WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Quelle adoption de l’écriture inclusive dans la langue française et les discours politiques contemporains ?


par Manel Khalifa née Ben Salah
Université Sorbonne Paris 4 - Master sciences du langage parcours linguistique française et générale 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Introduction

L'écriture inclusive « née de la volonté de faire changer les mentalités sur l'égalité homme /femme par le langage » (Bruno, 2017) « désigne l'ensemble des attentions graphiques et syntaxiques permettant d'assurer une égalité des représentants entre les femmes et les hommes » (Haddad, 2016).

Le débat sur l'écriture inclusive, qui remonte au 17e siècle (Cerquiglini, 2018), est revenue sur le devant de la scène suite à la parution en 2017 d'un manuel scolaire en écriture inclusive. Dans « Questionner le monde », des élèves de CE2 découvrent l'écriture inclusive définie par son auteur Raphael Haddad (2016) comme "un ensemble de manières de faire progresser l'égalité entre les hommes et les femmes dans l'écriture". Ce manuel « fait apparaître les noms de métiers, de titres, de grades et de fonctions avec une orthographe dite inclusive, qui fait figurer le masculin et le féminin, en les distinguant par un point ou un point médian ». A cette définition nous retiendrons plutôt celle d'Arbogast (2017) qui postule que l'écriture inclusive « n'exclue pas, même involontairement, des personnes censées être incluses dans les propos ».

Cette réforme de l'écriture est bien reçue dans les pays fervents défenseurs de la francophonie (Arbour et al., 2014). Ainsi, le Québec a été précurseur pour ce qui a trait à la féminisation des noms de métiers. Dès 1976, une terminologue est engagée par le gouvernement pour « officialiser la féminisation des titres en position d'autorité comme celui de ministre » (Jobin, 2019). La réforme se généralise trois années plus tard lorsque « la Gazette officielle du Québec préconise pour la première fois la féminisation des titres professionnels : on parle alors d'une avocate, d'une ministre ou d'une architecte » (Groussin, 2019, p.2). La féminisation des noms de métiers devient un sujet de première importance à cette époque dans la mesure où « l'accessibilité de nouvelles clientèles aux études universitaires, a vu son effectif d'étudiantes passer, depuis les années 70, de 45 % à 60 % » (Lamothe et al., 1992, p.3). Cette augmentation de la part d'étudiantes au sein des universités favorise une féminisation de la langue et plus précisément des noms de métiers. Le conseil d'administration québécois s'empare du sujet et « reconnaissait officiellement, en 1980, l'utilisation des titres féminins pour désigner les femmes (...). Celui-ci s'est vu confier le mandat d'établir une liste féminisée de tous les titres de fonctions » (Lamothe et al., 1992, p.3).

5

La commission publia en 1992 un document de travail qui donna lieu à la coexistence des titres féminins et masculins et à l'insertion des noms féminins dans la phrase. Cette nouvelle réforme de la langue a bien progressé au Québec suite à l'adoption des chartes des droits de la personne, des lois et réglementations sur l'équité en emploi.

Cette tentative de réforme provoquera en France une violente levée de bouclier. Il est pourtant illusoire de penser que les règles linguistiques sont immuables. La langue est une mémoire, certes, mais ne se doit-elle pas d'évoluer et de s'enrichir au gré de l'histoire, de ses histoires ?

Malgré les réfractaires, une évolution apparaît néanmoins dans le discours politique, définit comme « un discours d'influence produit dans un monde social », et dont le but est d' « agir sur l'autre pour le faire agir, le faire penser, le faire croire » (Giglione, 1989, p. 9). Ce type de discours consacre une importance à la féminisation qui ne date cependant pas d'aujourd'hui. Le discours de général Charles de Gaulle et ce célèbre « Françaises, français » en est une représentation significative, bien que remis en cause par les Académiciens dans les années 1980 (Winock, 1998).

Nombreux sont ceux, à commencer par les cercles féministes, qui incitent à l'intégration de l'écriture inclusive dans les textes politiques, en accordant beaucoup d'importance à cet acte nécessaire pour l'émancipation de la femme et son acceptation dans la vie professionnelle et politique. En revanche, tous ne sont pas de cet avis. Preuve en est, la consigne donnée aux membres du gouvernement par le premier ministre actuel Edouard Philippe, de bannir des textes officiels cette forme d'écriture. Dans la circulaire du Journal Officiel n°0272 du 22 novembre 2017 il sera écrit « Je vous invite, en particulier pour les textes destinés à être publiés au Journal officiel de la République française, à ne pas faire usage de l'écriture dite inclusive », et de rajouter « Outre le respect du formalisme propre aux actes de nature juridique, les administrations relevant de l'Etat doivent se conformer aux règles grammaticales et syntaxiques, notamment pour des raisons d'intelligibilité et de clarté de la norme ».( Phillippe, 2017)

Cette affirmation nie tout engagement féministe dans l'écriture « inclusive » dans les textes politiques. Mais cela prouve-t-il la non-neutralité des politiciens face à l'écriture « féministe » ? Sont-ils radicalement pour un éloignement du langage féministe ou finalement pour une évolution modérée du langage, en faisant dans la demi-mesure ? Car il est à noter en parallèle que le texte défend la féminisation systématique des noms de fonctions employées dans des textes officiels.

6

Ces évolutions démontrent le degré d'engagement féministe, ou à l'inverse le non engagement, des hommes et femmes politiques. Connaître l'approche politique face au débat sur l'écriture inclusive est essentiel selon nous, car un discours politique peut marquer un changement d'ère et une impulsion nouvelle. En revanche, un discours à lui seul ne suffit pas à faire tomber les barrières et à amorcer un changement de mentalité. La parité au sein des collectivités territoriales, des établissements publics, et des entreprises de façon plus large, est un excellent exemple. Pour tenir cette promesse électorale, le gouvernement de François Hollande a dû modifier la loi. Nous pouvons citer deux exemples emblématiques : la Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes et l'article 16 de la loi du 4 août 2016 pour l'obligation des entreprises en matière d'égalité professionnelle. Ces lois conduiront Schneider (2012) à écrire que « c'est une première dans l'histoire de la République Française que nous ayons un gouvernement totalement paritaire ».

Avant de creuser la problématique de notre mémoire « quelle adoption de l'écriture inclusive dans la langue française et les discours politiques contemporains ? », il nous faut préciser que l'objectif du lexique inclusif est de redonner au sexe féminin de la valeur et de l'importance, non seulement pour une « égalité linguistique » au niveau de langage (Mathieu et al., 2009) mais également au sein de la société.

Notre analyse de l'écriture inclusive « dans la pratique » abordera les questions de la féminisation de la langue française. La première partie s'attachera à analyser l'histoire de la féminisation de la langue et à étudier les règles de l'écriture inclusive. Dans cette partie nous présenterons les règles de la féminisation des noms de métiers et les règles grammaticales dans la langue française, qui permettent d'appréhender son histoire. La seconde partie visera à analyser les discours politiques de certains présidents de la république (avant et pendant leur mandat) et plus précisément d'étudier si ces discours ont évolué pour devenir plus inclusifs. Les discours des candidats et notamment ceux des présidents de la République peuvent démontrer le degré de leur engagement féministe ainsi que l'impact du contexte socio-économique sur leurs allocutions.

Il est important de souligner pour notre étude que les femmes représentent plus de la moitié de la population française, et autant en termes d'électeurs inscrits sur les principales listes électorales. Leur participation aux élections est de fait un enjeu de société pour les candidat-e-

7

s « politiques ». Si discours féminisé il y a, est-il un discours de conviction, ou juste un discours de séduction ? L'objectif n'est-il pas juste une conquête de l'auditoire féminin ?

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand