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Le temps dans la justice pénale au Togo.


par Solim Aimée SONDOU
Institut des hautes études des relations internationales et stratégiques - Master II en Droit Privé Fondamental 2018
  

Disponible en mode multipage

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MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR

ET DE LA RECHERCHE

 

REPUBLIQUE TOGOLAISE
Travail - Liberté - Patrie

INSTITUT DES HAUTES ETUDES
DES RELATIONS INTERNATIONALES
ET STRATEGIQUES (IHERIS)

AU COEUR DES DEFIS DE DEMAIN

ADVANCED STUDIES

IN INTERNATIONAL RELATIONS
AND STRATEGICAL INSTITUTE

QUES (IHERIS)

LICENCE EN DROIT ET SCIENCES POLITIQUES-SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION

MASTER : DROIT - DIPLOMATIE - MARKETING INTERNATIONAL - BANQUE-MONNAIE-FINANCE INTERNATIONALES
Agrément Ministériel : ARRETE N° 014 / MESR / SG du 1er juin 2011

MEMOIRE

De fin de formation en vue de l'obtention
du Diplôme de Master en Droit Privé Fondamental

OPTION : RECHERCHE

Thème :

LE TEMPS DANS LA JUSTICE PENALE AU TOGO

ANNEE ACADEMIQUE

2018 - 2019

Présentée et soutenue publiquement par : Directeur de Mémoire

Solim Aimée SONDOU Professeur Komi WOLOU

Agrégé des Facultés de droits

Président du Conseil Académique de IHERIS, Directeur de l'Ecole doctorale de la Faculté de Droit de l'Université de Lomé

REMERCIEMENTS

Tout d'abord, je tiens à remercier le bon Dieu, le tout puissant et miséricordieux, pour m'avoir donné la force et le courage de mener à bien ce modeste travail. Egalement je remercie mes parents, qui m'ont encouragé et aidé à arriver à ce stade de ma formation.

Je tiens à remercier très chaleureusement, Monsieur Komi WOLOU, qui m'a permis de bénéficier de son encadrement. Ses conseils et sa patience ont été déterminants dans la réalisation de ce travail.

Mes remerciements s'étendent également aux membres du jury pour l'intérêt qu'ils ont porté à mes recherches en acceptant d'examiner ce travail et de l'enrichir par leurs propositions.

Enfin, je tiens à remercier tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à la réalisation de ce travail.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. I

DEDICACE

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. II

Je dédie ce modeste travail :

A mes chers parents avec tout mon amour.

A mon père.

Aucun hommage ne pourrait être à la hauteur de tes sacrifices et de ton dévouement. Tu as

toujours été à mes côtés pour me soutenir et m'épauler. Que de ce mémoire, tu puisses trouver

le fruit de tes efforts.

A ma chère mère.

Tous les mots ne pourraient témoigner de ma gratitude, aussi je te dédie ce mémoire comme

le fruit de ton dévouement et l'expression de mon profond amour.

A mon frère Kévin.

Je te remercie pour ton soutien continu. Puisses-tu trouver dans ce travail le témoin de mon amour et de mon affection.

A mes soeurs Mauricia, Bernice et Faustine.

Vous avez rempli mes moments de joie et de bonheur. Je vous souhaite tout ce qu'il y a de meilleurs en cette vie.

A mon Oncle David

Trouve en ce travail, le fruit de ton soutien infaillible. Je souhaite santé et prospérité à toi et à ta petite famille.

A Isidore avec tout mon amour

Je te remercie pour ton soutien inconditionnel durant ces moments. Garde toujours le sourire comme tu sais si bien le faire. Je te souhaite le succès dans tous tes projets.

A mon garçon chéri

Je te remercie pour avoir été gentil et patient durant mes moments d'études. Ta présence m'apportait joie et bonheur. Que Dieu te protège et te procure santé et longue vie.

A Tous mes amis et Tous ceux qui m'estiment.

ABREVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. III

Art. Article

§. Paragraphe

Cass.req., Chambre des Requête

Cass. Crim Cassation Criminelle

CE Conseil d'Etat

CESDHLF Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des

Libertés Fondamentales

CEDH Convention Européenne des Droit de l'Homme

CADHP Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples

CPF Code Pénal de la France

CPT Code Pénal du Togo

CPPF Code de Procédure Pénale de la France

CPPS Code de Procédure Pénale du Sénégal

CPPT Code de Procédure Pénale du Togo

CROP Centre de Recherche et de Sondage d'Opinion

Dr. Droit

Ed. Edition

Ibidem Au même endroit dans l'ouvrage déjà cité

Idem La même chose

Numéro

Op cit, Abréviation du latin operecitato : tiré de l'ouvrage cité

P. Page

Pén. Pénal

PIDCP Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

Rev. Revue

RFAP Revue Française d'Administration Publique

SOMMAIRE

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. IV

INTRODUCTION ..01

PREMIERE PARTIE : L'INEFFICACITE DU TEMPS DANS LA JUSTICE PENALE

TOGOLAISE .

11

CHAPITRE PREMIER : LA LENTEUR DE LA JUSTICE PENALE TOGOLAISE

...14

Section I : Les obstacles de droit à la célérité de la justice pénale

...15

Section II : Les obstacles de fait à un jugement pénal dans un délai raisonnable

23

CHAPITRE II : L'OBSOLESCENCE DES REGLES DE LA PRESCRIPTION EN DROIT

PENAL TOGOLAIS 37

Section I : L'insuffisante réglementation de la prescription de l'action publique en

droit pénal togolais 38

Section II : L'insuffisante réglementation de la prescription des peines en droit pénal

togolais 45

PARTIE II : LE JUSTE TEMPS POUR UNE JUSTICE REPRESSIVE EFFICACE AU

TOGO ..53

CHAPITRE PREMIER : L'AMENAGEMENT DU TEMPS POUR LE TRAITEMENT DES

AFFAIRES PENALES DANS UN DELAI RAISONNABLE .56

Section I : Les exigences légales de la tenue du procès pénal dans un délai

raisonnable 57

Section II : L'implication des acteurs au procès pénal pour des décisions dans le délai

raisonnable 66

CHAPITRE II : LA NECESSITE DE REFORMER LA PRESCRIPTION EN MATIERE

PENALE AU TOGO ..77

Section I : Une réforme plus efficace de la prescription de l'action publique en droit

pénal togolais 78

Section II : Une réforme plus efficace de la prescription des peines en droit pénal

togolais 86

CONCLUSION GENERALE . 93

INTRODUCTION

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 1

Pour tout Homme de tous les temps de l'histoire, la quête de la justice, ce mot, fort de symboles est un idéal fondamental pour la vie sociale et est une aspiration profonde. Le concept de justice « est alternativement tiré du côté du bon et du côté du légal »1, du côté de la justice morale et de la justice légale. La justice perçue du point de vue du droit se distribue en trois registres à savoir : la justice commutative, la justice distributive et la justice rétributive ou pénale. La justice commutative est un « système crée par Aristote qui règle les échanges entre les individus conformément au principe de l'égalité arithmétique. Ainsi une personne doit recevoir l'équivalent de ce qu'il donne »2. La justice distributive est un « système crée par Aristote qui règle la distribution des richesse ou des honneurs selon le mérite donc dans la proportion géométrique »3. La justice rétributive est une « justice qui récompense ou châtie selon la valeur des actes, sans tenir compte des circonstances »4. La justice rétributive incarne une triple aspiration. D'abord, la victime de l'infraction doit être considérée par la justice et non abandonnée. C'est ainsi qu'elle souhaite légitimement être entendue, dans sa volonté de voir punir le coupable afin de pouvoir obtenir réparation du préjudice à elle subi. Ensuite, le prévenu doit être protégé par la justice, laquelle ne doit pas le laisser de manière indéterminée, dans l'incertitude de son sort5 puisqu'il attend de la justice à être innocenté. Enfin, la justice doit être effective ; telle est l'aspiration de la société. Ces différentes aspirations ne peuvent se concrétiser que si le procès pénal se tient dans le respect du délai raisonnable. La plupart des systèmes juridiques au monde tentent de répondre à cette exigence. Même si la justice togolaise s'est inscrite dans cette dynamique, elle reste désavantagée par plusieurs obstacles, ce qui explique sa lenteur.

Ainsi, « L`amour de la justice n`est pour la plupart des hommes que la crainte de souffrir de l`injustice »6. En effet, tout citoyen se rend compte à présent que l'état de la justice pénale est devenu déplorable au Togo en raison de sa lenteur excessive. Selon le Professeur André VITU, « de même que la vie des hommes, de leur naissance à leur mort, s'inscrit dans la durée, le droit est lui-même assujetti à la loi draconienne du temps » et d'après lui, « plus que les autres branches de la science juridique, la procédure en subit la marque puisqu'elle est successions d'actes ordonnés en vue d'un but précis : la décision de justice »7. Au regard de

1RICOEUR (P.), « Le juste entre le légal et le bon », in Lectures 1, Autour du politique, Paris, 1991, p. 178.

2www.linternaute.fr Dictionnaire, consulté le 10 avril 2019.

3www.linternaute.fr Dictionnaire, consulté le 10 avril 2019.

4www.cnrt.frdéfinitionrétributif,

5CEDH, Stögmüller c. Autriche, 10 novembre 1969, Série A, n° 10, § 9.

6 La ROCHEFOUCAULD, Réflexions ou sentences et maximes morales. L`Harmattan, 1989, p.56.

7 VITU (A.), Les délais des voies de recours en matière pénale, Mélanges Chavanne, 1990, p.179.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 2

ce qui précède et afin de mieux cerner l'enjeu, nous orienterons notre réflexion sur l'épineuse problématique du « temps dans la justice pénale au Togo ».

Etymologiquement, « le mot temps provient du latin « tempus », de la même racine que le grec ancienôåìíå?í (temnein), couper, qui fait référence à une division du flot du temps en éléments finis. temples (templum) dérive également de cette racine et en est la correspondance spatiale (le templum initial est la division de l'espace du ciel ou du sol en secteurs par les augures). Le mot « atome » (« insécable »), du grec ?ôïìïò (atomos) (non coupé, indivisible) dérive également de la même racine »8. Historiquement, le temps est subdivisé en trois périodes : le passé, le présent et le futur.

Du point de vue de la doctrine, le temps apparaît comme une notion difficile à définir. En effet, déjà, à la fin du IVème siècle de notre ère, Saint Augustin a eu le mérite de reconnaitre cette difficulté en s'interrogeant ainsi : « Qu'est-ce donc que le temps ? Si personne ne me le demande je le sais ; mais si on me le demande et que je veuille l'expliquer, je ne le sais plus »9. Nietzsche dira du temps présent: « L'instant : il était là, et hop, le voilà parti ; un néant le précède, un néant lui succède »10. Le Doyen Carbonnier parlait quant à lui de l' « abîme du temps »11 tandis que, le Professeur MALAURIE qualifie l'expression à la fois de forte et d'ambiguë, l'« abîme » du Doyen Carbonnier serait le lieu de tous les possibles empruntes d'angoisse et d'espérance12.

Par ailleurs, le Grand Robert recense douze sens au mot « temps » et en donne une définition générale comme un « milieu indéfini où paraissent se dérouler irréversiblement les existences dans leur changement, les évènements et les phénomènes dans leur succession »13. Le temps est donc le milieu indéfini où semble s'ordonner la succession irréversible des phénomènes et des évènements14.

Relativement à l'expression américaine « Time is money», le temps judiciaire15 est une préoccupation majeure. En effet, il est constant que dans la société togolaise comme ailleurs,

8Www.wikipédia.org/wiki/ « Temps », consulté le 28 février 2019.

9 SAINT AUGUSTIN, Confessions, Garnier Flammarion, 1964, Livre XI, 14.

10 DUGAIN (M.), LABBE (C.), L'homme nu, La dictature invisible du numérique, éd. Robert Laffont, 2016, p. 108.

11 CARBONNIER (C.), Flexible droit, Pour une sociologie du droit sans rigueur, LGDJ, 10ème ed., 2001, Chap. II, « Les temps du droit - Un an et un siècle », p.210.

12 MALAURIE (P.), Rapport de synthèse, in Le temps et le droit. Actes du colloque organisé par le Groupe de recherche en droit fondamental, international et comparé (GREDFIC) à la faculté des affaires internationales du Havre les 14 et 15 mai 2008, Litec, 2011, p.107 et s.

13 P.ROBERT, Le Grand Robert de la langue française - Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 2ème ed. par A. REY, 1985, v°« Temps », I. L'ouvrage distingue cette acception du temps avec l'acception météorologique. Dans la première acception, il est distingué selon que ce milieu est considéré dans sa durée (chronométrie), dans sa succession (chronologie) ou dans sa nature (la notion de temps).

14 Dictionnaire Universel, édition Hachette 2008, p.1228.

15GERARD (P.), OST (F.) et VAN DE KERCGOVE (M.) (Dir.), « L'accélération du temps juridique », publication des facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 2000 ; WIEDERKEHR (G.), « L'accélération des procédures et les mesures provisoires », RIDC, 1998, pp. 449 et s.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 3

la pression économique confère au temps une valeur primordiale. Cependant, à l'heure de la concurrence des droits, les modes d'évaluation des systèmes judiciaires ont fait apparaître la justice pénale togolaise comme lente et inefficace16. Cette lenteur est également observée dans d'autres systèmes judicaires. Ainsi, Alexis MIHMAN relevait dans sa thèse, que « le rythme des affaires civiles et pénales est une préoccupation de l'opinion publique et qu'il n'est pas satisfaisant aux yeux de cette dernière »17. Le temps judiciaire est une problématique qui est débattue fréquemment, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'institution judiciaire. Ces débats s'inscrivent souvent dans le cadre d'une réflexion générale, sur la qualité et l'efficacité de la justice18.

L'étymologie du mot « justice » est conforme à l'histoire du droit romain. Le droit romain, créateur de la première justice-institutionnelle de l'histoire est à l'origine linguistique du mot19. En latin, la justice se dit « justitia,ae » (écrit dans cette langue « iustitia »), nom féminin provenant de « justus » qui signifie « conforme au droit », ayant lui-même pour racine, « jus - juris » « le droit » au sens de permission, dans le domaine religieux20. Son étymon est parent avec le verbe « jurare », « jurer » qui désigne une parole sacrée, proclamée à haute voix. Proche, le mot « juge » renvoie au latin « judex » qui signifie « celui qui montre »21.

Selon le philosophe britannique John STUART MILL22, le terme « justice » est dérivé du verbe latin « jubere » - « ordonner, décréter » ; ce qui permet d'établir un lien entre l'ordre qui énonce le droit et le juste qui lui est conforme. La philosophie moderne porte intérêt aux origines religieuses du terme ; il aurait pour racine le sanskrit « ju », qui se retrouve dans des termes comme « jugum » (le « joug ») ou le verbe « jungere » (« joindre, unir »), notions où domine le sème du sacré23.

Pour Blaise PASCAL, la justice est avant tout un sentiment lié au sentiment de Dieu en le monde. Par ailleurs, il critique la possibilité de l'existence d'une justice universelle qui au contraire, est relative : « Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà »24 résume-t-il.

16WAMBUA (P.-M.) et LOGAN (C.), Le système judiciaire togolais entre l'inconfiance populaire et les perceptions de corruption ; Publication Afro Baromètre, Dépêche n°147, 2017.

17 MIHMAN (A.), Contribution à l'étude du temps dans la procédure pénale : pour une approche unitaire du temps de la réponse pénale, Thèse de doctorat en droit privé et science criminelle à l'Université Paris Sud 11-Faculté Jean Monnet le 02 avril 2007N°3, p.19.

18 MAGENDIE (J.-C.), « Célérité et qualité de la justice. La gestion du temps dans le procès. », rapport au Garde des Sceaux, 15 juin 2004, p.217.

19 Www.wikipédia.org/wiki/ « Justice », consulté le 30 février 2019.

20 Idem

21Oscar Bloch et WALTHER von Wartburg (dir.), « Justice », Dictionnaire étymologique de la langue française, PUF, coll. « Quadrige. Dicos poche », Paris, 2008. (ISBN 2130566219).

22 Idem

23 BLAY (M.), « Justice » (Dictionnaire des concepts philosophiques, p. 459 et 464)

24PASCAL (B.), Les Pensées, Paris, Bureau de la Bibliothèque Economique, 1670 : il insiste sur tous les éléments qui peuvent influencer les différents perceptions de la vérité selon l'homme.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 4

FRICERO estime que « le terme de justice peut être conçu comme recouvrant l`ensemble des institutions chargées de trancher, selon une procédure équitable, les litiges qui peuvent opposer des particuliers entre eux ou avec les autorités publiques »25. Tandis que selon CORNU, la justice consiste à rendre à chacun le sien et demander justice signifie « réclamer son dû, son droit »26. Jean-Jacques ROUSSEAU renchéri en définissant la justice comme « un lien nécessaire pour maintenir l`union des intérêts particuliers, lesquels sans lui retomberaient dans l`ancien isolement social ».

Il va de soi que la justice est un principe à la fois « philosophique, juridique et moral. C'est un fondement en vertu duquel les actions humaines doivent être sanctionnées ou récompensées en fonction de leur mérite au regard du droit, de la morale, de la vertu ou autres sources normatives de comportements »27. En réalité, la justice est une notion polysémique. Elle est d'abord perçue comme étant un idéal car, elle est assise sur des bases philosophiques dont le développement témoigne de l'évolution de la pensée et des systèmes. Ensuite, la justice est une norme parce qu'elle devient une réalité pratique qui est le droit et non plus philosophique comme dans la Rome antique. Enfin, la justice est une institution puisque par extension, elle est assimilée au pouvoir judiciaire (l'ensemble des tribunaux et magistrats qui jugent les infractions).

Du point de vue juridique, la justice est l'autorité administrative chargée de définir le droit positif, de faire appliquer les lois et de trancher les litiges. La justice désigne ce qui est juste. Rendre la justice consiste donc essentiellement à dire ce qui est légale en toute impartialité, loyauté et équité dans l'espèce concrète soumise au tribunal28. En conséquence, la justice est l'institution, le pouvoir, l'autorité judiciaire, ou l'ensemble des juridictions d'un pays donné qui permet de faire respecter les droits de chacun, en punissant tout particulièrement ceux qui ont mal agi dans la société.

La justice peut être civile, administrative ou pénale29. La justice civile est celle qui tranche les rapports entre particuliers tandis que la justice administrative a la vocation de trancher les conflits impliquant l'Etat. La justice pénale est quant à elle, l'autorité en charge de la sanction des infractions à l'ordre public et aux bonnes moeurs c'est-à dire qu'elle juge les personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction.

25 FRICERO (N.) Les Institutions Judiciaires, les principes fondamentaux de la justice ; les organes de la justice ; les acteurs de la justice ; Mémentos LMD, 2ème édition Lextenso année 2012, p.15.

26 CORNU (G.) Vocabulaire juridique 2011, association Henri Capitant, p.590. 27Www.wikipédia.org/wiki/ « Temps », le 30 février 2019.

28 Lexique des termes juridiques, édition Dalloz 2017-2018 25e édition, p, 1217-1218.

29 L'autorité en charge de la sanction des infractions à l'ordre public et aux bonnes moeurs.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 5

En droit togolais comme en droit français, la justice pénale n'échappe pas à l'emprise du temps puisque le procès pénal en est intrinsèquement lié30. Cette acception se justifie pleinement en droit français par les dispositions comme, la comparution immédiate, le traitement en temps réel des plaintes, les délais de la détention provisoire, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité31, l'enquête de police, la poursuite, l'instruction préparatoire et le jugement32 et la prescription en matière pénale. Ce sont autant de dispositions destinées à gérer le temps dans le procès pénal33.

La préoccupation du temps de la justice pénale est ancienne. En effet, les abus de cette justice ne datent pas d'aujourd'hui. Du temps colonial à l'indépendance du Togo jusqu'en 2019, la justice pénale est une institution qui éveille majoritairement chez les justiciables aussi bien nationaux34 qu'internationaux35, la défiance. Ceci dans la mesure où ils se plaignent constamment de sa lenteur mais aussi de son impuissance à répondre avec fermeté et efficacité aux problèmes sociaux et de sa dépendance accrue au pouvoir économique et surtout politique.

Selon ALIOUNE BADARA FALL, cette situation serait justifiée par le fait que « rien n'a été ménagé tout au long de la période coloniale et au début des indépendances, pour que les États africains soient dotés d'une justice moderne, avec des juges nantis de moyens matériels et de garanties statutaires suffisants pour dire le droit. Tout semblait alors aller dans le sens de l'institution d'un juge qui, tout en tenant compte des coutumes et mentalités des populations concernées, s'affirmerait comme un élément essentiel dans l'instauration de l'État de droit, au sens où cette expression est entendue dans les démocraties modernes »36.

L'actualité du sujet est frappante. En effet, cette problématique est d'une grande sensibilité, dans la mesure où le droit à un procès pénal dans le délai raisonnable constitue un enjeu majeur à tel enseigne que sa méconnaissance et son irrespect constant font perdurer la lenteur. Cette actualité révèle aussi l'obsolescence de la prescription en matière pénale. « Depuis 2005, la modernisation de la justice togolaise peine à devenir une réalité. Aujourd'hui, l'un

30 PONSEILLE (A) « La peine et le temps », Archives de politique criminelle 2007/1 (n° 29) ISBN : 9782233005229, Éditeur : Editions A. Pédone(article), p.1.

31 Art.495-7 et s. CPPF, issus de la loi n°2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

32 PRADEL (J.), Procédure pénale, 13eme éd, Ed.Cujas, 2006 ; STEFANI (G.), LEVASSEUR (G.) et BOULOC (B.), Procédure pénale, Dalloz, 20eme ed, 2006.

33 La gestion du temps dans le procès pénal fut le thème central d'un rapport au Garde des Sceaux : Jean-Claude MAGENDIE, Célérité et qualité de la justice, Paris : La Documentation Française, 2004, p.211.

34 Selon les conclusions d'une enquête initiée par le CROP en 2017, seul 37% ont confiance à la justice togolaise.

35Freedom House, 2016 ;Département d'Etat des Etats-Unis, 2015, « Les observateurs internationaux estiment que le système judicaire togolais est en proie à des difficultés du fait de l'influence politique de la présidence, dont la détention prolongée et sans jugement des adversaires politiques, et l'impunité dont jouissent les alliés politique », cité par WAMBUA (P.-M.) et LOGAN (C.), Le système judiciaire togolais entre l'inconfiance populaire et les perceptions de corruption ; Publication Afro Baromètre, Dépêche n°147, 2017.

36FALL (A.- B.), Le juge, le justiciable et les pouvoirs publics : pour une appréciation concrète de la place du juge dans les systèmes politiques en Afrique, Edition Bruxelles Bruyant 2000, p. 310.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 6

des symboles des difficultés que trainent cette justice est la lenteur des procédures. Descente dans les réalités. La justice togolaise a été souvent décriée, eu égard aux maux qu'elle traîne depuis des lustres. Entre des magistrats véreux, le manque d'outils techniques et des agents parfois peu qualifiés, les citoyens donnent assez moins de crédit à cette justice. En effet, en 2017, selon les conclusions d'une enquête initiée par le Centre de Recherche et de Sondage d'Opinions (CROP), partenaire d'Afro baromètre, seul 37% de togolais ont confiance aux tribunaux alors que 48% parlent de corruption. 48% se plaignent des longs délais; 44% déplorent la complexité du système et 39% pointent du doigt le manque de conseil ou d'assistance. Comme vous l'aurez constaté, les longs délais qui sont la conséquence de la lenteur des procédures découragent certains concitoyens à se tourner vers la justice même quand l'occasion les y contraint. Selon l'avis des spécialistes en la matière, la célérité (dans le respect des parties) est un impératif pour une justice moderne et efficace. Et pour cause, souhaiter que la justice soit bien rendue implique non seulement que la décision du juge soit juridiquement correcte mais aussi qu'elle intervienne dans un délai utile. Il suffit pourtant de lire certains arrêts des juridictions pour constater que la revendication d'une accélération du service public de la justice est devenue générale »37.

Il est intéressant de comparer la législation togolaise avec celle de la France en matière de temps dans la justice pénale afin de comprendre et de constater où se situe l'Etat togolais. Le constat amer qui se dégage est le retard du législateur togolais par rapport à son homologue français. En effet, le législateur n'a pas à l'heure actuelle référencé le droit au délai raisonnable dans son Code de procédure pénale. En matière de prescription de l'action publique, le législateur n'a ni allongé les délais ni prévu des délais dérogatoires. Son homologue français a pris le soin d'intégrer ces dispositions dans son Code de procédure pénale.

La justice s'exerce au nom d'un peuple dans le but d'assurer le respect des lois aussi bien nationales, régionales qu'internationales. Ce monopole est dévolu aux juges et leur permet de mettre en exergue la place de la justice afin de juger le niveau d'un Etat de droit.

Au Togo, la justice pénale a pour fonction de juger les infractions au Code pénal, qui sont de trois ordres : les contraventions, les délits et les crimes38. Trois juridictions assurent cette tâche : le tribunal de police, le tribunal correctionnel et la cour d'assise. Le juge pénal ne peut prononcer la sanction pénale que si le fait délictueux poursuivi est prévu et qualifié par la

37WWW. Info du pays La justice togolaise à Pas de Tortue, « la modernisation », consulté le 15 mars 2019. 38 Article 3 CPT.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 7

loi39. Telle est l'exigence de la formule latine qui exprime le principe de la légalité des délits et des peines : « Nullum Crimen, Nulla Poena Sine Lege ».

La justice pénale assurée par les juges répressifs ne les place pas au-dessus des lois. Et si les justiciables s'inquiètent des problèmes qui minent cette justice, c'est en partie à cause du traitement lent des dossiers40 ; ceci ne garantit pas le droit à un procès équitable dans un délai raisonnable41. Cette lenteur se ressent à plusieurs niveaux. D'abord, la garde à vue bien que règlementée dans le Code de procédure pénale par les articles 52 et suivants42, n'est pas respectée puisque que très souvent les Officiers de Police Judiciaire (OPJ) dépassent largement ce délai avant de déférer la personne mise en cause devant le procureur de la République. En droit pénal, cette exception au-delà des 48 heures devient souvent la règle, en violation de l'article 9 alinéa 4 du PIDCP43. Quel regard le ministère public, le législateur et plus précisément l'Etat portent-ils alors sur cet état de chose ? Ensuite, des personnes sont souvent arrêtées et détenues pendant des années sans jugement. Cette situation entraine l'engorgement des prisons. Enfin, l'indemnisation suite à des détentions préventives aboutissant à des acquittements n'est souvent pas à la hauteur du préjudice moral et social qui a été subi. Il se pose dès lors la question de l'utilité de la prolongation inutile des détentions préventives44. Il s'agit du temps dans la justice pénale togolaise.

Dans la justice pénale, le temps constitue l'un de ces problèmes majeurs qui défraient constamment la chronique et contribue à donner d'elle une image négative aussi bien à l'égard de la communauté nationale qu'internationale. Il est donc certain que la conduite de la justice pénale est irrémédiablement dépendante du temps. Vu l'importance du temps dans la justice pénale, il urge de se demander : quelle appréciation les juges togolais font-ils réellement de la notion du temps ? Le temps est un droit subjectif pour les justiciables et une obligation pour le juge. Mais, il y a lieu de reconnaitre que l'Etat en est le principal débiteur dans la mesure où il lui incombe de s'assurer que la justice soit rendue dans un délai raisonnable au risque de voir sa responsabilité engagée45.

Selon la Cour Européenne des droits de l'Homme, le délai de résolution d'un litige tient lieu de trois facteurs à savoir, la diligence plus ou moins grande du juge, le comportement des

39 Article 2 CPT.

40 Article 9 Paragraphe 3 du Pacte International relatif aux droits Civils et politique.

41Article 14 alinéa 3-c Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).

4248 heures, renouvelable une fois, exceptionnellement ce délai peut aller au-delà, jusqu'à 15 jours, lorsqu'il s'agit d'affaires complexes (drogues avec des ramifications étrangères).

43« Rapport sur le respect et la mise en oeuvre des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans l'administration de la justice au Togo », Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, décembre 2013, p.27.

44 Articles 112,113 et suivant du Code de Procédure Pénale du Togo (CPPT).

45 FRISON-ROCHE (M.-A.), « Les droits fondamentaux des justiciables au regard du temps dans la procédure », in J.-M. COULON et M.-A. FRISON-ROCHE (dir.), Le temps dans la procédure, coll. « Thèmes et commentaires », Dalloz, 1996, p.11s. ; DEGUERGUE (M.), « Les dysfonctionnements du service public de la justice », RFAP 2008/1 (n°125), p. 151.

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parties au procès et la complexité juridique du litige46. Dans la justice pénale, qui dispose réellement de la maitrise du temps ? En droit pénal, l'emprise des acteurs sur le temps du procès est-elle réellement effective ? Dans cette perspective, le temps peut-il revêtir une dimension aussi bien objective que subjective ?

Etant à la fois un critère de qualité de la justice et celui de l'évaluation du système judiciaire47, le temps est essentiellement consubstantiel à la procédure pénale comme à toute autre procédure48. Il est donc évident que le temps est un levier important dans la justice pénale. Le délai raisonnable d'exécution des décisions pénales est un indice au droit à un procès équitable. Malheureusement, la lenteur de la justice est une préoccupation que dénonce régulièrement les justiciables49 et certains juges50. En effet, cette lenteur a pour corollaires l'insuffisante célérité de la justice pénale, la lourdeur et la lenteur des procédures pénales. Elle révèle surtout le manque chronique de moyens matériels et humains, ce que la modernisation de la justice n'arrive toujours pas à résoudre.

Par ailleurs, la lenteur de la justice pénale constitue un obstacle à sa qualité et à son efficacité. C'est dans ce contexte que fleurissent les adages « le temps qui passe, c'est la vérité qui s'enfuit », « justice tardive équivaut à injustice » ou encore « justice delayed is justice denied »51. Il va de soi que la modernisation de la justice pénale entamée, a véritablement du mal à être effective. Comment peut-on dès lors établir un nécessaire équilibre entre les voies procédurales aux fins de parvenir à contenir efficacement la justice pénale dans le respect scrupuleux du délai raisonnable ? De même, pour une accélération de la justice pénale, quelles sont les mesures à prendre par le législateur national pour aboutir à des réponses pénales justes ? L'institution d'un délai raisonnable devient impérative pour éviter la lenteur dans l'exercice de la justice pénale.

Par ailleurs, le juge pénal avant de se pencher sur le traitement de l'affaire qui lui est confiée, a l'obligation de vérifier la possibilité de poursuivre l'acte délictueux. Le Code de Procédure Pénale a prévu des délais de prescription c'est-à-dire dix ans (10) pour les crimes, trois ans (03) pour les délits et un an (01) pour les contraventions dont l'écoulement entraine

46 CEDH, 24 octobre 1989, H. c/ France, RFDA 1990, p. 203, note O. DUGRIP et F. SUDRE, LPA 28 février 1990, p. 12, note L. RICHER.

47 MIHMAN (A.), « contribution à l'étude du temps dans la procédure pénale : pour une approche unitaire du temps de la réponse pénale », thèse pour le Doctorat en Droit privé et sciences criminelles à l'Université Paris Sud 11, 02-04-2007, p.16

48 VITU (A.), « les délais des recours des voies en matière pénale », in Mélanges offertes à Albert CHAVANNE : droit pénal, propriété industrielle, Litec, 1990, p. 179

49 WAMBUA (P.-M.) et LOGAN (C.), Le système judiciaire togolais entre l'inconfiance populaire et les perceptions de corruption ; Publication Afro Baromètre, Dépêche n°147, 2017.

50 Le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature du Togo monsieur Patrice Akakpovi GAMATO a reconnu en ces termes « lenteur, lenteur, c'est sous tous les cieux, la justice est lente » le 14 février 2016 au cours de l'émission Plateau de la Semaine « Hautes juridictions et facilitation de l'accès à la justice ».

51 SARR (N.), le délai raisonnable dans le procès pénal, mémoire de maitrise en science juridique à l'Université Gaston eryersaint-Loui 2007, p.4

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l'extinction de l'action publique et rend de ce fait toute poursuite impossible52. Mais, cette prescription ne peut-elle pas être considérée comme abusive dans la mesure où elle serait une entorse à la réponse pénale ? D'ailleurs, la prescription de l'action publique peut avoir pour conséquence non seulement l'absence de répression mais aussi la remise en cause de l'égalité devant la loi pénale. Dans cette perspective, la prescription peut être perçue comme un abandon par la justice pénale de ses devoirs ou le déni de la reconnaissance des victimes.

La prescription de l'action publique est la grande loi de l'oubli. Prévue par le Code pénal, la prescription de l'action publique, à l'aune des évolutions, peut être remise en cause, voire refusée et ce dans un double contexte à savoir : la nécessité de préserver le devoir de mémoire d'autant plus que la mémoire tend à supplanter l'oubli et la volonté d'assurer plus efficacement la répression. En effet, certains crimes ou délits ne peuvent pas passer tout simplement par pertes et profits du fait qu'on doit les oublier pour avancer. Des sanctions s'imposent pour décourager de potentiels criminels, auteurs ou complices d'infraction. C'est ce qui pousse certains penseurs53 à requérir une moindre indulgence envers les condamnés.

Le titulaire principal du droit de déclencher l'action publique est le ministère public. Ainsi, il n'est pas superfétatoire de rappeler qu'il est parfois bon que l'Etat poursuive dans le temps le délinquant si cela peut aider la victime à se décharger du poids qui pèse sur sa conscience. Une politique pénale répressive qui met à nu la carrière criminelle de l'individu permet aujourd'hui d'accroître l'efficacité de la répression. Pour pallier la prescription de l'action publique, le législateur ne doit-il pas songer à instaurer une procédure judicieuse et alternative à celle-ci ?

Après l'écoulement d'un temps, l'inexécution totale ou partielle de la décision de condamnation prononcée par le juge pénal, entraine son extinction. Il s'agit de la prescription de la peine. Cette situation actuelle du droit de la prescription des peines en droit pénal ne devient-elle pas une source de confusion et d'insécurité, à rebours de la vocation fondamentale du principe fondé justement sur la primauté de la sécurité ?

Parler du temps dans la justice pénale au Togo revient finalement à se demander si la justice pénale s'exécute dans le temps ? Quel temps faut-il pour le traitement des affaires pénales ?

Les réflexions que nous menons sur « le temps dans la justice pénale au Togo » présentent un intérêt certain et ce, sur les plans théorique et pratique.

52 Article 7 CPPT.

53 RENUCCI (J-F.), Infractions d'affaires et prescription de l'action publique, DALLOZ. 1997, Chronique.
P.23 :« Comment admettre l'oubli dès lors que la victime réclame réparation, même si cette demande est tardive ? » ; GARRAUD (R.), Traité théorique et pratique du droit pénal français, préc., T. II,§ 723, p.542.

Au plan théorique, cette étude met en exergue les lacunes de la législation dans sa quête d'une juridiction pénale qui s'inscrit véritablement dans le temps. Aussi, le législateur, voire les constituants, doivent prévoir des mécanismes permettant la distribution de la justice pénale dans un délai satisfaisant tous les intérêts en cause.

Au plan pratique, l'importance de cette problématique est évidente. En effet, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice pénale, la personne poursuivie, présumée innocente jusqu'à la condamnation définitive ou réputée telle, ne doit pas demeurer trop longtemps dans l'incertitude quant à l'issue des poursuites engagées contre elle. La victime ou ses ayants-cause, doivent avoir dans un délai optimal, la réparation du préjudice subi. Généralement, la société verra l'auteur de ces méfaits identifié, jugé et condamné. C'est à ce prix que la paix sociale pourra être rétablie.

Il est évident que dans la justice pénale, le temps constitue une préoccupation ininterrompue pour le policier, le gendarme, le parquetier, le magistrat instructeur ainsi qu'à la formation du jugement. Malheureusement, l'irrespect de ce temps demeure un frein à une bonne administration de la justice pénale togolaise (Première partie), et pour accélérer les procédures pénales afin de garantir une bonne répression des infractions au Code Pénal, il urge de réfléchir à instaurer le juste temps (Deuxième partie).

Première Partie : L'inefficacité du temps dans la justice pénale togolaise.

Deuxième Partie : Le juste temps pour une justice répressive efficace au Togo.

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PREMIERE PARTIE

L'INEFFICACITE DU TEMPS DANS LA JUSTICE

PENALE TOGOLAISE

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La commission d'une infraction pénale peut déboucher sur plusieurs issues. Soit l'action publique n'est pas déclenchée et est de ce fait prescrite après un certain temps. Soit l'action publique est mise en mouvement et le procès pénal parvient à un dénouement. Lorsque la sanction pénale n'est pas exécutée dans les délais, elle est prescrite. Dans tous les cas, tout se déroule sous le dictat du temps. Puisque, pour trouver un dénouement au procès pénal, le temps est mis en avant par les juges. Ainsi, ils usent des mois voire des années selon la complexité de l'affaire en cause. Le temps joue donc un rôle primordial dans la justice pénale togolaise. Malheureusement, le temps est perçu comme un facteur d'inefficacité de cette justice.

L'inefficacité est le fait de ne pas atteindre le résultat escompté. Le facteur est un élément qui participe à la réalisation de quelque chose. Ainsi, nous pouvons dire que la justice togolaise a véritablement du mal à cerner le temps.

Pourquoi le temps est-il considéré comme un facteur d'inefficacité de la justice pénale togolaise ?

Au Togo, la lenteur est l'un des défauts de la justice pénale. Dans ce système judiciaire, les entorses à la mise en oeuvre des standards du procès pénal équitable résultent essentiellement des textes législatifs ou règlementaires insuffisants ou imprécis, voire attentatoires aux libertés, et des comportements des acteurs du procès, méconnaissant les règles ou les appliquant de manière inappropriée. Ces situations entrainent la lenteur de la procédure pénale et rendent de ce fait la décision peu crédible. Dans cette perspective, la doctrine estime que « Justice rétive, justice fautive »54 et « le temps qui passe, c'est la vérité qui s'enfuit »55. En France par exemple, lors de la rentrée solennelle du TGI de Paris, le 12 janvier 2005, Jean-Claude MARIN, procureur de la République, insistait sur les « nécessaires équilibres entre les voies procédurales aux fins de parvenir à contenir le temps de la justice pénale dans le respect du délai raisonnable» et relevait « que la justice [était] aussi malade de son anachronisme et du caractère souvent historique de sa réponse aux agissements les plus graves, les plus complexes ou les plus systémiques »56.

Outre le manque de rapidité dans le déroulement du procès pénal, l'étude de la prescription en droit pénal, permet de projeter un double regard sur le temps et l'espace. En effet, le temps et l'espace illustrent parfaitement la prescription puisque, si l'espace reste domestiqué par l'homme et réglementé par la science des conflits des lois, l'homme n'a pourtant pas une

54KUTY (F.), Justice pénale et procès équitable, délai raisonnable - présomption d'innocence et autres droits spécifiques du prévenu, Volume 2, Larcier, Bruxelles, 2006, p 1.

55 LOCARD (E.), Traité de criminalité, tome VII, Desvignes Ed. Lyion 1940, p.282.

56 Cité dans Mission de recherche Droit et justice, Le(s) temps judiciaire(s), p.2.

véritable emprise sur le temps dont l'écoulement inexorable lui est tour à tour cruel et réparateur57.

Pour mieux cerner la problématique de l'inefficacité du temps dans la justice pénale togolaise, il urge de s'atteler au retard excessif qu'accuse la justice pénale (chapitre I) ainsi qu'aux problèmes que traversent la prescription en matière pénale (chapitre II).

Chapitre premier : La lenteur de la justice pénale togolaise.

Chapitre second : L'obsolescence des règles de la prescription en droit pénal togolais.

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57 FAUVARQUE-COSSON, (B.), « La prescription en droit international privé », édition Pedone, Paris 2005, p. 23.

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CHAPITRE I

LA LENTEUR DE LA JUSTICE PENALE TOGOLAISE

Au Togo, la confiance que les citoyens peuvent avoir dans le système judiciaire pénal est tributaire de l'idée qu'ils se font de la rapidité avec laquelle les dossiers sont traités par ce système judiciaire et de la mesure dans laquelle la procédure est conduite d'une façon qui garantisse la protection juridique de l'individu. Malheureusement, un sentiment de méfiance, de désaffection anime certains justiciables à l'égard de cette justice pénale58 à cause de sa lenteur qui est un phénomène aussi bien fréquent que préoccupant. En effet, face à la justice pénale togolaise, les plaideurs s'arment de patience inouïe dans l'attente du jugement, et l'obtention de la réparation.

La lenteur c'est ce qui manque de célérité ou de vivacité. C'est également le retard dans l'accomplissement ou le déroulement de quelque chose. Mais qu'est-ce qui explique réellement la lenteur de la justice pénale togolaise ?

Pendant longtemps, la justice pénale togolaise s'est voulue hors du temps, détachée des évènements, sous prétexte de prendre le recul nécessaire pour juger sereinement les dossiers. Aujourd'hui, le recul d'autrefois est devenu aux yeux des uns et des autres une perte de temps, d'où une modification progressive mais radicale des cultures professionnelles. En même temps, la stagnation du nombre de magistrats, à certaines époques, a maintenu de longs délais de traitement des dossiers, en termes de mois mais aussi d'années59 entrainant l'arriéré judiciaire60.

La crédibilité du juge togolais est sérieusement remise en cause. Il demeure à l'instar de certains de ses collègues africains dans sa « fonction pratiquement nulle » que Montesquieu avait assigné jadis au juge français qui semble en sortir définitivement « grâce à la hardiesse et à l'opiniâtreté avec lesquelles il procède à la moralisation de la vie politique (par des mises en examen successives d'hommes politiques de tous bords) »61. Il est donc constant que le juge africain, et par là même la justice au Togo, est « en panne »62. Ce constat n'est pas récent puisque depuis longtemps, de nombreux observateurs avertis l'ont établi par le biais de

58 Selon les conclusions d'une enquête initiée par le CROP en 2017, seul 37% ont confiance à la justice togolaise. 59BASTARD (B.), DELVAUX (D), MOUHANNA (C.) et SCHOENAERS (F.), Justice ou précipitation, L'accélération du temps dans les tribunaux, Ed Presses Universitaires de Rennes, 21 Janvier 2017.

60 Tant qu'un litige n'est pas tranché, il encombre évidemment les rôles et empêche que les autres le soient aussi.

61 FALL (A.- B.), Le juge, le justiciable et les pouvoirs publics : pour une appréciation concrète de la place du juge dans les systèmes politiques en Afrique, Edition Bruxelles Bruyant 2000, p. 310.

62 MOUTÉKÉ (MM. R.) et LOCKO, (I.), « Protection des droits et des magistrats au Congo. Pathologie d'une justice exsangue »; dans Droits de l'homme en Afrique centrale, colloque de Yaounde, 9-11 novembre 1994, éd. Ucac-Karthala, 1996, p. 169), dresse un constat pathétique, mais assez objectif de la situation de la justice au Congo. Une situation que connaît, hélas, la grande majorité des États africains.

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remarquables études63, afin de découvrir les causes et de tenter de trouver des remèdes à ce phénomène.

La lenteur de la justice pénale qui est la violation du droit d'être jugé dans un délai raisonnable découle souvent de l'inutile complexité des procédures judiciaires, du manque de moyens et de la « culture de la lenteur64 ». Il est évident que les causes de cette lenteur, constituent des facteurs d'injustice d'autant plus qu'on généralise le sentiment d'impunité en ne réglant pas à temps les problèmes posés.

L'observation, l'organisation, le fonctionnement du droit pénal et certaines réalités du pays, permettent de constater que le respect et la mise en oeuvre du droit au délai raisonnable dans l'administration de la justice pénale ne sont pas totalement effectifs. Les raisons sont diverses. A travers une observation attentive, ces difficultés doivent être liées d'une part, aux obstacles de droit à la célérité de la justice pénale (Section I) et aux obstacles de fait à un jugement pénal dans un délai raisonnable (Section II) d'autre part.

Section I : Les obstacles de droit à la célérité de la justice pénale togolaise

Les difficultés légales à la célérité de la justice pénale, sont liées aussi bien à l'exclusion de la notion du délai raisonnable par le droit pénal (§.1), qu'à l'inadéquation des règles de procédures (§.2).

§.1- L'exclusion de la notion du délai raisonnable par le droit pénal togolais

L'une des garanties d'un bon procès pénal est sa tenue dans un délai raisonnable. Cependant, même si certaines dispositions existantes65 font croire à la notion du délai raisonnable, le constat nous révèle que le législateur national n'a pas référencé la notion de délai raisonnable (A) et n'a pas non plus daigné assurer une protection pénale efficace du droit au délai raisonnable (B).

A- L'absence de référence de la notion de délai raisonnable en droit pénal togolais Le délai raisonnable est une notion juridique d'inspiration anglo-saxonne66. Il est inclut à l'article 6§1 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CESDHLF)67. Selon cette convention, le jugement des affaires

63 V. En particulier, les analyses faites sur la justice en Afrique, dans Afrique contemporaine, numéro spécial, 1990 et l'importante bibliographie citée à la page 293; v. également les articles publiés dans l'ouvrage de l'Aupelf-Uref, L'effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone ; Colloque international des 29 et 30 septembre et 1er-10-1993 à Port-Louis (République de Maurice), 1994; Le juge : une figure d'autorité, Actes du premier colloque organisé par l'Association Française d'Anthropologie du Droit, (A.P.A.D.),Paris, 24-25-26 novembre 1994, ed L'Harmattan, 1996; Les Cours Suprêmes en Afrique, tome 2, Economica, 1989; Encyclopédie Juridique de l'Afrique, tome V, NEA, Dakar, 1982.

64 LEHMAN (H.), Justice, Une lenteur coupable, Presses universitaires de France, Paris, 2002. 65Art 52 CPT : Garde à vue et art 112 CPT détention préventive.

66Www.wikipédia.org/wiki/, « Délai raisonnable », consulté le 16 février 2019.

67 Ibidem

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civiles et pénales par les juridictions doit intervenir dans un « délai raisonnable » compte tenu du nombre des parties, des textes invoqués, des preuves à apporter et de la complexité de l'affaire68. Aussi, la détention des personnes qui attendent de passer en jugement ne doit pas être la règle. Dans ce même ordre d'idées l'article 5 §.3 de la C.E.D.H. édicte notamment « toute personne arrêtée ou détenue a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure ». Il s'agit de la reconnaissance du droit au délai raisonnable par les traités internationaux.

La notion de délai raisonnable est une notion difficile à définir. Le terme délai se rapporte à la durée et peut s'entendre comme le temps accordé pour faire une chose. Selon sa traduction littérale, le mot « raisonnable » qui est un adjectif équivaut à « ce qui est conforme au bon sens » ou « ce qui est conforme à la raison » ou encore« ce qui se tient dans une juste mesure ». Il exprime la durée de temps qui sépare deux instants.

L'obligation de respecter, de protéger et de mettre en oeuvre le droit au délai raisonnable devant les juridictions pénales est consacrée par plusieurs instruments internationaux ratifiés par le Togo. Il s'agit à titre indicatif, du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (PIDCP) qui prévoit en son article 9, §.3 que « Tout individu arrêté ou détenu du chef d'une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant le juge ou une autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré » ; de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) adoptée en 1981 qui dispose en son article 7 : «Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend : [...] le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale ». Ces deux instruments internationaux ratifiés par l'Etat togolais font partie intégrante de la Constitution de la IVème République du Togo de 1992 révisée par les lois de 2002 qui dispose en son article 19 alinéa 1erque « Toute personne a droit en toute matière à ce que sa cause soit entendue et tranchée équitablement dans un délai raisonnable par une juridiction indépendante et impartiale ». Cette disposition fait également partie intégrante du préambule de la constitution sénégalaise de 2002.

Malheureusement une analyse approfondie nous permet de constater que cette disposition du « droit au délai raisonnable » est absente aussi bien du Code pénal que du Code de procédure pénale. Cette absence, constitue la violation d'un des aspects fondamentaux de la garantie du droit à un procès équitable prévu par l'article 14 alinéa 3-c du PIDCP et a pour corollaire la persistance de la lenteur de la justice pénale togolaise. Elle constitue également une violation flagrante des instruments internationaux ratifiés par l'Etat togolais. Pourtant son homologue

68 Ibidem

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français, a introduit dans l'article préliminaire de son Code de Procédure Pénale un article qui dispose qu' « il doit être statué, définitivement sur l'accusation dont la personne fait l'objet dans un délai raisonnable ».69 Il en est de même du législateur marocain, qui a déterminé dans le préambule de son Code de procédure pénale, de nouveaux délais devant assurer la célérité des procédures judiciaires. Les législateurs français et marocain ont donc pris la mesure de la chose en incitant clairement au respect du délai raisonnable. Ce qui nous motive à émettre ces interrogations : pourquoi le législateur togolais a-t-il gardé un mutisme en l'espèce ? Pourquoi le législateur n'a-t-il pas référencé la notion du droit délai raisonnable dans le droit positif togolais ? Il faut dire que le législateur national ne reconnait pas le droit au délai raisonnable en droit pénal.

Le droit au délai raisonnable est un pilier d'une bonne justice, un des aspects fondamentaux de la garantie du droit à un procès équitable. Mais, Qu'est-ce que le droit au délai raisonnable ? Comment peut-on l'identifier ? Comment peut-on le mesurer ? Des interrogations difficiles à cerner aussi bien par les justiciables que par les autorités judiciaires, en raison de l'absence de la notion du délai raisonnable dans le droit pénal.

Toute justice doit être rendue dans de meilleurs délais. Lorsque le délai raisonnable n'est pas respecté, comme l'a souligné le Professeur Fabienne QUILLERE- MAJZOUB, il y a entorse aux impératifs du procès équitable70. C'est dans ce contexte que fleurissent ces adages louangeurs : « Le temps qui passe, c'est la vérité qui s'enfuit » ; « Justice delayed is justice denied » et selon Walter Savage LANDOR« une justice tardive est une injustice »71. Par ailleurs, EDEL affirme qu'une justice qui n'a pas la capacité de rendre ces décisions dans un délai raisonnable serait théorique et illusoire72. Dans ce contexte et eu égard à la lenteur dont fait fille la justice pénale togolaise, il faut dire qu'elle ne répond pas à l'impératif de sécurité juridique.

Le « délai raisonnable », n'est pas juridiquement définit par le législateur national. Pourtant, c'est une composante essentielle du procès équitable et est un véritable concept juridique, surtout en matière pénale où les libertés fondamentales du justiciable sont en jeu, grâce à l'émergence des droits de l'Homme internationalement reconnus73.

Le respect du délai raisonnable dans un procès pénal a pour but d'empêcher les effets néfastes de l'écoulement du temps. A l'antipode, l'allongement des délais pénaux à

69CPPF, article préliminaire, Edition : 13/09/2017, droit point org, Institut Français d'information Juridique, p.10

70 QUILLERE-MAJZOUB (F.) La défense du droit à un procès équitable, Bruylant, Bruxelles, 1999, p.319.

71 SIDIKI (K.), Les droits de l'homme au Sénégal, collection xaam sa yoon, pp 104 et suivants.

72EDEL (F.), La durée des procédures civiles et pénales dans la jurisprudence de la CEDH, Editions du Conseil de l'Europe, 1 juin 2006, p .6.

73 QUILLERE-MAJZOUB (F.), La défense du droit à un procès équitable, Bruylant, Bruxelles, 1999, p.319 note (9).

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d'importants corollaires à savoir : la disparition totale ou partielle des preuves, la perte de crédibilité des témoins, l'augmentation des frais de justice et l'erreur judiciaire74.

L'introduction du droit au délai raisonnable dans le droit pénal togolais sera destinée à renforcer l'unité de la législation pénale, systématiser et si possible simplifier les formalités administratives au niveau de la justice pénale. Ce qui permettra une meilleure gestion de l'administration judiciaire pénale.

N'ayant pas référencé le droit au délai raisonnable dans le code de procédure pénale, le législateur a donc implicitement manqué d'assurer une protection suffisante audit droit.

B- L'absence de protection du droit au délai raisonnable

La protection du droit au délai raisonnable devant la justice pénale est la prise de dispositions nécessaires, suffisantes et adéquates pour garantir l'effectivité du procès pénal dans le délai raisonnable. Au, Togo, la protection du droit au délai raisonnable fait défaut. En effet, les dispositions légales devant assurer le respect du droit au délai raisonnable n'ont pas été prises dans les Code pénal et de procédure pénale. Cette situation est de nature à favoriser la lenteur de la justice pénale.

Cette absence de protection du droit au délai raisonnable est donc contraire aux droits reconnus par l'article 19 de la constitution togolaise et porte atteinte à la dignité humaine. Si le droit au délai raisonnable est consacré par la loi fondamentale togolaise, la pratique en est toute autre. En effet le principe de la primauté des droits et surtout celui d'être jugé dans un délai raisonnable sont fréquemment enfreints au nom du maintien de l'ordre public et de l'existence de circonstances exceptionnelles. Selon Julius NYERERE« il est préférable que quelques innocents souffrent d'une détention temporaire plutôt qu'un seul traître puisse détruire la nation»75. Pour renchérir, feu Félix HOUPHOUËT-BOIGNY déclarait en 1963« Je préfère l'injustice au désordre : on peut mourir de désordre, on ne peut mourir d'injustice. Une injustice peut être réparée »76.

L'absence de protection du droit au délai raisonnable devant la justice pénale entraine des violations de cette garantie. Ces violations peuvent être relevées aussi bien au début qu'au cours de la procédure pénale. S'agissant du début de la procédure, il faut noter la garde à vue. Les délais initialement prévus par le Code de procédure pénale77 sont souvent l'exception

74 VERGES (J.), Les erreurs judiciaires, Presses Universitaires de France, Paris, 2002, p.126.

75 Revue de droit contemporaine, n° 2, 1964, p.9.

76 MADIOT (Y.), Droits de l'homme et libertés publiques, Edition Masson; cité par Gonidec, tome II, p 60

77Art. 52 du CPPT :« Si, pour les nécessités de l'enquête, l'officier de police judiciaire est amené à garder à sa disposition une ou plusieurs personnes contre lesquelles il existe des indices graves et concordants de nature à motiver leur inculpation, il ne peut les retenir plus de 48 heures. Le délai prévu à l'alinéa précédent peut être prolongé d'un nouveau délai de 48 heures par autorisation du Procureur de la République ou du Juge chargé du Ministère public ».

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dans la pratique. En effet, la personne poursuivie reste plusieurs jours en garde à vue sans la prise en compte de son cas par les autorités de poursuite. La violation du délai de la garde à vue peut se justifier par la mauvaise foi ou la méconnaissance du délai raisonnable par certains officiers de police judiciaire.

Au cours de la procédure, les violations s'observent au niveau de la tenue des audiences. La mise en oeuvre tardive des audiences de jugement, entraine la détention provisoire de la personne poursuivie pendant des durées excessives. Un rapport établi en 2012 par l'Inspection générale des services juridictionnels et pénitentiaires du Togo, a révélé que plus de 70% des détenus dans les prisons sont des détenus préventifs78. En 2016, un autre rapport sur les droits de l'Homme au Togo de United States Department of State, atteste que les personnes en détention provisoire et préventive, sont au nombre de 2 800 et représentaient 63 % de l'ensemble de la population carcérale79. Cette réalité est en phase avec le système juridique pénal ivoirien. Ainsi, « quelle que soit la qualité des magistrats, il va sans dire que dans un pays où l'essentiel des preuves recueillies consiste en des témoignages, il est particulièrement difficile de juger des criminels, 5 ou 10 ans après les faits, selon une procédure accusatoire : les témoins et les parties civiles se désintéressent des procès après tant de temps, ne peuvent plus être retrouvés ou ne se souviennent plus des faits avec précision. Dans ces conditions, la justice rendue ne peut qu'être approximative et les risques d'erreurs judiciaires sont énormes. Or, il s'agit de crimes dont les auteurs encourent les peines les plus sévères »80.

Par rapport à ce qui précède, les violations du délai raisonnable dans la pratique judiciaire pénale togolaise sont dues à l'absence de protection du droit au délai raisonnable.

Si le délai raisonnable a du mal à être effectif en droit pénal togolais, c'est en partie parce certaines règles de procédures en matière pénale ne sont pas adaptées à l'heure.

§.2- L'inadéquation des règles de procédures en matière pénale

Pour l'heure, on note une insuffisance des règles de procédure pénale avant et pendant le jugement (A) et l'absence de véritable sanction de la violation du délai raisonnable (B).

A- L'insuffisance des règles de procédure pénale avant et pendant le jugement

Les règles de procédure pénale sont l'ensemble des règles qui organisent le processus de répression d'une infraction. Elles font le lien entre l'infraction et la peine, par le biais de

78 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, op cit, p.26.

79 Rapport 2016 sur les droits de l'Homme-Togo, United States Department of State
· Bureau of Democracy, Human Rights and Labor p.5.

80 L'unité de l'Etat de droit (rule of law), ONUCI ; Etude d'évaluation du système judiciaire ivoirien, l'organisation et le fonctionnement du système judiciaire en Côte d'Ivoire ; Juin 2007.

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phases intermédiaires et nécessaires portant sur la constatation des infractions, le rassemblement des preuves, les poursuites et le jugement de l'autorité compétente.

Le législateur a prévu dans son Code de procédure pénale, des règles pour diligenter la procédure pénale. Cependant, ces règles sont insuffisantes puisqu'il existe d'autres règles telles le « plaider coupable », « le délai de rigueur » et la limitation du nombre de renvoi qui facilitent aussi la procédure pénale mais qui ne figurent pas parmi les règles prévues par le législateur. Il faut noter que l'absence de ces règles handicape sérieusement la célérité de la justice pénale.

D'abord, le « plaider coupable » : il est d'origine anglo-saxonne et a été introduit en procédure française sous le nom de « comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité » par la loi du 09 mars 2004. Cette règle est un mode de traitement des infractions qui consiste à l'issue d'une procédure alléguée, à proposer au prévenu une peine inférieure à celle encourue en échange de la reconnaissance de sa culpabilité. Initialement réservée au jugement de quelques petits délits, cette règle concerne depuis la loi du 13 décembre 2011 tous les délits. Toutefois elle n'est pas applicable à certains délits ou certaines accusations graves. En d'autres termes, elle n'est applicable qu'aux délits punis à titre principal d'une peine d'amende ou d'emprisonnement d'une durée égale ou inférieure à 5 ans81. Le « plaider coupable », est destiné à accélérer le cours de la justice pénale en organisant un traitement plus rapide d'un nombre important de délits.

Le « plaider coupable », est mentionné à l'article 93 du Code pénal82 mais ne fait pas encore partie intégrante du Code de procédure pénale. Pourtant, le législateur renvoie au Code de procédure pénale, les conditions d'application, la détermination des infractions, et les modalités du recours à cette procédure83. Il faut préciser que l'application du plaider coupable est courante dans les pays anglo-saxons, environ 90 fois sur 100 aux Etats-Unis84. Au niveau national par contre, l'application du plaider coupable se révèle difficile en raison de sa non actualisation dans le Code de procédure pénale par le législateur. En France, la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a été appliquée pour la première fois par la justice le 1er octobre 200485 et a acquis très tôt une notoriété dans la mesure où les premières

81 Article 455 CPPF.

82 « Le Procureur de la République peut, d'office ou à la demande du prévenu qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés, ou de son avocat, recourir à la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité ».

83 Article 94 CPT.

84 PRADEL (J.), Procédure pénale, Edition Cujas, 19e édition, 10-2017, p. 297.

85 DELAGE (P.J.), La Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité : quand la pratique ramène à la théorie, Dalloz 28 juillet 2005, n°29, pp. 1970-1973.

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statistiques attestent que deux tiers des juridictions pénales appliquent le « plaider coupable »86.

Ensuite, le délai de rigueur : cette règle n'est pas encore consacrée par le législateur togolais. Son homologue sénégalais dans la quête d'une justice pénale dans le délai optimal, a introduit le « délai de rigueur » en matière de détention provisoire à travers l'article 127 de son Code de procédure pénale87.

Enfin la limitation du nombre de renvoi : le législateur, a de même gardé silence par rapport à la limitation du nombre de renvoi. Ce n'est pas le cas du législateur sénégalais qui, dans sa volonté de proscrire des manoeuvres dilatoires dont fait souvent fi certains justiciables et leur conseil, a disposé à son article 385 de son Code de procédure pénale : « une affaire en état d'être jugée ne peut faire l'objet de trois renvois successifs pour quelque cause que ce soit ».

Relativement au silence du législateur togolais concernant ces nouvelles règles de procédure, il faut estimer que le Code de procédure pénale est dépassé. L'absence de véritable sanction de la violation du délai raisonnable entrave la bonne administration de la justice pénale.

B- L'absence de véritable sanction de la violation du délai raisonnable

Les procédures pénales sont soumises à un principe général de célérité qui implique le respect d'un délai raisonnable. Mais, la réalité en est tout autre. En effet, certaines personnes, partie ou non au procès pénal font recours à des manoeuvres dilatoires ou abusives à dessein dans le but de ralentir la procédure pénale. Il s'agit de la violation du délai raisonnable. Des questions s'imposent : Qu'est-ce qu'une procédure abusive ? Qu'est-ce qui constitue véritablement une procédure dilatoire ? Ces interrogations restent sans réponses car, le législateur ne les a pas prévues dans les Codes pénal et de procédure pénale.

La violation du délai raisonnable doit être sanctionnée afin de dissuader d'éventuels contrevenants. Sur ce, qu'il s'agisse d'un justiciable, de son conseil, des autorités politiques, administratives, parlementaires, judiciaires ou militaires, la rigueur de la loi pénale doit leur être appliquée. Le législateur n'a regrettablement pas prévu de sanctions pour la répression de la violation du délai raisonnable. Cette situation se relève à plusieurs niveaux.

D'abord, le législateur n'a pas prévu de sanctions pour réprimer l'interférence de l'Etat dans l'exercice du travail du juge alors que certains responsables politiques font obstruction à la justice pénale dans leurs intérêts. L'interférence dans le travail du juge constitue une atteinte à son indépendance.

86 ROUMIER (W.), Mise en oeuvre de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, Droit pénal, avril 2005.

87 CPP Sénégal.

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Ensuite, le législateur n'a pas non plus prévu de sanctions pour les justiciables et leurs conseils en cas de violation du délai raisonnable. Dans ce cas, dans quelle mesure la responsabilité pénale du justiciable ou de son avocat peut-elle être engagée ?

Enfin, il est à noter l'absence de dispositions pénales devant punir les juges complices de la lenteur de la justice pénale. Certes, le Code de déontologie dans lequel, sont envisagées des sanctions à l'encontre des magistrats véreux existe, mais il reste insuffisant. Par ailleurs, le Code pénal dispose en son article 506 : « les autorités politiques, administratives, parlementaires, judiciaires, militaires et les magistrats ou tous fonctionnaires détenteurs d'une parcelle de l'autorité publique qui se seront concertés pour influencer, détourner ou s'opposer à l'exécution des lois sont de ce seul fait punis d'une peine d'emprisonnement de six (06) mois à deux (02) ans et d'une amende de cent mille (100 000) à deux cent mille (200 000) francs CFA ou de l'une de ces deux peines ». Cette disposition ne constitue pas pour autant une sanction de la violation du délai raisonnable.

De la sanction découle la réparation du préjudice subi. Dans l'affaire des incendies des marchés de de Kara et de Lomé les 11 et 12 janvier 2013, il faut rappeler que certains citoyens ont été arrêtés et détenus en prison et relaxés six (6) ans après, sans procès. Aucune indemnisation ne leur a été versée en réparation du préjudice subi en raison de leur incarcération. Nombre de togolais ont à l'époque, porté un regard accusateur à l'encontre de l'Etat et estimé que les arrestations orchestrées contre ces citoyens n'étaient que politiques. Au regard de cette situation, la question à se poser est de savoir si la justice togolaise a dit le droit ? Quelle est la responsabilité de l'Etat dans cette affaire ? En tout état de cause, face à ce fléau, il est impératif, comme c'est le cas au Sénégal de trouver des voies et moyens pour l'accélération des procédures.

On assiste de plus en plus à la condamnation des Etats pour leur lenteur judiciaire. Dans cette perspective, le Professeur François CHEVALLIER disait que « la France est régulièrement condamnée à ce titre devant la Cour Européenne des droits de l'homme »88. A titre illustratif, un requérant a obtenu la condamnation de la France pour violation du délai raisonnable89. Ce qui a d'ailleurs valu à l'état français le qualificatif d'un des plus mauvais élèves en la matière. Au Togo par contre, les sanctions contre la violation du délai raisonnable sont quasi-inexistantes.

88 CHEVALIER (F.), « le droit au juge devant les juridictions administratives » in Joël RIDEAU, Le droit au juge dans l'union européenne, 1998, p. 186.

89Cass. Crim, 3 février 1993, n°92-83.443.

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En réprimant les entraves au bon fonctionnement de la justice90, le législateur national a omis de sanctionner en prévoyant des peines d'amendes et d'emprisonnement à l'encontre des auteurs de la lenteur de la justice pénale. L'absence de sanction de la violation du délai raisonnable constitue une véritable entorse à son respect. Cette lacune du droit pénal togolais est de nature à favoriser la violation permanente du délai raisonnable tout en occasionnant l'impunité dans un pays où la lenteur dicte inexorablement sa loi dans une justice ternie souvent par des maux dont elles souffrent.

Il résulte de tout ce qui précède que le délai raisonnable est un droit fondamental, un fondement d'une bonne justice. Toutefois, il connaît dans la pratique des violations qui constituent les obstacles de droit à la célérité de la justice. D'autres obstacles à savoir, les obstacles de fait endiguent considérablement l'exécution de la justice pénale dans un délai optimal.

Section II : Les obstacles de fait à un jugement pénal dans un délai raisonnable

En consacrant le droit au délai raisonnable à l'article 19 alinéa 1er de la constitution togolaise, il va s'en dire que le Togo dispose d'un environnement adéquat à l'épanouissement des droits de l'homme et confère par voie de conséquence la garantie à chaque citoyen, la faculté de saisir un tribunal et de faire trancher son litige dans un délai raisonnable. Malheureusement, la justice pénale a véritablement du mal à s'exécuter dans le délai raisonnable en raison des obstacles de fait qui lui sont aussi bien internes (§.1) qu'externes (§.2).

§.1- Les obstacles internes à l'effectivité de la justice pénale togolaise

La justice pénale, en l'occurrence le juge pénal a la haute mission de trancher les conflits en protégeant les intérêts en jeu contre leurs violations et contre tout arbitraire de la part des pouvoirs publics. Cette justice est cependant accusée de tous les maux mais aussi soupçonnée de partialité, de laxisme, de corruption, de négligence et même très souvent d'incompétence. Cette situation se justifie aussi bien par le manque de personnel judiciaire au pénal et par la mauvaise organisation de la justice pénale (A), que par le disfonctionnement lié aux personnels judiciaires et à leurs conditions de travail (B).

A- La carence en personnel judiciaire au pénal et la mauvaise organisation de la justice pénale

Au Togo, le secteur de la justice en général et du pénal en particulier souffre d'un manque chronique de ressources humaines, aussi bien sur le plan quantitatif que qualitatif. Ce manque favorise la lenteur excessive de la justice pénale.

90Article 515 CPT : « Constituent une entrave au bon fonctionnement de la justice : 1) le bris de scellés ; 2) la destruction, la dégradation, la soustraction de registres, d'éléments de preuve, d'actes ou autres documents publics ; 3) le refus de témoigner ; 4) le faux témoignage ; 5) le faux serment ; 6) la subornation de témoin ; 7) l'altération volontaire par un interprète de déclarations faites en justice ; 8) l'altération volontaire par un expert de résultats ou d'observations apportés en justice.

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Le personnel judicaire au pénal est composé essentiellement de magistrats, de greffiers et de secrétaires des greffes et parquets. Au Togo, la formation des magistrats, des greffiers et des secrétaires de parquet est dévolue au Centre de Formation des Professions de Justice (CFPJ)91, créé par la loi 2009 - 024 du 30 Octobre 2009. Ils doivent être en nombre suffisant afin de pouvoir accomplir leur mission avec efficacité. Mais, il est à noter une absence considérable du personnel judicaire au pénal. En effet, le système judiciaire togolais est, surchargé et en sous-effectif92. En effet, le Togo ne compte au total que deux cent quarante-huit (248) magistrats dont trente (30) femmes93 en fonction. S'agissant des magistrats il faut distinguer : les magistrats du siège, les magistrats du parquet, les juges d'instruction, juges des libertés et de la détention et des juges de l'application des peines.

La lenteur de la justice pénale togolaise se justifie en partie par l'insuffisance de ces magistrats aux différentes étapes du procès pénal. D'abord, le magistrat du siège chargé de dire le droit en rendant des décisions de justice dont le juge d'instruction94, est un magistrat du siège du tribunal de grande instance. Il intervient avant l'éventuel procès pénal en vue de réunir tous les éléments permettant de déterminer si les charges à l'encontre des personnes poursuivies sont suffisantes pour que celles-ci soient jugées. Il instruit donc à charge et à décharge. Ce qui justifie son rôle crucial dans le procès pénal. Mais un regard porté sur le nombre des magistrats au Togo révèle son étroite insuffisance.

Ensuite, le ministère public représenté par le Procureur de la République en personne ou par ses substituts près le Tribunal de première instance95, par le Procureur General en personne ou par ses substituts près la Cour d'Appel et auprès de la Cour d'Assises96 et par un juge chargé du Ministère public auprès d'un Tribunal de première instance exerce à effectif restreint97 l'action publique et requiert l'application de la loi98. Les juges doivent être en nombre suffisant vu leur importance dans le procès pénal. Malheureusement c'est à effectif réduit qu'ils travaillent.

Enfin, le juge de l'application des peines reste absent dans l'organisation judiciaire. Il s'agit d'un vide juridique qui a des conséquences sur la situation des détenus puisque, cela limite l'individualisation des peines et à terme, contribue à la surpopulation carcérale99. La mise en oeuvre des peines probatoires en milieu ouvert reste aussi paralysée. Il en est de même de

91 Il est érigé en service à compétence nationale dans le cadre du Programme National de Modernisation de la Justice. Il

relève du Président de la République avec délégation de tutelle administrative et technique au Ministère chargé de la Justice.

92Rapport 2016 sur les droits de l'Homme-Togo, opcit, p.6.

93 www.justice.tg, consulté le 04 avril 2019.

94Art. 39 CPPT

95Art. 31 CPPT

96Art. 26 CPPT

97Art. 35 CPPT

98Art. 22 CPPT

99 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Op cit, p.34.

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l'aménagement des peines d'emprisonnement de courte et de moyenne durée telles que le port de bracelet électronique, le chantier extérieur, la semi-liberté et la libération conditionnelle.

Le manque de magistrats dans le procès pénal a pour conséquence immédiate la surcharge administrative. En effet, si dans le Tribunal de Première Instance de Première Classe de Lomé et dans quelques rares juridictions de l'intérieur du pays, la formation est collégiale d'au moins trois magistrats, la plupart des juridictions de l'intérieure du Togo fonctionne à juge unique. Le juge unique cumule à lui seul les fonctions d'Officier de Police Judiciaire, de juge d'instruction, de juge du siège et parfois même de juge chargé du Ministère Public100, ceci en violation de la règle de la séparation du Parquet et du Siège. Cette confusion de rôle menace sérieusement l'indépendance de la justice pénale togolaise. Il est évident que cet état de chose est préjudiciable au bon fonctionnement de la justice pénale togolaise. Ceci dans la mesure où la tenue des audiences en la matière sont très rares et l'instruction des affaires pénales reste problématique.

Face à la permanente pénurie de magistrats et de greffiers due à d'importants départs la retraite, à des décès, à des désertions et des affectations des juridictions inférieures aux juridictions supérieures, on a du mal à expliquer le mutisme du gouvernement. Nul concours n'est organisé en vue de recruter et de former de nouveaux magistrats, greffiers et secrétaires de parquet pour combler un tant soit peu le grand vide judiciaire qui existe actuellement. D'ailleurs le dernier concours de la magistrature lancé depuis septembre 2014 qui devrait se tenir le 03 décembre 2014 n'a été relancé que le 15 février 2019 que pour vingt (20) postes pour la magistrature et trente et cinq (35) pour greffiers et secrétaire de parquet. On a l'impression que l'Etat est complice de la situation retardant l'organisation du concours. L'une des inquiétudes au sujet du concours de la magistrature au Togo est l'absence de garantie de sa totale transparence. Puisque, chaque recrutement des magistrats fait régulièrement resurgir des soupçons sur certains candidats qui auraient été admis en raison de leur appartenance ethnique ou au parti au pouvoir en place. Cette question soulève bien évidement le problème de la compétence effective desdits magistrats.

Quant aux greffiers, ce sont des fonctionnaires et des auxiliaires de justice. La justice pénale togolaise fait face à leur carence101 au regard du volume de travail à accomplir par ceux-ci. Le greffier en chef est la « mémoire » de la juridiction puisque, outre les fonctions d`administration, d'encadrement, de gestion et d'assistance au Président dans les actes de sa

100 Dans l'interview accordé par le Président du Tribunal de Troisième Classe de Tchamba dans le Reflets du Palais, N°50 du mois de février 2018 à la page 4, il relevait à juste titre par rapport à l'organisation et au fonctionnement de leur juridiction que « Nous somme le Président du Tribunal, nous exerçons à ce titre les attributions liées à cette charge, nous exerçons les fonctions du juges du siège (juger et instruire), le décret nous nommant dit que nous somme chargé des fonctions de juge des enfants et chargé du Ministère Public ».

101 www.justice.tg, consulté le 04 avril 2019 : Le Togo ne compte qu'environ 202 greffiers.

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juridiction, il veille à la bonne gestion du matériel, des locaux et des équipements dont il a la charge. Les greffiers sont sous l'autorité du Greffier en chef et ont la vocation d'assister les magistrats dans l'exécution de leurs missions. A titre indicatif, ils dressent et authentifient les actes de la procédure tout au long du déroulement du procès pénal, délivrent les casiers judiciaires. Souvent, un greffier peut assister deux voire trois magistrats. Avec le nombre important de dossier que doivent gérer les greffiers, on comprend dès lors le rôle qu'ils jouent dans la lenteur de la justice pénale.

L'absence du personnel judiciaire aux différents stades du procès pénal est une cause de la lenteur de la justice pénale. Ce qui fait que la quasi-totalité des juridictions et de Cours d'appel travaillent à effectif réduit. Dans ces conditions, comment peut-on trouver un « homme neuf » (expression du professeur Jean Carbonnier), afin qu'il assure l'impartialité, l'indépendance judiciaire et dans le même temps, tenir le procès pénal dans un délai raisonnable ?

Auxiliaires de justice, les avocats fournissent de nombreux services à la population. L'absence de Barreau auprès de la Cour d'Appel de Kara, handicape sérieusement l'accès à un avocat à l'intérieur du pays. Ce qui justifie d'ailleurs la concentration des cabinets uniquement à Lomé. Il se pose dès lors la question de l'effectivité de la décentralisation de la profession d'avocat à l'intérieur du Togo.

La mauvaise organisation de la justice pénale contribue à ralentir son efficacité. En effet, cela a une double justification. D'une part, l'absence de décentralisation de la justice pénale est l'une des causes de sa lenteur. Il existe que deux Cours d'Appel : celle de Lomé et celle de Kara. La première desserve les juridictions au Sud et la seconde les juridictions au Nord. Il est donc évident qu'il s'agit de la concentration judiciaire qui constitue un inconvénient majeur entraînant quasiment des lenteurs excessives constatées dans la justice pénale togolaise. Contrairement au Togo, l'état français à une Cour d'Appel par ville et souvent, la mention du nom de la ville induit la Cour d'Appel de ladite ville.

D'autre part, en prenant en compte les facteurs de croissance démographique, de développement économique du Togo, il faut relever que la carte judiciaire de la République togolaise est complètement dépassée. En principe, à chaque préfecture sa juridiction. Mais c'est avec consternation qu'on constate que des préfectures comme Kougnowou, Agoè sont sans juridiction. Ce qui fait que les détenus de ces préfectures sont convoyés dans d'autre prison civile. La lenteur de la justice pénale est également inhérente aux personnels judiciaires et à leurs conditions de travail.

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B. Le disfonctionnement lié aux personnels judiciaires et à leurs conditions de travail

Toutes les juridictions pénales sont confrontées au problème de la lenteur qui est partiellement due au disfonctionnement lié aux personnels judiciaires et à leurs conditions de travail.

S'agissant du disfonctionnement lié aux personnels judiciaires, il est question à titre principal des magistrats, et de leurs collaborateurs. Relativement aux magistrats, d'abord la lenteur de la justice pénale est souvent due à la non élucidation de certaines affaires. C'est précisément le cas de l'affaire de monsieur Atsutsè AGBOBLI (historien, politologue, journaliste, ancien ministre et président du MODENA, un parti politique de l'opposition), qui avait été retrouvé mort à la plage de Lomé102.

Ensuite, la rétention d'informations et le refus obstiné de certains Procureurs de la République de donner suite à des plaintes qui portent sur une même affaire. Il s'agit à titre illustratif du Procureur de la République près du Tribunal de Première Instance de Lomé Monsieur Essolisam POYODI qui refusent de donner suite aux nombreuses plaintes relatives aux mauvais traitements infligés à un paraplégique103.

En outre, certaines juridictions inférieures refusent d'exécuter les décisions rendues par les instances supérieures. En exemple, dans l'affaire AGBA Bertin, le juge du 4ème cabinet d'instruction s'est refusé d'exécuter la décision de la chambre judiciaire de la Cour suprême aux motifs que : «Attendu que la Cour suprême dans son arrêt en cassant partiellement l'arrêt de la Chambre d'Accusation a prononcé deux décisions qui revenaient au procureur Général d'appliquer : Procéder à la mise en liberté provisoire de l'inculpé Sow Bertin AGBA contre payement d'une caution de 150.000.000F CFA ; Auditionner et confronter les parties ; Qu'il apparaît indéniable que toute confrontation après que l'inculpé en détention ait été mis en liberté est inutile du fait des connivences et subornations susceptibles de se faire ; Que c'est pourquoi en toute logique le Procureur Général a fait retour au Juge d'instruction afin que ces actes indispensasbles soient pris avant toute libération ; Que le non accomplissement à ce jour de ces auditions et confrontations est le fait des conseils des personnes mise en cause qui, par des alchimies procédurales bloquent l'avancée de l'information »104.

Enfin, le refus de la justice d'exécuter un arrêt rendu par une juridiction communautaire. Il s'agit à titre indicatif de l'arrêt rendu par la Cour de Justice de la CEDEAO dans l'affaire d'escroquerie internationale. En effet, La Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO), saisit par les avocats de l'ancien ministre Pascal

102 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Op cit, p.32.

103 Abbé Faria, Liberté n°2871 du lundi 04 mars 2019.

104 Ordonnance de rejet de la demande de mise en liberté provisoire (28 septembre 2012), Juge d'instruction du 4ème cabinet du Tribunal de 1ère instance de Première Classe de Lomé.

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Akoussoulèlou BODJONA, avait le 24 avril 2015 rendu un arrêt qui a souligné le caractère « illégal de sa détention ». Elle a par ailleurs recommandé à la justice togolaise de procéder à la libération ou au jugement de M. Pascal BODJONA. Dans le prolongement de la même décision de justice, le Conseil des droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et Amnesty International avaient réitéré les recommandations de la Cour de justice sous régionale.

D'autre part, excepté le manque de magistrats, il faut noter que la lenteur est également imputable aux greffiers et des secrétaires de parquet. En effet, il est difficile d'obtenir des décisions rendues puisque très souvent, ceux-ci conditionnent la délivrance des copies de décision de justice à exécuter au versement de pourboires. Ce qui constitue en fait une corruption. Pourtant ils estiment que cela est dû à la pénurie du matériel de travail et de personnel judiciaire.

La lenteur de la justice pénale est due à un contrôle très insuffisant du personnel judicaire. En effet, peu de contrôle sont effectués dans le système judiciaire pénal togolais. Il s'agit du contrôle des magistrats, des greffiers et même de la police judiciaire. Le nombre très insuffisant des inspecteurs au Togo n'est pas de nature à rassurer. Ceci au regard de la quantité des tâches qui leur incombent.

Le non-respect des délais pénaux est un véritable obstacle à la célérité de la justice pénale. Le non-respect de la procédure d'instruction rend ladite procédure lourde et cause sa lenteur. Il en est ainsi du manque de diligence dans l'envoi des dossiers après la clôture de l'information et la prise de réquisitions écrites par le Procureur Général. La lenteur imputable au juge d'instruction procède des circonstances externes. En exemple, les dénonciations calomnieuses, l'absence de délivrance de mandat de justice et la lenteur du Procureur de la République dans l'accomplissement de certaines formalités nécessaires à la suite de la procédure pénale105. Le Ministère Public est donc auteur de la lenteur de l'instruction lorsque le temps imparti pour la qualification des faits se révèle trop long.

La réglementation de la garde à vue par les articles 52106 et suivants du Code de procédure pénale, a du mal à être respecté dans la pratique. En effet, il est constant qu'au Togo, les Officiers de Police Judiciaire (OPJ) ont l'habitude d'outrepasser largement le délai réglementaire de la garde à vue avant de déferrer la personne mise en cause devant le Procureur de la République. Cette situation constitue la violation de l'article 9 alinéa 4

105 YAKE (P. B. A.), ibidem

106Voir supra, bas de page 72, p. 17.

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PIDCP107. Le respect des délais de la garde à vue souffre d'un triple mal : primo, il faut relever l'absence d'information du parquet par les OPJ ; cette situation justifie le fait que les mesures de garde à vue échappent totalement au contrôle du ministère public108. Secundo, il faut noter la violation des principes de l'indépendance de la justice pénale à cause de la constante « ingérence de la hiérarchie policière, militaire, politique et administrative, qui complique le travail des OPJ dans la mesure où ceux-ci sont parfois soumis à des pressions ou reçoivent des ordres et instructions contradictoires donnés, soit par le parquet, soit par leurs supérieurs hiérarchiques »109. Tertio, il faut dire que malgré la ratification du PIDCP par l'Etat Togolais, la violation de son article 11110 continue en raison des détentions pour dettes qui sont toujours courantes dans certaines brigades et certains postes de police111.

Au Togo la violation permanente des règles de la détention préventive est quasi récurrente. En effet, étant une mesure exceptionnelle112, lorsque la détention préventive est ordonnée certaines règles doivent être observées113. Malheureusement, l'irrespect de ces règles aussi bien en matière correctionnelle que criminelle, fait perdurer la procédure pénale114.

Les conditions de travail du personnel judiciaire se rapportent, tant à l'exercice de leur profession qu'à leur situation financière. Primo, il faut relever que les conditions d'exercice des magistrats togolais sont particulièrement difficiles puisqu'ils exercent le plus souvent dans des locaux pas assez propices. En effet, malgré la modernisation de la justice togolaise entamée, il est constant que certains tribunaux rencontrent d'importantes difficultés matérielles et financières pour assurer une justice rapide, efficace et accessible à tous les citoyens. Sur le plan matériel, « on relève l'insuffisance et l'inadaptation des infrastructures dans certaines juridictions du système judiciaire. Ce phénomène est beaucoup plus visible au niveau de la police judiciaire de même que dans des brigades de gendarmerie et des postes de police »115. En dépit des palais de justices construit à Atakpamé et à Sokodé, les Cours d'Appel de Lomé et Kara et la rénovation du tribunal de première instance de première classe de Lomé, on note l'absence de palais de justice ou de locaux adéquats pouvant loger les services administratifs judiciaires et de salles d'audiences adéquates puisque ces juridictions sont abritées par des bâtiments de location qui ne répondent aucunement aux exigences d'un palais de justice moderne. Les équipements sont primordiaux pour un bon fonctionnement de

107 «Quiconque se trouve privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. »

108 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Op cit, p. 27

109 Idem

110 Article 11 : «Nul ne peut être emprisonné pour la seule raison qu'il n'est pas en mesure d'exécuter une obligation contractuelle».

111 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Op cit, p. 27 112Art. 112 CPPT

113 Articles 113-124 CPPT

114 Supra, p.19 ;

115 Idem, p. 37.

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la justice, or force est de constater que la justice pénale togolaise fonctionne dans un état de pénurie. A cet effet, à la liste d'insuffisances relevée plus haut il faut ajouter le manque de connexions internet dans la plupart des juridictions. Cette carence limite l'utilisation de la documentation juridique (textes de loi, recueils de jurisprudence) en format numérique.

Secundo, la situation financière du personnel judiciaire n'est pas tout à fait satisfaisante. En effet, même si le salaire des magistrats a été augmenté116, il ne répond pas aux besoins de plus d'un. C'est d'ailleurs ce qui justifie leur grève de 04 jours du 12 au 15 juin 2018, pour réclamer notamment la conversion des trente (30) mille FCFA que le gouvernement avait accordé aux employés émargeant sur le budget de l'Etat, en points d'indice et des meilleures conditions de vie et de travail. Pendant le débrayage, les audiences correctionnelles et les actes d'instructions étaient suspendues ; de même que les audiences civiles, commerciales, administratives. Ce qui porte un véritable coup à la justice pénale et à la justice dans son ensemble déjà minée par la lenteur. La situation financière des greffiers n'a connu aucune évolue notable jusqu'à ce jour ; ce qui justifie les constantes grèves relevant de leur corporation. Cette situation financière des magistrats et surtout des greffiers n'est pas de nature à leur permettre d'avoir un niveau de vie décent. Ce qui constitue d'ailleurs une réelle démotivation pour eux et l'une des causes principales de leur vulnérabilité à la corruption. En effet, la corruption gangrène la justice togolaise117 et tend à lui enlever sa valeur éthique, voire son sens de troisième pouvoir dans l'Etat comme disait Montesquieu. Ce phénomène de la corruption résulte aussi de l'étroite dépendance de certains magistrats du pouvoir exécutif et législatif et du phénomène des intermédiaires de justice.

A l'instar des pesanteurs internes, la justice pénale est également confrontée aux obstacles externes.

§.2- Les obstacles externes à une bonne justice pénale togolaise

Une analyse approfondie de la pratique judiciaire togolaise permet de constater que le comportement des parties au procès pénal (A), ainsi que la complexité et/ou la nature de l'affaire et l'augmentation constante des affaires pénales (B) peuvent expliquer la lenteur de la justice pénale.

A- L'emprise des parties sur le temps

L'emprise des parties sur le temps pénal implique que les parties aient une maitrise sur la gestion du procès pénal. Cette emprise des parties sur le temps est une cause de la lenteur de

116 La loi organique n°2013-007 du 25 février 2013 est venue modifiée la loi organique n°96-11 fixant le statut des magistrats. Cette loi organique et son décret d'application n°2013-047/PR ont permis une révision des éléments de rémunération des magistrats.

117Rapport 2016 sur les droits de l'Homme-Togo, United States Department of State
· ibidem.

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la justice pénale. Elle est relevée à plusieurs niveaux.

D'abord, dans un procès pénal, l'emprise des parties sur le temps est souvent relevée lorsque l'une des parties ou son avocat mettent en oeuvre tous les artifices de procédure possibles afin que l'issue du procès soit retardée118. Pour se faire, les parties font recours à des manoeuvres dilatoires dans le but de ralentir la décision du juge afin de nuire à l'autre partie. Le temps contentieux est donc instrumentalisé119 à dessein personnel. Ainsi, les recours et les procédures devant les tribunaux motivés par la mauvaise foi, constituent des abus de droit120.

Tout citoyen a le droit fondamental de saisir la justice pour préserver ses droits et obtenir réparation lorsque ceux-ci ont été lésés121mais, il ne doit pas en abuser. Souvent, certains citoyens exercent des actions en justice, dépourvues de tout fondement. Ces actions sont en réalité vouées à des fins dilatoires, soit en différant, en retardant, ou en suspendant l'issue du procès. Il est donc évident que le procédé dilatoire est la plupart du temps usité dans le seul but de ralentir la justice.

En outre, La prorogation de l'instance pénale ou son renouvellement à la suite de l'exercice d'un appel ou d'un pourvoi en cassation par l'une des parties au procès pénal peut être perçu par l'autre partie comme trop longue. En effet, certaines parties conscientes du caractère infondé de leur recours, l'initient quand même dans le seul but d'avoir à exécuter le jugement rendu en première ou deuxième instance. L'emprise d'une des parties sur le procès pénal fait grandir le sentiment d'injustice à l'égard de l'autre partie qui reprocherait au juge la tardiveté de la sanction pénale122. Dans ces conditions, il est évident que la lenteur est vécue comme une attente interminable sur le sort de la victime de l'emprise.

Ensuite, l'emprise des parties sur le temps du procès est due à l'interférence de certaines personnes dans l'exercice de la fonction du juge. En effet, les magistrats rencontrent des difficultés et obstructions à la procédure. C'est le cas lorsque certains éléments des Forces Armées Togolaises (FAT) sont impliqués dans la commission d'une infraction puisque « la hiérarchie militaire retient l'intéressé pour des sanctions disciplinaires avant de le mettre à la disposition de la justice »123. A titre indicatif, « en 2009, les juridictions de Kévé et de Dapaong ont eu de nombreuses difficultés pour faire comparaître et interroger des militaires,

118 ODENT (B.), « L'avocat, le juge et les délais », Mélanges René Chapus, Paris, Montchrestien, 1992, p. 483.

119 DE BECHILLON (D.), « Deux caractères du temps contentieux », Justice & Cassation 2007, p. 134.

120 BAUDOUIN (J.L.) et DESLAURIERS (P), La responsabilité civile, 5e éd., Cowansville (Qc), Les éditions Yvon Blais, 1998 à la p. 137 ; LAROUCHE (P.), « La procédure abusive » (1991) 70 R. du B. can. 650 à la p. 665.

121; BAUDOUIN (J-L) et DESLAURIERS (P.), ibidem.

122 DANET (J.), « Le temps des parties. Temps du litige ou du conflit et temps de la procédure », in S. GABORIAU et H. PAULIAT (dir.), Le temps, la justice et le Droit, op. cit., p. 128.

123 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Opcit p. 33

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présumés auteurs, respectivement dans une bavure militaire ayant entraînée mort d'homme et dans un homicide »124.

Enfin, il faut relever l'immixtion du pouvoir exécutif dans l'exercice de la justice pénale togolaise125. En effet, il est constant que le pouvoir politique togolais cherche à s'attirer les grâces de sa justice pénale tout en la contrôlant. Face à l'insuffisance de la démocratisation du pouvoir judicaire togolaise, certains magistrats marquent leur reconnaissance à l'égard du pouvoir exécutif dans la prise des décisions. Ceux-ci, en agissant de la sorte ont le regard tourné vers leur fauteuil puisque, la promotion des magistrats passe par le politique, la fidélité à l'exécutif en place. En définitive, l'intrusion de l'Etat dans la justice pénale constitue une entorse à l'accélération du procès pénal. Les décisions rendues, sont dépourvues de crédibilité et remettent en cause l'indépendance effective du pouvoir judicaire. Il se pose dès lors la question de la subordination de la justice pénale à l'Etat, ce qui entrave l'exercice de ce droit126. Au passé, certains « [---] Ministres de la Justice togolaise ont imposé leur point de vue aux juges sous la menace d'affectation ou de sanction. Ce sont des situations qui sont observées et vécues par des magistrats ; elles ne s'expriment pas ouvertement mais plutôt dans la discrétion et les magistrats s'en plaignent »127.

A l'instar du Togo, l'immixtion de l'Etat dans la justice en faisant complètement fi des principes constitutionnels d'indépendance et d'impartialité des juges, est monnaie courante en Afrique128 comme en témoignent ces quelques illustrations.

Premièrement, en République Démocratique du Congo (RDC), Madame Ramazani Wazuri Chantal, Juge Présidente du Tribunal de Paix Lubumbashi/Kamalondo a multiplié des déclarations selon lesquelles « messieurs l'Administrateur Général de l'Agence Nationale des Renseignements (ANR), le Premier Président de la Cour d'Appel de Lubumbashi et le Procureur Général près cette Cour, l'avaient obligé de condamner M. Katumbi Chapwe Moïse, dans l'affaire sous RP 7652 qui oppose ce dernier à M. Emmanouil Alexandros Stoupis, à trois ans de prison, avec arrestation immédiate et aux dommages et intérêts d'un million de dollars américains, afin d'obtenir son inéligibilité à la présidence de la République »129. Il découle des déclarations de madame la juge Ramazani Wazuri Chantal, l'immixtion flagrante du Gouvernement de la RDC dans les affaires judiciaires130.

124 Idem

125Rapport 2016 sur les droits de l'Homme-Togo, Op cit, p.6.

126Ibidem

127 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, Op cit, p. 17

128FALL (A.- B.), Le juge, le justiciable et les pouvoirs publics : pour une appréciation concrète de la place du juge dans les

systèmes politiques en Afrique, Edition Bruxelles Bruyant 2000, p. 310.

129 Publié le 27 janvier 2017 par la Cité Africaine, Maître Tshiswaka Masoka Hubert, Avocat au Bareau de Lubumbashi/Directeur Général de l'Institut de Recherche en Droit Humains (IRDH))

130 Idem

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Deuxièmement, au Sénégal, le 27 février 2016 dans une déclaration faite en marge de l'installation du Comité de ressort de Dakar, l'Union des Magistrats du Sénégal (UMS) a dénoncé l'immixtion du pouvoir Exécutif sur les décisions de justice. L'UMS déplore en outre «la non -application des décisions rendues par les cours et tribunaux ».

Troisièmement, au Niger, le 29 novembre 2015, les magistrats Nigériens ont dénoncé les "immixtions" de plusieurs membres influents du régime dans "le traitement de dossiers judiciaires", dont la très sensible affaire de trafic de bébés impliquant l'opposant Hama Amadou, incarcéré.

Quatrièmement, au Bénin, l'Union Nationale des Magistrats du Bénin (UNAMAB) réunie en Assemblée Générale Extraordinaire le vendredi 04 mai 2018, constate que les déclarations du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la Législation, tenues sur Frissons Radio en marge de la présentation du compte rendu du Conseil des Ministres du mercredi 02 mai 2018, mettent en cause les attitudes du Juge d'Instruction et du Juge des Libertés et de la Détention relativement à l'exécution de mandat d'arrêt décerné contre l'honorable Atao Mouhamed. Il s'agit d'une interprétation inexacte des dispositions du Code de procédure pénale mais aussi d'une atteinte grave à l'office du juge et à l'indépendance de la Justice131. Par ailleurs, l'UNAMAB fustige avec gravité cette immixtion flagrante de l'exécutif dans la conduite de certaines affaires. Cette attitude du Garde des Sceaux, dont le chef est le Président de la République, garant de l'indépendance de la Justice et Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, vise à intimider, voire terroriser les magistrats et caporaliser le pouvoir judiciaire132.

Au demeurant, le rapport de l'Organisation Internationale de la Francophonie de juillet 2015 évoque des difficultés qui concernent les systèmes de justice de plusieurs États membres de la Francophonie. Ainsi, les difficultés d'exécution des décisions de justice sont parfois causées par l'obstruction de l'Administration et de ses agents133. La justice, élément constitutif de tout Etat de droit, ne semble donc pas bénéficier en Afrique en général et au Togo en particulier d'une grande confiance de la part de la population puisque l'indépendance du juge vis-à-vis des autres pouvoirs est loin d'être conquise.

Outre ce qui précède, la lenteur avec laquelle les décisions de justice sont rendues est due également à la complexité et/ou la nature de l'affaire ainsi qu'à la constante augmentation des affaires pénales.

131 DADAGLO (M. R.), Président du BE/UNAMAB, Cotonou expresse.

132 DADAGLO (M. R.), Président du BE/UNAMAB

133Projet de rapport de l'Assemblée Parlementaire de la Francophonie « L'accès à la justice dans l'espace francophone : le rôle des parlements » présenté par M. André DROLET, Député (Québec), Rapporteur, Berne (Suisse) | 7-10 juillet 2015, p.3

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B- La complexité juridique du litige et l'augmentation constante des affaires pénales

Le temps pénal dépend de la nature du procès. En effet, plus l'affaire pénale est complexe, plus il dure. L'encombrement de la juridiction pénale, est autant un facteur de la lenteur.

S'agissant de la complexité juridique et/ou la nature du litige, il faut rappeler que le temps du procès pénal dépend essentiellement de la matière sur laquelle porte celui-ci. L'objet du procès pénal revêt donc une importance considérable sur le temps processuel134 puisque toutes les infractions ne sont pas soumises à la même contrainte temporaire. En exemple, le vol d'un portable doit être réglé avec promptitude, tandis que l'attentat contre la sureté de l'Etat nécessite davantage de temps. Ainsi, le temps processuel s'adapte de manière structurelle au fond du procès pénal135. Le temps s'ajuste alors à la gravité de l'infraction. En droit pénal interne, le temps dépend donc de l'objet de l'infraction et de la nature de la réponse pénale.

En ce qui concerne l'augmentation constante des affaires pénales au Togo, en dépit du programme de modernisation de la justice lancé depuis 2005, les magistrats restent toujours sous le poids de plusieurs dossiers du fait de leur traitement tardif. La surcharge est synonyme du dépassement du seuil requis. La principale cause de cette surcharge administrative est liée à l'insuffisance de magistrats. « Si à Lomé et dans quelques villes du pays, on peut avoir une formation collégiale d'au moins trois magistrats pour rendre les décisions de justice, dans la plupart des tribunaux, surtout à l'intérieur du pays, c'est la règle du juge unique qui prévaut. Ce juge unique réunit tout à la fois, à lui seul la fonction d'Officier de Police Judiciaire, de juge instructeur et de juge du siège et parfois même de juge chargé du Ministère Public »136. Il faut noter que le retard constant dû à la surcharge du travail du système judiciaire emporte la violation de la garantie du délai raisonnable consacrée par l'article 19 de la constitution togolaise. Ce retard se justifie par l'absence de dispositions devant contrer cette situation. Les mesures prises sont inadéquates ou inopérantes. Il y a donc une disproportion entre la capacité du système public de justice de traiter les dossiers et l'augmentation du nombre de demandes qui lui sont adressées137. Il va de soi que l'Etat togolais est responsable des retards de la justice pénale.

134CIAUDO (A.), « La maîtrise du temps en droit processuel »,Jurisdoctorian° 3, 2009 p.35.

135 AMRANI-MEKKI (S.), Le temps et le procès civil, thèse, Dalloz, Nouvelle Bibliothèque de Thèses, t. 11, 2002, pp. 415 et s.

136 Dans l'interview accordé par le président du Tribunal de troisième classe de Tchamba dans Reflets du Palais N° 50 du mois de Février 2018, à la page 4, il relevait par rapport à l'organisation et au fonctionnement de leur juridiction : « Nous sommes le président du Tribunal, nous exerçons à ce titre les attributions liées à cette charge, nous exerçons les fonctions du juge du siège (juger et instruire), le décret nous nommant dit que nous sommes chargé des fonctions de juge des enfants et chargé du Ministère Public ».

137Projet de rapport de l'Assemblée Parlementaire de la Francophonie, ibidem.

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Outre l'Etat, d'autres facteurs favorisent l'augmentation constante des affaires pénales. Primo, la justice pénale a souvent tendance à traiter des affaires qui ne méritent pas véritablement une sanction pénale. C'est également le cas en France138. Secundo, l'action publique est exercée de manière abusive aussi bien par le Ministère public que par la victime. Tertio, l'augmentation de la population togolaise serait également l'une des causes de la hausse des affaires pénales. En effet, plus la démographie évolue plus des problèmes se posent. Quarto, la progression de la délinquance telle que rapporter par A. MIHMAN dans sa thèse139, a pour origine la dégradation de la situation socio-économique140 et politique.

Au regard de ce qui précède, il faut noter que la lenteur de la justice pénale à des corollaires aussi bien pour la victime, le prévenu, la société que sur la justice elle-même.

La victime, reste affectée par la lenteur de la justice pénale. En effet, selon elle, le temps qui passe, c'est la vérité qui s'enfuit. La lenteur de la justice est une véritable injustice pour elle parce que durant la durée de l'instruction, son préjudice reste entier et aucune réparation n'est envisageable tant que le procès n'est pas achevé. Elle se sentira également lésée en payant les différents frais d'actes malgré tout ce qu'elle peut éprouver aussi moralement, financièrement que juridiquement. La lenteur de la justice pénale est souvent l'opportunité que saisissent certains inculpés de mauvaise foi pour organiser leur insolvabilité afin de pouvoir échapper à toute indemnisation en cas d'éventuelle condamnation. Pour pallier la lenteur de la justice pénale et les incertitudes sur la sincérité du verdict, certaines victimes ont recours à des pratiques telles la vindicte populaire, les règlements de comptes.

Le prévenu souffre également du non-respect du délai raisonnable. En effet, il est très avilissant pour une personne d'être incarcéré alors qu'elle est innocente. En perdant sa liberté, le prévenu en détention provisoire ou en maison d'arrêt peut perdre son emploi et être déconsidéré socialement ; ce qui peut entraîner des conséquences désastreuses pour sa famille en raison, du discrédit porté à sa personne. La société l'étiquette alors comme coupable des faits qui lui sont reprochés. Aucune indemnisation ne pourrait compenser le préjudice subi.

La société, n'est pas en marge de la lenteur de la justice pénale puisque la justice est rendue en son nom141. La lenteur rend la justice pénale inefficace et lui fait perdre sa légitimité et sa crédibilité aux yeux des justiciables. D'ailleurs, c'est pour prévenir cela sous d'autres cieux,

138 CHIRAC (M.) déplore « la pénalisation exercice de la vie publique », Le monde, 14 décembre 1999 ; DEMICHEL (A.), Le droit pénale en marche en arrière, D. 1995 p.213.

139 MIHMAN (A.), Contribution à l'étude du temps dans la procédure pénale :pour une approche unitaire du temps de la réponse pénale, Thèse de doctorat en droit privé et science criminelle à l'Université Paris Sud 11-Faculté Jean Monnet le 02 avril 2007N°3, p.315.

140 KAMINSKI (D.), « Une métonymie consensuelle : l'insécurité », Revue de Science Criminelle et de droit pénal 2005, p. 415.

141Art.112 de la constitution togolaise, « Au nom du peuple Togolais ». Cela signifie que du début jusqu'à la fin de la procédure, les différents acteurs agissent sur mandat du peuple togolais.

que la CEDH a consacré le principe de « célérité » comme fondement de l'Etat de droit, puisque « la lenteur excessive de la justice représente un danger important, notamment pour l'Etat de droit »142.

CONCLUSION PARTIELLE

En tout état de cause, la lenteur de la justice pénale togolaise est imputable à l'Etat. Une justice lente équivaut à un déni de justice, ce qui est prohibé143.

Il est évident dans les conditions matérielles, statutaires, sociales et politiques existantes au Togo et dans la plupart des Etats africains, qu'il est difficile qu'un juge, animé de la plus forte conviction qui soit et d'une conscience professionnelle irréprochable, puisse vivre son indépendance et assurer la neutralité.

Il faut relever malgré ces difficultés le sens de responsabilité irréprochable de certains juges togolais. Il s'avère nécessaire de mettre plus de moyens à leur disposition afin qu'ils accomplissent avec succès les rôles qui leur sont assignés.

S'il est admis aujourd'hui, que le temps est un facteur d'inefficacité de la justice pénale togolaise en raison de la lenteur de ladite justice, la prescription en matière pénale n'en demeure pas moins une cause de cette inefficacité.

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142 CEDH, Di Mauro c. Italie, 28 juillet 1999, req. n° 34256/96, § 23.

143 Constatations du Comité des droits de l'Homme, Robert Casanova c. France, 27 décembre. 1990, req. n° 441/1990, A/49/40, annexe IX, sect.. U.

L'OBSOLESCENCE DES REGLES DE LA PRESCRIPTION

EN DROIT PENAL TOGOLAIS

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CHAPITRE II

La prescription est un principe général de droit qui fait référence à la durée au-delà de laquelle une action en justice, civile , administrative, commerciale ou pénale, n'est plus recevable. En matière pénale, la prescription est un mode général d'extinction du droit de poursuivre et du droit d'exécuter une peine. Elle est donc variable puisqu'elle englobe deux notions. Il s'agit de la prescription de l'action publique et de la prescription des peines, qui se distinguent aujourd'hui nettement144 et sanctionnent l'ignorance de la commission d'une infraction, la négligence de la partie poursuivante145 ou l'inexécution de la sanction pénale. Ces deux mécanismes sont intrinsèquement liés au temps. En effet, « le temps à vocation à rendre illégitime la réponse pénale à un comportement pourtant considéré comme infractionnel aux yeux de la loi »146. Mais, ce temps se présente aujourd'hui comme insuffisant et trop court dans la mesure où « l'injustice née de l'impunité d'un [---] malfaiteur serait un mal aussi fort pour la société que le méfait lui-même »147. Les règles régissant la prescription en matière pénale au Togo sont aujourd'hui obsolescentes.

L'obsolescence d'une règle est la péremption de celle-ci. Qu'est ce qui explique l'obsolescence des règles de la prescription en matière pénale en droit pénal togolais ?

En matière pénale, on note une opposition diamétrale des revendications de la doctrine et de l'opinion sur la prescription. En effet, si « dans certains domaines, les uns s'opposent à l'idée même de prescription ou réclament du législateur l'allongement des délais, suscitant d'ailleurs des oppositions notamment parmi les praticiens. En d'autres domaines, certains reprochent aux juges leur hostilité à la prescription, leurs jurisprudences reportant le point de départ du délai de prescription et demandent une intervention législative vigoureuse. Ils ont aussi leurs opposants. Le premier débat, mené autour des infractions contre les personnes, ne rencontre guère le second qui touche aux infractions contre les biens, et plus précisément au droit pénal des affaires »148.

144DANET (J.), « La prescription de l'action publique, un enjeu de politique criminelle », Archives de politique criminelle, 2006/1 (n° 28), p. 73-93. URL: https://www.cairn.info/revue-archives-de-politique-criminelle-2006-1-p.3.

145 RIDE (C.), « La réforme de la prescription pénale, allongement des délais de prescription et traitement particulier des infractions occultes et dissimulées », le Village de la justice, édité par legi team, 22 mars 2017.

146FOURMY (V.), Le désordre de la prescription de l'action Publique, Mémoire pour le Master II Droit Pénal et Sciences Pénales à la Faculté de droit Université Paris II Panthéon-Assas, Année universitaire 2010 - 2011, p.

147 Ibidem, p.16

148DANET (J.), opcit, p.80

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Les deux notions qu'englobe la prescription en matière pénale sont la prescription de l'action publique et la prescription des peines. La prescription des poursuites ou de l'action publique est le délai après lequel le ministère public ou une victime ne peut plus porter plainte ou exercer des poursuites. La prescription des peines est le délai après lequel la justice ne peut plus exécuter une peine. Ces deux prescriptions se présentent comme une problématique complexe et mouvante.

La prescription en matière pénale est obsolescente, en raison de l'insuffisance des règles qui fixent le temps nécessaire à la société pour que celle-ci estime, soit qu'il n'est plus possible d'engager des poursuites (Section I), soit qu'il n'est plus possible d'exécuter une peine (Section II).

Section I : L'insuffisante réglementation de la prescription de l'action publique en droit pénal togolais

L'action publique, est l'action exercée au nom de la société par le ministère public pour faire constater au juge compétent le fait punissable, établir la culpabilité du délinquant et obtenir le prononcé de la sanction pénale établie par la loi149. Le ministère public est donc le dépositaire légal de l'action publique qu'il exerce dans l'intérêt de la société. L'action peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée, dans les conditions déterminées par le Code de procédure pénale150. Cette action doit être exercée dans un délai légal, mais, lorsque ce n'est pas le cas, elle est prescrite autrement dit éteinte et toute poursuite devient impossible151.

La prescription de l'action publique est consacrée par le droit positif togolais. Cependant, elle reste problématique en raison des insuffisances liés à ses délais (§1) et de ses limites (§2).

§.1-Les insuffisances liées aux délais de la prescription de l'action publique

Le droit de la prescription de l'action publique présente des carences aussi bien dans le Code pénal que dans le Code de procédure pénale. Ces Codes sont inadaptés aux exigences contemporaines de répression des infractions en raison de délais courts de l'action publique et de l'absence d'une prise en compte effective de la gravité de certaines infractions au regard de leur délais de prescription.

Admettre la carence dans la limitation temporelle de la prescription de l'action publique c'est reconnaitre que les délais prévus par le législateur en matière de classification tripartite des

149Article 1er CPPT.

150 Idem

151 PICOTTE (J.), Juridictionnaire Recueil des difficultés et des ressources du français juridique, réalisé pour le compte du Centre de traduction et determinologie juridiques, 8 février 2018, p. 2272 ; GINCHARD (S.) et BUISSON (J.), Procédure pénale, 8e ed, Litec, 2012, n°1122, p ;797.

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infractions sont courts (A), et que ce dernier n'a pas daigné prévoir de délais dérogatoires aux délais de la prescription de l'action publique (B).

A- Le caractère abrégé des délais de la prescription de l'action publique

La prescription de l'action publique est « une cause d'extinction de cette action par l'effet de l'écoulement d'une période de temps depuis le jour de la commission de l'infraction »152. Elle constitue un enjeu majeur de la politique criminelle d'autant plus qu'elle touche la relation entre la justice pénale et l'écoulement du temps153.

Le Code de Procédure Pénale a prévu des durées de prescription de l'action publique. En effet, l'action publique est prescrite si l'infraction n'a pas été déférée à la juridiction de jugement par citation ou ordonnance de renvoi dans un délai partant du jour où elle a été commise.154 Ces délais sont fixés à dix (10) ans pour les crimes, trois (03) ans pour les délits et un (01) an pour les contraventions155. L'écoulement de ces délais entraine l'extinction de l'action publique et rend de ce fait toute poursuite impossible156. Il faut rappeler que ce délai est prorogé d'un (01) an en matière criminelle et six (06) mois en matière correctionnelle si l'instruction ouverte avant son expiration n'est pas achevée157 : il s'agit de la classification tripartite des infractions. Au regard de cette classification, il est à remarquer la variation du délai de la prescription selon la gravité de l'infraction. Par ailleurs, la même observation a été relevée par Maître Valentin GUISLAIN à propos du droit français158.

En droit français, le législateur a opéré des réformes en matière de prescription de l'action publique. Ces réformes ont doublé les délais de la prescription en matière pénale. Ainsi, en matière criminelle, le délai de prescription passe de dix ans (10) à vingt (20) ans159 tandis qu'elle passe de trois ans (03) à six (6) ans160 en matière délictuelle. Le législateur marocain a également aménagé les délais de la prescription en matière pénale. Il dispose à cet effet : « Sauf dérogations résultant des lois spéciales, l'action publique se prescrit : En matière criminelle, par vingt années grégoriennes révolues à compter du jour où le crime a été commis ; En matière délictuelle, par cinq années grégoriennes révolues à compter du jour où le délit a été commis ; En matière de simple police, par deux années grégoriennes révolues à compter du jour où la contravention a été commise »161. Ces réformes des délais de la

152 DESPOTES (S.), LAZERGES-COUSQUER (L), Traité de procédure pénale, Economica, 4e édition, 09-11-2015.

153 DANET (J), la prescription de l'action publique, un enjeu de la politique criminelle, Archives de politique criminelle 2006/1, n°28, p.73.

154 Article 7 CPPT

155 Op cit

156 Op cit

157 Idem

158 GUISLAIN (V.), « Sujet de grand oral : L'imprescriptibilité de l'action publique », 06/12/2014, Léga Vox, p, 2.

159 Article 7 CPPF

160Article 8 CPPF

161 Article 4 du Nouveau Code de Procédure Pénale du Maroc.

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prescription de l'action publique constituent une véritable révolution pour les procédures pénales française et marocaine et rétrograde la procédure pénale togolaise.

En droit pénal togolais, les délais de prescription de l'action publique apparaissent aujourd'hui courts. On peut donc estimer que le législateur national n'évalue pas l'ampleur du trouble causé par l'infraction avant de déterminer le temps qui sera nécessaire à la société pour qu'elle se refuse à poursuivre le comportement infractionnel. En conséquence, la prévision législative ne permet pas une prise en compte effective de la gravité inhérente à chaque type d'infractions162. Les règles régissant la prescription de l'action publique en droit pénal sont véritablement inadaptées aux attentes de la société.

Quoi qu'on dise, la prescription de l'action publique est réelle c'est-à-dire qu'elle concerne de façon générale l'ensemble des infractions qui sont prévus par le Code de procédure pénale. Toutefois, la prescription ne s'applique pas aux crimes les plus graves: le crime de génocide163, les crimes de guerre164 les crimes contre l'humanité165et le crime d'apartheid166. Ces crimes sont rendus imprescriptibles par le législateur167. Il en est de même en droit français en ce qui concerne les crimes contre l'humanité168. Cette consécration du législateur togolais constitue une innovation majeure car l'ancien Code pénal ne contenait aucune disposition en la matière.

Les lacunes du droit pénal togolais en matière de prescription ne se limitent pas uniquement aux délais courts que prévoit le législateur en ce qui concerne la classification tripartite des infractions. Ils s'étendent à l'absence de délais de prescription dérogatoires.

162MIHMAN (A.), op cite 363 Contribution à l'étude du temps dans la procédure pénale :pour une approche unitaire du temps de la réponse pénale, Thèse de doctorat en droit privé et science criminelle à l'Université Paris Sud 11-Faculté Jean Monnet le 02 avril 2007N°3, p.363.

163Article 143 CPT : « Constitue le crime de génocide l'un quelconque des actes ci-après, commis en temps de paix ou en temps de guerre dans l'intention de détruire en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial, politique ou religieux, comme :1) meurtre de membres du groupe ; 2) atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe ; 3) soumission intentionnelle de membres du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; 4) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe ; 5) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe ».

164Article 145 CPT : « Constitue un crime de guerre, l'une quelconque des infractions graves ci-après, commises en période de conflit armé international, lorsqu'elles visent des personnes ou des biens protégés par les conventions de Genève :1) l'homicide intentionnel... » ; Article 146 CPT : « Constituent également des crimes de guerre, les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir, l'un quelconque des actes suivants : 1) le fait de compromettre par un acte ou une omission injustifiée la vie, la santé et l'intégrité physique et mentale des personnes au pouvoir de la partie adverse ou internées... » et l'Article 147 : « Constituent, en outre, des crimes de guerre les violations graves de l'article 3commun aux conventions de Genève et les autres violations graves aux lois et coutumes applicables aux conflits armés non internationaux, à savoir l'un quelconque des actes suivants :1) les atteintes à la vie et à l'intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, inhumains et dégradants, ainsi que la torture...»

165Article 149 CPT « : Constitue un crime contre l'humanité, en temps de paix ou en temps de guerre, l'un quelconque des actes suivants, commis en connaissance de cause dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile ou une population désarmée en cas de conflit interne : 1) meurtre ; 2) extermination ... »

166Article 152 CPT : « L'apartheid est tout acte commis en vue d'instituer ou d'entretenir la domination d'un groupe racial d'êtres humains sur un autre groupe racial d'êtres humains aux fins de l'opprimer systématiquement » et l'Article 153 CPT : « Constitue un crime d'apartheid, assimilé à un crime contre l'humanité l'un quelconque des actes inhumains suivants :1) ôter la vie à des membres d'un groupe racial ou de plusieurs groupes raciaux ... »

167 Article 164 CPT

168 Art. 211-1 à 212-3 CPPF

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B- L'absence de délais de prescription dérogatoires

Aujourd'hui, notre pays le Togo fait face à des infractions qui méritent d'être assujetties à des régimes dérogatoires de droit commun de la prescription de l'action publique.

Les crimes tels : les crimes de nature terroriste169, le trafic de stupéfiants, la prolifération d'armes de destruction massive et de leurs vecteurs, l'eugénisme et le clonage reproductif et la disparition forcée nécessitent que le législateur leur consacre un délai dérogatoire au droit commun de la prescription. Ceci en raison de leur gravité. Si le législateur français s'est déjà inscrit dans cette dynamique en prescrivant tous ces crimes précités à trente ans170, le législateur togolais n'en est pas là. Le silence du législateur en l'espèce sous-entend, qu'à ces crimes, s'applique la prescription de droit commun. Il est clair que le législateur national a véritablement du mal à classifier les différentes formes de crimes.

En matière correctionnelles, les délits de violences sur mineurs, les agressions et atteintes sexuelles sur mineurs sont toujours prescrits après cinq ans. Cette situation est déplorable parce que, ces infractions portent atteinte à l'intégrité et à la dignité des mineurs et nécessitent de ce fait des délais dérogatoires. Le législateur national a donc manqué de proroger le délai de prescription de ses infraction. Il n'a pas non plus reporté le point de départ de la prescription des dites infractions à la majorité des victimes pour leur permettre d'agir en toute quiétude.

En droit comparé, le législateur français a réglé le problème en prévoyant des délais de prescription dérogatoires pour ces trois délits contre les mineurs. En effet, les délits de violences sur mineurs171, les agressions172 et les atteintes173 sexuelles sur mineurs se prescrivent par vingt ans à compter de leur majorité. En prorogeant ces délais de prescriptions, le législateur français a compris la nécessité de ces dérogations. Tel n'est pas le cas de son homologue togolais qui a préféré garder silence.

Le législateur togolais a aboli la peine de mort174. Mais, il n'a pas pour autant fixé un délai pour la prescription des infractions passibles d'une peine de réclusion à vie.

169Art. 716 CPT « Aux fins du présent code, les infractions de nature terroriste comprennent : 1) les infractions relatives à la sécurité de l'aviation civile, de la navigation maritime, du port et des plates-formes fixes; 2) la prise d'otages et les infractions contre les personnes jouissant d'une protection internationale; 3) les attentats terroristes à l'explosif et le terrorisme nucléaire ».

170 Droit Pénal Français Crimes - délais dérogatoires - Diverses exceptions sont prévues par le législateur. Ainsi, l'action publique des crimes de nature terroriste (CPF., art. 706-16), de trafic de stupéfiants (CPF., art. 706-26), relatifs à la prolifération d'armes de destruction massive et de leurs vecteurs (CPF., art. 706-167), d'eugénisme et de clonage reproductif (CPF., art. 214-1 à 214-4), de disparition forcée (CPF., art. 221-12), se prescrit par trente ans.

171Art. 222-12 CPF

Art. 222-29-1 CPF

173Art. 227-26 CPF

174 Loi N°2009-011 du 24 janvier 2009 relative à l'abolition de la peine de mort au Togo ; Le 23 juin 2009, les députés togolais ont à l'unanimité abolit la peine de mort.

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Il faut noter l'absence de délai dérogatoire du point de départ des infractions répétées qui, en raison de leur répétition ne devraient pas être assimilées aux infractions de droit commun.

Cette absence de précision de délai de prescription dérogatoire peut être considérée comme une négligence de la part du législateur national. Aussi, peut-on affirmer qu'il ne se rend pas compte de la gravité des infractions de droit commun.

L'insuffisante réglementation de la prescription de l'action publique en droit pénal, s'explique également à travers ses limites.

§.2- Les limites de la règle de la prescription de l'action publique

Considérée comme une alternative à la sanction pénale, la prescription de l'action publique se retrouve limitée en raison de l'ignorance des infractions occultes ou dissimulées, l'absence de détermination de leur point de départ(A), et des répercussions de la prescription de l'action publique (B).

A- L'ignorance des infractions occultes et dissimulées et l'absence de détermination de leur point de départ

Qu'est-ce qu'une infraction occulte ou dissimulée ? Une interrogation qui n'a pas sa réponse ni dans le Code pénal, ni dans le Code de procédure pénale puisque, le législateur n'en a pas fait référence. En effet, les infractions occultes et dissimulées ne se retrouvent pas encore dans l'arsenal juridique togolais. Par contre, son homologue français s'est intéressé à la question en référençant ces deux infractions dans son Code de procédure pénale175.

En principe, une infraction est dite occulte lorsqu'en raison de ses éléments constitutifs, elle ne peut être connue ni de la victime, ni de l'autorité judiciaire176. Par contre une infraction est qualifiée de dissimulée lorsque, son auteur accomplit délibérément toute manoeuvre caractérisée tendant à empêcher sa découverte177.

Quel est le point de départ des infractions occultes ou dissimulées ? Cette interrogation nous laisse perplexes en raison du silence du législateur en la matière.

En droit pénal tout comme en procédure pénale, on a véritablement du mal à déterminer les points de départ de la prescription des infractions occultes et dissimulées parce que le

175 Articles 9-1 al. 4 et. 9-1 al. 5 CPPF

176 Article 9-1al.4 CPPF

177 Article 9-1al.5 CPPF

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législateur ne les a pas précisées. Ce qui n'est toujours pas le cas du législateur français qui a pris le soin de déterminer ces points de départ.178

Le législateur national n'ayant ni référencé les infractions occultes et dissimulées, ni défini leur point de départ, laisse l'acteur judicaire dans une incertitude totale qui peut d'ailleurs être qualifiée de vide juridique. Il s'agit en tout état de cause d'une difficulté rédhibitoire.

Les infractions occultes et dissimulées sont des infractions difficiles à déceler, et concernent la plupart du temps les dossiers économiques et financiers. L'opacité du législateur concernant ces infractions, empêche la poursuite des dossiers de corruption, de détournement de deniers publics et des biens mal acquis. En vertu du principe « nullumcrimen, nulla puena sine lege »179, les infractions occultes et dissimulées ne peuvent être réprimées, puisque le législateur ne les a pas prévues. Cette lassitude du législateur entraine la non poursuite des auteurs de ses infractions, une fois le délai de prescription de droit commun expiré. D'aucuns diront que cette mission incombe à l'autorité de lutte contre la corruption. Mais cette autorité peine à accomplir cette obligation. Le Code pénal réprime la corruption180, les soustractions et détournements de deniers publics181 ; mais, cela ne résout véritablement pas la question du référencement des infractions occultes et dissimulées dans le droit pénal. D'ailleurs, il faut noter l'absence de sanctions dans la pratique judiciaire pénale des agents ou préposés de l'Etat, qui sont auteurs de la corruption, de soustractions et détournements de deniers publics. Pourtant, ce ne sont pas ces criminels qui font défaut.

L'inertie du législateur au sujet des infractions occultes et dissimulées pourrait laisser entrevoir qu'il est complice des agissements de ses délinquants qui sont des puissants, souvent en rapport avec des hommes politiques puisque l'impunité a véritablement acquis une notoriété dans ces domaines.

Si la prescription de l'action publique est consacrée en matière pénale, cela n'est pas sans répercussions sur les justiciables.

B- Les conséquences de la prescription de l'action publique

La prescription est une cause légale d'extinction de l'action publique. Etant une mesure d'ordre public, elle doit être relevée d'office par tout juge saisi même si personne ne l'invoque.

178Art. 9-1 al. 3 CPPF

179 Formule latine qui exprime le principe fondamental de la légalité des délits et des peines. « il n'y a pas de crime, il n'y a pas de peine sans loi ».

180Arts. 594 - 596 CTT : la corruption des agents publics nationaux ; Arts. 597- 599 CTT : la corruption des agents publics étrangers et des fonctionnaires Internationaux ; Arts. 600- 606 CTT : la corruption dans le secteur privé.

181Art. 586 bis CPT

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Ainsi, lorsque l'action publique n'est pas mise en mouvement dans les délais fixés par la loi, elle s'éteint. Des conséquences découlent de ce fait.

D'abord, la prescription de l'action publique correspond à l'extinction du droit de poursuivre après l'écoulement d'un certain délai. Elle éteint l'action publique et constitue, un handicap à son l'exercice. La prescription ôte en toute évidence aux faits poursuivis tout caractère délicieux. Il s'agit donc d'une irrecevabilité à agir. Cette dernière suppose qu'aucun jugement de condamnation n'est encore intervenu puisqu' elle a pour objet d'éteindre la poursuite, et se rattache donc à la procédure182.

Ensuite, une fois l'action publique prescrite, les faits commis ne peuvent plus donner lieu à condamnation. En effet, l'auteur des faits ne peut plus être ni pénalement poursuivi ni jugé sur sa culpabilité pénale183. Il est donc libre et toute poursuite à son encontre est impossible. C'est le mécanisme de la prescription extinctive qualifiée également de libératoire puisqu'il libère l'auteur des faits. La prescription de l'action publique se présente donc comme une institution favorable non seulement à celui-ci mais aussi à tous ceux qui sont intervenus dans la commission de l'infraction c'est- à-dire les auteurs, les coauteurs et les complices. Il s'agit bien évidement du caractère impersonnel de la prescription de l'action publique. Une fois la prescription acquise, l'auteur de l'infraction ne peut prétendre y renoncer. La loi proscrit alors toute poursuite initiée de son propre chef. Il s'agit d'un caractère d'ordre public de la prescription de l'action publique.

De plus, la prescription de l'action publique équivaut au déni de la reconnaissance des victimes. La prescription est le temps qui court irrévocablement contre la victime et finit par éteindre son droit. L'infraction n'a donc pas existé car la loi ne reconnaitra plus ni la victime ni le coupable. Finalement, ce n'est plus l'auteur de l'infraction qui est puni mais plutôt la victime. La loi sanctionne donc la négligence de la partie poursuivante en lui faisant perdre son droit à agir. Toutefois, la victime, le ministère public ou toute personne habileté peut soulever l'exception de prescription devant toutes les juridictions. Dans ce cas, la partie poursuivante à l'obligation de prouver que l'action judiciaire n'est pas éteinte.

Par ailleurs, la justice pénale juge les personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction : crime, délit ou contravention qui sont des comportements interdits parce qu'ils sont contraires soit à des valeurs essentielles de notre société, soit à des règles fondamentaux du vivre ensemble. La prescription de l'action publique handicape le juge dans son rôle de poursuivre et de sanctionner les infractions à la loi pénale en vue de mettre un terme au trouble causé à la

182 DONNEDIEU DE VABRES (H.), Traité de droit criminel et législation pénale comparée Sirey, Paris, 01-01-1947, 3e éd. 183Gian-FrancoRaneri, « La prescription, la fin du temps pénal », www.justice- en-ligne.be, 31 mars 2009.

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société par celle-ci. La prescription empêche ipso facto « le juge de dire la « vérité judiciaire » au plan pénal : il ne peut pas, même si la personne était en aveux, la déclarer coupable, ni lui infliger une peine. Le juge n'est pas face à un choix mais à une obligation, celle de constater d'office la prescription »184.

Enfin, la prescription tend à favoriser l'oubli. Ainsi, compte tenu de la durée écoulée depuis la commission des faits, il n'y a plus lieu de poursuivre leur auteur parce que l'opinion a oublié le trouble causé par leur commission et ne réclame plus vengeance. Cependant, est-il légitime d'oublier le comportement infractionnel qui laisse des traces dans les mémoires surtout que « Le crime est souvent perçu comme un signe de bestialité. Il caractérise la violation de la norme sociale édictée par le peuple, pour le peuple. Le crime est également un signe d'hominisation »185. A titre indicatif, les infractions volontaires accompagnées de récidive, le viol des femmes et des mineurs, la pédophilie, sont des infractions qui occupent une place primordiale dans la mémoire non seulement des victimes mais aussi de la société. Il est donc évident que les infractions, peu importe leur gravité laissent une empreinte indélébile dans la mémoire surtout avec leur médiatisation où les réseaux sociaux sont devenus aujourd'hui la principale source de propagande des informations. Il est clair qu'en droit togolais tout comme en droit français, la prescription de l'action publique constitue « un oubli annoncé »186. PRINS et GARRAUD, rejetant la prescription de l'action publique se demandent, « comment le simple écoulement du temps pourrait parvenir à l'amendement du délinquant alorsque la peine ne peut pas toujours atteindre ce but. »187

S'il est admis que la réglementation de la prescription de l'action publique reste problématique, la prescription des peines n'est pas du reste.

Section II : L'insuffisante réglementation de la prescription des peines en droit pénal togolais

En droit pénal, la peine est un châtiment, une punition, une sanction que prévoit la loi et qu'inflige le tribunal dans le double but de prévenir et de réprimer l'infraction188. Quand un certain temps c'est-à-dire un délai fixé par la loi s'est écoulé depuis la condamnation, sans que le ministère public ait fait exécuter la peine, une dispense définitive de la subir se produit en faveur du condamné : les peines sont prescrites et ne peuvent plus être subies189.

184Gian-FrancoRaneri,,ibidem.

185 GUISLAIN (V.), « Sujet de grand oral : L'imprescriptibilité de l'action Publique », LegaVox.fr, 06/12/2014, p.1.

186 COQUIN (C.), Deux aspects de l'évolution du concept d'oubli en droit pénal, Arch. Pol. crim 1998, n°20, p.37. 187MIHMAN, (A.) op. cit., N°257, p.289.

188PICOTTE (J.), Juridictionnaire Recueil des difficultés et des ressources du français juridique, réalisé pour le compte du Centre de traduction et de terminologie juridiques, 8 février 2018, p. 2182.

189 CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 9e ed, Paris, PUF,2011,

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Au Togo, le législateur a réglementé la prescription des peines, mais elle demeure incohérente, au regard des règles qui la régissent (§.1) et présente également des inconvénients (§.2)

§.1- L'incohérence des règles de prescription des peines consacrées

Les règles de prescription des peines consacrées en droit pénal togolais sont incohérentes en raison de l'absence de clarification de la notion de prescription des peines par le législateur(A). Cette incohérence résulte également de l'insuffisant délai imparti à la prescription des peines et à l'absence d'imprescriptibilité des peines relevant des crimes les plus graves (B).

A- L'absence de clarification de la notion de la prescription des peines par le législateur Qu'est-ce que la prescription des peines ? Au Togo, le législateur n'a pas clarifié cette notion. Un constat se dresse : nulle part dans les Code pénal et procédure pénale, ne figure la définition de la prescription des peines. Est-ce un oubli de la part du législateur ou c'est fait à dessein ? La notion de prescription des peines est difficilement saisissable par le droit positif. Cette situation est de nature à semer la confusion dans l'esprit des justiciables. Cet état de choses crée donc un vide juridique. Elle ne permet pas de cerner et de comprendre ce qu'est la prescription des peines. C'est ce qui nous amène à émettre ces interrogations : quand peut-on parler de la prescription des peines ?

A l'instar du législateur togolais, les législateurs ivoirien et béninois ne clarifient pas non plus la notion de la prescription des peines. On en déduit que ces législations ont du mal à cartographier la prescription des peines.

Le mutisme du législateur sur la clarification de la prescription des peines laisse entrevoir un constat : certains justiciables peuvent être amenés à la confondre avec la prescription de l'action publique.

Il est difficile de cerner la notion de prescription des peines parce qu'elle reste indéfinie. Le législateur qui est censé indiquer la voie aux acteurs du monde judiciaire n'a pas eu une telle hardiesse. Cette inertie du législateur qui est une lacune de la loi pénale, constitue un handicap pour les acteurs du monde judiciaire.

L'absence de clarification de la notion de la prescription des peines par le législateur, révèle sa défaillance à dessiner clairement les contours de ladite notion. En conséquence, sa défaillance peut avoir pour corollaire l'impossibilité pour les justiciables d'apprécier la prescription des peines puisqu'il ne les informe pas utilement.

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Il est du devoir du législateur de définir clairement la prescription des peines en vue de faciliter son appréhension dans la pratique. Définir la prescription des peines suppose sa détermination par une formule précise.

Parler de clarté dans la définition de la prescription des peines, renvoie à la netteté, à l'absence d'ambiguïté, à l'intelligibilité ou encore à la simplicité dans la définition. La seule existence d'un texte sera insuffisante ; il faut que ce texte soit d'une qualité nécessaire pour sa bonne application par le juge.

En outre, la Cour Européenne des Droits de l'Homme, dans son arrêt du 24 avril 1990190, a défini les deux composantes de la qualité de la norme pénale à savoir, la prévisibilité et l'accessibilité.

La prévisibilité renvoie aux exigences constitutionnelles de clarté et de précision de la loi. En d'autres termes, le citoyen à la lecture de la loi, doit connaître les actes et les omissions engageant sa responsabilité pénale. Tandis que l'accessibilité, tend à assurer une information préalable suffisante des justiciables. Le citoyen doit pouvoir prendre connaissances des règles applicables afin d'être prévenu des conséquences de son comportement.

Lorsque les prévisions du législateur manquent de clarté ou prêtent à confusion, très souvent, le juge appelé à appliquer la loi en cas d'infractions, en fait une interprétation et une application différente. L'interprétation de la loi parait souvent fantaisiste et partisane191. L'une des illustrations de cette application inexacte est révélée par la célèbre affaire Bistel ; affaire dans laquelle le tribunal correctionnel de Bruxelles décida que l'introduction frauduleuse d'un mot de passe constituait un écrit et donc, un faux ; alors que la cour d'appel de Bruxelles considéra qu'il s'agissait en réalité de l'interception indue d'une communication.

Le Code pénal prévoit la sanction des infractions à travers des délais de prescription des peines. Ces délais sont inadaptés aux exigences contemporaines de répression des infractions. Ils sont donc insuffisants en raison de leur caractère abrégé et de l'absence d'imprescriptibilité des peines relevant des crimes les plus graves.

B- Le caractère abrégé des délais de la prescription des peines et l'absence d'imprescriptibilité des peines relevant des crimes les plus graves.

En droit pénal, la prescription de la peine correspond à une durée au-delà de laquelle il n'est plus possible de mettre une condamnation pénale à exécution. Le point de départ de Ce délai est la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive.

190C.E.D.H. 24 avril 1990, Kruslin et Huvig c/ France, D. 1990, p. 353, note PRADEL J.

191 MATADI NENGA (G.), La question du pouvoir judiciaire en RDC : Contribution à une théorie de réforme, thèse, édition Droit et Idées nouvelles, Kinshasa, 2001, p. 201.

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Le délai de prescription des peines est de vingt-cinq (25) années révolues pour les peines criminelles192, cinq (05) années révolues pour les peines correctionnelles193 et deux (02) années révolues pour les peines contraventionnelles194. Il faut rappeler qu'il s'agit d'une évolution en matière criminelle car, le délai en vigueur dans le Code de procédure pénale était de vingt (20) années révolues pour les peines criminelles195. Par contre, les autres délais n'ont pas été modifiés. Les délais de prescription des peines, se révèlent courts en raison de la nature des infractions et du temps du jugement.

En droit pénal français, le délai de prescription des peines prononcées pour un délit est prorogé de cinq (05) à six (06) années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive196. Les peines prononcées pour un crime se prescrivent par vingt (20) années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive197. Le Code pénal et le Code de procédure pénale français prévoient pour certains crimes, un délai de prescription dérogatoire de trente (30) ans198.

Au Togo, les délais de prescription aussi bien pour les crimes que les délits sont standards pour ces deux catégories. Aucune disposition dérogatoire n'est envisagée. Pourtant certaines infractions de par leur gravité devraient être soumises à des régimes dérogatoires. C'est le cas, des crimes les plus graves à savoir, le crime de génocide, les crimes de guerre les crimes contre l'humanité et le crime d'apartheid. Le législateur a rendu ces crimes imprescriptibles en matière de l'action publique. Mais il n'en est pas de même en matière d'exécution des peines. Il a tout simplement gardé le silence. Faut-il dans ce cas considérer cela comme une imprescriptibilité des peines inhérentes aux crimes les plus graves suscités ou non ? En droit pénal français, le législateur a par contre pris le soin de rendre imprescriptibles les peines prononcées pour les crimes contre l'humanité199 tout en leur consacrant un alinéa distinct200. Le législateur togolais n'a donc pas prévue l'imprescriptibilité des peines pour les crimes les plus graves.

Pourquoi le législateur n'a-t-il pas daigné rendre imprescriptibles les peines des infractions relevant des crimes graves en raison de leur impact néfastes sur la société ? Il s'agit d'un vide juridique qui est de nature à compromettre la crédibilité de la justice pénale.

192Art. 105 CPT

193Art. 106 CPT et Art. 538 CPPT

194Art.106 CPT et Art. 539 CPPT

195Art. 537 CPPT

196Art. 133-3 al. 1.CPF

197Art. 133-2 al. 1.CPF

198Art.133-2 al. 2.CPF

199Art. 211-1 à 212-3CPF

200Art. 133-2 al. 3 CPF

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La prescription des peines consacrées par le législateur présentent réellement des incohérences. A ces incohérences, s'ajoutent des inconvénients.

§.2- Les inconvénients de la prescription des peines

La prescription des peines est une entorse à la réponse pénale (A). Le législateur a en outre gardé un mutisme sur certaines mesures qui accompagnent la peine (B).

A- La prescription des peines, une entorse à la réponse pénale

Tout procès pénal doit aboutir à une décision de justice. Cette décision doit être exécutée dans un délai prévue par la loi pénale. A défaut, elle s'éteint. Il s'agit de la prescription des peines qu`impose le droit pénal.

Prescrire une décision rendue par la justice pénale n'est pas sans conséquence. En effet, elle constitue une véritable entorse à la réponse pénale.

D'abord, la prescription des peines entraine l'inexécution de la réponse pénale, l'absence de répression. Il s'agit en conséquence de la privation de la fonction normative du droit pénal. On constate dans ce cas l'ineffectivité de la sanction pénale. Qu'est-ce que la sanction pénale ? Selon Stéphan SCIORTINO-BAYART c'est « la sanction qui ne peut être infligée que par un juge judiciaire, à la demande du ministère public garant des intérêts de la société»201.Elle permet d'attribuer la qualité d'infraction à l'ensemble qu'elle constitue avec l'incrimination202. Selon le vocabulaire juridique, la sanction est une « punition, (une) peine infligée par une autorité à l'auteur d'une infraction, (une) mesure répressive destinée à le punir »203.

Ensuite, la prescription des peines correspond à l'abandon de la justice pénale de son devoir qui consiste à sanctionner les infractions au Code pénal afin d'assurer la stabilité de la paix sociale. A cet effet, le législateur français distingue les objectifs des fonctions assignés à la peine en ces termes : « Afin d'assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l'équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime, la peine a pour fonctions : «1° De sanctionner le condamné» ; «2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion» »204. Cependant, en refusant d'appliquer la sanction pénale en raison de sa prescription, l'Etat qui est le seul détenteur de la « violence

201 SCIORTINO-BAYART (S.), Recherches sur le droit constitutionnel de la sanction pénale, thèse Université Paul Cézanne - Aix-Marseille III, 2000, p. 15.

202 BONIS-GARÇON (É.) et PELTIER (V.), Droit de la peine, Paris, Lexis Nexis, 2ème éd., 2015, p. 9.

203V°. « Sanction », in G. CORNU et Association Henri CAPITANT (sous la direction de), Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 10ème éd., 2014, p. 941.

204 Article 130-1 du titre III du livre Ier du CPF

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légitime »205 crée une double injustice : celle relative à l'infraction et celle portant sur l'inaction du détenteur du pouvoir de punir. « Le risque est alors que les cocontractants reprennent ce pouvoir qu'ils ont abandonné, pour l'exercer eux-mêmes. Or, le pouvoir exercé par les cocontractants de manière individuelle n'a pas la même finalité que celui qui est reconnu à l'autorité considérée comme légitime. Le pouvoir reconnu à l'autorité légitime transcende les intérêts individuels de chacun des cocontractants. Il n'est pas le résultat de l'addition de toutes les parts de liberté qui ont été abandonnées par les cocontractants. Il s'agit d'un pouvoir qui, détaché des intérêts particuliers, tend à maintenir la stabilité de la paix sociale et, partant, la préservation de la société par la recherche du bien commun »206.L'absence d'exécution de la sentence pénale ou de la réponse pénale par le juge togolais constitue un déni de justice. La prescription est alors perçue comme un abandon par la justice de ses devoirs, un signe d'indifférence, un déni de reconnaissance des victimes, un manquement à un devoir de mémoire et une prime à la délinquance.

Enfin, la prescription des peines tend à favoriser l'oubli d'autant plus que le législateur l'impose. Comment peut-on oublier une infraction dont l'existence a été connue par la justice et qui laisse très souvent une grande emprunte dans la mémoire non seulement de la victime mais aussi de la police. D'ailleurs, la doctrine a désapprouvé la prescription des peines. En effet d'une part, BECCARIA qui traitait de la prescription, s'était montré très hostile à l'institution lorsqu'elle permet à l'auteur de « crimes affreux dont les hommes gardent longtemps le souvenir » de rester impuni en considérant donc que la prescription avait pour tendance, lorsqu'elle était acquise, à favoriser le sentiment d'impunité du criminel et l'engageait à commettre de nouveaux méfaits207. D'autre part, Jérémie BENTHAM affirmait déjà en 1820 que l'injustice née de l'impunité d'un malfaiteur est un mal aussi fort pour la société que le méfait lui-même et qu'aux criminels ayant accomplis de tels méfaits « le glaive reste toujours suspendu sur leurs têtes »208.

Outre ces inconvénients précités, il faut relever le silence du législateur sur certaines mesures qui accompagnent la peine.

205 SUR (E.), « Violence et droit, Remarques sur la distinction entre la violence légitime et la violence pure », in Démocratie et liberté : tension, dialogue et confrontation, Mélanges en l'honneur de Slobodan Milacic, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 1041.

206 TZUTZUIANO (C.), L'effectivité de la sanction pénale, Thèse pour le doctorat en droit privé et sciences criminelles, Université de Toulon, 2 décembre 2015, p.9

207 BECCARIA (C.), Des délits et des peines (1764), GF Flammarion, 1991, §XXX, « Durée des procès et prescription », p.139 et s.

208 BENTHAM (J.), Traité de législation civile et pénale, trad. DUMONT (E.), Paris : Boissange, père et fils, Paris : Rey et Gravier, 1820, Tome II, « De la prescription en faits de peine », p. 149

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B- Le mutisme du législateur sur la non incidence de la prescription des peines sur certaines mesures accompagnant les peines

La prescription des peines vise à sanctionner non seulement le manque de diligences du ministère public, mais aussi de protéger le justiciable contre la demande d'exécution d'une peine intervenant à son détriment longtemps après la condamnation209. Mais le législateur a gardé un mutisme sur la problématique de savoir si la prescription des peines emporte ou non les mesures accompagnant les peines. S'il en a fait cas au sujet de certaines tel n'est pas le cas pour d'autre.

D'abord, s'agissant des mesures prises, il y a lieu de relever d'office que la prescription des peines n'affecte pas les mesures de sûreté qui accompagnent la peine. Dans ce contexte, la prescription n'atteint pas l'interdiction de séjour, la peine accessoire ou complémentaire. Ainsi, le condamné bénéficiaire de la prescription, « ne pourra résider dans la circonscription où demeuraient soit celui sur lequel ou contre la propriété duquel le crime aurait été commis, soit ses héritiers directs »210. Si le législateur français a déterminé le nombre d'année auxquelles sera banni le bénéficiaire de la prescription en stipulant que « le condamné à une peine perpétuelle, qui l'a prescrite, est frappé d'interdiction de séjour pendant 20 ans à compter du jour où la prescription est accomplie »211 , le législateur togolais dispose seulement que, « la durée de l'interdiction de séjour ne peut excéder dix (10) ans pour un fait qualifié crime et cinq (05) ans pour un fait qualifié délit »212 sans pourtant autant faire allusion à un fait qualifié de contravention.

Ensuite, est-ce que la prescription des peines emporte l'effacement de l'infraction du casier judiciaire du coupable ? Le législateur togolais a consacré en ses articles 540 et suivants du Code de procédure pénale la notion du casier judiciaire mais ne la pas définie. La lecture de l'article 541 du Code Pénal laisse paraître qu'il est fait mention, sur les bulletins n°1 de grâces, commutations ou réductions de peines, des décisions qui suspendent ou qui ordonnent l'exécution d'une première condamnation sans toutefois évoquer de manière expresse la prescription des peines. Pourtant, « cette trace a d'abord vocation à informer les magistrats pour une application la plus juste possible de la pénalité, en particulier comme élément de preuve de la récidive, mais elle a aussi vocation à informer les tiers. Les règles de divulgation des bulletins du casier judiciaire le démontrent, il y a là comme un prolongement à la

209 Www.wikipédia.org/wiki/ « La prescription en matière pénale en droit français », consulté le 28 mars 2019. 210Art. 537, al. 2 CPPT.

211 Art. 48, al. 4 et 5 ancien CPF.

212Art.115 CPT

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publicité du jugement, à la publicité de la décision de condamnation en l'occurrence »213. Il va s'en dire qu'il s'agit de la négligence du législateur de préciser cela.

Enfin, l'absence de précision du sort réservé aux condamnations civiles et au paiement des frais envers l'Etat. Il s'agit bien évidement des mesures qui accompagnent la peine. Une fois de plus, le législateur a failli à son obligation en s'abstenant d'éclairer les citoyens sur ces mesures qui accompagnent la peine. Par contre, en droit français, la prescription est sans effet sur les condamnations civiles214. Ainsi, la victime conserve son droit d'agir pendant le délai de droit commun qui est de trente (30) ans. Aussi, la prescription n'emporte pas les frais envers l'État puisqu'ils subsistent215.

CONCLUSION PARTIELLE

Dans le souci de sécurité juridique, la prescription en matière pénale fait perdre à la victime un double droit : le droit d'ester en justice et le droit d'obtenir la réparation du préjudice subi. L'auteur du fait délictueux sera dispensé de poursuite pénale et de l'obligation d'exécuter une peine.

La prescription en matière pénale varie en fonction de la gravité de l'infraction. Cependant, les règles de la prescription en matière pénale font l'objet d'importantes critiques. Ces critiques sont liées à des insuffisances relevées dans le droit pénal. Ce qui fait dire que la justice pénale est effectivement au tournant de son histoire parce que la stabilité de ces règles sont remises en cause aujourd'hui.

Au Togo, la justice pénale peine à trouver des lettres de noblesse malgré, les bonnes intentions de l'Etat, de certains acteurs du monde judicaires, des partenaires institutionnels et sociaux. Le droit au délai raisonnable tel que reconnu et consacré dans la loi fondamentale togolaise216, devient une gageure en raison de plusieurs obstacles. Face à cette situation qui prévaut, il urge de préconiser des voies, des stratégies et des moyens adéquats pour permette à la justice pénale de s'exécuter dans le délai raisonnable.

213 GRUNVALD (S.) et LETURMY (L.), Casier judiciaire et fichiers de police, in M. DANTI-JUAN (dir.), La mémoire et le crime, p.69

214 Art. 642 C.instr.crim français ; Article 133-6 Code Pénal franc 215Cass.req., 28 février 1905: D. P., 1905, 1, 176

216 Supra, P.16

DEUXIEME PARTIE

LE JUSTE TEMPS POUR UNE JUSTICE REPRESSIVE

EFFICACE AU TOGO

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Aujourd'hui, l'urgence et la vitesse sont deux concepts qui dominent les sociétés modernes. Notre époque s'inscrit inexorablement dans une mutation radicale du rapport au temps qui reste marquée par l'apparition de nouvelles conceptions du temporel à savoir l'urgence, l'immédiateté ou l'instantanéité. Ces urgences nouvelles doivent nécessairement s'étendre au droit217. Dans une société en constante évolution et face à des citoyens en forte demande sur la sécurité des droits individuels, il importe que l'institution judiciaire évolue et réponde de manière plus performante aux attentes des justiciables.

Le juste temps est le délai raisonnable. Autrement dit, la justice pénale doit être rendue dans un délai raisonnable.

Quel peut être le juste temps au cours duquel doit se dérouler la justice pénale ?

La revendication d'une accélération de la justice pénale togolaise qui constitue un critère de qualité, un principe d'une bonne administration de la justice, est devenue générale et indiscutable. Cet objectif ne sera atteint que par la recherche de l'efficacité de l'institution judicaire.

Il conviendrait de mettre en place une véritable démarche de qualité en préconisant des solutions aux facteurs de ralentissement de la justice pénale, en pérennisant des procédures et des pratiques qui seront adaptées à l'effectivité de l'accélération de ladite justice. Tout cela ne peut se concrétiser qu'en considérant le rôle de chaque acteur au procès pénal. Ce qui permettra au législateur objectif et aux justiciables sérieux d'avoir un procès qui n'est ni très lent, ni très accéléré, mais un procès qui se déroule dans un délai raisonnable de fond218. Ainsi, l'idée de célérité doit constituer non seulement dans la législation togolaise un principe directeur, mais aussi, l'examen de la pratique doit révéler cette accélération.

Le temps étant un facteur indissociable de la prescription en matière pénale, une attention particulière doit y être portée afin d'envisager des réformes. Ces réformes permettront aux acteurs de la justice pénale d'accomplir efficacement leurs missions à savoir poursuivre et réprimer les infractions à la loi pénale dans un délai conséquent. Selon MIHMAN, la réponse pénale se caractérise par deux périodes : la première est celle pendant laquelle la réponse peut être apportée à un comportement délictueux219. La seconde est celle de la mise en oeuvre de la réponse pénale220. En effet, le législateur a prévu des délais au terme desquelles l'action

217 SRONVI (Y. O.), Reflets du Palais N° 28, septembre 2015, « Célérité et qualité : la bonne mesure » p.2.

218 NDAM (I.), « La protection du droit à un procès dans un délai raisonnable dans l'espace Ohada », Revue de l'ERSUMA : Droit des affaires - Pratique Professionnelle, N° 2 - Mars 2013, Doctrine.

219 MIHMAN (A.), Juger à temps: le juste temps de la réponse pénale, Edition Harmattan, 2008, ISBN 229604302X.

220 Ibidem

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publique et la non-exécution de la peine sont prescrites. Ces délais, en raison de leur caractère abrégé doivent être revus.

Pour instaurer le juste temps qui permettra de rendre la justice pénale togolaise plus efficace, il urge non seulement d'aménager le temps afin que les affaires pénales soient traitées dans un délai raisonnable (chapitre premier) mais aussi, de réformer la prescription en matière pénale au Togo (chapitre second).

Chapitre premier : L'aménagement du temps pour le traitement des affaires pénales dans un délai raisonnable.

Chapitre second : La nécessité de réformer la prescription en matière pénale au Togo.

L'AMENAGEMENT DU TEMPS POUR LE TRAITEMENT DES

AFFAIRES PENALES DANS UN DELAI RAISONNABLE

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CHAPITRE I

Les instruments internationaux, régionaux ou nationaux reconnaissent à toute personne à un procès, des droits qui lui permettent d'être jugé dans un délai raisonnable221. Ces droits relatifs à la célérité du procès pénal sont exigibles à l'Etat togolais, premier garant de leur effectivité. Malheureusement, c'est la lenteur qui accule souvent la justice pénale togolaise. Ce profond ancrage de ce principe conduit certains auteurs à voir dans un dépassement de ce délai un « déni de justice processuel »222. Pour y remédier, il faut dès lors préconiser le juste temps.

L'aménagement consiste en l'ensemble des mesures ou dispositions prises pour améliorer une situation donnée. Dans quelles mesures peut-on aménager le temps pour que le traitement des affaires pénales se déroule effectivement dans un délai raisonnable ?

La lenteur de la justice, ce thème récurrent en droit pénal togolais, est également fort ancien en droit français. En effet, en se référant aux discours de rentrée aux audiences solennelles des cours d'appel en France, il apparaît que les magistrats se sont saisis dès le début du XIXe siècle de cette thématique223, afin d'y remédier. La doctrine n'est pas restée en marge de cette inquiétude d'autant plus que, NANA É. E. affirmait que « Le droit étant une recherche d'équilibre entre des intérêts opposés, la justice ne doit pas être administrée avec des retards propres à en compromettre l'efficacité et la crédibilité »224.

Pour contrer la lenteur qui sévit au sein de la justice pénale togolaise, il serait juste de mettre en place des mécanismes nationaux tendant à prévenir la lenteur et à apporter un redressement approprié en cas de violation des délais impartis. Mais, vu le caractère exponentiel du

221 Voir supra, A, pp. 15&16.

222 SAVADOGO (L.), Déni de justice et responsabilité internationale de l'État pour les actes de ses juridictions, JDI (Clunet), 03/2016, p. 827 s., cité par B. Nicaud, Délai raisonnable et droit européen, AJ pénal 2017. 163

223 FARCY (J.-C.), Magistrats, Les discours de rentrée aux audiences solennelles des cours d'appel XIXe- XXe siècles, CNRS Editions, 1998, p. 798. On peut par conséquent déduire de cette analyse que, dès1811, le Procureur Général ROULHAC (CA Limoges) traitait de la question, dans une intervention intitulée «L'activité et la célérité dans l'expédition des affaires ». Il fut suivi, en 1823, par l'avocat général LEBE (CA Agen), lequel exprimait « La nécessité d'une étude approfondie des lois de la part du magistrat et l'obligation d'impartirune bonne et prompte justice », exigence confirmée, l'année suivante, par le procureur général Blanquart DEBAILLEUL (CA Douai), dans son discours consacré aux « Devoirs des magistrats dans l'instruction criminelle : sagacité et célérité ». En revanche, en 1828, l'avocat général SAVEROT (CA Dijon), mettait en garde contre « Les dangers que représente l'amour de la célérité chez les magistrats ». Seule note discordante, semble-t-il, puisque le procureur général THOUREL (CA Nimes) reprenait, en 1855, le thème sous un titre plus neutre « De la célérité dans la distribution de la justice civile », la même sobriété revenant, en 1862, dans le discours de l'avocat général GAUTIER (CA Grenoble) « La célérité dans la justice ». Etrangement, peut-être, il a fallu plus d'un siècle pour que la question soit, de nouveau, placée au premier plan des préoccupations des chefs de cour, le conseiller Le Foyer DE COSTIL (CA Paris) centrant son propos, en 1986, sur « La justice et le temps ».

224NANA (É. E.), Droits de l'homme et justice : le délai de procédure pénale au Cameroun, L'Harmattan, 2010, p. 19.

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phénomène, une réaction vigoureuse du personnel judicaire ainsi qu'une implication active des parties au procès pénal s'imposent. Le respect du délai raisonnable devant la justice pénale togolaise implique de revoir les moyens humains au premier rang desquels figurent les magistrats chargés de rendre la justice, tout en améliorant l'organisation de l'institution judiciaire et des textes de nature à favoriser l'accélération des procédures pénales.

La justice pénale togolaise doit nécessairement se dérouler dans un délai raisonnable. Pour y arriver, il faut dès lors consacrer des exigences légales (Section I), tout en impliquant les acteurs de ladite justice pour que ceux-ci les mettent en application (Section II).

Section I : Les exigences légales de la tenue du procès pénal dans un délai raisonnable La tenue du procès pénal dans un délai raisonnable pose le problème des garanties d'un tel procès. Il s'agit des exigences légales pour atteindre cet objectif afin que le justiciable qu'il soit victime ou accusé en matière pénale, puisse avoir la possibilité de faire valoir ses droits sans retard excessif225.

Le délai raisonnable étant une condition sine qua non pour réaliser un procès pénal dans le temps (§.1), il faut revitaliser la procédure pénale togolaise (§.2).

§.1- Le délai raisonnable, condition sine qua non pour un procès pénal dans le temps Le délai raisonnable est absent du droit pénal togolais. Pour le consacrer, le législateur national doit nécessairement le référencer, le clarifier (A) et instituer des sanctions rigoureuses afin de dissuader d'éventuels contrevenants (B).

A- Le référencement et la clarification législative de la notion de délai raisonnable

Le procès pénal doit être rendu dans un délai raisonnable. Pour se faire, le législateur national doit faire mention de cette notion dans le droit pénal et la clarifier.

Le référencement de la notion du délai raisonnable, devient aujourd'hui une nécessité d'autant plus qu'on ne saurait évoquer le droit au délai raisonnable sans en faire référence, soit au Code pénal, soit à au Code de procédure pénal. Le législateur a donc l'obligation de référencer le droit au délai raisonnable dans les textes juridiques pénaux. Cela permettra et constituera un repère incontournable aussi bien pour le personnel judiciaire que pour les justiciables.

La clarification de la notion du droit au délai raisonnable, doit également faire partie intégrante des Codes pénal et de procédure pénale.

225 ALLIX (D.), « le droit au procès pénal équitable », justice n° 10, 1998, p.19.

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Qu'est-ce que le droit au délai raisonnable ? « La notion de délai raisonnable est une notion floue qui est difficile à définir. Le terme délai qui se rapporte à la durée peut s'entendre comme le temps accordé pour faire une chose. L'ambiguïté et la difficulté proviennent de l'adjectif raisonnable qui est accolé au "délai". Qu'est ce qui est raisonnable et qu'est ce qui ne l'est pas? De prime abord, nous pouvons dire qu'est raisonnable ce qui est conforme à la raison, au bon sens. Il s'agit d'une notion qui fait appel à des appréciations du milieu social. C'est ce qui est admissible dans une communauté à un moment donné. Le raisonnable varie alors avec le temps et l'espace comme l'ordre public »226.

Le droit au délai raisonnable sous-entend donc que la justice soit rendue avec célérité. Ce délai doit être en adéquation avec la situation à laquelle il s'applique. En d'autres termes, il doit être acceptable au regard des faits de la cause. En principe, le délai raisonnable se décline en trois délais. En effet, selon la Convention Européenne des Droits de l'Homme, l'aspect raisonnable s'attachant aux délais doit être apprécié in concerto pour chaque phase de la procédure. Ainsi, distingue t'elle d'abord, le délai raisonnable de la détention provisoire227 ; ensuite, le bref délai pour statuer en matière de détention228et enfin le délai raisonnable de la procédure229.

Traditionnellement, le caractère raisonnable de la durée d'un procès pénal s'apprécie au cas par cas et au regard de trois critères à savoir, la complexité de l'affaire, le comportement du requérant et la manière dont les autorités judiciaires ont traité l'affaire230. Le premier critère est « la complexité de l'affaire ». Il inclut toutes les données de fait et de droit. A titre indicatif, il y a la complexité de l'administration de la preuve qui résulte du nombre de prévenus, du volume et de la difficulté de l'affaire ; de même que l'incertitude de la règle de droit qui est très souvent un élément important expliquant certaines lenteurs procédurales231.Le deuxième critère est relatif au « comportement du requérant ». Il est reconnu que la personne inculpée ne dispose pas de moyens efficaces pour ralentir le cours de la justice pénale en raison de son droit de garder le silence que lui impose la loi pénale232.

226NATY (S.), le délai raisonnable dans le procès pénal, mémoire de maitrise en science juridique à l'Université Gaston eryersaint-Loui 2007, p.7.

227 Art5.3 CEDH : « Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c) du présent article, doit aussitôt être traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou liberty pendant la procédure... ».

228 Art5.4 CEDH « Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale. »

229 Art6 .1CEDH « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable,... ».

230 Posé dans un arrêt KöNIG vs RFA du 28 Juin 1988 : « le caractère raisonnable de la durée d'une procédure s'apprécie eu égard notamment de la Co complexité de l'affaire, du comportement du requérant, du comportement des autorités compétentes et de l'enjeu du litige » ; Observation no. 32 du Comité des Droits de l'Homme relative à l'article 14 du PIDCP ; CEDH 6 mai 1981, n° 7759/77, Buchholz c/ Allemagne;.25 mars 1999, n° 25444/94, Pélissier et Sassi c/ France, D. 2000. 357, note D. Roets ; 15 juill. 1982, n° 8130/78,Eckle c/ Allemagne, § 73

231 Arrêt Preto et autres contre Italie, 8 decembre1983, série A n° 7.

232 Article 14.3, g, du pacte international du 19 décembre 1966, relatifs aux droits civils et politiques.

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Cependant, il faut noter que certains requérants font souvent recours à des manoeuvres dilatoires telles le refus volontaire de communiquer à la justice les pièces qu'elle lui réclame, le changement incessant ou tardif d'avocats, l'abus de l'exercice des voies de recours, l'absence à l'audience, ou encore un requérant qui adopte une stratégie pour retarder le procès233.Le troisième critère qui est « le comportement des autorités compétentes » doit être entendu largement : les juges et l'Etat. Les juges doivent fournir des diligences durant la durée consacrée à la réflexion d'une analyse juridique. L'Etat ne doit pas compromettre la gestion de la justice pénale. Il s'agit de l'obligation de résultat qui lui incombe car il est le premier comptable en matière de respect du droit au délai raisonnable. L'intérêt de ces critères réside dans le fait qu'ils sont permanents et assurent la prévisibilité et la sécurité juridique propres à toute interprétation d'une règle de droit234.

Outre ces trois critères précités, un nouveau critère dit « l'enjeu du litige » est utilisé par la Commission Européenne des Droits de l'Homme, afin de garantir et de préserver la dignité du requérant235. Dans ce contexte, l'appréciation de la durée du procès pénal est plus stricte lorsqu'il est question d'un conflit de travail qui met en jeux les conditions de travails et de vie du requérant.

Le calcul de la durée du délai raisonnable n'est pas chose aisée. Il a tout de même pour point de départ le moment où la personne fait l'objet d'une accusation en matière pénale. Cette notification doit avoir « des répercussions importantes sur la situation du suspect »236 Ainsi, il peut s'agir de l'arrestation, de l'inculpation, ou de l'ouverture de l'enquête préliminaire237. Elle se termine avec la décision définitive. En France par contre, ce point d'arrivée est fixé soit à la date de l'arrêt de la cour de cassation ou du conseil d'Etat soit au délai de deux mois après l'arrêt d'appel.

Le législateur national doit référencer le droit au délai raisonnable afin que sa violation soit sanctionnée.

B- L'institution des sanctions de la violation du délai raisonnable

La violation du délai raisonnable est le recours à des procédures abusives pour retarder l'issue du procès pénal. Selon Pierre Larouche, « [Est] abusive la procédure faite avec intention de

233 NGONO (S.), le procès pénal camerounais au regard des exigences de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, l'Harmatan, 2002.

234 PICARD (M.) et TITUIN (P.), commentaire de l'article 5.3 C.E.D.H.

235CORTEN (O.), l'utilisation du raisonnable par le juge international, Bruxelles, Bruylant, 1997, page 576 ; Arrêt X vs France rendu le 31 Mars 1992 : « personne atteinte de la maladie du SIDA suite à une transfusion, délai de quinze ans. Déraisonnable en raison de la vie courte des requérants. Effectivement, tous les requérants étaient déjà décédés » ; Arrêt COTIEZ vs France de 1992. « Salarié par payé : six ans avant de condamner l'employer à payer le salaire. En effet caractère alimentaire de la somme déclaré ». Arrêt CERIELO vs Italie en 1999 pour un juge des référés.

236 CEDH Louerat c/ France §§29 et 30 du 13/02/2003.

237 CEDH Eckle c/ Allemagne §73 du 15/07/1982.

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nuire, esprit de chicane, témérité et légèreté blâmable, ou celle entachée d'une erreur grossière équipollente au dol »238 ou selon BAUDOUIN « la mauvaise foi (c'est-à-dire l'intention de nuire) ou la témérité (c'est- à-dire l'absence de cause raisonnable et probable) restent donc les bases de l'abus de droit dans ce domaine »239.

La justice pénale togolaise doit être la réponse à un litige imminent, mais la décision se fait largement désirer malgré la procédure pénale togolaise soumise à un principe général de célérité. Le délai raisonnable n'est donc pas respecté. Pour pallier cette lacune, la sanction de la violation du principe de célérité, doit être préconisée par le législateur national afin que la justice pénale togolaise cesse d'être constamment décriée, et ne soit plus frappée de suspicion ou de ridicule.

Pour attester de la nécessité d'une sanction, le délai doit être apprécié. Dans ce contexte, le caractère dit « raisonnable » d'un délai s'apprécie suivant les circonstances de la cause240.La sanction de la violation du délai raisonnable devant la juridiction pénale à un triple objectif : la prévention, la répression et la réparation.

S'agissant de la prévention, elle vise à dissuader les justiciables, le personnel judiciaire ou toute autre personne de ne pas user de quelques moyens que ce soit pour ralentir le cours de la justice pénale. Ainsi, toute personne désireuse de faire obstruction au respect du délai raisonnable du procès pénal devrait en principe s'abstenir afin de ne pas en subir les sanctions. Il s'agit donc de mesures dissuasives qui amènent à renoncer à ses intentions.

Quant à la répression, elle consiste à punir tout fauteur du droit au délai raisonnable. Peu importe la qualité de la personne reconnue coupable des entraves à la célérité de la justice pénale, sa responsabilité devra être engagée dans ce sens. Punir dissuaderait d'ailleurs certaines personnes qui seraient tentées d'outrager le droit au délai raisonnable. La répression permettra de préserver l'indépendance, l'impartialité de la justice pénale et les juges accompliront leurs missions dans un délai optimal. Mais, les dysfonctionnements du service public de la justice pénale doivent être davantage révélés par les poursuites disciplinaires à l'encontre des magistrats.

En ce qui concerne la réparation, elle peut être bénéfique à la victime ou à l'inculpé. D'une part, la victime de la violation du droit au délai raisonnable obtiendra la réparation du préjudice par elle subi. D'autre part, l'inculpé victime de la violation du délai raisonnable bénéficiera également de sa réparation qui peut constituer en sa libération, à son

238 LAROUCHE (P), «La procédure abusive» (1991) 70 R. du B. can. 650 à la p. 665.

239 BAUDOUIN (J.L.) et. DESLAURIERS (P), La responsabilité civile, 5e éd., ibidem. 240CEDH, 26 octobre 1999, requête n° 31801/96.

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indemnisation, ou encore des deux. Par ailleurs, s'il est établi que le délai entre la mise en accusation et le procès est déraisonnable, la CEDH admet des sanctions telles que : l'arrêt des procédures et la libération de la personne mise en cause, l'acquittement, la réduction de peine, l'irrecevabilité des poursuites et l'abandon des poursuites par le parquet241. A cet effet, le dommage peut être considéré comme établi alors même que le processus judiciaire se poursuit242.

Au Togo, il est difficile de voir appliquer cette mesure à l' endroit de l'accusé parce qu'il n'y a pas de texte spécial dans la législation pénale pour réparer la violation du délai raisonnable. En France par contre, cela est une réalité d'autant plus que, le législateur français, par le biais de l'article 149 du Code de procédure pénale qui modifie la loi du 15 juin 2000 et celle du 30 septembre 2000, a introduit un principe qui dispose que « [---J la personne qui a fait l'objet d'une détention provisoire au cours d'une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenue définitive a droit, à sa demande, à réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention ( et que), Lorsque la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement lui est notifiée, la personne est avisée de son droit de demander réparation ». Il s'agit de la réparation intégrale du préjudice subi par la personne inculpée. Deux décisions ont été rendues dans ce sens : en premier lieu, Rajeswaran Paskaran accusé du meurtre d'un policier et condamné à 20 ans de réclusion en 2011 a été remis en liberté parce que son affaire n'était pas encore fixée devant la cour d'Assises d'Appel au bout de quatre années243. En deuxième lieu, une femme dite « la veuve noire » condamnée à 30 années de réclusion criminelle, en 2010, pour homicide volontaire a été remise en liberté parce que depuis plus de cinq (05) ans, l'appel n'avait pas encore été programmé244. Cette décision de réparation de la violation du droit au délai raisonnable devant la justice pénale, bien que justifiée souffre de contestation au regard de l'indignation des familles, des proches, de la police et au-delà, l'émoi public devant ces décisions prenant acte de la lenteur de certains jugements et en tirant les conséquences au risque de provoquer ou de surprendre.

La réparation du préjudice subi, du fait de la violation du droit au délai raisonnable, nécessite son évaluation. Cette évaluation prendra en compte plusieurs paramètres. Il s'agira : d'abord, de la perte de revenus subis pendant la détention ou si un licenciement est intervenu en raison de l'incarcération245. Ensuite, les salaires et les congés payés ainsi que la perte de chance de

241 C.E.D.H., arrêt Eckle c/ Allemagne, 15 juillet 1982.

242 DOCQUIR (P.F.), « Délai raisonnable: l'exigence d'un recours effectif en droit interne, CDPK, 2001, p.274

243 Le Parisien, Cour d'assises : la lenteur au banc des accusés, 27septembre 2015.

244 Ibidem.

245SARR (N.), Le délai raisonnable dans le procès pénal, mémoire en Maîtrise sciences juridiques, Université Gaston Berger de Saint-Louis - 2007.

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retrouver un emploi à condition qu'elle soit directement liée à la détention246. Enfin, moralement, le préjudice peut être apprécié en tenant compte de l'âge, des éléments de la personnalité, de l'environnement familial et social247. Dans ce cas, le préjudice devra être évalué par expertise contradictoire.

Afin d'être efficace et d'atteindre le résultat escompté, la sanction contre la violation du droit au délai raisonnable doit respecter certaines conditions : elle doit être adéquate, convenable et constituer une juste réparation248. Pour obtenir la réparation, la partie lésée peut saisir la Cour de Justice de la CEDEAO (CJCA) en formulant un recours pour violation du droit au délai raisonnable afin de voir l'Etat togolais condamné pour violation du principe de célérité.

Pour que la justice pénale soit rendue dans un délai raisonnable, il faut donner de la vitalité aux règles de procédure pénale.

§.2- La nécessaire revitalisation de la procédure pénale

Cette revitalisation passe par le renforcement des règles de procédure pénale (A), et le renforcement des garanties d'un bon procès pénal (B).

A- Le renforcement des règles de procédure pénale

Une justice pénale qui s'inscrit dans le temps suppose qu'elle a de règles de procédures qui sont assez efficaces. La justice pénale togolaise doit donc s'inscrire dans cette perspective.

Pour être au diapason de l'actualité des réalités procédurales, le législateur doit faire une relecture de ses règles de procédure pénale afin de les adapter aux réalités du moment. Ce qui nécessite l'introduction de nouvelles règles dans le Code de procédure pénal.

D'abord, il urge que le législateur institue le « plaider coupable » encore connu sous le nom de procédure de « reconnaissance de culpabilité » ou encore «comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité »249 en droit pénal. Le plaider coupable est la procédure par laquelle, le procureur de la République propose à un prévenu un allègement de la peine encourue en échange d'une reconnaissance des faits qui lui sont reprochés250. Dans le Code pénal, le législateur dispose à l'article 93 que « Le procureur de la République peut, d'office ou à la demande du prévenu qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés, ou de son avocat, recourir à la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité ». Elle concerne essentiellement les délits passibles d'une amende ou d'une peine de prison inférieure ou égale à cinq (5)

246 Ibidem

247 Ibidem

248 C.E.D.H., arrêt H c/ Allemagne 13 décembre 1984.

249 Article 495-7 du CPPF.

250 Dictionnaire de français Larousse.

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ans251. Elle supprime ipso facto tout débat sur la preuve car l'auteur des faits a choisi de plaider coupable après avoir été informé en présence de son avocat dès son arrestation de son droit de se taire252. En France, le plaider coupable permet au Procureur de la République de proposer directement et sans procès, à une personne reconnaissant les faits à lui reprochés253 une ou plusieurs peines qui peuvent être des peines d'amende ou d'emprisonnement. En France, elle a été créée par la loi du 09 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité dite « Loi Perben II » et fait son entrée dans le palais de justice le 1er octobre 2004254. Au Etats Unis, le choix de cette voie est, parfois, lié à des réductions de peine255.

Pour une application efficace du plaider coupable, le législateur doit l'entourer de gardes fous. Ainsi, le juge doit toujours apprécier objectivement l'honnêteté des aveux du coupable avant de statuer. Ce qui lui permettra de ne pas commettre d'erreurs.

L'intérêt de la reconnaissance de culpabilité, est d'éviter la lourdeur d'un examen en audience, lorsqu'une enquête n'est pas utile. Elle permet donc d'accélérer le cours de la justice256, en jugeant rapidement et efficacement des délits et crimes peu importants. En réduisant les débats sur la culpabilité cette procédure permet d'épargner non seulement du temps d'audience mais également du temps de travail pour le juge. La reconnaissance de culpabilité est une procédure de jugement qui est un moyen alternatif au procès qu'il ne faut surtout pas confondre avec les alternatives aux poursuites pénales.

Ensuite, il est impérieux que le législateur togolais détermine des délais de rigueur en droit pénal. Cela revient à ce que celui-ci introduise dans son Code de procédure pénale une disposition spécifiant clairement lesdits délais. Ces délais de rigueur seront déterminés pour chaque phase de la procédure pénale. Aussi bien avant qu'au cours jugement pénal.

Enfin, pour tenir le procès pénal dans le délai raisonnable, il incombe au législateur de limiter le nombre de renvoi. En s'inspirant de l'article 385 du Code de procédure pénale du Sénégal, il pourra disposer q' « une affaire en état d'être jugée ne peut faire l'objet de trois renvois successifs pour quelque cause que ce soit ». La limitation du nombre de renvoi a pour objectif

251 Article 455 CPPF

252 CASORLA (F.), Revue International de Droit Pénal, 1995, p. 524, Sur le consensualisme en général

253 DILA, « Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) sur service -public.fr, 12-07-2012 ;

254 DELAGE (P.J.), La CRPC : quand la pratique ramène à la théorie, Dalloz 28 juillet 2005.

255A ce sujet le système des pleas agreements aux Etats-Unis (K.S. GALLANT, C. DENIS et C. MATHIEU, « La lutte contre la criminalité en droit fédéral américain », in. Les nouvelles méthodes de lutte contre la criminalité : la normalisation de l'exception. Etude de droit comparé (Belgique, Etats-Unis, Italie, Pays-Bas, Allemagne, France), sous la direction de M.L. CESONI, Bruxelles, Bruylant, 2007, pp. 167 et 168

256 PRADEL (J.), Procédure pénale, ibidem.

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de mettre la pression sur les conseils et leurs parties qui souvent font du dilatoire en vue de ralentir le cour de la justice pénale togolaise.

Au-delà du renforcement des règles de procédures pénales, il faut aussi renforcer les garanties d'un bon procès pénal.

B- Le renforcement des garanties d'un bon procès pénal

Tenir le procès pénal dans un délai raisonnable, implique nécessairement de renforcer ses principes directeurs, qui se retrouvent dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, dans la Convention Européenne des Droits de l'Homme et dans le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques.

Le premier principe est, l'intervention de l'autorité judicaire dans un délai optimal. En effet, tout citoyen a droit au juge dans un délai raisonnable en considération de la loi en vigueur lorsqu'il est soupçonné d'avoir commis une infraction. Nonobstant cela, souvent, des personnes sont détenues arbitrairement en garde à vue et déposées en prison sans avoir vue le juge. Le respect de la règle de l'intervention de l'autorité judicaire est de mise pour accélérer le cours de la justice pénale.

Le deuxième principe est relatif à l'indépendance de la magistrature. Cette indépendance se situe aux niveaux institutionnel et individuel. L'indépendance institutionnelle est consacrée à l'article 14 alinéa 1er du PIDCP257 et à l'article 113 al. 1er de la constitution togolaise qui dispose que « le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ». Le juge doit également préserver le principe d'indépendance. Pour cela, il urge de prendre des dispositions idoines afin de sanctionner les juges défaillants et toutes personnes qui seraient tenter de saboter ce principe. La garantie du principe d'indépendance constituera un vivier de la justice pénale.

Le troisième principe se rapporte à l'impartialité. Il trouve son fondement juridique dans l'article 14 alinéa 1 du PIDCP258 et à l'article 2 des principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature (PFIM)259. Il s'agit de l'impartialité des juges et des tribunaux. Selon ce principe, les juges ne doivent pas prendre parti, ni avoir de préjugés concernant l'affaire dont ils sont saisis. Le tribunal doit également donner une impression d'impartialité aux citoyens.

257 « Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle, [---]».

258 Idem

259« Les magistrats règlent les affaires dont ils sont saisis impartialement, d'après les faits et conformément à la loi, sans restrictions et sans être l'objet d'influences, incitations, pressions, menaces ou interventions indues, directes ou indirectes, de la part de qui que ce soit ou pour quelque raison que ce soit ».

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Le quatrième principe, porte sur le respect de la dignité de la personne de l'inculpé. Ce principe exige que l'inculpé ne soit pas détenu en prison ou en garde à vue dans un délai déraisonnable. Pour cela, les officiers de police judiciaire260 doivent être bien formés et sensibilisés sur la nécessité de respecter et de préserver l'intégrité physique et morale de la personne mise en cause. En gardant la personne accusée de manière arbitraire en détention, cela constitue un traitement inhumain et dégradant à sa personne, qu'aucune raison ne saurait justifier.

Le cinquième principe est relatif au respect du droit à la défense. En vertu de ce principe, « nul ne peut être jugé sans être mis en mesure de présenter ses moyens défense »261 .L'accès à un avocat est l'une des valeurs fondamentales du droit au procès pénal. Les avocats ont libre accès devant toutes les juridictions262. Cette liberté leur est concédée dès le stade de l'enquête préliminaire263. Mais, lorsque la mise en oeuvre de cette disposition devient difficile, il y a violation du droit à la défense. Cette violation a été observée lors des enquêtes concernant les auteurs présumés des incendies des grands marchés de Kara et Lomé où certains OPJ étaient réticents à admettre les avocats dans les locaux de la police judiciaire dès les premières heures de l'enquête préliminaire264. La victime aussi a droit à un avocat. Mais, lorsqu'elle traine à produire les preuves puisque la charge de la preuve lui incombe, fait du dilatoire en changeant constamment de conseil, dans l'unique but de retenir en détention la partie accusée, cette assistance constitue bien évidemment un abus.

Le sixième principe est la présomption d'innocence. Il trouve son fondement dans l'article 7. b. du CADHP265. Celle-ci consiste à considérer la personne inculpée comme étant innocent jusqu'à la fin du jugement266. Par contre, en le détenant pendant un délai déraisonnable, il finit par être considéré comme étant responsable des faits qui lui sont reprochés. Il revient au législateur de prendre des dispositions devant permettre de respecter véritablement la présomption d'innocence de la personne inculpée. Ainsi, elle ne sera pas condamnée par l'opinion avant son jugement. De même, les cours et les tribunaux ne feront pas état de la culpabilité du prévenu avant le prononcé d'un jugement définitif.

260Art. 15 CPPT « Ont qualité d'Officier de police judiciaire : 1°) Le Procureur de la République et ses substituts ; 2°) Les Juges chargés du Ministère public ; 3°) Les Juges d'instruction ; 4°) Les Officiers de gendarmerie, les Commandants de Brigade et les Chefs de poste de gendarmerie ; 5°) Le Directeur de la Sûreté nationale et son adjoint ; 6°) Les Préfets et Sous-Préfets ; 7°) Les Maires ; 8°) Les Commissaires de police et Chefs de poste de police 9°) Les Sous-Officiers de Gendarmerie, les Officiers de Police et les Officiers de police adjoints ».

261 Art. 11 de l'Ordonnance n° 78-35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire du Togo.

262 Idem.

263 Art. 16 al. 3 de la Constitution du Togo : « Tout prévenu a le droit de se faire assister d'un conseil au stade de l'enquête préliminaire ».

264 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme au Togo, op cit, p.30.

265 « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend : le droit à la présomption d'innocence, jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie par une juridiction compétente ».

266 Article 18 de la constitution togolaise

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Le rayonnement de la justice pénale togolaise ne peut être le fait du seul législateur qui doit harmoniser ses textes pour qu'ils soient en adéquation avec le droit au délai raisonnable. Les acteurs aux procès pénal doivent également unir leurs efforts afin de promouvoir la justice pénale dans le délai optimal.

Section II : L'implication des acteurs au procès pénal pour des décisions dans le délai raisonnable

La lutte contre la lenteur de la justice pénale togolaise appelle à une conjugaison d'efforts de part et d'autre, il est convenable que pour une meilleure gestion du temps judiciaire que chaque acteur, puisse prendre conscience à son niveau, des enjeux. Ainsi, cela nécessite non seulement une implication très active du personnel judiciaire (§.1), mais aussi une implication accrue de l'Etat et des parties au procès pénal (§.2).

§.1- Une implication très active du personnel judiciaire

L'implication active du personnel judicaire nécessite un renforcement dudit personnel (A), et un recours fréquent à des alternatives aux poursuites pénales (B).

A- Le renforcement du personnel judiciaire

La justice togolaise doit être un corps composé d'hommes expérimentés, d'une grande compétence, d'une grande rigueur et d'une grande intégrité puisque, le juge, comme le dit Montesquieu, incarne la « puissance de juger ». En vérité, « La magistrature est une des institutions sur lesquelles reposent la démocratie et l'État de droit »267

La prise de conscience s'accompagne bien souvent d'actions hardies. RABELAIS dira science sans conscience n'est que ruine de l'âme268. C'est dire que sans réelle prise de conscience du mal qui ronge, on ne peut aboutir à aucun résultat probant. Le ministre de la justice du Pius AGBETOMEY, a affirmé au cours de la rentrée judiciaire de la Cour d'appel en décembre 2015 que « le juge doit inspirer confiance ; il doit être un recours, un secours et une source d'espérance, un artisan de paix, car avec de bons juges, on peut changer la société ». C'est dans cette même dynamique que, dans la conclusion d'un entretien passé dans le Reflets du palais, numéro 37, le procureur général près la Cour d'appel de Lomé, monsieur KODJO Garba Gnambi lançait un appel aux togolais : « Je voudrais demander à nos compatriotes de faire un peu confiance à notre justice qui, je crois s'améliore de jour en jour même si ce n'est pas au rythme qu'ils auraient souhaité. Aucun magistrat n'est insensible aux

267 DEMBA SY « La condition de juge en Afrique l'exemple du Sénégal »,Etablissements EMILE BRUYLANT, société anonyme, Bruxelles Prés.-Dir. gén.: JEAN VANDEVELD, av. W. Churchill, 221, 1180 Bruxelles, 03-06-2003, p. 349

268 Dans son oeuvre Pantagruel, 1532.

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critiques et chacun de son côté fait ce qu'il peut pour combler les attentes de nos citoyens »269.

Les juges tout comme les greffiers doivent nécessairement recevoir une formation axée sur le droit au délai raisonnable. Pour ce faire, lors de leur formation en tant qu'auditeurs de justice, un cours intitulé « le droit au délai raisonnable » doit leur être dispensé afin qu'ils acquièrent la façon dont une affaire doit être rendue dans le délai raisonnable. Quant aux magistrats et greffiers en fonction, ceux-ci doivent régulièrement être recyclés sur la problématique du droit au délai raisonnable.

La justice doit être rendue dans un délai raisonnable. Il urge à cet effet d'augmenter les ressources humaines. Autrement dit, le nombre des magistrats et des greffiers doit être revu à la hausse. Ce recrutement permettra de pourvoir au manque de personnel judicaire et d'assurer leur indépendance et leur impartialité par rapport à toute influence aussi bien interne qu'externe.

L'instauration du juge des libertés et de la détention et du juge de l'application des peines en nombre suffisant pour remédier à la lenteur judiciaire. Il est opportun de mettre en place des juges qui seront habiletés à suivre l'évolution des dossiers afin d'éviter la lenteur dont la justice pénale se prévaut en permanence. En instituant des juges des libertés et de la détention en procédure pénale, ceux-ci devraient d'abord être « spécialement chargé de statuer sur la mise en détention provisoire d'une personne mise en examen, et sur ses éventuelles demandes de mise en liberté »270. Ensuite, Ils seront également chargés d'autoriser éventuellement le Parquet à accomplir certains actes dans certains types d'enquêtes. Enfin, Ils seront chargés de statuer sur la rétention administrative des étrangers et sur les demandes de prolongation d'hospitalisations psychiatriques sous contrainte. Les juges de l'application des peines seront eux, des juges spécialisés du tribunal de grande instance chargés de suivre les condamnés à l'intérieur et à l'extérieur de la prison.

Concernant les conditions de vie et de travail, les magistrats et les greffiers doivent disposer d'un environnement convenable, des moyens de travaux suffisants voire performants et surtout d'une rémunération raisonnable. Balzac ne disait-il pas déjà au dix-neuvième (19ème) siècle la même chose lorsqu'il écrivait : «Aujourd'hui, le magistrat, payé comme un fonctionnaire, pauvre pour la plupart du temps a troqué sa dignité d'autrefois contre une morgue qui semble intolérable à tous les égards qu'on lui fait ; car la morgue est une dignité

269 Reflets du Palais, N° 37, janvier 2017, p.7.

270 Professeur Jean-Paul DOUCET, « Juge des libertés et de la détention [archive] », in Dictionnaire de droit criminel [archive].

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qui n'a pas de point d'appui. La gît le vice de l'institution actuelle »271. En les privilégiant par rapport aux autres fonctionnaires de l'Etat, cela les motiverait davantage et les protégerait contre les tentations liées à la corruption.

Pour une justice dans un délai raisonnable, les juges doivent être indépendants et impartiaux. Ils doivent travailler afin d'atteindre l'effectivité de l'indépendance et de l'impartialité du pouvoir judiciaire. Ils ont le devoir de faire respecter le droit et d'affirmer l'indépendance de la justice pénale à travers l'exercice de leurs fonctions. Il leur incombe de s'émanciper. Il leur revient d'user de moyens juridiques mis à leur disposition pour condamner juridictionnellement toute tentative de subordination du pouvoir judiciaire au pouvoir exécutif, parlementaire ou de venant de tout bord. Afin de consolider l'indépendance du juge vis-à-vis du pouvoir exécutif, celui-ci pourra saisir la Cour Constitutionnelle pour violation du principe constitutionnel de son indépendance. Cependant, la Cour Constitutionnelle doit être elle-même impartiale afin que, l'indépendance qu'elle garantit au pouvoir judiciaire ne soit plus considérée comme une coquille vide.

La célérité des jugements permet de vider les affaires pendantes devant les juridictions et de punir au besoin les auteurs d'infractions et leurs complices. Néanmoins, le juge SRONVIE Yaovi Olivier relève que la célérité est devenue le leitmotiv qui caractérise, dans la conception du togolais, une justice efficace et performante272. Mais, il prévient qu'elle ne doit pas fasciner au point de perturber l'équilibre des pouvoirs et le déroulement judicieux du procès en bâclant les garanties du procès équitable et qu'au contraire, elle doit être poursuivie avec mesure, pour que le gain de temps ne se traduise pas par une perte de qualité273. En plus, doit-on formuler le voeu que, du fait de l'encombrement de nos juridictions, ou pour toute autre raison, ce temps ne soit pas exagérément prolongé274.Le personnel judiciaire togolais ne peut rendre la justice dans un délai raisonnable que si réellement, ils usent des alternatives aux poursuites pénales.

B- Le recours à des alternatives aux poursuites pénales

La justice pénale a pour rôle de régler les litiges entre les hommes. Mais face à son perpétuel engorgement, elle est devenue lente et il est constant qu'elle seule ne peut tout résoudre. D'autres alternatives de règlements doivent être développées. Il faut dès lors préconiser le règlement non juridictionnel de certains differends. Il s'agit des alternatives aux poursuites pénales. Une alternative aux poursuites pénale « consiste dans le choix offert de ne pas saisir une juridiction de jugement, de ne pas renvoyer l'auteur d'une infraction devant un juge mais

271C.Cass. Audience solennelle de Rentrée des Cours et Tribunaux, année 1992-1993, droits et responsabilité des 2juges.

272 Reflets du Palais N° 28, septembre 2015, « Célérité et qualité : la bonne mesure » p.2.

273 Idem

274 Idem

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d'y préférer une autre réponse »275.

Pour accélérer la justice pénale, le législateur national a consacré deux alternatives aux poursuites pénales. Il s'agit de la médiation pénale et la composition pénale276.

La médiation pénale est selon le législateur « [---] un mécanisme qui vise à conclure une conciliation entre l'auteur d'une infraction ou son représentant légal et la victime ou son représentant légal ou ses ayants droit. Elle a pour objectif d'arrêter les effets des poursuites pénales, d'assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l'infraction et de contribuer au reclassement de l'auteur de l'infraction »277.La médiation pénale est pratiquée lorsque l'infraction est portée à la connaissance du parquet. Il s'agit d'une alternative aux poursuites pénales, qui consiste essentiellement pour la personne sélectionnée par les antagonistes, de proposer à ces deniers un projet de solutions, sans se borner à rapprocher les positions278. Il y a lieu de rappeler que la médiation pénale doit avant tout être considérée comme une alternative aux poursuites pénales et non comme une alternative au classement sans suite279. Sauf exception, le ministère public ne devrait recourir à la médiation pénale que dans les hypothèses où, précédemment, il n'aurait pas décidé de classer sans suite280. Etant le dépositaire légal de la médiation pénale, le ministère public dispose du droit de l'initier ou pas et il n'a pas à motiver sa décision de ne pas y recourir. Il s'agit bien évidement de la manifestation de son pouvoir de juger l'opportunité des poursuites281.

De la définition de la médiation pénale proposée par le législateur togolais, on déduit la conciliation qui elle aussi est une alternative aux poursuites pénales. Selon l'ancien Président de la République du Sénégal M. Abdou DIOUF, lors de la rentrée des cours et tribunaux de 1997: « la conciliation est un mode traditionnel de règlement des litiges dans nos sociétés. L'art de la concertation fait le génie africain. Pourquoi ne pas cultiver nos traditions, lorsqu'il se trouve, qu'elles répondent précisément à un besoin des sociétés...il faut favoriser

275 LAURENT (R), Les alternatives aux poursuites et droit au juge, Master II recherche, droit pénal et sciences pénales, Université Panthéon-Asass Paris II, 2010-2011, p.11.

276 Article 58 CPT 277Article 59 CPT

278 CORNU (G.), vocabulaire juridique, association Henri Capitant, P.U.F.

279 DEMANET (G.), « La médiation pénale », Rev. dr. pén., 1995, pp. 887-921 ; VAN DE KERCHOVE (M.), « Médiation pénale et travaux d'intérêt général - Réflexions et commentaires relatifs aux lois du 10 février 1994 », J.T., 1994, pp. 61-67; ANDRIES (J.-B.), « La médiation pénale », Act. dr., 1996, p. 537 et s.; JACOBS (A.), « Les nouveaux pouvoirs du ministère public », in Doit pénal, C.U.P., vol. 7, 1996, pp. 75-95 ; DE NAUW (A.), « Les modes alternatifs de règlement des conflits en droit pénal belge », Rev. dr. pén., 1997, p. 357 et s. ; MARY (Ph.), « Travail d'intérêt général et médiation pénale - Socialisation du pénal ou pénalisation du social ? », Actes du colloque international organisé pour le60ème anniversaire de l'Ecole des sciences criminologiques Léon Cornil, Bruxelles, 1997 ; MINCKE (C.), « Vers un nouveau type d'utilisation du ministère public. L'exemple de la médiation pénale et de la procédure accélérée », Rev. dr. pén., 1998, p. 644 et s. ; DE VROEDE (N.), « La médiation pénale », J.T., 1999, p. 258 et s. ; DE RUYVER (B.) et VAN IMPE (C.), « De minnelijkeschikking en de bemiddeling in strafzaken », R.W., 2000-2001, p. 445 et s. ; MINCKE (C.), « La médiation pénale », in Droit pénal et procédure pénale, Kluwer, 2002, p.40.

280Ibidems.

281 BOSLY (H.-D.), VANDERMEERSCH (D.) et BEERNAERT (M.-A.), op.cit, p. 223.

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chaque fois que c'est possible le règlement non juridictionnel des litiges »282. Mais, devons-nous considérer la conciliation comme une alternative aux poursuites pénales ou simplement comme un élément entrant dans le champ de définition de la médiation pénale ?

Quant à la composition pénale, le législateur dispose que « le procureur de la République, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, peut proposer, directement ou par l'intermédiaire d'une personne habilitée, une composition pénale à une personne physique qui reconnaît avoir commis un ou plusieurs délits punis à titre de peine principale d'une peine d'amende ou d'une peine d'emprisonnement, ainsi que, le cas échéant, une ou plusieurs contraventions connexes »283. Ces deux alternatives aux poursuites pénales qui doivent être privilégiées par le ministère public, sont insuffisantes et il urge que le législateur les complète.

Aujourd'hui, on distingue de nouvelles alternatives aux poursuites pénales à savoir, la transaction pénale, le rappel à la loi ou l'avertissement, le classement sous condition, la réparation du dommage causé et la probation prétorienne. Ces nouvelles alternatives sont plus usitées et doivent être prises en compte par le législateur.

La « transaction pénale » est un processus extrajudiciaire de règlement des conflits pénaux284. Elle est un mode d'extinction de l'action publique qui se matérialise par le paiement préalable, par la personne présumée des faits, d'une somme d'argent, dont le montant est déterminé par le procureur de la république285. La particularité de la transaction pénale est le fait pour le ministère public de la proposer « même si l'action publique a déjà été initiée à la suite de la saisine d'un juge d'instruction ou d'une juridiction pour autant que celle-ci n'ait pas rendu de jugement ou d'arrêt ayant acquis force de chose jugée »286. Pour sa nature, il faut retenir qu'elle est un moyen administratif bilatéral d'extinction des poursuites287 et non un contrat civil de transaction, ni une peine.

Le « rappel à la loi ou l'avertissement» consiste pour le Procureur de la république de rappeler à l'auteur des faits les obligations résultant de la loi. Cette mesure est utilisée dans le but de protéger la jeunesse. Elle est consacrée aussi bien par le législateur des Pays-Bas, qui évoque le classement conditionnel288 que par le Code de procédure pénale français289. « Plusieurs

282 Cour de Cassation, audience solennelle de rentrée des cours et tribunaux, vol.3 année 97-98. 283Article 61 CPT

284 FERNANDES-BERTIER(M.) et LECOCQ (A.), « L'extension de la transaction pénale en droit belge : une évolution en demi-teinte », Revue de droit pénal de l'entreprise, 2011, pp. 219-238, spéc. p. 220.

285 FERNANDES-BERTIER (M.), « Analyse critique de l'extension du régime de la transaction pénale en droit belge », in Actualités de droit pénal, C.U.P., vol. 128, Anthémis, Limal, 2011, p. 202.

286Voy. E. DE FORMANOIR, « L'extension de la transaction pénale par les lois des 14 avril et 11 juillet 2011, Rev. dr. pén., 2012, pp. 245-276 ; K. VAN CAUWENBERGHE, « La nouvelle transaction devient la "jurisprudence" du ministère public », Vigiles, 2011, pp. 117-118 ; G. SCHOORENS, « La transformation de la transaction », Vigiles, 2011, pp. 113-116. 287 FRANCHIMONT (M.), JACOBS (A.) et MASSET (A.), op.cit., p. 105 ; DE RUYVER (B). et VAN IMPE (C.), « De minnelijkeschikking en de bemiddeling in strafzaken », R.W., 2000-2001, p. 445 et s.

288Art. 167 Wetboekvoorstrafvordering.

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travaux criminologiques ont, [ainsi], montré que pour des primo-délinquants un rappel de la norme correctement adressé pouvait entraîner une prise de conscience de la portée de l'acte commis et prévenir une récidive future pour autant que l'interaction établie, à cette occasion soit de qualité »290. Cependant, cette mesure peut également être appliquée aux personnes âgées en fonction de la nature de l'infraction commise.

Le « classement sous condition » consiste pour le Procureur de la République de classer sans suite une infraction lorsque l'auteur des faits consent à exécuter une obligation. Cette obligation peut être, l'orientation vers une institution sanitaire, sociale ou professionnelle, l'accomplissement d'un stage ou d'une formation dans un service ou un organisme sanitaire social ou professionnel, à ses propres frais.

La « réparation du dommage causé ou la demande de régularisation au regard de la loi ou du règlement » consiste pour la personne coupable de réparer le dommage causé ou de régulariser sa situation vis-à-vis de la loi.

La « probation prétorienne » est définie comme « La décision circonstanciée du parquet en vue de classer sans suite en fonction de la motivation affichée par l'intéressé pour adapter son comportement en répondant à certaines conditions telles que, par exemple, l'absence de récidive, la non-fréquentation du milieu toxicomane, la désintoxication »291.

L'inscription dans la loi pénale togolaise de ces alternatives aux poursuites pénales et leur pratique, permettraient de faire économie du procès pénal, de déjudiciariser de nombreux contentieux. Ce déchargement de la justice pénale, permettra donc de répondre au problème de sa lenteur qui est la principale critique. Il faut relever que ces alternatives aux poursuites pénales doivent être réservées à des conflits de moindre gravité c'est-à-dire d'une peine d'emprisonnement de zéro à cinq ans.

A l'instar du personnel judicaire, d'autres acteurs aussi doivent s'activer pour l'accélération de la justice pénale togolaise.

§.2- Une implication accruede l'Etat et des parties au procès pénal

Pour rendre une justice pénale dans le délai raisonnable, l'implication de l'Etat togolais premier comptable de l'accélération de ladite justice(A) ainsi que des parties au procès pénal et de leurs conseils (B) s'imposent.

289Art. 41-1, 1° du CPPF (« Procéder au rappel auprès de l'auteur des faits des obligations résultant de la loi. »).

290Voy. à ce sujet, D. TAIT, The effectiveness of criminal sanctions : anatural experiment, report 33/96-7 to the criminologyresearchconncil, University of Camberra, DMT Subdivision Management and Law, n° 2001/1, pp. 7 et 8 qui synthétise plusieurs travaux sur cette question.

291Monit, 2 juin 2003.

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A- L'Etat togolais, principal débiteur des exigences de célérité du procès pénal

L'Etat togolais est le premier responsable qui doit oeuvrer à ce que les jugements en matière pénale, soient rendus dans un délai optimal. Conscient de cette obligation qui incombe particulièrement à l'Etat togolais, le ministre de la justice Pius AGBETOMEY, réaffirmant la volonté du gouvernement de promouvoir le traitement des dossiers judiciaires dans un délai raisonnable, croit fermement que : « Si une affaire est soumise à une juridiction, et que cette affaire est réglée dans les meilleurs délais, tout le monde s'en sort heureux »292.

En adhérant au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, l'Etat s'oblige à son caractère « self executing ». Le « self executing » trouve son origine dans le droit constitutionnel des Etats Unis d'Amérique293 et a été précisé par la doctrine en droit international. Selon M. SORENSEN, « une disposition d'un traité serait self executing, c'est-à -dire auto exécutoire, si elle est conçue en des termes qui permettent de la considérer comme s'adressant non seulement aux Etats contractants, mais aussi, sans modification de texte, aux sujets de droit interne. Elle se prêterait alors à une application immédiate par les tribunaux internes »294.

En n'adhérant à la charte africaine des droits de l'homme, l'Etat du Togo s'est engagé à établir une organisation judiciaire répondant aux exigences de célérité. Pour respecter cet engagement, il lui incombe impérativement d'oeuvrer afin que les affaires ne s'enlisent pas. A cet effet, l'organisation du service de la justice pénale doit se faire. Cette organisation garantira à tout justiciable, le droit d'obtenir une décision définitive sur les contestations relatives à ses droits et obligations dans un délai raisonnable. Cette exigence se rattache au principe de bonne administration. En tout état de cause, il s'agit d'une obligation de résultat qui incombe à l'Etat. Pour se faire, il doit fournir des Hommes et du matériel.

S'agissant des Hommes, l'Etat doit recruter en nombre suffisant des magistrats et des greffiers compétents, en leur offrant aussi bien des formations que des sensibilisations axées sur « le droit au délai raisonnable ». Quant aux matériels, l'Etat a l'obligation de mettre les juges et les greffiers dans de meilleures conditions de travail en leur fournissant les moyens requis pour assurer une justice pénale dans le délai escompté. Il s'avère nécessaire de créer de nouvelles Cours d'appels dans les régions d'Atakpamé, de Sokodé et de Dapaong ; des

292 Reflets du Palais N° 28, septembre 2015, « Célérité et qualité : la bonne mesure » p.2.

293 . Dansl'affaire Forster etElainEnlilson, le Chief Justice Marshall affirmait « Our Constitution declares a treaty to be the law of the land. It is, consequently, to be regarded in Courts of justice as equivalent to an act of the legislature, whenever it operates of itself without the aid of any legislative provision. But when the terms of the stipulation import a contract, when either of the parties engages to perform a particular act, the treaty addresses itself to the political, not to the judicial department; and the legislature must execute the contract before it can become a rule for the Court». Cité par ERADES ET GOULD, «The relation between international law and municipal law in the Netherland and in the United States», Leyde, 1961.

294 SORENSEN (M.), « Obligations d'un Etat partie à un traité sur le plan de son droit interne ».

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tribunaux dans chaque préfecture du Togo et d'un Barreau près la Cour d'appel de Kara pour décongestionner celui de Lomé. Ce qui entrainera la décentralisation de la justice togolaise. Il faut également songer à multiplier les assises, du moins à chaque trimestre de l'année judiciaire.

La responsabilité de l'Etat doit être engagée lorsqu'un dommage a été causé à un justiciable, en raison de la lenteur de la procédure pénale. L'Etat doit donc rendre des comptes sur la célérité de sa justice pénale puisqu'il en est le principal débiteur. Ces exigences de célérité du procès pénal sont prévues par le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques et consacré à l'article 19 de la loi fondamentale togolaise. Le dysfonctionnement de la justice pénale devient donc un vecteur de l'objectivation de la responsabilité de l'État. En France par exemple, le législateur a montré la « voie d'une objectivation de la responsabilité du fait des dysfonctionnements de la justice en prévoyant la responsabilité sans faute de l'État pour deux dysfonctionnements, à la fois particuliers et extrêmes dans leurs conséquences dommageables, à savoir les erreurs judiciaires et les détentions provisoires injustifiées. Cette objectivation peut s'expliquer par la privation de liberté qu'entraînent ces dysfonctionnements, dont l'importance des préjudices induits justifie qu'ils soient réparés automatiquement, ce qui ne signifie pas qu'ils le soient sans conditions »295. Cependant,« Indépendamment de cette objectivation ancienne, un récent mouvement dans le même sens est perceptible, tant dans l'évolution de la jurisprudence relative à la réparation des conséquences dommageables du dépassement du délai raisonnable de jugement [---] en effet, le juge administratif a estimé dans [---] son raisonnement que la méconnaissance du délai raisonnable de jugement, même dans une affaire qui est encore pendante, peut avoir occasionné aux justiciables « un préjudice moral consistant en des désagréments qui vont au-delà des préoccupations habituellement causées par un procès » 296.

Le Professeur VUNDWAWE plaide pour l'effectivité d'une indépendance de la Justice à l'égard du pouvoir exécutif. Pour cela,« il estime qu'il faudrait que le Gouvernement qui a le monopole de la puissance publique s'interdise de refuser d'appliquer les décisions judiciaires ou de faire obstruction à leur exécution et d'interférer dans les nominations et promotions des magistrats en gênant le fonctionnement normal du Conseil supérieur de la magistrature [---

295 Voir sur ces questions qui ne seront pas traitées ici, la contribution de Munoz (F.), « L'indemnisation des détentions provisoires injustifiées : du secours à la garantie sociale », Fauvelet (E.), « La jurisprudence de la commission nationale d'indemnisation des détentions », inDeguergue (M.) dir.,Justice et responsabilité de l'État, PUF, coll. Droit et justice, 2003, p. 11 7 et 139.

296 CE, 25 janvier 2006, SARL Potchou,.

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] »297. En se remettant à la bonne foi du Gouvernement et de l'Administration, il faut rappeler que le respect de l'indépendance de la justice relève de leur obligation.

L'Etat togolais doit prendre en compte certaines dispositions, afin que sa justice pénale soit rendue dans le délai raisonnable. L'Etat doit en premier lieu adopter « le principe d'équilibre et de qualité globale de la justice pénale ». D'une part, il revient à l'Etat d'équilibrer et de contrôler les ressources tant humaines que matérielles, qu'il est censé mettre à la disposition de la justice pénale. D'autre part, afin d'atteindre l'objectif de rendre la justice pénale togolaise dans un délai optimal, l'Etat doit nécessairement rendre compatibles les principes dont il assure le respect, avec le souci légitime d'efficacité de la justice.

En second lieu, l'Etat doit se doter d'« ambitieux outils de mesure et de connaissances »toujours dans le but d'améliorer la célérité de la justice pénale. La mise au point des statistiques sur les durées des procédures de cette justice et des systèmes simples d'information de gestion, s'impose. Cette mesure figure parmi les priorités affichées au Programme des Nations Unies pour la prévention du crime dans la justice pénale depuis de nombreuses années298. Cela permettra de mieux contrôler le déroulement de la procédure pénale, en prenant connaissance de l'état d'avancement des dossiers, en recadrant les affaires en retard et en sanctionnant les juges récalcitrants au délai raisonnable.

En outre, l'Etat doit faire l'effort de « concilier toutes les exigences qui contribuent à un procès équitable dans un délai raisonnable ». Il convient dès lors de mettre tout en oeuvre afin que les garanties procédurales soient réellement respectées. Ceci permettra à la justice pénale d'être diligente.

La participation effective des parties et de leurs conseils s'avère nécessaire pour parvenir à une justice rendue dans un délai raisonnable.

B- L'engagement plus actif des parties et de leurs conseils

Les parties au procès pénal et leur conseil doivent réellement faire diligence en jouant avec fermeté leur rôle dans la quête de l'efficacité de la justice pénale.

On ne peut nullement bâtir une justice efficace sans l'implication des justiciables au nom de qui elle est rendue. Critiquer la justice est un droit du citoyen, mais formuler une critique objective est son devoir299. Il n'est donc plus un secret que les justiciables ont leur partition à

297 FICET (J.), Indépendance et dépendance de la justice, le concept d'indépendance de la justice comme enjeu des luttes politiques en France, doctorat en science politique, Université de Grenoble, décembre 2005, pp 7-8.

298NATIONS UNIES OFFICE CONTRE LA DROGUE ET LE CRIME Vienne NATIONS UNIES Informations sur la justice pénale,Printed in Austria V.07-86368--February 2008--500p.1.

299 SRONVI (Y. O.), Reflets du Palais N° 31, janvier 2016, « La contribution du justiciable » p.2.

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jouer pour une meilleure administration de la justice300. Selon Monsieur GAMATHO, les justiciables «[---] ont le droit à la justice, le droit au règlement rapide de leurs affaires, etc., il n'en demeure pas moins qu'ils ont aussi le devoir d'aider les acteurs judicaires à mieux les servir en respectant eux-mêmes les principes fondamentaux d'indépendance et d'impartialité. Ils doivent éviter de pousser les juges à la dépendance ou à la partialité dans le règlement des litiges en exerçant sur eux toutes formes de pressions hégémonique, économique, financière, familiale, ou relationnelle »301.

Devant la justice pénale, le plaideur doit avoir un comportement exemplaire. Il est tenu à cet effet d'accomplir avec diligence les actes le concernant.

Le plaideur ne doit pas user de manoeuvres dilatoires dans le but de voir la personne inculpée être détenue en prison pendant des mois et des années sans jugement. Ainsi, il lui est interdit de soudoyer les juges pour qu'ils ne détiennent plus arbitrairement les détenus. Il doit pouvoir communiquer à la justice les pièces qu'elle lui réclame dans le délai optimal puisque la charge de la preuve lui incombe. En s'abstenant de procéder au changement sans cesse ou tardif de conseil, il apportera donc sa pierre à l'édifice d'une justice pénale qui s'inscrit dans le délai raisonnable. Les voies de recours bien que relevant de ses prérogatives doivent être exercées dans les normes pour qu'elles ne soient pas préjudiciables à la partie adverse et au bon fonctionnement de la justice pénale. Le requérant présent à l'audience et n'ayant aucune intention malveillante pour retarder le procès pénal, agira ainsi pour la bonne marche de l'institution judiciaire.

Le plaideur ne doit pas exploiter les possibilités offertes par le droit interne pour abréger la procédure pénale en voulant nécessairement opter pour certaines alternatives au procès pénal lorsque cela n'est pas requis.

Le respect du droit au délai raisonnable devant la justice pénale doit être le cheval de batail des justiciables puisque, cela produit des intérêts pour chaque partie. Lorsque la justice est rendue dans le délai raisonnable, la vérité surgit tôt et la victime obtient réparation du préjudice à elle subi. Le prévenu de l'infraction quant à lui, est situé sur son sort : il sera libéré s'il n'est pas reconnu coupable ou condamné si la justice le reconnait coupable et dans ce cas il exécutera sa sentence. Pour la société, l'image de la justice pénale sera redorée si celle-ci est rendue dans un délai raisonnable. Ceci constituera pour les citoyens, une motivation à saisir la justice au lieu de vouloir recourir à d'autre alternative de règlement illégal des litiges tel le verdict populaire.

300 KODJO (G. G.), Reflets du Palais N° 42, juin 2017, « Aidez-nous à mieux vous servir » p.2.

301 Reflets du Palais N° 42, juin 2017, « Aidez-nous à mieux vous servir » p.2.

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Un avocat est un expert en droit qui défend ou assiste une partie dans un procès. Mais que serait la justice sans avocat ? A cette interrogation soulevée par KODJO G. Gnambi, il est répondu que « les avocats forment avec les magistrats un couple nécessairement désuni mais auquel le divorce est interdit »302. Un avocat pénaliste a plusieurs qualités à savoir, la bonne aptitude à la communication et les capacités de raisonnement cohérent sur le cas qu'il défend. Face à ses éminentes qualités dont il peut se prévaloir, l'avocat pénaliste doit pouvoir réagir avec promptitude dans l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit en vertu de son serment faire preuve de probité morale et d'honnêteté professionnelle en conseillant efficacement ses clients. L'avocat a donc l'obligation d'influencer objectivement le rythme du temps pénal. C'est à juste titre que Maître Kokou ANANI, avocat à la Cour martelait que « ce qui importe à l'avocat, c'est qu'il puisse voir ses dossiers être traités dans un délai assez court et que juste après que la décision ait été rendue, qu'il puisse en obtenir copie »303.

Relevant de la corporation de juristes, l'Ordre des avocats du Togo, doit pouvoir mettre en place des lois et des stratégies idoines permettant aux avocats de travailler au respect stricte des délais pénaux.

Pour une bonne administration de la justice pénale, les justiciables et leur conseil doivent cesser d'instrumentaliser le temps pénal.

CONCLUSION PARTIELLE

Les problèmes posés par la lenteur de la justice pénale togolaise ne sont pas rédhibitoires. En effet, comme l'a martelé la Cour Européenne des Droits de l'Homme, le délai de résolution d'un litige ne dépend pas uniquement de la plus ou moins grande diligence du juge, mais également du comportement des parties et de la complexité juridique du litige304.

La célérité de la procédure ne dépend pas du comportement d'un seul des acteurs du procès305. Pour une justice pénale dans un délai raisonnable, les acteurs doivent incontestablement juxtaposés leurs actions.

Afin de trouver le juste temps pour une justice répressive efficace au Togo, on ne saurait aménager le temps pour parvenir au traitement des affaires pénales dans un délai raisonnable sans réformer la prescription en matière pénale.

302 KODJO (G. G.), Reflets du Palais N° 46, octobre 2017, « Aidez-nous à mieux vous servir » p.2.

303 Reflets du Palais N° 28, septembre 2015, « Célérité et qualité : la bonne mesure » p.2.

304 CEDH, 24 octobre 1989, H. c/ France, RFDA 1990, p. 203, note O. DUGRIP et F. SUDRE, LPA 28 février 1990, p. 12, note L. RICHER.

305 CHOLET (D.), La célérité de la procédure en droit processuel, Paris, thèse, LGDJ, Bibliothèque de droit privé, t. 466, 2006, pp. 150 et s.

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CHAPITRE II

LA NECESSITE DE REFORMER LA PRESCRIPTION EN

MATIERE PENALE AU TOGO

Héritier du droit français, le droit pénal togolais a toujours admis le principe de la prescription en matière pénale à l'antipode des pays de Common Law qui l'excluent. La jurisprudence française considère la prescription comme une règle d'ordre public et le juge doit veiller à son respect. La prescription en matière pénale au Togo suscite des interrogations variées en raison de ses imperfections. En effet, les règles légales et jurisprudentielles qui régissent aussi bien la prescription de l'action publique que la prescription des peines sont peu à peu devenues inadaptées aux attentes de la société et souffrent aujourd'hui d'une incohérence et d'une instabilité préjudiciables à l'impératif de sécurité juridique. Il incombe dès lors au législateur national de réformer la prescription en matière pénale.

La réforme est définie comme des mesures prises ou des changements apportés pour affermir, améliorer et consolider une situation donnée. Ainsi, le droit positif togolais relatif à la prescription en matière pénale nécessite d'être reformée.

Quelles sont les innovations qu'il faut apporter pour combler les insuffisances constatées au niveau des textes de lois afin de rendre perfectible la prescription en matière pénale ? Aussi, quel équilibre peut-on établir entre la nécessité de poursuivre et de sanctionner les infractions à la loi pénale afin de pouvoir mettre un terme au trouble causé à la société par celle-ci et la volonté d'oublier les agissements commis par le délinquant, assurant par-là même l'impunité de ce dernier ?

Si le droit pénal togolais qui incrimine et qui punit est évolutif, il est évident que la fonction du temps apparaît essentielle dans l'application qui en est faite. En matière pénale, la prescription est un mode général d'extinction du droit de poursuivre et du droit d'exécuter une peine.

Réformer la prescription en matière pénale revient à « assurer un meilleur équilibre entre l'exigence de répression des infractions et l'impératif de sécurité juridique et de conservation des preuves, principalement en allongeant les délais de prescription de l'action publique en matière criminelle et correctionnelle, tout en unifiant ces délais avec ceux de la prescription

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de la peine, et en consacrant, précisant et encadrant les règles jurisprudentielles relatives aux causes d'interruption et de suspension de la prescription »306

Pour un droit de la prescription en matière pénale moderne et cohérent, il est opportun que le législateur réforme aussi bien la prescription de l'action publique (section I), que la prescription des peines (section II).

Section I : Une réforme plus efficace de la prescription de l'action publique en droit pénal togolais

Pour réformer la prescription de l'action publique en droit pénal, il est important d'étudier la nécessité de préserver ce principe (§.1), tout en songeant à le revaloriser (§.2).

§.1- La préservation du principe de la prescription de l'action publique

La prescription de l'action publique est un impératif qui existe pour imposer une limite à la possibilité d'engager des poursuites pénales. Cependant elle reste une institution discutée dans la mesure où si certains ont proposé son maintien, d'autres par contre estiment qu'elle doit être abolie307. L'étude de la prescription en droit pénal permet de constater qu'elle doit être maintenue. La préservation de la prescription de l'action publique passe par une analyse de ses fondements (A), et de ses critiques (B).

A- Les fondements du maintien de la prescription de l'action publique

Le maintien de la prescription de l'action publique en droit pénal se justifie par une double acception. Il s'agit des fondements traditionnels et des principes du droit contemporain.

S'agissant des fondements traditionnels au maintien de la prescription de l'action publique, ils sont de trois ordres.

D'abord « l'intérêt de la paix et la tranquillité sociale », ce fondement social de la préservation de la prescription de l'action publique entraine la cessation des poursuites après un certain délai. La prescription de l'action publique répond donc à des considérations évidentes de bonne administration judiciaire. Avec le temps, l'impact de l'infraction sur la société s'atténue, et ses effets sont oubliés308, la paix sociale se rétablit d'elle-même et il ne serait pas nécessaire de recourir à la sanction pénale309. Dans cette perspective, le Professeur

306Circulaire du 28 février 2017 présentant les dispositions de la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale.

307 LARGUIER (J), note sous CA Rouen,12 juillet 1954, D.1955, J.p.261.

308 Voir COSTAZ, « Le droit à l'oubli », Gaz ; Pal. 1995, t2, Doctrine, p.961

309FOURMY (V.), Le désordre de la prescription de l'action publique, Master de Droit Pénal et Sciences Pénales, UNIVERSITÉ PARIS II PANTHÉON-ASSAS, 2011, p.21.

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BOULOC, affirmait qu' « au bout d'un certain temps, mieux vaut oublier l'infraction qu'en raviver le souvenir »310.

Ensuite, on a le « dépérissement des preuves ». En effet, l'écoulement du temps trop long, mène à des preuves souvent fragilisées. En d'autres termes, les indices ou les traces matériels disparaissent et les témoignages tant à charge qu'à décharge deviennent plus fragiles. Ce qui accroît de ce fait le risque d'erreur judiciaire311. A juste titre, HELIE affirmait qu' « il y a lieu de présumer que les indices des crimes, comme ceux de l'innocence, se sont peu à peu effacés, qu'ils ont peut-être entièrement disparus, que la vérité n'apparaît que voilée ou altérée, que les juges, statuant sur des éléments mutilés par le temps n'arriveraient à un jugement qu'en s'appuyant sur des erreurs312 Ce qui oblige dès lors à renoncer à l'exercice de l'action publique.

Enfin, la prescription apparaît comme « la sanction de la négligence de la société ou du ministère public à exercer les poursuites ». Elle est la sanction de la négligence des autorités judiciaires qui n'ont pas été capables d'agir en découvrant l'infraction et en identifiant l'auteur dans un délai raisonnable. La société a pour tâche de poursuivre les délinquants. Lorsqu'elle s'abstient d'agir, elle subit selon PRINS « les inconvénients de son inertie ou de son impuissance »313. A cet effet, Mme Dominique-Noëlle COMMARET, avocat général à la Cour de cassation, soulignait : « parce que tout temps mort excessif laisse présumer le désintérêt de la victime ou du ministère public et leur renoncement, dans un système marqué par le principe d'opportunité des poursuites, la prescription apparaît nettement comme la réponse procédurale apportée à l'inaction ou l'oubli, volontaire ou involontaire »314.

Par ailleurs, il faut relever les principes du droit contemporain en faveur de la conservation de la prescription de l'action publique. Ils sont doubles.

En fait, la notion de procès équitable implique en particulier le recours à un système de preuve rigoureux tel que l'exige article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La prescription de l'action publique se fonde également sur le droit pour chacun d'être jugé dans un délai raisonnable, imposé aussi bien par l'article 9, paragraphe 3 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques que par l'article 7 de la Charte africaine

310 BOULOC (B.), Procédure Pénale, Dalloz, Coll. Précis, 22ème ed, 2010, N°203, p.173.BOULOC, Procédure Pénale, Dalloz, Coll. Précis, 22ème ed, 2010, N°203, p.173.

311 JACOBS (A.).), « La prescription en matière pénale », in , Formation Permanente C.U.P-U.., Liège, 1998, p.115-155

312 HELIE (F.), Traité de l'instruction criminelle ou théorie du Code d'instruction criminelle, Paris, 2ème ed., T.III, 1860, N°675 et s. cité par A.MIHMAN, op. cit., N°257, p.290.

313 PRINS (A.), Science pénale et droit positif, Bruxelles : Bruyant- Christophe, Paris : A. Marescq 1898, § 960. 314COMMARET (D.-N.), « Point de départ du délai de prescription de l'action publique : des palliatifs jurisprudentiels faute de réforme législative d'ensemble », Revue de science criminelle, 2004.

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des droits de l'homme et des peuples faisant partie intégrante de la Constitution de la IVème République du Togo de 1992 révisée par les lois de 2002.

La conservation de la prescription de l'action publique dans l'arsenal juridique togolais est impérative. Toutefois, « Il en ressort que la prescription de l'action publique n'apparaît plus tant comme une « loi sociale » qui justifierait une règle de droit mais plutôt comme une règle de droit, fondée par le souci de tenir, à l'intérieur de la justice pénale, un quadruple équilibre :- un équilibre entre le droit à la sécurité et celui du procès équitable ;- un équilibre entre le droit des victimes d'obtenir réparation après une déclaration de culpabilité de l'auteur d'une infraction et celui de chacun d'être jugé dans un délai raisonnable ;- un équilibre entre la mise en oeuvre des moyens techniques d'élucidation des infractions, en constante évolution et la nécessité de délimiter le champ du travail de la police, de fixer des priorités pour éviter la paralysie, la dispersion des moyens, l'arbitraire de choix laissés aux forces de police ;- et enfin, un équilibre entre les différents foyers de sens de la peine, entre le rappel de la loi et la défense de la société d'une part qui n'impliquent pas la prescription et le sens éducatif, le principe de proportionnalité, la nécessité et l'utilité de la peine qui eux la justifient »315

En définitive, « Le choix de maintenir la prescription de l'action publique peut être fait en raison de ce que des arguments adaptés aux réalités contemporaines la fondent parfaitement. Mais aussi parce que l'institution de la prescription apparaît, à bien des égards, comme une pièce logique d'un système juridique et le choix de sa suppression ne permet pas de trouver dans ce contexte juridique et culturel les mécanismes nécessaires qui s'y substitueraient »316.

Il ressort de ces fondements que le coupable est le véritable gagnant. C'est ce qui motive d'ailleurs GARCON à définir la prescription comme « le privilège pour le coupable de n'être plus poursuivi lorsqu'une certaine durée s'est écoulée »317.

Toutefois, ces fondements de la préservation de la prescription de l'action publique font l'objet de critiques.

B- Les critiques des fondements du maintien de la prescription de l'action publique

Les critiques sont des jugements portés sur l'efficacité aux fondements du maintien de la prescription de l'action publique.

Premièrement, en matière de fiabilité de la preuve, les progrès scientifiques permettent de conserver la preuve de l'infraction aussi tardivement qu'il soit. Aujourd'hui, de nouveaux

315DANET (J.), « La prescription de l'action publique, un enjeu de politique criminelle », Archives de politique criminelle 2006/1 (n° 28), p. 87.

316DANET (J.), « La prescription de l'action publique, un enjeu de politique criminelle », Archives de politique criminelle 2006/1 (n° 28), p.89.

317 GARCON « De la prescription », Le Monde 03 février 1960.

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moyens de preuve ont vu le jour. Il s'agit en particulier du recours aux empreintes génétiques et de la meilleure conservation des scellés qui permettent de rendre tardivement la justice pénale. Il est donc indéniable que l'évolution des techniques scientifiques pour la collecte des preuves oblige le législateur à repenser aux délais de prescription de l'action publique318.

Deuxièmement, il est inadmissible de sanctionner la négligence de la société de n'avoir pas poursuivi le délinquant parce que, quoi qu'on dise, le contentieux de certaines infractions telles que les infractions sexuelles ou des violences conjugales témoigne d'ailleurs des difficultés des victimes à dénoncer les faits dans le temps de la prescription : « La sanction de la négligence de la victime ne peut être aujourd'hui acceptée comme fondement général de la prescription »319.

Troisièmement, l'argument de la préservation de la paix sociale n'est pas du tout édifiant dans la mesure où le coupable bénéficiaire de la prescription de l'action publique n'ayant pas été sanctionné pour être moralisé ou être ramené à la raison, il est fort probable qu'il récidive surtout quand il n'a pas eu de remord ou de repentance. C'est ainsi que RASSAT renchérit en considérant que « l'absence de poursuites des premières infractions d'un individu a pu le renforcer dans un sentiment d'impunité et l'inciter, au contraire, à en commettre de nouvelles [et que,] l'absence de poursuite a empêché d'appliquer tout de suite à l'intéressé les mesures qui auraient été propres à le détourner de la délinquance »320. Ainsi la paix sociale tant convoitée serait une utopie, une chimère. Cependant s'il est probable que certains primo délinquant peuvent se repentir en se ressaisissant, les délinquants professionnels, les criminels nés et les criminels d'habitudes qui sont incorrigibles n'y sont pas susceptibles. C'est d'ailleurs le raisonnement du Professeur PRADEL qui estime que « la prescription est pernicieuse (...) Elle nuit à la protection de la société en profitant aussi bien aux grands malfaiteurs qu'aux petits délinquants alors que le temps ne saurait atténuer les dangers des premiers »321. C'est dans le même contexte que s'inscrit GARRAUD lorsqu'il jugeait la théorie du repentir du coupable d'être surannée car la quasi-totalité des délinquants ne se repend pas et ne s'amendent pas par l'effet du temps322.

Quatrièmement, on aurait passé sous silence la théorie de la présomption d'oubli qui fort malheureusement est discutable. En effet, si la victime venait à demander la réparation du préjudice qu'elle a subi bien que tardivement, cela sous-entend incontestablement qu'elle ne

318 Voir sur le sujet de la preuve scientifique : J-R.DEMARCHI, La preuve scientifique et le procès pénal, Thèse, Université de Nice Sophia-Antipolis, 2010.

319DANET (J.), GRUNVALD (S.), LE GALL (Y.) et HERZOG-EVANS (M.), Prescription, amnistie et grâce en France, Université de Nantes (recherche subventionnée par le GIP « Mission Recherche Droit et Justice »), mars 2006, p. 125.

320 RASSAT (M-L.), Procédure Pénale, PUF, 2ème éd., 1995, p. 469.

321 PRADEL (J.), Procédure Pénale, Cujas, 15ème ed., 2010, N°236, p.184 mais aussi R.MERLE et A.VITU, op. cit.,N°50, p.184.

322 GARRAUD (R.), Traité théorique et pratique du droit pénal français, préc., T. II,§ 723, p.542.

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l'a pas oublié et que on ne saurait oublier une infraction aussi facilement que cela. Le temps n'a donc pas vocation à accorder un certain pardon moral à l'auteur d'une infraction et on ne saurait renoncer à la quête de la sanction. Ce qui motive le professeur RENUCCI à s'interroger en ses termes : « Comment admettre l'oubli dès lors que la victime réclame réparation, même si cette demande est tardive ? »323.

Au regard de ces critiques, il urge de procéder à l'allongement des délais de la prescription de l'action publique.

§.2- La prorogation des délais de la prescription de l'action publique

La prescription de l'action publique à cette époque où nous en sommes, a besoin d'être revalorisée. Pour y parvenir, il incombe au législateur non seulement d'allonger les délais de la prescription de l'action publique de droit commun existant (A)mais également, vue la gravité de certaines infractions, d'instaurer certains délai dérogatoire au régime de droit commun à la prescription de l'action publique (B).

A- L'allongement des délais de la prescription de l'action publique de droit commun

Selon l'honorable Georges FENCH, les délais de prescription de l'action publique c'est à dire dix ans (10) pour les crimes et trois ans (03) pour les délits en vigueur avec le Code d'instruction criminelle promulgué le 16 novembre 1808 en France et modifié aujourd'hui mais toujours d'actualité dans le Code de Procédure Pénale Togolais n'est plus du tout adapté à la société actuelle en raison d'une part de l'augmentation permanente de l'espérance de vie et d'autre part des nouvelles méthodes et techniques d'investigation de recueil et de conservation de preuves qui permettent justement de clarifier de très anciennes affaires 324.

Il est évident que les délais de prescription de l'action publique apparaissent aujourd'hui excessivement courts. Pour les adapter à la société qui évolue de jours en jours, il urge de les allonger.

L'allongement des délais de la prescription de l'action publique porte sur la révision des dispositions relatives à la classification tripartite des infractions à la loi pénale.

D'abord, les crimes qui se prescrivent initialement après dix (10) ans doivent désormais être fixés à vingt-cinq (25) ans.

Ensuite, les délits qui se prescrivent initialement après trois (03) ans doivent passer à six (06) ans.

323 RENUCCI (J-F.), Infractions d'affaires et prescription de l'action publique, DALLOZ. 1997, Chronique. P.23.

324 FLEURIOT (C.), « Proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale », DALLOZ actualité, 17 février 2017 ; Circulaire du 28 février 2017 présentant les dispositions de la loi n°2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale, p. 2

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Enfin, les contraventions qui se prescrivent initialement après un (01) an doivent passer à un an et demi (01,5) ou à deux ans (02).

Ces modifications des délais de la prescription de l'action publique de droit commun visent à dissuader d'éventuel contrevenant à la loi pénale et à mieux protéger l'intérêt des victimes en leur accordant plus de droit de manoeuvre d'autant puisque l'avènement des nouvelles méthodes et techniques d'investigation, de recueil et de conservation des preuves est devenu une réalité.

Aussi, y a -il lieu de rappeler que cet allongement des règles de la prescription de l'action publique préconiser aura le mérite d'assurer un meilleur équilibre entre l'exigence de répression des infractions et l'impératif de sécurité juridique en matière pénale.

S'agissant du point de départ de la prescription de l'action publique, le législateur doit les maintenir au jour de la commission de l'infraction à l'exception des infractions occultes et dissimulées.

L'aménagement des délais de la prescription de l'action publique nécessite de prévoir des délais dérogatoires au régime droit commun.

B- L'instauration de délais de prescription dérogatoires

Pour conférer plus de crédibilité au régime de la prescription de l'action publique, des délais dérogatoires doivent être envisagés dans trois domaines: certaines infractions de droit commun, les infractions répétées, les infractions occultes et dissimulées.

S'agissant de certaines infractions de droit commun dont il faut prévoir des délais dérogatoires à la prescription de l'action publique, il s'agit de certains crimes et délits. D'abord, le législateur national doit prescrire à trente (30 ) ans les crimes de nature terroriste, le trafic de stupéfiants, a prolifération d'armes de destruction massive et de leurs vecteurs, l'eugénisme et de clonage reproductif et la disparition forcée en raison de leur gravité.

Ensuite, le législateur doit fixer à trente-cinq (35) ans le délai de la prescription des infractions qui sont passibles d'une peine de réclusion à vie.

Enfin, en matière délictuelle, le législateur doit prescrire à trente (30) ans à compter de la majorité des mineurs trois types de délits à savoir : des délits de violences sur mineurs, d'agressions et atteintes sexuelles sur mineurs à titre indicatif la pédophilie et le viol des mineurs. La prescription de l'action publique est donc suspendue pendant la minorité de l'enfant et elle ne commencera à courir qu'après sa majorité. Ce délai aura pour objectif d'être

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adapté au traumatisme des victimes, à une procédure douloureuse et complexe en s'attachant à l'identité de la souffrance ressentie par la victime et en lui donnant le temps nécessaire à la dénonciation des faits325. Puisque, pour porter plainte contre son agresseur ou son violeur, la victime doit être physiquement et psychiquement en état de le faire326. Dans le même contexte, on se rend compte que de grands dignitaires de l'église catholique sont aujourd'hui reconnus coupables, soit de pédophile à l'égard des mineurs327, soit d'avoir gardé le silence sur les actes de pédophilie perpétrés dans le temps par certains prêtres.

Quant aux infractions « occultes328, et dissimulées329 » parler d'elles, revient à s'intéresser à leur référencement, au point de départ de leur prescription ainsi que de leur délai.

Primo, il revient au législateur d'intégrer ces deux catégories d'infraction dans l'arsenal juridique pénal togolais. Cela aura pour conséquence leur reconnaissance et une prise en charge efficace par les juges lorsqu'ils en seront saisis.

Qu'est-ce qu'une infraction occulte ou dissimulée ? Comment peut -on les reconnaitre ou les identifier ? Référencer ces infractions suppose de les clarifier immédiatement afin de ne pas laisser aussi bien les juges que les justiciables dans un flou total. Par définition, « est occulte l'infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l'autorité judiciaire »330d'une part et d'autre part « est dissimulée l'infraction dont l'auteur accomplit délibérément toute manoeuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte »331.

Secundo, au regard du point de départ de la prescription des infractions occultes ou dissimulées, le législateur doit les faire courir non pas à la date de leur commission, mais à la date de leur découverte par la justice. Elle est justificative dans la mesure où si on laissait ses infractions courir au jour de leurs commissions, la justice laisserait impunie la majorité de ces infractions faute de pouvoir en prendre connaissance avant l'expiration de leur délai de prescription. En droit français, le législateur a déjà prévu cette disposition selon laquelle le délai de prescription de toute infraction occulte ou dissimulée court à compter du jour où ces

325 L'exposé des motifs de la proposition de loi ° 368 du 13 février 2014 en France visant à modifier le délai de prescription de l'action publique des agressions sexuelles, https://www.senat.fr/leg/ppl13-368.html

326 Ibidem

327 Le cardinal australien George PELL, numéro trois du Vatican, reconnu coupable de pédophilie le 11 décembre 2018 pour des faits commis dans les années 1990 dans la sacristie de la cathédrale Saint- Patric Melbourne où il était archevêque. 328Occulte par nature, les délits d'abus de confiance, de tromperie, de publicité trompeuse, etc.

329 Comme exemple citer par l'ancienne magistrate financière Eva Joly, aujourd'hui eurodéputée écologiste on peut énumérer : les abus de biens sociaux dans les administrations ou les grandes entreprises qui ne sont généralement découverts qu'en cas d'alternance politique ou de changement d'actionnaire ; Certains abus de faiblesse sur des personnes âgées ne sont découverts par les héritiers que longtemps après les faits ; des malversations sur des rétrocommissions en marge d'un contrat de vente.

330Art. 9-1 al. 4 CPPF

331Art. 9-1 al. 5 CPPF

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infractions sont apparues et ont pu être constatées « dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique »332.Ainsi, selon Mme Dominique-Noëlle COMMARET, avocat général à la Cour de cassation, la clandestinité doit être un élément constitutif de l'infraction333.Cependant, afin d'éviter comme prévu en France l'imprescriptibilité de ces infractions, le législateur togolais doit nécessairement encadrer le point de départ de la prescription des infractions occultes ou dissimulées par des délais butoirs, qui courent cette fois ci à compter de la date de la commission de l'infraction. D'aucun pourront considérer cette mesure comme constituant une imprescriptibilité. L'introduction de cette disposition pourra permettre à la justice pénale de poursuivre plusieurs délinquants financiers qui autrefois y échappaient.

Les infractions dissimulées sont souvent rattachées aux infractions à caractère financier ou économique. Toutefois, en raison de leur bien fondé, le législateur, peut les étendre aux autres domaines du droit pénal. En particulier aux crimes dissimulés qui souvent sont des meurtres déguisés en mort naturelle ou le fait de dissimulé le corps334. .

Tertio, en ce qui concerne la durée de la prescription des infractions occultes ou dissimulées, le législateur doit fixer leur délai pour trente (30) ans en matière criminelle, quinze (15) ans en matière délictuelle et cinq (05) en matière de contravention.

En ce qui concerne les infractions répétées, ce sont des infractions qui constituent des actes répétés relevant d'une même résolution criminelle. Tout comme la jurisprudence française, le législateur togolais doit s'évertuer pour reporter le point de départ de la prescription de ses infractions au dernier acte délictueux. A titre indicatif, il y'a « d'abord [---] l'escroquerie, infraction instantanée entièrement consommée par la remise de fonds. Cependant, lorsque l'escroquerie prend la forme de remises successives, la prescription ne commence à courir qu'à compter de la dernière remise335. Ensuite [---] la corruption, consommée dès la conclusion du pacte de corruption, la prescription ne court qu'à compter du dernier acte d'exécution dudit pacte336. Enfin, [---] l'usage de faux337et, plus récemment, au délit d'abus de l'ignorance ou de l'état de faiblesse d'une personne338 »339. Ces solutions concourent, à l'évidence, à allonger le délai de prescription pour les cas d'infractions précitées.

332Art. 9-1 al. 3 CPPF.

333Article cité in Revue de science criminelle, 2004, p. 897.

334Les difficultés auxquelles les magistrats sont confrontés pour donner une suite judiciaire à certaines enquêtes -comme

dans les affaires des « disparues de l'Yonne » ou du « tueur à l'oreiller » (-qui aurait assassiné 23 femmes entre 1989 et

2006)- pourraient être plus aisément surmontées.

335Chambre criminelle de la Cour de cassation, 3 décembre 1963.

336Chambre criminelle de la Cour de cassation, 6 février 1969.

337Chambre criminelle de la Cour de cassation, 30 mars 1999.

338Chambre criminelle de la Cour de cassation, 4 octobre 2000.

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Afin de pouvoir actualiser le droit de la prescription en matière pénal, il revient au législateur en outre de réformer la prescription de l'action publique mais aussi la prescription des peines.

Section II : Une réforme plus efficace de la prescription des peines en droit pénal togolais

Selon DONNEDIEU DE VABRES, la préservation de la prescription des peines a trois fondements qui justifient le fait que la prescription de la peine est un précieux moyen de politique criminelle : d'abord, l'extinction des peines en raison de la négligence du ministère public de les avoir fait exécuter ; ensuite, la non-conformité des exigences de la justice avec une sanction non exécutée après un délai raisonnable ; enfin, l'impunité du coupable en échange de son repentie340.

Vue la prééminence de la prescription des peines en matière pénale au Togo et afin de la rendre plus moderne et plus cohérente, le législateur national doit s'efforcer de la renforcer (A) tout en aménageant certaines de ses règles (B).

§.1- Le renforcement de la prescription des peines

Pour renforcer la prescription des peines, il s'avère important de la clarifier (A) et de procéder à l'allongement de ses délais (B).

A- La clarification de la notion de la prescription des peines

La clarification est l'explication ou une précision qui permet de mieux comprendre une inquiétude. Clarifier une chose, c'est donc l'expliquer, faire connaître sa nature, enlever les zones d'ombre en vue de la faire apprécier. C'est ce à quoi nous allons essentiellement nous atteler ici.

Clarifier la prescription des peines, reviens à se demander : qu'est-ce que la prescription des peines ? C'est au législateur de répondre dorénavant à cette interrogation qui constitue aujourd'hui, une préoccupation majeure. Répondre sous-entend d'introduire la définition dans le Code de procédure pénal. En effet, définir la prescription des peines suppose sa détermination par une formule précise.

En se référant à DANET, « la prescription est un mode d'extinction qui, affectant l'exécution d'une condamnation pénale, empêche que celle -ci soit exécutée lorsqu'elle n'a pu l'être pendant un certain laps de temps déterminé par la loi »341.

339 https://www.sénat.fr rap.r06-338-syn ; Pour un droit de la prescription moderne et cohérent, commission des lois du Sénat, rapport d'information de 20 juin 2017

340 DONNEDIEU DE VABRES (H). La prescription de la peine « Traité de droit criminel » Sirey, Paris 1947, 3e éd.

341 DANET (J.), « La prescription de l'action publique, un enjeu de politique criminelle », Archives de politique criminelle 2006/1 (n° 28), p. 74.

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Selon DONNEDIEU DE VABRES (H.), « quand un certain temps s'est écoulé depuis la condamnation, sans que le ministère public ait fait exécuter la peine, une dispense définitive de la subir se produit en faveur du condamné »342. En d'autres termes, lorsque le délai prévu pour l'exécution d'une peine s'écoule, le condamné est exempté de subir la peine. Il s'agit de l'extinction des peines.

Cependant, il y a lieu de rappeler qu'il ne faut surtout pas confondre la prescription des peines avec la grâce343 qui est aussi un mode d'extinction directe de la peine. Par ailleurs, deux autres mécanismes juridiques emportent disparition de la possibilité de mettre à exécution la peine. Il s'agit de l'amnistie344 et de la réhabilitation345 qui font disparaitre non seulement l'exécution de la peine mais aussi la condamnation dans son ensemble346.

Cette clarification de la notion de la prescription des peines permettra aux justiciables ainsi qu'aux juges de mieux l'appréhender. Elle enlèvera toute équivoque qui pourra exister entre elle et la prescription de l'action publique. On gardera donc de les confondre. La prescription de l'action publique est le principe selon lequel l'écoulement d'un délai entraîne l'extinction de l'action publique et rend de ce fait toute poursuite impossible. L'auteur d'une infraction ne pourra plus être poursuivi.

Examinée de manière approfondie et critique la prescription des peines doit permettre aux acteurs du monde judiciaire d'être plus outillés et aguerris. Les justiciables sauront finalement à quoi s'en tenir et surtout comment s'y prendre pour qu'elle n'advienne pas. Ce qui leur permettra de ne plus demeurer dans l'obscurantisme de cette notion.

Parler de la prescription des peines implique d'inviter le législateur à porter un regard correcteur sur les délais qu'il a initialement prévu.

B- L'allongement des délais de la prescription des peines

Une fois la sentence pénale prononcée, son exécution doit en principe être immédiate. A l'antipode, un délai est accordé afin qu'elle le soit. Nonobstant, l'inexécution de la peine, elle devient prescrite au terme du délai prévu. La non-exécution des peines est une cause d'extinction en principe applicable à toutes. Les délais octroyés pour l'exécution des peines en droit pénal togolais doivent être conséquents de la gravité de l'infraction telle que le définit

342 DONNEDIEU DE VABRES (H.), La prescription de la peine, « Traité de droit criminel », Sirey, Paris 1947, 3e éd 343Article 103 CPT : « La grâce accordée par décret du Président de la République emporte seulement dispense totale ou partielle, définitive ou conditionnelle, d'exécuter une peine ou une mesure de sûreté devenue définitive ».

344Article 102 CPT : « L'amnistie éteint l'action publique. Elle efface toutes les condamnations prononcées et met fin à toute peine et mesure de sûreté à l'exception de l'internement dans une maison de santé et de la confiscation, mesure de police ». 345Article 110 CPT : « La réhabilitation efface la condamnation et fait cesser pour l'avenir toutes les incapacités et déchéances qui en résultent ».

346 www.wikipédia.org/wiki/ « Prescription de la peine en droit français », consulté le 28 février 2019.

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ledit droit. Ainsi, ils doivent être allongés afin de ne plus laisser des peines inexécutées. L'allongement des délais de la prescription des peines doit porter essentiellement sur les peines criminelles, les peines correctionnelles et les peines contraventionnelles.

S'agissant des peines criminelles qui se prescrivent initialement après vingt-cinq (25) années révolues, ils doivent être rallongés à trente (30) ans.

Quant aux peines correctionnelles, qui se prescrivent initialement après cinq (05) années révolues doivent désormais être fixés à sept (07) ans.

En ce qui concerne les peines contraventionnelles, qui se prescrivent initialement après (02) années révolues, ils doivent être rallongés à quatre (04) ans.

Toutefois, il y a lieu de rappeler que le législateur est censé prévoir des délais dérogatoires à la prescription de certaines infractions jugées graves. Ainsi, en matière délictuelle, le législateur doit prescrire à vingt (20) ans des peines prononcées contre les infractions suivantes perpétrées sur les mineurs : des délits de violences sur mineurs, d'agressions et atteintes sexuelles sur mineurs à titre indicatif la pédophilie et le viol des mineurs.

Parler de la date à laquelle, la prescription des peines commence à courir revient à évoquer un principe et une exception.

Ainsi, par principe, le délai de prescription de la peine en matière pénale au Togo commence par courir à l'instar du droit français à partir de la date où la condamnation est devenue définitive347. Cela à une double connotation : soit au terme du délai de recours lorsque ce droit n'a pas été exercé, soit au moment où les voies de recours ont été épuisées. Par voies de recours, il faut entendre : l'appel ou l'opposition.

Cependant, une triple exception est à envisagée. D'abord, dans le cas où la peine est assortie d'un sursis, deux possibilités sont à retenir. D'une part, le délai de prescription court à compter du terme du sursis. Ou d'autre part le délai de prescription commence à courir à compter du moment où une éventuelle décision révoquant ce sursis est elle-même devenue définitive348.

Ensuite, lorsque l'exécution de la sanction a commencé mais a été interrompue, la prescription court à compter du jour de cette interruption. C'est le cas par exemple lorsqu'une personne s'évade de la prison.

347Article 107 CPT ; Cass. crim. 27 octobre 1998.

348Cass. crim. 17 juillet 1985 ; Cass. crim. 27 octobre 1998.

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Enfin, en cas de force majeur, telle la démence de la personne emprisonnée, le délai de prescription peut être suspendu.

L'intérêt de l'allongement des délais de la prescription des peines est de prévenir l'impunité en prorogeant l'exécution des peines dans un délai conséquent.

On ne peut réformer la prescription des peines sans pour autant évoquer son aménagement.

§.2- L'aménagement des règles de la prescription des peines

La prescription étant la règle, il est nécessaire pour lui concéder sa modernité que le législateur tient véritablement compte de toutes les mesures qui accompagnent une peine et qu'elle ne peut emporter (B) sans toutefois oublier de référencer l'imprescriptibilité des peines les plus graves en droit pénal togolais (A).

A- L'imprescriptibilité des peines les plus graves

Les crimes les plus graves sont : le crime de génocide349, les crimes de guerre350 les crimes contre l'humanité351 et le crime d'apartheid352. Ces crimes sont rendus imprescriptibles par le législateur togolais353. En parlant d'imprescriptibilité, le législateur évoque les poursuites. L'imprescriptibilité en question se fonde sur le caractère particulièrement odieux des actes commis par leur auteur. Toutefois, l'imprescriptibilité des infractions porte aussi bien sur les poursuites que les peines354.

Cependant, qu'est-ce que l'imprescriptibilité des peines prononcées contre les crimes les plus graves ? C'est le défi auquel, le législateur doit relever.

Il est temps pour le législateur de formaliser expressément l'imprescriptibilité des peines prononcées contre les crimes les plus graves dans le Code de Procédure Pénale puisque, actuellement, il ne s'agit que d'une imprescriptibilité de fait. En légalisant l'imprescriptibilité de ces infractions, il sera au diapason des conventions internationales et de son homologue français qui a déjà rendu imprescriptibles les peines prononcées pour les crimes contre l'humanité355.

Cependant, il est important de chercher à connaitre la définition de l'imprescriptibilité des peines. En effet, l'imprescriptibilité des peines signifie que la sanction pénale peut être exécutée aussi longtemps que vit le criminel.

349Article 143 CPT 350Article 145 CPT 351Article 149 CPT 352Article 152 CPT 353 Article 164 CPT 354Conv. des Nations Unies, art. IV ; conv. du Conseil de l'Europe, art. 1er 355Art. 211-1 à 212-3CPF .

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De manière générale, l'imprescriptibilité veut dire ce qui n'est pas soumis à la prescription. C'est le « Terme de droit signifiant qui n'est pas susceptible de prescription [...], c'est-à-dire que n'atteint ou n'altère aucune condition de temps ou de lieu »356.

On peut expliquer l'imprescriptibilité par des motifs partielle à en croire Christophe HUBERT en se basant sur deux pistes : d'une part, selon lui, pour DURKHEIM, les règles pénales ne sont que le reflet en négatif des valeurs d'une société humaine puisque le droit pénal a pour vocation de réprimer les actes qui ont un effet nuisible ou préjudiciable à ces valeurs qui sont collectives357. D'autre part, Pierre LEGENDRE attristé par exemple par le crime contre l'humanité révèle qu'il relève de l'indicible358.

Avec l'imprescriptibilité des peines prononcées contre les crimes les plus graves, il n'y aura ni point de départ ni point d'arriver puisque ces deux notions ne sont applicable qu'à la prescription afin de pouvoir calculer le délai requis soit pour l'exercice de l'action publique soit pour l'exécution de la peines prononcées par le juge.

Consacrer l'imprescriptibilité des peines veut dire qu'aucun oubli ni pardon ne devra être tolérée à l'antipode de la prescription. C'est dans ce sens que c'était inscrit Francis RICHARD lorsqu'il écrivait que « L'imprescriptibilité me semble donc caractéristique de notre époque : pas d'oubli, pas de pardon, donc, également, pas de rédemption possible, pas de miséricorde, qui semblent réservées au seul Tout-Puissant et à l'Au-delà »359. Il est clair que grâce à l'imprescriptibilité, les peines prononcées contre les crimes graves peuvent être exécutées sans être paralysées par le seul écoulement du temps. Ce qi veut dire qu'ils ne sont donc pas soumis à la prescription extinctive360.

Au regard de leur caractères odieux, les peines encourues par les auteurs des crimes les plus graves ne peuvent en aucun cas s'éteindre par le seul écoulement du temps. C'est à juste titre que MERTENS affirmait qu'« On ne conçoit pas d'application de la 'loi de l'oubli' pour des crimes qui ont été perpétrés contre la communauté des nations et l'humanité en tant que telles. Ces crimes sont imprescriptibles par nature »361.

On ne saura parler de la prescription des peines sans pour autant intercéder pour une précision

356CALVO (Ch.), Dictionnaire de droit international public et privé, Paris/Berlin, Pédone, Guillaumin Rousseau/Puttkammer&Mühl-brecht, 1885, tome I, p. 387.

357HUBERT (C.), « Le temps de l'imprescriptibilité », Revue Juridique de l'Ouest, 202, p.342.

358LEGENDRE (P.), Le désir politique de Dieu (Leçon VII) et le crime du caporal Lortie (Lecon VIII), Edition FAYARD 1988 et 1989.

359 RICHARD (F.), « L'imprescriptibilité en matière pénale ne devrait pas exister », www.francisrichard.net,26 novembre 2008.

360 LA ROSA (A.-M.), Imprescriptible, Dictionnaire de droit international pénal, p.50

361 MERTENS (P.), L'imprescriptibilité des crimes de guerre et contre l'humanité. Ed. de l'Université de Bruxelles, 1974, p. 226.

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claire de l'absence d'effet de la prescription des peines sur certaines mesures qui accompagnent les peines.

B- La prise en compte de la non incidence de la prescription des peines sur les mesures accompagnant les peines

En parlant de la prescription des peines, il faut remarquer qu'elle est assortie de mesures qui frappent le bénéficiaire. En droit pénal togolais le législateur n'a consacré que quelques-unes de ces mesures. C'est ainsi qu'il prévoie en matière de mesure de sureté l'interdiction de séjours qui « consiste dans la défense faite au condamné de paraître dans les lieux dont la liste lui est administrativement notifiée »362. Par voie de conséquence, celui qui viendra à violer cette disposition sera puni d'une peine d'emprisonnement de deux (02) mois à un (01) an et en cas de récidive, ces peines sont portées au double sauf à obtenir du ministère public un laissez-passer spécial363.

D'abord, le législateur doit clairement énoncer dans le Code de procédure pénal que la prescription des peines n'emporte pas la condamnation puisqu'elle subside dans le casier judiciaire du bénéficiaire. Ainsi, si le bénéficiaire venait à commettre plus tard une infraction à la loi pénale, il sera considéré comme récidiviste dans la mesure où la condamnation antérieure existe. Il s'agit en réalité d'une mesure de préservation sociale. On voit clairement, l'indépendance qui existe au regard de la prescription en matière pénale entre la mesure de sûreté et la peine.

Ensuite, la prescription des peines est sans incidence sur deux condamnations à savoir, les condamnations civiles et les condamnations aux frais de l'État. D'une part, la prescription des peines est sans effet sur les condamnations civiles parce qu'elle ne cause pas de préjudice à la victime ; les condamnations civiles subsistent. La victime conserve toujours le monopole d'agir pendant le délai qui résulte du droit commun et qui est de trente (30) ans.

D'autre part, la prescription des peines n'emporte pas la condamnation aux frais de l'État. Celle-ci subsiste et le bénéficiaire de la prescription est dans l'obligation de l'exécuter364. Il s'agit d'une obligation à laquelle, il ne peut se soustraire.

Par ailleurs, toute personne qui a été condamnée par une juridiction à une peine soit criminelle, soit correctionnelle ou contraventionnelle peut être réhabilitée365 depuis la Loi n° 2015-10 du 24 novembre 2015 portant nouveau Code Pénal du Togo. En effet, « la

362Art. 113 CPT 363Art.116 CPT 364Cass.req., 28 février 1905: D. P., 1905, 1, 176 365Art. 109 CPT

réhabilitation efface la condamnation et fait cesser pour l'avenir toutes les incapacités et déchéances qui en résultent »366.

Le législateur doit toujours être explicite dans sa démarche afin que toute personne qui utiliserait la loi puisse la comprendre aisément.

CONCLUSION PARTIELLE

Il est évident que La prescription en matière pénale constitue un grand enjeu de politique criminelle dans la mesure où elle est concomitante à la relation entre la justice pénale et le temps.

Afin de parvenir à une prescription efficace en matière pénale, une prise de conscience effective du législateur sur sa réforme de manière globale est incontestable.

Pour mieux garantir la lisibilité de l'échelle de gravité des crimes, des délits et des contraventions établie par le législateur togolais, il est primordial que toute réforme dans le cadre de la prescription en matière pénale puisse prendre en considération le lien entre la gravité des infractions et la durée du délai des prescriptions.

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366Art. 110 CPT

CONCLUSION GENERALE

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« La nature n'a rien donné à l'homme de précieux que le temps. Mais, ce bien précieux, et le seul qui soit véritablement à nous, est aussi celui qui nous échappe le plus promptement »367. Cette citation forte de symbole illustre parfaitement nos recherches. Par ailleurs, LABRUYERE affirmait que « le devoir des juges est de rendre la justice, leur métier est de la différer. Certains connaissent leur devoir. Beaucoup font leur métier »368.

En effet, en Afrique, la justice serait à la fois « un service public sans services » compte tenu de l'indigence des moyens, « une justice sans juge » en raison de la façon dont ils exercent leur office et « des tribunaux sans justiciables » car ceux-ci s'abstiennent de saisir des juridictions d'accès difficile dont ils se méfient369.

Aujourd'hui, nul ne peut ignorer que la justice pénale togolaise se trouve dans l'obligation de rendre des comptes sur la manière dont elle s'exerce quotidiennement. Si certaines avancés ont pu être réalisées grâce à sa modernisation, il n'en demeure pas moins qu'il reste beaucoup à faire. Afin d'obtenir un résultat probant, il urge d'avoir un regard critique sur le fonctionnement de cette justice, ce qui permettra de l'évaluer constamment à travers une remise en question utile de ses pratiques.

En vertu du principe de la légalité criminelle, le législateur national ne pourra aucunement dérober à sa responsabilité des enjeux légaux que traverse cette justice pénale. Il doit veiller à ce que la justice soit bien rendue c'est-à-dire, que la décision du juge soit juridiquement correcte et qu'elle intervienne dans un délai raisonnable. Pour ce faire, l'existence des règles permettant de rendre les décisions pénales dans un temps optimal et de rendre la prescription en matière pénale beaucoup plus moderne et cohérente, s'avère nécessaire. Il incombe donc au législateur de mettre en place des lois de qualités parce que, « un texte normatif mal écrit, est une menace supplémentaire à la sécurité juridique. Ce constat est d'autant plus vrais que les pathologies dont souffre la norme, quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente, sont de plus en plus nombreuses, et leur dénonciation d'actualité »370.

367 D'AGUESSEAU (H.-F.), L'emploi du temps, TOME PREMIER, Paris, 1714, p.199.

368 PRADEL (J.), Procédure pénale, 10ème édition 2000-2001, éd. CUJAS, p. 303

369 DE GAUDUSSON (J.-du B.), « La justice : nouveau défis, nouveau acteurs », in Afrique contemporaine 2014, (n°250), p.14.

370 KOKOROKO (K.D.), Préface de l'ouvrage Légistique de BELEI Bediani B., 2eme édition, Editions Awoudy, Collection

U.

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Pour atteindre cet idéal qui est une décision bien motivée, intervenue dans un délai raisonnable, à l'issue d'un procès où toute la matière litigieuse s'est trouvée dans le débat et où tout a été loyalement et contradictoirement discuté, chaque acteur doit jouer sa partition. Ainsi, les magistrats, les parquetiers, les greffiers ainsi que les secrétaires de parquet, le policier, le gendarme, les conseils, doivent tout en gardant une parfaite maîtrise de leur temps, parvenir à distinguer le« temps utile » du «temps gaspillé ».

S'il faut résolument inscrire la justice pénale dans la modernité et l'efficience, les autorités judiciaires doivent impérativement mettre en garde le monde politique et la société contre les dangers d'une obstruction de ladite institution. Et afin de répondre à l'impératif de sécurité juridique, la justice pénale doit être rendue dans les meilleurs délais. La solution du litige qui en découlerait pourrait conserver tout son intérêt pour le justiciable et la justice serait ipso facto équitable.

Concernant la prescription en droit pénal, il revient au législateur d'établir l'équilibre entre la nécessité de poursuivre et de sanctionner les infractions à la loi pénale afin de pouvoir, mettre un terme au trouble causé à la société et à la volonté d'oublier les agissements commis par le délinquant, assurant par-là même l'impunité de ce dernier.

Selon F. OST, la matière pénale s'inscrit aussi bien dans un temps résolument orienté vers l'avenir que dans un temps de l'instantané371. Dans cette perspective, A. ELAABD disait : « [---] les branches du droit, s'inscrivent effectivement, dans un temps résolument orienté vers l'avenir, et la norme pénale ne fait pas exception, car elle a comme les autres branches, vocation à régir l'avenir : elle naît de l'analyse du passé, de l'observation du présent et surtout de la volonté de préserver le futur »372.

La célérité, selon PRADEL, ne signifie pas précipitation, mais plutôt promptitude. Elle vise à donner au procès pénal « un rythme aussi rapide que possible, sans porter atteinte aux principes fondamentaux de l'ordre juridique, comme la présomption ou les droits de la défenses »373.

Il faut donc dissocier une justice pénale à vocation expéditive de celle qui intervient dans le délai raisonnable. La justice à vocation expéditive, porte atteinte aux droits des justiciables dans la mesure où elle ne leur laisse pas un délai conséquent pour s'organiser. Le respect du temps de déroulement du procès pénal est d'une évidence incontestable pour la personne présente audit procès d'autant plus qu'ils participent à une modification importante de sa

371 OST (F.), « Les multiples temps du droit », inLe droit et le futur, Paris, Edition PUF, 1985, p.126.

372 ELAABD (A.), « La célérité du procès pénal dans le cadre d'une justice équitable » recil.grupolusofona.pt, 2013, p.121. 373PRADEL (J.), La célérité de la procédure pénale en droit comparé, édition RIDP, 1995, p.

situation374. Dans cette perspective, Jean PRADEL affirmait que « toute affaire pénale doit s'étaler sur une certaine durée. Le travail de décantation des preuves exige du temps pour que la vérité se dégage »375.

Le temps doit être plus que jamais l'élément primordial pour garantir les droits de la défense et assurer une justice équitable à toutes les parties au procès pénal. Même si les acteurs au procès pénal à savoir, le magistrat, le policier ou le gendarme, le coupable et la victime, ont chacun leur propres logiques et leurs propres perceptions du temps376, le législateur national doit parvenir à les harmoniser afin de donner plus de crédibilité à l'institution judiciaire.

Toutefois, il faut relever comme l'a retenu Monsieur Yaovi O. SRONVI qu'il est impérieux d'accoler au terme de célérité de la justice, celui de la qualité des procédures afin de se préserver des excès ou manquements qui pourront en résulter377.

En élaborant les textes de lois relatives au droit à un délai raisonnable, ainsi qu'à la prescription en matière pénale, le législateur doit indéniablement prendre en compte l'emprise que le temps à sur ces normes. La définition temporelle effective de ces normes contribuera à leur gestion efficiente.

Le droit étant reconnu comme la recherche d'équilibre entre des intérêts qui sont opposés, une prise de conscience générale s'impose pour que la justice pénale togolaise cesse de s'administrer avec des retards de nature à en compromettre véritablement son efficacité et sa crédibilité. Dans le souci d'aboutir à un procès juste et équitable et ce dans un délai raisonnable, les acteurs de la justice et les justiciables doivent unir leurs efforts. La partition de chacun rendra efficace la justice tout en l'imposant comme un véritable rempart du plus faible et du plus vulnérable378.

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374 GUINCHARD (S.), Le temps et la procédure, Edition Dalloz 1996, p.132.

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377 Reflets du Palais N° 28, septembre 2015, « Célérité et qualité : la bonne mesure » p.2.

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criminalité.

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2007.

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Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement à Nairobi (Kenya) en juin 1981.

Code de Procédure Pénal du Sénégal.

Nouveau Code de Procédure Pénale du Maroc.

Pacte International relatif aux Droits Civils et Politique.

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Droit togolais

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Code de Procédure Pénal du Togo.

Constitution de la IVème République du Togo de 1992 révisée par les lois de 2002.

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 104

Loi N°2009-011 du 24 janvier 2009 relative à l'abolition de la peine de mort au Togo.

La loi organique n°2013-007 du 25 février 2013 est venue modifiée la loi organique n°9611 fixant le statut des magistrats.

Ordonnance n° 78-35 du 7 septembre 1978 portant organisation judiciaire du Togo.

JURISPRUDENCE

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TABLES DES MATIERES

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 105

REMERCIEMEMTS ..I

DEDICACE II

ABREVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES ...III

SOMMAIRE IV

INTRODUCTION...01

Première partie : L'inefficacité du temps dans la justice pénale togolaise 11

Chapitre premier : La lenteur de la justice pénale togolaise .14

Section I : Les obstacles de droit à la célérité de la justice pénale togolaise 15

§.1- L'exclusion de la notion du délai raisonnable par le droit pénal togolais 15

A- L'absence de référence de la notion de délai raisonnable en droit pénal togolais

.15

B- L'absence de protection du droit au délai raisonnable....18

§.2- L'inadéquation des règles de procédures en matière pénale 19

A- L'insuffisance des règles de procédure pénale avant et pendant le jugement 19

B- L'absence de véritable sanction de la violation du délai raisonnable 21

Section II : Les obstacles de fait à un jugement pénal dans un délai raisonnable 23

§.1- Les obstacles internes à l'effectivité de la justice pénale togolaise 23
A-La carence en personnel judiciaire au pénal et la mauvaise organisation de la justice

pénale 23

B- Le disfonctionnement lié aux personnels judiciaires et à leur condition de travail 27

§.2- Les obstacles externes à une bonne justice pénale togolaise 30

A- L'emprise des parties sur le temps 30

B- La complexité juridique du litige et l'augmentation constante des affaires pénales 34

Conclusion partielle 36

Chapitre II : L'obsolescence des règles de la prescription en droit pénal togolais .37

Section I : L'insuffisante réglementation de la prescription de l'action publique en droit

pénal togolais 38
§.1-Les insuffisances liées aux délais de la prescription de l'action publique...38

A- Le caractère abrégé des délais de la prescription de l'action publique 39

B- L'absence de délais de prescription dérogatoires 40

§.2- Les limites de la règle de la prescription de l'action publique 42

A- SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 106

L'ignorance des infractions occultes et dissimulées et l'absence de détermination

de leur point de départ 42

B- Les conséquences de la prescription de l'action publique .43
Section II : L'insuffisante réglementation de la prescription des peines en droit pénal

togolais .45

§.1- L'incohérence des règles de prescription des peines consacrées . 46

A- L'absence de clarification de la notion de la prescription des peines par le

législateur .46

B- Le caractère abrégé des délais de la prescription des peines et l'absence

d'imprescriptibilité des peines relevant des crimes les plus graves ..47

§.2- Les inconvénients de la prescription des peines .49

A- La prescription des peines, une entorse à la réponse pénale .49

B- Le mutisme du législateur sur la non incidence de la prescription des peines sur

certaines mesures accompagnant les peines 51

Conclusion partielle 52

Partie II : Le juste temps pour une justice répressive efficace au Togo 53

Chapitre premier : L'aménagement du temps pour le traitement des affaires pénales

dans un délai raisonnable ..56
Section I : Les exigences légales de la tenue du procès pénal dans un délai raisonnable.....57

§.1- Le délai raisonnable, condition sine qua non pour un procès pénal dans le temps......57

A- Le référencement et la clarification législatives de la notion de délai raisonnable.57

B- L'institution des sanctions de la violation du délai raisonnable .59

§.2- Une meilleure gestion du temps judiciaire 62

A- Le renforcement des règles de procédure pénale 62

B- Le renforcement des garanties d'un bon procès pénal 64
Section II : L'implication des acteurs au procès pénal pour des décisions dans le délai

raisonnable ...66

§.1- Une implication très active du personnel judiciaire 66

A- Le renforcement du personnel judiciaire 66

B- Le recours à des alternatives aux poursuites pénales .68

§.2- Une implication accrue de l'Etat et des parties au procès pénal ..71

A- L'Etat togolais, principal débiteur des exigences de célérité du procès

pénal 72

B- L'engagement plus actif des parties et de leurs conseils 74

Conclusion partielle .76

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 107

Chapitre II : La nécessité de reformer la prescription en matière pénale au Togo 77

Section I : Une réforme plus efficace de la prescription de l'action publique en droit pénal

togolais 78

§.1- La préservation du principe de la prescription de l'action publique 78

A- Les fondements du maintien de la prescription de l'action publique 78

B- Les critiques des fondements du maintien de la prescription de l'action

publique ..80

§.2- La prorogation des délais de la prescription de l'action publique 82

A- L'allongement des délais de la prescription de l'action publique de droit

commun 82

B- L'instauration de délais de prescription dérogatoires 83

Section II : Une réforme plus efficace de la prescription des peines en droit pénal togolais 86

§.1- Le renforcement de la prescription des peines 86

A- La clarification de la notion de la prescription des peines 86

B- L'allongement des délais de la prescription des peines 87

§.2- L'aménagement des règles de la prescription des peines 89

A- L'imprescriptibilité des peines les plus graves 89

B- La prise en compte de la non incidence de la prescription des peines sur les mesures

accompagnant les peines .91

Conclusion partielle 92

CONCLUSION GENERALE 93

BIBLIOGRAPHIE 96

TABLE DES MATIERES .....105






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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery