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Les sens: l'essence de toutes interactions


par Julia Lazzetta
BUC Ressources - Educateur spécialisé 2020
  

Disponible en mode multipage

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Domaine de Compétence 2.2 Conception et conduite du projet éducatif spécialisé Mémoire professionnel

Les sens : L'essence de toutes interactions

Dossier écrit en vue de l'obtention du Diplôme d'Etat d'Educateur Spécialisé

Session 2020

Remerciements

Je remercie Murielle pour son temps, son soutien inépuisable et son intérêt pour les sujets abordés, Merlin pour ses conseils et sa très grande disponibilité, Emmanuelle, pour son temps, les jeunes des Didgé pour leur joie de vivre et leurs sourires inoubliables, Alexandra pour sa simplicité et son honnêteté, Anne-Laure pour sa sympathie, sa bonne humeur, ses connaissances, sa bienveillance pour les jeunes et son travail auprès d'eux, Dominique Depenne pour sa compréhension fine qui m'a permis d'être reconnue, entendue et éclairée, et Anastasia pour ses observations bienveillantes.

Sommaire

Introduction 1

I. L'Établissement Pour Enfants et Adolescents Polyhandicapés 4

1. Son contexte historique et juridique 4

a. Son contexte historique 4

b. Son cadre légal et son financement 5

2. Ses missions et le public accueilli 6

3. Son équipe et ses partenaires 7

4. Son organisation 8

a. Ses réunions 8

b. Ses modalités d'admission 9

c. Sa structure 10

d. L'organisation des journées 10

II. Deux jeunes en recherche d'interactions sociales avec leur environnement 11

1. Angel 11

2. Zadkiel 13

III. Les besoins spécifiques d'Angel et de Zadkiel 16

1. Questionnements initiaux 16

2. Toutes les occasions sont bonnes pour entrer en relation 16

3. A la recherche d'objets de stimulations et de dynamisme 17

4. Le besoin de stimulations sensorielles, s'ajoutant aux cinq besoins de base 18

5. Le besoin de participation, soit le besoin d'humanité 19

6. Pistes de réponses 21

IV. Les contes sensoriels 22

1. Naissance du projet, pour qui et... 22

2. ...Pourquoi ? 23

3. Annonce du projet à l'équipe 26

4. Objectifs visés 26

5. Cadre de l'activité 28

a. Nombre de participants 28

b. Moyens matériels 29

c. L'annonce de l'activité aux jeunes 30

d. L'histoire choisie 30

6. Déroulement des séances 31

a. Première séance 31

b. Deuxième séance 32

c. Troisième séance 32

d. Quatrième séance 33

e. Cinquième séance 34

f. Des participants attentifs et réactifs lors des séances 34

g. L'atterrissage après le voyage par les sens 35

V. Evaluation des séances 37

1. Ajustements opérés 37

2. Qu'en est-il des objectifs ? 38

3. Le sentiment continu d'exister 42

VI La suite au prochain épisode ? 43

Auto-évaluation 44

Conclusion  46

Introduction

Lors de mes trois expériences professionnelles, j'ai été amenée à m'interroger sur la participation des usagers et sur leurs capacités à tirer parti des activités et de l'accompagnement proposé.

Lors de mon premier stage auprès d'adultes en situation de handicap mental, j'ai diminué mes consignes pour laisser aux usagers la possibilité d'agir, de proposer ou de choisir. A titre d'exemple, à travers une activité créative, j'accompagnais la personne à réaliser un projet de création en l'encourageant à trouver des idées à partir de ses envies. En fonction des capacités du résident, l'oeuvre pouvait prendre la forme d'une peinture, d'un dessin, d'un bracelet ou de toute autre création. J'ai travaillé sur l'expression de leurs désirs afin de les éveiller au plaisir de s'investir dans une activité mais également pour stimuler leurs capacités cognitives. J'ai pu constater une certaine attente ou dépendance envers les consignes de l'éducateur. Or, je pense qu'il est nécessaire de veiller à ne pas décider à la place de la personne mais de les accompagner, et les stimuler afin que ceux-ci restent des sujets pensants et désirants, et non des objets. La participation permet donc de reconnaître le statut des personnes accompagnées.

Par la suite, j'ai effectué mon deuxième stage auprès de jeunes adultes au service de l'Aide Sociale à l'Enfance. Lors de suivis dans le cadre de contrats jeunes majeurs1(*), j'ai noté qu'un manque de complicité entre moi et «l'usager» pouvait entraver son implication. C'est pourquoi, au long de mon troisième stage à responsabilités au sein d'un Établissement pour Enfants et Adolescents Polyhandicapés (EEAP), j'ai veillé à développer un lien de confiance avec les jeunes accueillis, notamment lors des soins. De plus, au quotidien j'ai pu encourager et rechercher les moindres réactions, ou tentatives de participation lors des douches, d'activités ou lors des choix de vêture ou de nourriture. Ainsi, mon travail effectué sur la participation m'a amené à valoriser et intensifier les tentatives d'actions et d'interactions de la personne accompagnée.

La participation des personnes accompagnées s'envisage tant dans le quotidien de leur prise en charge ou accompagnement, que pour favoriser l'évolution des pratiques et des structures comme l'inscrit durablement la Loi 2002-2 rénovant l'Action Sociale et Médico-sociale. Ainsi la participation de « l'usager » est un droit qui est garant de sa dignité en tant que sujet et doit donc rester un axe de travail central et essentiel.

Ainsi, tout au long de mon stage j'ai pu repérer le besoin des jeunes de participer à une conversation, une activité ou en d'autres termes à participer à la vie de leur environnement, afin de se mettre en lien avec ces mouvements de vie et de dynamisme. La problématique de mon mémoire s'inscrit donc de la façon suivante, elle interroge ma place auprès de deux résidents : je me suis interrogée sur ce que devrait être la meilleure réponse à apporter dans leurs divers besoins d'interactions sociales et de stimulations sensorielles. En premier lieu, les questions à aborder sont les suivantes : quels sont les besoins des résidents polyhandicapés ? Est-ce que l'équipe de professionnels y répond déjà dans le quotidien ? A partir de mes observations, comment vais-je pouvoir m'inscrire dans une démarche éducative avec ces deux résidents, tout en veillant à répondre à leurs besoins respectifs, dans le respect de chacun ?

Mon stage s'est déroulé en deux temps. D'une part, je me suis attachée à accompagner les jeunes au quotidien à travers les soins et les activités de loisirs. Puis, d'autre part, j'ai pu me montrer présente au sein de l'unité d'enseignement auprès de l'enseignante spécialisée deux jours par semaine. Cette unité prend en charge une quinzaine de jeunes. L'EEAP a fait le choix d'un partenariat avec le personnel éducatif, c'est-à-dire les salariés et les stagiaires, afin de permettre un accompagnement individuel, et de répondre aux spécificités liées aux apprentissages et à la diversité des jeunes. Ceux-ci y travaillent la capacité à se repérer dans le temps (date, météo, évènements), à reconnaître les chiffres et certains mots, et à réaliser des travaux manuels. L'expérience au sein de l'unité d'accompagnement éducatif m'a permis de connaître les potentialités cognitives et manuelles de certains jeunes. En outre, j'ai pu soutenir les jeunes dans leur travaux, bien que leur participation s'envisageait sous forme de petites tâches car tel que le spécifie Danièle WOLF«Toute activité, du moment qu'elle est minutieusement décomposée, peut présenter des segments auxquels une personne polyhandicapée peut être associée activement. Cela peut être partiellement, brièvement, et si l'accomplissement de la tâche le requiert, en guidance»2(*).

Je vous propose donc d'aborder mon mémoire comme suit. Tout d'abord, je présenterai l'établissement qui a en charge les deux jeunes résidents. Puis, je vous les présenterai et j'exposerai un diagnostic de leurs besoins. Ensuite, je tâcherai de détailler l'activité, s'intitulant «contes sensoriels» que j'ai eu l'opportunité de mettre en place en réponse aux besoins repérés. J'évaluerai cette activité en reprenant les objectifs initiaux. Enfin, j'analyserai le déroulement des séances afin de conclure sur des préconisations quant au futur de l'accompagnement des résidents.

Les prénoms des sujets figurant dans ce dossier ont été modifiés pour conserver l'anonymat de chacun.

I. L'Établissement Pour Enfants et Adolescents Polyhandicapés

1. Son contexte historique et juridique

a. Son contexte historique

L'EEAP est un établissement médico-social créé en 1994 et géré par La Croix-Rouge Française. Il est situé à l'endroit d'un ancien sanatorium où étaient hébergées et soignées, dans les années 50, des personnes atteintes de la tuberculose et plus tard des enfants hémophiles. Aujourd'hui, les professionnels de l'établissement accueillent des enfants et adolescents polyhandicapés et porte son nom en mémoire d'un déporté, mort en 1943 dont la famille a légué le terrain à la Croix Rouge pour la construction d'un lieu de soins.

La Croix-Rouge Française est une association humanitaire d'action médico-sociale. Le 24 juin 1859, Henry Dunant organise des secours aux victimes de la bataille de Solférino. L'aide humaniste apportée aux soldats des deux camps sans discrimination est l'acte fondateur de la Croix-Rouge. En 1863, le Comité international de la Croix-Rouge pour le droit international humanitaire est signé par seize nations. La Croix-Rouge Française prend naissance le 25 mai 1864. En août 1940 les trois sociétés : la Société Française de Secours aux Blessés Militaires, l'Association des Dames de France et l'Union des Femmes de France se sont réunies sous la dénomination Croix-Rouge Française. Puis, l'ordonnance du 27 avril 1945 confirme la nouvelle organisation de la Croix-Rouge Française ainsi que sa reconnaissance d'utilité publique. Enfin, en mai 1946, la Croix-Rouge Française est nommée à l'Ordre de la légion d'honneur, et s'est vue attribuée la croix de guerre avec palme pour ses actes.

La Croix-Rouge Française est régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, reconnue d'utilité publique par décret du 7 août 1940 et validée par l'ordonnance du 27 avril 1945.

Son action humanitaire s'articule autour de trois axes :

- secourir

- développer les solidarités

- soulager, prévenir et apaiser les souffrances.

Son action sanitaire et médico-sociale consiste à soigner et éduquer.

L'EEAP s'inscrit dans ce dispositif et se réfère aux sept principes de la Croix-Rouge Française :

- humanité : «ce principe tend à protéger la vie et la santé ainsi qu'à faire respecter la personne humaine. Il favorise la compréhension mutuelle, l'amitié, la coopération et une paix durable entre tous les peuples ;»

- impartialité : «il ne fait aucune distinction de nationalité, de race, de religion, de condition sociale et d'appartenance politique» 3(*) ;

- neutralité : «le mouvement s'abstient de prendre part aux hostilités et, en tout temps, aux controverses d'ordre politique, racial, religieux et idéologique»4(*) ;

- indépendance : «le mouvement est indépendant » ;

- volontariat : «il est un mouvement de secours volontaire et désintéressé» ;

- unité : «il ne peut y avoir qu'une seule société de la Croix-Rouge. Elle doit être ouverte à tous et étendre son action humanitaire au territoire entier» ;

- universalité : «le Mouvement international de la Croix-Rouge est universel».

Le siège de la Croix-Rouge, situé à PARIS (14ème arrondissement), se décline de manière déconcentrée sur le territoire national par le biais des directions régionales et des pôles de services régionaux.

b. Son cadre légal et son financement

L'EEAP validé par arrêté préfectoral en date du 16 avril 1994 est reconnu conforme aux annexes XXIV du décret n°89-798 du 27 octobre 1989, fixant les conditions techniques d'agrément des établissements privés de cure et de prévention pour les soins aux assurés sociaux.

L'accueil, la prise en charge thérapeutique et éducative des jeunes résidents de l'EEAP s'inscrivent dans un dispositif législatif qui définit la population accueillie et délimite son action ; il s'inscrit dans le décret du 2 avril 2009 article 5. Celui-ci précise que l'établissement met en place un projet individualisé d'accompagnement prévoyant un enseignement adapté conformément au contenu du projet personnalisé de scolarisation. Le décret autorise donc la mise en place d'une unité d'enseignement, créée par convention, pour dispenser les apprentissages permettant la réalisation d'acquisitions dans le champ scolaire, le développement de la personnalité et la socialisation des enfants et adolescents accueillis. Le décret souligne l'élaboration d'un projet d'établissement à visée pédagogique, éducative et thérapeutique précisant les objectifs et les moyens mis en oeuvre pour assurer cet accompagnement. L'article met en évidence l'implication de la famille, associée à l'élaboration du projet individualisé d'accompagnement, à sa mise en oeuvre, à son suivi régulier et à son évaluation. Enfin, il est précisé que l'établissement doit permettre d'accompagner l'enfant ou l'adolescent dans sa globalité et de manière continue. Pour ce faire, l'établissement maintient auprès du public, le personnel nécessaire pour encadrer les jeunes accueillis.

L'établissement est rattaché pour sa gouvernance à une délégation territoriale de la Croix-Rouge. Le pôle de services régionaux d'Île-de-France assure le suivi budgétaire et comptable et élabore les payes. L'établissement reçoit une dotation pour son fonctionnement. Cette dotation est fixée par un Contrat Pluriannuel d'Objectifs et de Moyens (CPOM), pour une période de 5 ans. Cette dotation est réévaluée chaque année par application d'un taux directeur fixé par les pouvoirs publics. Ce CPOM englobe deux autres établissements de la Croix-Rouge Française.

Enfin, le dispositif législatif «amendement CRETON» permet à l'EEAP d'héberger les jeunes qui ne trouvent pas de place dans des établissements pour adultes au-delà de 20 ans.

2. Ses missions et le public accueilli

Le public accueilli au sein de l'EEAP comprend les enfants ou adolescents de 6 ans à 18 ans, en situation de polyhandicap. Le polyhandicap correspond à des déficiences graves et durables dues à des causes variées, le plus souvent pré et périnatales ; la déficience mentale est associée à des troubles moteurs et à d'autres déficiences, entraînant une restriction extrême de leur autonomie, nécessitant un accompagnement permanent.

Les missions générales de l'EEAP sont les suivantes : accueillir des enfants ou adolescents en situation de polyhandicap, leur assurer un accompagnement éducatif, pédagogique et thérapeutique de qualité, qui réponde à leurs besoins évolutifs et spécifiques. Ses fonctions sont d'apporter aux familles des jeunes le soutien nécessaire dans leur vécu du handicap souvent ressenti comme difficile. Il s'agit aussi d'inscrire cet accompagnement dans un projet de vie qui intègre toutes les étapes de la vie des jeunes, jusqu'à l'âge adulte ainsi que leur orientation vers un autre établissement. De plus, l'accompagnement doit aider au développement ou au maintien des capacités cognitives, sensorielles, affectives et motrices. Puis, il doit soutenir le développement de l'autonomie (aider à faire seul ou à participer aux différents gestes de la vie quotidienne, à exprimer des choix, etc.). Enfin, les missions visent à stimuler le développement de la communication et des relations sociales (aider à exprimer ses besoins, désirs et émotions, et à développer la capacité de vie en groupe). Le travail éducatif s'opère tout au long de la vie quotidienne, au travers d'ateliers éducatifs et de déplacements à l'extérieur.

Chaque membre de l'équipe éducative est référent de deux jeunes au sein de son unité. La famille sollicite davantage le professionnel référent en revanche, le projet individuel et la synthèse sont élaborés par le responsable socio-éducatif qui veille à prendre appui sur les décisions et les réflexions émises en réunion.

3. Son équipe et ses partenaires

Les missions de l'établissement sont réalisées par une équipe pluridisciplinaire organisée en différents services : l'encadrement regroupant un directeur, un directeur adjoint et une cheffe de service, le service médical et soin représenté par un médecin généraliste, un médecin de rééducation physique et fonctionnelle, une psychologue, des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes, des psychomotriciens, une orthophoniste, des infirmiers et infirmiers coordonnateurs, le service éducatif qui accueille un responsable socio-éducatif c'est-à-dire un éducateur spécialisé, des moniteurs-éducateurs, des accompagnants éducatifs et sociaux et des aides-soignants, avec lesquels je travaille quotidiennement. Tous assurent la prise en charge des jeunes dans les actes de la vie quotidienne (toilettes, repas, lever, coucher etc.) et les différentes activités proposées au sein de l'établissement. Enfin, l'établissement dispose d'un service administratif et d'un service général pour la maintenance de l'établissement

L'EEAP dispose d'une unité d'enseignement spécialisé. En effet, l'Education Nationale met à disposition un enseignant spécialisé à temps plein qui a pour mission de prendre en charge 15 enfants. Cette unité d'enseignement a été créée par convention conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article D. 312-10-6, et qui est missionnée pour dispenser les apprentissages permettent la réalisation d'acquisitions dans le champ scolaire, le développement de la personnalité et la socialisation des enfants et adolescents accueillis.

L'établissement s'appuie également sur des partenaires extérieurs pour construire son action : le centre hospitalier régional, des professionnels libéraux (dentistes, kinésithérapeutes).

4. Son organisation

a. Ses réunions

Plusieurs réunions ont lieu au sein de l'établissement :

? la réunion de coordination se déroule tous les lundis matins, se nomme la réunion de coordination. Elle permet l'échange d'informations concernant le fonctionnement institutionnel hebdomadaire. Les participants sont : le chef de service, les responsables des équipes éducatives, et la secrétaire médicale. Cette dernière fait un compte-rendu de la réunion et le remet à l'ensemble des professionnels qui interviennent dans les services ;

? la réunion interdisciplinaire se déroule au moins quatre fois par an. Elle est l'instance où l'ensemble de l'équipe paramédicale, le médecin, le chef de service éducatif et les responsables des équipes éducatives traitent les différentes questions de fonctionnement quant à la coopération et la coordination entre les services éducatifs et paramédicaux ;

? la réunion de synthèse a lieu une fois par an pour chaque jeune. Elle regroupe les professionnels des équipes éducatives et les différents personnels paramédicaux concernés ainsi que le directeur, le chef de service, le médecin, l'assistante sociale et la psychologue. Ils se réunissent autour du bilan et du projet d'accompagnement dont la finalité est d'analyser l'évolution des jeunes quant à leurs besoins et leurs capacités, afin d'élaborer un nouveau projet d'accompagnement pour l'année suivante ;

? la réunion projet permet la rencontre entre les familles et l'institution. Celle-ci y est représentée par le directeur et/ou le chef de service éducatif, le responsable du groupe éducatif, le référent du projet ainsi que les professionnels paramédicaux concernés. L'objectif de cette réunion consiste à trouver un accord sur l'analyse des besoins des jeunes et la mise en place d'un partenariat autour du projet d'accompagnement individualisé. Elle se déroule au minimum une fois par an pour chaque jeune accueilli dans l'établissement ;

? la réunion institutionnelle se déroule une fois toutes les deux semaines et convie l'ensemble du personnel à y participer alternativement. Elle est assurée par le psychiatre et a comme objectif de permettre d'aborder les différentes problématiques professionnelles ;

? la réunion d'équipe éducative se déroule une fois par semaine et rassemble les membres du groupe éducatif avec son responsable autour des sujets qui concernent l'accompagnement des jeunes, autant dans l'organisation à mettre en place que dans les stratégies éducatives à adopter. Les différents projets de sortie sont également abordés lors de ces réunions ;

? la réunion paramédicale permet la discussion paramédicale et médicale autour des différentes problématiques du moment. Elle réunit l'équipe paramédicale et médicale et l'équipe éducative. L'équipe éducative partage ses observations et ses questionnements avec l'équipe médicale qui en retour donne des avis, des conseils et certaines informations médicales sur les jeunes ;

? la réunion d'équipe de suivi de scolarisation (ESS) réunie l'enseignante, l'évaluatrice du suivi de scolarisation, le cheffe de service, le responsable d'unité, les jeunes, les parents et la responsable de l'activité «éveil» dans le cadre de la circulaire 2006-126 du 17 août 2006 relative à la mise en oeuvre et au suivi du projet personnalisé de scolarisation.

Les jeunes peuvent participer à la réunion projet et d'ESS s'ils le désirent.

b. Ses modalités d'admission

L'admission se construit à partir d'une notification envoyée par la Commission Départementale pour l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH). Dans un premier temps, l'établissement accueille la famille seule afin de prendre le temps de présenter la structure. Dans un deuxième temps, si la famille est favorable à l'admission, l'EEAP organise une rencontre avec la famille, l'enfant et les professionnels. Le troisième temps de l'admission est celui de l'échange entre l'équipe d'accueil et la famille concernant les besoins, les intérêts et les capacités du jeune. Ensuite, s'en suit une période d'évaluation de trois semaines afin d'estimer si toutes les conditions sont réunies pour que l'institution puisse accueillir le jeune et pour qu'il puisse s'y épanouir. Un bilan effectué par le responsable socio-éducatif de l'unité du jeune est réalisé à l'issue de cette période. Si le bilan est favorable, un contrat de séjour est proposé. Un premier projet d'accompagnement individualisé est proposé trois mois après le bilan, réajusté six mois plus tard et enfin, réévalué tous les ans.

c. Sa structure

L'établissement dispose de 42 places en internat de semaine et de sept places en accueil de week-end. Ces places sont réparties dans six unités de vies mixtes, composées chacune de sept jeunes. Les enfants sont répartis en fonction de leur âge, afin de marquer les étapes de la vie par un rite de passage que constitue le changement d'unité. Les trois unités de vie du premier étage sont composées des enfants les plus jeunes (de 6 à 14 ans environ). Les trois unités de vie du deuxième étage accueillent les adolescents et les jeunes adultes. L'unité des jeunes les plus âgés est plus particulièrement destinée aux jeunes en attente d'une place dans un établissement pour adultes.

Les locaux sont répartis sur trois niveaux, avec à l'arrière un parc et une aire de jeux adaptée. Les bureaux des personnels administratifs et des responsables sont au rez-de-chaussée, de même que la salle de classe, la salle SNOEZELEN5(*), l'atelier cuisine, l'atelier d'éveil6(*), la balnéothérapie7(*) et la salle polyvalente. L'infirmerie et les salles pour les prises en charge paramédicales sont dans les étages. Concernant les unités de vie, tous les groupes disposent d'une salle commune considérée comme un lieu d'accueil, de rencontres et de partage où se tiennent les repas et les différentes activités éducatives. Chaque unité de vie dispose également d'une petite cuisine, d'une salle-de-bain et d'une salle-de-douche, d'un cabinet de toilette adapté et de quatre chambres.

d. L'organisation des journées

Concernant l'organisation de la journée, la matinée commence à 7h00. Le lever, le petit-déjeuner, les soins d'hygiène ainsi que la toilette se déroulent en fonction du rythme et du désir de chacun, ainsi qu'en fonction des prescriptions ou des nécessités de soins paramédicaux. Les infirmiers s'informent de l'état de santé de chacun et distribuent les médicaments en général pendant les repas. Le déjeuner est servi à 11h30. Il est suivi d'un moment de détente précédant les soins paramédicaux mis en place à 13h et par des activités de groupe à 14h. A 15h, tout le monde se retrouve dans la salle commune pour la préparation du goûter, mais aussi pour partager des moments tels que les jeux, les travaux manuels et la musique. Une intervention thérapeutique peut être nécessaire à tout moment de la journée, pour répondre à des besoins d'installation, de déglutition, d'autonomie. Le dîner est servi à 18h30 et suivi par les soins d'hygiène et le coucher. La journée se termine à 21h où l'équipe de nuit prend le relais.

II. Deux jeunes en recherche d'interactions sociales avec leur environnement

1. Angel

Angel est une jeune femme de 27 ans. Elle est arrivée à l'EEAP en 2003. Elle est la dernière d'une fratrie de cinq. Elle rentre chez elle le week-end ainsi qu'en période de fermeture de l'EEAP.

Angel a l'usage de ses membres supérieurs uniquement et se déplace donc en fauteuil. La jeune a besoin d'une tierce personne dans de nombreux actes de la vie quotidienne. Elle a une carrure assez imposante du fait de son poids et de ses jambes écartées, liées à des déformations orthopédiques. Angel est née prématurément à 35 semaines, ce qui a provoqué une détresse respiratoire et une infection à la naissance. Son diagnostic médical révèle une hémorragie cérébrale ancienne. Son état de santé natal et prénatal pourrait expliquer son polyhandicap. Angel doit prendre des médicaments liés à son syndrome de Lennox Gastaut, une forme d'épilepsie sévère, caractéristique du polyhandicap. La jeune femme a également des troubles digestifs, qui peuvent être sources de douleur. L'équipe se doit de rester vigilante malgré la difficulté d'Angel à s'exprimer sur sa douleur et sa localisation.

En 2006, la jeune femme a subi une intervention chirurgicale de diminution des hanches (ténotomie). En 2008, elle a bénéficié d'une arthrodèse pour redresser sa colonne vertébrale. «C'est (l'arthrodèse) un passage quasi obligé pour les enfants polyhandicapés car leurs troubles du tonus déforment peu à peu leur corps et notamment le tronc, et ce malgré tous les appareillages contraignants qu'on leur fait porter quotidiennement»8(*)

Angel est suivie par une kinésithérapeute, une fois par semaine, et ponctuellement par une ergothérapeute et ce, depuis son enfance. La jeune n'a pas de suivi quotidien par l'orthophoniste, cependant celle-ci effectue un bilan de communication à chaque synthèse.

Elle porte des lunettes pour corriger une myopie. Elle utilise tous ses sens, réagit à des stimulations tactiles variées, à différentes odeurs. Selon l'orthophoniste, elle présente une bonne compréhension des faits simples en relation avec sa vie quotidienne. En effet, elle comprend mes consignes.

Angel est une jeune femme qui utilise le langage verbal de façon adapté mais à minima. Le plus souvent, il est nécessaire que je la stimule par exemple pour qu'elle fasse le récit de son week-end. Lorsqu'elle ne sait pas répondre à une question, elle reste silencieuse. Je reformule mes phrases ou lui demande si elle ne sait pas. Elle est en recherche de contacts avec ceux dont les possibilités motrices et/ou verbales peuvent lui apporter du plaisir et un échange. Angel est très observatrice aux faits et gestes des personnes qui l'entourent. Elle n'hésite pas à interpeller les professionnels, quant à ce que peuvent faire ses camarades. Angel m'interpelle fréquemment en me demandant ce que je fais. Si je me trouve dans la cuisine, je l'invite à se rapprocher pour être en ma compagnie.

J'ai pu constater qu'il peut être intéressant d'encourager Angel à effectuer une activité malgré un refus initial. Notamment, lorsque je lui ai proposé de se rendre à l'activité ballon dans le couloir, cette dernière m'a fait part de ne pas vouloir y participer. Je n'ai pas insisté pour qu'elle s'y rende. Cependant, ma collègue a insisté, au final Angel a semblé apprécier l'activité. En effet, j'ai constaté que celle-ci préfère rester avec des personnes qu'elle connaît bien en revanche une fois présente lors d'activités proposées, elle s'y complaît. Elle constate qu'elle y rencontre des personnes qu'elle connaît. Ainsi, lorsqu'une activité est proposée, je l'encourage à me suivre et à y participer avec moi.

D'autre part, j'ai constaté qu'Angel a besoin de temps pour se mettre à la tâche, cependant, elle est fière de me montrer ce dont elle est capable. Ainsi, il m'arrive de stimuler et encourager Angel a réaliser une tâche (se déplacer, fermer les bouchons des feutres, etc.). Pour ce faire, j'utilise de manière régulière l'humour. A titre d'exemple, si elle doit se déplacer jusqu'aux toilettes, j'ai pour habitude de faire une course avec elle en la défiant de me dépasser.

Angel est inscrite à l'atelier «groupe communication,» dans lequel sont abordés divers sujets d'actualité, la réalisation d'une gazette avec le bilan des activités et sorties réalisées au sein de l'EEAP. Elle y participe avec enthousiasme. De temps à autre, elle prend part à l'activité «tous en forme» (sport adapté) animée par des encadrants de l'institution.

Il m'arrive de défier Angel au bras de fer. Angel a beaucoup de force et je la complimente lorsqu'elle gagne dans le but de forger son estime d'elle-même. Sur l'espace de vie, je propose de temps à autre à Angel des ateliers tels que la manucure. Je lui fais choisir la couleur et un motif pour ongles. Je pense qu'il est important de saisir toute les occasions de participation. L'atelier manucure est particulièrement intéressant puisque Angel choisit son look. Cette activité donne l'opportunité de la valoriser dans son statut de jeune femme. Enfin, Angel feuillette quasi quotidiennement son cahier de communication, illustré par des photos de sa famille. Elle apprécie beaucoup de me parler de cette dernière. Je pense que la famille est une partie importante de notre identité, et qu'il est donc d'un grand intérêt de reconnaître la jeune dans son statut de soeur, de fille ou de nièce.

2. Zadkiel

Zadkiel est un jeune homme, âgé de 21 ans. Il est arrivé à l'EEAP en 2008. Il est l'aîné d'une fratrie de deux enfants. Il rentre le week-end chez ses parents mais il lui arrive quelque fois dans l'année de rester à l'EEAP, le week-end. Il rentre chez lui lors de périodes de fermeture de l'EEAP.

Le jeune est installé en fauteuil dans un siège moulé. Ce dernier ne peut se déplacer seul en raison d'un handicap moteur global. Cependant, il est capable de pointer du doigt. C'est un jeune qui est né prématurément à 38 semaines, présentant une microcéphalie avec cerveau lisse, maladie qui désigne un aspect inhabituel du cortex cérébral. Ce diagnostic médical me fait comprendre d'où provient son handicap et notamment son niveau mental et ce qui fait qu'il ne peut pas avoir accès au langage. Ceci me fait écho au passage de Saulus, cité dans un livre: "Le polyhandicap n'est pas un accident qui affecte un individu par ailleurs indemne. Par la précocité et la massivité des liaisons responsables, des déficiences et des incapacités directement induites, le polyhandicap engendre véritablement une manière d'être au monde, une et originale. L'être humain polyhandicapé est, pourrait-on dire, tout entier handicapé ; non pas pour insister de manière péjorative sur la gravité de son état, mais pour nous engager résolument sur la voie de la reconnaissance de son droit à une existence originale.»9(*) Je pense qu'au long des accompagnements avec des personnes polyhandicapées, il est important de se souvenir du diagnostic médical afin de rester réaliste et ainsi être le plus proche possible de la réalité de la personne. De plus, par sa condition hors norme, il n'est pas exclu d'envisager un accompagnement qui soit pareillement hors norme.

Zadkiel est épileptique et doit prendre des médicaments. Le jeune a également des troubles digestifs, qui peuvent générer des douleurs. L'équipe doit rester attentive à tout changement de comportement, qui pourrait révéler une douleur ou un problème de santé. Enfin, son audition et sa vue sont normales.

Zadkiel a subi de nombreuses opérations chirurgicales pour des raisons orthopédiques au niveau des hanches, des pieds et du dos (2003 à 2014) Nous sommes particulièrement interpellés par l'équipe médicale pour être très vigilants lors des transferts avec le lève-personne.

Zadkiel est suivi deux fois par semaine par une ergothérapeute et une kinésithérapeute. Le jeune participe à deux séances d'orthophonie hebdomadaire, pour des séances de commande oculaire. Il s'agit d'une technologie permettant de capter le regard dont le but est d'effectuer des exercices sous forme de jeux afin d'entraîner le jeune au suivi du regard, au comptage ainsi qu'à la relation de cause à effet.

Zadkiel présente une compréhension simple des situations et actes de la vie quotidienne. Il est très sensible aux intonations du message verbal. C'est pourquoi, j'accentue l'intonation de ma voix lorsque je lui adresse la parole. Ceci permet de l'aider à la compréhension du message, ce qui le fait beaucoup rire.

Le jeune utilise une communication non verbale, il apprécie et recherche l'interaction avec l'adulte, il aime plaisanter et se moquer. Il est très observateur et curieux de tout ce qui l'entoure. Zadkiel exprime son ressenti par des regards, qui sont très expressifs, des mouvements de bras ainsi que par des vocalises. Ainsi, il m'interpelle fréquemment de cette manière, lorsqu'il ressent le besoin d'interagir avec moi. Zadkiel étant en capacité de pointer du doigt, il semble éprouver beaucoup de plaisir à étendre son bras pour toucher un objet. En effet, il s'agit de son principal moyen d'action sur son environnement. Ainsi, je n'hésite pas à lui faire toucher des matières, par exemple, des plantes lorsque nous sommes sur le balcon de l'unité ou à l'extérieur.

Zadkiel est en capacité d'utiliser des pictogrammes,10(*) que nous utilisons pour l'aider à choisir ou pour renforcer la compréhension du message verbal lui permettant d'anticiper une prise en charge ou un atelier. Il n'est parfois pas aisé de comprendre ce dont il souhaite parler car le oui/non n'est pas toujours fiable, les réponses diffèrent en fonction de son interlocuteur. C'est pourquoi, je me focalise sur l'expression de son visage pour connaître son avis sur quelque chose. De plus, il peut refuser catégoriquement d'utiliser les pictogrammes en fonction de l'interlocuteur,et cela semble l'amuser. Il m'arrive alors de devoir choisir à sa place lorsqu'il refuse de me donner une réponse. Je l'informe par conséquent que je choisis pour lui. Je lui explique alors que l'absence de réponse entraîne en conséquence la décision d'une tierce personne.

Zadkiel est toujours très enjoué de se rendre aux divers ateliers proposés par l'EEAP tels que l'atelier peinture et les sorties en extérieur. Le jeune participe au «groupe communication» avec Angel tous les mardis. Enfin, Zadkiel se rend deux fois par semaine en classe adaptée, il travaille entre autre le repérage dans le temps, la date, la météo et est amené à réaliser des travaux manuels (collages, découpages etc.). Ce dernier apprécie se rendre en classe et notamment retrouver sa camarade de classe. Pour soutenir ses liens d'amitié, l'enseignante et moi rapprochons les sièges, les deux jeunes peuvent alors se toucher les mains.

III. Les besoins spécifiques d'Angel et de Zadkiel

1. Questionnements initiaux

Au cours de mes accompagnements avec les jeunes, j'ai pu repérer leurs recherches constantes d'interactions et de stimulations Ainsi, dans la partie qui suit, j'expliciterai mes questionnements concernant les différents besoins en termes d'interactions et de stimulations de ces deux résidents : De quelle manière les deux jeunes manifestent ces besoins ? Est-ce que l'équipe et moi y répondons déjà au quotidien ? Mais avant tout, quels sont les besoins des personnes polyhandicapées ? Enfin, comment vais-je intervenir dans ce cadre et m'inscrire dans une démarche éducative avec ces deux résidents tout en veillant à répondre à leurs besoins respectifs dans le respect de chacun ?

2. Toutes les occasions sont bonnes pour entrer en relation

J'ai pu constater qu'Angel recherche constamment l'interaction avec l'adulte. En outre, elle aime être en relation avec différents interlocuteurs, et apprécie écouter les conversations autour d'elle et être informée des activités de chacun. Je me demande si Angel réclame fréquemment aux professionnels des services dans le but de provoquer un échange. En effet, la jeune peut me demander quelque chose si notre conversation se termine. Ou bien, Angel peut me demander un verre d'eau, peu de temps après avoir pris son petit déjeuner. J'ai entendu à plusieurs reprises les professionnels lui demander si elle avait réellement soif. Cependant, les professionnels ne peuvent pas lui répondre de manière systématique. A titre d'exemple, il est arrivé qu'Angel se vexe et sorte de la salle de vie de l'unité lorsqu'une de mes collègues argumentait sur le fait que je n'étais pas disponible pour communiquer avec elle C'est pourquoi, je pense qu'il est important pour Angel d'avoir des relations harmonieuses et d'avoir de nombreux temps d'échanges avec les professionnels. Si j'explique à Angel que je suis occupée ou que je lui fais part de mes difficultés, la jeune femme est en capacité de patienter. Ainsi, une forme de connivence s'opère entre la jeune et moi. Cependant, je dois prendre le temps de lui expliquer.

Zadkiel quant à lui, émet fréquemment des vocalises pour nous interpeller et plaisanter avec nous et lorsque que je le remarque, il se met à rire. Zadkiel réagit beaucoup lorsque je prononce des mots farfelus, lorsque je reproduis un son entendu à la télévision, lorsque moi-même ou l'équipe sifflons ou bien lorsque j'exagère mon étonnement. Par exemple, j'ai pour habitude de chanter «allo, allo, allo, allo» lorsque je vois Zadkiel, puisqu'il s'agit d'une mélodie qu'il connaît et qu'il l'amuse. En effet, si je le prononce doucement sans forcément lui adresser la parole, il réagit vivement au son.

En conséquence, je pense qu'Angel et Zadkiel ont un grand besoin d'interactions, d'être en relation avec l'équipe. En effet, du fait de leurs conditions, ils ne peuvent pas se rendre eux-mêmes vers l'objet ou débuter une conversation dans le cas de Zadkiel. Ils sont alors dans une attente passive que l'objet vienne à eux. «Par ses mouvements expressifs et différenciés, l'enfant initie et dirige les premières interactions auxquelles les parents réagissent et répondent. Ici encore l'enfant au corps malhabile ou passif n'arrive pas à provoquer ces interrelations de manière satisfaisante : ses mouvements mal coordonnés et son inertie alertent, angoissent et, isolent. Corps douloureux ou transformé en objet, fréquentes séparations affectives expliquent en partie la passivité, l'apathie, le manque d'intérêt à de nouveaux objets ou à des offres de stimulations.»11(*) Effectivement, il existe une certaine inertie chez Angel, lorsque celle-ci refuse par exemple de se rendre dans le couloir avec les autres jeunes pour jouer au ballon, mais qui, après de nombreuses sollicitations, le fait et y prend plaisir. De même, pour les tâches du quotidien, traverser le couloir pour se rendre aux toilettes lui requiert beaucoup d'efforts et de motivation. D'ailleurs, lors des repas d'Angel, celle-ci semble dans l'attente et nous devons la stimuler pour que la jeune finisse son repas. Quant à Zadkiel, son manque de coopération lors des moments de soin est peut-être dû à une fatigabilité, une tension des muscles difficilement contrôlable, du fait de sa pathologie (hypertonie).

3. A la recherche d'objets de stimulations et de dynamisme

En revanche, malgré l'inertie qui peut apparaître, je pense que, par ces demandes d'interactions, les deux jeunes sont, malgré tout, à la recherche d'objets de stimulations Par ces objets de stimulations, j'entends notamment tout ce qui est de l'ordre du nouveau, les événements, les mouvements en somme... Les jeunes souhaitent capter ces mouvements, symboles de vie. «La vie est mouvement : la marche mais aussi la respiration, la circulation des fluides corporels, le mouvement des yeux, des mains. Ces mouvements, petits ou grands, nous donnent des informations sur notre corps et sur le monde qui nous entoure [...] Nous savons tous que le développement des enfants, cognitif et émotionnel, est fondé sur les échanges avec l'environnement par le mouvement et les sens. Ce mode de connaissance propre aux jeunes enfants reste d'ailleurs prépondérant chez la personne polyhandicapée, tout au long de sa vie. La diminution ou l'absence de mouvements, absence de leur perception sont sources de monotonie et d'isolement, peut même conduire à la folie. [...] Les troubles moteurs limitent considérablement les mouvements spontanés de l'enfant polyhandicapé et donc la possibilité d'explorer son corps et de l'utiliser comme un moyen de relation avec le monde qui l'entoure.»12(*) Il est vrai que les deux jeunes réagissent fréquemment avec beaucoup d'enthousiasme, lorsqu'un professionnel les emmène vers un lieu différent dans le but de participer à une activité ou un soin. D'ailleurs, dès lors qu'un professionnel se met à danser, ne serait-ce que brièvement, cela ne passe jamais inaperçu, les jeunes répondent et réagissent vigoureusement.

En outre, l'équipe et moi donnons de l'importance à entrer quotidiennement en relation avec les jeunes et, à créer un environnement dynamique. Il nous arrive fréquemment de mettre de la musique au sein de l'unité, de danser avec les jeunes. Les moments de soin sont également des moments où nous pouvons créer une relation puisqu'il s'agit d'un moment privilégié, durant lesquels nous sommes seuls avec le jeune. Il est important de créer une ambiance joyeuse et propice lors de ces moments, afin que celui-ci soit d'une manière ou d'une autre, encouragé, porté à participer ou à coopérer avec le professionnel. Il me semble donc que ce besoin de dynamisme est déjà investi par les professionnels.

4. Le besoin de stimulations sensorielles, s'ajoutant aux cinq besoins de base

Lors de mon stage j'ai pu discuter avec les professionnels de l'institution sur leur métier auprès des jeunes polyhandicapés. Je me suis entretenue notamment avec la psychologue au sujet des besoins des jeunes polyhandicapés. Je lui ai fait part de mon questionnement sur la place du domaine éducatif dans le quotidien des jeunes accueillis. En effet, notre travail a tendance à être centré sur les moments de soins, de repas, de changes. Néanmoins, d'après Abraham MASLOW, psychologue, cinq types de besoins sont hiérarchisés, les besoins : physiologique, de sécurité, d'appartenance, d'estime et d'accomplissement. Bien que l'accompagnement quotidien tourne essentiellement autour du besoin physiologique, il ne faut pas oublier que les personnes polyhandicapées ont les mêmes besoins que toute autre personne. Je pense qu'il faut toujours se souvenir de cette pyramide de hiérarchisation des besoins, peu importe le public abordé. La psychologue a pu me préciser que le besoin d'estime trouve sa place dans la valorisation par eux-mêmes, à titre d'exemple « tu te trouves beau ? » ; cette formulation sollicitera alors le jeune à envisager sa propre valorisation pour ensuite l'intérioriser. Par ailleurs, le besoin d'estime de soi peut être reconnu simplement par des félicitations ou des valorisations telles que «tu as fait un dessin, c'est génial». Lors de cet entretien, j'ai pu apprendre que les personnes porteuses de polyhandicap ont un besoin de stimulations sensorielles car ces dernières vivent à travers leur sensorialité. N'ayant pas la représentation mentale de ce qui se passe dans leur environnement, elles ont recours au sens pour l'appréhender et le comprendre. Pour nous représenter le monde, notre vue nous donne des informations sur l'espace, notre ouïe nous aide à être averti d'une agitation dans notre espace etc. Les personnes polyhandicapées ont besoin d'un environnement stimulant. Ainsi, à leur contact, il ne faut pas faire l'économie de mots. Celles-ci ont besoin de baigner dans un monde de langage et de sensations afin d'être en immersion dans un monde vivant. Ce besoin de stimulations sensorielles est dû au fait que, par leur handicap, les personnes atteintes de polyhandicap n'ont que peu de moyen d'explorer leur environnement. «Cela (les troubles moteurs) limite également les expériences sensorielles avec comme résultat le ralentissement du développement cognitif de la personne, privée des apprentissages nécessaires. Chaque enfant, quand il apprend à se déplacer (ramper, marcher) s'individualise, devient autonome par rapport à sa mère, il explore son environnement. Il expérimente son corps, agit sur son environnement et développe ainsi de nouvelles conduites, mais aussi des schèmes cognitifs.»13(*)Ainsi, mon interrogation est la suivante : Puis-je aider la personne à explorer son environnement dans le but de lui permettre de répondre à ses besoins de stimulations sensorielles ?

5. Le besoin de participation, soit le besoin d'humanité

Tout d'abord, concernant les initiatives des jeunes à entrer en relation, Danièle WOLF explique : «En outre combien de fois par jour lorsque c'est la personne polyhandicapée, qui prend à sa manière des initiatives, que ce soit pour agir ou pour entrer en relation, ne s'entend-t-elle priée...d'attendre ? Or, il y a déjà longtemps que les béhavioristes ont démontré que l'absence de renforcement du comportement est la meilleure manière de l'éliminer. Aussi, à force de tomber dans le vide, la personne polyhandicapée risque-t-elle, au fil du temps, de renoncer» ? 14(*) Effectivement, il est très important de prendre en compte ses initiatives afin de les valoriser. Cependant, il ne faut pas oublier les contraintes du quotidien, il arrivera un jour où le professionnel ne pourra prendre le temps d'engager une conversation avec le jeune ; en revanche il est crucial de le lui expliquer et de lui réserver un moment ultérieur. Une réponse négative est toujours une réponse. Le besoin ici, certes évident mais inéluctable, est le besoin de l'autre, du regard de l'autre, de l'attention de l'autre, de l'écoute de l'autre, c'est le besoin d'humanité. Selon moi, auprès d'un public de personnes polyhandicapées, il s'agit de maintenir et surtout de garantir leur place de sujet, c'est-à-dire d'être humain pensant et désirant. D'autant plus, que les personnes présentant ce type de handicap vivent à travers l'autre, en d'autres termes l'autre est le moteur de la journée, celui-lui qui guide. En effet, malgré la bonne volonté des professionnels quant aux choix du jeune au quotidien (concernant ses habits, son dessert etc.), la réalité institutionnelle et le manque de temps résultent que très fréquemment, c'est le professionnel qui décide ; par exemple, quant à l'heure de la douche, de boire ou d'aller en activité. De même, leur corps n'est pour la majorité du temps que source de souffrances, et manipulé du lever jusqu'au coucher. Ils n'ont pas pu développer ce sentiment de sujet séparé et acteur. En effet, en reprenant les mots de Philip VANMAEKELBERGH : «le nourrisson atteint de polyhandicap arrive bien souvent avec un déficit d'expériences de bases fondamentales durant la vie intra-utérine. Or, rappelons-le, les expériences sensorielles dans l'utérus durant la grossesse apportent déjà à l'ensemble des informations fondamentales sur lui-même. De telles informations somatiques (le toucher), vestibulaire (sensation de mouvement) et vibratoire (sensation qui passe par les os), concernant tout le corps, représentent pour l'enfant le point de départ pour son propre moi-même en délimitation du monde extérieur.» 15(*) Il est donc important de valoriser les moments d'échanges et de participation.

6. Pistes de réponses

Pour répondre à mes premiers questionnements, cités plus haut, j'ai pu repérer plusieurs besoins. Tout d'abord, nous avons vu que les besoins des personnes polyhandicapées coïncident avec les besoins découverts par MASLOW. Ces besoins sont satisfaits par l'équipe dans la mesure du possible. Les besoins physiologiques sont pris en compte par l'équipe avec les changes, les soins quotidiens etc. Ensuite, le besoin d'appartenance est pris en compte puisque l'unité est décorée de manière à mettre en avant les jeunes qui y vivent, par exemple à l'aide de photos disposées sur les murs au sein des unités ou bien, lors des fêtes de l'établissement, les professionnels proposent des jeux compétitifs, les unités constituent des équipes et créent un hymne d'équipe. Puis, le besoin d'estime s'opère par les compliments des professionnels envers les jeunes. Enfin, le besoin de s'accomplir peut être pris en compte lors des réalisations artistiques ou scolaires.

Au cours de mon analyse, j'ai dégagé le besoin de dynamisme qui est mis en pratique lors des douches. Cependant, j'ajouterais qu'il est peu investi tout au long de la journée, notamment en milieu de matinée et en milieu d'après-midi. Il s'agit de temps dédiés aux séances paramédicales ou aux ateliers. Ensuite, nous avons vu que le consentement de la personne et les choix sont favorisés autant que possible au quotidien, correspondant au besoin de participation. Les activités permettent également de considérer l'importance de la participation, à titre d'exemple, si le jeune n'a pas usage de ses mains, le professionnel invite le jeune à rouler avec son fauteuil sur le papier pour créer des lignes, qui apparaîtront par la suite sur la feuille. Ainsi, chaque contribution est envisagée pour participer à un projet. Ce besoin de participation est corrélé au besoin d'humanité ou besoin d'attention et le besoin d'échanges. Ceux-ci ne sont pas toujours satisfaits, faute de temps. Par ailleurs, les jeunes envisagent leur environnement par les sens et comprennent les mots quand ceux-ci sont inclus dans un contexte. J'en conclus que pour faciliter l'interaction, il est nécessaire de passer par les sens. Ainsi, j'ai repéré le besoin de stimulations sensorielles. Mis à part en sortie en extérieur, le besoin de toucher, de sentir les matières... est rarement pris en charge au quotidien. En effet, je ne pense pas que l'équipe soit au fait de ce besoin particulier, par faute de temps l'équipe se concentre sur les besoins primaires, qui demeurent chronophages. En outre, lorsque les besoins primaires sont satisfaits, l'équipe a davantage l'opportunité de proposer des sensations aux jeunes, notamment à l'aide d'objets tels que des appareils de massage ou des éléments de la nature.

IV. Les contes sensoriels

1. Naissance du projet, pour qui et...

Après avoir échangé avec l'équipe sur les besoins de stimulations sensorielles, ma référente et un accompagnant éducatif et social m'ont fait part de leur formation sur le thème des contes sensoriels. Ces derniers ont effectués la formation à l'extérieur et, avait été proposée par l'établissement. Un conte sensoriel est un conte simplifié dans lequel des éléments de l'histoire sont amenés de manière sensorielle aux spectateurs qui deviennent ainsi, acteurs de l'histoire. Ces derniers le deviennent par ce qu'ils expérimentent grâce aux informations sensorielles et, par des actions induites par les personnages de l'histoire.

J'ai alors envisagé de proposer à Angel et Zadkiel une activité «contes sensoriels» En effet, après avoir réalisé un réel travail d'observation de ces deux résidents, j'ai longuement mûri ma réflexion sur la mise en oeuvre de cette activité. Cette hypothèse s'inscrit dans un cheminement dans lequel j'ai pu apprendre à connaître Angel, avec qui j'ai construit des liens étroits, et ce notamment lors d'activités que je lui ai proposé durant l'activité en espace de vie (manucure, jeux de société etc.). En ce qui concerne Zadkiel, grâce à ses recherches constantes d'interactions, je l'amène à saisir différentes stimulations sensorielles qui l'amusent beaucoup. Ainsi, la relation que j'ai tissé avec ces deux jeunes et ma présence au sein de leur unité m'a conduite à proposer une activité qui puisse susciter leur intérêt et répondre aux besoins de stimulations sensorielles, d'interactions sociales et de participation.

D'autant que ces derniers présentent plusieurs traits communs. J'ai pu ainsi observer qu'ils sont en recherche d'interactions avec les personnes de leur environnement, et demandeurs d'activités, ils sont aussi très observateurs. A l'affût, ils réagissent avec beaucoup d'enthousiasme au moindre événement nouveau s'inscrivant dans leur quotidien. Chaque nouvelle activité ou déplacement semble être vécu de manière festive. Aussi, ils sont tous deux blagueurs et taquins, ayant besoin d'être constamment en relation avec un professionnel. J'ai pu également noter que leur niveau de compréhension, d'acuité visuelle et auditive étaient correctes et plutôt similaires. Sachant d'une part, qu'ils sont tous deux dépendants pour tous les actes de la vie quotidienne, et que leur besoin de découverte de leur environnement se fait grâce à un tiers et qu'ils appartiennent à la même unité, ainsi que le même «groupe communication »et que d'autre part, ils se connaissent, j'ai pensé que mon projet leur permettrait de renforcer leurs liens et leur permettre de faire partie d'un nouveau groupe. Je suis persuadée qu'il est important de proposer des activités encourageant l'interaction avec d'autres jeunes. Comme le soulignent Cécile VISSCHER et Pere TORAS, «l'objectif principal est d'offrir à l'enfant un espace ludique lui permettant de découvrir son corps comme objet de relation à l'autre, comme média pour explorer avec plaisir, toujours en relation avec d'autres enfants et éducateurs.»16(*) D'autre part, l'équipe et moi pensons que les jeunes ont peu d'expériences du monde extérieur. Au vu du cahier de liaison entre l'établissement et la famille dans lequel sont inscrits les récits des week-ends et du cahier de communication comportant des photos, il semblerait que peu d'activités leur soient proposées à l'extérieur. Puis, comme nous l'avons vu plus haut, les deux jeunes ont des besoins similaires. Enfin, ils sont en attente d'admission pour un établissement adulte l'un comme l'autre et se retrouvent donc en position d'attente. Au vu de ces facteurs, je pense que la participation aux «contes sensoriels» pourrait leur être bénéfique.

2. ...Pourquoi ?

Premièrement, tels que vu plus haut, et selon Cécile VISSCHER et Père TORAS, la personne atteinte de polyhandicap arrive au monde avec un manque d'expériences sensorielles durant la vie-utérine ce qui a provoqué une difficulté à développer une idée du corps propre, la peau étant l'organe de contact et de délimitation. Ainsi, d'après ces auteurs, l'enfant a tendance à renoncer à «utiliser son corps comme moyen d'exploration, de recherche et de satisfaction de sa curiosité, mais aussi comme moyen d'approche et de communication.»17(*) J'en déduis qu'il est nécessaire d'apporter ces objets de stimulations à la personne porteuse de polyhandicap afin de l'aider à explorer avec son corps, lui permettant d'entrer en relation avec l'objet ou l'environnement. Ainsi, les éléments sensoriels de l'histoire pourraient créer l'opportunité de découverte et d'ouverture vers l'environnement extérieur.

Par ailleurs, comme le soulignent Messieurs Dalla Piazza et GODFROID «pour une personne polyhandicapée, les moyens de communication concernent surtout la modification des rythmes de la vie quotidienne, l'amplitude respiratoire, des émissions vocales diverses, des mouvements, le toucher. Nous sommes au niveau de l'émission de comportements de base issus des premières étapes du développement. Le premier outil pour communiquer, pour créer une relation est le corps.»18(*) Or, nous utilisons principalement une communication verbale. De même, pour beaucoup les mots simples sont très complexes à aborder et à comprendre. Il faut alors les aider à appréhender les mots en passant par l'éveil des sens, c'est-à-dire en adaptant le ton au contexte, en utilisant des mots qu'ils connaissent et qui leur font écho. En suivant cette logique, il est alors question de leur faire vivre les phrases dans leur corps lorsqu'elles sont prononcées. Il s'agit de traduire les mots afin qu'ils deviennent plus accessibles. Il se peut que certains mots ne fassent pas sens pour certains jeunes. Ainsi, théâtraliser est important lorsque l'on souhaite raconter une histoire ou faire passer un message. C'est pourquoi, je pense qu'il est nécessaire de jouer les phrases, au contact des personnes porteuses de polyhandicap qui appréhendent leur environnement à travers leurs sens. Pour ce faire, l'histoire choisie devra être jouée, voire de manière exagérée, théâtralisée et amenée de façon à permettre un vécu par le jeune.

Je peux porter mon attention sur le verbe interagir c'est à dire «agir, jouer un rôle dans quelque chose»19(*) ainsi, je comprends que l'interaction va de pair avec la participation puisque participer c'est «prendre part à une action, à un sentiment, etc.»20(*) Et que prendre part correspond au «fait d'intervenir ou de participer à quelque chose qui est en train de se passer.»21(*) Interagir c'est participer. A ce propos, FELCE et MANSELL ont développé une approche : l'Active Support. Cette approche encourage la participation de la personne par des offres de soutien appropriées dans l'intention de garantir l'accomplissement de la tâche. «Mieux vaut un engagement, même partiel ou de courte durée, [...], qu'une participation plus longue et moins étayée mais susceptible de s'achever sur un échec ou un abandon».22(*) Cette méthode met en avant l'importance des participations au quotidien, même si elles sont de courtes durées ou nécessitant une guidance. Par ses participations, le jeune va pouvoir «expérimenter son emprise sur l'environnement.»23(*). Puis, selon Félicie AFFOLTER, psychologue, l'enfant se construit avec le toucher et le mouvement ; ce que la personne polyhandicapée dans son enfance, n'a pas pu expérimenter. C'est pourquoi, «solliciter le toucher et l'accompagner dans ses mouvements servent à enrichir ses expériences sensorielles et lui permettent d'agir sur son environnement.»24(*) Il faut donc apporter un aspect participatif et tactile afin que le jeune prenne part aux stimulations de l'activité proposée.

L'humain est un être social et «les fortes limitations de relation et de communication entre la personne et son entourage [...] freinent son développement personnel et les apprentissages, limitent considérablement toute action possible de la personne sur son environnement, compromettant ainsi son épanouissement personnel et sa place de sujet.»25(*)

Ainsi, limité dans sa communication, il va s'adapter et compenser sa condition d'une manière ou d'une autre. En outre, les personnes en situation de polyhandicap communiquent sans cesse, avec leur propre mode de communication. En effet, les personnes en situation de polyhandicap «expriment surtout leurs désirs et leurs ressentis dans le cadre d'une communication pré ou proto symbolique, comme les expressions faciales, les mouvements, les bruits, la posture, la tension musculaire.»26(*) Alors, malgré de grandes difficultés pour la personne polyhandicapée à se faire comprendre, le professionnel peut intercepter les tentatives de la personne, soit devenir facilitateur de la parole de l'autre, en veillant «à ne pas appliquer ses propres schémas de pensée mais de trouver le bon rythme, être attentif à tous les modes de communication - regard, langage, toucher, odorat, mouvements, mimiques, silence, attitudes, rythmes.»27(*) Il est donc nécessaire de connaître les modes de communication et les habitudes réactionnelles de la personne pour pouvoir comprendre et intercepter les signaux, ce qui permettra à la personne d'être encouragée à entrer en communication et, d'être reconnue comme une personne qui agit sur son environnement. Je repère donc l'importance de connaître les modes de communication des personnes qui participent à la séance. C'est pourquoi, les personnes qui collaboreront avec moi lors des séances devront connaître suffisamment les jeunes, afin d'être attentifs à leurs réactions durant la séance. Cette attention portée aux réactions des jeunes permettra d'une part, l'évaluation de l'activité, mais également d'échanger avec les jeunes. De plus, mentionner auprès des jeunes leurs réactions, à l'issue de la séance leur permettra de donner corps à cet événement vécu comme particulier.

3. Annonce du projet à l'équipe

L'annonce du projet à l'équipe a constitué la première étape du projet, et a pu être abordée lors d'un temps de pause. Mes collègues me faire des suggestions sur le déroulement de l'activité. Ma référente m'a proposé de soumettre un projet à la cheffe de service, précisant le montant des frais financiers à engager, les moyens matériels et humains ainsi que le cadre temporel à envisager. Par la suite, j'ai proposé à l'équipe une lecture fine de mon projet qui a demandé des lectures successives. Mes collègues m'ont indiqué des éléments à ajouter afin de le rendre précis et fluide. D'autre part, ma référente et moi avons pris rendez-vous avec la cheffe de service afin de lui présenter. Lors de cet échange, mon projet a fait l'objet d'une validation de ma cheffe de service qui a proposé que ma référente puisse se joindre à moi lors du déroulement des séances. Après concertation auprès de ma référente, nous avons décidé qu'elle réaliserait la lecture et que mes missions consisteraient à choisir les contes, jouer l'histoire et utiliser les éléments sensoriels afin de permettre aux jeunes de les toucher, les sentir, les voir de plus près (parfums, tissus, matières diverses....). Dans le cas où ma référente ne soit pas présente, nous avons convenu que je demanderai à un autre professionnel de la remplacer pour l'atelier.

4. Objectifs visés

Les objectifs de l'activité «contes sensoriels» visés sont les suivants :

? permettre aux jeunes l'accès aux histoires

J'espère faciliter l'accès des histoires aux jeunes grâce aux stimulations sensorielles favorisant la réception des informations ;

? apporter un moment d'interaction

L'activité est destinée aux jeunes, nous nous adressons à eux. Une interaction s'opère à deux. Ainsi, pour aider à la participation des jeunes, je les inclus dans l'histoire. Je les invite à effectuer des actions de l'histoire. Je prononce leurs prénoms. Les personnages de l'histoire font appel aux jeunes afin de favoriser l'implication de chacun ;

? vivre et découvrir le nom des émotions, des sensations, des sentiments et idées...

Après chaque séance, nous discutons sur les émotions que chaque jeune a pu ressentir. Nous évoquons également certains éléments de l'histoire pour les aider à la contempler, la comprendre et à l'appréhender ;

? s'habituer au contact corporel et entrer en relation avec l'autre

Les jeunes sont amenés à entrer en relation avec les personnages qui s'adressent directement à eux et leur apportent le matériel de l'histoire qu'ils expérimentent à travers leurs capteurs réceptifs ;

? utiliser son corps comme moyen d'exploration grâce aux stimulations sensorielles

J'aspire à ce que les jeunes répondent aux stimulations sensorielles, en d'autres termes, qu'ils acceptent les sollicitations conduites par l'équipement représentant l'histoire afin de leur donner l'opportunité d'utiliser leurs corps comme moyen d'exploration ;

? percevoir et découvrir son propre corps et son environnement, ainsi que ses possibilités de participation

Par les stimulations sensorielles, j'espère que les jeunes découvrent une expérience nouvelle de leur corps et de leur environnement. En outre, ceci permettra d'éveiller leur curiosité et donc leur intérêt, encourageant ainsi les jeunes à interagir avec les personnages ;

? éveiller la curiosité

Mon souhait est de faire découvrir aux jeunes de nouvelles sensations et/ou éveiller leurs capteurs sensoriels. Ainsi, une façon d'évaluer l'impact de leur découverte consiste en l'observation de leur curiosité en éveil. Il est à souligner que, la curiosité est également un élément qui détermine l'intérêt de la personne pour l'activité. Par ailleurs, je pense que pour soutenir l'attention des jeunes il est nécessaire de varier ce que l'on propose en termes d'activité. En effet, la nouveauté rend curieux. Cela permet également à l'intervenant d'observer les jeunes dans un autre cadre,et donc de conserver sa capacité d'observation et de réajustement En effet, tels que l'affirment Philippe CAMBERLEIN et Gérard PONSOT «la routine, sécurisante dans une certaine mesure, [...] peut enfermer dans des pratiques [...] L'évolution même de la personne polyhandicapée que les intervenants ont connue enfant peut échapper à leur observation.»28(*);

? prendre du plaisir

La notion de plaisir est importante dans le secteur du polyhandicap. En effet, l'évolution des capacités d'autonomie de la personne est stimulée par les professionnels lorsque cela est possible mais reste néanmoins restreinte ; la question du corps et du plaisir est alors centrale. De plus, observer le goût du plaisir ou m'assurer que la personne en éprouve me permet d'évaluer son consentement quant au déroulement de l'activité. Ce consentement m'indique la direction à suivre. Par exemple, si le jeune refuse de se rendre à l'activité, ou bien, lorsque nous évoquons cette dernière, le jeune n'est pas intéressé ou fuit du regard, j'en conclus qu'il est nécessaire de proposer une activité différente ou de l'améliorer.

5. Cadre de l'activité

a. Nombre de participants

Pour des raisons techniques et de concentration, j'ai évalué que deux participants aux «contes sensoriels» était le nombre idéal. En effet, le temps consacré à l'acte d'amener les éléments sensoriels à la portée des jeunes est très long, le risque étant que ceux-ci perdent le fil de l'histoire. De plus, être deux permet l'individuation puisque pour s'individuer, il faut se différencier. En soi, le groupe apporte une opportunité de découvrir ses possibilités comme objet de relation à l'autre. En effet, «dans la prise en charge des enfants polyhandicapés, et vu la multiplicité de ses troubles, on donne souvent priorité à la prise en charge individuelle, tout en oubliant l'importance des activités favorisant les interactions avec d'autres enfants.»29(*)

b. Moyens matériels

L'activité a lieu dans la salle «audio». Cette salle est consacrée à l'activité, c'est une salle peu investie par l'établissement ; «l'extraction du milieu de vie habituelle apporte le calme nécessaire pour favoriser l'attention»30(*) et permet aux jeunes de se repérer dans l'espace-temps. J'ai estimé que 25 minutes est la durée maximum dédiée à l'activité afin de permettre aux jeunes de soutenir leur attention. Chaque atelier se déroule une fois par semaine, le mercredi à 10h40, il s'agit d'un temps où les jeunes sont disponibles tous les deux. Après chaque séance, un journal de bord accompagné d'un questionnaire est tenu à jour, sa finalité est de suivre l'évolution des séances afin d'adapter ou de réajuster au mieux l'activité lors de la séance suivante. Mon binôme durant l'activité reste en fin de séance pour qu'ensemble nous réalisions une évaluation. Les supports utilisés sont les suivants :

- une vieille valise achetée à la brocante et qui a un vécu, dans laquelle je transporte tout mon matériel. Mon choix s'est porté sur ce type de bagage dans le but de poser un cadre théâtral à l'activité. Cette valise a suscité des questions de la part d'Angel, qui me parlera de cette valise à plusieurs reprises lorsqu'elle commentera l'activité. Elle accentue la part mystérieuse de l'histoire (cette drôle de valise marron sent une odeur forte, âcre....)

- des boîtes dans lesquelles j'ai placé des odeurs naturelles (cannelle, clous de girofle, menthe etc.). Celles-ci sont utilisées pour éveiller l'odorat ;

- un masque de monstre avec des poils, une boule rose très molle en caoutchouc (son aspect est déroutant car flasque), des éléments de la nature (feuilles, bâtons, pierres, plantes etc.). Ces matériaux sont utilisés pour le sens du toucher ;

- une perruque blonde, une corde, une cape, une tête de cheval, une couronne, une paire de lunettes à verres de couleur rose. Ces éléments sont utilisés pour le sens de la vue et l'aide à la compréhension de l'histoire ;

- une enceinte, afin de stimuler l'audition. J'ai choisi de diffuser des mélodies représentant l'atmosphère des différentes scènes de l'histoire. Je me suis inspirée ici de la musicothérapie, thérapie qui utilise des éléments de la musique ou de la musique en tant que telle afin d'ouvrir des canaux de communication. Je pense qu'associer l'histoire à certaines musiques favorise la compréhension de l'histoire puisqu'elle ajoute un élément d'information supplémentaire et favorise la mémorisation. En effet, «elle mobilise l'attention, engage la mémoire corporelle et sensorielle et le traitement séquentiel des informations31(*)

c. L'annonce de l'activité aux jeunes

Pour proposer l'activité aux jeunes, j'ai sollicité leur participation. Angel m'a répondu qu'elle souhaitait y participer. Quant à Zadkiel, j'ai expliqué l'atelier en mimant et puis j'ai observé ses expressions qui étaient positives. Enfin, j'ai pris la décision de venir les chercher avec la tête cheval, étant de grande taille, elle représente l'activité et permet aux jeunes de se repérer et de comprendre que l'activité est sur le point de débuter. Tels que l'explique Danièle WOLF, annoncer l'activité permet à la personne d'être davantage disponible car «cette sollicitation (inviter à partager une activité) survient fréquemment sans signes annonciateurs de la part de l'intervenant qui souvent présume que son interlocuteur sera d'emblée réceptif. »32(*)

d. L'histoire choisie

Concernant le choix de l'histoire, je me suis longuement interrogée sur le fait de privilégier une histoire correspondant à leur âge actuel, 20 et 27 ans, ou bien l'âge de leur développement cognitif. Pour Andreas FROLICH «le niveau développemental de ces enfants ne dépasse pas six mois.»33(*) J'ai d'abord envisagé la première solution en m'attardant sur les contes classiques. J'ai eu beaucoup de difficultés à les simplifier, à y apporter des éléments sensoriels et de participation. Je me suis ensuite tournée vers des livres très simples qui cependant étaient destinés aux moins de trois ans. J'ai veillé à ne pas infantiliser les jeunes. En effet, je suis d'avis de prendre en compte, si cela est envisageable, l'âge actuel des jeunes en réadaptant mon approche car, comme le dit justement Dominique JUZEAU, les jeunes découvriront leur statut d'adulte «au travers d'expériences que la famille et les équipes éducatives sauront amener avec la modification de ses apprentissages, de ses tenues vestimentaires, du soin porté à sa personne, des activités proposées (on quitte les comptines par exemple).»34(*) Ainsi, ma référente et moi avons pris du temps pour préparer et organiser l'activité. Puis j'ai pris la décision d'écrire une histoire. Je me suis inspirée d'une histoire pour enfants que je ne considérais pas pour autant infantilisante. C'est-à-dire, bien que le sujet35(*) choisit soit de type fantastique, l'histoire pouvait intéresser les enfants et les adultes. Ainsi, j'ai pu prendre en compte leurs capacités cognitives en proposant une histoire simple, tout en tenant compte de leur âge actuel en adaptant le scénario.

6. Déroulement des séances

A ce jour, nous avons effectué cinq séances, à raison d'une séance par semaine, lors de ma présence à l'établissement. Les séances ont été réalisées en binôme, la plupart du temps avec ma référente, certaines fois avec des accompagnants éducatifs et sociaux, et une fois avec l'aide de l'enseignante spécialisée. La personne qui m'accompagnait lisait l'histoire, prenait en charge la musique et se chargeait lors d'une scène de faire trembler les fauteuils. Quant à moi, je jouais les personnages et j'amenais les stimuli sensoriels à la portée des jeunes. A la fin de chaque séance, je réalisais une évaluation en collaboration avec mon binôme sous la forme d'un journal de bord, en précisant les éléments à modifier.

a. Première séance

Lorsque j'ai convié les deux jeunes à participer à la première séance, ils semblaient enthousiastes et souriaient. Lors de la séance, les jeunes étaient très surpris, parfois ils se montraient effrayés par les personnages. Les jeunes ont ri à certains moments. Angel observait souvent ma référente lors de la lecture. Lorsque cette dernière utilisait une voix rauque pour l'un des personnages, Zadkiel semblait impressionné. Peut-être que celui-ci associait ce ton de voix aux réprimandes ? A l'issue de la séance, les jeunes sont restés bouche bée. Angel, qui d'habitude est très loquace est restée muette. Nous sommes restés dans la salle à la fin de la séance pour demander aux jeunes ce qu'ils en avaient pensé. Nous n'avons pas obtenu de réponse immédiate de leurs part puis, Angel nous a partagé avoir aimé la séance. Pour Zadkiel, en revanche nous avons pu confirmer sa satisfaction grâce à l'expression de son visage. Ensuite, j'ai demandé à Angel ce que j'avais fait, elle m'a répondu « des bêtises ». Puis lorsque j'ai demandé ce que l'un des personnages faisait, celle-ci n'a pas répondu. Je pense que les jeunes ne s'attendaient pas à participer à une activité telle que celle-ci. En effet, ils n'avaient pas de représentation de ce que pouvait être un conte sensoriel.

b. Deuxième séance

Angel n'était pas présente en raison d'un stage dans une structure pour adulte. Lorsque je suis venue chercher Zadkiel, une professionnelle m'a confié que celui-ci était tendu au niveau des bras durant sa séance de kinésithérapie. Je suis venue le chercher avec le cheval, il nous a fait un très large sourire et lorsque nous avons pris l'ascenseur, Zadkiel riait déjà. Il semblait donc avoir reconnu le cheval, et s'attendait à vraisemblablement participer de nouveau à l'activité. Celui-ci a émis des vocalises lorsque nous avons eu accès à la salle, ce qui est une manière pour lui de montrer son excitation pour l'activité. Mon binôme et moi avons décidé de filmer l'activité pour qu'il puisse partager son expérience avec sa famille. Plus tard, j'ai profité de la vidéo pour observer les réactions du jeune homme. Lors de la séance, il s'est montré attentif et rieur, il a parfois eu des fous rires. Il a regardé à plusieurs reprises la seconde personne qui faisait office de binôme, je dois ajouter que le jeune était principalement concentré sur ma prestation. A l'issue de la séance, il a semblé ravi mais également songeur. Je lui ai demandé s'il avait apprécié l'histoire, il m'a fixé et sourit. In fine, le jeune semblait moins surpris mais plus pensif. Davantage préparé à participer à l'activité, ce dernier m'a semblé plus pensif car comme nous le verrons ultérieurement, il a très certainement pu intégrer d'avantages d'éléments de l'histoire comparé à la fois précédente.

c. Troisième séance

Lorsque je me suis présentée aux jeunes, ils ont reconnu le cheval et étaient enthousiastes de se rendre à l'activité. Angel semblait particulièrement fière de tenir le cheval jusqu'à la salle. Pendant l'activité, les jeunes étaient souriants, attentifs et ont bien participé aux commandes des personnages (par exemple, l'un des personnages demande à Angel de tirer une corde). En fin de séance, j'ai demandé à Angel si celle-ci a été effrayée lors de l'activité, celle-ci a acquiescé. Je lui ai ensuite demandé si elle avait été surprise, en revanche je n'ai pas obtenu de réponse. Ma référente n'a également pas obtenu de réponse de la part de cette dernière.

d. Quatrième séance

Cette séance a été particulièrement intéressante car elle a été effectuée avec l'assistance de l'enseignante spécialisée. Lorsque nous sommes allées à la rencontre des jeunes, Zadkiel a reconnu le cheval, en effet, il a souri dès qu'il l'a aperçu. Quant à Angel, elle s'est montrée fortement excitée (cris, sourires et agitations) de se rendre à l'activité, avant même d'avoir repéré le cheval. Puis, les jeunes ont présenté sensiblement les mêmes comportements que les fois précédentes, c'est-à-dire que durant la séance, ils ont été attentifs, aidants et participatifs. Puis une fois que l'activité est arrivée à son terme, ils sont restés pensifs, d'ailleurs, Angel est restée muette. Nous sommes restés dans la salle pour échanger autour de l'activité. Ainsi nous avons interrogé Zadkiel afin qu'il nous montre s'il avait ressenti de la crainte, à cette demande il n'a eu aucune réaction notable. Puis, lorsque nous lui avons demandé s'il s'était diverti, il a souri largement et a vocalisé. Enfin, nous avons interrogé Angel, celle-ci a confirmé qu'elle avait trouvé l'activité amusante par son acquiescement. Concernant les stimuli, nous nous sommes assuré qu'Angel sentait bien les odeurs, mais nous n'avons pas eu de commentaires de sa part. Quant à Zadkiel, j'ai remarqué qu'il s'était montré attentif lorsque je lui présentais les éléments sensoriels.

Suite à un retour d'expériences auprès de l'enseignante spécialisée, j'ai décidé d'utiliser la même histoire pour les séances suivantes. En effet, l'enseignante m'a partagé l'intérêt de la répétition auprès de ce public. Ainsi, avec la répétition se construit la mémoire. La mémorisation aide à la compréhension de l'histoire, les jeunes peuvent se concentrer sur de nouveaux éléments du conte à chaque nouvelle séance, à mesure que la compréhension s'acquiert. Les jeunes peuvent se concentrer sur des éléments qu'ils n'avaient pas assimilés lors des séances précédentes. La compréhension leur permettra d'apprécier davantage l'histoire. De plus, la répétition permet de travailler la représentation mentale, en d'autres termes l'anticipation. Grâce à leurs représentations mentales de plus en plus claires, ils seront amenés à se construire une idée des événements de l'histoire et ils seront ensuite de plus en plus en mesure de la recevoir ; tout comme le cheval qui est devenu une représentation mentale de l'activité pour les jeunes.

e. Cinquième séance

Lors de la cinquième séance, Angel n'a pas pu être présente. Celle-ci a quitté l'établissement et est retournée à son domicile. Zadkiel a bénéficié de l'activité en présence de deux camarades plus jeunes que lui. En effet, ma référente a changé d'unité durant ma période de stage, ainsi j'ai été invitée à poursuivre mon stage au sein de cette unité de jeunes âgés de 8 à 14 ans. Pour des raisons pratiques, je poursuivrai le mémoire en me focalisant uniquement sur Zadkiel mais je reviendrai sur la question du futur de l'activité lors de la partie «perspectives éducatives».

Zadkiel a réagi immédiatement à la vue du cheval avec un grand sourire lorsque je me suis rendue à son unité. Je l'ai invité à le porter jusqu'à la salle, je l'ai déposé sur la tablette de son fauteuil roulant afin d'initier sa participation. J'ai prévenu ensuite le jeune de la présence de deux nouvelles camarades et, j'ai rappelé qu'Angel était partie du fait de son âge. Je n'ai pas senti le jeune perturbé par ces changements, il semblait concentré sur ce qui allait se dérouler. Cependant, pour ma part, j'ai eu plus de mal à circuler dans la pièce trop étroite pour accueillir trois résidents. Pour cette cinquième séance, Zadkiel n'a pas été ébahi contrairement aux séances précédentes. Le jeune s'est exprimé dès la fin de la séance grâce à des vocalises.

En effet, il n'a pas eu besoin de temps pour réfléchir, dès que nous avons initié la discussion post-narration, il a initié le «dialogue». A ce stade, je pense que le jeune est plus confortable face à l'histoire et qu'il commence à l'intégrer.

J'ai effectué cette séance avec une accompagnante éducative et sociale. Par son regard sur l'activité, celle-ci m'a permis de me questionner sur le volume de la musique de fond qui semblait élevé. En effet, il peut être préférable de séparer les stimuli pour favoriser l'assimilation des informations. Ainsi, lors des séances suivantes je privilégierai de diffuser la musique en début et en fin de séance afin de bien différencier chaque stimulus.

f. Des participants attentifs et réactifs lors des séances

Lors des séances et des bilans j'ai pu observer plusieurs faits. D'une part, les réactions des jeunes semblaient adaptées à l'histoire car celles-ci sont en corrélation avec la scène, par exemple, j'ai pu noter que les jeunes étaient surpris lors de scènes où un changement inattendu prenait place.

Puis d'autre part, j'ai remarqué que Zadkiel restait muet durant les séances, mais une fois l'activité terminée il semblait vouloir initier la discussion. Durant le spectacle son silence semblait traduire sa concentration.

Lors de l'évaluation, je prenais en compte les remarques de mes binômes, qui connaissaient bien les jeunes et leurs réactions. Ensemble nous nous accordions à dire que par leur enthousiasme de se rendre à l'activité et leur attention, les jeunes semblaient éprouver un réel intérêt aux séances.

g. L'atterrissage après le voyage par les sens

Les jeunes se sont montrés très attentifs, curieux et captivés, ils me suivaient du regard. Cependant, la séance terminée ils semblaient déconcertés ; Zadkiel ne vocalisait pas et Angel ne commentait pas la séance. Ils semblaient dans l'expectative. J'ai noté qu'ils paraissaient imprégnés par l'histoire. A la fin de la séance, ils semblent donc dans l'attente, peut-être se demandent-ils si l'histoire a pris fin ? Effectivement, ils font partie intégrante des personnages, ils sont englobés dans le conte, ils la vivent. Ainsi, ils ne savent plus comment réagir après coup, puisque ceux-ci sont encore dans l'histoire, impliqués et imprégnés par celle-ci. Je pense alors qu'ils ont reçu de «plein fouet» toutes les stimulations qui leur ont été amenées, ils se sont entraînés à les recevoir, c'est pourquoi ils demeurent dans l'expectative.

Ayant changé d'unité au cours de mon stage, j'ai pris pour habitude de me rendre à l'unité pour rencontrer les jeunes les jours suivant la séance, dans le but de discuter de l'activité et de prendre de leurs nouvelles. Durant ces moments d'échanges, j'en profite pour noter chacune de leurs réactions, et les comparer aux réactions initiales repérées le jour des «contes sensoriels.» De cette manière, en évoquant l'activité à Zadkiel, j'ai pu constater qu'il vocalisait davantage qu'en fin de séance. Quant à Angel, en confrontant avec les échanges d'après séance, je comprends qu'elle répond plus aisément. J'en conclus que les jeunes ont besoin de temps pour assimiler l'activité et pour se remettre de leurs émotions.

Faut-il adoucir l'histoire pour que les jeunes soient moins déstabilisés ? Je ne pense pas qu'être déstabilisé soit contraire à l'épanouissement des jeunes puisque dans chaque conte se trouve un personnage incarnant le méchant et un héros qui rencontre des difficultés, du moins au début de l'histoire. Bruno BETTELHEIM cite à ce propos «la majorité des parents croient que l'enfant doit être mis à l'abri de ce qui le trouble le plus : ses angoisses informes et sans nom, ses fantasmes chaotiques, colériques et même violents. [...] Mais ce régime à sens unique ne peut nourrir l'esprit qu'à sens unique, et la vie réelle n'est pas que soleil...»36(*) De plus, la personne séduite par le personnage, s'identifie à lui et ce dernier lui apporte un message qui lui apprend ou lui rappelle «que la lutte contre les graves difficultés de la vie est inévitable [...] mais si au lieu de se dérober, on affronte fermement les épreuves [...], on finit par remporter la victoire.»37(*)Même si dans son livre Bruno BETTELHEIM écrit au sujet des enfants, je pense que cela peut s'appliquer aux adultes également. En effet, selon moi l'enfant intérieur peut être touché lors de l'écoute d'une histoire, en d'autres termes, je pense que pour tout individu les histoires ou le visionnage de films peuvent être une source de stimulations et aide à la gestion des émotions, narrées par l'histoire. Je pense donc que les adultes peuvent également apprécier une histoire qui ne soit pas adoucie mais qui reprend les difficultés de la vie.

En revanche, il se peut que le sujet de l'histoire ne soit pas à l'origine de ce qui provoque l'étonnement des jeunes, cela peut concerner un autre aspect. Il peut s'agir de l'activité dans sa globalité, l'histoire et l'éveil des sens. En effet, au regard de leur réactions, j'ai pu conclure qu'il y avait, pour les jeunes, une nécessité de procéder à un «atterrissage». Je pense que l'histoire a stimulé une circulation de l'esprit. Elle a peut-être permis de ré-ouvrir des possibles et solliciter l'imaginaire. L'imaginaire les a amené à expérimenter un voyage dans l'histoire. Après la séance, il faut donc amortir «l'atterrissage.» Mon but n'était pas de les illusionner. C'est pourquoi après les séances, nous prenions le temps de ralentir, ce moment de pause nous permettait d'échanger.

V. Evaluation des séances

1. Ajustements opérés

D'autre part, mon binôme et moi avons eu tendance à nous précipiter dans les actions de l'histoire, à lire et à amener les éléments sensoriels de manière assez rapide. Puis, j'ai réussi à ralentir mes gestes cependant je pense que la séance pouvait être encore plus longue en termes de temps. Il est très important de ralentir lors des accompagnements de personnes en situation de polyhandicap, notamment pour leur donner le temps de recevoir l'information. «Elles ont besoin de temps pour pouvoir répondre. Il nous faut apprendre à repérer leurs stratégies et leur «temps» qui n'est pas le nôtre.»38(*) C'est alors que j'ai réalisé, que malgré nos efforts, il est très difficile de ralentir le rythme de l'activité lors d'un accompagnement. En outre, ces arrêts sur image permettent également aux jeunes de mieux comprendre le sens de l'histoire.

Puis, après un petit incident lors de la première séance, j'ai pris la décision de fermer la porte de la salle à clef, pour que l'activité ne soit plus perturbée par l'ouverture de la porte par une personne extérieure.

A propos de l'évaluation, j'ai testé plusieurs manières de l'effectuer. J'ai d'abord débuté par l'écriture et ce, sous la forme d'un journal de bord dans lequel je notais quelques observations. J'ai pensé à l'éventualité d'omettre des éléments. Alors, j'ai préféré aborder la séance suivante sous la forme d'un tableau en y comparant le comportement des jeunes : avant, pendant et après l'activité. Ce type d'évaluation m'a été bien utile cependant, j'ai réalisé que ce type d'organisation pouvait engendrer des oublis. Ainsi, j'ai effectué la troisième évaluation sous forme d'objectifs afin de repérer s'ils avaient été atteints.

Faute de temps, je n'ai pas procédé de la sorte. De ce fait, pour la quatrième évaluation, j'ai réalisé un questionnaire dans le but de comparer les comportements des jeunes avec les séances précédentes ; j'y ai également ajouté d'autres items tels que «Est-ce que leurs réactions étaient adaptées au contenu ?» Inscrire des questions au préalable m'a permis d'élargir mes questionnements en prenant davantage de temps pour les élaborer. Toutes ces tentatives m'ont permis de cheminer vers la méthode la plus efficiente qui pour moi s'est traduite de la sorte : lire en un premier temps, les objectifs de mon activité ainsi que les observations précédentes au préalable de toute nouvelle évaluation puis dans un second temps, rédiger l'évaluation tel un journal de bord.

2. Qu'en est-il des objectifs ?

Afin d'évaluer l'activité «contes sensoriels,» je propose d'étudier les objectifs un par un.

? Donner aux jeunes l'accès aux histoires

Je pense avoir pu donner aux jeunes l'accès aux histoires du fait qu'ils étaient captivés par les diverses scènes, qui ont pu leur faire ressentir des émotions variées. Ils ont pu sursauter, être effrayés par les personnages ou rire face aux scènes divertissantes. Par leur réactions à l'activité et leur concentration, je peux constater que les jeunes ont écouté le récit, ils ont eu donc accès à une histoire. Par contre, pour qu'ils aient accès aux histoires, avec un s, il faudrait continuer l'activité sur le long terme, durant plusieurs mois dans le but de leur proposer une histoire différente lorsque l'histoire aura été suffisamment répétée. Nous verrons plus bas l'intérêt de répéter la même histoire ;

? apporter un moment d'interactions

L'histoire est racontée pour les jeunes dans laquelle ils peuvent participer par les actions sollicitées par les personnages de l'histoire ; mais également parce que nous discutons du conte après les séances. En premier lieu, je peux constater que les jeunes entrent en relation du fait qu'ils écoutent attentivement, suivent du regard. Leurs réactions soulignent qu'ils sont bien présents, être présent c'est interagir. Comme vu plus haut, interagir c'est agir et comme ils ont réagi face à mes stimulations, j'en déduis qu'ils ont été dans l'interaction. Le corps est un être de parole. Ainsi, même si les jeunes ne communiquent pas ou difficilement avec des mots, ils sont tout de même dans l'interaction. J'ai noté des regards, de l'attention, des réactions expressives etc. Il est simplement nécessaire d'y prêter attention et, de leur donner un support pour enclencher cette interaction qui est proposée à deux sens. Dans un second temps, j'ai pu constater qu'il est assez difficile de discuter avec les jeunes à l'issue de l'activité, en effet, comme j'ai pu évoquer plus haut, les résidents restent pensifs et dans l'expectative. Peut-être aurions-nous pu mettre en place un atelier hebdomadaire dédié à échanger avec les jeunes à propos de la dernière séance «contes sensoriels» ? ;

? vivre et découvrir les noms des émotions, des sensations, des sentiments et
des idées...

En fin de séance, des échanges avec les jeunes leur ont permis de revivre certaines émotions. Nous évoquions les différentes émotions suscitées chez les jeunes. A titre d'illustration, nous avons abordé la surprise au travers de l'expression de leur visage ou leur mutisme qui semblait traduire cette émotion. Le loup-garou du conte est poilu c'est ce qui le caractérise, l'animal devient réel par le biais des poils que les jeunes ont pu toucher. Nous avons donc évoqué le pelage du loup-garou avec les jeunes, cet échange aide les jeunes à intégrer l'histoire en opérant un retour en arrière. Au sujet des sensations, Angel a pu acquiescer afin de nous confirmer qu'elle avait bien senti les odeurs proposées lors du conte. Je pense que les séances ont permis une introduction face à ces nouveaux sujets et émotions qu'ils ont pu expérimenter et en «parler» ;

? s'habituer au contact corporel et entrer en relation avec l'autre

L'activité a permis aux jeunes d'expérimenter leur corps d'une toute autre manière. Afin de sortir du contexte quotidien dans lequel le contact corporel est utilitaire (par exemple lors des moments de soins), il leur a été proposé de découvrir leur corps par les sens, à travers une histoire. Les stimuli ont été acceptés par les jeunes, qui se sont laissés entrer en relation. Ce qui s'est traduit notamment lorsque j'ai donné la balle de caoutchouc à Angel, elle a pu la tenir dans sa main. Ainsi, je n'ai pas constaté de leur part de difficultés eux à entrer en relation. Néanmoins, il est vrai que je m'attendais à davantage de réactions de leur part face aux stimuli. Je détaillerai ce point dans le paragraphe suivant ;

? utiliser son corps comme moyen d'exploration grâce aux stimulations sensorielles

Cet objectif va de pair avec le précédent. Comme je l'explique plus haut, les jeunes ont acceptés les stimuli, ils ont donc exploré le conte grâce aux sens. Il est à noter cependant qu'un sens était plus particulièrement investi que d'autres. En effet, seul le spectacle occasionnait de vives réactions. A titre d'exemple, les jeunes regardaient d'un coup d'oeil les capsules odorantes lorsque je les amenais à leur portée, ils les sentaient puis se concentraient aussitôt sur les personnages. C'est pourquoi, je pense que le sens de la vue a semblé plus captivant pour les jeunes. Néanmoins, je pense que les stimuli sont importants pour l'exploration du corps, du conte et pour la participation à l'histoire. Il est compréhensible que le spectacle occasionne le plus de réactions, il s'agit d'une expérience complètement nouvelle, dynamique et donc qui attire l'attention et le regard. En SNOEZELEN, il est conseillé de séparer les stimuli afin de favoriser l'attention et l'assimilation de l'information puisque tel que le relate Anne-Marie ASENCIO au sujet des personnes présentant un polyhandicap, «ces personnes conjuguent à la fois le non accès à une communication verbale [...] et dans un environnement saturé de messages multi sensoriels, que les spécificités de leur fonctionnement sensoriel, organique et neuronal ne leur permettent pas toujours de réguler, en termes de flux et, de métaboliser au niveau du sens.»39(*) Peut-être, aurait-il été intéressant de séparer le spectacle (la vue) des autres éléments sensoriels. Prolonger la séance pourrait être possible mais nécessiterait plus de temps et donc serait plus difficilement mis en place, en fonction des emplois du temps de chacun ;

? percevoir et découvrir son corps propre et son environnement, ainsi que ses possibilités de participation

Je pense que les jeunes, grâce aux sollicitations sensorielles de l'histoire proposées ont pu expérimenter l'environnement de l'activité et l'impact de leur personne sur l'histoire, puisque les personnages réagissent également aux jeunes. Afin d'illustrer cet exemple, si Angel ne réussissait pas à jeter la balle sur un des personnages comme demandé par l'un deux, celui-ci lui faisait une remarque humoristique, ce qui faisait rire Zadkiel. En revanche, si Angel atteignait le personnage avec la balle, celui-ci se transformait et retirait son masque.

De surcroît, les jeunes qui doivent appréhender toutes les informations provenant de leur environnement avec des moyens de connaissance et de communication limitées, ont besoin de structure, ce qui aménage leur environnement pour «le rendre plus sûr, plus contenant et plus reconnaissable pour cette personne car sa qualité de vie en dépend largement.»40(*) C'est pourquoi, il est nécessaire d'utiliser à la fois un langage accessible aux personnes si cela est réalisable c'est-à-dire un langage qui passe par le corps et, d'apporter également des repères auxquels les jeunes puissent s'appuyer pour construire leurs représentations mentales de leur environnement. Dans la situation de l'activité, il s'agit de comprendre l'importance de la répétition afin de la mettre en place. Il est nécessaire de répéter le récit, de disposer de la même salle, de prévenir les jeunes de tout changement survenu (changement de participants...) ; il s'agit de parler de la séance pour mieux la comprendre. Ainsi, le professionnel est un «passeur de sens,» «notre rôle de passeur entre le monde et la personne polyhandicapée est bien de trouver les moyens d'installer dans leur vie les rythmes et les éléments de temps qui la structurent et rendent ce monde un peu plus compréhensible»41(*);

? éveiller la curiosité

J'ai pu observer l'étonnement, la surprise voire quelques fois l'émerveillement dans les expressions de leur faciès. Ce spectacle sensoriel peut être considéré par les résidents comme un événement magique. La découverte était l'un des objectifs de l'activité, et le moyen de l'évaluer est de repérer la curiosité. Ainsi, selon moi les jeunes ont pu découvrir leur propre corps et leur environnement par la curiosité qu'ils ont manifestés.

Il est à noter que l'activité a apporté une nouveauté qui a amené de l'excitation car ces stimulations peuvent faire coupure dans la continuité de leur rapport au monde, que Véronique PAUTREL qualifie de «difficilement perceptible tant il y semble indifférent faute de moyens psychiques.»42(*). Ainsi, précise-t-elle «Les seuils d'excitations sont facilement franchis pour ces enfants qui n'ont pas les moyens de donner du sens à ce qu'ils éprouvent.» Ceci pourrait expliquer la raison pour laquelle Zadkiel réagit vivement aux nouveautés du quotidien et la raison pour laquelle les jeunes ont semblé déboussolés par la séance ;

? prendre du plaisir

Cette curiosité semble montrer l'intérêt des jeunes pour l'activité. De plus, j'ai constaté l'enthousiasme des jeunes à chaque fois que je venais les chercher avec le cheval. J'ai eu l'opportunité de demander à Angel et à Zadkiel s'ils avaient apprécié l'activité, leurs retours ont été positifs. En revanche, je donne la possibilité aux jeunes de refuser ou de remettre à plus tard la séance en veillant à leur réaction à l'annonce de cette dernière dans le but de renforcer leur «sentiment continu d'exister.»43(*)

3. Le sentiment continu d'exister

Au cours de mon projet, je me suis inspirée du concept de la stimulation basale d'Andreas FROLICH. Cette théorie consiste à proposer à la personne des sensations relatives à la vie intra-utérine, par exemple des «sensations d'enveloppement, frottement, serrage, percussions, vibrations, déplacements.»44(*) Philippe CAMBERLEIN et Gérard PONSOT précisent «qu'il s'agit de fournir à l'enfant des stimuli spécifiques susceptibles de provoquer son intérêt et son attention» et de «stimuli relatifs aux expériences corporelles primitives, à la base probablement du sentiment d'exister.»45(*) A ce sujet, j'ai intégré des vibrations dans les éléments sensoriels de l'histoire.

Par ailleurs, il se peut que l'activité ait répondu à une angoisse de morcellement. En effet, Véronique PAUTREL a émis l'hypothèse que les personnes présentant un polyhandicap «vivent sans doute des angoisses que nous pourrions qualifier d'archaïques au sens où elles seraient antérieures à la problématique de la perte de l'objet.»46(*) L'angoisse de morcellement est une angoisse archaïque d'une rupture du moi différencié, soit la peur de la destruction de son propre corps ou de son propre psychisme. Les personnes sujettes aux angoisses de morcellement ont besoin de sentir la limitation de leur corps.

C'est pourquoi, l'histoire a pu constituer une enveloppe qui les a contenu, qui les a transporté, qui les a «porté» vers un voyage, ainsi les éléments sensoriels ont permis aux jeunes de sentir leurs corps. Grâce aux diverses sensations, les jeunes ont pu percevoir «l'extérieur» puisque ceux sont les «différentes perceptions émanant de l'objet, qui permettent à celui qui perçoit de le vivre comme extérieur à son intériorité de sujet percevant.»47(*) Ainsi, ils ont eu conscience de leur corps et ont pris conscience de leur existence. Il s'agit de passer «d'une existence organique à une existence corporelle, d'une existence qui s'ignore à une existence consciente d'elle-même.» C'est donc en favorisant «l'activité attentionnelle»48(*) de la personne que l'on favorise la conscience de soi et de l'environnement. Ceci en passant par le corps car «le corps est l'intermédiaire entre la personne et le monde»49(*). Je peux en conclure que l'interaction proposée qui passe par la sensorialité permet de développer cette attention chez la personne et de favoriser son existence consciente.

VI La suite au prochain épisode ?

Je tiens à rappeler qu'Angel a quitté l'établissement. Je préconise que Zadkiel continue à participer à l'activité. Celui-ci l'apprécie et s'est prêté au jeu. En outre, j'ai constaté une évolution du jeune, notamment lors de la dernière séance, j'ai remarqué qu'il émettait des vocalises plus aisément en fin de séance et semblait moins perplexe. Je souligne donc l'importance de la répétition de l'activité. Si l'activité perdure, Zadkiel pourra intégrer de plus en plus d'informations à mesure que sa compréhension de l'histoire s'acquiert. Cette répétition «permet de retrouver des sensations identiques, rassemblées dans la même expérience, de retrouver des traces de déjà vécu, qui constituent autant d'ébauches de représentation mentale et du sentiment continu d'exister. Il s'agit d'activité à penser sur le long terme50(*)

Je sollicite les professionnels de l'établissement pour continuer à inscrire l'activité au sein de l'établissement. Effectivement, lors de la cinquième session, nous avons effectué une séance d'essai, ainsi deux nouveaux enfants ont accompagné Zadkiel. Nous avons constatés que ces dernières pourraient s'y complaire. Concernant le déroulement de l'activité en elle-même, je préconiserais d'espacer les séances, d'en proposer moins mais de la prolonger afin de favoriser la séparation des stimuli. C'est-à-dire, de commencer par le spectacle, puis d'emmener les éléments de l'histoire aux jeunes tout en rappelant l'histoire et ses caractéristiques. Parler l'histoire permettrait de mieux l'appréhender et de pouvoir amorcer «l'atterrissage». Il faut néanmoins garder certains éléments qui favorisent la compréhension de l'histoire et la participation des jeunes ; tels que la vibration des chaises lorsqu'un des personnages fait trembler le sol, ainsi que toutes les participations des jeunes, à titre d'exemple lorsque les personnages s'approchent des jeunes pour les solliciter dans des actions précises. De plus, je préconise d'effectuer une deuxième séance, le lendemain, si cela est possible. Cet échange serait uniquement dédié à discuter de l'activité car comme nous l'avons vu plus haut, les participants ne sont pas disponibles en fin de séance.

Enfin au cours des évaluations, je me suis interrogée sur la fréquence des représentations. A quel moment doit-on proposer une seconde histoire ? Comment repérer si la répétition du premier récit a été bien intégrée ? L'enseignante spécialisée m'a expliqué que les jeunes en situation de polyhandicap peuvent apprendre mais que le temps pour que les apprentissages puissent s'opérer se compte en années. Ainsi, nous ne connaissons pas le nombre de séances qu'il serait préférable d'effectuer pour une histoire. En effet, quel que soit ce que nous proposons aux jeunes, que ce soit un conte sensoriel ou un autre atelier, nous pouvons avoir toutes les idées théoriques, et connaître tous les bénéfices que cela puisse apporter, seul le jeune en question pourra nous indiquer s'il adhère ou non à l'accompagnement proposé. Aucune journée ne se ressemble, d'un jour à un autre, les jeunes peuvent réagir d'une manière très différente. En revanche, les réactions des jeunes me permettent de réguler mon approche. Je pense donc qu'il faut rester ouvert au sujet avec lequel nous travaillons, et qu'il nous dirigera certainement toujours vers la bonne direction, si toutefois nous sommes prêt à rebondir, revoir notre positionnement en fonction de ce qu'il nous montre. Tel que l'affirme si bien Sophie LUTZ, mère d'une jeune polyhandicapée «La première chose que j'ai découvert c'était que j'avais à travailler sur moi parce que c'était moi d'abord qui devait trouver comment me comporter et une des choses qui est venue en premier c'est d'accepter mon impuissance. [...] J'ai découvert que la meilleure manière de m'approcher d'elle c'était d'arriver comme quelqu'un qui va apprendre, non pas comme quelqu'un qui va accompagner l'autre mais qui va se faire accompagner par elle, [...] pour être vraiment adéquate, être vraiment en lien avec elle, d'une manière qui soit respectueuse»51(*).

Auto-évaluation

Initialement ma crainte était de ne pas réussir à trouver un ou une professionnelle pour m'accompagner lors de l'activité, par faute de temps ou de moyens humains. Cependant, avec de l'anticipation et de l'organisation, c'est-à-dire en informant en amont l'unité des jeunes et mon binôme de l'horaire et du cours de l'activité, je n'ai rencontré aucune difficulté à effectuer l'activité en binôme. Je les ai réalisés avec plusieurs professionnels différents, ce qui a permis de faire découvrir les «contes sensoriels» à un maximum de personnes dans la perspective que l'activité se perpétue suite à mon départ. J'ai d'ailleurs pu constater un intérêt des professionnels pour mon activité.

Puis, lorsque j'ai changé d'unité, j'ai douté de mon diagnostic énonçant un besoin de stimulations sensorielles. En effet, j'ai accompagné des enfants de 7 à 14 ans qui étaient très fatigables aux diverses sollicitations et cela m'a interpellé sur le fait que trop de stimulations fatiguent les personnes en situation de polyhandicap. Ainsi, j'en ai conclu que malgré ce besoin, il est nécessaire de veiller à ne pas sur-stimuler les résidents mais de séparer les stimuli lors des activités, comme expliqué plus haut, afin de s'adapter au mieux à leur condition.

Enfin, j'ai engagé ma réflexion suivante : comment continuer ce travail de prise en compte du besoin d'interactions par les stimulations sensorielles lorsque l'activité cesse ? Comment élargir le travail afin qu'il puisse s'opérer en dehors des séances ? Au fil de mes accompagnements au quotidien, j'ai dirigé mon approche éducative sur les sensations sensorielles afin d'entrer en relation avec les enfants de ma nouvelle unité. A titre d'exemple, j'utilisais leurs jouets ou des bouteilles sensorielles Montessori afin de capter leur attention et engager une interaction. En l'occurrence, il s'agit de bouteilles remplies d'eau, d'huile ou de billes pour stimuler l'éveil des jeunes enfants En outre, lors des moments de soins, j'utilisais l'eau, le toucher des produits ou la mousse pour inviter le jeune à se concentrer sur une sensation et je théâtralisais mes réactions ou mes phrases afin de me faire entendre, de rencontrer la personne là où je peux la trouver, c'est-à-dire de prendre en compte sa manière spécifique d'appréhender et de recevoir les informations de son environnement. En d'autres termes, nous ne sommes pas obligés d'attendre les activités mis en place au sein de l'établissement pour rencontrer le jeune et l'inviter vers quelque chose que l'on considère intéressant pour son bien être. Les moments de soins aussi représentent des occasions de stimulations basales. De plus, tel que le précise Andreas FROLICH, le quotidien doit donner «l'occasion [...] d'intégrer des sensations qui [...] le submerge bien souvent, entraînant stress et réactions de protection et de défense, et l'empêchent de comprendre les situations dans lesquelles il se trouve impliqué.» L'approche bienveillante qui l'invite à re-découvrir ses sensations corporelles l'aide à soutenir sa confrontation à la complexité «des situations sensorielles complexes» de sa vie quotidienne. En effet, «les ressources cognitives de l'enfant ou de l'adulte polyhandicapé ne lui permettent guère de transférer les découvertes vécues en atelier à son vécu dans un autre espace-temps.»52(*)

Conclusion 

Au cours des accompagnements, je me suis penchée sur les besoins des personnes en situation de polyhandicap.

Tout d'abord, inspirée par mon entretien avec la psychologue de l'EEAP, je pense qu'il est nécessaire face à cette pathologie, de se remémorer quotidiennement les cinq besoins de base présentés par Abraham MASLOW, psychologue, à savoir les besoins : physiologiques, de sécurité, d'appartenance, d'estime et de s'accomplir. Ainsi, je pense que bien que la façon de subvenir aux besoins physiologiques de ces personnes concentre de manière conséquente le personnel soignant et éducatif, elles ont autant besoin d'être considérées dans leur ensemble, que le reste de la population.

Ensuite, j'ai constaté que les deux jeunes que j'ai accompagné dans le cadre de mon projet se montrent en demande constante d'interactions sociales. Cependant, pour subvenir à ce besoin, j'ai noté l'importance de prendre en compte leur manière spécifique d'envisager et de comprendre le monde. En effet, à défaut de pouvoir comprendre et manipuler les mots, dans leurs caractéristiques brutes et absolues c'est-à-dire le mot en lui-même, les jeunes ont besoin de contexte, de tonalité et de sensorialité. Ils ont donc besoin de stimulations sensorielles favorisant la réception des informations provenant de leur environnement.

Puis, j'ai pu noter un besoin de dynamisme par leur grand intérêt et attention envers tout comportement à caractère festif ou événement inhabituel.

Enfin, j'ai explicité le besoin de participation, à savoir d'être pris en considération lors de choix qui les concernent, d'être avertis de tout changement et de les inclure le plus possible aux conversations et aux activités de l'unité.

Au cours de mon projet, j'ai été amenée à m'interroger sur la réponse apportée par l'équipe des professionnels aux divers besoins des jeunes et, si celle-ci était satisfaisante.

Avant toute chose, j'ai constaté que les cinq besoins de base sont pris en compte, dans la mesure du possible, c'est-à-dire, avec les contraintes de temps et de moyens disponibles, ceci au quotidien ou lors d'activités.

Ensuite, le besoin d'interactions sociales et de participation est pris en compte quotidiennement en revanche, il fait face à des contraintes de temps étant donné que les professionnels ne sont pas toujours disponibles pour discuter ou proposer une activité.

Puis, concernant le besoin de dynamisme, j'ai noté que les professionnels ont à coeur de dynamiser les moments de soin, par exemple à l'aide de musique. A ce titre, l'établissement organise trois fêtes par an, à savoir la fête de Noël, le Carnaval et la fête de l'établissement dans laquelle la famille est conviée.

Enfin, concernant le besoin de stimulations sensorielles, j'ai pu observer l'équipe faire sentir les odeurs de la nature lors de sorties à l'extérieur. Cependant, ces besoins ne sont pas toujours pris en considération ; il arrive souvent à l'équipe de converser avec le jeune sans théâtraliser pour favoriser la compréhension, sans utiliser de tonalités poussées, ou sans y associer de stimulations sensorielles.

Ainsi, je me suis interrogée tout particulièrement sur la manière de répondre aux divers besoins d'interactions sociales et de stimulations sensorielles d'Angel et Zadkiel. Pour se faire, je leur ai proposé des contes sensoriels car l'activité me semblait en concordance avec leurs besoins spécifiques.

Au fil des séances, les deux jeunes se sont montrés attentifs, participatifs face aux sollicitations et étonnés une fois l'activité terminée.

J'ai observé l'importance de prendre du temps après chacune des séances afin de permettre «l'atterrissage» suite au voyage des sens proposé. Mon binôme et moi avons pris du temps pour discuter de l'histoire et/ou des éléments sensoriels présentés cependant les jeunes ne semblaient pas disponibles car trop pensifs. Ainsi, je pense qu'il serait utile de proposer une autre séance dédiée à la discussion afin de permettre aux jeunes une meilleure appréhension et compréhension de l'activité «contes sensoriels».

D'autre part, j'ai pu constater la nécessité de séparer certains éléments sensoriels pour les proposer (tels que la musique, les matières à toucher et les odeurs) en fin de séance, dans le but d'éviter une sur-stimulation et de favoriser de cette manière l'assimilation des informations liées à l'activité.

Au fil de mes lectures portant sur la sensorialité des personnes en situation de polyhandicap et à partir de mes accompagnements auprès de Zadkiel et d'Angel, j'en conclus qu'il est intéressant d'approcher ce public par le biais de la sensorialité. En effet, celle-ci les amène à acquérir une conscience de leur corps et de leur environnement. Cette activité attentionnelle ainsi que, la participation des jeunes renforcent leur sentiment continu d'exister. Par conséquent, inclure la personne dans le dynamisme de la vie c'est s'adapter à elle, afin de lui proposer des outils qui lui permettent d'agir sur son environnement et d'être en capacité de recevoir sereinement l'extérieur et de le comprendre.

Je me suis intéressée à deux jeunes en recherche d'interactions et disposant de nombreuses facultés sensorielles (ouïe, odorat, vue, goût, toucher). Cependant, qu'en est-il des jeunes qui ne disposant pas de tous leurs sens ? Peut-on adapter l'activité «contes sensorielles» pour ces derniers ? Qu'en est-il des jeunes qui ne semblent pas être dans la recherche d'interactions sociales ? Pourrait-on envisager d'interagir avec eux par le biais de la sensorialité ?

Bibliographie

Ouvrages lus :

? DOLTO Françoise, La cause des adolescents : respecter leur liberté et leurs différences, Pocket, Paris, 2003

? JUZEAU Dominique, Louis Vallée, Pierre Tisserand, et Philippe Pernes, Vivre et grandir polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010, page 21, page 91, page 46

? DALLA PIAZZA Serge, GODFROID Bénédicte, La personne polyhandicapée : son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, pages 29, 112, et 119

Ouvrages et documents consultés :

? Projet d'établissement de l'EEAP, 2010

? Etude commanditée par le CLAPEAHA, Recherche-action nationale : Les situations de handicap complexe, Île-de-France, 2013

? Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, la connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 124, page 127, page 362, 671, page 1039

? ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe : besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 38, page 46, page 48 consulté sur http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756

? BETTELHEIM Bruno, CARLIER Théo, Psychanalyse des contes de fées, Éditions Robert Laffont, Paris, 2016, page 19, page 20

Revues

? WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi : l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 25, page 26

? VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activités groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 60, page 61, page 64

Webographie

? https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs

? https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/Origines

? Interagir, dans le dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/interagir/43600

? Participer, dans le dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/participer/58375

? Prendre part à, dans le dictionnaire linternaute en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/prendre-part-a/

Audio-Visuels

? Alliance VITA, Comment accompagner une personne gravement handicapée ? [Youtube], 2017, consulté sur le lien https://www.youtube.com/watch?v=ME5bexStCCw&t=219s

Glossaire des sigles

? EEAP : établissement pour enfants et adolescents polyhandicapés

? ESS : équipe de suivi de scolarisation

? CDAPH : Commission Départementale pour l'Autonomie des Personnes Handicapées

* 1 Dispositif permettant d'apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique aux majeurs âgés de moins de 21 ans confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre.

* 2 WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 25

* 3 https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs

* 4 https://www.croix-rouge.fr/La-Croix-Rouge/Un-mouvement-international/7-principes-fondateurs

* 5 Méthode de relaxation par la stimulation sensorielle

* 6 Atelier proposant divers jeux ou activités afin de travailler le développement sensoriel, moteur psycho-affectif et/ou social d'un enfant

* 7 Il s'agit d'une piscine adaptée au handicap et sécurisée pour travailler la motricité, le tonus musculaire et apporter un moment de détente aux personnes accompagnées

* 8 http://www.lesouriredalexis.com/pages/l-arthrodese.html

* 9 DALLA PIAZZA Serge, GODFROID Bénédicte, La personne polyhandicapée: son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 17

* 10 Utilisation d'images représentant des objets, personnes connues de la personne dans le but de communiquer.

* 11 VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 60

* 12 VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 64

* 13 Dalla Piazza, S., Godfroid, B., La personne polyhandicapée: son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 29

* 14 WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée

* 15 Cité par VISSCHER Cécile, TORAS Pere, dans Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 60

* 16 VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 64

* 17 VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010 page 61

* 18 Dalla Piazza, S., Godfroid, B., La personne polyhandicapée: son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 112

* 19 Interagir, dans le dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/interagir/43600

* 20 Participer, dans le dictionnaire Larousse en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/participer/58375

* 21 Prendre part à, dans le dictionnaire linternaute en ligne, consulté le 14 décembre 2019 sur https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/prendre-part-a/

* 22 WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 26

* 23 WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée, page 26

* 24 DALLA PIAZZA Serge, GODFROID Bénédicte, La personne polyhandicapée: son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 117

* 25 ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe: besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 46, consulté sur http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756

* 26 ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe: besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 48, consulté sur http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756

* 27 ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe: besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 38, consulté sur h ttp://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756

* 28 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 127

* 29 VISSCHER Cécile, TORAS Pere, Activité groupales et découverte du corps avec des enfants polyhandicapés, dans une crèche spécialisée, La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, n°50, 2010, page 64

* 30 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 362

* 31Dalla Piazza, S., Godfroid, B., La personne polyhandicapée: son évaluation et son suivi, De Boeck, Bruxelles, 2010, page 119

* 32 WOLF Danièle, Polyhandicap, le nouveau défi: l'accompagnement éducatif des adultes, Revue suisse de pédagogie spécialisée

* 33 JUZEAU Dominique, VALLEE Louis, TISSERAND Pierre, et PERNES Philippe, Vivre et grandir polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010, page 21

* 34 JUZEAU Dominique, VALLEE Louis, TISSERAND Pierre, et PERNES Philippe, Vivre et grandir polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010, page 91

* 35 C'est l'histoire d'un loup garou qui vivait dans une grotte au milieu d'une forêt. Un beau jour, une fille vint en aide au roi qui souhaitait se débarrasser du loup garou. Celle-ci usa de sa bonne humeur pour provoquer une transformation de ce dernier.

* 36 BETTELHEIM Bruno, CARLIER Théo, Psychanalyse des contes de fées, Éditions Robert Laffont, Paris, 2016, page 19

* 37 BETTELHEIM Bruno, CARLIER Théo, Psychanalyse des contes de fées, Éditions Robert Laffont, Paris, 2016, page 20

* 38 JUZEAU Dominique, Louis Vallée, Pierre Tisserand, et Philippe Pernes, Vivre et grandir polyhandicapé, Dunod, Paris, 2010 page 46

* 39 ASENCIO Anne-Marie, FIACRE Patricia, PEINTRE Carole, Les situations de handicap complexe: besoins, attentes et modes d'accompagnement des personnes avec altération des capacités de décision et d'action dans les actes essentiels de la vie quotidienne, CEDIA-CREAHI, Paris, 2013, page 49 consulté sur http://www.cedias.org/index.php?lvl=notice_display&id=78756

* 40 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 120

* 41 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 127

* 42 Paurel Véronique, L'enfant polyhandicapé douloureux face à ses soignants, [Thèse], Poitiers, 2009

* 43 Citation de Korf Sausse, cité par Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 1039

* 44 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 361

* 45 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 361

* 46 PAUTREL Véronique, L'enfant polyhandicapé douloureux face à ses soignants, [Thèse], 2009, Poitier, page 256, consulté sur http://nuxeo.edel.univ-poitiers.fr/nuxeo/site/esupversions/a48f6e65-9575-479c-aa1d-2efff494de2d

* 47 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 370

* 48 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 370

* 49Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 124

* 50 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 371

* 51 Alliance VITA, Comment accompagner une personne gravement handicapée ? [Youtube], 2017, consulté sur le lien https://www.youtube.com/watch?v=ME5bexStCCw&t=219s

* 52 Camberlein Philippe, Gérard Ponsot, La personne polyhandicapée, La connaître, l'accompagner, la soigner, Paris, Dunod, 2017, page 362






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