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La participation de la femme à la vie politique au Tchad:1933-2003

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par Eugène Le-yotha Ngartebaye
Université Catholique d'Afrique Centrale - Maîtrise en Sciences Sociales option Sciences Juridiques et Politiques 2003
  

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§2 : La Conférence Nationale Souveraine : une émergence spectaculaire des femmes au devant de la scène politique.

En1990, le vocabulaire politique de l'Afrique subsaharienne en général et du Tchad en particulier s'est enrichi d'une nouvelle expression : « la Conférence Nationale Souveraine ». Elle désigne, selon Fabien Eboussi Boulaga, une instance inédite qui figurera désormais dans la nomenclature et l'histoire des institutions61(*). Ainsi les Conférences Nationales sont apparues comme la révélation d'un nouvel esprit, une fusée fulgurante, un signal lumineux que nous lançait l'avenir. Dès lors, quels furent donc la place et le rôle de la femme tchadienne dans cette Conférence Nationale ?

Une réponse à cette question nécessite un aperçu sommaire de la conférence nationale souveraine du Tchad avant d'examiner la place de la femme.

A - Un aperçu sommaire de la Conférence Nationale Souveraine (CNS)

Après la chute de la troisième république en décembre 1990, le Tchad entre dans une période de turbulences politiques et de convulsions sociales. Les nouvelles autorités pour opérer une rupture afin de jeter les bases de la nouvelle République, optèrent d'organiser d'une Conférence Nationale.

L'idée de la tenue d'une telle conférence a été émise par le président IDRISS DEBY lors de son investiture en mars 1991, quand il rendit public le calendrier devant permettre, sur une période de trente mois, l'installation définitive d'un régime démocratique au Tchad. Ce fut le décret présidentiel du 24 décembre 1991 qui nomma une commission nationale chargée de la préparation de la conférence.

Elle était composée de quatre vingt (80) membres qui, lors de leur première session le 20 janvier 1992, élirent à leur tête le Général KOTIGA GUERINA.

La commission avait pour mission de :

· recenser et arrêter les thèmes de la conférence ;

· mettre au point l'organisation matérielle ;

· fixer les conditions de participation ;

· arrêter le nombre des participants ;

· déterminer la durée de la conférence ;

· et établir le projet de règlement intérieur.

Après moult tracasseries suivies de l'intervention le 13 novembre 1992 d'une commission tripartite chargée d'organiser la Conférence Nationale Souveraine, la commission tripartite étudia le rapport final de la commission préparatoire en vue de faire des propositions d'amendement s'il y avait lieu, en tenant compte des points de vue de toutes les composantes62(*).

Le 15 janvier 1993 la Conférence a été ouverte sous la présidence provisoire de la tripartite en attendant l'élection d'un présidium. L'ouverture de cette conférence s'est faite par une mise à feu de quelques armes, (symbole d'un adieu aux armes) par le président IDRISS DEBY, secondé par l'ancien président GOUKOUNI WEDDEYE, le tout soutenu par un discours prononcé par une jeune représentante de l'association Tchad Non Violence (TNV) en présence de 1088 personnes63(*).

Les participants étaient repartis comme suivent :

· Les institutions de l'État 33.18%, soit 364 délégués ;

· Les partis politiques 21.88 %, soit 240 délégués ;

· La société civile 32,09% soit 352 délégués ;

· Tchadiens à l'étranger 2,73% soit30 délégués;

· Autres (sociétés civiles et cultes) 0,82% soit 9 délégués ;

· Autres personnalités 9,30% soit 102,11 délégués.64(*)

On nota une infime présence féminine à la conférence, il n'eut que 6,2% de femmes soit 51 femmes. Ces quelques déléguées ont été très présentes lors des séances et n'ont pas fait de la figuration65(*).

B - La femme à la Conférence Nationale Souveraine

Arrivées pour la plupart à la Conférence Nationale Souveraine comme membres des organisations de la société civile, les tchadiennes saisirent l'opportunité de la conférence pour exprimer leur maturité politique et revendiquer les droits de toutes les femmes et la place qui est la leur au sein de la classe politique.

La conférence, comme le souligne Eboussi Boulaga «  est un événement d'importance qui recèle d'étonnantes possibilités de connaissances de la réalité : elle dénude les rouages de notre histoire. Phénomène social total, elle est le lieu géométrique ou les plans et les problèmes s'entrecroisent »66(*). Ainsi, il apparaît à la conférence des clivages entre les composantes présentes aux assises. Clivage jeunes/vieux, Nord/Sud, chrétiens/musulmans, femmes/hommes.

Ce dernier clivage a été observé lors du déroulement des élections pour le présidium. En effet, après avoir pourvu les postes de président de présidium, des deux Vices-Présidents et du Rapporteur Général, il restait le poste de Rapporteur Général Adjoint à pourvoir. Une candidate, Madame Ngarmbatna Karmel représentante de l'Ordre des Pharmaciens, était annoncée. Cette candidature avait du mal à passer comme le montraient plusieurs déclarations ambiguës ou embarrassées de ses partisans et adversaires67(*), car on voyait très mal une femme élevée à une haute instance d'une conférence qui devait marquer l'histoire politique du Tchad. Elle brigua le poste sans peine en obtenant 79,20% des voix.

Le clivage homme-femme atteignit son comble quand le poste de trésorier général devait être pourvu. La candidature de Youssouf Mbodou Mbami, Chef de canton de Bol, candidat des représentants de la chefferie traditionnelle du Tchad fut annoncée. Ce poste opposa Youssouf Mbodou Mbami à une femme, Madame Kemneloum Delphine, présidente de l'Association pour la Promotion et la Défense de Droits de l'Homme (ATPDH).

Cette élection a été passionnante et amusante au plus haut degré, car elle mettait aux prises le représentant des chefs traditionnels à une femme. Elle fut considérée comme un affront ; le simple fait d'avoir cherché à briguer le poste de trésorier général contre un chef traditionnel fut considéré comme un crime de lèse majesté. Mais cet acte, de la part d'une femme participait de la volonté des femmes de se faire entendre et de briser le carcan des pesanteurs socioculturelles. Kemneloum fut malheureusement battue avec une courte avance de 13 voix.

La « glorieuse défaite » de Kemneloum au poste de trésorière générale, stimula ses consoeurs Belembouta Djeram Odile et Madame Achta Gossingar à se lancer dans la course pour le poste de trésorier général adjoint. Elles firent face à trois hommes : Adam Ngatta Koïdoum, Lobé Dillah, Abdelgader Yacine. Les deux femmes arrivèrent au second tour avant que Mme Gossingar ne soit élue avec 53,75%. On arriva au décompte final des neufs (09) membres du présidium avec deux femmes.

Cette volonté d'exprimer leur point de vue avec hargne a été observée même dans les propos de certaines déléguées. Ce fut le cas de Madame KHADIDJA TOURE qui dit : « notre pouvoir est au bout du pilon »68(*) ou encore de Madame FATIME SISSOKO qui disait à un homme « tu crois peut-être que la politique se fait dans la nuit, au niveau des testicules. Non, mon ami, ça se fait le jour et ici »69(*).

Cette détermination qui régna dans le milieu féminin lors de la tenue de la conférence permit aux femmes de s'affirmer comme de véritables actrices politiques.

* 61 EBOUSSI BOULAGA F., Les Conférences Nationales en Afrique Noire : une affaire à suivre, Paris, Kart hala, 1993, p. 7.

* 62 Pour d'amples informations se référer à BUIJTENHUIJS R., La Conférence Nationale Souveraine du Tchad : un essai d'histoire immédiate, paris, Karthala, 1993, 212 p.

* 63 Précisons que le nombre des participants à cette conférence a varié dans plusieurs documents que nous avons consultés. On avancé tantôt le chiffre 1247 tantôt 1097, le chiffre que avons gardé est celui qui figure dans FAURE P. (Sous DIR) La société civile, N'Djaména, CEFOD, 1995 p41.

* 64 FAURE P. op. cit. p...

* 65 BUIJTENHUIJS R.op cit p.

* 66 EBOUSSI BOULAGA F., op. cit. pp. 9-10.

* 67 BUIJTENHUIJS R. Op cit p. 81.

* 68. BUIJTENHUIJS R, op cit p. 81

* 69 BUYTENHUIJS. ibidem

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus