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Contribution aux stratégies de communication pour l'éradication de l'infanticide rituel en milieu Baatonu de Bori, commune de N'Dali

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par Y. Vitalien Raoul ADOUKONOU
Université d'Abomey-Calavi (Bénin) - Maîtrise 2007
  

Disponible en mode multipage

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REPUBLIQUE DU BENIN

------------

UNIVERSITE D'ABOMEY-CALAVI

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FACULTE DES LETTRES, ARTS ET SCIENCES HUMAINES

(F L A S H)

--------

DÉPARTEMENT DES SCIENCES DU LANGAGE

ET DE LA COMMUNICATION

(D S L C)

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MÉMOIRE DE MAÎTRISE

Option : Information - Communication

THEME

Contribution aux stratégies de communication pour l'éradication de l'infanticide rituel en milieu baatonu de Bori, commune de N'Dali

Présenté et soutenu par

Yélognissè Vitalien Raoul ADOUKONOU

Directeur du mémoire

Dr. Antoine D. DADELE, Ph.D, Msc, DEA

Enseignant au Département

Année académique : 2006-2007

La Vie !

La vie est une chance, saisis-la.
La vie est beauté, admire-la.
La vie est béatitude, savoure-la.
La vie est un rêve, fais-en une réalité.
La vie est un défi, fais-lui face.
La vie est un devoir, accomplis-le.
La vie est un jeu, joue-le.
La vie est précieuse, prends-en soin.
La vie est une richesse, conserve-la.
La vie est amour, jouis-en.
La vie est un mystère, perce-le.
La vie est promesse, remplis-la.
La vie est tristesse, surmonte-la.
La vie est un hymne, chante-le.
La vie est un combat, accepte-le.
La vie est une tragédie, prends-la à bras-le-corps.
La vie est une aventure, ose-la.
La vie est bonheur, mérite-le.
La vie est la vie, défends-la.

Mère Teresa

D É D I C A C E

A ceux qui sont engagés dans la lutte contre la violation des droits de l'enfant particulièrement contre la stigmatisation et l'élimination des `'enfants - sorciers''.

R E M E R C I E M E N T S

À

v Mon maître de mémoire, M. Antoine D. DADELE qui n'a pas ménagé ses efforts pour m'accompagner dans mes recherches ;

v Tous les enseignants du Département des Sciences du Langage et de la Communication (DSLC) pour leur constante disponibilité à l'écoute des étudiants ;

v Ma tendre mère qui m'a toujours soutenu. Puisse-t-elle jouir longtemps des fruits de l'arbre qu'elle a planté ;

v Monsieur Alassane GOBI et à M. Anastase FANDOHAN pour leur soutien permanent et leurs précieux conseils. Ils m'ont été d'un appui décisif dans la rédaction de ce travail ;

v Mes frères et soeurs, cousins et cousines, les membres de ma famille, particulièrement ma tante Catherine DAKPOGAN ASSEGBEDE ;

v Mes amis et camarades de classes et d'amphis pour m'avoir appris à mieux appréhender la vie en communauté.

LISTE DES ABRÉVIATIONS

- APEM : Association pour la Protection de l'Enfance Malheureuse

- CAEF : Comité d'Arrondissement pour l'Education des Filles

- CCE : Comité Communal de l'Education

- CSA : Centre de Santé d'Arrondissement (CSA)

- DDG : Discussions Dirigées de Groupe

- DDSP : Direction Départementale de Santé

- EABMSP : Enfant Ayant Besoin de Mesures Spéciales de Protection

- ELIB : Espoir Lutte contre l'Infanticide au Bénin

- ONG : Organisation Non Gouvernementale

- ESF : Espoir sans Frontières

- UVS : Unité villageoise de Santé

- UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

- TAR : Théorie de l'Action Raisonnée

-HBM : Health Belief Model

Sommaire Pages

Introduction 6

I- Généralités 9

II- Cadre et méthode d'étude 31

III- Présentation des résultats de l'étude 41

IV- Analyse des résultats 53

Conclusion générale 64

Références bibliographiques 70

Annexes. 74

Introduction

Chaque peuple a ses croyances, ses pratiques culturelles et ses traditions. Chaque communauté a ses spécificités et le monde trouve son vrai sens dans la diversité des peuples. Cependant, la nature humaine est unique et tous les êtres humains sont égaux. Cette conception de la nature humaine est universellement partagée et des textes juridiques l'établissent. Mais, dans la réalité, ces principes ne sont pas toujours respectés.

Dans certains pays d'Afrique, et dans bien des pays du monde, certaines pratiques coutumières violent de façon flagrante des droits humains pourtant universellement reconnus. Au Bénin, des communautés, à un moment de leur histoire, ont connu des pratiques portant atteinte aux droits fondamentaux de l'être humain (sacrifice humain, mariage forcé, excision, infanticide, etc.). Certaines de ces pratiques ont disparu avec le temps, mais d'autres continuent et ont encore, si on y prend garde, de beaux jours devant elles. C'est le cas de l'infanticide rituel pratiqué dans certaines communautés béninoises dont les Baatombu et les Boko.

Cette pratique est l'objet de ce mémoire. Notre étude, entre autres préoccupations, s'interroge sur les raisons pour lesquelles des communautés continuent d'attacher du prix à une pratique qui consiste à tuer ou à rejeter des enfants pour le simple fait qu'ils sont « mal nés » ou qu'ils ont « mal fait leur dentition ».

Notre travail vise à étudier de façon critique les actions menées par les uns et les autres afin de proposer de nouvelles stratégies aux structures engagées dans la lutte contre l'infanticide dans les communautés baatombu en général et dans l'arrondissement de Bori, cadre de l'étude, en particulier.

Ce travail est subdivisé en quatre grandes parties : la première aborde les généralités. Si la deuxième partie apporte des éclaircissements sur le cadre et les méthodes d'étude, la troisième présente les résultats issus des recherches sur le terrain. La dernière partie fait une analyse desdits résultats. La conclusion enfin résume tout le travail et propose de nouvelles stratégies de lutte contre l'infanticide.

I-

Généralités

I-1- Problématique

Au terme des dispositions de l'article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits »1(*). La reconnaissance de la dignité de tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde2(*).

Aussi, la convention relative aux droits de l'Enfant adoptée par la communauté internationale le 20 novembre 1989 et ratifiée par la République du Bénin le 03 août 1990 confère-t- elle à tout enfant le droit à la vie.

Par ailleurs, dans les communautés africaines en général et béninoises en particulier, l'enfant est un être précieux. L'enfant constitue souvent la clé de réussite du mariage. Il est aussi la plus grande richesse d'un couple et apporte à toute famille joie et bonheur. « La stabilité et la solidité de tout couple dépend intimement de la procréation » Emilie KPADONOU (1997)3(*). L'enfant est donc la valeur sûre, le bien sublime, l'ultime récompense, le don le plus précieux de la Nature aux couples.

« Dans nos cultures noires africaines, l'enfant représente un lien entre les vivants et les ancêtres, c'est lui qui assure la continuité entre la vie et la mort »4(*).

Comme on peut le constater, tant le droit que les traditions africaines s'accordent pour reconnaître l'importance de l'enfant.

Paradoxalement à leur attachement à la vie, particulièrement à la vie des enfants, les communautés du monde ont à un moment de leur évolution porté atteinte aux droits de ces êtres à la vie et à leur dignité en raison de croyances qu'elles ont eu à développer. Certaines de ces pratiques ont disparu avec le temps. Cependant d'autres persistent. Au Bénin, au nombre de celles-ci, il y a l'élimination des enfants dits sorciers5(*). Cette pratique consiste à éliminer ou à rejeter des enfants que la communauté juge indésirables.

Au Sud et au Centre du Bénin, ces enfants sont appelés toxosu ou toxolu. Ils sont consacrés « rois des eaux » et sont jetés à l'eau.

 En dehors de ces critères liés au handicap physique, dans certaines communautés, des critères particuliers de l'enfant à la naissance peuvent conduire à son élimination. On parle dans les communautés baatombu, boko et Fulfulde d'enfants sorciers. Les fulfulde abandonnent les enfants quand leurs mamans meurent en couche.

En milieu baatonu, il existe au moins une dizaine de critères empiriques préétablis dont chacun d'eux suffit pour déterminer la conduite à tenir quant à l'élimination physique ou le rejet de l'enfant. Ces critères sont :

«  A la naissance :

-Naissance à huit mois (le prématuré de sept mois est toléré) ;6(*)

-Présentation par le siège ;

-Présentation par la face ;

-Présentation par l'épaule ;

-Naissance avec des germes de dents ;

-Naissance avec présence de malformations visibles ;

-Naissance entraînant la mort de la mère ;

-Toute naissance de l'enfant face contre terre (la femme accouchant traditionnellement accroupie) ;

De la naissance à un an :

-Poussée des incisives à huit mois ;

-Poussée de la première dent à la mâchoire supérieure »7(*).

En plus de ces critères, il y a le cas où l'enfant commence à marcher à l'âge de 7 mois.

Les enfants présentant l'un de ces critères ou malformés sont soit « réparés » par un bourreau, soit abandonnés chez les peulhs dans le but de les exorciser. Cette pratique remonte à la nuit des temps dans ces communautés et est sérieusement ancrée dans la tradition baatonu. Certains pensent que son éradication est impossible.

Cependant, des ressortissants de ces communautés s'insurgent depuis plusieurs années contre cette pratique pour la dénoncer et la combattre afin de susciter une prise de conscience collective.

Officiellement depuis 1993, des ong et autres structures ont été créées pour sensibiliser les populations sur le caractère rétrograde de cette pratique et pour les inviter à l'abandonner.

Dans cette dynamique, il faut signaler que des séminaires, des études et des travaux de recherches sont également consacrés à l'infanticide rituel. Des recommandations y ont été faites. Malgré tout, la pratique continue et résiste dans le temps et dans l'espace.

Au vu de tout ce qui précède, la question fondamentale qu'on est en droit de se poser est de savoir :

« En quoi consistent les stratégies de communication utilisées par les structures qui luttent contre l'infanticide rituel en milieu baatonu, plus particulièrement à Bori,  et pourquoi elles ne permettent pas de réduire substantiellement la pratique?»

«Comment des populations qui attachent autant de prix à la procréation et à la vie en sont venues à cette pratique et pourquoi les communautés perpétuent-elles l'élimination des enfants qui en réalité n'ont aucune influence sur leur naissance?»

Les réponses à ces questionnements nous permettront de dégager de nouvelles stratégies de communication en faveur de la lutte contre l'infanticide rituel en milieu baatonu, particulièrement à Bori, dans la commune de N'Dali.

I-2- Hypothèses de l'étude

1- La persistance de la pratique de l'infanticide rituel à Bori est liée à l'incompatibilité entre les stratégies de communication d'intervention et les facteurs psychosociaux des communautés.

2- Les croyances et les valeurs de la communauté baatonu constituent un facteur défavorable à l'éradication de la pratique de l'infanticide rituel à Bori.

I-3- Objectifs de l'étude

Objectif Général

Etudier les stratégies novatrices pour l'éradication du rejet et de l'élimination des enfants dits sorciers en milieu Baatonu particulièrement dans l'arrondissement de Bori, commune de N'Dali, zone à haut risque de pratique d'infanticide dans le Borgou.

Objectifs spécifiques

1- Identifier les causes et fondements de la persistance de l'infanticide rituel en milieu baatonu, particulièrement à Bori commune de N'Dali ;

2- Analyser les stratégies de communication utilisées par les structures intervenant dans la lutte contre l'infanticide rituel à Bori, commune de N'Dali ;

3- Proposer de nouvelles stratégies de communication sur la base des faiblesses des méthodes d'intervention des structures engagées dans la lutte contre l'infanticide rituel à Bori, commune de N'Dali.

I-4 Revue documentaire

Plusieurs documents et auteurs ont abordé d'une manière ou d'une autre la question de l'infanticide. Nous exposerons ici les termes reliés au terme et l'essentiel des documents qui l'ont abordé.

I-4-1 Clarifications conceptuelles

Infanticide rituel

Ce concept révèle deux termes chargés de douleur, de mystère et de tragédie.8(*)

En effet, l'infanticide est le meurtre ou l'assassinat d'un nouveau né, au cours du délai imparti pour faire la déclaration de naissance à l'Etat civil des trois (3) jours qui suivent l'accouchement9(*). Au Bénin ce délai est de 10 jours10(*).

Le Code pénal en ses articles 300 et 302 qualifie exclusivement d'infanticide, le meurtre d'un enfant nouveau né et punit le coupable de la peine de mort. Il convient de préciser que le meurtre est un homicide intentionnelle à la vie humaine alors que l'assassinat est un homicide commis avec préméditation ou guet-apens. Dans le meurtre ou dans l'assassinat, il y a atteinte à la vie d'une personne humaine.

Le mot rituel vient ajouter à l'infanticide une dimension secrète et initiatique à un domaine auquel n'ont accès que les initiés adultes. Ceci explique l'exécution secrète des enfants et rend complexe l'évaluation des responsabilités et l'établissement de la culpabilité d'une personne ou d'une autre.

Enfant sorcier

La notion d'enfant sorcier est particulière à certains groupes sociolinguistiques du Bénin dont notamment les Baatombu et les Boo. Dans ces communautés, est enfant sorcier, tout nouveau né qui sort du sein maternel par les pieds, qui naît à 8 mois ou qui naît avec des dents et tout enfant qui pousse des dents à 8 mois ou dont la dentition commence par la mâchoire supérieure, ou qui commence à marcher à l'âge de sept mois, les enfants dont les mères meurent en couche11(*). Bref, les enfants qui ne respectent pas les normes physiques de naissance et d'évolution prescrites par la société baatonu sont qualifiés de sorciers. 

I-4-2 Les théories de prédiction de comportement

L'adoption de tout comportement suit un processus défini. Et lorsqu'une personne a un comportement à risque que l'on désire changer, il importe de prendre en compte plusieurs paramètres. En effet, plus l'on en sait sur les facteurs qui sous-tendent l'adoption ou non d'une pratique, plus l'on est en mesure de concevoir avec succès une intervention qui puisse influer sur cette pratique. Plusieurs travaux de recherche ont été consacrés au changement du comportement et expliquent le processus.

Le fondement théorique de notre étude s'inspire de quelques théories du comportement dont notamment le Modèle des Croyances Relatives à la Santé, la Théorie de l'Action Raisonnée (TAR) et la Théorie Sociale Cognitive. Il est nécessaire d'associer plusieurs bases théoriques parce qu'aucun modèle ne s'est, à lui tout seul, avéré être suffisant pour concevoir et évaluer des programmes de promotion de la santé12(*). En effet, il y a eu, depuis quelques années un développement des connaissances dans l'art de motiver de nouvelles attitudes et de nouvelles actions tant chez les individus que dans les organisations et au sein des communautés13(*).

A notre niveau, nous avons regroupé les théories mettant l'accent sur les déterminants du comportement : (les bases théoriques citées supra).

Le Modèle des Croyances Relatives à la santé ou Health Belief Model (HBM), se prête facilement à une approche résolument directe d'éducation pour la santé en vue de définir un comportement et une intervention. Comme son nom l'indique, le modèle des Croyances Relatives à la Santé est basé sur des variables cognitives. Il suggère que le comportement sanitaire est fonction de quatre croyances ou facteurs mentaux clés :

1- le sentiment personnel d'une prédisposition à une menace de maladie ;

2- la perception de la gravité de son état de santé ;

3- la perception de l'efficacité d'un comportement particulier face à l'état de santé ;

4- la perception des obstacles à ce comportement.

Ensemble, ces facteurs mentaux déterminent le penchant d'une personne vers une action14(*). Le HBM pose comme prémisse que tout individu est susceptible d'entreprendre une action pour prévenir une maladie ou une situation désagréable s'il possède des connaissances minimales dans ce domaine et s'il considère la résolution de son problème comme une dimension importante dans sa vie.

La Théorie de l'Action Raisonnée (TAR) s'appuie sur une approche psychosociale d'explication du comportement. Elle étudie des rapports entre les croyances, les attitudes, les intentions et le comportement. Le but ultime de la théorie de l'action raisonnée (Fishbein et Ajzen 1975) est de prédire, et par ce fait, de comprendre les comportements sociaux. Elle part de l'hypothèse que pour modifier une pratique donnée, il faut nécessairement modifier la structure cognitive qui la sous-tend. Cette théorie est beaucoup plus perçue comme une série d'hypothèses.

En premier lieu, on suppose qu'un comportement est essentiellement fonction de l'intention de la personne d'avoir ce comportement. En second lieu, l'intention d'avoir ce comportement est perçue comme étant fonction de deux facteurs : un facteur personnel qui est l'attitude de l'individu par rapport au comportement et un facteur social qui est l'importance que l'individu accorde à l'opinion des gens qui lui sont proches. Cette théorie permet de comprendre en partie pourquoi certaines personnes de ces communautés malgré toute leur bonne volonté de changer continuent de suivre l'opinion générale faite sur les enfants sorciers.

Par ailleurs, pour changer, les gens n'ont pas seulement besoin de modifier leurs pratiques sur le plan sanitaire, mais également leurs modes de comportement, leurs ressources psychologiques et leurs repères sociaux. La théorie sociale cognitive (TSC) étudie de manière très précise les obstacles potentiels aux changements personnels. Elle est bâtie sur une relation triangulaire entre la personne, le comportement et l'environnement à travers un processus de «déterminisme réciproque». En d'autres termes, bien que l'environnement détermine ou provoque largement le comportement, une personne utilise des processus cognitifs pour interpréter aussi bien l'environnement que son comportement, tout comme il se comporte de manière à changer l'environnement et arriver à de meilleurs résultats grâce à son comportement. La théorie sociale cognitive est surtout utile dans le cas de comportements qui résistent particulièrement aux changements comme des pratiques coutumières fortement ancrées dans les moeurs. Ce qui est essentiel pour l'efficacité personnelle, ce n'est pas seulement le fait d'obtenir une information juste, mais également des compétences techniques, la confiance en soi, les changements progressifs d'attitude et la décision d'essayer de nouveaux comportements. La communication en tête-à-tête est souvent très efficace lorsqu'il s'agit d'aider des sujets à arriver à des changements de comportements difficiles à réaliser. Cependant, il existe des canaux moins personnels qui peuvent également inculquer ces compétences en utilisant des techniques telles que les témoignages pour influencer le public et créer les conditions d'un changement de comportement.

Somme toute, après une analyse approfondie, les trois théories présentées plus haut se recoupent dans une large mesure. Les théoriciens ont identifié huit facteurs communs à ces théories15(*) :

1- Croire que les avantages ou les bénéfices de l'adoption d'un comportement sont supérieurs aux inconvénients (croyance en l'efficacité du comportement) ;

2- Avoir l'intention ferme et positive de s'engager à adopter ce comportement (Intention) ;

3- Avoir les compétences nécessaires pour l'adopter (compétences techniques) ;

4- Avoir la conviction que ces compétences peuvent vous permettre de réaliser ce comportement (Efficacité Personnelle) ;

5- Etre convaincu que ce comportement produira vraisemblablement un effet tout à fait positif plutôt que négatif (Emotions) ;

6- Etre persuadé que la réalisation de ce comportement s'accorde avec son image personnelle (Image Personnelle) ;

7- Sentir plus de pression sociale pour adopter (Normes Sociales Perçues) ;

8- Sentir moins de contraintes environnementales à l'adopter qu'à ne pas l'adopter (Inconvénients).

Non seulement ces facteurs sont autant de points de convergence entre les théories, mais ils ont été présentés empiriquement comme représentant l'essentiel des variations dans tout comportement particulier au sein d'une population donnée. L'association de ces théories permet de mieux cerner les déterminants d'un comportement afin de l'influencer. Ces bases théoriques importent dans la proposition de nouvelles stratégies pour lutter efficacement contre l'infanticide qui est un comportement difficile à abandonner.

I-4-3- Revue Documentaire

Les documents consultés ont abordé essentiellement les causes, l'origine, les fondements, les conséquences de l'infanticide rituel et les mesures entreprises contre la pratique ainsi que les mesures judiciaires en vigueur. Des recommandations ont été faites dans la plupart de ces documents pour une lutte efficace contre l'élimination physique des enfants dits sorciers. Dans l'un ou l'autre des cas, une impression générale est donnée sur l'infanticide rituel qui n'est pas que l'apanage des peuples africains.

Dans sa communication lors du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin tenu à Natitingou les 25, 26 et 27 novembre 1997, le docteur Emilie F. KPADONOU, affirme que l'infanticide est une réalité universelle. C'est un acte que l'on retrouve dans toutes les civilisations, du moins à un moment de leur existence. Selon Alexandre MINKOWSHI repris par Alassane GOBI dans sa communication au cours de ce même séminaire, « l'infanticide est une pratique qu'on retrouve dans toutes les civilisations. Même la civilisation gréco-romaine n'y a pas échappé. » Le droit de vie et de mort existait en effet dans l'antiquité et jusqu'au Ive siècle. En Europe, au moyen âge, l'on pensait que les nouveaux nés étaient le siège de forces obscures, qu'ils étaient habités par le démon. On se méfiait donc des enfants nés de façon anormale et de ceux dont l'accouchement coïncide avec un événement malheureux notamment le décès de leur mère.

Roger GBEGNONVI affirme que, selon les préceptes eugéniques de Platon et de Aristote, les enfants débiles ou disgracieux sont immolés peu de temps après leur naissance en présence des concepteurs16(*). C'est donc un infanticide approuvé par la conscience collective.

Chez les juifs, du temps du patriarche Abraham, comme en témoigne la sainte Bible, le sacrifice des enfants à un être suprême existait. Le passage où Abraham voulait sacrifier son fils unique, Isaac, en dit long : « Dieu dit à Abraham : « Abraham, prends ton fils, ton unique, que tu chéris, Isaac et va-t-en au pays de Moriyya et là tu l'offriras en holocauste sur une montagne que je t'indiquerai »17(*).

Les Perses enterraient vivants des enfants. Chez les Egyptiens et les Hébreux, l'avortement était interdit, mais seulement deux enfants au plus étaient sauvegardés pour assurer la continuité de la lignée. A défaut d'être vendu pour servir d'esclave, le reste de la fratrie était éliminé18(*).

Les enfants à croissance défectueuse, les enfants illégitimes, incestueux, adultérins, les enfants issus d'un viol, les jumeaux, les filles, en dehors de la première dans certaines coutumes sont voués à l'infanticide. A cet effet, Roger GBEGNONVI déclarait : « Tout le monde sait que chez les Arabes du temps avant le prophète Mohamed, on enterrait vivantes les petites filles parce qu'elles étaient considérées comme déshonneur et malheur pour leurs pères. » 19(*)

Aujourd'hui encore, l'infanticide continue dans les pays européens à travers l'avortement et la mise à mort de nouveaux nés par leur mère 20(*). En Inde, l'infanticide continue. Les nouveaux-nés de sexe féminin sont simplement éliminés dans certaines familles indiennes parce qu'ils sont jugés de charges inutiles. En effet, dans certaines communautés indiennes, il revient à la femme de donner la dot à son époux ; ce que certains parents préfèrent éviter dès la naissance21(*).

Comme l'Europe, le continent africain regorge de pratiques coutumières qui portent gravement atteinte aux droits et à l'intégrité de la personne humaine. Cependant, avec le temps, certaines de ces traditions ont été abandonnées. D'autres par contre, persistent et résistent au temps et au brassage des cultures.

En Cote d'Ivoire, par exemple chez les peuples Agni, « malgré l'avidité avec laquelle un lignage accueille toute promesse de vie humaine, les responsables n'acceptent pas la naissance de n'importe quel bébé. Un tri s'opère pour supprimer dès son arrivée sur terre, tout enfant non désiré par le lignage22(*)». Ainsi, de la grossesse à l'accouchement, les femmes traversent une épreuve énigmatique qui les traumatise.

Au Bénin des pratiques similaires d'atteinte au droit de l'enfant à la vie existent. « Diverses sources concordantes, aussi bien orales qu'écrites, font état des causes de l'infanticide rituel au Bénin. Mais la cause principale prédominante qu'on retrouve dans toutes les coutumes béninoises, du Nord au Sud, est incontestablement celle des malformations congénitales, à savoir les cas d'imperforation anale, de fistule ano-vaginale, d'hydrocéphalie, de spina bifida, de bec de lièvre avec ou sans fente palatine, de cécité congénitale, d'absence totale ou partielle d'un membre de l'enfant à la naissance etc. »23(*). Ces enfants sont considérés comme inutiles et avilissants : « Tant sur le plan physique, psychologique que social, c'est une situation pénible pour tous ceux qui a priori peuvent se réclamer d'un quelconque lien de parenté avec l'enfant. C'est parfois une honte, et le regard des « autres » est difficile à supporter. Dans ces circonstances, l'élimination physique de l'enfant constitue un soulagement pour tous »24(*).

En effet, dans le Centre et le Sud Bénin, l'enfant pluriformé, l'infirme moteur cérébral appelé `'toxolu'' ou `'toxosu'' est consacré « roi des eaux » et jeté dans un cours d'eau. Selon Félix IROKO, en milieu Kufalo (un groupe socio-culturel de l'Atacora), « Les enfants nés malingres ou estropiés sont tués, car on suppose qu'ils ne seront jamais de bons guerriers une fois devenus grands »25(*).

Dans la partie Nord du Bénin, notamment chez les Baatombu et les Boko, les enfants dits sorciers sont éliminés. Ce qui fait dire à Roger GBEGNONVI que: « Tout le monde sait que chez nous au Bénin, nous tuons certains enfants à leur naissance pour des raisons qui, au fond, sont étonnantes et déroutantes par leur simplicité » 26(*).

En effet, « Un enfant sorcier n'est pas ce que nous nous imaginons. C'est un enfant viable, qui n'est ni un handicapé physique, ni un handicapé mental. C'est un enfant normal sur tous les points. Un être humain à part entière [...]le bariba dénie à ces enfants la qualité d'êtres humains et leur en inflige une autre qui fait d'eux, dans l'esprit des gens, des épouvantails, des êtres abjects. » 27(*)

Tout enfant «mal né» ou qui «fait mal sa dentition» est soit rejeté, soit éliminé dans ces communautés sans aucune autre forme de procès. Dans ces groupes socio culturels, tout ce qui ne répond pas aux normes liées à la naissance et au développement de l'enfant est suspect, et conformément aux prescriptions des ancêtres, il faut le réparer. Pour Alassane GOBI, « face à l'anormal il y a toujours des réactions, et si besoin, des sanctions. Ces faits de sociétés sont, hélas, transposés sur les circonstances de naissance et/ou de croissance des bébés dans certaines sociétés. Le normal et l'anormal sont comme on le sait, des notions antinomiques, caractérisées par une certaine relativité, car leur appréciation varie selon les sociétés et selon les époques. L'infanticide n'échappe pas à cette logique. [...] Comme la naissance et la croissance des enfants obéissent habituellement à certains critères empiriques, tout ce qui est hors de ces critères est considéré comme anormal dans nos sociétés. »28(*)

Selon Clément GOUNOU, « le fondement de l'infanticide peut être situé dans le souci des communautés de conjurer un mal et d'assurer à la collectivité un bonheur, une paix ou une quiétude. Ainsi, comme de temps en temps la force du mal prend chair et s'incarne dans la société avec des signes particuliers, il faut savoir lire et reconnaître ce mal par les signes qu'il émet et partout agir conséquemment au risque de courir à l'autodestruction : voilà la philosophie qui soutient cette pratique de l'infanticide. A cela il faut prendre en compte la nature très sélective de la société baatonu. C'est une société qui a développé un principe sacro-saint du profil de l'homme qui doit vivre : il doit être d'abord physiquement irréprochable, sa naissance faite suivant les normes et par la suite il faut avoir une grandeur d'esprit et une bonne moralité. Tout ce qui ne répond pas à ces critères, il faut l'éliminer ou l'exiler. Voilà à la vérité ce qui semble expliquer l'infanticide. Mais des gens se seraient levés très tôt contre cet esprit si on ne l'entourait de mythe qui fait planer la mort collective. 29(*)»

L'origine de la pratique n'est pas clairement déterminée. Selon des études menées de 1967 à 1970 par une équipe de religieuses et religieux européens en collaboration avec Clément GOUNOU, l'origine de la pratique est diverse.

Mohamed ALIDOU reprend la version de Clément GOUNOU. « L'infanticide est une pratique fondée sur la superstition. Des informations recueillies après trois années de recherche auprès d'une centaine de personnes reconnues sensées, seules deux sont dignes d'intérêt. La première, est celle d'une vieille de Kali (Bagou), commune de Gogounou qui donnait comme source de la pratique, la naissance à Nikki d'un nouveau-né venu par les pieds et ayant en outre commencé la dentition par le haut. Tout le temps qu'a vécu cet enfant, Nikki a connu des morts inexplicables et incontrôlables. Alors le roi de Nikki, DEOBIDIA, a demandé à son devin de consulter les oracles sur les causes de ce phénomène insolite. Le bébé né par les pieds fut désigné comme source de tous les maux. Alors le souverain ordonna la mise à mort de tout enfant qui naîtrait de façon «anormale» ou commencerait la dentition par le haut. La deuxième information communicable pour son intérêt a été recueillie dans la commune de Kandi. Celle-là situe l'origine de l'infanticide à des temps immémoriaux chez les Baatombu roturiers, donc avant même l'arrivée des Wassangari. Selon le vieux Yérima N'GOYE, une consultation annuelle des oracles aurait révélé la naissance d'un enfant de façon particulière. Cet enfant qui naîtra sera dur de caractère et causera des dégâts dans le pays si on ne le retrouvait pas tout de suite. Après cette prédication, un enfant naquit après douze (12) mois de grossesse. Quatre mois après sa naissance, il commença à pousser des dents par le haut. En même temps, il se mit à marcher. Pendant que ces événements se déroulaient, l'oncle du bébé (18 ans) mourut, suivi de la mort d'une femme en état de grossesse et d'un enfant dans la famille. Alors le devin s'écria : c'est l'enfant annoncé par les oracles. Il faut l'éliminer pour conjurer le mal sinon, tout le pays risque de mourir. Et comme l'on ne sait pas expérimenter les phénomènes chez nous, alors ceux qui naissaient de façon irrégulière étaient considérés comme venant pour perpétrer un malaise dont eux-mêmes seraient le remède. Il faut les éliminer pour conjurer le mal. » 30(*).

Ces sociétés viennent ainsi de trouver un bouc émissaire pour expliquer leur malheur. Aucun raisonnement rationnel n'est mené pour comprendre le phénomène. Des milliers d'enfants subissent en silence les affres de ce que Isabelle TEVOEDJRE appelle « une ignorance et un sous développement mental » d'une société superstitieuse. Isabelle TEVOEDJRE explique que, « dans ces ethnies, il fut un temps où les jumeaux et les triplés étaient accueillis par la mort. En effet dans ces régions, les jumeaux et triplés que l'on rencontre ont à peine une vingtaine d'années pour les plus âgés. L'époque de la condamnation à mort brutale de ces enfants semble révolue pour eux, les chanceux !!! Nous espérons qu'il en sera de même pour les bébés dits «sorciers» 31(*).».

C'est un voeu noble mais difficile à réaliser. D'ailleurs Mohamed ALIDOU reconnaît la difficulté de la tâche. Eradiquer le phénomène de l'infanticide sera difficile dans la mesure où l'exécution de ces êtres inoffensifs dits sorciers se fait dans la discrétion. 

Par ailleurs, la pratique de l'infanticide est considérée comme un acte de purification de la lignée, de la famille victime d'une souillure survenue par la naissance d'un tel enfant. Cette purification est une réparation, le rétablissement d'un ordre troublé. Elle est appelée « sumbu » 32(*) en baatonu. Les populations continuent cette pratique qui constitue une atteinte sérieuse aux droits des enfants notamment le droit à la vie.

Malgré le fait que l'infanticide rituel prive les enfants de leurs droits élémentaires, aucune action d'envergure n'est engagée contre la pratique. « Les différents programmes de coopération Bénin-Unicef qui ont permis de lever le voile sur plusieurs cas de comportements en défaveur des enfants, malgré leur succès, n'ont pas encore touché toutes les catégories d'enfants en situation difficile. En effet très peu d'actions sont menées pour lutter contre le phénomène de l'infanticide rituel. » 33(*)

Dans le souci de mieux cerner le phénomène de l'infanticide rituel dans le temps et dans l'espace, le programme de coopération Bénin-Unicef par le biais du projet Enfant Ayant Besoin de Mesures Spéciales de Protection (EABMSP) a initié une étude dans ce sens. Cette étude s'est déroulée du 02 au 16 janvier 2001 et a couvert les départements de l'Alibori, de l'Atacora, du Borgou, des Collines et de la Donga.

Les résultats de cette étude ont montré que quelques organisations non gouvernementales, des personnalités religieuses et spirituelles se sont déjà engagées dans la lutte contre cette pratique. La première personnalité religieuse à avoir engagé ce combat est un prêtre Baatonu du nom de Pierre Bio SANOU. Pendant plus de vingt ans, il a lutté seul contre cette pratique avant de créer avec d'autres bonnes volontés en 1993 l'ong « Espoir Lutte contre l'Infanticide au Bénin » (ELIB). Il faut signaler que cette ONG travaille en étroite collaboration avec l'ong française «Espoir sans Frontières» (ESF). Aux cotés de l'ELIB, l'Association pour la Protection de l'Enfance Malheureuse (APEM ong) mène la même lutte. Les principales activités de ces organisations consistent essentiellement à sensibiliser les populations. L'APEM ong « a adopté la méthode de séminaires itinérants sur les lieux mêmes où ces crimes sont commis. Ensuite cette ONG a entrepris d'initier sur les antennes des radios rurales, des débats issus de ces séminaires. »34(*)

L'ELIB de son coté réagit contre la pratique à travers un certain nombre d'activités classées en activités préventives et en activités curatives à travers la sensibilisation des populations et la récupération d'enfants voués à l'infanticide.

Les responsables de l'ELIB, notamment le père Bio SANOU, ont récupéré plusieurs dizaines d'enfants voués à l'infanticide qu'ils ont placés dans des foyers très loin de leur lieu de naissance. Certains sont envoyés et adoptés en Europe. Mais le père SANOU ne se fait pas d'illusion quant à la difficulté de cette lutte. A cet effet, il dit que « l'infanticide aura de beaux jours devant lui tant que ces enfants dits sorciers ne seront pas intégrés dans leurs propres sociétés. ». Mais l'intégration de ces enfants dans leurs sociétés, en l'occurrence celle des Baatombu semble être une tâche pratiquement impossible à court terme. « A un enfant à qui on dénie la nature humaine qu'il tient de Dieu, à qui on n'accorde même pas le prénom qui lui revient de droit de par son rang dans l'ordre de la naissance, il n'y a pas de place dans la société. Pour lui, ou bien la mort ou bien le rejet, la rupture totale avec la société, la sienne35(*)

En dehors de ces activités, l'ELIB s'investit dans la construction de maternités dans les villages à haut risque d'infanticide. Cette stratégie a fait ses preuves. Des milliers d'enfants voués à l'infanticide vivent parce que leurs communautés n'ont pas été informées des conditions de leur naissance. La construction des maternités est aujourd'hui le moyen le plus efficace de lutter contre l'infanticide. En témoignent les données recueillies par certains chercheurs dans SEPD /DDSP Alibori, Atacora, Borgou, Donga et Collines : annuaire statistique 1999. Selon les données, mille deux cent trente-six (1236) enfants sont nés dans des conditions anormales et auraient pu être exécutés si l'accouchement avait eu lieu à domicile36(*).

Ces chiffres révèlent l'importance des maternités. Mais le mal est que très peu de femmes fréquentent ces maternités. Par exemple « sur mille cent quatre vingt dix huit (1198) grossesses suivies en 1999, seulement quatre cent quatre vingt douze (492) accouchements sont assistés, soit 41,06%, six cent quatre vingt dix-neuf (699) cas d'accouchements à domicile. Ce même constat est fait en 2000 avec mille cent trente (1130) cas d'accouchements à domicile sur 1599 grossesses suivies, soit seulement 469 accouchements assistés (soit 29,33%) ». Ces données viennent des statistiques d'accouchements à la maternité de Kolokondé. 37(*).

Il faut mentionner que plusieurs autres grossesses n'ont pas du tout été suivies. Avec ce constat, le problème reste entier. Une chose est donc de construire les maternités, une autre est de convaincre les femmes de les fréquenter. Pour cela le concours des chefs traditionnels a été sollicité. Certains soutiennent déjà la lutte contre l'infanticide. Entre autres, « les chefs traditionnels, leurs majestés Bagana OROUSOUROU II de Kouandé et KPKETONI VI de Djougou se sont déclarées contre cette pratique traditionnelle qu'ils qualifient de « criminelle »»38(*). Les chefs traditionnels des régions septentrionales sont de plus en plus instruits et gagnés par les religions révélées. De ce fait, ils s'opposent aux pratiques traditionnelles qui ne sont pas conformes aux enseignements religieux « Tu ne tueras point » prescrit, le 5è commandement de Dieu. L'engagement de ces chefs traditionnels est important dans la lutte contre l'infanticide rituel.

Et pourtant, l'infanticide est sanctionné par la législation en vigueur au Bénin. Mais avant toute sanction, il faut qu'il soit véritablement établi qu'il y a infanticide. Maître Mohamed TOKO dans son intervention au séminaire tenu à Natitingou les 25, 26 et 27 novembre 1997, rappelle que pour « qu'une personne tombe sous le coup de l'infanticide, il faut :

- un meurtre ou un assassinat ;

- que la victime soit un enfant nouveau né.»  

Ainsi, lorsque les éléments constitutifs du crime d'infanticide sont réunis, les auteurs doivent être poursuivis et sanctionnés. Et dans ce cas, l'article 302 du code pénal dispose que « Tout coupable d'assassinat (...) sera puni de mort... »

Il ressort de cette disposition que :

- pour la mère de l'enfant du nouveau-né, lorsqu'elle est auteur principal de l'infanticide de son nouveau-né intervenu par assassinat, elle sera condamnée aux travaux forcés à perpétuité, mais lorsqu'elle est complice de l'infanticide de son nouveau-né, par simple meurtre, elle sera condamnée aux travaux forcés à temps.

- pour les autres personnes : autres co-auteurs ou complices, lorsqu'il s'agit d'un assassinat de nouveau-né, ils sont condamnés à la peine de mort et aux travaux forcés à perpétuité lorsqu'il s'agit de meurtre de nouveau-né.

Il y a donc des dispositions qui punissent l'infanticide, mais il est difficile de les appliquer dans la mesure où la connaissance par les autorités des faits d'infanticide est rare compte tenu du secret qui les entoure. C'est pourquoi, il convient de développer l'information et la sensibilisation des population pour que les faits du genre soient portés à la connaissance du public et des autorités publiques aux fins de répression, laquelle doit déboucher sur des sanctions. » 39(*)

Les différents rapports de séminaires et les travaux de recherches sur l'infanticide rituel ont fait plusieurs recommandations pour éradiquer cette pratique de nos sociétés. Au nombre de ces recommandations, il y a la construction des maternités et l'institution d'amendes pour les accouchements à domicile surtout dans les zones à haut risque d'infanticide, l'insertion dans les programmes d'étude de l'enseignement officiel des cours sur l'infanticide rituel, l'utilisation de sketchs dans les séances de sensibilisation, l'association des bourreaux repentis aux séances de sensibilisation, etc.

Ce qui ressort de cette revue littéraire est que malgré les séminaires, les études consacrées à la pratique et les recommandations faites, l'infanticide rituel persiste. Il ressort également que les actions ne sont menées que par quelques ONG appuyées par des autorités religieuses dans certaines régions. Il serait judicieux que l'Etat central s'engage plus dans cette lutte même.

II-

Cadre et Méthode d'étude

II-1- Cadre de l'étude

Les recherches entrant dans le cadre de ce travail se sont déroulées dans l'arrondissement de Bori, commune de N'Dali.

II-1-1 Informations générales sur la commune de N'Dali

Notre recherche s'est déroulée dans la commune de N'Dali, une des 8 communes que compte le département du Borgou. D'une superficie totale de 3748 km², soit 3,33 % de la superficie du Bénin, la commune de N'Dali compte 5 arrondissements : N'Dali, Bori, Gbégourou, Ouénou, Sirarou. Située à 60 km de Parakou et à 475 km de Cotonou, elle est limitée au Nord par les communes de Bembérekè et de Sinendé, au Sud par les communes de Parakou et de Tchaourou, à l'Est par les communes de Nikki et de Pèrèrè et à l'Ouest par la commune de Djougou.40(*)

En 1992 la population totale de la commune de N'Dali était de 45334 habitants dont 41674 habitants composent la population rurale, soit 91,90 % de la population totale. En 1999, la population a atteint 60442 habitants avec 83 % de population rurale soit 50260 habitants. Avec le RGPH3, la population est passée à 67379 habitants, dont 33895 hommes (enfants et adultes) et 33484 femmes. La taille des ménages est de 7,9 et compte 6494 ménages. La population rurale est estimée à 56518 personnes. On dénombre 34215 personnes de 0-14 ans, 29480 de 15-59 ans et 3360 personnes de plus de 60 ans41(*). La population de N'Dali est donc jeune.

La croissance de la population est de 4,25 % et de 4,54 % pour la population rurale. La densité humaine est de 12,1 hab/km². L'ethnie majoritaire est celle des Baatombu (59,1 %). Suivent les Fulfulde (22,4 %) les Bètamaribè (5,6 %). Il y a aussi les Yom et les Lokpa (3,8 %), les Yoruba (2,8 %), les Dendi (1,9 %), les Fon (1,2 %), les Adja (0,3 %) et autres (2,9 %).

Trois religions sont majoritaires à N'Dali. Les musulmans représentent 49,5 % de la population, les catholiques 13,7 %, les religions traditionnelles 14,6 %, les autres 19,2 %42(*).

Les populations de N'Dali vivent essentiellement de l'agriculture, de l'élevage, de la pêche, du commerce, de l'artisanat, du transport, de l'exploitation de bois de feu, de la transformation de produits.

L'agriculture représente 43,86 % des revenus. Les principales cultures sont : le maïs, le sorgho, le coton, l'igname, le manioc et le mil. La superficie cultivée est de 3068400 ha (70,05 %). Le climat est aussi favorable à l'agriculture. Comme dans nombre de communes du Borgou, le climat est de type soudanien avec une seule saison pluvieuse. La pluviométrie varie entre 900 et 1300 mm par an. La saison des pluies commence en Avril et couvre 7 mois environs. La température moyenne annuelle s'établit autour de 26° C avec un maximum de 32° C en Mars et redescend aux environs de 23° C en Décembre-Janvier. L'humidité relative varie entre 30 et 70 %43(*). Dans la commune de N'Dali, les sols ferrugineux tropicaux sont dominants, profonds, non concrétionnés et soumis au lessivage.

II-1-2- Informations spécifiques sur l'arrondissement de Bori

Le village de Bori dans l'arrondissement de Bori a servi de cadre pour nos recherches.

II-1-2-1- Caractéristiques géographiques

L'arrondissement de Bori est l'un des cinq que compte la commune de N'Dali. Il est situé à l'Ouest de la commune et limité au Nord par les communes de Bembérèkè et de Sinendé, au Sud par l'arrondissement de Sirarou, à l'Est par l'arrondissement de Ouénou et à l'Ouest par les communes de Djougou et de Tchaourou.

L'arrondissement de Bori est situé à 36 km de la ville de N'Dali. Il est traversé par la route non revêtue N'Dali - Djougou.

Végétation

La végétation à Bori est très dense parce qu'une grande partie de la forêt classée s'y trouve. En dehors de cette forêt classée, la végétation est de type savane - boisée. La végétation offre aux animaux du fourrage très varié et est d'une grande richesse médécinale. Elle facilite la fabrication des produits indispensables à la guérison des enfants sorciers.

Le Relief

Le relief de l'arrondissement de Bori est particulièrement accidenté par rapport à celui des autres arrondissements. Dans la région de Témé et de Kori il y a une bande d'élévation de collines.

Hydraulique

La couverture de l'arrondissement de Bori en eau potable est très faible. Il n'y a pas encore d'alimentation en eau potable de la SONEB. Les adductions d'eau sont rares et les puits insuffisants. Par moments les populations sont contraintes d'utiliser comme eau de boisson les eaux des marigots. Ceci est à la base des nombreux cas de diarrhée que le centre de santé de l'arrondissement et les centres villageois de santé enregistrent.

Environnement

L'environnement est très pollué avec les insecticides utilisés dans la culture du coton. En saison sèche, l'environnement est très poussiéreux.

Infrastructures routières

La seule voie praticable dans l'arrondissement de Bori est la route non revêtue N'Dali - Djougou. Les voies secondaires Bori - Maregourou - Teme - Kori - N'Dali sont très dangereuses et impraticables en saison pluvieuse. Cela ne permet pas un accès facile dans les villages reculés pour les séances de sensibilisation.

Habitat

Dans les cinq grands villages de l'arrondissement de Bori (Bori, Maregourou, Kori, Soumon et Teme) l'habitat est de type traditionnel. Les cases sont construites en bancos. Les populations vivent dans de grandes agglomérations avec une grande cour commune. Cette situation fait que les couples ne peuvent garder le secret sur la naissance ou la dentition de leurs enfants.

Tout autour des agglomérations et les séparant les unes des autres il y a des touffes d'herbes, nid de moustiques. Aux alentours des concessions l'on cultive du tabac44(*). A l'intérieur des agglomérations vivent les moutons, les cabris et la volaille. Derrière chaque concession sont parqués les boeufs servant à la culture attelée45(*).

II-1-2-2- Caractéristiques démographiques

L'arrondissement de Bori est estimé à 18003 habitants dont 9081 hommes et 8922 femmes en l'an 200246(*). La population agricole représente plus de 94 % de la population avec un effectif de 16966 personnes.

II-1-2-3- Caractéristiques socioculturelles

Le groupe sociolinguistique dominant à Bori est constitué par les Baatombu qui font plus des 80 % de la population. Il y a environ 10 % de fulfulde nomades qui vivent dans des camps appelés «camps peulhs». Il y a aussi les Pila-Pila ou Yom de l'Atacora 5 % et d'autres communautés minoritaires.

Religion

La religion la plus pratiquée à Bori est la religion traditionnelle. Il y a aussi les chrétiens et les musulmans. Dans le village de Marégourou la majorité est musulmane. A Bori, il y a un grand syncrétisme religieux47(*)et une pacifique cohabitation entre les différentes religions.

Valeurs

La solidarité et l'hospitalité sont les plus grandes valeurs des Baatombu. Une grande expression en est faite à Bori. L'attachement à l'hospitalité est exprimé dans le second nom du village de Bori : «TOUKOSARI» ce qui veut dire «personne n'est étranger» ou «nous sommes les mêmes». Toutes les associations de femmes, de jeunes et d'hommes portent ce nom «TOUKOSARI». Par ailleurs, dans ces communautés il y a une grande entraide. Le problème de l'un est celui de toute la communauté. Aussi la vie en communauté, est-elle prisée.

Organisation sociale

A Bori, les populations vivent dans de grandes concessions. Tout tourne autour du chef de la concession qui est le plus âgé de la famille ; tout le monde mange le repas préparé dans la marmite commune.

Les décisions sont prises par le chef de la famille et communiquées aux hommes qui informent à leur tour les femmes.

II-1-2-4- Données économiques

Dans l'arrondissement de Bori, il y a trois principales activités génératrices de revenus : l'agriculture, l'élevage et le commerce.

L'agriculture occupe plus de 90 % de la population. C'est une agriculture constituée de deux types de culture : la culture de rente et la culture vivrière. La principale culture de rente est le coton. Les cultures vivrières sont : le maïs, l'igname, le sorgho, le riz, l'arachide, la patate douce, etc. Les boeufs sont utilisés pour cultiver les champs. Les femmes font du petit commerce.

L'élevage qui est la deuxième plus grande activité est pratiqué par les Fulfulde. Ils élèvent les bovins et les caprins prioritairement. L'élevage domestique est constitué de la volaille.

II-1-2-5- Autres occupations

En dehors de leurs petits commerces, les femmes se regroupent en association par quartier et village. Elles font de la transformation du karité en beurre, du manioc en gari. Elles s'occupent aussi du nettoyage des places publiques.

Les hommes ont aussi leur association mais sont moins organisés que les femmes. L'association de développement «TOUKOSARI» est constituée de personnes d'un certain rang. Tout le monde ne s'y retrouve pas même si c'est ouvert à tous. Cette association s'occupe du règlement des conflits qui surviennent au sein de la communauté.

Les jeunes sont en train de se mettre sur la voie des aînés. Il n'y a pas un cadre qui regroupe tous les jeunes. Les non scolarisés se retrouvent dans les groupements villageois alors que les élèves et étudiants ont leur association.

La principale distraction sportive à Bori est le football. Il regroupe toute la population. La principale activité culturelle est le bal poussière qui a lieu tous les vendredis. C'est une occasion de distraction et de communion pour tous les jeunes.

II-1-2-6- Système éducatif

Dans l'arrondissement de Bori, il y a 11 écoles primaires et un collège d'enseignement général. De nos jours il y a une relance du système éducatif et les écoles sont de plus en plus fréquentées. Ceci fait que l'effectif est pléthorique dans les classes. Au collège, c'est le système des classes volantes qui prévaut par manque d'infrastructures. Le principal problème est celui du manque de personnel qualifié dans l'enseignement secondaire. Au collège de Bori, il y a un seul enseignant agent permanent de l'Etat et un contractuel de l'Etat sur 17 vacataires sans grande qualification.

II-1-2-7- Système sanitaire

Dans l'arrondissement de Bori, il y a deux centres de santé : le centre de santé d'arrondissement (CSA) de Bori et le centre de santé de Marégourou. Ils sont composés d'un dispensaire et d'une maternité. Dans les autres villages il y a des UVS (Unités Villageoises de Santé).

Le taux de fréquentation de la maternité est de plus de 80 %.

Les principales maladies qu'on rencontre dans les centres de santé sont : le paludisme, la diarrhée, les infections respiratoires aiguës.

II-1-2-8- Canaux de communication

La localité n'étant pas électrifiée, les populations n'ont pas accès à la télévision. Par contre elles écoutent la radio. La radio la plus écoutée par les adultes est Radio Bembérékè et `'Fraternité FM Parakou'' par les jeunes.

Les canaux traditionnels de communication comme le conte, le théâtre, la chanson  sont donc les plus utilisés.

II-1-2-9- Besoins

Les populations n'ont pas accès à l'eau potable. Les puits sont insuffisants et les femmes font des heures avant de prendre de l'eau. D'autres s'approvisionnent dans les marigots ou les rivières avec tous les risques de maladies que cela comporte. La principale source d'éclairage est le pétrole. Les routes sont constituées pour la plupart de pistes en terre rouge et la principale route n'est pas revêtue. Les routes secondaires sont très dangereuses et presque impraticables par les véhicules. Les centres de santé et le personnel sanitaire sont insuffisants.

II-2- Méthode d'étude

II-2-1- Type d'étude

Notre étude est à la fois descriptive et analytique.

· Descriptive, parce qu'elle décrit à travers l'étude socio communautaire les causes et les manifestations de la pratique, de même que les stratégies d'action des structures qui luttent contre l'infanticide.

· Analytique, parce que l'étude établit des liens entre plusieurs éléments. D'une part entre les besoins de la communauté et les actions des structures en charge de la protection des enfants sorciers ; d'autre part entre les stratégies mises en oeuvre par les structures luttant contre la pratique et l'impact de ces actions sur les populations afin d'en dégager les forces et les faiblesses.

II-2-2- Population d'étude

La population de l'étude comporte les responsables de structures qui interviennent dans la lutte contre l'infanticide à Bori,  et un échantillon des potentiels bénéficiaires de leurs actions ainsi que les tenants de la tradition à Bori.

Les cibles primaires

Les garants de la tradition (les chefs de famille, les sages de Bori) et les responsables de structure constituent les cibles primaires de notre étude.

Les cibles secondaires

Pour mieux appréhender le problème, nous avons opté pour une recherche qui prenne en compte toute la population. En dehors des cibles primaires sus citées notre étude a atteint :

- les femmes ;

- les jeunes de Bori ;

- les élèves et étudiants de Bori ;

- les religieux ;

- les élus locaux ;

- les enseignants.

II-2-3- Site de l'étude

Notre étude s'est prioritairement déroulée dans le village de Bori, une zone à haut risque d'infanticide et à Marégourou un village situé à 7 km de Bori.

II-2-4- Echantillonnage

Le problème de l'infanticide touche toute la population de Bori. Compte tenu des moyens limités, nous avons interrogé au total 313 personnes réparties comme suit :

- 10 principaux responsables des structures qui interviennent contre la pratique à Bori ;

- 15 sages ;

- 45 chefs de ménages ;

- 60 femmes ;

- 60 jeunes élèves et étudiants ;

- 40 jeunes paysans ;

- 12 enseignants (soit 7 au collège et 5 instituteurs) ;

- 5 agents de santé ;

- 2 responsables religieux (le curé de Bori et l'Imam de Bori) ;

- 4 élus locaux (dont le maire de N'Dali).

En dehors de ces personnes, le fait d'avoir séjourné dans la localité nous a permis de discuter du sujet avec beaucoup d'autres personnes sans les soumettre à des séances de question-réponse.

Tableau 1 : Répartition de l'échantillon selon les ethnies

Publics

Ethnies

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Baatonu

3

(75%)

8

(80%)

40

(88,88%)

54

(90%)

48 (80%)

36

(90%)

11

(57,89%)

Peulh

1

(25%)

1

(10%)

5

(11,12%)

6

(10%)

6

(10%)

-

-

Autres

-

1

(10%)

-

-

6

(10%)

4

(10%)

8

(42,10%)

La majorité des personnes approchées au cours de cette enquête est baatonu. Cela se justifie par le fait que c'est le groupe socio linguistique qui est directement concerné par la pratique.

Tableau 2 : Répartition de l'échantillon selon le niveau d'instruction

Publics

Niveau d'instruction

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Supérieur

3

(75%)

8

(80%)

-

-

6

(10%)

-

11

(57,89%)

Secondaire

1

(25%)

2

(20%)

5

(11,11%)

-

48

(80%)

-

5

(36,84%)

Primaire

-

-

10

(10,22%)

6

(10%)

6

(10%)

8

(20%)

-

Aucun

-

-

30

(66,66%)

54

(90%)

-

32

(80%)

1

(5,26%)

Alphabétisation

-

-

23

(51,11%)

35

(58,33%)

-

16

(40%)

-

La plupart des enquêtés notamment les sages, les femmes et les jeunes paysans n'ont pas été à l'école. Certains parmi eux suivent cependant des cours d'alphabétisation.

Tableau 3 : Répartition de l'échantillon selon la religion

Publics

Religion

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Traditionnelle

0%

0%

25

(55,55%)

7

(11,66%)

24

(40%)

18

(45%)

2

(10,52%)

Islam

3

(75%)

6

(60%)

15

(33,33%)

30

(50%)

18

(30%)

10

(25%)

6

(31,57%)

Christianisme

1

(25%)

4

(40%)

5

(11,11%)

17

(28,33%)

6

(10%)

10

(25%)

9

(47,36%)

Athée

0%

0%

0%

6

(10%)

12

(20%)

2

(5%)

2

(10,52%)

La religion la plus pratiquée à Bori est la religion traditionnelle. Cependant les populations se convertissent aux religions révélées notamment l'Islam et le Christianisme. Il faut signaler que ces données sont fidèles aux propos des enquêtés même si la réalité montre qu'il y a un fort syncrétisme religieux à tous les niveaux.

II-2-5- Techniques et outils de collecte des données

Les techniques et les outils utilisés sont propres à la recherche qualitative.

Technique

L'immersion pour la collecte des données sur le terrain s'est déroulée du 10 octobre au 08 novembre 2006. Le sujet étant assez délicat, nous avons utilisé prioritairement les techniques propres à la recherche qualitative dont notamment :

- les interviews individuelles approfondies ;

- les discussions dirigées de groupes (DDG) focus groupe.

Nous avons aussi utilisé à bon escient l'observation participante et l'exploitation documentaire.

Outils :

Les outils de collecte de données utilisées dans le cadre de cette étude sont :

- les guides d'entretien ;

- la grille d'observation ;

- les fiches de dépouillement.

II-2-6- Le pré-test

La croyance en la nuisance des enfants - sorciers étant commune à toutes les communautés baatombu, nous avons pré testé les outils d'étude à N'Dali centre. Les suggestions et remarques des cibles nous ont permis de réajuster les outils.

II-3- Limites de l'étude

La principale difficulté rencontrée lors de cette étude est relative à la délicatesse du sujet et aux expériences antérieures des publics cibles. Selon certains, les données recueillies au cours des précédentes enquêtes n'ont pas été exploitées objectivement. Les chercheurs ne prennent qu'une partie de la vérité et dramatisent la pratique. Les populations, en particulier les femmes se sont gardées de donner leur point de vue sur la question. Le sujet était tabou pour les femmes. Au cours des DDG, aucune d'elles n'aborde le sujet. Toutes disent n'avoir jamais entendu parler de cette pratique et que si cela a existé ce n'est pas de leur temps. Devant l'échec des DDG avec les femmes sur la question, nous nous sommes consacrés aux interviews individuelles approfondies avec elles.

Parce que nous avons vécu parmi elles et mangé les repas qu'elles nous présentaient, les populations ont fini par nous faire confiance. Pour aller rencontrer une personne nous prenons pour guide un de ses enfants ou de ses proches. Un climat de confiance s'est instauré vers la fin de la recherche et nous a permis d'avoir des informations indisponibles au départ.

Cependant, certaines personnes ont voulu cacher la réalité par pudeur. Par ailleurs les moyens mis en oeuvre pour la réalisation de la présente étude n'ont pas permis de faire une plus longue immersion afin de comprendre certaines réalités culturelles de Bori.

III-

Présentation des résultats et commentaires

Les recherches sur le terrain ont permis d'appréhender les connaissances des populations (jeunes, vieux, femmes) sur les enfants sorciers. Les études ont aussi porté sur les actions de lutte contre l'infanticide à Bori.

III-1- Connaissances des enquêtés des

caractéristiques des enfants sorciers

Publics

Critères

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Prématuré (8 mois)

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Né avec des dents

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Né par le siège

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

30

(50%)

28

(70%)

16

(84,21%)

Né assis

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

12

(20%)

20

(50%)

14

(73,68%)

Né face contre terre

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

6

(10%)

8

(20%)

14

(73,68%)

Poussée premières dents par le haut

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

6

(10%)

40

(100%)

19

(100%)

Dentition

à 8 mois

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

45

(75%)

36

(90%)

16

(84,21%)

Le huitième (8ème) mois en milieu baatonu est appelé `'suru konso'' c'est-à-dire un mois dangereux. C'est pourquoi les enfants qui naissent ou font leur dentition à cette période sont jugés nuisibles. La grande partie des enquêtés connaissent les principaux critères qui font d'un enfant un sorcier.

II-2- Appréciation des populations sur les

enfants sorciers

Publics

Appréciations

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Enfants porte malheur

3

(75%)

0

(0%)

40

(88,88%)

48

(80%)

42

(70%)

36

(90%)

6

(31,57%)

Enfants fantômes

3

(75%)

0

(0%)

40

(88,88%)

48

(80%)

42

(70%)

36

(90%)

6

(31,57%)

Enfants dangereux à sa famille

3

(75%)

0

(0%)

40

(88,88%)

48

(80%)

42

(70%)

36

(90%)

6

(31,57%)

Enfants normaux à esprit maléfique

3

(75%)

0

(0%)

40

(88,88%)

48

(80%)

42

(70%)

36

(90%)

6

(31,57%)

Enfants normaux

1

(25%)

10

(100%)

5

(11,11%)

12

(20%)

18

(30%)

4

(10%)

13

(68,42%)

Pour la majorité des populations, un enfant, qui présente les critères anormaux présentés plus haut, est un enfant dangereux et maléfique. Même s'il a l'air normal, cet enfant, selon les populations a un esprit mauvais qu'il ne contrôle pas. C'est cet esprit qui cause les malheurs.

III-3- Expériences des populations avec des

enfants sorciers

Publics

Expériences

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Déjà vu 1 enfant sorcier ou jugé tel

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

Déjà vu un enfant sorcier tué

0

(0%)

0

(0%)

25

(55,55%)

0

(0%)

0

(0%)

12

(30%)

0

(0%)

Déjà vu un enfant sorcier dans sa famille

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

Déjà entendu parler des agissements d'un enfant sorcier

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

Aucun enquêté n'a jamais eu dans sa famille des enfants sorciers, mais tous en ont déjà entendu parler. Elles ont honte de la pratique et la nie.

III-4- Connaissances des formes d'accueil réservé

aux enfants sorciers

Publics

Accueil

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Abandon chez les peulh

4 (100%)

16

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Elimination par noyade

4 (100%)

16

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

36

(60%)

40

(100%)

19

(100%)

Elimination par asphyxie

4 (100%)

16

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

36

(60%)

40

(100%)

19

(100%)

Elimination rituelle par les bourreaux

4 (100%)

16

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Abandon dans la brousse

4 (100%)

16

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Purification

4 (100%)

5

(50%)

45

(100%)

60

(100%)

48

(80%)

40

(100%)

10

(52,63%)

Les enquêtés connaissent presque tous, les différents sorts réservés aux enfants dits sorciers. Seuls quelques jeunes ne savent pas que l'enfant peut être réparé par asphyxie ou par noyade.

III-5- Comportements à adopter par les populations

au cas où elles auraient un enfant sorcier

Publics

Critères

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Le sacrifier

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

Le jeter

0

(0%)

0

(0%)

5

(11,11%)

0

(0%)

6

(10%)

4

(10%)

0

(0%)

Le garder et le jeter dès un malheur

0

(0%)

0

(0%)

5

(11,11%)

0

(0%)

6

(10%)

4

(10%)

0

(0%)

Le guérir et le garder

2

(50%)

0

(0%)

30

(66,66%)

30

(50%)

36

(60%)

28

(70%)

6

(31,5%)

Le garder et ne pas en parler

2

(50%)

10

(100%)

5

(11,11%)

6

(10%)

6

(10%)

4

(10%)

13

(68,42)

Laisser décider l'entourage

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

24

(40%)

6

(10%)

0

(0%)

0

(0%)

La plupart des enquêtés affirment garder leurs enfants s'ils étaient nés avec des signes extérieurs de sorcellerie. ils le feront purifier et ne sont pas prêts à l'abandonner au début, mais si un malheur survenait, certains avouent l'abandonner.

III-6- Connaissances des populations sur le niveau

actuel de la pratique

Accueil Publics

réservé à

l'enfant sorcier

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

On continue de tuer rituellement les enfants mais clandestinement

3

(75%)

10

(100%)

9

(20%)

6

(10%)

15

(25%)

8

(20%)

12

(50%)

On ne tue plus aucun enfant sorcier

1

(25%)

0

(0%)

36

(80%)

54

(90%)

45

(75%)

32

(80%)

7

(20%)

Il n'y a plus de bourreaux

3

(75%)

1

(10%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

6

(31,57%)

Des enfants sont clandestinement abandonnés

3

(75%)

10

(100%)

30

(66,66%)

48

(80%)

42

(70%)

32

(80%)

13

(68,42)

On guérit prioritairement les enfants

3

(75%)

8

(80%)

45

(100%)

54

(90%)

54

(90%)

40

(100%)

10

(52,63)%

Les enfants sorciers ne sont pas totalement acceptés même après guérison

3

(75%)

10

(100%)

36

(80%)

54

(90%)

54

(90%)

36

(90%)

13

(68,42)

La pratique a considérablement diminuée

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Certains résistent encore au changement

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Dans l'ensemble, les enquêtés reconnaissent que la pratique a considérablement diminué. Ils avouent aussi que tout le monde n'est pas prêt d'abandonner la pratique. La pratique est héritée des ancêtres et il serait difficile aux populations de la laisser à court terme. Il faut reconnaître qu'avec l'option prioritaire de la purification une prise de conscience est en train d'avoir lieu.

III-7- Appréciation des populations sur les causes du recul de la pratique

Publics

Causes

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Accouchement à la maternité

3

(75%)

10

(100%)

18

(40%)

48

(80%)

24

(40%)

20

(50%)

16

(84,21%)

Le développe-ment des religions révélées (islam christianisme)

2

(50%)

6

(60%)

36

(80%)

54

(90%)

42

(70%)

32

(80%)

16

(84,21%)

Brassage culturel

4

(100%)

4

(40%)

14

(31,11%)

30

(50%)

48

(80%)

20

(50%)

16

(84,21%)

Développement du système éducatif

4

(100%)

4

(40%)

36

(80%)

60

(100%)

56

(90%)

32

(80%)

17

(89,47%)

Le développe-ment des radios communautaires

2

(50%)

10

(100%)

27

(60%)

42

(80%)

36

(60%)

28

(70%)

15

(78,94%)

Les dispositions administratives et judiciaires

4

(100%)

4

(40%)

32

(71,11%)

42

(80%)

42

(80%)

32

(80%)

14

(73,68%)

Le développement du système éducatif a impulsé un nouveau souffle dans le cadre de la prise de conscience et de l'abandon de l'infanticide rituel. La modernisation et le brassage culturel renforcent cette prise de conscience au sein des populations.

III-8- Appréciation des populations sur les causes

de survivance de la pratique

Publics

Accueil

Elus locaux

Responsables structures de lutte

Sages/chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Autres (agents de santé, enseignants, religieux)

Ignorance et analphabétisme

4

(100%)

10

(100%)

20

(44,44%)

48

(80%)

54

(90%)

18

(45%)

15

(78,94%)

Poids de la tradition

4

(100%)

10

(100%)

45

(100%)

60

(100%)

60

(100%)

40

(100%)

19

(100%)

Crainte du regard des autres

3

(75%)

7

(70%)

35

(77,77%)

50

(83,33%)

48

(80%)

32

(80%)

15

(78,94%)

Les pratiques héritées des ancêtres s'abandonnent difficilement. C'est ce qui justifie la persistance de cette pratique au sein des populations de Bori. La non scolarisation de la plupart des enquêtés est un facteur favorisant la persistance de la pratique.

III-9- Connaissance des structures intervenant

contre la pratique à Bori

Public

Structures

ou personnalités

Elus locaux

Sages et chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Enseignants

Religieux

Agents de santé

APEM

4

(100%)

20

(44,44%)

20

(33,33%)

15

(25%)

8

(20%)

14

(73,68%)

ELIB

2

(50%)

8

(17,77%)

5

(8%)

5

(8%)

2

(5%)

5

(26,31%)

Centre de promotion sociale

4

(100%)

8

(17,77%)

5

(8%)

5

(8%)

2

(5%)

5

(26,31%)

Farouk kissira

4

(100%)

36

(80%)

45

(75%)

20

(33,33%)

20

(80%)

9

(47,36%)

Autorités locales

4

(100%)

35

(77,77%)

40

(46,66%)

40

(46,66%)

25

(62,5%)

13

(68,42%)

Autorités religieuses

4

(100%)

40

(88,88%)

45

(75%)

45

(75%)

33

(82,5%)

15

(78,94%)

Les populations dans leur grande majorité reconnaissent l'engagement des autorités municipales, notamment celui du chef d'arrondissement de Bori et des autorités religieuses dans la lutte contre l'infanticide. Certaines personnes ont déjà entendu parler de l'APEM, mais très peu connaissent l'ELIB à Bori. Il faut reconnaître qu'il leur est difficile de retenir le nom de ces structures parce que en grande partie analphabètes. Farouk kissira, un sage de N'Dali est aussi un acteur clé dans la lutte contre l'infanticide à Bori.

III-10- Implication des populations dans les actions des structures (APEM, ELIB, Centre de promotion sociale)

Public

Degré d'implication

Elus locaux

Sages et chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Enseignants

Religieux

Agents de santé

Associé à toutes les actions

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

0

(0%)

Associé ponctuellement

2

(50%)

10

(22,22%)

10

(16,66%)

0

(0%)

0

(0%)

8

(42,10%)

Pas du tout associé

2

(50%)

35

(77,77%)

50

(83,33%)

60

(100%)

40

(100%)

11

(57,89%)

Les populations ne sont pas vraiment impliquées dans les actions de lutte contre l'infanticide. Les structures prennent les populations comme des acteurs passifs. Seuls quelques uns sont par moment impliqués dans l'organisation des actions de sensibilisation.

III-11- Actions des différentes structures, autorités et personnalités

Actions

Structures

ou personnalités

Sensibilisations et information

Récupération d'enfants voués à l'infanticide

Menaces, intimidations et répression

Alphabétisation

Promotion de l'éducation

Construction de maternité

APEM

5

1

1

1

1

1

ELIB

5

5

3

1

1

5

Centre de promotion sociale

5

3

3

3

3

3

Farouk kissira

5

5

3

1

1

1

Autorités locales

5

5

5

3

5

3

Autorités religieuses

5

5

1

3

3

1

Légende : 5-  Beaucoup ;

3- Peu ;

1- Très peu ou pas du tout.

L'action prioritaire menée par toutes les structures est la sensibilisation. Celles qui ont les moyens récupèrent les enfants destinés à l'infanticide. La promotion de l'éducation reste difficile.

III-12- Cibles des actions de sensibilisation

Structures Cibles

ou personnalités

Tout le monde

Sages et chefs de ménages

Femmes

Jeunes élèves

Jeunes paysans

Enseignants

APEM

100%

40%

20%

15%

15%

10%

ELIB

100%

40%

20%

15%

15%

10%

Centre de promotion sociale

100%

65%

15%

10%

10%

0%

Farouk kissira

100%

60%

20%

10%

5%

5%

Autorités locales

100%

40%

30%

20%

15%

5%

Autorités religieuses

100%

30%

40%

10%

20%

0%

La cible prioritaire des actions de sensibilisation est constituée par les adultes. Les jeunes sont rarement pris pour cible importante. Les écoles et collèges ne sont pas pris en compte. Les actions de sensibilisation ne réunissent que les anciens et les groupements féminins. Aucune action de sensibilisation n'est faite à l'endroit des jeunes écoliers et élèves.

III-13- Les canaux de communication utilisés et types de sensibilisation

Canaux utilisés

Structures

ou personnalités

Médias

Canaux traditionnels de communication

Communication directe

Action globalisante

Séminaire

Causerie débats

APEM

50%

5%

25%

90%

10%

5%

ELIB

25%

15%

50%

50%

5%

5%

Centre de promotion sociale

20%

5%

65%

70%

5%

5%

Farouk kissira

10%

15%

75%

30%

5%

5%

Autorités locales

20%

50%

20%

100%

5%

5%

Autorités religieuses

10%

10%

70%

80%

5%

5%

La plupart des actions de sensibilisation s'adressent de la même manière à toutes les composantes de la population. Les canaux traditionnels ne sont pas très prisés. Les structures organisent des séances de sensibilisation au cours desquelles les mêmes messages sont adressés à toutes les personnes présentes aux séances.

IV-

Analyse des résultats de l'étude

Les résultats de la recherche sur le terrain font ressortir quelques unes des raisons pour lesquelles l'éradication de la croyance en la nuisance des enfants sorciers n'est pas encore une réalité. Pour mieux cerner ce qui motive les populations baatombu en général et celles de Bori en particulier à perpétuer cette croyance, nous approfondirons notre réflexion sur les points suivants :

- l'atteinte des objectifs et la qualité, validité des résultats de l'étude ;

- le poids de la tradition ;

- la prise de conscience ;

- la scolarisation des enfants à Bori ;

- les causes liées à la pratique à Bori ;

- les actions des structures de lutte ;

IV-1- L'atteinte des objectifs de l'étude

Le présent mémoire a pour objectif de contribuer à l'amélioration des stratégies de communication dans la lutte contre le rejet des enfants sorciers. Dans cette logique l'étude sur le terrain visait un double objectif 

- étudier les causes de la pratique à Bori ;

- étudier l'adéquation des stratégies des structures de lutte contre la pratique et les besoins de la communauté.

Au terme de notre recherche nous avons pu :

o identifier les facteurs socioculturels liés au rejet des enfants sorciers

o déterminer les forces et faiblesses des structures luttant contre la pratique à Bori

o proposer de nouvelles stratégies sur la base des faiblesses de ces structures.

Les outils de collecte de données que nous avons utilisés nous ont permis d'atteindre approximativement l'objectif de notre étude. Les résultats reflètent la réalité même s'ils peuvent comporter quelques insuffisances.

IV-2 La force de la tradition

Comme naguère l'excision et le mariage forcé, le rejet des enfants sorciers est fortement ancré dans les mentalités des populations baatombu. Depuis des décennies, et de génération en génération, cette croyance est transmise. Dès l'enfance, les jeunes sont largement informés sur la pratique. Cette croyance fait partie intégrante de leur éducation et de leur culture.

Des exemples mythiques d'enfants sorciers qui ont massacré leur famille sont trouvés et donnés pour mettre en garde ceux qui douteraient de leurs forces maléfiques. Le résultat est bien probant. Tout le monde à Bori, du moins la grande majorité, croit qu'un enfant qui naît à 8 mois, par le siège, avec les dents, ou tout enfant qui fait la première dentition par le haut ou à 8 mois est un enfant dangereux pour sa famille.

Cependant, de nos jours, les critères les mieux connus sont : la poussée des premières dents par la mâchoire supérieure, poussée des premières dents à 8 mois. La construction des maternités a vraiment contribué à résoudre une partie du problème.

Pour que les enfants qui ont développé les critères de sorcellerie soient tolérés, ils doivent subir un rite de guérison48(*) pour «devenir» humain. C'est seulement après la guérison qu'un enfant sorcier peut être admis dans sa propre famille. Cependant, tout le monde n'opte pas pour cette solution. Des doutes subsistent. Pour cela, certains jettent simplement l'enfant. De toute façon, celui-ci n'est plus rituellement sacrifié49(*). Le constat sur le terrain et les témoignages des populations infirment dans une certaine mesure les affirmations de certains documents qui soutiennent que la pratique persiste à Bori.

Il faut signaler que l'option de la purification de l'enfant à Bori est générale. Même ceux qui disent ne pas croire aux enfants sorciers sont prêts à aller faire soigner leurs enfants s'ils présentent une des spécificités qui font d'un enfant, un sorcier. Certains chrétiens catholiques font aussi cette option, de même que des musulmans pratiquants. Seuls quelques uns surtout des jeunes élèves et cadres convertis aux religions révélées, et qui, selon des anciens ne savent pas de quoi ils parlent, sont contre la purification des enfants parce qu' « ils ne souffrent d'aucune maladie » selon eux. Comme on peut le constater une prise de conscience commence.

IV-3 Les causes liées à la persistance de la pratique.

Malgré les actions des personnes et structures pour éradiquer le rejet et l'élimination des enfants nés en contradiction avec les normes sociales, la crainte des enfants sorciers persiste à Bori et reste vivace dans les mentalités. Elle se manifeste aussi dans la vie quotidienne des populations.

La recherche sur le terrain et l'analyse des actions des ONG qui luttent contre la pratique nous ont permis d'identifier les principales causes liées à la persistance de la croyance.

Pour nombre de personnes, c'est l'analphabétisme qui est la principale cause de la persistance de la pratique avec ses corollaires de croyance aveugle en la tradition et d'attachement obstiné à la coutume.

Les principales causes révélées par l'étude sur le terrain sont les suivantes :

- fort taux d'analphabétisme ;

- croyance en des forces surnaturelles ;

- non urbanisation de la localité ;

- pratique fortement ancrée dans les mentalités ;

- méconnaissance d'autres réalités par les populations ;

- ignorance ;

- incapacité d'expliquer des phénomènes extraordinaires ;

- pression sociale sur les jeunes couples ;

- indiscrétion des couples ;

- Les populations n'ont pas la preuve de l'invulnérabilité des enfants sorciers.

A ces causes s'ajoutent les faiblesses décelées dans les actions des structures :

- les ONG ne sont pas décentralisées ;

- les cibles ne sont pas clairement définies ;

- les actions sont globalisantes ;

- aucune action directe n'est faite vers les jeunes notamment les élèves ;

- les enseignants ne sont pas impliqués dans la lutte ;

- les canaux traditionnels de communication ne sont pas exploités dans la lutte contre la pratique ;

- l'inexistence de partenariat avec les autres structures qui interviennent à Bori ;

- les actions de sensibilisation sont sporadiques ;

- l'insuffisance des moyens financiers, matériels et humains ;

- les messages ne sont pas concrets ;

- l'inexistence de matériels éducatifs pour la sensibilisation ;

- la non utilisation des supports matériels au cours des séances de sensibilisation.

IV- 4- Fondement de la pratique

L'homme est sûr de l'avènement d'un fait dans sa vie : sa mort. Cette évidence est ce qui lui fait le plus peur et son attente crée une profonde anxiété. Paradoxalement à l'évidence de la mort, la chose à laquelle l'être humain tient le plus est sa vie. Pour la préserver, il est capable de tout. S'il lui était possible de la prolonger, sans aucune hésitation il le ferait. Aussi, est-il capable, pour préserver sa vie, d'arracher celle de son semblable si la vie de ce dernier menace la sienne. Les juristes parlent de légitime défense.

C'est pareil en milieu baatonu. L'infanticide rituel est perçu comme de la légitime défense. C'est en termes clairs, une élimination préventive. En effet, la plupart des personnes interrogées, mêmes celles qui luttent contre la pratique, affirment que c'est dans le souci de préserver des vies innocentes que les enfants sorciers sont éliminés ou rejetés. Les tenants de cette pratique croient être en face d'un dilemme : soit c'est l'enfant dit sorcier qui passe, soit c'est eux. Le choix est donc très facile à faire. Cette réflexion du vieux Doko Boumba Kora, l'une des premières personnes à commencer la lutte à N'DALI est plus qu'édifiante :

« Quand l'on vous assure que le bébé qui est né avec les caractéristiques d'un enfant sorcier porte toujours malheur, est-ce que vous avez le choix ? Dans la famille, vous êtes 20 par exemple. Quand le bébé sorcier naît, on vous assure que, si vous le laissez en vie sans rien faire, il est capable de tuer 10 membres de la famille. Si ce `'mangeur d'homme'' tue 10 des vôtres et vous mettez encore un autre enfant sorcier au monde et qu'il mange le reste, qu'est-ce qui restera de votre famille ? Est-ce que vous allez attendre d'avoir la preuve que cet enfant est sorcier avant d'agir ? Et s'il commençait par vous ? »

Pour la quiétude du clan, il ne faut pas se poser de questions. Puisque rien ne rassure les membres de la communauté du caractère inoffensif du bébé, ils se rassurent en procédant soit à son élimination physique, soit à son rejet, en l'abandonnant loin du clan. Ainsi tout le monde retrouve la paix de l'âme. Par ailleurs, les hommes ont plusieurs femmes et plusieurs enfants. Un de plus ou un de moins, cela ne semble pas avoir vraiment d'importance. L'essentiel c'est que le clan vive en paix.

IV-5 Le début d'une prise de conscience

Plus des 90% de ceux qui croient que les enfants sorciers sont des êtres maléfiques à Bori ne sont pas pour leur élimination physique. Pour certains c'est de la barbarie que de tuer ces enfants. L'infanticide est donc en train d'être délaissé lentement mais sûrement.

C'est un grand pas qui est ainsi franchi surtout à Bori50(*). La mise à mort d'un enfant est un crime. Beaucoup l'ont compris. Mais peu ont compris que tout enfant est enfant et qu'un enfant qui naît par le siège ou pousse les dents par la mâchoire supérieure n'a rien de plus ni de moins qu'un enfant « normal ».

La plupart des personnes qui se sont engagées dans la lutte contre l'infanticide l'ont fait par conviction et volontairement. Elles ont à un moment donné de leur existence compris par elles-mêmes que ces enfants ne sont nullement dangereux.

Aussi, cela ne les effraie t-elles plus. Pour éradiquer la pratique, il faudrait que tous ceux qui partagent cette croyance soient convaincus qu'il n'y a aucune différence entre les enfants. C'est parce que les actions des structures qui luttent contre la pratique ne convainquent pas tout le monde qu'il y a des réticences et que la pratique continue. Les populations n'ont aucune preuve que le bébé qui naît par le siège est aussi inoffensif que celui qui naît la tête en avant. Seule l'éducation permettra de susciter une prise de conscience plus accrue.

En effet, chez les jeunes, surtout scolarisés, l'esprit critique intervient déjà et ils sont plus réceptifs aux messages de sensibilisation. Malheureusement, ils ne sont pas suffisamment pris en compte par les campagnes de sensibilisation. Ceci ne répond d'ailleurs pas à la stratégie de segmentation du public cible qui veut que les actions commencent d'abord par les innovateurs précoces qui sont plus susceptibles au changement. Par ailleurs, il est important de déterminer le niveau des cibles selon le processus de changement de comportement proposé par Rogers. Selon ce chercheur, il y a cinq étapes principales dans l'adoption de tout comportement : connaissance, persuasion, décision, adoption et confirmation. Il importe de connaître le niveau auquel se situe chaque cible afin de déterminer les actions qui conviennent pour plus d'efficacité. La scolarisation est, dans le cas précis de la lutte contre l'infanticide, un facteur facilitant.

IV-6- La scolarisation à Bori

De véritables progrès ont été fait dans l'éducation à Bori. Beaucoup de parents sont en train de comprendre la nécessité d'envoyer leurs enfants à l'école. Cependant la scolarisation reste encore très faible à Bori. Les raisons qui expliquent ce fait sont diverses :

- le besoin de main d'oeuvre dans l'agriculture ;

- la non effectivité de la gratuité de l'école ;

- le manque d'infrastructures scolaires ;

- le manque de personnels qualifiés ;

- le taux élevé des frais de scolarité au collège.

Le nombre de filles allant à l'école à Bori est très faible. Elles s'occupent pour la plupart d'aider leur maman dans les travaux domestiques. Nombre de celles qui ont la chance d'être inscrites à l'école n'évoluent pas. La majorité abandonne pour des raisons de maternité.

En dehors de l'école classique, il faut signaler que l'alphabétisation est répandue à Bori. Il y a quatre centres d'alphabétisation dans le village. Les populations s'intéressent de plus en plus à l'alphabétisation. C'est surtout pour des raisons économiques, car elles maîtrisent mieux leurs affaires, la vente de coton par exemple.

IV-7 Les actions des structures de lutte

Plusieurs personnes physiques et morales s'investissent dans la lutte contre le rejet et l'élimination des enfants sorciers à Bori. L'analyse socio - communautaire nous a permis d'identifier comme principale ong intervenant dans le Borgou, donc à N'Dali et à Bori, l'ong APEM. C'est aussi la principale structure reconnue par les autorités locales. Farouk KISSIRA, un natif de N'Dali, est aussi connu pour ses interventions à Bori. Les religieux à travers les cultes apportent leur contribution à la lutte contre la pratique. Le centre de promotion sociale représentant le Ministère de la famille mène aussi des actions dans ce sens.

La principale activité de toutes ces structures est la sensibilisation. Leurs actions ne s'adressent pas à des cibles spécifiques et bien identifiées. A toute la population, ces structures adressent les mêmes messages. De véritables séances de discussion ne sont pas organisées. Ce sont plutôt des séances d'information et de sensibilisation sans un réel suivi. Ces séances ne sont renforcées par aucune autre action de communication. Ceci réduit la chance de réussite de ces structures.

Par ailleurs, les femmes et les sages se retrouvent dans les mêmes lieux face à des messages identiques alors que l'organisation sociale ne le permet pas. Les femmes devraient avoir leurs séances indépendamment de celles des hommes. En effet, il est difficile en milieu baatonu, à la limite impossible, à une femme d'intervenir dans un débat en présence de son mari et de ses aînés. De plus ces actions sont rares à Bori51(*). La seule action d'envergure qui a été menée remonte à la descente de la ministre de la famille et de la protection sociale, Mme Léa HOUNKPE en septembre 2004.

Les actions les plus régulières sont les messages diffusés sur la radio Bembèrèkè pour sensibiliser les populations. Depuis un certain temps cela ne se fait plus car le contrat qui liait la radio à l'APEM a pris fin et n'a pas été renouvelé avant et après notre séjour dans la localité.

Les actions seront plus efficaces si les cibles sont clairement définies et sensibilisées en conséquence. En outre, l'on doit `'tuer'' le mal à la racine. Pour éradiquer cette croyance, la cible prioritaire doit être les jeunes ; ils sont plus réceptifs. Les actions doivent être dirigées vers eux à travers la scolarisation et la sensibilisation dans les établissements scolaires. Il importe donc de promouvoir à Bori la scolarisation des enfants et particulièrement la scolarisation des filles. Tant que la majorité des enfants n'iront pas à l'école la situation déplorée aujourd'hui n'avancera véritablement pas demain.

Pour les anciens, la sensibilisation doit porter sur des supports comme des documentaires en langue baatonu pour leur expliquer le développement du foetus dans le sein maternel. Ceci aura pour intérêt de leur montrer que la naissance par le siège est un phénomène naturel. Ce phénomène est accepté par les autres peuples. Il faut engager des discussions avec eux pour recueillir leur inquiétude et y apporter des éclaircissements.

Par ailleurs, le comité de lutte contre la traite des enfants mis en place avec le concours de l'UNICEF s'occupe plus du trafic des enfants52(*) que de l'infanticide. La plupart des structures font de la lutte contre l'infanticide une préoccupation subsidiaire dans la mesure où il y a officiellement des organismes qui les appuient dans les luttes contre l'excision et le trafic des enfants. Beaucoup de moyens sont consacrés à ces pratiques. Ce qui n'est pas le cas de l'infanticide. Cette situation confirme les résultats de l'étude sur l'infanticide au Bénin commanditée par l'UNICEF en 2001.

La lutte contre le rejet des enfants sorciers est une lourde mission qui nécessite beaucoup de moyens tant matériels, financiers, humains qu'institutionnels. Mais les ong n'ont pas les ressources nécessaires pour mener une lutte efficiente et efficace contre la pratique. Aucun volet d'aucun programme n'y est consacré. Le service Protection du Ministère de la Famille, de la Femme et de l'Enfant que cette pratique interpelle, devrait s'investir plus dans la lutte. L'UNICEF, le Fonds Mondial consacrent par moment des études à la pratique. Ils appuient aussi quelques ong qui s'y investissent. Mais cela ne suffit pas. L'Etat, garant des libertés et droits civiques, devrait s'intéresser plus à cette pratique qui prive des milliers d'enfants, même s'il n'y a pas de statistiques l'attestant, de leurs droits les plus élémentaires. Sans une prise de conscience des gouvernants, il serait difficile de vaincre cette croyance qui continue de faire du tort à des être innocents.

De plus, la lutte sera beaucoup plus efficace si les structures mettent à contribution les canaux traditionnels de communication existant encore à Bori comme les scénettes, les chansons et les danses traditionnelles au cours des bals poussières organisés tous les vendredis soirs. Les groupes folkloriques pourraient être mis à contribution.

Conclusion générale

C O N C L U S I O N

L'étude socio communautaire nous a montré que la crainte des enfants sorciers reste toujours vivace dans les mentalités. Notre étude a révélé qu'officiellement il y a une seule ONG qui intervient à Bori et environs. En plus d'elle, il y a le centre de promotion sociale de N'Dali, les religieux et des personnalités comme Farouk KISSIRA.

Notre étude a constaté l'inadéquation des ressources de l'APEM-ONG face au grand défi que constitue l'éradication du rejet des enfants sorciers. Par ailleurs la sensibilisation tous azimuts est la principale stratégie utilisée par les structures de lutte contre cette pratique coutumière. Les cibles ne sont pas clairement déterminées. Les actions sont aussi sporadiques et l'on ne constate pas encore une réelle implication de l'Etat central dans la lutte pour l'éradication de cette pratique qui constitue un problème de développement.

Face à ces constats et sur la base des facteurs psychosociaux des communautés, nous avons proposé des stratégies pour :

- renforcer les actions des ONG à Bori ;

- dynamiser la lutte au plan national.

Ces stratégies visent à mettre les communautés au coeur de la lutte contre la pratique. Sur le plan national, la mise sur pied d'un comité de chercheurs pour faire l'état des lieux sur le problème des enfants sorciers est primordiale. Ceci permettra de situer clairement la pratique et son ampleur afin de prendre les dispositions opportunes.

SUGGESTIONS

La lutte contre la crainte et le rejet des enfants nés par le siège, à 8 mois, avec des dents ou des enfants qui font leur première dentition à 8 mois ou par le haut rencontre beaucoup de difficultés. Pour que les actions de lutte soient efficaces, nous faisons les suggestions suivantes :

A l'endroit des enfants et jeunes scolarisés de Bori

- organiser des séances de discussion avec les élèves et écoliers sur les enfants sorciers ;

- faire des projections cinématographiques dans les établissements sur le développement de l'embryon jusqu'au foetus ;

- inviter un spécialiste en santé pour parler aux jeunes du phénomène naturel de la dentition ;

- impliquer les cadres dans la lutte et les amener à faire des discussions avec les jeunes ;

- organiser au niveau de chaque classe des séances de discussions dirigées par les enseignants sur les enfants sorciers ;

- organiser avec les élèves et écoliers des caravanes de sensibilisation sur la protection des enfants sorciers ;

- organiser des compétitions culturelles interclasses ayant pour thème les enfants sorciers lors des journées culturelles du collège de Bori ;

- introduire des cours sur les droits de l'enfant et les droits humains à tous les niveaux d'enseignement.

A l'endroit des jeunes non scolarisés

- organiser des séances de sensibilisation sur les enfants sorciers ;

- faire des projections audiovisuelles sur le développement du foetus en langue Baatonu suivi de discussions dirigées par un spécialiste ;

- organiser des discussions sur la dentition des enfants par un spécialiste en santé ;

- renforcer l'alphabétisation au niveau des jeunes déscolarisés ou non scolarisés.

A l'endroit de tous les jeunes de Bori

- organiser des bals poussières avec des chansons sur la protection des enfants sorciers ;

- organiser des compétitions de football ayant pour thème «la protection des enfants sorciers» pour clôturer les caravanes ;

- organiser des séances de discussions entre tous les jeunes (scolarisés ou non) sur la pratique avec des projections audiovisuelles.

A l'endroit des personnes qui suivent des cours d'alphabétisation

- introduire des cours sur les droits humains au niveau des classes d'alphabétisation ;

- susciter des discussions sur les droits de l'enfant ;

- susciter des discussions sur les enfants sorciers ;

- organiser des projections audiovisuelles sur le développement du foetus dans le sein maternel ;

- susciter des discussions dirigées sur la dentition des enfants sous la direction d'un spécialiste de santé ;

- utiliser des boîtes à image pour sensibiliser les populations sur l'évolution des enfants et leur dentition ;

- renforcer l'alphabétisation  à Bori.

A l'endroit des enseignants et maîtres alphabétiseurs

- organiser des séminaires de formation sur les droits humains à l'endroit des enseignants et maîtres alphabétiseurs ;

- outiller les enseignants et maîtres alphabétiseurs sur l'évolution du foetus et le mécanisme de dentition des enfants ;

- amener les enseignants à dégager un laps de temps dans leurs cours pour parler des enfants sorciers avec leurs élèves ;

- amener les enseignants à susciter des discussions sur les enfants sorciers ;

- mettre à la disposition des enseignants des matériels éducatifs tels les boîtes à image pour renforcer leurs actions.

A l'endroit des sages et chefs de ménages

- organiser des séances de discussions avec les anciens sur les enfants sorciers ;

- organiser des projections audiovisuelles sur le développement de l'enfant et sur sa dentition suivies de discussions avec les anciens de Bori ;

- organiser des séances de discussion appuyées par des matériels éducatifs sur l'évolution des enfants.

A l'endroit des femmes

- organiser des séances de discussions avec les groupements féminins dirigées par une femme du milieu ;

- organiser des discussions autour de documentaires audiovisuels et des matériels éducatifs.

A l'endroit des ONG

- organiser un partenariat avec les autres structures intervenant à Bori notamment le CAEF de Bori ;

- mettre sur pied un comité dynamique de lutte contre le rejet des enfants sorciers à Bori ;

- choisir des personnes influentes de Bori pour composer le comité ;

- concevoir, produire et diffuser largement des matériels éducatifs ;

- mettre à la disposition des comités ces matériels éducatifs pour la sensibilisation des populations ;

- organiser des séances de sensibilisation en collaboration avec le CAEF de Bori ;

- impliquer dans la lutte, la diaspora de Bori et les leaders d'opinion de la localité ;

- choisir les mois de février et de mars53(*) pour intensifier la sensibilisation à l'endroit des paysans ;

- promouvoir la scolarisation à Bori, notamment celle des filles ;

- décentraliser les structures.

A l'endroit du gouvernement et des Institutions internationales

- insérer la lutte contre l'infanticide rituel dans leur plan d'action ;

- mettre sur pied un comité multidisciplinaire pour faire l'état des lieux et déterminer les dispositions à prendre pour éradiquer cette pratique ;

- consacrer un volet d'un programme de protection de l'enfance malheureuse à la lutte contre l'infanticide.

Références bibliographiques

1- Rapports de séminaires et d'étude

· Actes du séminaire sur l'Infanticide rituel au Bénin, Natitingou les 25, 26 et 27 novembre 1997

· APEM, Fondation FRIEDRICH NAUMANN, (1994) Rapport Général des séminaires itinérants sur l'infanticide, 1994-1995. Parakou.

· Ministère de la Protection Sociale et de la Famille, Unicef. (2001), Rapport sur l'infanticide au Bénin, janvier 2001

· Rapport final sur le Séminaire National sur les droits de l'enfant à la vie et à la famille et les pratiques coutumiers au Bénin, Parakou les 20, 21 et 22 novembre 1995

2- Mémoires

· ADAMOU (I. S.) (1999). Les fondements socioculturels de l'infanticide rituel en milieu `'Baatonu'' : à propos des résultats d'une enquête effectuée dans la sous préfecture de N'Dali, Mémoire de fin de formation pour l'obtention du diplôme d'Etat d'Assistant Social, ENAS, UNB, 1998-1999

· GOBI, Alassane. (2002). Pratiques coutumières et droits de l'homme au Bénin, mémoire en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies des droits de la Personne Humaine et de la Démocratie, FASJEP, UAC , Deuxième promotion (2001-2002)

· VIKOU, Bessan. (2003). Formulation de stratégies de communication pour réduire la morbidité palustre infantile à Vodjè (Cotonou) : applicabilité du modèle de Green, Mémoire de Maîtrise, DSLC, FLASH, UAC, 2002-2003

3- Ouvrages spécialisés

· BASICS. (1996) Boîte à outils pour le renforcement des compétences en matière de communication, USAID, Healthcom, Dakar

· Children's Vaccine Program at Path. (2001); Guide d'élaboration de matériels éducatifs relatifs à la vaccination et à la santé infantile, Avril 2001

· BOUGNOUX, Daniel. (1998). Introduction aux sciences de la communication, Ed, Découverte, Paris

· DADELE, Antoine. (2006). Méthodologie de planification d'une stratégie de communication participative pour le développement, une synthèse documentaire.

· DADELE, Antoine. (2004). Théories de comportement, SLC204, DSLC FLASH, UAC, Bénin.

4- Autres

· - Amnesty International, (1991).  « Amnesty International raconte la déclaration universelle des droits de l'homme », Paris, les éditions francophones d'Amnesty International

· Centre d'information et de documentation sur les collectivités locales, (2001). Atlas monographiques des communes du Bénin

· INSAE, RGPN3 2002, (Mai 2004). Cahier de villages et quartiers de ville département du Borgou, Bénin

· Lexique des termes juridiques Dalloz, Edition 1985

· Mairie de N'Dali, PRODECOM, (2005) Prospectus sur la commune de N'Dali.

· Ministère d'Etat Chargé de la Coordination de l'Action Gouvernementale, du Développement Economique et de la Promotion de l'Emploi, UNICEF. (1998), Enfants et Femmes, Avenir du Bénin, Bénin

ANNEXES

Annexe 1 : TÉMOIGNAGE D'UN HOMME SAUVE DE L'INFANTICIDE

L'infanticide est le fait de tuer son enfant pour une raison ou pour une autre. Mais quelle qu'en soit la raison, cet acte est un crime et de ce fait réprimé par la loi. Depuis des temps très reculés, chez les Boo et les Baatombu du Bénin, du Nigeria et des Peulhs du Bénin, l'infanticide a contribué à décimer un nombre important d'enfants.

Cet acte odieux continue encore de nos jours. Le seul tort de ces enfants est de sortir du ventre de leur mère à plat ventre ou de naître avec des dents dans la bouche ou encore de sortir leurs premières dents par la gencive supérieure.

Pour ces gens qui pratiquent l'infanticide, un enfant né dans ces conditions est un «démon» qui a pris la forme humaine pour nuire à la société. Il faut donc l'éliminer physiquement.

C'est ce que je devais subir, quand Dieu m'a sauvé.

Ce témoignage que vous allez suivre, m'a été fait par mon propre père et ses proches.

En effet, je suis né chez ma mère à Kouguizi, dans un petit village de Kayama au Nigeria, vers 1942. De père, je suis du Canton de Kidaroumpérou, subdivision de Nikki - Dahomey, sous le drapeau français.

A ma naissance à Kouguizi, je suis sorti à plat ventre. Les vieilles qui assistaient ma mère se regardèrent et quittèrent une à une notre case, laissant maman et enfant dans le sang alors que je criais. Un «sorcier» est né. Après un temps, informés, des «spécialistes» de l'infanticide sont arrivés faire certaines cérémonies rituelles et me prirent. Pendant qu'on me faisait la toilette j'ai commencé par crier, c'est alors qu'une vieille fut surprise de voir une dent pointée à ma mâchoire supérieure. Prise de peur, elle me déposa et alla informer d'autres vieilles.

Les évènements ne tardèrent pas à se répandre dans la région. N'étant pas paternellement du Nigeria, mon élimination ne pouvait se faire tout de suite. Il fallait d'abord informer mon grand-père, chef Canton au Dahomey (Français). Mais en entendant, on ne cesse de me laver avec des produits et de m'en en faire boire d'autres. Selon eux, c'était pour atténuer les effets de malheurs avant le jour de l'opération. Des mois ont passé. Et comme si ces deux signes de «malheurs» ne suffisaient pas, une autre dent sortait par la mâchoire supérieure, secondant celle qui était là au premier jour de ma naissance.

Face à ce chapelet de mauvais signes que je porte, il fallait vite agir, avant que le pire n'arriva. Alors, la décision fut enfin prise pour me «réparer» c'est-à-dire me tuer. Mais il fallait attendre l'avis de mon grand-père, chef Canton en territoire français. Un de mes oncles maternels s'était donc dépêché au Dahomey pour parler à mon grand père de l'enfant «sorcier» qui est né et avoir son point de vue sur son élimination.

Par le messager, mon grand-père adresse une lettre au chef de Kayama, lui confiant ma totale protection. Alors, tous les membres de ma famille maternelle sont mis en garde contre mon élimination. C'est ce qui m'a donné la vie sauve.

J'ai actuellement 58 ans après 30 ans de carrière dans la santé publique ; un foyer heureux, avec de beaux enfants filles et garçons.

Mon père devenu chef Canton de Kidaroumpérou à la mort de mon grand père avait pris l'habitude de récupérer dans sa maison tout enfant traité de «sorcier» par les leurs. Il les élevait comme ses propres fils. Dès que l'enfant atteignait un certain âge, il demandait à la famille de venir reprendre leur progéniture. Il arrivait même que certains parents venaient reprendre spontanément leurs enfants. Il ne cesse de donner à qui veut l'entendre l'exemple de son propre fils pour sensibiliser les gens.

Et pour tous ceux qui veulent savoir son secret (c'est-à-dire celui de dompter «un sorcier», il leur répond qu'il n'avait ni feuille ni décoction et que cela relève d'une pure ignorance.

Comme vous le voyer, la superstition tue notre société. Il n'y a jamais eu d'enfants «sorciers». Gardez et élevez tous vos enfants qu'ils soient nés la tête première ou le tronc à plat ventre ou encore avec 20 dents. Ce sont des enfants comme les autres et à ce titre ils doivent être considérés comme des enfants et ont droit à la vie. Celui ou celle qui tue un enfant né avec ces caractéristiques commet un homicide et est puni par la loi.

Monsieur Farouk KISSIRA

Correspondant ORTB

N'Dali BORGOU

Résumé du mémoire

La constitution du Bénin prévoit la liberté et l'égalité en droit de tous les citoyens béninois. Nos traditions exigent aussi le respect de la dignité humaine. Le droit coutumier confirme cette préoccupation. Malgré ces considérations d'ordre statutaire, les droits élémentaires sont-ils toujours et vraiment respectés chez nous au Bénin? Ces droits sont-ils défendus par l'Etat Central ?

Non, hélas. Non quand on sait que l'infanticide, objet de ce travail de recherche, est toujours une réalité dans certaines de nos communautés. Nous sommes convaincus que l'infanticide est un vrai problème de développement. Et c'est dans le but de proposer des solutions à ce problème de développement que nous avons retenu de réfléchir sur le sujet en termes de recherche-action intitulé:

«Contribution aux stratégies de communication pour l'éradication de l'infanticide rituel en milieu Baatonu de Bori, commune de N'Dali»

Ce travail de recherche est subdivisé en quatre parties. Dans les généralités, la problématique est énoncée et appuyée par une revue de littérature. Si la deuxième partie apporte des éclaircissements sur le cadre et les méthodes d'études, la troisième présente les résultats issus de l'étude sur le terrain. La dernière, quant à elle, analyse les données.

Par ce travail nous avons voulu contribuer quelque peu à l'arrêt d'une pratique qui prive des êtres innocents et inoffensifs de leur droit le plus élémentaire : le droit à la vie. En effet, des milliers d'enfants meurent chaque jour de par le monde parce que des adultes en décident ainsi. Si le cas de l'avortement malheureusement devenu acte banal est le plus connu, dans nos communautés, des pratiques coutumières amènent les populations à éliminer physiquement des nouveaux-nés parce qu'ils sont mal formés ou pluriformes. Au Sud Bénin on les appelle « toxolu ». Ce critère fait de l'enfant «un monstre» et est commun à plusieurs communautés béninoises voire africaines. En dehors de ce critère, des groupes socio linguistiques, notamment les Baatombu et les Boo réparent des enfants qu'ils jugent de sorciers.

Comme le disait le père Bio SANOU, le pionnier de la lutte contre l'infanticide rituel, puisque c'est de cela qu'il s'agit, « un enfant sorcier » n'est pas ce que nous nous imaginons. C'est un enfant viable qui n'est ni un handicapé physique, ni un handicapé mental. C'est un enfant normal sur tous les points. Un être humain à part entière donc. Mais lorsqu'à sa naissance ou au cours de son enfance, cet enfant développe certains critères `'anormaux'', il est dit sorcier en milieu Baatonu. Ces critères sont :

- la naissance à huit mois (le prématuré de sept mois est accepté),

- la naissance par le siège, appelé communément agossu chez les fons,

- la naissance avec des dents,

- la poussée des premières dents par la mâchoire supérieure,

- La poussée des incisives à huit mois

- La marche à 7 mois.

Tout enfant qui présente l'un ou l'autre de ces critères ne mérite pas de faire partie de la communauté Baatonu. Il est, soit physiquement éliminé, soit jeté loin des siens, soit encore abandonné chez les peulhs : ce sont ces derniers qui sont appelés les Mare Yo à ne pas confondre avec les Gando qui sont des Baatombu vendus aux peulhs par les rois Baatombu.

L'enquête socio anthropologique pour vérifier les informations sur la question a eu lieu à Bori, dans la commune de N'Dali. Cette zone est, à en croire nombre de documents cet de témoignages, une zone à haut risque de pratique de l'infanticide.

L'étude sur le terrain a confirmé que cette pratique héritée des ancêtres a toujours cours dans ce village. En effet, plus de 80% des personnes approchées croient qu'un enfant qui présente l'un des critères précités est un enfant porte-malheur ; un enfant dangereux et maléfique pour ses proches parents.

Il est encore des gens aujourd'hui qui continuent d'éliminer physiquement mais clandestinement ces genres d'enfants dits `'sorciers''. Et pourtant des dispositions légales punissent les auteurs d'infanticide. L'infanticide, pour le définir, est l'assassinat d'un enfant nouveau-né et « tout coupable d'assassinat (...) sera puni de mort... » Selon l'article 300 du code pénal.

Aujourd'hui, plus de 90% des enquêtées font recours, selon ce les informations recueillies, à des rites de purification de ces enfants et ne les tuent plus. Toutefois, ceci ne met pas ces enfants à l'abri de tout soupçon et au moindre malheur ils peuvent être exécutés ou abandonnés. Aussi, malgré sa purification, l'enfant dit `'sorcier `'est-il stigmatisé et peut être exécuté à tout moment.

Face à cette pratique qui persiste, des actions de communication sont menées par des structures et des personnalités. A Bori l'ONG APEM entendez Association pour la Protection de l'Enfance Malheureuse, les religieux, le centre social et des personnalités notamment FAROUK KISSIRA, un sage de N'Dali, luttent contre l'infanticide. Les actions prioritaires menées sont des séances de sensibilisation tous azimuts à l'endroit de toutes les couches sans distinction.

Après analyse des résultats de l'étude, j'ai relevé comme causes de la persistance de l'infanticide celles qui suivent :

- le fort taux de personnes non scolarisées (environ 90%). N'Dali est cependant la première commune à adopter l'alphabétisation au Bénin,

- la forte croyance des populations en des forces surnaturelles,

- le caractère culturel de la pratique de l'infanticide,

- la non urbanisation de la zone,

- pression sociale sur les jeunes couples

- le caractère très conservateur des populations

A ces causes d'ordre comportemental, s'ajoutent des causes d'ordre organisationnel. Ceci nous amène à relever des faiblesses dans les stratégies des structures intervenant à Bori. Il s'agit de :

- l'inexistence de partenariat avec les autres organisations intervenant dans d'autres domaines comme l'éducation et la santé,

- l'insuffisance des moyens financiers, matériels et logistiques,

- la non utilisation des supports matériels et la non diversification des actions de communication et des médias utilisés.

Concrètement, il faut reconnaître que l'ampleur de la pratique de l'infanticide a régressé à Bori. Une prise de conscience naît au sein des communautés et il importe de la renforcer.

Aussi, face aux causes signalées de l'infanticide et sur la base des faiblesses des structures intervenant contre la pratique à Bori, avons-nous fait quelques suggestions.

Il ensemble important de mettre en place des actions de communication basées sur les trois principaux axes classiques d'un plan de communication. Il s'agit de :

- le plaidoyer,

- la mobilisation sociale,

- la communication en appui au programme ou communication pour un changement de comportement.

Il faut donc qu'un accent soit mis sur la scolarisation à Bori, notamment celle des filles. Pour cela des actions de plaidoyer au niveau des dignitaires et des séances de sensibilisation des populations sont indispensables.

Des actions de sensibilisation avec des supports audiovisuels en langues locales sont plus convaincantes. Il faudrait donc les utiliser pour expliquer le phénomène naturel que constitue la naissance par le siège. Les radios locales devraient aussi être mises à contribution ainsi que les médias traditionnels. Il importerait aussi de faire des actions de marketing social afin d'amener les femmes qui continuent d'accoucher à domicile (plus de 20% des gestantes) à se rendre à la maternité.

Par ailleurs, des actions de plaidoyer pour une meilleure implication de l'Etat et des partenaires au développement dont l'Unicef, Plan Bénin, Social Watch pour ne citer que ceux là, dans la lutte contre la pratique à travers un volet d'un programme consacré à la protection de l'enfance malheureuse.

Il est aussi indispensable que les ONG luttant contre l'infanticide se mettent en réseau avec les autres structures qui ont déjà une certaine crédibilité dans leur zone d'intervention pour susciter une mobilisation sociale autour de la question.

L'infanticide reste un problème qui ne fait pas l'objet de grandes décisions politiques. Des lois claires réprimant l'infanticide doivent être votées afin de donner conférer un cadre juridique précis à la lutte contre la pratique.

Ce travail a été réalisé dans le cadre de la soutenance du mémoire de maîtrise au département des sciences du langage et de la communication (DSLC) à l'université d'Abomey-Calavi. Ce mémoire a été soutenu le vendredi 26 octobre 2007 après quatre années de formation.

Annexe 2 : TABLEAU à 6 COLONNES

Objectifs

Variables

Informations

à recueillir

Sources

(Lieux Personnes)

Technique

Outils

1- Faire l'analyse de la situation de la commune de N'Dali en général et de l'arrondissement de Bori en particulier.

1- Facteurs géographiques et démographiques

Climat - Relief, Hydrographie Sol - Végétation Habitation Environnement

Démographie

- Nombre de naissances

- Nombre d'habitants

- Nombre de naissances déclarées

- Répartition par âges/sexe

- Ratio homme/femme

- Régime matrimonial

- Tailles et compositions des ménages

- Taux de mortalité

- Taux de natalité

- Taux de mortalité infantile

Mairie/ CA/ Service d'information et de documentations

Mairie/ CA

Registre de la Mairie/ CA

Centre de Santé

Ménages

- Exploitation documentaire

- Observation

- Entretien

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Observation participantes

- Entretien

- Fiche de dépouillement

- Grille d'observation

- Guide d'entretien

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

- Grille d'observation

- Guide d'entretien

2- Facteurs psycho Sociaux

- Données linguistiques.

Langues parlées

Langues véhiculaires

Langues/ alphabétisées écrites

Données culturelles

- Religions

- Croyances

- Interdits

- Traditions liées aux enfants et à leur naissance

- Système d'habitat

- Typologie des canaux traditionnels et modernes de communication

- Organisation sociale

* Rôles de pouvoir/ de décision (Autorité dans la famille)

* Mariage (Polygamie/ Lévirat)

Type de famille

Structures sociales locales (ONG et réseaux locaux)

-Leaders d'opinion

Système éducatif

- Nombre d'écoles

- Situation géographique des établissements

- Ratio filles/ garçons

- Taux de réussite/ de redoublement/ d'abandon

Organisation de la jeunesse

- Groupe de sport

- Groupe culturel

Données économiques

- Activités principales

* Pour les hommes

* Pour les femmes

* Pour les jeunes Scolarisés/ déscolarisés

- Ressources

- Besoins (adéquation)

Système politique

- Partis politiques

- Administrations (Gendarmerie/ Justice)

- Mairie/ Arrondissement

- Centre d'alphabétisation

- Enseignants

- Chefs traditionnels

- Mairie

Communauté

- Chefs traditionnels

- Mairie

- Médias

Mairie

Chefs de Ménages/ Collectivités

- Chefs traditionnels

- Chefs de Ménages/

Collectivités

- Mairie/ Arrondissement

- Présidents d'associations et de cultes

Communauté

- Mairie (registre de la mairie)

- Ecole/ CEG (registre d'inscription)

- Enseignants

Mairie/ Arrondissement

Mairie/ Arrondissement

Marché

Ménages

Autorités locales

Chefs de collectivités/ Ménages

Mairie

Brigade

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Entretien

- Observation

- Observation participantes

- Entretien

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Entretien

- Observation participantes

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Entretien

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Exploitation documentaire

- Observation participantes

- Exploitation documentaire

- Observation participantes

- Entretien

- Entretien

- Observation participantes

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

- Guide d'entretien

- Grille d'observation

- Grille d'observation

- Guide d'entretien

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

- Guide d'entretien

- Grille d'observation

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

- Guide d'entretien

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

- Fiche de dépouillement

- Grille d'observation

- Fiche de dépouillement

- Grille d'observation

- Guide d'entretien

- Guide d'entretien

- Grille d'observation

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

2- Recenser les activités des structures gouvernementale/ non gouvernementale/ et locales en charges de la lutte contre le phénomène de l'infanticide rituel.

Atouts et faiblesses des structures notamment l'ELIB - ONG

- Typologie des activités menées par les différentes structures.

* Prévention

* Action curative

- Partenaires locaux et externes

- Implication du Ministère de la Famille

ELIB - ONG et autre structure

Ministère de la Famille, de la Mère et de l'enfant (Service Protection)

- Entretien

- Exploitation documentaire

- Entretien

- Guide d'entretien

- Fiche de dépouillement

- Guide d'entretien

* 1 Amnesty International. (1991) : « Amnesty International raconte la déclaration universelle des droits de l'homme », Paris, les éditions francophones d'Amnesty International

* 2 Préambule de la Déclaration Universelle des droits de l'homme, Idem, Ibidem

* 3 KPADONOU, Emilie. (1997) : « Quelques contours et avatars » In Rapport du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 novembre 1997, pp56-65

* 4 Idem, Ibidem 4

* 5 On parle à ce niveau d'infanticide rituel (cf. clarification des concepts)f

* 6 Les chiffres pairs (8, 10, etc.) sont de mauvais mois et selon ces communautés un enfant qui naît en un mois paire ne peut que apporter du malheur.

* 7 GOBI, Alassane. (2002), Pratiques coutumières et droits de l'homme au Bénin, mémoire en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies des droits de la Personne Humaine et de la Démocratie, FASJEP, UAC , Deuxième promotion (2001-2002)

* 8 TEVOEDJRE Isabelle. 1997, Infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 Novembre.

* 9 Lexique des termes juridiques Dallez, Edition 1985.

* 10 Code des personnes et de la famille.

* 11 Bio BIGOU Bani Léon, « Les classes sociales Ganno et Mareyo en milieu baatonu : comment et pourquoi des enfants sont liquidés ou exilés ? » Le forum de la semaine hebdomadaire d'information générale, de publicité et d'annonce paraissant tous les mercredis, 5è année, n° 209, mercredi 11 mai 1994, PP8-n

* 12 Ce qui est valable pour la santé, est valable selon nous pour le changement de n'importe quelle autre comportement, notamment ceux liés à l'éducation et au développement.

* 13 BASICS ; USAID, Healthcom. (1999) Boîte à outils pour le renforcement des compétences en matière de communication. Ed les presses de l'imprimerie Saint-Paul, Dakar, Mai 1999, p.205

* 14 DADELE, Antoine. (2004) Théories de comportement, SLC204, DSLC FLASH, UAC, Bénin.

* 15 BASICS, USAID, Healthcom. (1999), Boîte à outils pour le renforcement des compétences en matière de communication, Ed les presses de l'imprimerie Saint-Paul, Dakar, Mai 1999, p 207

* 16 GBEGNONVI, Roger. (1995) : Actes du Séminaire National sur les droits des enfants à la vie et à la famille et les pratiques coutumières au Bénin, Parakou les 20,21 et 22 novembre 1995 

* 17 Genèse, chapitre 22, verset 2.

* 18 GBEGNONVI, Roger. (1995) : Actes du Séminaire National sur les droits des enfants à la vie et à la famille et les pratiques coutumières au Bénin, Parakou les 20,21 et 22 novembre 1995 

* 19 Idem, Ibidem 

* 20 L'émission `'envoyé spécial'' du vendredi 8 décembre 2006 sur la chaîne de télévision France 2 a réalisé un reportage sur ces femmes qui pour une raison ou une autre tuent leur nouveau né et les enterrent tout près de chez elles.

* 21 Journal de 23h sur Radio France Internationale (RFI) le dimanche 22 juillet 2007

* 22 Jean Paul ESCLILIMANN, dans Naître sur la terre africaine, édition INADES, Abidjan

* 23 GOBI, Alassane. (1997), « Infanticide rituel : Ses origines - Ses causes » In Rapport du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 novembre 1997, pp 19-36

* 24 Idem, Ibidem 6

* 25 GOBI, Alassane. (1997), « Infanticide rituel : Ses origines - Ses causes » In Rapport du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 novembre 1997, pp 19-36

* 26 GBEGNONVI, Roger. (1995) : Actes du Séminaire National sur les droits des enfants à la vie et à la famille et les pratiques coutumières au Bénin tenu à Parakou les 20,21 et 22 novembre 1995 

* 27 BIO-SANOU, Pierre. (1997) « Quelle place dans la société des Baribas pour les enfants dits sorciers » » In Actes du séminaire sur l'Infanticide rituel au Bénin, Natitingou les 25, 26 et 27 novembre 1997, pp. 66-74

* 28 GOBI, Alassane. (2002), Pratiques coutumières et droits de l'homme au Bénin, mémoire en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies des droits de la Personne Humaine et de la Démocratie, FASJEP, UAC , Deuxième promotion (2001-2002)

* 29APEM, Fondation FRIEDRICH NAUMANN, (1994) « Infanticide rituel : Origine et Fondements » In Rapport Général des séminaires itinérants sur l'infanticide, 1994-1995. Parakou.

* 30ALIDOU, Mohamed. (1997), « Infanticide rituel : Origines - Causes et Fondement » In Rapport du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 novembre 1997,

* 31TEVOEDJRE Isabelle. (1997), « Préface» In Rapport du séminaire sur l'infanticide rituel au Bénin, Natitingou, 25, 26 et 27 novembre 1997,

* 32 Ce mot baatonu veut dire `'on va arranger''.

* 33 Ministère de la Protection Sociale et de la Famille, Unicef. (2001), Rapport sur l'infanticide au Bénin, janvier 2001

* 34 ALIDOU, Mohamed. Idem, Ibidem, pp. 37-47 Ministère de la Protection Sociale et de la Famille, Unicef. (2001), Rapport sur l'infanticide au Bénin, janvier 2001

* 35 BIO-SANOU, Pierre. (1995), Rapport final sur le Séminaire National sur les droits de l'enfant à la vie et à la famille et les pratiques coutumiers au Bénin, Parakou les 20, 21 et 22 novembre 1995

* 36 Ministère de la Protection Sociale et de la Famille, Unicef. (2001), Rapport sur l'infanticide au Bénin, janvier 2001

* 37 Idem, Ibidem

* 38 Idem, Ibidem

* 39 Actes du séminaire sur l'Infanticide rituel au Bénin, Natitingou les 25, 26 et 27 novembre 1997

* 40 Centre d'information et de documentation sur les collectivités locales. (2001) Atlas monographiques des communes du Bénin. p.86

* 41 INSAE, RGPH32002. (2004), Cahier des villages et quartiers de ville du département du Borgou, Mai 2004, pp 14-16

* 42 INSAE, RGPH32002. (2004), Cahier des villages et quartiers de ville du département du Borgou, Mai 2004, pp 14-16

* 43 INSAE, RGPH32002. (2004), Cahier des villages et quartiers de ville du département du Borgou, Mai 2004, pp 14-16

* 44 La majorité de la population prend du tabac.

* 45 L'odeur des crottes de boeufs envahit les concessions.

* 46 INSAE, RGPN3 2002, Cahier de villages et quartiers de ville département du Borgou, Mai 2004 pp- 14-15

* 47 Certains pratiquent les trois religions.

* 48En réalité il s'agit d'une cérémonie de purification. Le terme usuel à Bori est `'guérison''

* 49 Selon les populations, l'infanticide rituel est un triste passé à Bori. Cependant elle peut continuer dans d'autres communautés baatombu.

* 50 Bori est une zone à haut risque d'infanticide dit on souvent. C'est là que les enfants sorciers de toutes les communautés Baatombu du Borgou venaient faire exécuter leurs enfants. De nos jours Bori a développé des mécanismes de guérison de ces enfants. Et c'est une manière de les sauver.

* 51 Certains habitants de Bori racontent que depuis environ 15 ans il n'y a eu que deux actions véritables menées contre la pratique. La dernière remonte à 2004 où la ministre de la famille et de la sécurité sociale a organisé une grande séance de sensibilisation.

* 52 Le trafic des enfants est présentement un fait récurent à Bori. Les enfants sont envoyés dans les villes environnent pour y travailler.

* 53 Pendant ces deux mois les paysans sont plus ou moins libres en attendant les premières pluies






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