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Assurer un accès à l'eau et à l'assainissement par la coopération décentralisée, le cas de Villa El Salvador et Rezé

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par Claire Gaillardou
Sciences Po Bordeaux - DESS Coopération Internationale et Développement 2005
  

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1.3. Les « asentamientos humanos » : marqueurs des inégalités

« La situation d'accès à l'eau et à l'assainissement dans le pays continue à être une barrière fondamentale à la réduction de la pauvreté et des inégalités, même si les chiffres officiels indiquent une couverture intégrale » (Agence Canadienne pour le Développement International).

Comme nous l'avons vu dans l'étude de la croissance urbaine liméenne, les « asentamientos humanos » sont des espaces de promiscuité, de grande pauvreté et qui manquent cruellement d'infrastructures pour leur développement. Cependant, nous sommes venus à la conclusion que dans ces espaces le manque d'eau potable et d'assainissement pouvait également être un facteur aggravant des inégalités sociales. En effet, les « asentamientos humanos » ne bénéficient pas des mêmes conditions d'accès à l'eau. Tout d'abord, d'un point de vue financier, l'eau potable est parfois payée jusqu'à 10 fois plus cher dans les périphéries que dans les quartiers à fort pouvoir d'achat du centre comme Miraflores ou Surco. De plus, la qualité de cette eau est bien moindre puisqu'elle est tributaire bien souvent d'un réseau de camions citernes qui ne respecte guère en pratique les contrôles d'hygiène imposés pour le nettoiement des cuves42(*).

De même, la situation à risque des asentamientos humanos dans des lieux ne bénéficiant pas d'un système de voierie adéquat et parfois même perchés à flanc de cerros, implique un difficile acheminement de la ressource, donc un temps et des efforts précieux nécessaires qui occupent une place importante dans le quotidien des habitants.

Enfin, la faible qualité de l'eau et le manque de services d'hygiène spécifiques sont responsables de taux de maladies importants, stigmates des pays du sud comme le choléra. A la fois cause et conséquence des inégalités, la recherche en eau est donc un enjeu crucial dans la lutte contre la pauvreté lancée par l'Etat péruvien.

1.4. Enjeu politique : la problématique du manque de concertation intra-sectorielle

Durant la décennie 90, le Pérou a appliqué un programme d'ajustement structurel basé sur la croissance macroéconomique et la compensation sociale, orientée vers la stabilité du pays.

Cependant, malgré certaines améliorations ciblées, les problèmes de la pauvreté, du manque d'emplois et du chômage persistent. Avec la mise en place du nouveau régime, l'agenda du pays aborde entre autre dans ses thèmes d'attentions prioritaires la lutte contre la pauvreté, la décentralisation, la génération d'emplois de qualité et le renforcement des institutions.

Dans ce cadre, les secteurs de l'accès à l'eau et à l'assainissement peuvent être des clefs de lutte contre la pauvreté et de consolidation du processus de décentralisation, avec la participation des municipalités des districts et des municipalités provinciales dans l'organisation et l'application auto soutenue de ces services.

Face à la lenteur et à l'ingérence du système politique, d'autres acteurs tentent aujourd'hui d'apporter des solutions au problème de l'eau et de l'assainissement liméen.

Il s'agit sur le terrain des Organisations Non Gouvernementales, quelles soient nationales ou internationales, ainsi que de l'action de certaines municipalités locales comme Villa El Salvador qui devant l'ingérence étatique décident de prendre les devants de l'action de développement, et enfin, à une échelle encore plus grande, de l'action de comités de quartiers, rassemblant des riverains des quartiers spontanés dans une démarche d'aménagement participatif du territoire.

Notre travail de recherche nous a très vite permis de comprendre qu'il était difficile de concilier les attentes et les modes d'opération de chacun de ces acteurs. Ces mésententes sont souvent liées du coté des ONG à un refus en bloc de toute action étatique car celle-ci serait assimilée à l'acceptation du gouvernement d'Alan Garcia, toujours responsable dans les esprits de la grave crise économique qui a touché le Pérou à la fin des années 80.

D'autre part, les municipalités locales et les comités de quartiers à l'origine de projets de développement appartiennent majoritairement à une population de migrants, responsable historiquement des invasions des années 70 et 80, et par la même ne recevant à la base aucune légitimité de la part de la Municipalité liméenne. Dans cette optique, ces groupes ont lancés des projets extrêmement locaux de développement, comme ce fut le cas à Villa El Salvador, dans le cône sud de Lima, qui ont souvent connus de très bons résultats puisque réalisés en concertation et avec l'aide de la population.

Enfin, il faut relever que toutes les concurrences ne sont pas originaires des oppositions formulées à l'encontre de l'Etat ou de sa politiques. Il existe aussi de manière pernicieuse et sous forme de non-dit, un certain rapport concurrentiel avec les techniques de développement sur le terrain entre les différentes ONG ou au travers des entreprises privées lors des offres de projets, afin de gagner les subventions qui leur seront nécessaires. Ce rapport est évidement légitime dans le cadre d'un effort de rentabilité et de fonctionnalité technique, cependant il est souvent ici faussé à cause de la corruption du système décisionnel péruvien, encore bien trop souvent à la main de quelques puissants et des entreprises dont ils sont actionnaires.

Un effort de concertation et d'échange des connaissances et des données techniques est aujourd'hui nécessaire à la réalisation des projets de développement sur le terrain.

La croissance continue de la ville de Lima et le manque de ressources financières pour mettre en oeuvre des mesures de contrôle environnemental contribuent à la dégradation de la qualité de l'eau. La ville est en croissance accélérée et les ressources en eau sont fragiles et restreintes43(*). Si la croissance actuelle se poursuit, Lima aura une population de plus de 10 millions d'habitants d'ici à l'an 2000 et de près de 15 millions d'ici à 2010. Alors, le Rímac et le Chillón, ainsi que l'aquifère, ne seront plus en mesure de répondre aux besoins domestiques, industriels et environnementaux de la région urbaine.

Il est difficile de trouver d'autres sources d'eau. Les meilleures options sont probablement dans la région montagneuse, surtout au-delà de la ligne de partage des eaux, dans les cours supérieurs des tributaires de l'Amazone. Toutefois, tout projet qui aurait pour but d'acheminer de l'eau sur de telles distances et à partir de lieux aussi inaccessibles sera extrêmement coûteux, de l'ordre de plusieurs centaines de millions de dollars.

La dette nationale du Pérou est importante et sa côte de crédit est faible dans le système financier international. Le niveau d'investissements requis pour exploiter de nouvelles sources d'eau n'est sans doute pas réalisable dans un avenir prévisible. Par conséquent, la solution immédiate au problème doit comporter une meilleure gestion et la protection des bassins du Rímac et du Chillón ainsi que de l'aquifère de Lima, la réutilisation des eaux usées (du moins aux fins de l'irrigation et de l'industrie) et un effort de rénovation du réseau de distribution pour limiter les pertes d'eau. C'est d'un tel projet d'assainissement qu'il est question avec Villa verde, comme nous allons le détailler plus amplement par la suite.

La solution définitive consisterait à réévaluer le potentiel environnemental de croissance de la ville de Lima en l'intégrant dans une politique nationale démographique et économique. Le milieu ambiant est fragile et il y a une limite au degré d'urbanisation qui serait supportable. Il y a déjà longtemps que cette limite a été dépassée. La plaine côtière ne peut pas supporter une population de 7 millions d'habitants (encore moins une population de 10 millions comme l'indiquent les projections pour la prochaine décennie) sans subir des effets préjudiciables irréversibles. Cependant, aujourd'hui il est plus raisonnable de se baser sur une trame de projets de développement des infrastructures au niveau local pour faire face à l'urgence sans aggraver les processus actuels de dégradation de la qualité de l'eau.

* 42Cf. Annexes : Photo 3 et 4 : De la cuve du camion-citerne aux bidons personnels de conservation, un manque d'hygiène flagrant.

* 43 Cf. en annexe : Carte 2 : Couverture du service d'eau  selon les chiffres actuels donnés par la SEDAPAL.

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