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De la protection juridique des forêts du Burundi : le cas du parc national de la Kibira

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par Désiré UWIZEYIMANA
Université de Limoges - M2 Droit International et Comparé de l'Environnement 2012
  

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A. La Police de l'environnement et les structures de recherche

1. La Police de l'environnement

En juillet 2005, le Gouvernement du Burundi, conscient de l'importance de l'environnement a mis en place une police de l'environnement. Sous l'autorité du Ministère de la Sécurité Publique, cette police a été mise en place avec l'appui de la coopération belge et est chargée de faire respecter les lois et règlements sur la protection de l'environnement. Elle travaille en étroite collaboration avec les agents de l'INECN, l'administration locale, les organisations oeuvrant dans le secteur de l'environnement et la population environnante du PNK. A cet effet, il est indispensable pour ce corps de police de connaître des outils de lutte contre l'exploitation illégale de l'environnement que sont les lois et les conventions internationales.

Au niveau du PNK, la police de l'environnement est composée de 25 unités éparpillées dans diverses positions de la Kibira67. En effet, dans leur mandat d'appuyer les agents de l'INECN sur terrain dans la surveillance du PNK, cette police joue un rôle important de prévention des actes nuisibles à la biodiversité du parc.

Cependant, ce corps de police est confronté à de nombreuses contraintes qui font qu'elle n'est plus en mesure de contrer les actes de destruction auxquels fait l'objet la faune et la flore du PNK, liés surtout au manque de formation professionnelle et de moyens pour être à la hauteur de cette noble tâche qu'il est appelé à accomplir.

Malgré la mise en place de la police de l'environnement, de nombreuses difficultés subsistent dont :

- un manque de formations adéquates en matière de la protection de l'environnement en général et de la conservation du PNK en particulier ;

- une distorsion administrative due au fait que ce corps n'est pas du ressort du Ministère en charge de l'environnement ;

- le cadre d'intervention de cette police n'est pas bien défini.

66 INECN, Plan d'Aménagement et de Gestion du Parc National de la Kibira, Gitega, Burundi, Juillet 2009, p.v.

67 INECN, Plan d'Aménagement et de Gestion du Parc National de la Kibira, Gitega, Burundi, Juillet 2009, p.36.

2. Les structures de recherche

D'après le contenu de l'article 23 du décret portant structure, fonctionnement et missions du Gouvernement de la République du Burundi, certaines des missions du Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique concernent la promotion de la Recherche scientifique et technologique dans les différents secteurs de la vie nationale et la promotion du développement de la science, de la technologie et l'innovation pour en faire un outil de développement durable68.

A ce titre, le Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique comporte des institutions universitaires très impliquées dans les activités de recherche sur l'environnement et particulièrement en matière de conservation des écosystèmes naturels. C'est ainsi que l'Université du Burundi est impliquée dans la conservation de la biodiversité à travers les activités de recherche. La Faculté des Sciences et celle des Sciences Agronomiques mènent des activités de recherche dans les aires protégées en général et le PNK en particulier il faut noter que la recherche appliquée est nécessaire pour la bonne gestion d'un espace naturel69.

A titre illustratif, à l'issue d'une étude réalisée par les chercheurs de la Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université du Burundi sur la forêt ombrophile de la Kibira, il a été constaté que ce site est dégradé bien que certains paramètres font croire qu'il y a plutôt reconstitution. A travers cette étude, ses réalisateurs ont, à cet effet, recommandé aux responsables de l'INECN d'actualiser et de mettre en oeuvre, dans les plus brefs délais, les plans de gestion du Parc pour sauvegarder ce qui reste de cette forêt ombrophile de montagne70.

Quant à l'Institut Supérieur d'Agriculture de Gitega de l'Université du Burundi (ISA), il forme des étudiants sur des programmes relatifs à l'environnement et délivre des diplômes d'Ingénieurs et de Biologistes. En collaboration avec l'INECN, il dispose, à travers les parcs nationaux, d'un beau champ d'investigations qui permet aux professeurs et à leurs étudiants de réaliser des travaux de recherche sur la diversité biologique du PNK.

Ainsi donc, force est de constater que les structures de recherche apportent un appui indéniable à l'INECN dans la conservation et la gestion du PNK, au moyen des investigations effectuées sur la flore et la faune de cet écosystème naturel.

68 Article 23 du Décret n°100/08 du 13 septembre 2010 portant structure, fonctionnement et missions du Gouvernement de la République du Burundi.

69 NINDORERA, D., Etude sur le cadre légal, politique et institutionnel en matière de biodiversité, Bujumbura, 2013, p.26.

70 HABONIMANA, B., NDIHOKUBWAYO, N., HABONAYO, R., NZIGIDAHERA, B., Bagaert, J., Essai de détermination des indicateurs de dégradation forestière : cas de la forêt ombrophile de la Kibira au Burundi, p.12.

71 DJIGO Seybatou A., NINDORERA D., Projet d'amélioration de l'efficacité des aires protégées pour la conservation de la biodiversité au Burundi, Bujumbura, 2010, p.23.

B. L'Office du Thé du Burundi (OTB) et la Régie de Production et de Distribution d'eau et d'électricité (REGIDESO), Burundi.

Au PNK, il existe des structures publiques qui mènent diverses activités dans le parc et en milieu riverain. Ces structures pourraient participer directement ou indirectement dans la préservation de la biodiversité du parc.

1. L'Office du Thé du Burundi (O.T.B)

L'Office du Thé du Burundi a beaucoup de plantations théicoles à la lisière du Parc National de la Kibira dont la production dépend du microclimat créé par le Parc National de la Kibira.

En effet, l'exploitation de ces plantations théicoles par l'OTB procure de l'emploi et des revenus aux populations riveraines du PNK et contribue ainsi à l'amélioration de leurs conditions de vie et à la conservation des ressources naturelles du PNK.

La forme de partenariat de l'OTB dans la protection de la biodiversité du PNK revêt deux aspects. D'une part, elle se présente sous forme d'une approche participative du fait que les populations employées par l'OTB sont impliquées dans la gestion du PNK et d'autre part, comme une activité génératrice des alternatives dans la mesure où les populations riveraines du parc qui dépendaient des ressources naturelles de la Kibira bénéficient désormais d'une autre source de subsistance. En effet, l'existence de trois sociétés théicoles autour de la Kibira (Teza, Rwegura et Mabayi) constitue une source de revenus pour les populations des communes voisines. Ces sociétés utilisent une main -d'oeuvre très importante pour la cueillette de la feuille verte et les autres activités d'entretien des pistes, des pépinières et des plantations. C'est ainsi que dans le secteur Teza, la principale société reste l'OTB qui emploie 1200 journaliers dans ses plantations de thé. Dans le secteur Rwegura, on note essentiellement que l'O.T.B. occupe 3.000 personnes dans ses plantations de thé et le PNK. Dans le secteur Mabayi, on peut noter l'OTB de Buhoro qui occupe environ 800 personnes dans ses plantations de thé71.

Ainsi donc, ces structures représentent une soupape inespérée. En effet, une grande partie de la population parvient à se maintenir dans les environs du parc grâce aux revenus supplémentaires que ces sociétés engendrent.

Il convient toutefois de souligner qu'avec la crise, le taux d'occupation de certaines institutions a diminué beaucoup. Pour le cas notamment du PNK, une partie du personnel de surveillance de

l'INECN a abandonné son travail suite aux combats qui s'y déroulaient, laissant libre cours à la coupe du bois et aux défrichements abusifs de certaines zones du PNK72.

Il faut signaler enfin que le fait de faire participer les communautés locales en proposant des alternatives à l'exploitation du PNK (artisanat, élevage, emplois dans les parcs et autour de ces derniers, la création des pistes touristiques, etc.) est une des solutions que le pays peut envisager pour conserver sa biodiversité et améliorer la vie des populations riveraines. Cette gestion inclusive conduit à l'utilisation durable des ressources naturelles de cette aire protégée.

2. La Régie de Production et de Distribution d'eau et d'électricité (REGIDESO), BURUNDI

Un grand nombre de rivières prenant source dans la forêt de la Kibira, ce massif forestier entretient des conditions hydrologiques et climatiques essentielles pour la production d'électricité et de l'eau pour l'irrigation. Ainsi, près de 100 captages sont aménagés dans le périmètre ou à proximité immédiate de la Kibira. Ces captages alimentent les populations riveraines en eau potable et participent au développement rural73.

Par ailleurs, la REGIDESO dispose d'une grande centrale hydroélectrique du pays au niveau du lac de retenue de Rwegura (en province Kayanza, au centre du pays) sur la rivière Gitenge alimentée essentiellement par des cours d'eau provenant du Parc National de la Kibira.

Dans ces conditions, la REGIDESO emploie un personnel important dans la production du courant électrique qui peut influer négativement sur le parc notamment à travers des cultures pratiquées à la lisière du Parc. D'où, la nécessité d'un partenariat entre les deux institutions (INECN et REGIDESO) pour la bonne gestion du parc. En effet, la REGIDESO tire beaucoup de profits des ressources naturelles du PNK notamment de ces cours d'eaux. Ainsi, il peut être demandé à la REGIDESO de contribuer à la protection de ce parc pour continuer à recevoir de l'eau qui alimente ces différents captages dont celui du barrage électrique de Rwegura. Pourtant, l'autorité gestionnaire du PNK ne bénéficie d'aucun avantage en contrepartie sous forme d'apport relatif aux moyens humains et matériels mis en oeuvre pour la préservation de cet écosystème naturel.

Cela pose le problème d'accès aux ressources et au partage des avantages découlant de leur utilisation. En effet, ce principe est consacré par le Protocole de Nagoya sur l'accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des bénéfices découlant de leur utilisation relatif à la Convention sur la Diversité Biologique du 29 octobre 2010. Le Burundi n'a pas encore adhéré à ce Protocole bien que les démarches d'adhésion soient en cours.

72 NZOJIBWAMI, C., Etude de cas d'aménagement forestier exemplaire en Afrique centrale: le parc national de la Kibira, Burundi, 2002, FAO, p.1.

73 NZIGIDAHERA, B., Analyse de la biodiversité végétale nationale et identification des priorités pour leur conservation, INECN- PNUD, Bujumbura, 2000, p.127.

A notre avis, le concept d'accès et de partage juste et équitable des avantages devrait être pris en compte au niveau des textes légaux et administratifs concernant l'exploitation des ressources biologiques au Burundi conformément aux dispositions du dudit protocole74. Bref, le besoin d'une législation nationale et d'une structure en matière d'accès et partage des avantages s'avère indispensable afin de permettre au pays et à l'INECN particulièrement de tirer profit des ressources naturelles de cette aire protégée.

Section 2: Les Communautés locales et autochtones, ONGs nationales, coopération bilatérale et multilatérale

En plus des institutions publiques, les communautés locales et autochtones, plusieurs ONGs nationales, la coopération bilatérale et multilatérale participent dans la mise en oeuvre des politiques nationales de protection et de gestion en rapport avec les ressources naturelles du PNK.

§1. Les Communautés locales et autochtones et les ONGs nationales A. Les communautés locales et autochtones

Les communautés locales sont les premières à exercer des pressions sur les ressources des aires protégées en général et plus particulièrement sur celles du PNK pour satisfaire leurs besoins multiples. Il s'agit notamment de la recherche du bois de chauffage, de la recherche des plantes médicinales et des ressources alimentaires75. Au niveau de la population locale, la coordination est une affaire de l'administration. Cependant, certains membres de la communauté s'organisent en groupement pour l'exploitation des éléments de la biodiversité du Parc de façon autorisée ou illicite comme les scieurs, les chasseurs, les coupeurs des arbres de construction ou à but artisanal, les collecteurs des animaux pour la vente. Evidemment, tous ces groupes nécessitent une organisation afin de contribuer dans la sauvegarde de cet écosystème forestier.

Les groupes autochtones (les Batwa) jouent un rôle important dans l'utilisation des ressources biologiques des aires protégées surtout le Parc National de la Kibira. Ces derniers vivent de plusieurs ressources qu'ils récoltent dans le parc. Ils servent également d'intermédiaires aux tradipraticiens dans la collecte des plantes et animaux utilisés en médecine traditionnelle et dans le commerce.

Aux fins de pouvoir mener une gestion du PNK efficace sur le plan écologique, bénéfique sur le plan social et viable sur le plan économique, le Projet Parcs pour la Paix « PPP » en collaboration avec l'INECN, mène des concertations avec les populations riveraines (communautés locales et

74 Article 5.2 du Protocole de Nagoya sur l'accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation relatif à la Convention sur la Diversité Biologique.

75INECN, Rapport d'étude sur les modes de gouvernance et les catégories d'aires protégées actuelles et futures au Burundi, Bujumbura, 2008, p.16.

autochtones) dans la préservation des aires protégées, de la forêt de la Kibira. En effet, c'est depuis 2001 que l'INECN a mis en place un système d'intégration des communautés dans la gestion des aires protégées autour des plans communautaires de conservation des aires protégées. Il existe actuellement deux plans communautaires élaborés pour les communautés riveraines du PNK (à Bugarama et à Rwegura) mis en place dans le cadre du Projet Parcs pour la Paix « PPP ». Ces concertations se déroulent normalement depuis les collines, les secteurs et les zones par le biais d'un diagnostic participatif (D.P) au cours duquel les communautés locales ont été appelées à :

1. décrire le milieu dans lequel elles vivent, leur mode de vie, les atouts disponibles pour conserver l'aire protégée (PNK) ;

2. décrire et hiérarchiser les menaces de l'aire protégée et les problèmes environnementaux du milieu environnant ;

3. analyser les groupes cibles par rapport aux problèmes environnementaux ;

4. analyser et hiérarchiser les causes profondes de ces problèmes sur base de relation de cause à effet ;

5. identifier des solutions sur base de l'arbre à problème ;

6. définir des actions concrètes pour résoudre les menaces ;

7. fournir des indicateurs, l'échéancier ;

8. identifier les intervenants, y compris les communautés elles-mêmes ;

9. définir le code de conduite des communautés et autres acteurs dans la conservation de l'aire protégée76.

A la fin de cet exercice, les communautés riveraines du parc sont en mesure de connaître avec exactitude les problèmes environnementaux qu'elles vivent et les solutions appropriées à adopter. De plus, elles connaissent désormais le rôle qu'elles doivent jouer pour atteindre les solutions. A ce niveau, il convient de préserver les droits coutumiers et faire en sorte que les plans d'aménagements et gestion comprennent absolument toutes les indications nécessaires concernant les responsabilités de chacun des partenaires.

Enfin, des dispositions doivent être prises pour que la participation des populations locales débute effectivement avec la préparation des plans d'aménagement et de gestion jusqu'à la mise en oeuvre effective de ces derniers. Actuellement, la gestion des aires protégées et des boisements doit être une gestion collaborative où les populations locales surtout celles vivant dans et/ou autour de ces écosystèmes forestiers se sentent directement concernées par la conservation de la biodiversité.

Ceci transparaît bien dans le rapport d'étude sur les modes de gouvernance et les catégories d'aires protégées77 et dans la loi y relative.

76NZIGIDAHERA B., NZOJIBWAMI C., BIRUKE Maneno, MISIGARO A., Plan communautaire de conservation du Parc National de la Kibira en zones NKONGE et RWEGURA, Bujumbura, 2002, p.7.

77 INECN, Rapport d'étude sur les modes de gouvernance et les catégories d'aires protégées actuelles et futures au Burundi, Bujumbura, 2008, p.19.

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