WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le rapport des enseignants aux langues nationales, en tant que médiums et matières d’enseignement, dans l’éducation bilingue au Burkina Faso.


par Bouinemwende Wenceslas ZOUNGRANA
Université sciences humaines et sociales /Lille 3 - Master 2 Recherche 2014
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

INTRODUCTION

« Les progrès des sciences assurent les progrès de l'art d'instruire, qui eux-mêmes accélèrent ensuite ceux des sciences ; et cette influence réciproque, dont l'action se renouvelle sans cesse, doit être placée au nombre des causes les plus actives, les plus puissantes du perfectionnement de l'espèce humaine. » (Condorcet, 1793-1794 : 215). Cette réflexion de Condorcet qui fait de l'éducation de base la pierre d'angle de tout l'édifice éducatif et du progrès traduit à quel point l'éducation joue un rôle incontournable dans le développement humain, et combien la recherche de solutions nouvelles pour la rendre meilleure est toujours au centre des préoccupations des chercheurs. Cette influence de l'éducation sur le développement est si prégnante que partout, ceux qui sont en charge de sa gestion n'ont de cesse de chercher les voies et moyens pour la rendre plus accessible et plus efficace dans la transmission des savoirs. Au Burkina Faso, c'est une telle préoccupation qui a conduit les gouvernants à expérimenter et à mettre en place le système éducatif bilingue.

Le système éducatif bilingue actuellement en pratique au Burkina Faso est une innovation pédagogique qui a vu le jour suite aux états généraux de l'éducation tenus en 1994. Ces états généraux avaient fait le constat des limites, voire même de l'échec de l'éducation classique utilisant le Français comme langue unique de scolarisation. Les raisons de cet échec se rapportent entre autres au fait que l'utilisation du Français, langue non maternelle des élèves et parlée couramment par une minorité (10 à 15% de la population à l'époque), comme médium des enseignements, constituait un sérieux handicap à l'appropriation des contenus disciplinaires par les apprenants.

Suite à ce constat et à la recommandation faite par les états généraux de l'éducation d'utiliser les langues nationales comme médiums d'enseignement et aussi en tenant compte des nombreuses expériences déjà entreprises dans ce domaine par les acteurs de l'éducation non formelle, l'Etat, par le biais du ministère de l'Enseignement de Base, va prendre à coeur cette préoccupation en soutenant une expérience d'éducation bilingue initiée par une ONG suisse, l'oeuvre suisse d'entraide ouvrière. Lorsqu'en 2002, l'évaluation de cette expérimentation est jugée positive, le Ministère de l'enseignement de Base publie une circulaire qui autorise les parents et les écoles qui le souhaitent à demander la transformation des écoles classiques de leurs localités en écoles bilingues. A la suite de cette opération et selon les statistiques du ministère de l'enseignement de base de l'année scolaire 2010-2011, le Burkina comptait 114 écoles bilingues sur un total de 10 796 écoles. Parmi ses 114 écoles,

2

95 étaient des écoles publiques et les 19 autres des écoles privées relevant pour la majorité de l'enseignement catholique qui a fortement soutenu le projet.

La principale innovation dans ce modèle pédagogique qui dure 5 ans au lieu de 6 ans (pour le classique), c'est l'utilisation de la langue maternelle ou langue première de l'enfant comme médium et matières d'enseignement.

Si aujourd'hui l'efficacité du système d'éducation bilingue semble admise sur le plan didactique, il n'en demeure pas moins vrai qu'il subsiste, malgré tout, des lenteurs ou des réticences du côté des parents à transformer leurs écoles classiques en écoles bilingues ; de telles attitudes témoignent, à notre sens, des nombreuses appréhensions avec lesquelles ils envisagent l'avenir de cette innovation pédagogique. En effet, outre le fait que ce système éducatif voit le jour au milieu d'une soixantaine de langues nationales, on ne peut ignorer le fait qu'il est appelé à se développer dans un contexte dit diglossique où les langues nationales ne jouissent pas nécessairement de préjugés favorables à leur utilisation comme médium et matières d'enseignement. A tout cela s'ajoutent les nombreuses critiques formulées à l'encontre de la manière dont a été conduite l'expérimentation, notamment son instrumentalisation par les partenaires du projet.

Ayant fait quelque peu l'expérience des difficultés inhérentes à la mise en oeuvre de cette innovation pédagogique et étant nous-même habité par le souci de l'amélioration du système éducatif burkinabè, nous nous interrogeons particulièrement sur la posture des enseignants dans un tel contexte. L'objet de notre étude n'est pas d'engager une polémique sur la qualité didactique, pédagogique ou socio-anthropologique de l'éducation bilingue au Burkina Faso. La préoccupation qui nous guide, c'est de comprendre le rapport des enseignants aux langues nationales qui sont utilisées comme médium et matières d'enseignement dans l'éducation bilingue, c'est-à-dire la manière dont ils appréhendent ces objets d'enseignement en tant que premiers acteurs du système éducatif.

Une telle recherche présente à notre sens un triple intérêt : d'une part elle permettra à la communauté scientifique de mieux investir un domaine non encore bien exploré ; en effet, si l'éducation bilingue a fait l'objet de nombreux travaux au Burkina Faso, la question proprement dite du rapport aux langues nationales utilisées comme médiums et matières d'enseignement reste à investiguer. D'autre part, étudier le rapport des enseignants aux langues nationales nous permettra sans doute de mieux les situer par rapport au reste de la

3

population dans le contexte de la diglossie. Enfin, nous estimons que comprendre le rapport des enseignants à l'éducation bilingue permettra non seulement aux enseignants eux-mêmes de mieux réfléchir à leurs pratiques mais aussi aux formateurs de mieux les prendre en compte dans les modules de formation.

Pour mener à bien notre recherche, nous nous adossons au cadre de la théorie anthropologique du rapport au savoir d'Yves Chevallard qui met en jeu les interactions entre les institutions ainsi que les sujets et les objets qu'elles contiennent dans le processus de construction du savoir. Par ailleurs la méthodologie de recherche de type mixte, quantitative et qualitative que nous adoptons nous permettra de procéder à une analyse descriptive de la situation du rapport aux langues nationales des enseignants par les données quantitatives d'une part et de mieux cerner leurs représentations sur ces langues nationales par le biais des données qualitatives d'autre part.

Dans un souci de cohésion, notre réflexion sera articulée selon la démarche suivante : après avoir présenté le contexte de l'étude, nous déroulerons la problématique relative à l'utilisation des langues nationales dans l'éducation et à la mise en place de l'éducation bilingue. Cette base contextuelle et théorique nous permettra de définir les cadres théoriques et méthodologiques qui baliseront notre étude et sous l'angle desquels seront exposés les principaux résultats et l'interprétation dont ils feront l'objet.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire