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Mobilité résidentielle et processus d'étalement de la ville de Niamey (Niger).

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par Abdoulaye ADAMOU
Abdou Moumouni Dioffo - Doctorat de Géographie 2012
  

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5.2. SDAU de 1984 : une continuité dans la logique d'étalement de la ville de Niamey

Le Schéma Directeur d'Aménagement Urbain de Niamey de 1984 a fait l'objet d'un examen rigoureux de la part de M. K Seydou en 1995, c'est-à-dire 11 ans après son élaboration. Dans son ouvrage intitulé « La politique de planification urbaine au Niger : le cas de Niamey », publié dans les cahiers du CIDEP n° 22, l'économiste-planificateur a essayé de montrer, sans le remettre en cause, les limites de l'outil de planification en question, en insistant sur les difficultés de sa mise en application. Il n'a pas manqué en outre de faire des propositions qui permettaient d'élaborer un SDAU plus adaptable aux conditions urbaines de Niamey.

L'auteur reprochait d'abord au SDAU, l'incohérence entre ses objectifs et les moyens de sa mise en oeuvre ; ensuite, il montre que la programmation et la réalisation des services et équipements urbains prévus, se font au gré des opportunités et des moyens de financements généralement offerts par les bailleurs de fonds internationaux. Il en résulte un déclin du rôle de l'Etat, qui est supplanté par la Nigetip33(*) en matière d'urbanisme au cours de la décennie 1990-2000.

En effet, l'auteur fait remarquer que depuis sa création, imposée par la banque mondiale, la Nigetip draine l'essentiel des financements des bailleurs de fonds traditionnels comme la CCCE, le PNUD, etc. Par conséquent, elle s'est vite substituée au Ministère de l'équipement et à l'Etat. Aussi, toujours selon M. K. Seydou, la Nigétip procède-elle dans les villes du Niger par la méthode HIMO (consistant à utiliser une Haute Intensité de Main d'OEuvre), à la construction d'écoles ou de clôtures d'écoles, au pavage des rues, au traitement de koris (ravins), à la construction de marchés, etc.

Par ailleurs, M. K. Seydou a démontré que la planification du SDAU souffrait d'un environnement institutionnel défavorable et d'une forte pesanteur sociopolitique. Il note d'ailleurs une réglementation inachevée et une disqualification des autres acteurs, alors que le processus de planification devrait les engager. A cela s'ajoute le fait que cet outil qu'est le SDAU est prévu pour couvrir un temps assez long (15 ans) dans un pays où les conditions d'existence et les politiques de développement sont instables. Il est difficile de prévoir certaines éventualités comme la crise économique, le Programme d'Ajustement Structurel (PAS), la démocratisation et la municipalisation qui sont une réalité de nos jours. L'auteur a aussi reproché le caractère global du SDAU, car associant des projets nationaux, internationaux et locaux qui ne dépendent pas seulement de l'Etat nigérien.

Néanmoins, il conclut que c'est la non mise en application du SDAU qui a favorisé l'extension non maîtrisée de la ville. D'où la persistance de l'urbanisme de rattrapage qui recouvre des actions de régularisation foncière, de viabilisation et de réhabilitation des quartiers anciens, faute de financement depuis la crise de la Caisse de Prêt aux Collectivités Territoriales (CPCT).

Quant au présent exercice, il consiste à vérifier que les projections spatiales et l'emplacement des équipements ont été respectés dans la construction de la ville. Cela revient à comparer l'organisation et l'extension spatiales proposées par le SDAU et la réalité actuelle de la ville. Cette analyse permettra de répondre à un certain nombre de questions :

- quelle est la structure de la ville proposée par le SDAU ?

- Vise-t-elle une rupture avec l'ancien mode de développement spatial de la ville ?

- Si le SDAU avait été réalisé entièrement, n'aurait-on pas assisté à un suréquipement ou à une extension spatiale plus importante de la ville ?

- N'aurait-il pas envenimé certaines situations conflictuelles telles que les relations entre Niamey et les communes environnantes, notamment en ce qui concerne les limites de la ville ?

On relève d'abord que le SDAU a surestimé l'effectif de la population de Niamey en 1996. En effet, les projections démographiques établies dans le livre blanc du SDAU ont abouti à une surestimation de la population de Niamey à environ 750 000 habitants à l'horizon 1996 ; l'hypothèse faite correspondait donc à un doublement de la population de 1984 sur 12 ans. Or, ce seuil n'a pas été atteint même en 2001, où le RGP/H évalue la population à 707 759 habitants, soit 42 241 habitants de moins que les projections du SDAU à l'horizon 1996, c'est-à-dire pour cinq ans auparavant.

De ce fait, puisque la population en 1996 a été largement surestimée, on devrait s'attendre logiquement à une surestimation de l'espace à mettre en valeur pour le développement de la ville si le SDAU a été strictement appliqué. Aussi, en résulterait-il une plus forte densité humaine dans la ville contrairement à ses objectifs.

Les raisons de la surestimation de la population de Niamey à l'horizon 1996, sont sûrement liées à la baisse du taux d'accroissement démographique de la ville au cours de la décennie 90, et surtout à la non mise en oeuvre des grands projets d'envergure internationale prévue dans le cadre du SDAU. Elles découlent également de certains impondérables liés à la crise économique qu'a traversée le pays dans les décennies 80, sous l'effet des programmes d'ajustement structurel imposés aux pays en voie de développement par les institutions de Breton Wood. En effet, le PAS a entraîné une montée sans précédent de la pauvreté, qui a contribué à ralentir l'afflux des exodants à Niamey, tout en poussant certains ménages à regagner les villes secondaires ou leur lieu d'origine, qui peut être un village. Ce retour fait suite soit à une retraite anticipée, soit à un licenciement du chef de ménage.

Aussi, la crise économique rend-elle difficile l'accueil des migrants dans les familles urbaines ainsi que leur accès à l'emploi. Quant aux petits métiers, ils rapportaient moins. Ce qui fait que les villes ne servaient plus d'alternative à la vie rurale déjà en crise, et ne conditionnaient plus l'organisation de la main d'oeuvre familiale qui consistait à envoyer une partie des actifs travailler dans les centres urbains pour faire des économies, en vue de soutenir ceux qui sont restés au village. Il faut dire que l'augmentation rapide des effectifs de la population est aussi un facteur explicatif de la persistance de la crise économique.

S'agissant des grands projets d'envergure internationale, ils visent à renforcer la fonction de la capitale tant à l'échelle nationale qu'à l'échelle sous-régionale (dans le cadre de l'Afrique de l'ouest). En intégrant ces projets, le SDAU a sûrement mesuré leur incidence sur la croissance démographique de la ville. En effet, la réalisation de ces projets aurait entraîné un appel de main d'oeuvre nécessaire à la création de gares et de marchés, etc., qui auraient relancé l'exode rural et créer des besoins en logements.

Les grands projets en question portent précisément sur :

- la voie ferrée Niamey-Parakou passant par Dosso dont l'étude de faisabilité a déjà été réalisée au moment de l'élaboration du SDAU. Dans la perspective de ce projet, il a été prévu une gare ferroviaire/marchandises, une zone artisanale et une zone industrielle à l'entrée de la ville sur la route de Dosso à l'emplacement de la forêt classée située au sud-est de l'aéroport international Diori Hamani.

Mais, comme le projet n'a pas été réalisé, l'espace qui lui a été réservé (les équipements et infrastructures d'accompagnement compris) est plutôt devenu un prolongement de la zone d'habitat informel du quartier aviation que la mairie a voulu limiter en opérant les lotissements de Balaré au sud de la route nationale (RN). Au nord, l'espace fait office de carrière ou lieu de fabrication de briques adobes en banco (Kaolin, latérite). Des murs en parpaing commencent aussi à s'y lever. Voilà donc le sort réservé aux 530 hectares prévu par le SDAU il ya 27 ans, au niveau de ce qui devrait constituer le lieu de conjonction route-aéroport-voie ferrée.

- La voie ferrée Niamey-Ouagadougou en passant par Abidjan devait partir de la jonction avec la Route Nationale (RN) et la voie ferrée Parakou-Niamey à environ un km au sud de Saga, puis traverser le fleuve en passant par Kirkissoye et Saguia avant de rejoindre la route de Torodi non loin de l'emplacement actuel du poste de police. Les équipements prévus aux alentours de la douane à cet effet, ont tous vu le jour. Mais, plus à l'ouest, la zone artisanale ainsi que le camp militaire prévus dans le cadre de ce projet, constituent des espaces exposés à la spéculation foncière. Le projet de la voie ferrée Niamey-Haute Volta n'est pas encore réalisé, car les politiques sous régionales ont plutôt misé sur le développement des routes transfrontalières.

- Le projet de la construction de deux autres ponts sur le fleuve Niger, l'un devant relier la rive gauche (à partir du quartier Yantala) à la rive droite (au niveau du village urbain de Lamordé), l'autre à l'est devant relier Gamkallé à l'actuel Gaweye,... La réalisation de ces ponts aurait eu un effet similaire à celle du pont Kennedy (1971) sur le développement spatiale de la rive droite. Aujourd'hui, le 5ème Arrondissement recèle la plus importante ressource foncière de Niamey, car elle est moins affectée par la croissance urbaine. C'est seulement en 2008 que la construction du deuxième pont reliant Gamkallé à Gaweye a débuté sur financement de la Chine.

Carte n° 5.4 : Schéma Directeur d'Aménagement Urbain de Niamey, 1984

- Il y a enfin le projet d'extension de l'aéroport, qui n'a pu être réalisé qu'en 2005 dans le cadre des 5ème jeux de la francophonie.

On voit qu'aucun de ces quatre grands projets n'a vu le jour dans la période que le SDAU est censé couvrir. Or, dans l'esprit du SDAU, la réalisation de chacun de ces projets devait susciter des équipements et infrastructures d'accompagnement, pouvant accentuer le développement des secteurs de la ville, avec notamment l'extension des zones d'habitat. Les espaces ainsi laissés viennent s'ajouter aux réserves foncières prévues par le SDAU, donnant une allure incohérente au tissu urbain. Pire, elles ont suscité la gourmandise des spéculateurs au profit desquels la mairie procède au morcellement de ces espaces.

* 33 Nigetip : Agence Nigérienne de Travaux d'Intérêt Public pour l'emploi

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