7a], tel renvoie à la promesse de donner de l'argent à Nana, promesse faite par Muffa, son amant. Dans cet emploi, tel signifie un tel N (des N) de cette nature. L'étymologie de tel est révélatrice, selon le dictionnaire Latin-Français (1959 :667), tel vient du latin talis signifiant de cette manière, de cette nature, de cette qualité, de ce genre, il traduit, selon l'expression de Hybertie (op cit),

un type d'opération d'anaphore particulier qui entraîne que prédéterminant + tel + N signifie : un N ou des N du genre, de la nature de ceux dont il a été question antérieurement, de ceux qui ont été antérieurement déterminés.

En glosant l'énoncé [7a], on pourrait avoir à peu près ceci : un manque de parole de la nature de celui que connaît Nana / ayant les mêmes caractéristiques que celui que Nana connaît... La combinatoire de un tel ne peut cependant pas être commutée par le démonstratif ce parce que ce denier exige, pour une bonne interprétation, un recours à l'univers extralinguistique.

En repérage énonciatif, l'instruction attachée à l'emploi de tel mérite qu'on se réfère à la situation d'énonciation pour avoir la référence du nom comme dans cet énoncé emprunté à Hybertie (op cit : 66) :

8. Avec un tel chapeau, t'as bonne mine

Tel suivi de que peut aussi être employé pour marquer la conséquence, le rapport ou la ressemblance de deux choses que l'on compare ensemble. Si cette locution nous intéresse dans cette étude, c'est parce que comme le déclare Hybertie, les opérations que traduit tel...que sont corrélatives de la valeur générale de tel.

Dans le cas de la conséquence, la relation entre tel s'établit avec la proposition consécutive comme il est question dans [9] :

9a. Les porions ne suffisaient pas au raccommodage, les bois cassaient de toutes les parts, [...]. Bientôt les désastres étaient tels, qu'il devait nécessiter de long mois de réparation, avant que l'abattage pût être repris. ( Ge, p 245) ;

9b. A cette minute, la confusion devint telle, qu'il se produisit un de ces faits d'affolement qui restent inexplicable. (Ge, p344) ;

9c. C'était, cette fois, une course de cinq grands kilomètres. Un élan tel les (sic) charriait, qu'ils ne sentaient pas la fatigue atroce, leurs pieds brisés et meurtris. (Ge, p318) ;

9d. Dès le premier voyage, Catherine, effrayée, revint en disant qu'il n'y avait plus personne au plan incliné. Le saisissement n'était pas tel, que les dix hommes l'avait cru, [...]. (Ge, p443).

Pour supposer la valeur référentielle de tel, il faut attendre l'accomplissement de la conséquence. Ainsi [9a], par exemple, peut être paraphrasé de la manière suivante : les désastres étaient tellement lourds / accentués qu'il devait nécessiter de long mois de réparation ... Nous parlons de supposer parce que, selon l'opération de parcours dont nous parlons depuis dans notre étude, tel construit une sous-classe d'occurrences du nom, sous-classe qui peut être réduite à un ou plusieurs éléments, dont, affirme Hybertie (op cit :67), le trait définitoire est de posséder la propriété qui permette l'avènement de la conséquence exprimée par la consécutive. On note que le choix d'un élément du paradigme de l'adjectif n'est possible qu'à travers l'expression de la conséquence. En d'autres termes, parmi les désastres, il y en a qui ont la propriété qui fait qu'on mette de long mois de réparation. Mais avec la structure un + N + tel de l'occurrence [9c], la détermination de tel devient difficile, même avec la réalisation de la conséquence. Avec N intercalé entre un et tel, il devient pénible de dire à quoi tel est incident. De là une interrogation pèse sur la grammaticalité ou l'acceptabilité d'une telle construction.

Parlant maintenant de la comparaison avec tel, nous avons la même description qu'avec si et tant. En glosant [9d], on obtient : ... Le saisissement n'était pas tel, que les dix hommes croyaient que le saisissement était / le saisissement n'était pas tel, que les dix hommes le disaient. La détermination de la propriété du nom auquel réfère tel dans le contexte reste indéterminée parce que cela relève du préconstruit. C'est également ce que souligne Hybertie (op cit : 115) lorsqu'elle déclare :

on peut remarquer que lorsque si et tant forment un système comparatif, le verbe de P2 est toujours soit un verbe de parler, soit un verbe de penser, [...]. Il s'agit donc toujours d'une représentation relevant du préconstruit.

Le préconstruit renvoie à ce qui est construit ou conçu avant l'acte d'énonciation. Pour Charaudeau et Maingueneau (2002 : 464),

le préconstruit peut être approché comme la trace, dans l'énoncé, d'un discours antérieur ; il s'oppose donc à ce qui est construit au moment de l'énonciation. Un sentiment d'évidence s'attache au préconstruit parce qu'il a été « déjà dit » et qu'on a oublié qui en était l'énonciateur.

Les verbes de parole ou de pensée sont les indices qui déclenchent cet effet discursif. En effet, dire, penser, imaginer, croire, présumer, etc. font partie des verbes dont parlent Hybertie et en guise d'exemple, pour qu'un locuteur énonce un fait comme celui-ci : Même à la dernière Sainte-Barbe, [...], le lapin n'avait pas été si gras ni si tendre qu'on l'eût pensé, il faut au préalable que lui ou le co-locuteur ait conçu que le lapin était gras ou tendre. Ceci est valable pour les énoncés avec tant et tel également. Et avec l'adverbe de négation, le locuteur nie ce qui a été d'abord conçu par autrui. C'est sans doute pour cela qu'on note que leur emploi en système corrélé est exclusivement réduit à des contextes mettant en jeu la co-énonciation comme c'est le cas des situations spécifiques suivantes :

6b'''. [...], le lapin avait-il été si gras et si tendre qu'on l'avait pensé ?

6c'. [...], avaient-ils tant ri qu'ils le prétendaient ?

9d'. [...] Le saisissement était-il tel, que les dix hommes l'avait cru ?

Dans la consécutive tout comme dans la comparative, l'introduction de la négation dans P1 ne produit pas la négation pure et simple de la propriété sur laquelle porte la détermination du niveau d'intensité, mais seulement la négation de l'intensité déterminée par le repère supposé nécessaire. En effet, dans l'énoncé le lapin n'avait pas été si gras ni si tendre qu'on l'avait pensé, qu'on eût à avaler sans mâcher, le locuteur nie le degré d'intensité déterminé par la représentation que l'on prête au co-énonciateur. Linguistiquement, cette représentation peut prendre soit la forme d'une consécutive, qu'on eût à avaler sans mâcher, soit la forme d'une comparative : qu'on l'avait pensé, sans nier la propriété être gras ou être tendre. Quant à l'interrogation, le locuteur laisse le soin au co-locuteur de trancher soit pour affirmer, soit pour infirmer. Dans [6c'], il s'agit d'une interrogation totale, l'unique type d'interrogation susceptible de fonctionner avec l'intensité.

En outre, nous constatons que dans le cas de la conséquence, si le degré d'intensité est nié et ne peut entraîner la conséquence, il est toutefois possible que cette conséquence puisse être possible pour peu que l'intensité atteint une échelle pouvant rendre la conséquence effective ; ce qui n'est pas le cas avec la comparaison puisque ce qui est nié c'est l'assertion du degré d'intensité produite par le co-énonciateur.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus