Conclusion
Le système européen de protection des droits et
libertés fondamentales exerce sans conteste une influence majeure dans
la définition d'un standard européen du droit de la presse: les
buts légitimes de protection de la réputation et des droits
d'autrui ne doivent pas remettre en cause le rôle de la presse de
«chien de garde» lors de débat public d'intérêt
général. La Cour Européenne consacre par la même un
haut niveau de protection des idées et de l'information politiques afin
-il faut le saluer - de faire face aux détournements des
législations protectrices des droits et libertés de la personne
à des fins de censure. Dans le même temps, la Cour
Européenne sait faire preuve de souplesse grâce à la
doctrine de la marge d'appréciation dans les domaines où aucune
pratique juridique n'a émergé dans l'ensemble des pays
européens comme c'est le cas de la protection de la morale et de la
religion plus ou moins intense selon les traditions diverses entre la France et
l'Écosse. Toutefois, la Cour de Strasbourg ne donne pas une
liberté illimitée aux États et, elle s'évertue
à définir des principes généraux qui
empêcheront la censure.
Tandis que l'Écosse accorde une protection
renforcée à la morale et à la religion, la France se
singularise par une législation antiraciste très
répressive. Ces différentes pratiques juridiques couvertes par la
marge nationale d'appréciation s'expliquent essentiellement par des
facteurs extrajuridiques: les sociétés écossaises et
françaises ont fait des choix distincts conformément à
leur histoire, leur culture et leur système politique. Les relations
entre l'Église et l'État et les divergences de vue pour ce qui
est des notions de Nation et de l'intégration donnent droit à des
limites de « l'acceptable » plus ou moins larges.
Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que les sociétés
européennes connaissent une évolution convergente vers la
définition d'un standard commun. Ainsi, le délit de
blasphème considéré comme dépassé et
discriminatoire par la doctrine écossaise et de la Cour de Strasbourg,
risque ainsi d'écarter l'application de la doctrine de la marge
d'appréciation. En outre, l'expression des opinions personnelles peut
parfois entrer en contradiction avec le droit à l'information ou au
débat public d'intérêt général. Ainsi, le
haut niveau de protection accordée à la presse par la Cour de
Européenne dans ce domaine permet de parer aux risques de censure
politique.
Le droit au respect de la vie privée, la protection de
la réputation et le droit à un procès équitable
connaissent une évolution convergente dans les deux pays sous
l'impulsion de la Cour de Strasbourg. Cependant, pour ce qui est de la vie
privée, l'influence européenne est perçue de façon
totalement contradictoire: les pays anglo-saxons connus pour l'absence de
législation générale de la vie privée s'opposent au
modèle français très protecteur. Ces différences
s'atténuent du fait de l'influence contradictoire dans les deux pays.
L'édification du tableau de ces pratiques juridiques
montrent à quel point le droit est relié à la
société ou il s'établit. Et, la Cour Européenne
semble incarnée plus un miroir qu'un réel pouvoir constituant.
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