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Evaluation de l'impact de l'application des mesures conservatoires et leurs incidences sur l'exploitation des forêts au Gabon

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par Freddy MEKA M'ALLOGHO
Ecole Nationale des Eaux et Forêts - Ingénieur forestier spécialite en SIG et BD 2007
  

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Introduction

La gestion durable des ressources forestières revêt actuellement une importance cruciale, aussi bien pour les populations rurales que pour les gouvernements et la communauté internationale. Presque tous les Etats africains se sont dotés de réglementations forestières qui, a priori, sont favorables à une gestion pérenne des forêts(Le Flamboyant n°59/60, 2005). Au cours de ces dix dernières années, le Gabon à l'instar des autres pays du bassin du Congo a inscrit les questions de gouvernance forestière à l'ordre du jour des politiques et stratégies de développement économique.

Au niveau de la Direction Générale des Eaux et Forêts, cela s'est traduit par l'élaboration d'un plan d'actions dont les principaux objectifs visent entre autres, la mise en place des principes de bonne gouvernance. Il s'agit en d'autres termes pour l'administration forestière de créer des conditions pour une meilleure contribution du secteur forestier au PIB (au moyen de la promotion, puis l'encouragement à la certification ou l'éco-labellisation des produits forestiers), à développer le domaine rural et la participation des nationaux dans l'ensemble des activités forestières1(*). En ce qui concerne le groupe nominal mesure conservatoire qui constitue la trame de notre étude, plusieurs définitions peuvent être données selon les sources.

Souvent utilisée en droit de l'environnement, l'expression « mesure conservatoire », désigne une décision ayant pour effet de conserver provisoirement une ressource, un droit ou un bien pour une durée indéterminée2(*). En ce qui concerne notre travail, ces mesures sont principalement axées sur la suspension provisoire d'attribution de nouveaux permis forestiers (décret n° 666/PR du 09/08/2004) et l'arrêt d'attribution des coupes familiales en 2005.

La loi n° 16/01 du 31 Décembre 2001 portant code forestier en république gabonaise dans son article 94, conditionne l'exploitation forestière à l'attribution des permis. Or les mesures conservatoires (décrets, arrêtés) prises récemment dans le secteur forestier sont toujours en cours de validité. A cet effet, l'une des problématiques sur laquelle l'administration forestière se penche actuellement, est celle de savoir si les initiatives émergentes de préservation des forêts au Gabon, contribuent réellement à l'amélioration de la légalité dans l'exploitation forestière?

Ainsi, l'objectif général de ce travail est de ressortir les impacts liés à l'application des mesures conservatoires prises par l'Etat sur l'exploitation des forêts. De manière spécifique, il s'agira de faire un audit institutionnel, et de dresser les conséquences relatives aux deux mesures. L'intérêt d'un tel travail est qu'il permet d'avoir une vue assez large des dispositions de la réglementation forestière en république gabonaise et surtout de faire une analyse critique de la nouvelle politique forestière.

Ledit travail se base sur deux principales hypothèses qui consistent à supposer que :

(i) les mesures conservatoires prises par l'Etat contribuent à la prolifération de l'exploitation forestière illégale d'une part,

(ii) le cadre institutionnel actuel du secteur forestier souffre de nombreux dysfonctionnements d'autre part.

Notre travail est constitué de quatre principaux chapitres. Dans le premier chapitre il est question de montrer comment l'exploitation forestière a évolué au Gabon de 1957 à 2007, de dresser un bref aperçu de la filière bois et de présenter la méthodologie inhérente à ce travail. Le chapitre deux est essentiellement consacré à l'audit du cadre institutionnel, alors que le troisième chapitre se focalise plus sur les mesures conservatoires proprement dites.

Enfin le chapitre quatre présente les tendances de production forestière et les alternatives nécessaires à une gestion forestière efficiente.

CHAPITRE I

GENERALITES ET METHODOLOGIE


I.1. Présentation du lieu de stage et ses principales missions

Nous avons effectué ce stage à la Direction Générale des Eaux et Forêts (commanditaire) au Ministère de l'Economie Forestière, des Eaux, de la Pêche et des Parcs Nationaux. Composé actuellement de trois directions générales à savoir : la DGEF, la DGENEF et la DGPA, le Ministère de l'Economie Forestière a pour principales attributions ; la gestion du domaine forestier, de la faune sauvage, des ressources halieutiques, le contrôle général et l'application de la réglementation forestière dans les forêts relevant du domaine de l'Etat3(*) .

En ce qui concerne spécifiquement la DGEF, elle est chargée entre autres  de :

þ Préparer et d'appliquer les textes législatifs et réglementaires relatifs aux activités du département (ministère)4(*) ;

þ D'assister le ministère des Eaux et Forêts dans le traitement des affaires à soumettre au conseil des ministres et à l'assemblée nationale.

Composée de six(6) directions techniques, neuf(9) inspections provinciales, vingt six (26) cantonnements et quatorze (14) brigades (DGEF, 2002), la Direction Générale des Eaux et Forêts compte actuellement 671 agents (Annexe1), soit 299 agents (DPFO, 2007) de plus qu'en 2005. L'organigramme de la DGEF est établi comme suit :

Figure 1 : Organigramme de la DGEF

Source : DPFO(2007)

Les attributions de la Direction de la Production Forestière au sein de laquelle nous avons été suivis, visent principalement :

þ L'élaboration des directives générales concernant la gestion de la forêt, la conservation des sols, ainsi que le contrôle de leur exécution ;

þ La proposition des conditions d'attribution des permis forestiers ;

þ L'instruction des demandes de permis ;

þ La centralisation et la gestion des dossiers de permis et le fichier des entreprises d'exploitation forestière ;

þ Le contrôle de la production forestière, en liaison avec la direction compétente du ministère chargé des domaines.5(*)

I.2. Les grands traits géographiques du Gabon

I.2.1. Situation géographique.

A cheval sur l'équateur, le Gabon (267667 km2) est bordé par l'Océan atlantique, et possède des frontières communes avec la Guinée équatoriale au Nord-Ouest, le Cameroun au Nord à l'Est et au Sud par le Congo6(*) . En ce qui concerne ses coordonnées géographiques caractéristiques, le Gabon se trouve entre les latitudes 3°55S- 2°30N, et les longitudes 8°E -15°E7(*)(figure 2).

Figure 2 : Situation géographique du Gabon

Source : Léonard et Richard, cité par Robert NASI(1999)

I.2.2. Climatologie et Forêt

I.2.2.1 Climatologie

Le Gabon appartient à la région climatique de « l'alizé dévié sud atlantique » qui regroupe également le Sud du Cameroun, la partie Nord de l'Angola et une grande partie de la cuvette congolaise. Le climat est chaud et humide, de type équatorial8(*). La pluviométrie annuelle varie entre 1500 et 3000 mm. Sur l'ensemble du pays, il y a opposition entre une saison sèche très marquée (précipitations inférieures à 100 mm/mois) de Juin à Août et une longue saison de pluie de 9 mois. En effet, la petite saison sèche de Décembre à Février est souvent humide.

Mais avec les changements climatiques actuels, ces saisons deviennent de plus en plus hétérogènes. Il existe trois grandes régions climatiques au Gabon (figure 2) qui se définissent comme suit : 

þ La région Nord-Est où le rythme pluviométrique est équatorial (régions A1 et A2) avec apparition de deux véritables saisons sèches;

þ La région centrale, de Libreville à Mbigou qui connaît un rythme pluviométrique tropical de transition (région B), avec une saison sèche de trois mois et une saison humide de 9 mois;

þ Tout le Sud-Ouest du pays, au Sud d'une ligne Omboué-Ndendé est sous l'influence d'un rythme pluviométrique tropical (région C).

I.2.2.2 Brève présentation de la filière bois

Pour une superficie totale d'environ 26,8 millions d'hectares, le Gabon est couvert de près de 22 millions d'hectares 9(*) de forêt (soit 85% du territoire). Il y a 20 millions d'hectares de forêt productive et le taux de déforestation annuel est estimé à 1%.

En 2005, le potentiel total sur pied a été estimé à environ 2.600.000.000 m3 et le potentiel commercialisable à 1.500.000.000 m3, avec 130.000.000 m3 Okoumé (Aucoumea klaineana)10(*). Le Gabon est ainsi, un réservoir de carbone dont l'estimation varie entre 0,90 et 5,24 gigatonnes (PSFE, 2005)

Parmi les 400 autres essences connues à part l'Okoumé (Aucoumea klaineana) et considérées comme exploitables, seules 65 plus connues sous le vocable « bois divers » sont commercialisables actuellement. La filière bois (exploitation forestière, industrie et négoce du bois) contribue de 4% au PIB11(*) et représente le premier employeur du secteur privé avec 12580 personnes sur un total de 55200 personnes en 2006, soit 22% de la population active12(*) au Gabon. Ce qui fait de la filière bois, le deuxième employeur après la fonction publique. Le tableau 1 et la figure 3 suivants donnent respectivement les principales activités du secteur industriel et la répartition des différentes nationalités, dans ce dernier.

Tableau 1 : Activités du secteur industriel par ordre d'importance en 2006

Segment d'activité

% par segment

% des effectifs par origine

Gabonais

Européens

Asiatiques

Africains

Sciage

49,07

83,22

3,01

4,41

8,8

Placage

29,26

92,09

1,28

3,77

3,4

Contreplaqué

18,97

64,28

1,43

0

1,5

Tranchage

2,7

88,46

3,07

0

8,5

MOYENNE

25

82,01

2,20

2,05

5,55

Source : DGEF(2006)

Figure 3 : Répartition des effectifs par nationalité dans le secteur de

L'industrie du bois en 2006

Source : DGEF(2007)

Il ressort qu'il y a beaucoup de Gabonais qui exercent dans les différentes branches du secteur industriel du bois. Pour un total de 65 unités de transformation locale en 2006 il y aurait environ 82,01% de nationaux toute branche confondue. La politique du gouvernement basée sur la création d'emplois semble donc effective au vu de ces chiffres.

Les principales activités liées à l'industrie du bois concernent le sciage, le déroulage et le placage tel que le montre la figure 4 suivante.

Figure 4 : Principales activités du secteur industriel en 2006

Source : DGEF(2007

I.3. Evolution de l'exploitation forestière au Gabon de 1957 à 2007

La surface allouée aux concessions forestières au Gabon, a été multipliée par sept de 1957 à 1999. La figure 5 ci-dessous présente une série chronologique de ces concessions.

Figure 5 : Evolution cumulée des concessions forestières

Attribuées au Gabon entre 1957 et 1997

Zones cumulées des concessions forestières.

Forêts (denses humide et secondaires).

Autre végétation

Légende 

forestières

Source : GFW(2000)

En effet, la plupart des forêts où l'on peut trouver de l'Okoumé ont été attribuées à l'exploitation depuis 1957. Mais le début de l'exploitation forestière au Gabon peut être situé dès le 20ème siècle, avant l'élaboration d'une réelle législation et délimitation du domaine forestier. La crise de 1930 a fait chuter la production de près de 50%. Ainsi dès 1932, l'administration13(*) coloniale créa une deuxième zone.

Mais jusqu'en 1956, l'exploitation s'est poursuivie seulement en première zone et la superficie a été à environ trois millions d'hectares. Avec l'ouverture à l'exploitation de la deuxième zone (Arrêté du 28 Novembre 1956, confirmé par le décret du 13 Mars 1961),14(*) les permis accordés ont atteint deux millions d'hectares en 1963, puis trois millions en 1968. Matériellement, la technologie apportée par les premiers tracteurs à chenilles et le rail de Decauville au lendemain de la deuxième guerre mondiale ont permis cette évolution.

En outre, la construction dans les années 70 du Transgabonais qui traverse le pays d'Est en Ouest a ouvert d'importantes étendues de forêts et permettait ainsi l'attribution de lots (permis) pour son financement. Ces lots constituent la troisième zone avec une superficie de 1 520 000 hectares15(*) . En 1972, la totalité des concessions forestières couvrait une superficie d'environ 15 millions d'hectares16(*). En 1997, année à laquelle le projet de la nouvelle loi forestière a été initialement proposé ; les concessions forestières se répartissaient entre 221 détenteurs, mais 13 compagnies seulement détenaient 50% de la superficie totale des concessions forestières, soit environ 9 millions d'hectares.

Les trois quarts de superficie se concentraient sur quatre provinces (Ogooué Lolo, Ogooué Ivindo, Ngounié et Moyen Ogooué) le long du chemin de fer. Aujourd'hui, il existe toujours deux zones (décret 1205/PR/MEFPE du 30 Aout 1993) d'exploitation forestière (figure 6).

Figure 6 : Les différentes zones d'exploitation forestière au Gabon

Légende :

Première zone

Deuxième zone

Source : Gérard BUTTOUD et al ;(2005)

La première zone, le long de la côte et déjà largement exploitée (100% des exploitations en 1956) représente une superficie totale de 4.920.000 hectares (DIARF, 1998), dont 3.335.000 hectares de forêt. Cette zone est uniquement réservée aux exploitants forestiers nationaux, lesquels concèdent souvent des licences en fermage à des entreprises étrangères.

La deuxième zone avec près de 17 millions d'hectares comprend la Nyanga, le bassin de la Ngounié, le Moyen Ogooué et le Haut-Ogooué, l'Ogooué-Lolo et une partie de l'Ogooué -Ivindo et du Woleu-Ntem. Cette zone regroupe actuellement, l'essentiel des grandes exploitations forestières. Aujourd'hui, il y a 29 concessions forestières, (soit 4.19 millions d'hectares) engagées dans le processus d'aménagement17(*). La superficie totale des permis forestiers sur toute l'étendue du territoire national s'élève aujourd'hui à environ 10.5 millions d'hectares contre 11 millions en 2002. Cette variation est présentée par la figure suivante :

Figure 7 : Evolution des superficies sous concessions forestières en km2

Entre 1997 et 2007

Source : MEKA(2007)

De cette synthèse, il ressort que la province de l'Ogooué-Ivindo est celle qui a enregistrée le plus grand nombre de permis de 2002 à 2007. Ce qui est logique compte tenu du fait que jusqu'en 1997, une grande partie de cette province ainsi que le Woleu-Ntem, n'étaient pas encore sous concession (figure 5).

Toutefois, la politique qui vise à transformer à long terme, une exploitation de prélèvement incontrôlée en une exploitation aménagée et rationnellement gérée commence à se concrétiser. Dans la figure 7 ci-dessus, cela se traduit par la baisse de la superficie totale des concessions forestières, car faut-il le rappeler, la volonté du gouvernement est de constituer un domaine à vocation permanente de 12 millions d'hectares (soit 8 millions de forêt productive et 4 millions pour les aires protégées)18(*). D'où la nécessité de diminuer  les concessions forestières

I.4. Méthodologie

I.4.1. Ressources

Pour l'aboutissement de ce travail, nous avons eu recours à plusieurs de ressources (machines, hommes et documents), parmi lesquelles :

· Les partenaires du projet (voir fiche de projet du stagiaire) ;

· Les mémoires de DESS Ecofore/INSG ;

· Internet ;

· Code forestier gabonais (Loi 16/01 du 31 Décembre 2001)

· Un ordinateur portable, avec tous les logiciels nécessaires au traitement de texte ;

· Des procès verbaux de 2001 à 2007 ;

· Une carte récente des concessions forestières (Annexe 2);

· Le décret n°666/PR du 09 Août 2004 portant suspension provisoire de l'attribution de nouveaux permis forestiers en République gabonaise (Annexe 3).

I.4.2. Méthode de travail

Nous avons commencé ce travail par une revue bibliographique. Ce qui nous a permis non seulement d'avoir une idée assez large de la situation de l'exploitation forestière au Gabon depuis les années d'indépendance jusqu'aujourd'hui, mais aussi de mieux orienter notre travail.

Ensuite, pour faire le diagnostic institutionnel, nous avons eu recours à la règle dite des « 5M », d'usage courant en systèmes d'informations organisationnels (NZIENGUI, 2007)

Les « 5M » concernent : le Milieu, le Matériel ; la Méthode ; la Main d'oeuvre et la Matière. Mais dans le cadre de notre travail, nous avions eu recours qu'aux quatre dernières composantes. Le Matériel concerne la logistique et les moyens techniques utilisés. La Méthode quant à elle, fait référence aux pratiques et démarches adoptées dans la gestion du secteur forestier. Pour ce qui est de la main d'oeuvre, elle a trait au diagnostic des ressources humaines. Enfin, la matière concerne le potentiel forestier, ainsi que toutes lois sous-jacentes.

Pour les besoins d'évaluation quantitative des impacts liés aux mesures conservatoires, nous avons organisé les procès verbaux (mis à notre disposition par le service contentieux de la DED) par années afin d'avoir une base de données complète et facilement utilisable de ces derniers.

L'évaluation qualitative s'est quant à elle appuyée sur les trois piliers de durabilité (BRUNDTLAND, 1987) que sont le pilier écologique, le pilier économique et le pilier social.

CHAPITRE II

AUDIT INSTITUTIONNEL

II.1 Contexte juridique et réglementaire.

Dans le cadre de la prise en compte des recommandations, et engagements divers contenus dans les traités, conventions et déclarations internationales auxquels la République Gabonaise a souscrit depuis le sommet de Rio de Janeiro en 1992, les autorités Gabonaises ont entrepris d'importantes réformes institutionnelles et réglementaires dans le secteur forêt et celui de la protection de la nature (BUTTOUD, 2005).

En effet, la tradition juridique francophone exige que les lois (ensemble de dispositions législatives) soient appliquées par le truchement de divers autres textes juridiques en particulier des décrets et arrêtés. Ainsi au cours de ces trois dernières décennies, le législateur gabonais n'a véritablement fait évoluer le système réglementaire forestier qu'à deux reprises : d'abord par la loi 1/82 du 22 Juillet 1982 dite « loi d'orientation en matière des Eaux et Forêts », ensuite la loi 16/01 du 31 Décembre 2001, portant code forestier en république gabonaise.

Pour cette dernière (loi 16/01), il faut dire qu'elle est favorable à une gestion durable des ressources naturelles renouvelables en général et des forêts en particulier. Sur 296 articles( sur 298) techniques, seuls vingt huit (28) 19(*) projets de texte dont une (1) loi, vingt quatre (24) décrets et trois(3) arrêtés (figure 8) ont été adoptés, ou sont en cours d'adoption. Ils concernent notamment :

þ L'aménagement durable des forêts de production et la gestion des forêts communautaires,

þ L'industrialisation de la filière bois,

þ La gestion de la faune et des aires protégées,

þ Les ressources financières.

Figure 8 : Aperçu des textes adoptés dans la loi 016/01

du 31/12/2001

Source : MEKA(2007)

 

Plus des trois quarts des textes d'application prévus n'ont pas encore été pris à ce jour. Ce qui constitue un véritable frein à la mise en place d'une gestion forestière efficace et opérationnelle quand bien même, il était prévu que la loi 16/01 sorte avec tous ces textes d'applications (GFW, 2000).

Toujours en ce qui concerne les insuffisances dans le cadre juridique et réglementaire, l'article 96, du code forestier limite la superficie maximale d'un PFA à 15000 ha lorsqu'il est intégré dans une CFAD. Mais l'article 97 précise que la superficie d'une CFAD varie entre 50000 et 200000 ha. Finalement on se demande quel est réellement le seuil de constitution d'une CFAD ?

En outre, plusieurs permis forestiers entourent de nombreuses aires protégées, certains se trouvant même à l'intérieur de ces dernières (cas du PTE n°16/84 à Wonga-Wongué)20(*). Ce qui constitue aussi, une forme d'exploitation forestière non réglementaire.

Par ailleurs, plusieurs exploitants détiennent encore des dizaines, voir des centaines de millions d'arriérés fiscaux (MBAGOU,2007) pour des permis qui en réalité devraient faire retour au domaine (art 275 et 281), comme ce fut le cas des cent seize (116) permis retirés en Mai 2007.

Aussi, le code actuel dans son article 127 légalise la pratique du fermage. Fait incohérent qui constitue un frein à ses objectifs de développement. Considéré au départ comme un fait illicite, (art 20 et 21 de la loi 1/82), le fermage ou sous-traitance des concessions forestières, est aux antipodes du processus d'aménagement durable. Sous cette pratique, le propriétaire reçoit une rente sans qu'il ne se sente obligé d'investir à long terme dans les concessions.

Le fermage ne rime pas également avec l'objectif global de l'Etat qui consiste à accélérer le processus de développement économique des régions rurales, dans la mesure où c'est le sous-traitant qui fixe les règles de ce « jeu » fermier-propriétaire.

Tous ces manquements corroborent ainsi le fait que le cadre réglementaire et juridique du secteur forestier gabonais contient encore beaucoup de points faibles tels que :

þ Le manque de mécanismes efficaces d'application directe des textes de lois énoncés par la législation forestière ;

þ Le manque de dispositions en faveur de la transparence et de la responsabilité financière des processus décisionnels forestiers ;

þ Une reglémentation forestière contradictoire à d'autres secteurs tels que l'agriculture et l'extraction minière.

Enfin, la filière bois au Gabon s'est dotée récemment d'une nouvelle structure syndicale dénommée Syndicat des Métiers du Bois du Gabon (SMBG) dont un des buts est de proposer au gouvernement, des solutions possibles pour parvenir à une meilleure présence des nationaux dans la filière bois21(*).

II.2. Contexte administratif et technique

Seuls 45% des agents (contre 47% aux services centraux) de la DGEF sont affectés aux inspections provinciales et aux cantonnements alors que c'est à eux que revient la lourde charge des opérations de terrain. La figure suivante montre les proportions entre les agents des services décentralisés et les agents des services centraux.

Figure 9 : Répartition des Agents de la DGEF en 2007

Source : MEKA (2007)

Par ailleurs, il y a un nombre limité de moyens de déplacements pour les agents sur le terrain. Dans certaines provinces telles que l'Ogooué-Lolo et l'Ogooué-Ivindo, le nombre de concessions forestières est supérieur au nombre d'agents. Ainsi chaque agent doit surveiller près de 700 km2 de concession (tableau 2). Ce qui n'est pas raisonnable pour un système de contrôle qui se veut fiable, quand on sait que le ratio retenu pour l'UICN est de un (1) agent pour 22 hectares22(*)

Tableau 2 : Aperçu des superficies gérées par agent et par province

Provinces

Superficies (km2)

Nombre d'agents

Superficie par agent

ESTUAIRE

13284

47

283

HAUT-OGOOUE

12029

31

388

MOYEN-OG

7755

28

277

NGOUNIE

15918

42

379

NYANGA

4693

25

188

OG-IVINDO

22055

36

613

OG-LOLO

20500

30

662

OG-MARITIME

2572

16

161

W-NTEM

5807

47

124

Source : MEKA(2007)

En ce qui concerne les ressources financières, le budget de la DGEF (fonctionnement et investissement) s'élevait à près de 950 millions FCFA en 2002, contre 636 millions en 2006. Ce qui est assez paradoxal pour deux principales raisons :

En effet, la DGEF a plus besoin de moyens financiers actuellement, parce que le renforcement des capacités de contrôle et l'engagement vers l'application d'une foresterie moderne nécessitent de grands investissements financiers.

Par ailleurs il est illogique que pour un secteur qui génère plus de trois cent milliards de recettes (372 exactement en 2006)23(*), les retombées nécessaires à son fonctionnement soient aussi insuffisantes.

De ce qui est de l'aspect technique, il convient de souligner que malgré le fait que le pourcentage des gabonais exerçant dans la filière bois soit élevé, la majorité des 65 unités24(*) de transformations sont à capitaux étrangers, soit un pourcentage de plus de 75%. (Annexe 4).

Les gabonais n'occupent que la seconde place avec moins de 25% et derrière les français. Le manque de moyens financiers et surtout le manque d'incitation semblent être les raisons évidentes pouvant expliquer ces chiffres.

II.3. Gouvernance forestière

Depuis 1990, la gouvernance est un concept qui s'impose de plus en plus dans les secteurs ayant trait au développement tel que le secteur forestier. Parler de gouvernance, c'est parler de pouvoir, de relations et de reddition de comptes25(*).C'est-à-dire qu'il faut arriver à savoir : qui dispose des informations clés ? Qui décide ? Qui a un pouvoir d'influence ? Comment les décisions sont-elles prises ? Qui bénéficie ? Qui perd ? Qui rend compte ?

C'est donc à partir de ce moment qu'on arrive à satisfaire aux cinq principales clés, caractéristiques d'une bonne gouvernance définies par les nations unies (tableau 3).

Tableau 3 : Clés d'une bonne gouvernance.

Principes

Principes des nations unies sur lesquels ils sont basés

Légitimité et voix

Participation, recherche du consensus

Reddition de comptes

Obligation de rendre compte au public et aux intervenants institutionnels, transparence.

Performance

Réactivité des institutions et des processus face aux intervenants, efficacité et efficience

Impartialité

Equité, Primauté du droit.

Orientation

Vision stratégique, comprenant le développement humain et les complexités historiques, culturelles et sociales

Source : DABIRE(2003)

Au niveau du Gabon, à travers la DGEF, le souci de bonne gouvernance en matière de foresterie s'est traduit en 2006 par plusieurs objectifs qu'on a évalués comme suit :

Tableau 4 : Situation des objectifs de la DGEF par rapport à ses ambitions de bonne gouvernance déclinés en 2006.

OBJECTIFS

Atteints

Non atteints

Finaliser le cadre réglementaire de l'aménagement forestier 

 

x

Mettre en application les principes de l'aménagement durable 

 

x

Tester le système d'adjudication à travers des essais pilotes 

 

x

Relancer les inventaires forestiers 

 

x

Suivre et contrôler les activités de terrain, notamment grâce à la télédétection par satellite

 

x

Appliquer et vulgariser la loi

 

x

Source : MEKA(2007)

Il n'y a pas une réelle adéquation entre ces objectifs de la DGEF, et les clés de bonne gouvernance, telles que définies par le tableau 3.

Parmi les faits actuels qui cadrent aussi avec la gouvernance, on a la certification. Au Gabon, la surface des forêts indépendamment certifiées a quasiment doublé en mars 2003. Plusieurs concessions ont ainsi été certifiées `Keurhout' au Gabon : les 575.000 ha de la concession Leroy Gabon (CFAD) et une concession de 615.000 ha gérée par le groupe Thanry-CEB puis Rougier Gabon qui vise la double certification FSC-PAFC de l'ensemble de ses concessions.

La certification permet de s'assurer que le bois vendu provient d'une forêt gérée durablement. Pour le producteur, elle peut être un outil de marketing commercial26(*).

Afin qu'elle soit efficiente, la certification nécessite :

þ Un système de traçabilité « robuste » basé sur l'utilisation de technologies appropriées, afin de pouvoir remonter jusqu'à une source légale pour les produits présentés à l'exportation ;

þ Un système de base de données unique afin de centraliser, vérifier, croiser et synthétiser les données27(*).

L'autre volet de la gestion forestière est la fiscalité. En effet, l'article 244 de la loi 16/01 prévoit dix taxes et redevances qui malheureusement ne sont pas toujours recouvertes de manière régulière et ne cadrent pas parfois avec les objectifs d'aménagement forestiers. Aujourd'hui il n'est prélevé que quatre taxe (abattage, sciage, superficie et martelage). Chaque taxe ou chaque redevance a son influence sur le comportement des acteurs de la filière bois et de surcroît sur les conditions d'exploitations. Le Gabon a su mettre sa politique fiscale en oeuvre. Par exemple :

- une redevance à la superficie relativement élevée (tel que c'est le cas actuellement, 600 FCFA /ha) incite à faire une gestion économe de l'espace et une meilleure valorisation des essences secondaires ;

- une redevance à la surface pondérée selon la distance du port (annexe 2), permet d'éviter une exploitation hyper sélective et favorise l'ouverture à l'exploitation des massifs les plus reculés.

Néanmoins, il reste la mise en oeuvre d'une taxation différenciée selon les essences, c'est-à-dire, une forte taxation pour les essences telles que l'Okoumé (Aucoumea klaineana) et l'Ozigo (Dacryodes buttnerii), puis une faible taxation pour permettre la promotion des essences secondaires. Aussi, une forte taxation à la sortie des grumes est censée décourager les exportations et favoriser une transformation locale accrue.

L'unique ambigüité qu'on puisse souligner et qui a trait à la fiscalité est la mesure selon laquelle, l'administration forestière avait décidé d'exonérer de 50% du montant de la redevance annuelle de superficie (soit 300 FCFA/ha), les entreprises ayant vu leur plan d'aménagement approuvé. En fait, une telle dérogation ne se justifie pas, sur un plan purement institutionnel parce que l'aménagement est une contrainte légale applicable à tous les concessionnaires forestiers.

CHAPITRE III

ETUDE DE CAS DE DEUX MESURES CONSERVATOIRES

III.1 Suspension provisoire d'attribution des permis au Gabon

Le décret n° 666/PR du 09 Août 2004, a fixé l'arrêt de l'attribution de nouveaux permis forestiers en république gabonaise. Ce décret qui est intervenu moins de trois ans après la promulgation de la loi 16/01, a fait suite aux engagements pris par le Gabon dans la lettre de politique de développement du secteur forestier, élaborée en 2004, en coopération avec la Banque mondiale et les autres bailleurs de fonds28(*).

En outre, le Gabon s'est fixé des priorités dans le secteur forestier parmi les lesquelles, l'aménagement forestier et l'industrialisation de la filière bois. La mise en oeuvre effective de ces options, a nécessité alors de revoir les mécanismes actuels de gestion en vue:

þ de faire un bilan des avancées de l'aménagement et de l'industrialisation de la filière bois, d'en dégager les forces et faiblesses, puis déployer de nouvelles stratégies,

þ d'établir un bilan complet des capacités des services centraux et de terrains de l'administration forestière impliqués dans l'aménagement forestier.

þ de tester les adjudications (art 2 du décret 666/PR)

III.2. Arrêt d'attribution des coupes familiales

L'arrêt d'attribution des coupes familiales en 2005 dont l'objectif s'inscrit toujours dans le droit fil de l'aménagement durable, fait suite aux nombreux manquements liés à cette catégorie de permis. En vigueur dans la loi 1/82 (ancienne réglementation forestière) et destinées uniquement aux nationaux, les coupes familiales concernaient l'attribution de cent (100) arbres sur pieds et ont été administrées par les inspections provinciales, sous couvert de la Direction Générale des Eaux et Forêts.

Mais ce mode d'attribution a montré ses limites. En effet, il s'est avéré que seuls, ceux qui ont eu les moyens (financiers et techniques) ont pu exploiter leurs permis, car le plus souvent, les populations locales n'en ont pas. Cela a entraîné la prolifération du fermage avec toutes les conséquences négatives que ce cela engendre (N'SITOU MABIALA, 2007).

Les coupes familiales n'ont pas réussi à promouvoir une classe d'entrepreneurs nationaux.

En outre, les permis de coupes familiales ont été attribués pour une durée d'un an. Mais dans la pratique, les cent (100) pieds étaient abattus au terme de quelques mois. Le reste du temps, les propriétaires de ces permis se livraient dans leur majorité à la surexploitation avec le cautionnement de l'administration forestière. Enfin, les coupes familiales n'avaient aucun effet incitatif sur la valeur ajoutée de la filière bois.

Forte de tous ces manquements, l'administration forestière a décidé en application de l'article 95 de la loi 16/01, de passer à l'attribution des permis de gré à gré (PGG) en remplacement des coupes familiales. En théorie, les PGG devraient contribuer au développement du milieu rural parce qu'ils s'intègrent dans des forêts communautaires. Les permis de gré à gré concernent l'attribution d'un maximum de cinquante (50) arbres sur pieds et ne feront pas l'objet d'adjudications. La lettre de politique de développement du secteur forestier précise par ailleurs que « les PGG remplaceront les coupes familiales en 2006 » Mais à jusqu'à lors, la mesure n'est toujours pas concrète.

III.3 Evaluation des incidences liées aux deux mesures conservatoires

Préserver les forêts par l'instauration de mesures qui sous-tendent une foresterie moderne, est une initiative encourageante. Mais le fait de ne pas penser aux conséquences liées à ces mesures peut engendrer de nombreuses incidences. C'est sans doute l'erreur qu'à commise l'administration forestière gabonaise, car n'ayant pas prévu la mise en place d'une stratégie d'ajustement provisoire.

De facto, la suspension provisoire d'attribution des permis et l'arrêt d'attribution des coupes familiales affectent la durabilité du secteur forestier par des faits tels que :

· L'exploitation forestière illégale.

En effet, les investisseurs étrangers ayant emprunté de l'argent auprès des banques et loué des moyens techniques, se sont vu refuser l'attribution de permis compte tenu du décret n°666/PR du 09/08/2004. Etant dans l'obligation de rembourser leurs créances, ces investisseurs se lancent alors dans des coupes illicites de bois. Aujourd'hui les usagers se contentent de couper illégalement le bois et de venir demander l'établissement des procès-verbaux auprès de l'administration forestière (photo 1).

Photo 1 : Grumes portant la mention PV dans un parc à bois d'Owendo

Source : Steve MAGUENDJI(2007)

Ce sont donc ces procès verbaux que les usagers vont présenter en cas de contrôle. Or le procès-verbal n'est pas un titre d'exploitation. Ce qui est plus ou moins certain, c'est que cette mauvaise pratique existera aussi longtemps que se prolongera l'actuelle période transitoire.

Les mesures conservatoires ont d'autres conséquences écologiques. En effet, elles favorisent la « contre sélection » des essences qui elle-même est tributaire d'une exploitation anarchique. La sélection se fait logiquement par DME, ce qui préserve les essences avenir pour qu'ils soient exploitables à la prochaine rotation. Or les exploitants malhonnêtes ne font généralement pas de ces DME, leur préoccupation.

En fin, le concept d'infrastructures naturelles dont font partie les services environnementaux (fonction récréative, fonction hydrique, fixation du carbone, maintien de la diversité biologique...) est tout simplement dévalorisé.

· Les incidences économiques

Il est évident que des mesures mal conçues dans un secteur aussi sensible que celui de la forêt, puissent avoir des impacts sur la croissance économique. Parmi les conséquences économiques directes, on a :

- Les pertes de recettes fiscales pour l'Etat, car ces « pseudo- exploitants » ne payent ni taxe de superficie, ni taxe d'abattage ;

- La non- participation des produits (bois) au calcul du PIB29(*).

Les conséquences économiques indirectes quant à elles, concernent les coûts du reboisement qui sont le plus souvent onéreux. Cependant, la parafiscalité (amendes) a connu une progression considérable ces dernières années. En effet, les procès-verbaux établis entre 2005 et 2007 ont largement augmentés (figure 10), par rapport à ceux établis entre 2001 et 2004.

Figure 10 : Evolution des PV de 2001 à 2007*

Source : MEKA(2007)

Avant 2004, où les usagers avaient encore la possibilité d'avoir les permis, le nombre d'infractions toutes catégories confondues était limité. Mais avec l'instauration de mesures conservatoires qui sont sensées protéger les forêts, la situation devient de plus en plus préoccupante. Les procès-verbaux relatifs à l'exploitation sans titre étant les plus nombreux avec plus de 900 observations de 2005 à 2007 soit 86%. Les procès verbaux établis en 2003, sont caractéristiques dans la mesure où leur nombre élevé a servi d'appui à la décision relative à la suspension provisoire des attributions de permis en 2004. Toutefois il est permis d'émettre un doute sur la fiabilité des données disponibles parce que n'étant pas récoltées avec toute la rigueur possible (prise en compte des volumes)

· La fracture sociale

Les populations rurales qui n'ont d'ailleurs pas été consultées, sont parmi les grandes victimes de ces mesures conservatoires. En fait les permis de gré à gré qui doivent remplacer les coupes familiales, vont s'attribuer dans des forêts communautaires. Or lesdites forêts font l'objet d'études actuellement.

En conséquence, les populations ne peuvent pas bénéficier légalement de la manne forestière qui leur revient de droit, ni par l'attribution de permis, encore moins par le fermage qui constitue leur pratique préférée. Néanmoins, l'application par l'administration forestière, des dispositions de l'article 281 du code forestier, se fait avec rigueur.

CHAPITRE IV

TENDANCES DE PRODUCTION FORESTIERE ET ALTERNATIVES POUR LES MESURES CONSERVATOIRES

IV. 1 La production de grumes au cours de ces dix dernières années

La production de grumes a évolué de manière croissante de 1998 à 2001(tableau 5), et la grande partie était destinée à l'exportation. Par ailleurs, la consommation locale qui était très négligeable jusqu'en 1999(environ 74000m3), connaît actuellement une progression considérable avec plus de 2 millions de mètres cubes en 2006, dépassant ainsi la quantité de bois exportée (1,7 millions de mètres cubes). Ces chiffres de 2006 s'expliquent non seulement par la prise des mesures conservatoires en 2004, mais surtout à cause de l'instauration des barrières non tarifaires (quotas) en 2005.

Pour toute l'année 2007 les exportations de grumes ne devraient pas atteindre 2 millions de mètres cubes, car au premier semestre, la quantité totale exportée était de 895635 m3 (SDV, Juillet, 2007). La situation idéale (plus de transformation locale et moins d'exportation), effective depuis 2006 devrait donc continuer pour qu'on espère avoir les 75% de transformation locale en 2012 tel que prévu dans l'article 227 du code forestier gabonais.

Tableau 5 : Productions de bois au Gabon de 1997 à 2006(x1000 m3)

 

ANNEES

TOTAL

MOY/AN

 

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

 

 

PRODUCTION DE GRUMES

2775

2164

2402

3300

4216

3615

3563

3500

3200

3100

31835

3183,5

EXPORTATION

2671

1764

2328

3173

2314

1928

1928

1928

1586

1769

21389

2138,9

CONSOMMATION LOCALE

105

400

74

127

1902

1687

1635

1572

1614

2028

11144

1114,4

Source : DGEF(2007)

En effet, ne peuvent exporter du bois actuellement, que des entreprises ayant des quotas, condition qui est elle-même est assujettie à la possession d'unités de transformations locale et d'une concession forestière aménagée. L'Okoumé et l'Ozigo constituent l'essentiel des volumes exploités (673069m3 en 2006). La production de bois diminue certes depuis 2001(figure 11), mais les variations de production entre années, de 2002 à 2004 sont inférieures à celles de 2004 à 2006. Or plus la variation est grande, plus la production baisse. C'est dire que les mesures conservatoires ont eu un effet sur la production de grumes.

Figure 11 : Production, Exportation et Consommation de bois au Gabon de 1997

à 2006 (x1000 m3)

Source : MEKA(2007)

IV.2. Alternatives pour une meilleure mise en oeuvre des mesures conservatoires

Bien que se voulant passives, les mesures conservatoires prises par l'Etat, n'ont été accompagnées d'aucune mesure compensatoire, pouvant permettre, non seulement la satisfaction des  usagers du secteur forestier, mais aussi la réduction des impacts négatifs dont elles sont à l'origine aujourd'hui. Le gouvernement aurait dû créer une commission multipartenaires, regroupant les différentes parties prenantes du secteur forestier, pour trouver ensemble, une solution acceptée de tous. En effet, faut-il le rappeler, le secteur forestier est très sensible et par conséquent les meilleures décisions ne peuvent être que celles prises de manière consensuelle.

C'est donc après avoir fait un état des conséquences liées aux mesures conservatoires, actuellement en vigueur dans le secteur forestier que nous proposons ces alternatives qui auraient dues être mises en place au moment même des décisions.

Pour la suspension provisoire de l'attribution de permis, l'Etat, aurait dû faire exception des coupes familiales et prendre des mesures fortes pour proscrire le fermage. Cela aurait permis aux populations locales de prendre conscience, non seulement de l'intérêt que le gouvernement accorde à l'implication véritable des nationaux, dans le développement du secteur forestier, mais également son souci de préserver les forêts. Aussi, à partir de la date de sortie du décret, il aurait fallu réduire de 50%, le nombre de pieds attribués et le temps de validité des coupes familiales. De cette manière, les habitudes (achat de 50 pieds d'arbres) se seraient installées progressivement, jusqu'à la mise en place des permis de gré à gré dont le début effectif aurait du coïncidé avec l'arrêt des coupes familiales.

En ce qui concerne les grands permis à vocation industrielle, l'Etat aurait dû prévoir beaucoup de moyens financiers, techniques et humains pour renforcer les dispositifs de contrôle sur le terrain.

Enfin, l'article 2 du décret 666/PR précise que le gouvernement testera les adjudications pendant la période transitoire. Malheureusement, au moment où le décret fut publié, le document de mise en oeuvre de ces adjudications n'était même pas encore ficelé. Aujourd'hui encore, il fait l'objet d'études (MBAGOU ,2007). Or si les adjudications commençaient aussitôt, l'exploitation illégale serait quand même maîtrisée.

IV.3.Suggestions

Actuellement le concept de foresterie moderne requiert une gestion forestière orthodoxe, basée sur une certaine transparence de la part de tous les intervenants du secteur, une réglementation cohérente et impartiale, puis des ressources humaines disponibles et suffisantes. Malheureusement, rien de tout cela n'est satisfaisant aujourd'hui, au vue de l'audit institutionnel que nous avons fait.

Ce qui est encore plus surprenant, et paradoxal, c'est le fait que le décret n°666/PR qui suspend l'attribution des permis, prévoie en son article 2 que « pendant la période de suspension provisoire d'attribution de permis forestiers, le gouvernement testera le système d'adjudications ». Cela suppose alors que les adjudications n'existeront que pendant le temps que va durer la transition. Mais la question qu'on se pose actuellement est celle de savoir combien de temps mettra la transition pour juger de l'efficacité du nouveau mode d'attribution de permis ?

Du même article 2, il ressort qu'après la période de transition on reviendra au mode classique : celui de gré à gré. Que veut réellement l'administration forestière ? Peut-on gérer une ressource naturelle à long terme, avec un cadre juridique aussi flexible ? A notre avis, non, parce que toutes les bonnes pratiques (certification, aménagement, industrialisation, gouvernance...) qui tournent autour de la foresterie ont d'abord pour support des lois biens pensées et ne souffrant d'aucune ambigüité.

Pour la question des adjudications, l'idée aurait été meilleure si elle était accompagnée de dispositions particulières en faveur des petits exploitants. Par exemple contingenter le nombre maximal de permis que peut acheter un exploitant.

Mais les adjudications sont un système qui fait fi des réalités sociales, car plus axé sur des préoccupations d'ordre économiques. L'inquiétude qu'il faudrait avoir proviendrait du fait que l'administration forestière exonère d'un certain montant, les grandes sociétés sous prétexte que leurs offres seraient meilleures.

En effet, cela a déjà été le cas avec les plans d'aménagement, dont certaines sociétés forestières ont bénéficié d'une réduction de 50% de leurs charges financière vis-à-vis de l'Etat.

Pour ce qui est de l'arrêt de l'attribution des coupes familiales, pour passer aux PGG, l'initiative est soutenable, parce que le projet de forêts communautaires dans lequel s'intègrent ces permis de gré à gré est une initiative de développement rural encourageant. Mais cela n'empêche que nous puissions nous interroger sur la longévité de ces PGG et leur efficacité à remplacer les coupes familiales, au cas où les forêts communautaires tarderaient à s'implanter sur toute l'étendue du territoire.

Ainsi les principales recommandations aux problèmes que posent l'application des mesures conservatoires aujourd'hui, sont:

þ Affecter plus de ressources (financières, humaines et matérielles) dans les inspections provinciales et cantonnement, afin de renforcer les dispositifs de contrôle et maîtriser l'exploitation forestière illégale ;

þ Mettre en place, une plate-forme d'échange et de communication pour tous les acteurs du secteur forestier ;

þ Faire des études d'impacts en prenant quelques régions comme échantillon, afin d'estimer réellement les pertes économiques engendrées ;

þ Accélérer la mise en place des forêts communautaire afin de permettre l'efficacité des PGG ;

þ Continuer l'attribution des permis, mais uniquement par adjudications.

Conclusion

Les deux mesures conservatoires évoquées dans ce document, n'ont pas eu les effets escomptés. Les résultats obtenus sont plutôt accablants et contradictoires au concept de bonne gouvernance forestière.

Les hypothèses faites en introduction ont finalement été confirmées. C'est-à-dire qu'après l'évaluation quantitative et qualitative des incidences liées aux deux mesures, il s'est avéré que ces dernières sont l'un des faits favorisant l'exploitation illégale des forêts sur toutes ses diverses formes.

L'audit institutionnel, a permis de mettre en relief des insuffisances notoires des cadres juridique, réglementaire, administratif et technique du secteur forestier gabonais. Il ressort ainsi que la réglementation est moins explicite et moins vulgarisée, il y'a des effectifs en agents de missions réduites, puis des pratiques qui découlent d'un manque de stratégies en matière forestière.

C'est dire que malgré les avancées significatives enregistrées ces dernières années dans le secteur forestier, beaucoup reste à faire pour que la gestion durable soit véritablement une réalité et non une expression vaine. La gouvernance forestière à laquelle le Gabon aspire par des moyens tels que la certification et l'aménagement des forêts reste encore très contrastée.

Les adjudications et les permis de gré de gré qui constituent les principaux faits des mesures étudiées, sont des initiatives positives pour le développement d'une foresterie moderne et communautaire, à condition qu'elles soient bien suivies et qu'elles soient pérennes.

Aujourd'hui, Il est donc plus que nécessaire de mener une étude de fond, afin de savoir quels sont les véritables apports socio-économiques des systèmes d'adjudication et de gré à gré, dans le développement du secteur forestier au Gabon ?

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5. MEF(2005). Mémorandum de politique économique et financière pour 2004-2005, 13p.

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7. PSFE(2005). Document de Programme, 56p.

8. PSFE(2005).Rapport final, 248p.

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AUTRES DOCUMENTS

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4. MEFEPEPN(2004).Présentation des textes d'application de la loi16/01 portant code forestier en république gabonaise. 105p

* 1 : DGEF(2006) Bilan du plan d'action, p 4.

* 2 : Encyclopédie numérique wikipédia

* 3 : Article 2 du décret n° 1746 du 29/12/1983

* 4 : Article 7 du décret n° 1746 du 29/12/1983

* 5 : Article 10 du décret n° 1746 du 29/12/1983

* 6 : R.NASI, S.DROUINEAU;(1999). L'aménagement forestier au Gabon : historique, bilan et perspectives, p.1

* 7 : Atlas de l'Afrique, cité par J .R NZAMBA MOMBO (2005).p 4

* 8 : R.NASI, S.DROUINEAU;(1999). L'aménagement forestier au Gabon : historique, bilan et perspectives, p.1

* 9 : PSFE, 2005, Document de Programme, p.7

* 10 : PSFE, 2005, Rapport final, p.64

* 11 : Ibid, p.64

* 12 : DGEF( 2007)

* 13 : NASI(R) et al;(1999). L'aménagement forestier au Gabon : historique, bilan et perspectives, p.9

* 14 : Ibid., p.6

* 15 : MEN(1983) cité par S.IBOUANGA-MBOUMBA

* 16 : CHRISTY(P) et al ;(2003). La forêt et la filière bois au Gabon. Libreville, MULTIPRESS-GABON, p 204

* 17 : DIARF (2007)

* 18 : GFW(2000)

* 19 : MEFEPPN(2004).Rapport de présentation des textes d'application de la loi16/01 portant code forestier en république gabonaise. p. 2

* 20 : Carte des permis forestier, 2007 (Annexe 2)

* 21 : JBO « Les PME Gabonaises à la croisée des chemins ».in :L'Union, Libreville, Sonapresse, n° 9536, 2007, p20

* 22 : PSFE(2005) ; Document de Programme, p.36

* 23 : MEFEPPN(2007) ; Note de Conjoncture Economique de la Filière bois au 31 Décembre 2006 et perspectives 2007, p.3

* 24 : DDICB(2006)

* 25 : DABIRE (2003), Note analytique sur le processus AFLEG, UICN, pp 9-13

* 26 : CHRISTY(P) et al ;(2003).La forêt et la filière bois au Gabon. Libreville, MULTIPRESS-GABON, p144

* 27 : WWF (2003), L'origine du bois : un pas vers la gestion durable des forêts, p.34

* 28 : MEF(2005) Mémorandum de politique économique et financière pour 2004-05, p.9

* 29 : POINT(2004), Approche économique des fonctions forestières non-marchandes, présentation PowerPoint, p2

*Premier trimestre 2007






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