WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Auxiliaires médicaux et médecins africiains au Togo sous domination coloniale: 1884-1960

( Télécharger le fichier original )
par Zinse Emmanuel MAWUNOU
Université de Lomé - Maitrise 2006
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

UNIVERSITE DE LOME ANNEE UNIVERSITAIRE

Lomé- TOGO 2006 - 2007

FACULTE DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

DEPARTEMENT D'HISTOIRE ET D'ARCHEOLOGIE

MEMOIRE POUR L'OBTENTION DE LA MAITRISE ES-LETTRE

Option : HISTOIRE COMTEMPORAINE

THEME :

AUXILIAIRES MEDICAUX ET MEDECINS

AFRICAINS AU TOGO SOUS DOMINATION COLONIALE : 1884- 1960

PRESENTE PAR : DIRIGE PAR :

MAWUNOU Zinsê ASSIMA-KPATCHA Essoham

Maître - Assistant en

Histoire contemporaine

INTRODUCTION GENERIALE

«Il vaut mieux,prenant la vérité pour guide, attendre sa récompense de la postérité que de nous livrer à la flatterie pour plaire à nos contemporains.Telle est la règle,tel est le fil à plomb d'une HISTOIRE bien écrite.»

LUCIEN de Samosate.

Partout dans le monde où la colonisation a eu à s'affirmer, les Européens avaient non seulement exploité les colonies mais aussi les forces de production dans le but d'accroître leur profit (Sarraut 1923 : 94).

Cette logique n'épargne pas les colonies européennes d'Afrique et même le territoire qui, en 1884, deviendra TOGO en était victime. Entretenir les forces productrices c'est-à-dire la main-d'oeuvre sous-entend la présence d'agents capables, ou ayant du moins les notions élémentaires pouvant encadrer et apporter aux colonisés les moindres satisfactions en cas de maladies ou accidents. C'est ainsi que les Togolais avaient « bénéficié de la médecine moderne » selon les termes de Tolgou (1998 :32).

Toutefois, comme nous le disons plus haut, « l'enseignement et la santé sont deux services qu'on peut qualifier de sociaux même si dans la réalité leurs actions étaient orientées de sorte qu'elles profitent aux colonisateurs. Ils furent mis en oeuvre dans le but de soigner les autochtones pour accroître les potentialités en main-d'oeuvre et de les former pour qu'ils travaillent dans le sens des intérêts coloniaux. » (Assima-Kpatcha 2004 :142).

Les débuts de la médecine moderne au Togo étaient d'abord assurés par les Allemands. Mais « quand début août 1914, éclate la guerre, [......] les Allemands, assaillis de toutes parts, [......] doivent capituler dès 26 août, et les vainqueurs se partagent    "provisoirement" le territoire occupé. » (Marguerat 1992 :26). C'est ainsi que les Allemands quittèrent le Togo laissant celui - ci aux Français et aux Anglais selon leur zone.

En effet, la médecine telle qu'elle est connue de nos jours n'est que le fruit, sinon le prolongement de ce qui a été mis sur pied depuis l'époque allemande et poursuivi par les Français. Tout au long de ce travail, il sera démontré comment s'était constitué ce corps de métier, d'abord sous les Allemands puis consolidé et renforcé par les Français (Gayibor 2005 : 289 t2). D'autre part on verra dans quelle mesure l'état de guerre favorisa l'émergence d'une nouvelle catégorie socioprofessionnelle de médecins autochtones.

La période sur laquelle porte l'étude de ce thème est de son côté bien significative. En effet, l'année 1884 est celle qui, à la date du 5 juillet, vit la naissance du Togo comme entité territoriale. En d'autres termes, c'est à partir de cette date que la colonisation allemande, qui avait tout organisé pour la mise en exploitation du Togo, commerça (Napo 1996).

En ce qui concerne l'année 1960, elle est l'année à laquelle le Togo accéda à la souveraineté internationale. Elle correspond au fait à l'année à partir de laquelle les Togolais avaient rejeté le joug colonial, s'affirmant ainsi et prendre en main la destinée de leur pays. En vertu de toutes ces considérations, notre thème « AUXILIAIRES MEDICAUX ET MEDECINS AFRICAINS AU TOGO SOUS DOMINATION COLONIALE : 1884--1960 » garde toute sa raison d'être.

Aussi, certaines raisons confèrent à notre thème son originalité. D'abord c'est un sujet qui n'est pas encore suffisamment étudié quand bien même Alonou (1994) a fait une thèse sur la politique sanitaire de la France au Togo. Aussi, certains enseignants du département d'Histoire, certains étudiants en Histoire avaient-ils eux aussi produit des thèses, des mémoires et des articles toujours dans le domaine de la santé. Mais tous ne se sont intéressés pour l'essentiel qu'aux actions d'organisation et de mise en oeuvre de l'action sanitaire.

Or ce n'est pas cet aspect qui est la préoccupation de ce travail. Ici on s'intéressera essentiellement à l'histoire d'un corps de métier c'est-à-dire insérer cette recherche dans l'histoire du travail.

Quand à l'intérêt du sujet, soulignons avant tout qu'il tient à apporter sa contribution à l'écriture de l'histoire du Togo dans sa globalité. Il est aussi intéressant dans la mesure où, embrassant toute la période coloniale, il fera ressortir les nuances qui minaient les différentes administrations qui dirigèrent le Togo pendant cette période coloniale. Ensuite, ce thème nous paraît important à travers la portée de sa problématique.

Toute l'époque coloniale, quelque soit le colonisateur (Allemand ou Français) fut organisée de sorte à tirer le maximum de profit du territoire colonisé. Cette idée suppose l'entretien de la main-d'oeuvre par des agents susceptibles d'assurer cette tâche. En fonction de cette réalité, quel a été le processus de formation de la catégorie socioprofessionnelle des auxiliaires médicaux et des médecins africains au Togo pendant la période coloniale de 1884 à 1960 ?

Bien répondre à cette question principale ci-dessus posée nous conduit évidemment à la subdiviser en éléments pouvant aborder tous ses aspects.

Tout d'abord il est sans aucun doute admis que la médecine existait bien au Togo sous une forme traditionnelle avant l'arrivée des Européens (Gayibor 2005 : 289t2). Dans cette logique, comment avait commencé à se former cette catégorie socioprofessionnelle sous la période allemande de 1884 à 1914 ?

Ensuite, il est important de souligner qu'en 1914, le Togo a été surpris dans son développement par la première guerre mondiale qui bouleversa toutes les institutions allemandes. Alors, en quoi l'état de guerre a - t - il entravé l'émergence d'une véritable catégorie d'auxiliaires médicaux et de médecins africains de 1914 à 1922 ?

Enfin à partir de 1922 la partie orientale du Togo a été confiée à la France après le départ des Allemands en 1914 ; ainsi continuèrent-ils l'oeuvre sociale mise en place par leurs prédécesseurs. Alors, comment s'est renforcée puis consolidée cette catégorie socioprofessionnelle au temps de la colonisation française de 1922 à 1960 ?

A travers cette problématique structurée, nous comptons atteindre certains objectifs tout en émettant certaines hypothèses.

D'abord, nous tenons à faire ressortir la nécessité d'un tel corps pour la colonisation allemande puis française. De même on étudiera dans quelle mesure la colonisation avait eu d'impacts sur ces premiers agents de santé et durant la période d'occupation du Togo. Ce travail nous permettra également de dégager l'influence qu'avaient eu les différents statuts du Togo (mandat puis tutelle) sur l'évolution de ce corps de métier.

Ensuite, plusieurs hypothèses ont guidé nos recherches. Nous sommes parti du principe selon lequel la colonisation était une machine bien organisée, et cela pour une bonne cause qui est de faire profiter au maximum la métropole. Dire alors dans cette logique que la main-d'oeuvre est entretenue pour développer le territoire est inadmissible : le vrai but poursuivit est ailleurs. Enfin, développer le Togo suppose offrir aux Togolais une condition de vie,ou un niveau de vie acceptable : ce qui n'est pas le cas pour la plupart des Togolais qui avaient travaillé aux côtés des Européens comme agents de santé car leur formation et même leur rémunération laissent à désirer. Notre thème peut enfin être bien cerné à travers la compréhension de ces concepts et surtout leurs sens que nous leur attribuons.

Intitulé « AUXILIAIRES MEDICAUX ET MEDECINS AFRICAINS AU TOGO SOUS DOMINATION COLONIALE : 1884-1960 », notre sujet renferme beaucoup de concepts que nous nous sommes évertué à définir. Au fur et à mesure que nous les définirons, ces concepts seront regroupés afin de donner à notre thème son orientation ou bien sa compréhension que nous lui avions voulu.

Le mot « auxiliaire » selon le Petit Robert 1 et le Larousse du XXème siècle Tome 1 est définit comme quelqu'un ou quelque chose qui aide par son concours ; il est aussi défini comme une personne qui aide en apportant son concours ; qui est recruté à titre provisoire par l'administration. Toujours dans le Petit Robert 1 le mot « médical » veut dire quelque chose qui guérit alors que dans le Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française ce mot désigne tout ce qui concerne la médecine ; on parle alors du monde ou du corps médical pour désigner l'ensemble des médecins.

Ainsi, parler d'auxiliaires médicaux dans le sens de notre travail revient à comprendre ces mots comme un groupe de personnes qui apportent leur aide à un autre groupe. Leur rôle est d'aider un groupe techniquement plus fort et plus avancé qu'eux. Ils peuvent seulement être initiés aux règles élémentaires de soins primaires, formation qui puisse leur permettre de pouvoir assurer leur rôle d'auxiliaire.

Quant au mot « médecin » le Petit Robert 1 le définit comme une personne habilitée à exercée la médecine après obtention d'un diplôme sanctionnant une période déterminée d'études et le Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française dit de son côté que c'est une personne qui exerce la médecine et qui est titulaire d'un diplôme de docteur en médecine.

« Africain » selon le Larousse du XXème siècle est définit comme une personne qui habite l'Afrique, qui est de l'Afrique ou appartient à l'Afrique et au Petit Robert 1 de le définir comme quelqu'un qui est spécialement de l'Afrique Noire. Donc médecin africain est avant tout un noir africain qui a acquis une certaine formation en médecine lui permettant d'exercer ce métier. Par rapport aux auxiliaires médicaux, ces médecins ont un diplôme d'étude ou un doctorat en médecine ; ce qui leur confère une certaine qualité professionnelle. Tout au long de notre travail cette expression désignera ceux qui ont un niveau d'étude acceptable leur permettant d'évoluer dans une carrière médicale.

Donc, même si auxiliaires médicaux et médecins africains sont tous des agents de santé, ils sont tout de même différenciés par leur formation et leur degré d'évolution. Les premiers sont « formés » seulement de pouvoir intervenir dans une circonstance spéciale et très limitée alors que les seconds sont formés et même spécialisés dans divers domaines de la médecine, mais tous ont travaillé sous domination coloniale ; expression qui, selon Encyclopédique Universalis, désigne la période pendant laquelle le territoire togolais était souverainement commandé par un autre pays : d'abord l'Allemagne puis la France.

Tout compte fait et d'une manière générale, ce travail comporte trois grandes parties conformément à la problématique définie.

La première partie s'évertuera à analyser le processus de formation de la catégorie socioprofessionnelle sous la période coloniale allemande de 1884 à 1914. Ainsi, cette partie est sectionnée en deux sous parties (chapitres) dont la première fera l'état des lieux avant 1884. Ici, nous verront comment la société « togolaise » précoloniale, à travers ceux que nous appellerons les guérisseurs traditionnels, arrivait à guérir et même radier de son sein certaines maladies. Enfin, la deuxième sous partie se consacrera à l'intrusion coloniale allemande et à l'émergence d'un personnel médical autochtone de 1884 à 1914. Cette partie fera ressortir les débuts de la médecine moderne au Togo sous les Allemands avec l'aide des premiers agents de santé que nous nommons les auxiliaires médicaux.

La deuxième partie de son côté se donnera pour tâche d'étudier les auxiliaires médicaux au Togo sous occupation anglo-française sur la période de 1914-1922. Elle sera également sectionnée en deux sous parties dont la première nous éclairera sur les entraves aux activités médicales : de la guerre de 1914-1918 à l'occupation du Togo allemand. Cette section approfondira les effets de la guerre sur les activités médicales et l'état des auxiliaires médicaux pendant la période d'occupation. La deuxième sous partie parlera de l'émergence d'un véritable personnel médical autochtone au Togo de 1920 à 1922. Elle abordera les moyens mis en oeuvre pour essayer de trouver une approche de solution au problème de personnel sanitaire créé par la guerre.

La dernière partie de ce travail s'attachera au renforcement et à la consolidation du corps des auxiliaires médicaux et des médecins africains au temps des Français de 1922 à 1960. Comme toutes les autres parties elle comprend aussi deux sous parties. La première examinera les auxiliaires médicaux et les médecins africains au Togo au temps du mandat c'est - à - dire de 1922 à 1946 et la seconde de 1946 à 1960, ce qui correspond à la période de la tutelle. Mais avant de revenir en détail sur toutes ces parties, voyons ce qu'est le contenu da la première partie.

PREMIERE PARTIE

L'EMERGENCE D'UN EMBRYON D'AUXILIAIRES MEDICAUX AU TOGO SOUS LA COLONISATION ALLEMANDE : 1884-1914.

La vie passe d'abord par la santé, dit-on. Cette santé avait pendant longtemps été la préoccupation de la population togolaise pendant les temps immémoriaux ; cela par le biais des certains éléments de cette même population. C'est dire que le traitement des maux dont souffrent les Togolais n'est pas d'actualité ; elle avait une source très lointaine dans l'histoire avant même que le contact entre Européens et Togolais ne soit noué. Même après qu'il y eût ce contact, ce traitement avait continué sous d'autres formes. Ainsi, comment avait commencé à se former cette catégorie socioprofessionnelle des auxiliaires médicaux, allemande de 1884 à 1914 ?

La réponse à cette question s'appréhende en deux volets. D'abord, nous ferons l'état des lieux avant 1884, période au cours de laquelle ce furent ceux que nous appellerons « les maîtres de la médecine traditionnelle » qui étaient les principaux agents qui s'occupaient de la santé de leurs frères. Ensuite, à partir de 1884, l'arrivée des Allemands donna un nouveau ton à l'action médicale. Mais avant de venir en détail sur les Allemands et leur oeuvre sanitaire au Togo, comment les « Togolais » s'en prenaient dans la société précoloniale ?

CHAPITRE PREMIER : Les guérisseurs traditionnels togolais avant 1884

Un fait est très important à souligner dans cette partie : avant 1884 on ne peut pas évoquer le nom TOGOLAIS puisque le TOGO n'existait pas avant cette date. Utiliser ce terme avant cette année relève par conséquent d'un pur par anachronisme que nous sommes pourtant obligé d'accepter pour la commodité de ce travail (Gayibor 2002 : 7).

Dans cette société togolaise, les maladies, malédictions, mauvais sorts et autres trouvaient leurs traitements. Qui étaient alors ceux-là qui détenaient cette médecine dite traditionnelle et comment arrivaient-ils à ces fins ?

1 - Les maîtres de la médecine traditionnelle

Les populations africaines et précisément togolaises n'avaient pas attendu l'arrivée des Européens pour se soigner. Chaque communauté, chaque village, même les coins les plus enclavés avaient des guérisseurs et des féticheurs qu'on appelle généralement les médecins traditionnels. Leur pratique médicale est ce que nous appelons «la médecine traditionnelle ».

La médecine traditionnelle est l'ensemble de toutes les connaissances pratiques explicables ou non, pour diagnostiquer, prévenir ou éliminer un déséquilibre mental ou social en s'appuyant exclusivement sur l'expérience vécue et l'observation transmise de génération en génération oralement ou par écrit (Alonou 1994 : 41).

Le guérisseur traditionnel est une personne reconnue par la collectivité dans laquelle il vit comme compétente pour dispenser les soins de santé, grâce à l'emploi des substances végétales, animales et minérales et autres méthodes basées sur le fondement socioculturel et religieux aussi bien que sur les connaissances, comportements et croyances liés au bien-être physique, mental et social ainsi qu'à l'étiologie des maladies et invalidités prévalant dans la collectivité (Alonou 1994 : 9)

.

Ainsi donc, la société traditionnelle togolaise disposait d'un éventail très large de guérisseurs comme nous le démontrerons à travers quelques éléments.

1-1- Le sorcier

Il est le détenteur incontesté de tous les pouvoirs maléfiques, le jeteur de sorts. Il passe dans la catégorie des guérisseurs parce qu'il est capable de détruire ses propres sorts et ceux de ses autres confrères sorciers moyennant un tribut.

Habituellement, on reconnaît deux catégories principales de sorciers pour l'ensemble du territoire : ceux de bonne foi et ceux mal intentionnés.

Seuls les premiers nous intéressent dans la mesure où, dans certains cas ils combattaient les seconds.

1-2- Le féticheur ou prêtre

Le féticheur est avant tout prêtre d'une divinité. Il est l'ennemi principal des sorciers mal intentionnés en fonction de son rôle social que nous verrons plus loin. Il passe aussi pour un excellent guérisseur quand ses connaissances et sa sagesse lui en offrent le talent. Il peut être à la fois prêtre, sorcier de bonne foi, devin et guérisseur plus ou moins renommé.

1-3- Le devin

Il porte aussi l'appellation de voyant. Il existait dans toutes les collectivités traditionnelles du Togo. Il y en avait de plusieurs catégories avec des techniques variées.

2 - Leurs rôles sociaux

Les guérisseurs traditionnels dont nous venons de faire l'inventaire jouaient différents rôles dans leurs collectivités et cela leur attribuait un véritable prestige social.

2-1- Les moyens d'intervention

Les guérisseurs traditionnels sauvaient la vie des patients par les vertus des plantes ; ce qui faisait qu'ils étaient de grands botanistes.

Dans leurs interventions, ils faisaient également usage des pouvoirs spirituels pour décanter et savoir les origines des maladies et comment les guérir.

Le prêtre de son côté est le protecteur de sa communauté ; il est le bouclier de son entourage.

Quant au devin il s'appliquait, grâce à ses pouvoirs mystiques, à la recherche des causes de la maladie et dans certains cas même de la mort. Il rendait les oracles et faisait souvent des prescriptions en indiquant les remèdes ou les sacrifices spécifiques dans la composition desquelles entrant toujours les plantes.

2-2- Leur prestige social

Aux yeux de leurs populations, les guérisseurs traditionnels avaient un prestige sans partage.

En effet, étant considérés comme dignitaires et représentants des divinités locales, les différentes communautés dans lesquelles ils étaient les élevaient au sommet du mysticisme dans la sphère de leur localité.

Certains mêmes dépassaient leur environnement social et avaient une influence régionale. Sur cet aspect, voici ce que nous a confié AKLOBESSI1(*) : «  Les « Bokonon » et les « Hounon » étaient et demeurent pour nous ce que peut être un parapluie pour celui qui est pris par un orage. Ils nous protègent et nous délivrent des attaques étrangères (...). Certains mêmes voyagent très loin pour chercher des solutions à leurs problèmes auprès des guérisseurs renommés ».

Il est à souligner que le prestige de ces guérisseurs relève de deux éléments que nous tenons ici à évoquer.

D'abord ils étaient ceux qui étaient à même de sauver une personne d'un mauvais sort qui lui avait été jeté ; et parfois tout un village est « couvert » et « sauvé » ainsi par les sorciers bienfaiteurs. Peut-être en guise de reconnaissance, de témoignage de respect pour eux ils avaient petit à petit acquis une considération qui se métamorphosa en une grande valeur qu'est le prestige qu'ils avaient

.

Ensuite, ce prestige proviendrait aussi sans aucun doute de leur aptitude à rentrer en contact avec les esprits et recevoir de ces derniers consignes et des recommandations pour la masse populaire. Ainsi, leur niveau de mysticisme était un véritable élément qui caractérise leur considération et leur rang social.

C'était de cette manière que dans la société traditionnelle togolaise les maladies étaient éliminées, cela bien entendu par le savoir-faire d'une frange de la société qui en avait la vertu : ainsi avaient-ils toute la considération que cela exigeait.

Toutefois, cette valeur qu'avaient les guérisseurs traditionnels avait été secouée par l'intrusion coloniale allemande à partir de 1884.

CHAPITRE DEUXIEME : L'intrusion coloniale allemande et l'émergence d'un personnel médical autochtone : 1884-1914.

La colonisation allemande sur le Togo débuta le 4 juillet 1884 avec la signature du traité de protectorat entre Nachtigal et le roi Mlapa III de Togoville à Baguida (Alonou 1994 :15) traité qui sanctionna la naissance de la colonie allemande avec la présence effective des Allemands qui entreprirent plusieurs travaux notamment dans le domaine social où un programme d'équipement sanitaire et d'éradication des épidémies a été mis sur pied.

Cette entreprise nécessita sans doute des agents pour concrétiser cette ambition. Alors, comment à partir de quelques médecins allemands y avait-il eu émergence d'un personnel autochtone et quelles furent les activités de ce personnel médical sous les Allemands ?

1- L'implantation de la médecine moderne coloniale au Togo par les

Allemands

L'implantation de la médecine moderne au Togo avait été un processus élaboré par les médecins allemands. En effet, les premiers Allemands en s'installant au Togo avaient introduit la médecine moderne pas pour soigner les indigènes mais les Européens et leurs collaborateurs autochtones (Tolgou 1998 : 32) qui sont les soldats, les cuisiniers, les boys et les employés des commerçants européens. Ce n'était que par après, lorsque l'administration a eu besoin des forces indigènes qu'elle avait étendu les soins aux autres couches sociales seulement dans le but d'accroître la productivité. Quoi qu'on en dise, cette entreprise avait donc besoin de personnel sanitaire dont les pionniers furent les médecins allemands.

1-1- Le personnel de santé allemand

Le premier médecin allemand à s'installer au Togo était le docteur August WICKE qui y arriva le 7 janvier 1888 (Tolgou 1998 ; 32), ce qui laisse entrevoir que l'assistance médicale n'était présente qu'à partir de cette année.

C'est d'ailleurs sous ce médecin que fut ouvert, en 1894, le premier hôpital togolais baptisé hôpital Nachtigal à Aného (Gayibor 2005 : 573t1). Mentionnons ici qu'à part WICKE le Togo utilisa les services d'autres médecins parmi lesquels on peut citer :

* le docteur WOLF plus connu comme explorateur et missionnaire.

* les docteurs SCHILLING et ENGELHARDT qui ont travaillé sur la maladie du sommeil.

* le docteur SCHMIDTS qui était spécialiste de la variole.

Ces docteurs ci-dessus mentionnés avaient passé un temps relativement long au Togo dans l'exercice de leur fonction. D'autres par contre y avaient passé un temps encore plus court. Parmi ces derniers, y figurent les docteurs KRUEGER, ZUPITA, von RAVEN, von der HELLEN et le docteur RODENWALDT (Alonou 1994 : 17).

D'une manière générale, le corps des médecins allemands peut être scindé en différents groupes :

* les médecins civils ou militaires d'origine allemande détachés du service colonial et travaillant sous la seule direction du gouverneur du territoire. Ils étaient tous des médecins généralistes et leur séjour au Togo leur permettait d'acquérir des expériences dans leur domaine de spécialisation.

* les membres de groupements telle que l'association des infirmières allemandes de la Croix-Rouge ou aussi des groupements du « Deutsche Frauen Verein » qui assuraient bénévolement certains services médicaux, surtout l'oeuvre du berceau (Alonou 1994 :17 ; Tolgou 1998 : 32).

Ainsi en 30 ans le Togo a bénéficié du service de 31 médecins. Toutefois, de tout ce que nous venons de parler une ambiguïté subsiste : comment expliquer la présence de médecins allemands déjà à ce début de la période coloniale ?

Après analyse, il ressort que les premiers soucis des médecins colons étaient d'améliorer leur connaissance en médecine et surtout de protéger les leurs contre les maladies. Ils devaient alors s'intéresser à la santé des indigènes, c'est-à-dire s'en servir comme un cobaye pour faire progresser la science.

A côté de cette motivation, il faut ajouter la volonté des colons d'augmenter l'espérance de vie des indigènes afin de bénéficier de leurs taxes civiques et de la main-d'oeuvre qu'ils constituaient. Donc ces médecins colons, dans la logique de ces idées, n'avaient pas introduit la médecine au Togo pour le bien de la population mais pour faire le maximum de profit à la métropole. Ce constat est d'ailleurs bien souligné par Jean Martet (1933 : 20)2(*) « Une bonne colonie qui produira et qui durera est une colonie où le matériel humain est amené à son maximum de rendement physique et intellectuel. Le devoir de la puissance colonisatrice est le même, qu'on le considère du point de vue de l'idéal ou du point de vue de l'intérêt. Il faut que l'indigène de porte bien, qu'il conserve sa santé et ses forces le plus longtemps possible, qu'il fonde une famille, que ses enfants vivent, se développent : voilà ce que nous enseigne l'intérêt ». Voilà alors les idées forces de l'implantation de la médecine moderne dans les colonies ; ce qui n'avait pas épargné le Togo.

Mais ces médecins colons, en nombretres limité et ne comprenant pas la langue des autochtones, devaient faire recours aux indigènes qui manipulaient un peu leur langue : c'est ainsi qu'était née l'idée de la profession infirmière autochtone au To

1-2- L'ébauche d'un personnel autochtone

L'administration coloniale allemande avait eu besoin d'un personnel local non seulement pour résoudre le problème de communication, mais également d'arriver à pénétrer les différentes composantes de la population et aussi d'inspirer auprès de leurs frères noirs la confiance dans cette médecine moderne.

En effet, l'implantation de cette médecine n'à pas été chose aisée dans la mesure où la médecine traditionnelle avait déjà eu la confiance des autochtones avec, avions-nous déjà mentionné, une large connaissance en botanique des charlatans et guérisseurs.

Malgré tout, les colons allemands ont réussi à introduire et imposer la médecine moderne. Notons tout de même que cette action s'est pendant longtemps limitée dans le Sud car dans le Nord le caractère frustre des populations limitait l'action du médecin aux tournées de vaccinations (Cornevin 1987 : 217). Ainsi donc dans le Sud, quelques notions en médecine moderne étaient enseignées aux indigènes ayant un niveau d'instruction peu élevé et une formation rudimentaire. Mais d'abord, voyons comment étaient le recrutement et la condition d'admission des futurs auxiliaires médicaux.

1-2-1- Le recrutement et la condition d'admission

Le recrutement se faisait exclusivement par le gouvernement colonial allemand sur demande du médecin général résidant au Togo. Peuvent être recrutés les élèves ayant le niveau sixième dans les écoles officielles de Zébé et de Lomé3(*).

1-2-2- La formation professionnelle

La formation des indigènes à la médecine moderne était très rudimentaire. D'ailleurs, aucun programme de formation n'existait si bien que la formation se réduisant à la pratique ; une pratique elle aussi très limitée.

En effet, c'était une formation qui, très hâtive, se faisait sur le tas et auprès d'un médecin allemand4(*).Celui-ci devait enseigner aux futurs auxiliaires médicaux certains gestes médicaux tels que les pansements, les frictions, les installations de collyre dans les yeux, les injections et autres soins médicaux.

La formation proprement dite durait de six à neuf mois à l'issue de laquelle le titre de Heilgehilfen (aide chirurgien ou aide médecin) leur était décerné. Ces infirmiers, malgré leurs formations qualitativement insuffisantes, avaient acquis des expériences au fils des années dans l'exercice de leur fonction ; c'est ce qui leur a valu la qualification de médecin auxiliaire (Tolgou 1998 : 33).

En 30 ans les colons allemands ont formé 28 infirmiers dont 21 polyvalents, 5 spécialisés dans la maladie du sommeil et 2 spécialisés en vaccination comme l'indique le tableau suivant :

Tableau N° I : Nombre d'infirmiers en fonction de leur spécialité et de leur année d'engagement

Années

Nombre d'infirmiers polyvalents

Nombre d'infirmiers spécialistes en vaccination

Nombre d'infirmiers spécialistes dans la maladie du sommeil

1894

01

00

00

1899

02

00

00

1906

02

00

00

1907

06

00

00

1908

02

00

00

1909

01

00

00

1910

06

01

01

1911

01

00

01

1912

00

01

00

1914

00

00

03

TOTAL

21

02

05

Source : Tolgou 1998 : 34

D'après les données contenues dans ce tableau, le nombre d'infirmiers polyvalents fait à lui seul 75,00 % des infirmiers formés par les médecins allemands. Il était dit plus haut que les auxiliaires étaient formés auprès d'un médecin allemand ; donc ce pourcentage de polyvalence des infirmiers formés confirme l'idée selon laquelle les médecins allemands étaient tous les médecins généralistes et que c'était leur séjour au Togo qui leur permettait d'acquérir des expériences dans leur domaine de spécialisation. Cette spécialisation n'étant pas poussée, on comprend aisément pourquoi les infirmiers spécialistes en vaccination et dans la maladie du sommeil sont en pourcentages très réduits respectivement 7,41% et 17,85%.

En plus de ces auxiliaires médicaux, les inspecteurs sanitaires aussi étaient recrutés. Leur recrutement se faisait de la même façon que les infirmiers, mais ils ne recevaient aucune formation particulière en matière de santé. Ils étaient seulement chargés de transmettre aux indigènes le message des médecins portant sur les notions élémentaires d'hygiène dans les habitations. Au total 27 inspecteurs sanitaires ont été recrutés par les Allemands.

De tout ce que nous venons de dire sur la formation donnée aux indigènes en matière de santé, une inquiétude subiste : quelle analyse pouvons-nous faire de cette formations donnée aux indigènes ?

La réponse à cette interrogation revêt deux interprétations.

D'abord nous pouvons supposer que si cette formation si rudimentaire est donnée, cela peut être dû au manque de structures pouvant permettre une formation quantitative et qualitative. Le personnel médical allemand fut certes de l'ensemble de qualité (Cornevin 1987 : 217) mais la qualité de la formation relèverait de l'absence d'infrastructures adéquates.

Ensuite, cette mauvaise qualité de la formation pouvait résulter de la volonté des Allemands de former les indigènes à un niveau inférieur, de les réduire à un état de serviteurs. Sinon, comment expliquer que pendant les trente (30) années de leur présence au Togo les Allemands n'aient formé que 55 agents de santé (infirmiers et inspecteurs sanitaires) et parmi eux aucun n'avait accédé au diplôme d'Etat ni bénéficié d'une formation supplémentaire en Allemagne ?

Après analyse de ces deux hypothèses, la seconde nous paraît plus fondée dans la mesure où les Allemands ne manquaient pas de possibilité d'envoyer les Togolais en Allemagne afin de suivre des études en médecine ou compléter celles qu'ils ont reçues au Togo. Un exemple frappant de cette période était le cas de Pedro OLYMPIO. En effet, ce dernier était envoyé en Allemagne (non pas par les colons allemands) suivre des études en médecine.5(*) Les auxiliaires médicaux togolais ainsi formés l'étaient pour travailler aux côtés des médecins allemands. Alors, comment avaient-ils exercé cette profession sous les Allemands ?

2 - Les auxiliaires médicaux sous les Allemands

La santé a été l'une des tâches prioritaires de l'administration allemande au Togo (Dadja 1983 : 263). Pourtant, les Allemands ont eu la difficile charge d'amener les indigènes à la pratique médicale des Blancs, tâche délicate du fait que les guérisseurs et les charlatans avaient « pignon sur rue » et avaient parfois des connaissances en botanique (Cornevin 1987 : 217). Ce qui présage que les actions des auxiliaires médicaux n'étaient pas chose aisée. Mais avant d'en arriver là, voyons si ce corps socioprofessionnel avait une législation.

2-1- Le régime législatif du personnel des auxiliaires médicaux et les salaires

Le corps des auxiliaires autochtones avait connu un début un peu difficile. Concernant la législation, ce corps n'était qu'un résidu issu du besoin du colon allemand présent sur place. C'était d'ailleurs sur proposition du médecin général résidant au Togo que se faisait le recrutement des futurs auxiliaires médicaux.

Dans ces conditions, et surtout que la colonisation était à ses débuts pour l'Allemagne qui s'était lancé dans cette aventure très tard, aucun texte juridique ne réglementait la profession des auxiliaires médicaux.6(*) Ce qui veut dire que tout se réduisait à la volonté du médecin général.

Cette latitude qu'avait le médecin général avait des répercussions sur les salaires des agents de santé autochtones. En ce qui concerne le travail salarié, il avait beaucoup souffert sous l'administration allemande.

N'ayant pas pu l'éliminer car existant bien avant leur arrivée, les Allemands avaient du mois déformé de façon considérable le salaire en le fixant à son niveau le plus bas (Gayibor 2005 : 233t2).

Toutefois, on pouvait remarquer qu'il y avait eu une politique d'augmentation de salaire sous l'administration allemande. Cette augmentation dépendait entre autre de l'ancienneté dans la profession, de la qualité des services rendus par l'agent de santé. Ces critères étaient importants dans la définition de la hiérarchie.

2-2- La hiérarchie des auxiliaires médicaux

La hiérarchie des auxiliaires médicaux, avons-nous dit, était définie par rapport à leur ancienneté dans cette profession ; ce qui veut dire que les auxiliaires médicaux d'une promotion sont, selon la hiérarchie, supérieurs à ceux qui les suivront et ainsi de suite.

Mis à part cette façon de définir la hiérarchie, certains agents qui montraient du zèle dans les travaux, et par là avaient acquis la considération et la confiance du Blanc étaient promus parmi leurs promotionnaires.

De toute façon les auxiliaires médicaux avaient exercé des activités très considérables sous l'administration allemande.

2-3- Les actions les auxiliaires médicaux

Les auxiliaires médicaux avaient eu différentes activités sous l'administration allemande. Malgré la formation très insuffisante qu'ils recevaient, leurs prestations furent remarquables.

On les retrouvait dans les villages, même les plus isolés, en poste ou en tournée de vaccination. Le fait qu'ils arrivaient, par leurs soins gratuits, à soulager certains malades leur valait beaucoup de considération et de respect (Gayibor 2005 : 289t2).

Très souvent les tournées se faisaient en compagnie de leurs supérieurs blancs dans les localités et régions de l'intérieur pour procéder aux vaccinations. C'était lors des épidémies de variole, de peste et parfois même de paludisme que s'organisaient ces genres de tournées au cours desquelles les Allemands profitaient pour faire des recensements et contrôler les mouvements migratoires dans les régions.

Toutefois, des difficultés étaient enregistrées au cours des travaux. Elles s'illustraient par le caractère de méfiance qu'avaient les populations envers les agents de santé.

La raison en était que beaucoup de personnes tombaient malade et parfois même mourraient malgré les tournées de vaccination. Par exemple, après une tournée de vaccination contre la variole, les populations étaient parvenues à la conviction que les régions soumises à la vaccination affichaient un taux de mortalité très élevé et que la pratique ancienne qui consistait à contaminer légèrement les personnes valides procurait une immunité beaucoup plus efficace que la vaccination pratiquée par les Européens.

Ainsi, on comprend aisément pourquoi les médecins avaient besoin du concours non seulement des chefs traditionnels mais aussi (cas rares) des policiers.

Parfois, certains fuyaient dans les brousses ou simplement se cachaient à l'approche des médecins. C'est ainsi que la commission de lutte contre la maladie du sommeil confirme cette résistance des malades et ainsi, la lutte contre les grandes endémies (lèpre, maladie du sommeil) entreprise par les Allemands donna finalement peu de résultats (Gayibor 2005 : 577t1).

Mais après tout, quel a été le bilan de l'action médicale allemande au Togo ?

2-4- Bilan de l'action médicale allemande au Togo

A la lumière de ce qui précède, nous pouvons dire que la période allemande a utilisé uniquement les services de médecin généralistes d'origine allemande. En matière sanitaire, les Allemands ont fait très honnêtement leur travail. Plusieurs médecins de très hautes valeurs marquèrent le pays par des études poussées, tels le professeur Rodenwaldt et les docteurs von Raven, Külz, Sunder et Krüger.

Ces médecins allemands étaient aidés par des Togolais dont aucun n'avait bénéficié d'une formation de médecin en Allemagne. Ainsi, tous les Togolais ayant servi dans le domaine sanitaire étaient tous des agents subalternes. Toutefois, ceux-ci, n'ayant bénéficié d'aucune structure particulière ni d'écoles de formation étaient néanmoins appréciés par leurs supérieurs et par la population.

Notons par ailleurs qu'officiellement aucune formation de sage-femme n'a été donnée au cours de la période allemande. Cependant dans son mémoire « Un médecin des tropiques raconte sa vie », 1957, le docteur Rodenwaldt affirmait avoir introduit l'éducation des sages-femmes dans le pays. Mais on ne saurait donner le nombre de personnes formées ni le lieu où cette formation avait été donnée (Tolgou 1998 : 35).

De plus, notons que la médecine curative était essentiellement basée dans le Sud du pays et seule la médecine préventive s'étendait vers le Nord en cas d'épidémie.

Les malades noirs et blancs n'étaient pas traités de la même manière dans les hôpitaux, car il se pratique un traitement discriminatoire (Gayibor 2005 : 575t1). Certes, tous étaient consultés par le même médecin mais dans des salles différentes. Les soins étaient gratuits pour les soldats les élèves et les prestataires. En effet, cette gratuité des soins pour ces groupes n'était que l'application d'une réglementation datée du 4 février 1909.7(*) Ces groupes, selon cette réglementation, appartenaient à la première catégorie.

La deuxième catégorie comprenait les habitants aisés qui pouvaient également se faire soigner en payant un tarif compris entre 2 et 3,4 marks.

Enfin la dernière catégorie comprenait les habitants indigents qui payaient un tarif compris entre 1,5 et 2 marks. (Sebald 1988 : 509).

Au nombre d'infrastructures sanitaires, les Allemands ont eu certaines réalisations. Le premier hôpital vit le jour à Petit Popo (Aneho). Il fut ouvert en 1894 et baptisée Nachtigal. Après l'hôpital Nachtigal, il y a eu construction d'autres hôpitaux tels que l'hôpital Reine-Charlotte (1909) à Lomé, le dispensaire de Kpalimé (1907) et celui d'Atakpamé (1912) (Gayibor 205 : 574t1 ; Tolgou 1998 : 32 ; Cornevin 1987 : 217).

D'une manière générale, la médecine traditionnelle qui était en vogue depuis la nuit des temps a été supplantée par la médecine moderne introduite par les Allemands, ainsi jetèrent-ils les bases de cette médecine moderne au Togo. Leur rôle principal était la protection sanitaire et l'hygiène des populations, la lutte contre les endémies afin d'entretenir la force de travail indispensable à la mise en valeur du territoire.

La naissance des professionnels de la santé dans la société togolaise découle de la volonté politique des Allemands d'amener à la pratique médicale occidentale des populations qui ne se soignaient que par des plantes. C'est alors que des équipements sanitaires furent mis en place, dotés de personnel médical blanc aidé par les autochtones.

Tout était mis en place pour la mise en oeuvre de l'idéal allemand quand brusquement, en 1914, les Allemands avaient été surpris par la première guerre mondiale après seulement trente ans de présence au Togo.

DEUXIEME PARTIE

LES AUXILIAIRES MEDICAUX AU TOGO SOUS OCCUPATION ANGLO-FRANÇAISE : 1914-1922

L'année 1914 marque une rupture dans l'histoire du monde des auxiliaires médicaux au Togo. En effet, cette année a été celle qui a vu se développer un conflit mondial qui bouleversa toutes les institutions allemandes et remis en cause leurs réalisations.

La guerre de 1914-1918 avait donc porté un coup dur au corps socioprofessionnel des auxiliaires médicaux. Alors, en quoi l'état de guerre a-t-il entravé l'émergence d'une véritable catégorie d'auxiliaires médicaux et de médecins africains de 1914 à 1922 ?

Cette interrogation, noyau principal de cette partie renferme bien d'autres idées. D'abord nous verrons comment la guerre de 1914-1918 avait entravé les activités médicales et comment le corps d'auxiliaires médicaux a été géré par la coalition anglo-française qui occupa provisoirement le Togo après le départ des Allemands.

Ensuite, à partir de 1920, un réaménagement intervint favorisant l'émergence d'un véritable personnel médical autochtone au Togo, l'ébauche de ce que nous appellerons les médecins africains. Mais d'abord, comment la guerre s'était déroulée et quels ont été ses effets sur les agents de santé laissés par les Allemands ?

CHAPITRE TROISIEME : Les entraves aux activités médicales : la guerre du 1914-1918 et l'occupation du Togo allemand.

Quand la guerre éclata en Europe, les Allemands ne l'avaient pas envisagée possible en Afrique, à plus forte raison dans le Schutzgebiet Togo8(*). Ne s'y attendant pas, les Allemands ne s'étaient pas préparés et donc avait été surpris au Togo par cette guerre. Ne pouvant rien contre la coalition anglo-française qui attaquait de toute part, les Allemands étaient obligés de capituler en abandonnant la colonie aux mains de cette coalition (Tcham 2005 : 585).

Alors, comment cette guerre s'était déroulée dans la colonie allemande du Togo et quels ont été les problèmes créés par cette guerre ? Comment les Anglo-français ont essayé de trouver des solutions à ces problèmes ?

1 - La guerre et les activités médicales

C'est par les télégrammes des 4 et 5 août 1914 que les Allemands s'étaient rendus compte de l'effectivité et de la possibilité de la première guerre mondiale au Togo.

Quelle était la psychologie allemande de la guerre au Togo et comment s'y était-elle déroulée ?

1-1- La guerre de 1914-1918 au Togo

Si l'Allemagne était la principale actrice de cette guerre en Europe, ce qui veut dire que si elle s'en était préparée pour cette guerre en Europe, au Togo les Allemands ne s'attendait pas à cette guerre.

En effet, le Togo paraissait bien loin de l'Europe à telle enseigne qu'aucun des territoires (anglais, français ou allemand) n'avait envisagé la guerre comme possible dans cette partie de l'Afrique (Cornevin 1988 : 221). C'est pour cette raison que quand Von Doering9(*) s'était rendu compte que cette guerre allait être transférée au Togo, il proposa aux gouverneurs du Dahomey, de la Gold Coast et de l'AOF de neutraliser son territoire pour ne pas donner aux Africains le spectacle des guerres entre Européens. Malheureusement ces gouverneurs refusèrent, ce qui rendait évident la guerre dans cette partie de l'Afrique.

Ainsi donc, en considérant les conditions de déclaration de la guerre et surtout la proposition de neutralité du Togo de Von Doering, nous pouvons déduire que cette guerre a été une surprise pour les Allemands au Togo.

La capitale Lomé était occupée sans résistance (Tcham 2002 :579) car pour Von Doering il ne fallait pas se battre pour la capitale mais concentrer toutes les forces pour protéger la station de radio de Kamina10(*). Et pourtant Kamina n'offrait pas une position aisée à défendre. Le problème était que «  Kamina est une plaine surplombée de hauteurs. Et aussi : La distance entre les tours extérieurs était de plus d'un kilomètre, et il était très difficile de défendre u pareil périmètre » (Marguerat 1987 : 64).

Alors les Allemands, ne voulant pas abandonner ce dispositif aux Anglo-français décidèrent de sa destruction. C'est ainsi que dans la nuit du 24 au 05 août la remarquable station de radio fut anéantie. Les Allemands capitulèrent et la campagne du Togo était ainsi terminée après deux semaines d'opérations (Marguerat 1992 : 26).

Ainsi prenait également fin la domination allemande sur le Togo et donc les activités médicales entreprises par les Allemands reçurent aussi un coup.

1-2- L'étouffement des activités médicales

Pendant la période de guerre (1914-1918), les activités médicales avaient été énormément affectées. Cela était lié à certains éléments dont la non préparation des Allemands à la tenue de la guerre au Togo.

En effet, les agents de santé autochtones étaient sous le commandement des médecins allemands dont certains étaient des militaires (médecins militaires). Or c'étaient ces militaires qui avaient pris part aux opérations militaires qui avaient duré deux semaines au Togo. De même les médecins allemands étaient aussi pris au coup par la manière brusque dont la guerre avait commencé. D'ailleurs, ces médecins allemands étaient en nombre réduit au Togo à cette époque. Ainsi donc, la guerre les ayant surpris, les Allemands n'avaient pas pu préparer les autochtones à les suppléer dans ces genres de circonstance ; de plus la guerre n'avait pas si duré au Togo pour qu'ils puissent profiter de l'état de guerre pour former certains autochtones à pouvoir prendre la relève au cas où ils seraient absents. C'est pourquoi le départ des Allemands du Togo a été un frein aux activités médicales.

Les auxiliaires médicaux de leur part étaient déboussolés car leurs maîtres ont été vaincus et chassés du Togo. Les activités médicales dans ces conditions ne pouvaient que ralentir puisque les auxiliaires médicaux avaient des domaines d'action très limités et par conséquent des connaissances médicales très restreintes pour prétendre relayer les médecins allemands.

Cependant, l'hôpital de Lomé continua à fonctionner pendant toute la guerre (Gayibor 2005 : 579t2 ; Cornevin 1987 : 274) probablement sous la direction des occupants, c'est-à-dire les militaires anglo-français.

Le Togo allemands, alors devenu orphelin de la guerre, est donc à la merci de la coalition anglo-française.

2 - L'attentisme et les solutions anglo-françaises au problème médical.

Après la guerre, c'est-à-dire à partir de 1918, le problème du personnel s'est accentué parce qu'il y avait un climat des méfiance qui régnait vis-à-vis de la colonie allemande : le TOGO.

2-1- L'attentisme anglo-français

Pendant la guerre et durant toute la période d'occupation, la gestion du Togo avait connu un caractère ambigu. Au fait, cette ambiguïté résulte de l'incertitude du sort de la colonie laissée par les Allemands.

Beaucoup de problèmes avaient favorisé ce climat de méfiance. Entre autre, nous pouvons mentionner les rivalités politiques et idéologiques anglo-françaises sur la côte des esclaves et surtout du statut réel du Togo qui n'était pas encore déterminé.

C'est pour ces raisons que Anglais et Français hésitaient à investir et à prendre la relève des Allemands une fois que ces derniers étaient vaincus parce que ni les uns ni les autres ne voulaient pas prendre le risque d'investir au Togo pour enfin se voir évincer de ce territoire. En effet, dans l'idée des Alliés (les Anglais précisément) plusieurs options étaient possibles sur le sort du Togo11(*).

D'abord le Togo pourrait être restitué à l'Allemagne (hypothèses très peu probable) ; ensuite le Togo pourrait être partagé entre la Grande Bretagne et la France ; aussi, le Togo sera cédé en entier soit à la Grande Bretagne soit à la France et enfin le Togo et le Dahomey seront tous les deux cédés à la Grande Bretagne en échange d'autres territoires attribués à la France.

Cette formule purement anglaise était différente de celle formulée par les Français. Pour ceux-ci, Gabriel Augoulvant en donna le ton dans une lettre adressée au ministre des Colonies dans laquelle il prônait l'initiative de proposer un remembrement « définitif » de l'Afrique Occidentale après la guerre12(*), qui supprimerait de nombreuses enclaves sur la côte en absorbant la Gambie, la Guinée portugaise, le Libéria. Le Togo sous occupation peut ainsi être sacrifié sans grand remords.

Revenu à son poste, Clozel ouvre le dossier le 15 mars 1917 et veut de sa part la totalité de l'Afrique Occidentale sans toutefois préciser ce qui serait offert à la Grande Bretagne en contrepartie. Son succession Joast van Vollenhoven trouve qu'il faut avant tout mettre en valeur les territoires mais le Togo ne doit pas être rendu à l'Allemagne.13(*)

Comme on le constate, les solutions possibles étaient fort diverses et ne favorisaient pas une réelle prise en charge du personnel médical autochtone laissé par les Allemands.

2-2- Le problème de personnel médical créé par la guerre.

Au sujet des prestations sanitaires et du personnel médical autochtone, il est difficile, voire impossible, de dire avec précision quel était la situation sanitaire et comment le personnel médical fut géré pendant la guerre et durant l'occupation (Assima-Kpatcha 2004 : 49).

Mais d'après notre documentation et pour les raisons évoquées plus haut, il est presque certain que la guerre et la défaite des Allemands désorganisèrent totalement le système médical et aucune oeuvre significative n'y fut entreprise avant le début des années 1920.

Tout d'abord, le personnel médical autochtone « formé » par les Allemands était en nombre très réduit. Ce nombre était alors à la merci des aléas de la guerre car les médecins et les autres membres du personnel médical étaient mobilisés pour la guerre qui ne s'était achevée qu'en 1918.

Cette mobilisation et aussi le temps qu'avait pris la guerre n'avaient pas permis aux occupants de continuer d'encadrer et même de former des auxiliaires médicaux autochtones.

Ainsi donc, toutes les énergies et l'attention des Européens étaient canalisées vers la guerre. Soigner les autochtones d'un territoire occupée n'était pas une priorité, en plus le sort du Togo était incertain. Il y eut donc un certain attentisme (Assima-Kpatcha 2004 :49).

Ce climat n'avait pu qu'aggraver la catégorie socioprofessionnelle des auxiliaires médicaux.

Toutefois, durant la période d'occupation, le service de santé fut confié aux médecins du corps expéditionnaire (Alonou 1994 : 29). Ces médecins militaires, en nombre très réduit, assurèrent de leur mieux un service élémentaire durant toute cette période (Cornevin 1987 : 274).

Tel a été le problème sanitaire posé par la guerre. C'est alors que chacun de son côté, Anglais et Français en avaient trouvé une formule

2-3- Les solutions anglo-françaises au problème

En 1919 eut lieu le traité de Versailles qui clarifiait le sort du Togo. D'après ce traité, l'Allemagne perdait définitivement le Togo qui passa désormais aux vainqueurs. C'est ainsi que le Togo subit diverses tractations sur ses frontières pour donner ce que nous connaissons aujourd'hui.

Alors la Grande Bretagne et la France se sont partagés le Togo ; la première reçut la partie occidentale et la seconde la partie orientale. Cela permit à chacune d'organiser sa portion de sorte à rayer dans la mesure du possible le déficit né de la guerre. C'est ainsi que des mesures furent prises par la France pour organiser la santé publique (Assima-Kpatcha 2004 : 49). C'était dans ce but que les médecins militaires arrivèrent au Togo ; mais en nombre réduit. Ils étaient probablement aidés par les autochtones recrutés dès les débuts de l'administration civile en 1919. Ces autochtones seraient d'anciens membres du personnel médical de la période allemande mais surtout des Dahoméens.

Sur le personnel médical de la période allemande nous tenons à préciser un fait. En réalité, beaucoup d'entre eux, jugés trop proches des Allemands c'est-à-dire ceux qui étaient germanophiles étaient évincés de la profession par les Français car considérés par ces derniers comme dangereux à leur administration. Les autres qui avaient pu être recrutés par les Français avaient été reconvertis au français (Assima-Kpatcha 2004 : 45).

Sur le personnel du Dahomey, l'administration française eut à importer des médecins et des sages-femmes auxiliaires qui encadrèrent les infirmiers et agents sanitaires formés par les Allemands (Tolgou 1998 : 35). Ce personnel était importé du Dahomey (l'actuelle République du Bénin) parce que cette colonie était aussi administrée par la France ; et ce faisant, la France peut amoindrir ses dépenses coloniales.

D'une manière générale, disons que la première guerre mondiale avait laissé des effets de grande ampleur sur le Togo allemand et donc sur le personnel de santé formé par ces Allemands. Elle avait donc étouffé les activités médicales à cause de l'expulsion des Allemands. Par ailleurs, les nouveaux occupants administraient avec une main molle puisque chacun de son côté jouait sur le sort du Togo. Ce n'est qu'à partir de 1919 que le sort du Togo a été clarifié confiant donc une partie du Togo allemand à la France qui, depuis cette année, en était devenue officiellement la nouvelle tutrice. Ainsi, à partir des années 1920 la France mis en oeuvre de nouvelles structures notamment dans le domaine de la santé pour faciliter l'émergence d'un véritable personnel médical autochtone au Togo.

CHAPITRE QUATRIEME : L'émergence d'un véritable personnel médical autochtone au Togo : 1920 : 1922

Le début des années 1920 inaugura une nouvelle ère pour la profession médicale au Togo. Les bouleversements de la guerre et les coups reçus par les agents de santé avaient connus de nouvelles réformes. Ces réformes avaient été introduites par la nouvelle administration française qui venait à peine de prendre officiellement la charge du Togo. Elles avaient touché tous les aspects de la santé à savoir : les agents, leur hiérarchie, les soldes ou salaires, les conditions de travail et autres. Ces réformes encore appelées organisations redressèrent petit à petit les auxiliaires médicaux et jetèrent les bases d'un futur corps médical autochtone encore plus compétant que le précédant formé par les Allemands.

Quelle a donc été cette nouvelle organisation qui donna un nouveau souffle à la profession médicale à partir de 1920 ? Quelles ont été les actions ou dans un large mesure les résultats de cette organisation sur les agents de santé autochtone togolais ?

1 La réorganisation de la profession médicale

Après les revers de la guerre de 1914-1918 les Français s'étaient attelés à réorganiser la profession médicale qui connut de profondes blessures. Quelles ont été les raisons profondes de cette réorganisation et les premières réformes qui ont été introduites dans ce domaine ?

1-1- Les raisons de la réorganisation du corps des agents de santé

Comme nous l'avions dit plus haut, les activités médicales avaient connu une crise au Togo à cause du déclanchement de la première guerre mondiale et surtout du départ des Allemands qui en furent les cadres. Arrivés, les Français s'étaient trouvés dans la nécessité de réorganiser la profession médicale. Les raisons de cette réorganisation furent nombreuses.

Les premières raisons furent les problèmes nés de la guerre. En effet, la guerre a été la principale cause du départ des Allemands qui avaient sous leur ordre des auxiliaires médicaux autochtones. C'est pourquoi à leur départ ces autochtones avaient eu du mal à se mettre dans les conditions de la guerre pour lesquelles ils ne s'étaient jamais préparés. Même pendant la guerre et durant l'occupation la priorité des Français n'était pas d'assurer leur encadrement mais de répondre aux efforts de guerre et préparer les populations pour la future mise en exploitation du territoire. D'ailleurs, tous les auxiliaires médicaux de la période allemande n'avaient pas collaboré avec les Français dès leur arrivée. La plupart était écarté pour leur intérêt pour les Allemands et les quelques éléments qui étaient recrutés le furent après leur reconversion au Français (Assima-Kpatcha 2004 : 45).

Ensuite nous devons insister sur le fait que la guerre avait renforcé le problème de déficit de personnel médical qui existait même au temps des Allemands. A ce problème de personnel s'ajoutait celui de l'insuffisance de formations sanitaires et aussi des problèmes financiers (Alonou 1994 : 33).

Enfin il faut atteindre régulièrement les populations qui jusque là n'avaient que peu de contact avec la médecine moderne ou qui n'en avaient pas du tout. Toutes ces populations, les Français en auront besoin pour étendre et asseoir leur domination ; c'est pourquoi les soigner était parmi les priorités français. C'est de cette idée que naîtra la médecine mobile (que nous verrons en détail plus loin) qui exerçait dans les régions les plus reculées des centres administratifs (Alonou 1994 :33).

Toutes ces raisons et contraintes avaient conduit les Français à penser à une réforme à partir de 1920.

1-3- Les timides réformes des années 1920-1922

Elles avaient pour but de donner au service de santé et à son personnel un nouveau souffle après la vague de tergiversation qu'ils venaient de traverser. Toutefois, précisons que ces réformes furent de moindre ampleur jusqu'en 1922. Elles touchèrent cependant la hiérarchie, les soldes et les conditions de recrutement et étaient généralement issues des arrêtés.

Sur la fixation de la hiérarchie, ce fut un arrêté du 8 novembre 1920 qui l'instaura (Assima-Kpatcha 2004 : 47). Cet arrêté ne définissait pas clairement la hiérarchie des agents de santé et les sources dont nous disposons ne nous ont pas permis de la définir avec précision. Néanmoins selon l'arrêté n° 32 du 10 septembre 1920 il y eut des classements aux titres d'aides médecins de première et de troisième classe, d'infirmiers de deuxième et de troisième classe, d'infirmiers stagiaires et d'élèves infirmiers. A cette date deux personnes furent dans le premiers cas ; deux dans le deuxième ; trois dans le troisième et douze dans le derniers cas. Ces classements seraient probablement liés à leur ancienneté (surtout les Dahoméens et certains auxiliaires des Allemands) et à leur niveau d'instruction.

Ce même arrêté du 8 novembre 1920 qui fixait la hiérarchie définissait aussi les soldes. L'échelle des soldes variait entre 6 000 francs par / an et 1200 francs/ an. Il existait, en outre, un surveillant d'hygiène de sixième classe rémunéré à 1300 francs / an et un autre de première classe dont la solde était de 1100 francs / an14(*). Cette grille salariale avait beaucoup varié dans le temps. D'autres arrêtés modifièrent celui du 8 novembre 1920, notamment l'arrêté du 7 octobre 1924 qui entra en vigueur le 1er janvier 1925 (Assima-Kpatcha 2004 : 151).

Concernant le recrutement des agents de santé, il fut très bouleversé au début à cause des aléas que le service de santé a connu. Mais mises à part les embauches opérées durant la période d'occupation, des critères plus rigoureux furent introduits à partir à partir de 1922 grâce aux textes dont nous venons de citer quelques-uns. Mais d'après Marguerat (1992 : 161) il semble que le recrutement des sages-femmes (pourquoi pas des infirmiers ?) avait commencé déjà à partir de 1920 puisque la toute première promotion de sages-femmes togolaises était sortie de sa formation de Dakar en 1923 (Marguerat 1992 : 161 ; Assima-Kpatcha 2004 : 151).

Mais d'une manière générale, c'est à partir de 1922 que les profondes réformes avaient commencé à être opérées. Toutefois sous les Français, ces premiers agents de santé avaient d'une manière ou d'une autre eu à accomplir certaines actions. Ce personnel médical de toute façon profita de cette réforme.

2 Le personnel médical autochtone et les réformes

Ces différentes réformes dont nous venons de faire l'inventaire avaient, d'une certaine manière, redressé le personnel médical autochtone. Elles avaient revalorisé ce personnel et jeté les bases d'un nouveau corps de personnel médical autochtone sous les Français.

2-1- La revalorisation du personnel autochtone

Le personnel médical autochtone et sa formation n'étaient pas une invention française. Ils existaient même depuis l'époque allemande.

Sous les Allemands, le personnel médical autochtone était sans statut. Les auxiliaires médicaux n'avaient presque pas de considération ou de valeur aux yeux des colons allemands dans la mesure où aucune législation officielle ne touchait ce personnel. Plus encore, les salaires n'avaient pas clairement été définis.

Par contre sous l'administration française, les auxiliaires médicaux avaient une législation officielle qui définissait clairement certaines préoccupations des agents de santé de l'époque. Il est vraisemblablement possible que les Français eussent l'idée de dominer cette classe socioprofessionnelle autochtone mais notre intérêt ici est de mettre l'accent sur la volonté de l'administration qui voulait donner un statut, une certaine valeur aux auxiliaires médicaux.

Evidemment, par ces différents arrêtés et décisions administratives, la hiérarchie était clairement définie ; les soldes également étaient clairement précisées même si des arrêtés les avaient constamment modifiées au gré des intérêts français. De toutes les façons ce corps avait connu une revalorisation sensible, ce qui annonçait également une nouvelle ère pour le corps des agents médicaux autochtones.

2-2- Les débuts d'un nouveau corps d'agents de santé autochtones

Les réformes entamées à partir des années 1920 inaugurèrent une ère pour le personnel autochtone. Elles donnèrent une nouvelle forme et un aspect nouveau à la prestation des auxiliaires médicaux.

Comme nous l'avons dit plus haut, ces différents arrêtés n'étaient que le début d'un long processus de remise en état de la fonction des agents de santé autochtones. En effet, les auxiliaires médicaux avaient déjà une idée sur la formation médical que donneront les Français par rapport à ce qu'avaient, quelques années auparavant, donné les Allemands. Ainsi, les possibilités d'évolution de ce corps socioprofessionnel étaient apparentes et chaque agent y pouvait avoir accès.

La période de 1920-1922 avait alors été un moteur ou encore un stimulateur qui bouleversa les anciennes données en y instaurant de nouvelles dans le but d'approfondir les connaissances des auxiliaires médicaux et de préciser leur statut financier et hiérarchique. En cela, cette période avait servi d'intermédiaire entre un corps d'auxiliaires pratiquement ignorés et perdus et un autre corps d'auxiliaires cette fois-ci conscients de leur existence et de leur profession. Cette émergence d'un nouveau corps d'auxiliaires médicaux autochtones avait évolué pour connaître un renforcement et une consolidation à partir de 1922.

D'une manière générale, nous pouvons affirmer que les réformes des années 1920-1922, si timides et minimes soient-elles, avaient été d'une grande importance pour les agents de santé autochtones. Par elles, la profession médicale prit un nouvel élan pour, à partir de 1922, se renforcer et se consolider et donner le jour à un nouveau corps : les médecins africains.

TROISIEME PARTIE

LE RENFORCEMENT ET LA CONSOLIDAION

DU CORPS DES AUXILIAIRES MEDICAUX ET DES MEDECINS AFRICAINS AU TEMPS DES FRANÇAIS : 1922 - 1960

A partir de 1922 et jusqu'en 1960 plusieurs événements intervinrent dans l'histoire du Togo ; événements qui, d'une manière ou d'une autre, avaient défini l'évolution des agents de santé que sont les auxiliaires médicaux et les médecins africains.

En effet, après la Conférence de Versailles en 1919 la partie orientale du Togo a été confiée à la France mais à partir de 1922 le Togo passa sous le mandat de la SDN administré par la France et à partir de 1946 il passa sous la tutelle de l'ONU toujours administré par la France pour accéder à l'indépendance en 1960.

Mais toujours est-il qu'entre 1922 et 1960 les agents de santé avaient bien évolué. Alors, comment s'est renforcée puis consolidée cette catégorie socio-professionnelle des auxiliaires médicaux et des médecins africains au temps de la colonisation française pendant la période de 1922-1960 ?

Cette question principale de cette partie mérite d'être abordée en deux grands domaines. D'abord, nous verrons quelle a été l'évolution de ce corps entre 1922 et 1946 c'est-à-dire sous le régime de mandat puis entre 1946-1960 sous le régime de tutelle.

CHAPITRE CINQUIEME : Les auxiliaires médicaux et les médecins

africains au temps du mandat : 1922-1946

A partir de l'année 1922, les agents de santé autochtones avaient connu une évolution considérable. Au corps d'auxiliaires médicaux qui existait auparavant venait s'ajouter un autre beaucoup plus compétent, celui des médecins africains. Comment les auxiliaires médicaux et les médecins africains étaient recrutés puis formés ?

Ce personnel médical autochtone avait sans doute, accompli plusieurs activités et avec eux il y eut beaucoup d'innovations. Quelles étaient ces activités et les innovations intervenues dans le domaine médical ? Mais avant de répondre à cette interrogation, voyons d'abord quelles étaient les conditions de recrutement des auxiliaires médicaux.

1- Les auxiliaires médicaux et les médecins africains : conditions de

recrutement et formations

Encore appelés « personnel indigène, » le recrutement et la formation des auxiliaires médicaux et des médecins africains ont beaucoup évolué. Qu'en était-il des auxiliaires médicaux ?

1-1- Les auxiliaires médicaux : conditions de recrutement et formation professionnelle.

Cette catégorie d'agent de santé existait depuis l'époque allemande mais

les conditions de recrutement avaient assez varié.

1-1-1- Les conditions de recrutement

Avant 1945, le personnel infirmier était recruté sur le tas et sur ordre du Commissaire de la République, ce qui veut en d'autres termes signifier que c'est le système de recrutement allemand qui se poursuivait jusqu'à cette date à partir de laquelle les conditions ont évolué. Ce n'étaient plus les élèves intelligents, les élèves ayant une écriture lisible, les boys et autres qui étaient recrutés mais le choix se porta sur les élèves ayant un niveau élevé.

Ainsi, pour être admis à effectuer les études préparant au diplôme d'aptitude, les candidats devaient être âgé de 17 ans au moins et 24 ans au plus et remplir les conditions suivantes :

- être de nationalité française (citoyen, sujet ou administré) ;

- formuler une demande d'admission sur papier timbré, adressée au

Commissaire de la République, accompagnée des pièces suivantes :

· un extrait d'acte de naissance ou toute autre pièce en tenant lieu ;

· Une copie du Certificat d'Etudes Primaires Elémentaires (CEPE) ou d'un diplôme équivalent.

C'était là la première étape qu'on peut qualifier de présélection. Si la

demande est agrée, le postulant aura à compléter son dossier par :

- un extrait du casier judiciaire ;

- un certificat médical constatant que le candidat est apte au service de

l'assistance médicale indigène. Les trois dernières pièces devaient dater de moins de trois mois.

Le candidat devait alors mentionner sur sa demande d'admission le lieu choisi pour subir les épreuves du concours, ainsi que l'adresse à laquelle la convocation devait lui être envoyée.

Le concours était ouvert dans chaque chef-lieu du cercle à la date et à l'heure fixée par le commissaire de la République et sous la direction de l'administrateur commandant le cercle.

Les épreuves du concours étaient du niveau du certificat d'étude et comportaient une composition française d'une durée de 2 heures et deux problèmes arithmétiques d'une durée de 2 heures. Chaque épreuve terminée, elles étaient adressées sous plis cachetés à la Direction de la Santé Publique et corrigées par une commission (Marguerat1992 :122). Le nombre d'élèves à recruter était fixé annuellement par le Commissaire de la République.

A l'issue de ce concours, certains candidats étaient retenus pour être formés.

1-1-2- La formation professionnelle

La formation professionnelle pendant cette période était appréciable. Déjà en 1932 une école de garde sanitaire a été créée à Lomé. En 1938, une autre école de microspistes et d'infirmiers spécialistes de la trypanosomiase ont été créées à Bafilo et à Alédjo15(*) (Alonou 1994 : 37 ; Gayibor 2004 : 583).

Comme nous l'avions dit un peu plus haut, le recrutement du personnel jusqu'à cette date se faisait sur le tas et leur formation, outre celle que recevait le personnel dans les écoles énumérées plus haut il y avait également la formation sur le tas héritée de l'époque allemande.

C'était finalement le décret N° 274/P portant création de l'école des infirmiers et signé le 29 Mai 1945 par le Gouverneur Noutary qui sonna le glas du début d'une formation d'importance au Togo. Cette école avait pour but de préparer à leurs fonctions les infirmiers et infirmières et était rattachée à la formation sanitaire de Lomé et fonctionnait sous la direction du médecin-chef de cette formation assisté d'un médecin résident (Tolgou 1998 : 38).

La durée de la formation, de 6 mois au début fut portée à 1 an puis à deux à la création de l'école et était calquée sur un programme de formation bien défini (Marguérat 1992 :122).

Le programme de formation comportait un stage pratique qui s'effectuait par roulement dans les différents services hospitaliers, ainsi qu'à la pharmacie, au laboratoire de bactériologie et au service d'hygiène.

L'enseignement théorique était assuré l'après-midi et les cours étaient professés par les médecins, les pharmaciens, médecins africains en service à Lomé. Les matières enseignées au début de la création étaient basées sur la morale professionnelle, le rôle de l'infirmier, la technique des soins d'usage courant à donner aux malades, le mobilier et matériel médicochirurgical, la stérilisation et la désinfection, des notions élémentaires de pharmacie  et de laboratoire (Tolgou 1998 : 39 ; Marguerat 1992 : 122).

A la fin de la formation, les élèves subissaient un examen de sortie qui comportait des épreuves écrites, orales et pratiques. Les élèves qui réunissaient à cet examen de sortie étaient nommés infirmiers stagiaires et affectés, à ce titre, dans les différentes formations hospitalières du territoire où ils étaient soumis à un stage d'un an avant qu'il soit statué, d'après leur aptitude et leur manière de servir, sur leur titularisation. Titularisés, ils faisaient partie du cadre local des infirmiers du Togo (Tolgou 1998 : 40 ; Marguérat 1992 : 122). Tels étaient le recrutement et la formation des auxiliaires médicaux. Qu'en était-il des médecins ?

1-2- Les médecins africains : conditions de recrutement et formation professionnelle

Il nous est important de rappeler ici que auxiliaires médicaux et médecins

africains étaient tous des agents de santé ayant servi sous la direction des médecins européens. Pourtant, tous n'avaient pas le même niveau d'instruction, ne recevaient pas la même formation et aussi n'étaient pas formés ensemble. Les premiers (auxiliaires médicaux) étaient formés au Togo alors que les seconds (médecins africains) l'étaient hors du Togo. Leur formation ne leur permettant pas d'accéder au diplôme d'Etat, ils étaient valables seulement pour l'Afrique d'où leur nom : médecins africains (Tolgou 1998 : 35). Quelles étaient alors les conditions de recrutement de ces médecins africains à cette époque et quelle était la qualité de la formation qu'ils recevaient, telles sont les principales questions de cette sous-partie.

1-2-1- Les conditions de recrutement

Les conditions d'admission aux études des médecins africains étaient diverses. Ils pouvaient y parvenir après un processus ou être directement recrutés sur concours.

Sur le processus après lequel on pouvait avoir accès à ces études, voici les propos tenus par le Docteur MIKEM qui fut l'un des médecins togolais ayant suivi ce processus :16(*) « C'est après l'obtention du CEPE que j'ai été admis, sur concours, au cours complémentaire, le « Petit-Dakar » de Lomé. Par la suite, certains services du Togo ayant été transférés au Bénin (le Dahomey d'alors) ; en 1935, le cours complémentaire et même la Direction de la Santé ont été aussi transférés là-bas. Nous avons été donc formés à l'école Victor Ballot de Porto-Novo, de là, nous avons passé un concours qui nous a permis d'être admis d'abord à l'école normale supérieure de Sébicotane, puis, par la suite, grâce à un autre concours, nous avons été admis à l'école de médecine de Dakar. » (Marguerat et Péléi 1992 : 157).

Cette interview du Docteur MICKEM nous révèle les étapes à suivre, à partir du CEPE, pour atteindre l'école de médecine de Dakar. Cette étape, relativement longue serait celle en vogue au début de la colonisation française et probablement jusqu'aux années 1930.

Par contre, d'autres Togolais étaient aussi recrutés directement pour la formation de Dakar. Les médecins et les pharmaciens y étaient admis avec le baccalauréat tandisque les sages-femmes et les infirmiers pouvaient y entrer avec le BEPC (Alonou 1994 : 37), tous sur un concours qui se faisait dans toute l'Afrique Occidentale Française (AOF) le même jour (Marguerat et Péléi 1992 : 161). Les épreuves du concours étaient du niveau exigé pour le concours dans chaque catégorie et pouvaient avoir accès à ce concours tous les Africains ressortissants des pays de l'AOF. Les candidats reçus à la suite du concours doivent alors rejoindre le Sénégal pour être formés.

1-2-2- La formation professionnelle

La formation du personnel qui comprenait donc les médecins africains, les sages-femmes, les vaccinateurs, les infirmiers, les vaccinateurs pour ne citer que ceux-la se faisait à Dakar (qui était à l'époque la capitale de l'AOF) au Sénégal mais aussi au Cameroun (où l'on formait les infirmiers du service de lutte contre la trypanosomiase) et plus tard en France (comme nous le verrons plus loin).

Mais puisque c'est à Dakar que la plupart des Togolais de cette époque étaient formés, nous privilégierons cette ville par rapport aux autres pays.

Le programme de formation de l'Ecole de Dakar (école crée en 1919) était basé sur tout ce qui se rapportait à la médecine préventive et à l'hygiène (Alonou 1994 : 37).

Selon la spécialisé choisie, les futurs agents de santé n'étaient pas formés dans une même école à Dakar puisque la ville de Dakar était en ces moments dotée de :

- un hôpital principal recevant les Européens et certaines catégories d'Africains. L'établissement comprenait une maternité et tous les services de spécialité ;

- Un hôpital central avec Services de spécialités réservé à l'Assistance Médicale Indigène ;

- Une maternité uniquement réservée aux Africains ;

- Une polyclinique dite Polyclinique Roume, organisme de consultations externes ;

- Un institut pasteur, organisme de recherches scientifiques ;

- Une Ecole Africaine de Médecine et de Pharmacie avec des promotions moyennes de 20 élèves et

- Un Ecole de Sages-femmes africaines17(*)

C'étaient dans ces différentes écoles et établissements qu'étaient formés les médecins africains, les sages-femmes, les infirmiers et autres.

La durée de formation était de 4 ans pour les médecins et de 3 ans pour les

pharmaciens et les sages-femmes (Alonou 1994 : 37) ; Marguerat et Péléi 1992 : 162). A la fin de cette formation, un examen de sortie était organisé à la suite duquel les diplômes leur étaient donnés. A la sortie, ils revenaient au Togo pour commencer leur profession.

De toute évidence, ces médecins africains étaient mieux formés que les auxiliaires médicaux et par conséquent, avaient une connaissance plus approfondie que les auxiliaires ; mais tous formaient le personnel médical autochtone.

2 - Le personnel médical et les nouvelles innovations

Le personnel médical était relativement considérable à cette époque. Elle était composée sans doute de personnel européen et surtout de personnel indigène. Leurs actions étaient nombreuses et c'étaient d'elles que naîtront de nouvelles innovations. D'abord voyons comment était composé le personnel médical.

2-1- Le personnel médical

Généralement, nous pouvons distinguer deux types de personnels :le personnel européen et le personnel autochtone.

2-1-1 Le personnel médical européen et ses activités.

Le personnel sanitaire européen était composé de médecins militaires, de pharmaciens militaires, d'infirmiers militaires ; ils étaient soit des médecins généralistes, soit des médecins spécialistes (Alonou 1994 : 35).

Le rôle des médecins européens était surtout un rôle de direction et de contrôle, ayant leur centre d'action au chef-lieu de la circonscription sanitaire. Ils avaient la haute main sur l'hôpital indigène ; mais, en général, ils se bornaient à y assurer un service technique de médecin consultant de façon à n'aliéner ni leur liberté, ni leur mobilité et à pouvoir, par des tournées fréquentes, suivre le personnel local, le conseiller, l'encourager et empêcher toute défaillance (Alonou 1994 : 36 ; Gayibor 2004 : 583).

Concernant les médecins spécialistes, ils étaient en principe utilisés dans les colonies suivant leur spécialité et au mieux des intérêts et des nécessités du service médial outre - mer. Pendant des années, le corps de santé coloniale, qui a été pionnier de l'assistance indigène dans toutes les colonies, restait insuffisant pour accomplir une tâche efficace et durable. Pour lui permettre de faire face à de multiples fonctions, particulièrement importantes en Afrique, des mesures furent prises pour intensifier son recrutement. Malgré toutes ces mesures l'insuffisance du personnel français resta grande. Pour y remédier, il fut envisagé le concours des médecins togolais pour remplir les fonctions d'adjoint sous les ordres et le contrôle des médecins français (Alonou 1994 :36 ; Assima - Kpatcha 2004 :153).

Le tableau suivant fait apparaître l'insuffisance du personnel médical européen et l'accroissement du personnel africain.

Tableau N°2 : Nombre de postes médicaux et effectifs du personnel européen et africain de 1922 à 1927.

Années

Nombre de postes médicaux

Personnel européen

Personnel africain

1922

11

5

30

1923

11

6

46

1924

11

6

49

1925

12

9

56

1926

12

9

65

1927

17

10

86

Source : Cornevin 1988 : 275

Dans ce tableau on constate une hausse continue du personnel européen et africain de même que du nombre de postes. Concernant le dernier en constate une hausse des effectifs de 88,06% entre 1922 et 1927.

Précisons par ailleurs que pendant cette période, le personnel africain n'était pas composé seulement des Togolais mais aussi d'autres médecins venus de l'AOF et surtout du Dahomey. Mais toujours est - il que le personnel européen était aidé dans ses tâches par le personnel indigène c'est - à - dire autochtone.

1.1.2. Le personnel autochtone et ses activités

En dehors des médecins européens, on notait à partir de l'entre - deux - guerres des médecins africains, appelés ainsi en comparaison des premiers, qui, seuls avaient le titre de docteurs. Parmi eux nous pouvons citer les docteurs Hospice Coco, Samuel Johnson, Trenou, Robert Fiadjoe (Marguerat et Péléi 1992 :122 ; Gayibor 2005 :584t1). On peut également citer les premières sages - femmes comme Bekea, Kponton, Adigo.

Ce personnel représentait les éléments d'exécution essentiels dont l'action auprès des populations fut incessante. Ayant des affinités de langue ou parlant le même dialecte, connaissant la mentalité, les préjugés et les traditions, il représentait le meilleur moyen de pénétration et de persuasion, et c'est surtout par lui que les indigènes devaient apprendre à lutter contre les endémies et d'autres maladies (Alonou 1994 : 36).

La place des sages - femmes était dans les dispensaires et les centres de consultation pour les examens à effectuer et les conseils à donner. Elles y pratiquaient les accouchements et y introduisaient les notions de puériculture.

Les gardes sanitaires étaient chargés de la surveillance des mesures d'hygiène et de salubrité.

Les médecins africains quant à eux étaient employés comme auxiliaires dans les hôpitaux et dispensaires disponibles sur toute l'étendue du territoire (Carte n°1).

Le rapport annuel de 192318(*) précisait que ce personnel rendait d'excellents services. Certains médecins auxiliaires qui faisaient preuve d'une bonne instruction médicale suppléaient jusqu'à un certain point les médecins européens dans les dispensaires et lors de certaines tournées (Assima-Kpatcha 2004:153).

Les aides médecins et les infirmiers dont quelques-uns avaient de 20 à 25 ans de service étaient aussi expérimentés que dévoués .Grâce à ces qualités, les dispensaires annexes qui étaient confiés à de simples aide médecins et infirmiers indigènes sous la surveillance des médecins- chefs des cercle fonctionnaient très bien.

Les sages-femmes diplômées de l'école de Dakar et les infirmières étaient des plus utiles pour les soins aux accouchées, aux nourrissons et aux femmes malades. Elles pénétraient plus facilement que les médecins européens dans les familles indigènes pour faire des accouchements, pour donner des conseils aux jeunes mères et surveiller l'alimentation et l'hygiène des nouveaux-nés (Marguerat et Péléi 1992 : 163 ; 165).

Ainsi, les tâches du personnel médical autochtone consistaient à maintenir sur le territoire des conditions sanitaires acceptables, c'est-à-dire soigner la population, à la vacciner, à dépister les maladies, à lutter contre les épidémies et les endémies, à veiller au maintien des conditions hygiéniques adéquates.

C'est en fonction de tous ces éléments que les effectifs des personnels européens et surtout africains ont considérablement évolué entre 1928 et 1931 comme nous le montre le tableau suivant.

Tableau N° 3 : Nombre de postes médicaux et des effectifs des personnels européens et africains de 1928 à 1931

Années

Nombre de postes

Personnel européen

Personnel africain

1928

20

12

115

1929

25

15

148

1930

32

21

149

1931

35

20

170

Source : Cornevin 1987 : 275

Il est à constater dans ce tableau la hausse continue aussi bien du nombre

de postes (+75 %) que des effectifs du personnel médical africain (+47,82 %) et européen (+66,66 %) entre 1928 et 1931 (Assima - Kpatcha 2004 : 299).

La relation entre les « Dakarois » et les auxiliaires formés au Togo était au

début un peu désagréable avant de se normaliser par la suite. Sur ce, voici le témoignage qu'en livre le Docteur Mikem (cité plus haut) : « La solidarité dans le travail ne s'est pas instaurée immédiatement. C'est avec le temps, petit à petit, qu'on s'est familiarisé, car, quand nous sommes arrivés, il y avait des anciens infirmiers qui faisaient fonction d'assistants des médecins de l'époque, et qui travaillaient très bien. Il y a eu des noms célèbres comme les Kpadénou, les Adigo, qui ont été  des infirmiers réputés dans le temps, qui assistaient vraiment correctement les médecins dans leur travail ! Quand nous étions arrivés, il est vrai que l'entente ne s'est pas établie tout de suite, mais, petit à petit, on a appris à se tolérer, et l'entente a fini par prédominer.»(Marguérat et Péléi 1992 :153).

Ces petits problèmes entre personnel togolais n'étaient pas de taille à

compromettre la qualité de leurs prestations. Ces prestations se sont élargies avec de nouvelles innovations.

2-2-Les nouvelles in novations

Ces innovations dont nous ferons cas concernent deux principaux services

mis au point à l'endroit des indigènes et dont les principaux agents étaient les agents de santé togolais toujours dirigés par les Européens : c'étaient la médecine mobile et l'oeuvre de berceau.

2-2-1- La médecine mobile

Ce service, crée par l'arrêté du 27 novembre 1923 avait pour but de porter

les bienfaits de l'Assistance médicale dans les régions éloignées des postes pourvus de médecins.19(*)

Un médecin fut chargé de ce nouveau service et passait un mois environ

dans chaque circonscription médicale. Le service mobile exerçait dans les régions les plus éloignées des centres administratifs (Sokodé, Bassari, le pays Cabrais, Sansanné-Mango, les cantons Konkombas dans le Nord et dans le Sud les cercles de Lomé et d'Anecho ; la région montagneuse d'Akposso, Tététou et Sagada)20(*), en liaison étroite cependant avec les postes médicaux sur lesquels il dirigeait les malades les plus gravement atteints (Alonou 1994 : 33).

Les médecins mobiles profitaient pour visiter les principaux centres les jours de marché où l'affluence était particulièrement considérable. Afin de faciliter leur tâche, les Administrateurs prévenaient à l'avance leurs administrés de la visite du médecin en les invitant à rassembler les malades au lieu et à l'heure de la consultation. Par ces consultations, les médecins soignaient un grand nombre d'individus, distribuaient de la quinine, et aussi donnaient des conseils d'hygiène et de puériculture. D'autres maladies comme la lèpre, la maladie du sommeil, la , le syphilis et le parasitisme intestinal étaient dépistés.

En outre, les médecins mobiles donnaient aux chefs et aux notables d'utiles conseils sur l'assainissement des villages, la destruction des larves de moustiques dans les réservoirs d'eau, l'assèchement des mares, le débroussaillement, l'établissement de margelles autour des puits, les soins aux nouveaux-nés...(Alonou 1994 : 34).

Cette médecine dite mobile était l'une des innovations de la période mandataire ; une autre innovation est l'oeuvre de berceau.

2-2-2- L'OEuvre du Berceau

L'autorisation de la création de L'OEuvre du Berceau a été possible grâce à l'arrêté en date du 22 mai 192421(*). Cet arrêté autorisait au fait la création à Lomé d'un Comité de la Croix-Rouge française, dépendant de l'Union des Femmes de France et ayant pour but l'assistance aux mères et aux nourrissons indigènes.22(*)

L'OEuvre du Berceau était donc une organisation privée qui était chargée d'effectuer le redressement nécessaire en ce qui concerne les mesures de présentation et de protection de la première enfance.

Fondée par les femmes européennes, l'OEuvre du Berceau était sous le patronage de l'épouse du Gouverneur Bonnecarrère et rattachée au siège central à Paris.

L'un des éléments essentiels de cette organisation était la construction des maternités. La première fut construite en 1925 à Lomé. Une annexe de l'OEuvre du Berceau était créée à Aného en 1927 ; l'année suivante ce fut à Kpalimé que cette oeuvre s'étendit. Les villes d'Atakpamé et Kara connurent chacune la construction d'une maternité par la progression de l'oeuvre en 1929-1930 (Gayibor 2005 : 593t1).

Ces différentes maternités ajoutées à celle qui furent créées par l'administration avaient enregistré les données contenues dans le tableau suivant :

Tableau N° 4 : Nombre d'accouchements pratiqués dans les maternités

Années

Nombre d'accouchements

1922

8

1923

14

1925

24

1926

64

1927

274

1928

306

1929

378

Source : Gayibor 2005 : 593t1

Des résultats de l'oeuvre avaient été satisfaisants ; ce qui explique l'augmentation du nombre d'accouchements chaque année d'une manière très considérable.

A part ces accouchements, l'oeuvre faisait également les consultations au cours desquelles les mères amenaient leurs enfants qui étaient examinés par un médecin puis immatriculés dans un registre muni du livret de nourrisson. Ce livret contenait l'état civil de l'enfant, les observations faites à la naissance, la courbe du poids pendant les premières années et le résumé des consultations. Ces consultations sont résumées dans le tableau suivant :

Tableau N° 5 : Nombre de consultations

Années

Lomé

Aného

Kpalimé

Atakpamé

Sokodé

Kara

Mango

1924

1083

 
 
 
 
 
 

1925

3061

 
 
 
 
 
 

1926

6172

 
 
 
 
 
 

1927

6864

4212

 
 
 
 
 

1928

7332

4525

3224

 
 
 
 

1929

7431

2906

2071

46

 
 
 

1930

8529

8776

3516

1937

1168

1140

4603

1931

8380

9248

3445

1097

3621

8243

7863

Sources : Gayibor 2005 : 294t1

Ces chiffres contenus dans le tableau nous témoignent l'effectivité de la tâche accomplie par les sages-femmes au Togo sous mandat administré par la France.

Précisons toutefois que ces sages-femmes qui avaient travaillé dans le service du Berceau n'étaient pas toutes françaises. En effet, elles étaient les principales directrices des activités mais étaient aidées par des sages-femmes africaines. Ces dernières étaient composées aussi bien des femmes ressortissantes des pays de l'AOF mais surtout du Dahomey (Le Bénin actuel) et des premières sages-femmes togolaises formées à Dakar car la toute première promotion de sages femmes du Togo en était sortie en 1923 (Marguerat et Péléi 1992:161). Elles devaient donc faire partie des sages - femmes de L'OEuvre du Berceau.

D'une manière générale, la période de mandat du Togo sous la France correspondant à la période de 1922 - 1946 était une période de profondes mutations. Ces mutations ne touchaient pas seulement les nouvelles dispositions sur le recrutement des auxiliaires médicaux mais aussi leur formation prit de nouvelles orientations.

La même période donna aussi naissance à un nouveau corps d'agent de santé autochtone qui est les médecins africains, les sages - femmes, les infirmiers.

Ce nouveau corps était techniquement plus formé que le premier. Il n'était pas formé au Togo comme c'est le cas des auxiliaires médicaux mais pour la plupart à Dakar, capitale de l'AOF.

Des innovations marquaient également cette période. Nous avions énuméré deux services sociaux rattachés à la santé qui furent créés pour le bien des populations indigènes. C'étaient la médecine mobile et L'OEuvre du Berceau. Ces services marquèrent de leur sceau la vie des Togolais par les nombreux rôles qu'ils avaient joué dans cette société.

Mais à partir de 1945, le Togo changea de nouveau son statut, ce qui marqua également le corps des auxiliaires médicaux et des médecins africains.

CHAPITRE SIXIEME: Les auxiliaires médicaux et les médecins africains au temps de la tutelle: 1946 - 1960.

La période allant de 1946 à 1960 est celle qui correspond à la période de tutelle de la France sur le Togo. En effet, c'est à partir de 1946 que le TOGO passa du statut du mandat de la SDN pour celui de la tutelle de l'ONU. Ce nouveau statut, bien que différent du précédant de part ses recommandations vis- à - vis de la France, n'avait pas assez marqué le corps des agents médicaux autochtones. Cependant, certaines dispositions nouvelles avaient été prises. Quelles furent ces dispositions qui marquèrent la fin de la colonisation française au Togo sur les auxiliaires médicaux et les médecins africains? Quel est enfin l'état général de ces agents de santé autochtones?

1-Les nouvelles dispositions de la tutelle

Ces dispositions seront comprises par l'étude de certains faits comme la seconde guerre mondiale et la Conférence de Brazzaville mais aussi par l'analyse de l'esprit de la tutelle sur les agents sanitaires.

1-1- L'héritage de la période du mandat.

Plusieurs évènements eurent lieu pendant mandat qui ont valablement soutenu et avantagé le corps médical autochtone: c'étaient la seconde guerre mondiale et la Conférence de Brazzaville

.

1.1.1. La seconde guerre mondiale

Sur la seconde guerre mondiale, elle n'avait pas créé de rupture dans le service de santé comme l'avait fait la première guerre mondiale. Lors de la première grande guerre (comme nous l'avions démontré plus haut), le personnel médical togolais était délaissé par le personnel allemand qui lui servait de cadre. Par contre, pendant la seconde guerre mondiale, le personnel autochtone était toujours encadré comme la période d'avant guerre. Sur ce, voici ce que nous livre un document secret daté du 16 juillet 193123(*) :« En temps de guerre, le Service de Santé est dirigé par le Chef du Service de Santé du temps de paix.Le Chef du Service de Santé du Territoire en temps de guerre est placé sous les ordres directs du Commissaire de la République qui lui délègue tous les pouvoirs nécessaires au fonctionnement de ce service.»

Ces phrases nous révèlent sans commentaires la continuité des oeuvres sanitaires même pendant la période de guerre. Ces oeuvres se poursuivaient toujours avec l'aide des agents sanitaires autochtones.

Pendant la guerre ce document permettait au chef du Service de Santé d'établir un plan d'action en tenant compte des nécessités suivantes:24(*)

- Utiliser au maximum le personnel médical européen non soumis aux obligations militaires; militaires;

- Assurer l'assistances pré et post- natale, celle des adultes et des vieillards;

- Assurer l'hygiène individuelle et collective des Indigènes et des Européens;

- Continuer la lutte contre la trypanosomiase dans les foyers particulièrement importants et procéder à des sondages dans les régions où elle a été précédemment révélée;

- Procéder aux vaccinations préventives, varioliques en particulier;

- Assurer dans les grands centres la prophylaxie des maladies endémiques (paludisme, fièvre jaune, amibiase, etc.)

- Procéder aux soins curatifs du pian;

- Augmenter le rayon d'action des secteurs sanitaires maintenus.

Comme nous pouvons clairement le constater, ces dispositions prévues pour la période de guerre n'étaient pratiquement pas différentes de celles existant en période de paix; ce qui veut également dire que le Service de Santé n'avait tellement pas senti les coups de la seconde guerre mondiale comme pendant la première guerre.

Aussi est - il important de souligner que, puisque le Service de Santé dépendait aussi de l'apport des auxiliaires médicaux et médecins africains, ceux - ci avaient pendant cette période existé et travaillé comme en temps de paix. Par ailleurs, leur formation aussi s'était toujours poursuivie, même à Dakar (Marguerat et Péléi 1992: 158).

De tout ceci, on peut estimer que la guerre de 1939 - 1945 n'avait pas été un facteur défavorable aux activités médicales au Togo. Plus encore l'a été la Conférence de Brazzaville qui poussa même loin l'idée de l'épanouissement des indigènes.

1.1.2. La Conférence de Brazzaville

Tenue dans la capitale congolaise du 30 janvier au 8 février 1944, la Conférence de Brazzaville a été, sans vraiment le vouloir, un déclencheur de l'affirmation de la personnalité africaine francophone.

Initiée par le général Charles de Gaulle, chef du Gouvernement de la France Libre sous la présidence du Commissaire aux Colonies René Pleven, cette conférence réunit exclusivement les hauts fonctionnaires coloniaux en activité en Afrique: les gouverneurs et les lieutenants - gouverneurs (Gayibor 2005 :204t1). Le Togo a été représenté par le Commissaire de la République Jean NOUTARY.

De retour au Togo, NOUTARY se chargea de mettre en application les décisions de la conférence qui sont d'ordre politico- administratif et social afin de conduire à améliorer les conditions matérielles, spirituelles et morales des populations colonisées qui doivent consentir à s'adapter aux valeurs de la civilisation française (Gayibor 2005: 205t1)

En effet, la France entendait ouvrir le chemin aux Africains afin qu'ils arrivent à petit coup à se prendre en charge et à s'initier à la politique administrative.

C'était dans ce but que les Togolais avaient eu cette latitude de pouvoir se mettre aux côtés des Français pour pouvoir acquérir des connaissances qui leur permettront de pouvoir les suppléer à terme.

Dans le domaine de la Santé, plusieurs mesures avaient été prises pour l'émancipation des médecins africains comme nous le verrons plus loin. C'est ce qu'on peut comprendre à travers les écrits de Miège (1973: 310 - 311 in Gayibor 2005: 205t1) «La Conférence de Brazzaville (30 janvier - 8 février 1944), sans avoir le caractère révolutionnaire et décolonisateur qui lui sera prêté par la suite, remet en cause l'organisation passée...».

A partir de cette conférence, les agents de santé eurent un nouveau départ dans leur niveau d'étude.

Ces dispositions héritées de la période du mandat et les nouvelles recommandations de la tutelle hissèrent la profession médicale autochtone très haut.

1.2. L'esprit de la tutelle et les agents sanitaires autochtones.

La SDN (Société des Nations) qui institua le régime du mandat avait connu sa chute par le déclenchement de la seconde guerre mondiale en1939. C'est ainsi qu'à la fin de cette guerre, LONU (Organisation des Nation Unies) fut créée et, à son tour, institua le régime de tutelle.

Ces deux régimes sont identiques sur le fait qu'ils prenaient la direction des colonies allemandes confiées à la France et la Grande Bretagne; mais leur différence réside dans la souplesse des mesures prises et la volonté d'expansion des colonies voulues par l'ONU.

En effet, pour contribuer efficacement à la réalisation de ces nouvelles dispositions, le Conseil de Tutelle exigea désormais de la France et du Royaume - Uni de produire des rapports annuels portant sur certains points.

Une nouveauté dans ces dispositions était que la Commission de tutelle pouvait envoyer dans les territoires des missions d'observation, qui, dans le cadre du Togo, furent un élément important de son évolution politique et social (Gayibor 2005: 183 t1).

C'est en fonction de ces dispositions que la France fut obligée d'assouplir ses armes de domination sur le Togo.

Sur le personnel de santé autochtone, ces dispositions furent saisies pour que le personnel togolais autochtone puisse s'affranchir des liens et de la volonté des Français de tarder voire bloquer l'évolution de ce personnel

En un mot, de la seconde guerre mondiale en passant par la Conférence de Brazzaville jusqu'aux dispositions du régime de tutelle, on peut retenir que tous ces éléments avaient donné un résultat commun qui est l'éclosion et l'émancipation de la profession médicale autochtone au Togo. Dans la réalité, comment avait donc évolué ce corps des auxiliaires médicaux et de médecins africains au Togo pendant cette période de tutelle?

2 Le personnel médical autochtone au Togo sous le régime de la tutelle.

Sous le régime du mandat comme sous la tutelle, le Togo était administré par la France, ce qui sous - entend que le personnel médical autochtone était sous les ordres des médecins français. Pourtant l'administration des deux régimes était quand même différente l'une de l'autre en fonction des recommandations de chaque régime. En quoi donc le régime de tutelle différait de celui du mandat sur la vie des auxiliaires médicaux et des médecins africains?

Quelles étaient les conditions de vie des auxiliaires médicaux et des médecins africains à traverses les témoignages des agents sanitaires togolais de cette période? Toutes ces questions seront analysées sans passer sous silence le bilan de l'action sanitaire de la France au Togo.

2.1. L'approfondissement des réformes sous le régime de tutelle.

Le régime du mandat a connu sa fin avec l'instauration de celui de la tutelle. Sous celui- ci, plusieurs dispositions avaient été prises.

Sur le recrutement, c'était le système du régime du mandat qui étai poursuivi. Cela signifie que seuls les jeunes gens titulaires d'un certificat d'études primaires étaient admis au stage d'élève infirmier sur concours. Ce concours avait lieu sur décision du gouverneur (Tolgou 1998:37).

En 1947, l'arrêté N° 379/P du 28 mai modifia ce système d'admission. Désormais, l'admission à l'école a lieu chaque année par voie de concours dans la première quinzaine du mois de juillet. (Tolgou 1998:38). Cette disposition accrut considérablement le nombre des auxiliaires médicaux pendant la tutelle.

Recrus, les élèves étaient formés. Le programme et les méthodes de formation demeurèrent mais furent élargis par le décret N°379/P du 28 mai 1947 cité plus haut. Ainsi les nouvelles matières ajoutées étaient l'anatomie, la physiologie, l'hygiène, l'épidémiologie, la bactériologie, la parasitologie, les sémiologies médicale et chirurgicale, la pratique d'urgence, la petite chirurgie, la pharmacologie et l'administration.

L'école de formation de Lomé, à cette date, ne disposait pas de salle de cours à proprement parler, ni de matériel, ni de salles de démonstrations pratiques. Les cours étaient irrégulièrement dispensés à cause de la non disponibilité des professeurs qui étaient des médecins de l'hôpital ou de la ville. Ces absences chroniques des enseignants avaient réduit la formation infirmière aux stages pratiques dans les différents services (Tolgou 1998:39).

D'autres catégories d'auxiliaires étaient également créées à cette époque. Il s'agit des agents sanitaires, des agents techniques et des agents d'hygiène.

Le cadre des agents sanitaires, créé par un arrêté daté du 16 juin 1947 comprenait des agents sélectionnés dans le cadre des infirmiers. Ils étaient recrutés, après concours spécial, parmi les infirmiers titulaires du certificat d'études primaires après examen de la qualité des services du candidat.

Les candidats admis au concours effectuaient un stage d'instruction d'un an à l'hôpital de Lomé dans les services hospitaliers. L'instruction théorique était assurée par les cours professés par les médecins africains en service à Lomé (Gayibor 2005: 584t1).

La sévérité de la sélection expliquait la qualité des agents de ce cadre qui étaient les auxiliaires des médecins. Ils étaient chargés de l'exécution des soins différenciés, des fonctions d'encadrement et de la tenue des dispensaires les plus importants (Tolgou 1998:40). Ensuite viennent les agents techniques.

Il s'agit d'un nouveau corps de cadre supérieur créé par l'arrêté N°1034 - 54/ C.P. du 6 décembre 1954 comportant des agents dûment sélectionnés dans les cadres des agents sanitaires, des infirmiers et destinés à remplacer le cadre des agents sanitaires. Ces agents étaient recrutés soit sur titre, soit par voie de concours ou examen professionnel. Ceux recrutés sur concours ou examen professionnel devaient avoir au moins cinq ans d'ancienneté dans le service. (Tolgou 1998:40-41). Enfin venaient les agents sanitaires.

Créé par l'arrêté du 16 juin 1947, ce cadre, composé d'agents d'hygiène assermentés, était chargé d'assurer sous l'autorité des médecins du service d'hygiène, l'exécution des mesures d'hygiène et de la prophylaxie prévues par les règlements. Leurs formations et leurs avancements étaient superposables à ceux des infirmiers. Les cours théoriques et pratiques se déroulaient au service d'hygiène de Lomé (Tolgou 1998:41).

En résumé, la formation des cadres subalternes avait été quantitativement et qualitativement insuffisante d'abord pour des raisons énumérées plus haut et aussi pour des raisons budgétaires de 1945 - 1957. Pour ces raisons les concours d'infirmiers n'avaient pu avoir lieu en 1952, 1954et en 1955. En 1956 le concours avait permis de recruter seulement 10 élèves infirmiers. Mais à partir de 1958 le développement de l'instruction publique offrait des candidats en grand nombre et par conséquent donnait une sélection satisfaisante (Tolgou 1998:41).

Au total, les services de santé togolais utilisaient en 1950 un personnel de santé composé de 13 Européens et de 419 Africains comme nous le montre le tableau suivant :

Tableau N°6: Personnel européen et africain servant au Togo en 1950

QUALITE

EUROPEENS

AFRICAINS

TOTAL

 

MILITAIRES

CIVILS

 
 

Docteur en

médecine

08

02

02

12

Médecins

africains

00

00

00

00

Chirurgiens

dentistes

00

01

00

01

Pharmaciens

chimistes

01

00

00

01

Pharmaciens

africains

00

00

01

01

Sages-femmes contractuelles

00

01

00

01

Sages-femmes africaines

00

00

03

03

Agents sanitaires

00

00

23

23

Infirmiers (ères) de cadres

00

00

243

243

Infirmiers (ères) auxiliaires.

00

00

27

27

Infirmiers (ères) journalières.

00

00

77

77

TOTAL

09

04

419

432

Source: Tolgou 1998:37.

Ce tableau nous révèle la part importante des Africains au Togo dans la profession médicale, ce qui atteint un pourcentage de 96,99% d'Africains contre environ 3,01% d'Européens. Mais à partir des années 1950 d'autres avantages se présentèrent aux Togolais

La multiplication, le développement et la différenciation des services sanitaires entraînaient dans les années cinquante le recrutement d'un personnel de plus en plus nombreux et de plus en plus instruit. Le relèvement considérable du niveau des études devait permettre le recrutement et la formation de toutes catégories de personnels nécessaires au service de santé. Toutes les facilités étaient données aux étudiants togolais pour poursuivre leurs études en France à l'aide de bourses. Ces dernières étaient offertes sans discrimination aucune, à tous les étudiants. Outre les études en France, d'autres possibilités étaient offertes aux étudiants togolais d'entreprendre leurs études médicales à la nouvelle Ecole de Médecine de Dakar (Tolgou 1998: 42).

Les boursiers togolais en cours d'étude en France en 1956 étaient au nombre de 29 dont 13 étudiants en médecine comme l'indique le tableau qui suit.

Tableau N°7: Situation des boursiers togolais en cours d'étude en France en 1956.

Niveau d'étude

Etudiants en Médecine

Chirurgiens

dentistes

Pharma-

ciens

Sages- femmes

Infir-

miers

1ère année

00

00

00

03

02

2ème année

01

00

00

00

00

3ème année

01

00

01

01

00

4ème année

03

00

01

00

00

5ème année

01

01

01

00

00

6ème année

02

00

00

00

00

Certificats spéciaux

00

01

04

00

00

Spécialisation

05

00

00

01

00

Total

13

02

07

05

02

Source: Tolgou 199:42

Il est à retenir que les premiers médecins togolais avec une formation complète en sept années apparurent dans les années 1950. Parmi ces "médecins complets" nantis d'un doctorat en médecine nous pouvons citer les docteurs KPOTSRA. KEKEH et VOVOR dans les années 1956-1960 (Marguerat et Péléi 1992:123; Gayibor 2005:584t1). Ces derniers exercèrent dans le public contrairement à Pédro Olympio qui, lui, était dans le privé (Gayibor 2005:584t1).25(*)

Ces médecins furent bien accueillis par les agents de santé et les populations. A la lumière des témoignages de ces agents de santé, analysons les conditions de vie du corps des professionnels de la santé au Togo à cette époque.

1.2. Les conditions de vie des agents de santé sous la tutelle:

les témoins parlent.

Les recommandations de la tutelle en collaboration avec les legs du mandat firent de la période 1946-1960, sur le plan des conditions de vie des agents de santé une période prospère. Beaucoup de témoignages montrent que ces fonctionnaires trouvaient que leurs conditions de vie et de travail, à défaut d'être bonnes, étaient quand même acceptables. Sur ce, laissons parler les témoins.

Sur les conditions de travail, voyons d'abord ce qu'était l'effectif du personnel avant d'arriver au matériel. Au sujet des effectifs du personnel, le Docteur Pierre Mikem racontait:«Je ne sauvais vous donner un chiffre exact. Je sais qu'à cette époque, travaillaient le médecin - commandant Chavenon, des troupes coloniales, le médecin Leponcin, et d'autres médecins qui venaient, mais qui ne restaient pas longtemps. Le docteur Chavenon s'occupait de la chirurgie générale et de docteur Leponcin de la médecine générale et de la pédiatrie. Madame Bru, une sage - femme européenne, s'occupait de la maternité, avec cinq ou six sages - femmes africaines. Il y avait à l'époque le médecin. Colonel Lot, qui était là au moment des transferts de l'hôpital; le commandant Chavenon; de la chirurgie étant parti, le médecin - commandant Moran étai venu le remplacer (...) Comme médecins togolais il y avait le Dr Coco Hospice, le Dr Yébovi, le Dr Samuel Kokoroko Johnson et moi: on était à la chirurgie. En médecine générale, il y avait des agents techniques qui secondaient les médecins. Les médecins togolais étaient surtout affectés dans le nord du pays; (...) Le Dr Olympio travaillait comme médecin privé.» (Marguerat et Péléi, 1992: 147- 148; 150 - 151).

Sur l'effectif des sages-femmes, Marie - Louise Mikem, sage - femme raconte « : On n'était pas nombreuses comme sages - femme, à la maternité. On était quatre. (...) Nous étions secondées par une infirmière, et on avait la chance de travailler avec les anciennes infirmières comme Mesdames Anna Wood, Anna Lawson, Adjgo et tant d'autres. Elle (l'infirmière) travaillait avec nous et quand il y avait un cas grave, on faisait appel aux médecins. » (Marguerat et Péléi 1992:162-163).

Comme nous pouvons le constater le personnel était composé d'Européens et d'Africains mais ces derniers aussi avaient à leur charge certains services.

Concernant les conditions de travail et à la question de savoir si elles étaient améliorées Marie - Louise Mikem répondait. « Ah oui, forcément, parce que, quand on était en bas (...) il n'y avait pas de gants ; on travaillait avec les mains nues, si bien qu'à chaque accouchement, surtout quand il s'agissait des cas d'infection, nous avions du mal; ce n'était pas agréable...Mais à Tokoin, il y avait des gants ; et jusqu'à maintenant, les jeunes soeurs travaillent dans des conditions que je dirais faciles, et qui n'existaient pas avant. Il faut dire qu'un grand pas a été fait; elles sont beaucoup plus à l'aise pour travailler.» (Marguerat et Péléi 1992:165).

Cette condition de travail difficile au début mais satisfaisant par la suite a été soulignée par le Dr Pierre Mikem au moment du transfert à l'hôpital de Tokoin:« Nous sommes partis de Lomé avec sept malades seulement, les plus graves, qui devaient constituer le premier lot de malades à être traités dans ce nouvel hôpital. (...) C'est finalement au mois d'août 1954 que tout le reste, le gros matériel, le personnel, a été amené. Tout était en vrac le jour où nous avions démarré le travail à Tokoin. Au service de la chirurgie, alors qu'on avait encore rien installé au bloc opératoire, nous recevions dès la première nuit une urgence chirurgicale: c'était une hernie étranglée...On a dû travaillé dans des conditions impossibles, mais nous étions très contents parce que, finalement, on a réussi à le tirer d'affaire...»; mais seulement quelques temps après, continue l'interlocuteur, «le personnel était satisfait, parce qu'il pouvait travailler dans de meilleurs conditions, avec du matériel médico- chirurgical meilleur! Les installations, les structures étaient également plus accueillantes que ce qu'il y avait à Lomé.» (Marguerat et Péléi 1992: 150 - 151)

Parmi ces conditions de travail, l'accueil n'en manquait pas. L'état de ces accueils d'abord entre infirmiers et médecins togolais revenus de Dakar puis entre les «Dakarois» et les jeunes docteurs revenus d'Europe.

Sur ces points, voici ce que nous livrait le Dr Mikem d'abord sur l'accueil Infirmiers-Dakarois «La solidarité dans le travail ne s'est pas instaurée immédiatement. C'est avec le temps, petit à petit, qu'on s'est familiarisé, car, quand nous sommes arrivés, il y avait des anciens infirmiers qui faisaient fonction d'assistants des médecins de l'époque, et qui travaillaient très bien. Il y a eu des noms célèbres comme les Kpadénou, les Adjgo, qui ont été des infirmiers réputés dans le temps, qui assistaient vraiment correctement les médecins dans leur travail! Quand nous étions arrivés, il est vrai que l'entente ne s'est pas établie tout de suite, mais, petit à petit, on a appris à se tolérer, et l'entente a fini par prédominer.»

Concernant eux - mêmes formés à Dakar et les docteurs revenus d'Europe il disait ceci: «En tout cas, nous les avons bien accueillis, tout au moins pour moi! J'ai trouvé là la possibilité d'avoir encore du personnel médical; ce qui permettait de partager ma tâche, car, quand j'étais médecin résident, il y avait un seul médecin pour la chirurgie, le docteur Brimbusson, qui, avec me docteur Moran, assumaient les tâches dans tout le service chirurgical. J'étais littéralement sollicité à chaque instant, pour les urgences médicales comme

les urgences chirurgicales! La tâche était énorme...Donc c'était un plaisir pour moi de pouvoir partager ces tâches avec des confrères nouvellement arrivés. Ces nouveaux étant d'ailleurs plus ou moins la famille, parce que la plupart des médecins avaient envoyé leurs enfants pour la relève......» (Marguerat et Péléi).

De tout ce qui précède, il est certain que les agents de santé autochtones que sont les auxiliaires médicaux et les médecins africains avaient connu une évolution considérable sous le régime de la tutelle, c'est à - dire entre 1946 - 1960. Cette sensible évolution était tributaire de certains grands événements dont la seconde guerre mondiale et la Conférence de Brazzaville. Ces éléments avaient donné un nouveau souffle aux agents sanitaires autochtones; mais avec l'esprit de la tutelle, le corps autochtone des agents de la santé connu un éclat sans précédant.

En effet, l'approfondissement des réformes qui a été enregistré à partir des années 1940 marqua profondément la carrière médicale. Les différents décrets et arrêtés portants sur l'organisation du service de santé et sur la création de nouveaux corps d'auxiliaires médicaux avaient atteint leur sommet par la chance qu'avaient alors les Togolais, grâce aux bourses d'études, de poursuivre les études en Europe pour sortir nantis du doctorat.

Toutes ces dispositions avaient assoupli et amélioré les conditions de vie et de travail des agents de santé des Togolais.

3. Bilan de l'action médicale française au Togo

Comme bilan, nous pouvons noter que les activités médicales continuèrent à se résumer à l'exécution des mesures d'hygiène, de salubrité et d'assainissement intéressant la protection de la santé publique, prescrites par le chef du territoire; à assurer dans les agglomérations rurales et urbaines le dépistage des maladies endémiques, épidémiques et appliquer instantanément toutes mesures propres à les combattre et empêcher leur extension; à développer chez les populations autochtones, sous la direction des médecins, les notions élémentaires d'hygiène, surveiller l'hygiène de l'enfance et collaborer à la lutte contre les causes de la mortalité infantile; à encadrer solidement le personnel indigène affecté aux services d'hygiène (Assima-Kpatcha 2004:300.)

Les services sanitaires du Togo sont calqués sur celle des autres colonies françaises. Le territoire est partagé en subdivisions sanitaires correspondant généralement aux limites des cercles. A la tête de chaque subdivision sanitaire est placé un médecin qui dirige et contrôle un personnel composé d'infirmiers, de médecins auxiliaires et de sages- femmes. De chef de subdivision sanitaire ordonne et dirige les recensements démographiques, donne les conseils d'hygiène nécessaires, examine les malades graves et au besoin assure leur évacuation sur la formation sanitaire la plus proche. Cette action, menée avec persévérance auprès des Africains et appuyée par des tournées périodiques de prospection, obtient un plein succès. Le nombre de dispensaires et de postes de traitement augmente régulièrement et la lutte contre les maladies endémo épidémiques s'intensifie (Tolgou 1998:35).

Dans l'ensemble, le territoire fut partagé en sept subdivisions sanitaires correspondant aux limites territoriales ou encore aux subdivisions administratives (Cornevin 1987:405; Alonou 1994:30).

A Lomé, il existait un service de police sanitaire maritime chargé de la reconnaissance et l'arraisonnement des navires. Ce service était exercé par le chef du service de santé et des agents sanitaires placés sous son autorité. Il avait également sous ses ordres: le médecin arraisonneur, le gardien de lazaret, les gardiens sanitaires et les sous- agents sanitaires.

Dans chaque subdivision administrative, il était créé une commission sanitaire d'hygiène composée du médecin de cercle, du commandant de circonscription, d'un notable indigène et d'un commerçant européen. Les médecins de circonscriptions étaient vice-présidents des missions sanitaires d'hygiène et veillaient à la stricte observation des règlements sanitaires dans toute l'étendue du cercle. Ils signalaient également à la commission tous les accidents sanitaires qui se produisaient dans me cercle (Alonou 1994:30-31).

Au centre de chaque circonscription sanitaire il y avait un hôpital indigène organisé avec petit laboratoire, matériel de désinfection mobile, dépôt de médicament, sérums et vaccins, moyens de transport et tout le matériel utile pour l'organisation, l'approvisionnement et le ravitaillement des services sanitaires mobiles. (Alonou 1994:34).

C'était ainsi que le service de santé colonial était organisé pour que tout le territoire soit couvert et les populations bien suivies. Avec les actions, la détermination et la bravoure des agents de santé autochtone, ces objectifs avaient été atteints.

CONCLUSION GENERALE

En somme, disons que la formation du personnel autochtone en science de la santé remonte à l'époque coloniale. La naissance des professionnels de la santé dans la société togolaise découle de la volonté politique des Allemands d'amener à la pratique médicale occidentale des populations qui ne se soignaient que par les plantes avec leur médecine traditionnelle.

Les Allemands avaient eu la difficile charge d'amener les indigènes à la pratique médicale des Blancs, tâche délicate du fait que les guérisseurs et charlatans avaient "pignon sur rue" et avaient parfois des connaissances en botanique.

Au fait, les "Togolais" n'avaient pas attendu l'arrivée des Européens pour se soigner. Chaque communauté avait ses guérisseurs, généralement appelés les médecins traditionnels.

Cette médecine dite traditionnelle a ses fondements dans la culture des peuples où les traditions rentrent en ligne de compte. Elle était fortement ancrée dans les différentes communautés traditionnelles et les maîtres de cette médecine avaient du poids aux yeux de leurs frères. C'est dans ce contexte que le colonisateur allemand avait cherché à introduire, non sans difficulté, la médecine moderne. Donc elle chercha, pour avoir du crédit aux yeux des populations, à combattre les maladies pour au même moment écarter la main - mise des guérisseurs traditionnels sur cette médecine. C'est à cette tâche que s'étaient attelés les médecins coloniaux.

Les difficultés de ces médecins, l'ignorance des coutumes et dialectes "togolaises", mais surtout le nombre très insuffisant du personnel allemand, avaient contraint les Allemande à ébaucher la formation d'un corps d'auxiliaires médicaux autochtones.

Les conditions de recrutement de ces agents de santé qui pour la plupart étaient de niveau très peu élevé et surtout la formation professionnelle qui leur était donnée firent de ces auxiliaires médicaux des cadres subalternes qui restaient sous les ordres des médecins allemands. Ainsi donc, ce personnel de santé, composé d'Allemands et de Togolais avaient accompli certaines actions à l'endroit des populations togolaises car, souligne DAJA «La santé a été l'une des tâches prioritaires de l'administration allemande au Togo» (Dadja 1983:263). C'était le cas de la variole dont la vaccination constituait la principale arme. C'était la maladie qui était la plus répandue, la plus récurrente et qui faisait le plus de ravage parmi les populations de cette époque. Pourtant, malgré les énormes efforts pour endiguer le fléau, celui -ci ne s'arrête pas. Durant l'été 1911, la variole s'étant encore déclarée dans toutes les parties du Togo avec l'importantes pertes en vies humaines dans certains cercles, il faut encore multiplier les vaccinations. Certains cercles avaient enregistré jusqu'à 4000 personnes ravagées par ce fléau.

La variole n'était pas la seule maladie ciblée par le personnel de santé de la période allemande. Il y avait aussi la maladie du sommeil, la méningite cérébro-spinale.

Si avec la maladie du sommeil il y a un traitement et que contre la variole il existe un vaccin préventif, il n'en était pas de même pour certaines épidémies dont la méningite cérébro-spinale face à laquelle les Allemands ne disposaient d'aucun remède.

Malgré ces difficultés qu'éprouve le pouvoir colonial dans sa lutte contre certaines maladies, on peut dire, s'agissant de l'ensemble du protectorat dans le domaine médical que les infrastructures existent et des médecins aussi; ces derniers étant bien entendu aidés dans leurs travaux par les auxiliaires médicaux autochtones.

De réels efforts sont fait dans une partie du territoire, ce qui constitue un facteur d'évolution social important, contrairement à la situation qui prévalait encore à Kété- Kratchi, Sokodé- Bassari et surtout Mango - Yendi.

Ainsi, jusqu'à la fin de la présence allemande, ces régions ne connaissent que le régime de vaccination. En dehors de celui -ci, pas d'infrastructures, ni de présence permanente de médecins pour suivre régulièrement les populations et les soigner d'autres maladies.

De toutes les circonscriptions de l'arrière - pays, Mango-Yendi semblait la plus mal lotie. Elle ne connut qu'une campagne de vaccination en 1908 et ceci grâce à la présence d'un médecin dans la commission de délimitation de la frontière.

En dehors donc de ces campagnes de vaccination, il n' y avait plus rien comme structures sanitaires dans toute cette vaste région, à l'exception des 2 villages de lépreux dans le cercle de Sokodé - Bassari et celui de Bogou dans le cercle de Mango - Yendi, ce que Ali Napo qualifie de « vide territorial de la région, à son peuplement et surtout aux besoins en santé pour médical que l'on peu même qualifier d'absolu si l'on fait référence à l'étendu ces populations.» (1995:1878t4).

De toute évidence, la formation des auxiliaires médicaux datait depuis l'époque allemande. Mais quelle que soit la formation, aucun d'eux n'accédait au diplôme d'Etat. Ce comportement du colonisateur était - il au refus délibéré pour sauvegarder sa suprématie ou était - il dû au bas niveau intellectuel des autochtone? Deux réponses peuvent être envisagées à cette question.

Tout d'abord la première assertion peut être vraie dans la mesure où le personnel subalterne qu'ils acceptaient de former était plus une contrainte qu'un souci de promouvoir l'éducation des autochtones en science de la santé. Les épidémies et les maladies dues au manque d'hygiène qui sévissaient au début de la colonisation ne pouvait pas laisser indifférents les colons car ils avaient besoin de la main- d'oeuvre autochtone et de percevoir les taxes civiques. Il fallait alors « sauver » ces autochtones. Mais le nombre de médecins colons était très insuffisant pour prendre en charge tous les malades autochtones.

Pour pallier à ce déficit, les colons avaient introduit l'enseignement de quelques notions de médecine moderne aux autochtones. Ceux- ci, étant initiés, devaient prendre en charge leurs compatriotes malades. Leur nombre étant aussi insuffisant pour couvrir tout le pays, les colons avaient trouvé la nécessité d'enseigner aux autochtones les notions d'hygiène afin qu'ils évitent de contracter certaines maladies. C'est d'ailleurs ce qui explique la primauté de la médecine préventive à l'époque allemande.

La formation des autochtones n'étant pas une priorité de l'administration mais un besoin éprouvé par le médecin colon, on comprend pourquoi aucun programme de formation n'était mis sur pied et que la formation elle - même s'était réduite qu'à la pratique.

Cependant, la réponse envisagée précédemment pourrait être réfutée parce que les colons utilisaient une langue différente de celle des autochtones et compte tenu du bas niveau intellectuel de ceux - ci, il n'était pas aisé pour les colons de promouvoir leur formation. Nous avons pour preuves le recrutement et la formation des premiers auxiliaires médicaux. Ces derniers étaient analphabètes, mais au fur et à mesure que le niveau intellectuel s'élevait, le choix se portait sur les élèves de niveau des auxiliaires médicaux, des conditions de recrutement et de la formation qui leur était donnée, leur apport a été considérable au côté des médecins allemands. Ils arrivaient à intégrer certains milieux inaccessibles et hostiles aux Allemands.

Toutefois, les Allemands étaient contraints de laisser le Togo, et donc les auxiliaires médicaux, après leur défaite de la première guerre mondiale.

Les conditions du déclanchement de la guerre mais aussi de sa durée au Togo (juste deux semaines) n'avaient pas permis aux Allemands de préparer une relève qui s'occuperait du personnel médical à leur départ.

Ainsi, le personnel médical autochtone laissé par les Allemands en avait souffert. Par là, la guerre de 1914 - 1918 laissa de sérieuses répercussions sur les activités médicales et sur l'émergence d'un personnel médical autochtone.

Après le climat d'attentisme, c'est - à dire de méfiance des Anglais et Français vis - à - vis du Togo allemand et surtout le problème de personnel médical créé par la guerre, certaines solutions, à titre temporaires avaient été élaborées conjointement par les Anglais et les Français, chacun dans sa zone d'occupation.

Mais on pouvait espérer les débuts d'une véritable volonté de résoudre cette crise pendant la période 1920 -1922.

Pendant ces dernières années au cours desquelles le Togo était sous occupation anglo-française, certaines réformes étaient enregistrées dans la partie du Togo administrée par les Français (partie orientale).

On peut dire qu'en matière de recrutement les premiers personnels médicaux sous occupation française, il y eut d' abord une période de flottement entre 1914 et 1919. Mais à partir de 1920, des clarifications furent introduites afin de définir les règles devant régir le travail salarié.

Dans ce cadre, la situation des auxiliaires médicaux embauchés antérieurement sans statut précis commença à être spécifiée. Plusieurs arrêtés furent alors signés procédant à l'organisation des cadres, à l'établissement de la hiérarchie professionnelle et à la fixation précise des soldes. Mais ces réformes seront approfondies à partir de 1922.

Entre 1922 et 1960, les différents statuts internationaux du Togo avaient de toute façon renforcé puis consolidé le corps des auxiliaires médicaux d'une part et favorisé l'émergence d'un nouveau corps de médecins africains de l'autre.

D'abord entre 1922 et 1946 le Togo était sous le régime de mandat de la SDN .Pendant cette période, les Français inaugurèrent et affinèrent lentement une politique de santé qui devint plus dynamique à partir des années 1930. Une attention particulière était accordée à l'état de santé des populations et le recul des endémies revient sans cesse dans les rapports annuels adressés à la SDN

.

C'était sous le régime du mandat que le recrutement des auxiliaires médicaux connut une évolution significative grâce aux décrets et arrêtés de cette période. Ainsi, le niveau était alors élevé, ce qui pouvait permettre aux auxiliaires médicaux une formation aisée. La formation elle-même prit des avancées considérables. Il y avait alors un programme de formation qui concernait plus la pratique que la théorie.

Par leur rôle, ces infirmiers étaient proches des populations. On les retrouvait dans les villages isolés en poste ou en tournées de vaccination. Le fait qu'ils arrivaient, par leurs soins gratuits, à soulager certains malades leur valait beaucoup de considération et de respect.

Les principaux auxiliaires médicaux des Français avaient joué un rôle prépondérant dans les nouvelles innovations qu'étaient la médecine mobile et l'OEuvre de Berceau. Etant de création française, ces innovations avaient pour moteurs principaux le personnel médical autochone même si elles étaient dirigées par les Français.

Par leurs oeuvres , le personnel autochtone contribuait à la lutte contre les endémies comme la rougeole, la syphilis, le pian , la variole et surtout la maladie du sommeil vigoureusement combattue à partir de 1927.

Progressivement, on passa des auxiliaires médicaux aux médecins africains. Les conditions de recrutement de ceux-ci étaient plus rigoureuses et la formation qu'on leur donnait n'était pas des moindres. Ils étaient formés dans une école spéciale à Dakar d'où ils sortaient avec le diplôme d'Etat. Un autre décret avait été pris pour permettre aux médecins, sages- femmes et pharmaciens africains d'accéder aux études de médecine en France à partir des années 1950.

Ces années 1950 se situaient dans la période de tutelle de l'ONU où le Togo était administré par la France.

Cette tutelle couvrait de 1946 à 1960. Donc cette facilité qu'avaient les Togolais de pourvoir compléter leur formation en France pour être des « docteurs  complets » était le fruit de certaines circonstances. Nous pouvons faire cas des héritages de la seconde guerre mondiale et de la Conférence de Brazzaville. Ces circonstances, surtout la seconde a été un effet déclencheur du brassage de connaissance entre Français et Africains, précisément les Togolais.

Ainsi, les réformes datant du régime du mandat avaient été approfondies ; ce qui améliora considérablement les conditions de vie du personnel de santé autochtone.

En tout état de cause, nous reconnaissons que la formation du personnel médical autochtone remonte au début de la colonisation avec les Allemands. Ils ont été remplacés par les Français à partir de 1914 et ces derniers étaient présents jusqu'en 1960. Pendant toute l'époque coloniale, les structures pouvant garantir une formation quantitative et qualitative n'avaient pas été mises sur place jusqu'en 1956, année au cours de laquelle le Togo est devenu République Autonome. Par ailleurs, la formation qualitative du personnel autochtone n'a été effective qu'après l'indépendance du pays en 1960 ?

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

DOCUMENTS D'ARCHIVES A L'A.N.T. / LOME

Série H : La Santé

Sous série 1 H

Dossier 24 : Correspondances et rapports sur le fonctionnement du service de santé au Togo. Etat nominatif du personnel employé dans les services sanitaires.

Dossier 42 : Instruction relative à la mobilisation sanitaire en temps de guerre.

Dossier 45 : Législation de l'exercice de la médecine et de l'art dentaire.Dossier concernant le Docteur Pedro Olympio.

Dossier 62 : Rapport sur le personnel du corps de santé colonial.

Série L : Travail et lois sociales

Sous série 1L

Dossier 3 : Arrêté instituant des livrets de contrats de travail et réglementant la visite sanitaire de travail.

Règlement sur le pécule des travailleurs auxiliaires indigènes employés dans l'administration.

Sous série 2L

Dossier 2 : Circulaire n°2202 du 22/09/1924 relative aux mesures de protection sanitaire à appliquer aux travailleurs indigènes.

Série 4APA : Relations avec les colonies voisines (TOGO-DAHOMEY)

Dossier 4 : Lettre confidentielle du gouverneur Fourn de la colonie du Dahomey au gouverneur général de l'AOF sur l'organisation politique et administrative du Togo sous occupation française notamment rattachement de certains services du territoire à ceux du Dahomey.

BIBLIOGRAPHIE

AFANOU (K.), 1989 : La politique sanitaire allemande à Lomé de 1897 à1914, mémoire de maîtrise en allemand, UB, 147p.

AGENCE DE DISTRIBUTION DE PRESSE, 1949 : Guid'AOF : Afrique occidentale français cercle par cercle 1949. Dakar, 431 p

ALONOU (K.), 1994 : La politique sanitaire de la France au Togo à l'époque coloniale : 1919-1960. Thèse de doctorat, Université de Poitiers ,303p

ASSIMA-KPATCHA (E.), 2004 : Travail et salariat au Togo dans l'entre-deux- guerres : 1914-1939. Thèse de doctorat, Université de Lomé, 342 p.

CHAZELAS (V.), 1931 : Territoires africains sous mandat de la France : Togo Cameroun. Paris, 240p

CORNEVIN (R.) ,1987 : Le Togo, dès origines à nos jours. Paris ,556p

DADJA (S.H.-K.), 1982 : Le Togo «  Musterkolonie ». Souvenirs de l'Allemagne dans la société togolaise. Thèse de doctorat 3eme cycle, Université de Provence, tome 1, 544p.

GAYIBOR (N.L.) (ss.dir.), 2005 : Histoire des Togolais de 1884 à 1960, Tomes 1et 2544p.

MARGURAT (Y.), 1992 : Lomé, une brève histoire de la capitale du Togo, Karthala et Haho, 64p.

MARGUERAT (Y.) & PELEI (T.), 1992 : Si Lomé m'était comptée.... PUB ; tome 1, 240p + photos.

KODJO (A.), 1984 : Le Togo depuis la Conférence de Berlin ; 1884-1984. Lomé, 208 p.

PECHOUX (L.) ,1939 : Le mandat français sur le Togo. Paris.

REAL (J.) ,1980 : L'administration du protectorat allemand du Togo .Répertoire des Archives coloniales allemandes : 1884-1914. Lomé

SARRAUT (A.), 1923 : La mise en valeur des colonies africaines. Paris, 656 p.

TCHAM (K.B.), 2002 : Le bassin de l'Oti du XVIIIe siècle à 1914. Thèse de doctorat d'Etat, Université de Lomé, tome 2, pp. 387-622.

TOLGOU (Y.), 1998 : Les formations Médicale et Paramédicale au Togo. Thèse de doctorat en médecine UB, 130 p.

ZÖLLER (H.), 1890: Le Togo en 1884. Karthala et Haho, 216p

Table des tableaux et carte

Tableau N° 1 : Nombre d'infirmiers en fonction de leurs spécialités et de leurs années d'engagement ........................................................................18

Tableau N° 2 : Nombre de postes médicaux et effectifs du personnel européen et africains de 1922 à 1927 ...................................................................42

Tableau N° 3 : Nombre de postes médicaux et des effectifs des personnels européens et africains de 1928 à 1931......................................................45

Tableau N° 4 : Nombre d'accouchements pratiqués dans les maternités ......48

Tableau N° 5 : Nombre de consultations ..........................................48

Tableau N° 6 : Personnel européen et africain servant au Togo en 1950......56

Tableau N° 7 : Situation des boursiers togolais en cours d'étude en France en 1956..............................................................................................57

Carte : Etablissements sanitaires en 1928 .........................................44

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE 2

PREMIERE PARTIE : L'EMERGENCE D'UN ENBRYON D'AUXILIAIRES MEDICAUX AU TOGO SOUS LA COLONISATION ALLEMANDE : 1884-1914 8

CHAPITRE PREMIER : Les guérisseurs traditionnels togolais avant 1884...10

1. Les maîtres de la médecine traditionnelle.................................10

1.1. Le sorcier.......................................................................10

1.1. Le féticheur ou prêtre..............................................................11

1.2. Le devin............................................................................11

2. Leurs rôles sociaux ...............................................................11

2.1. Les moyens d'intervention .......................................................11

2.2. Leur prestige social................................................................12

CHAPITRE DEUXIEME : L'intrusion coloniale allemande et l'émergence d'un personnel médical autochtone : 1884-1914..........13

1. L'implantation de la médecine moderne coloniale au Togo par les Allemands...........................................................................13

1.1 Le personnel de santé allemand...................................................13

1.2 L'ébauche d'un personnel autochtone ..........................................15

1.2.1 Recrutement et condition d'admission .......................................15

1.2.2 La formation professionnelle..................................................15

2. Les auxiliaires médicaux sous les Allemands...............................18

2.1 Le régime législatif des auxiliaires médicaux sous les Allemands et les salaires...................................................................................18

2.2 La hiérarchie des auxiliaires médicaux.........................................18

2.3 Les actions des auxiliaires médicaux............................................19

2.4 Bilan de l'action médicale allemande au Togo.................................20

DEUXIEME PARTIE : LES AUXIAIRES MEDICAUX AU TOGO SOUS OCCUPATION ANGLO-FRANÇAISE :

1914-1922.........................................................22

CHAPITRE TROISIEME : Les entraves aux activités médicales : la guerre de 1914-1918 et l'occupation du Togo allemand.......24

1. La guerre et les activités médicales..............................................24

1.1 La guerre de 1914- 1918 au Togo ................................................24

1.2 D'étouffement des activités médicales...........................................25

2. L'attentisme et les solutions anglo- françaises au problème médical.....26

2.1 L'attentisme anglo- français .......................................................26

2.2 Le problème de personnel médical créé par la guerre..........................27

2.3 Les solutions anglo- françaises au problème....................................28

CHAPITRE QUARTRIEME : L'émergence d'un véritable personnel médical autochtone au Togo : 1920-1922................30

1. La réorganisation de la profession médicale ..............................30

1.1 Les raisons de la réorganisation du corps des agents de santé...............30

1.2 Les timides réformes des années 1920-1922...................................31

2. Le personnel médical autochtone et les réformes...........................32

2.1 La revalorisation du personnel autochtone......................................32

2.2 Les débuts d'un nouveau corps d'agents de santé autochtones .............33

TROISIEME PARTIE : LE RENFORCEMENT ET LA CONSOLIDATION DU CORPS AUXILIAIRES MEDICAUX ET DES MEDECINS AFRICAINS AU TEMPS DES FRANÇAIS : 1922-1960..............................34

CHAPITRE CINQUIEME : Les auxiliaires médicaux et les médecins africains au temps du mandat : 19922-1946..................36

1. Les auxiliaires médicaux et les médecins africains : conditions de recrutement et formations......................................................36

1.1 Les auxiliaires médicaux ; conditions de recrutement et formation professionnelle. ...................................................................36

1.1.1 Les conditions de recrutement ...............................................36

1.1.2 La formation professionnelle.................................................36

1.2 Les médecin africains : conditions de recrutement et formation professionnelle ....................................................................38

1.2.1 Les conditions de recrutement ...............................................39

1.2.2 La formation professionnelle.................................................40

2. Le personnel médical et les nouvelles innovations ........................41

2.1 Le personnel médical .............................................................41

2.1.1 Le personnel médical européen et ses activités.............................41

2.1.2 Le personnel autochtone et ses activités ...................................42

2.2 Les nouvelles innovations ........................................................46

2.2.1 La médecine mobile ...........................................................46

2.2.2 L'OEuvre de Berceau..........................................................47

CHAPITRE SIXIEME : Les auxiliaires médicaux et les médecins africains au temps de la tutelle : 1946-1960............................50

1. Les nouvelles dispositions de la tutelle ..........................................50

1.1 L'héritage de la période du mandat................................................50

1.1.1 La seconde guerre mondiale ......................................................50

1.1.2 La Conférence de Brazzaville...................................................51

1.2 L'esprit de la tutelle et les agents sanitaires autochtones........................52

2. Le personnel médical autochtone au Togo sous le régime de la tutelle.....53

2.1 L'approfondissement des réformes sous le régime de tutelle....................54

2.2 Les conditions de vie des agents de santé sous la tutelle : les témoins parlent....................................................................................58

3. Bilan de l'action médicale française au Togo....................................60

CONCLUSION GENERALE..........................................................63

Sources et Bibliographie...............................................................69

Table des tableaux et cartes...........................................................73

Table des matières.......................................................................74

* 1 Adepte du culte « Vodou » communément connue sous Da Vodou. Interviewée le 11-03-06 à Aklakougan, 56 ans.

* 2 Passage cité par ALONOU et SEBALD en introduction à l'article « l'OEUVRE SANITAIRE DE LA COLONISATION » de L'Histoire desTtogolais de 1884 à 1960, VII, t1, P. 273

* 3 Les écoles officielles de Zébé et de Lomé étaient les seules écoles existant à l'époque

* 4 Les moniteurs du département infirmier EAM-LOME, 2001 : Déontologie de l'infirmier€ et histoire du nursing, p. 42

* 5 ANT-Lomé, 1H. Dossier 45 portant sur la législation de l'exercice de la médecine et de l'art dentaire concernant le Dr Pedro OLYMPIO.

* 6 La profession des auxiliaires médicaux évoque plusieurs éléments : le recrutement des futurs auxiliaires ; leur formation et la durée de la formation ; le personnel et ses conditions de travail ; les salaires.

* 7 C'était une réglementation relative aux médecins, aux hôpitaux, aux polycliniques et à la pharmacie.

* 8 Expression allemande désignant le Protectorat du Togo

* 9 Von Doering assurait en ce moment l'intérim du duc de Mecklembourg alors en congé.

* 10 Cette station radio était très vitale pour l'empire allemand outre-mer ; aussi Berlin donna l'ordre à Von Doering de la défendre à tout prix.

* 11 Ces options (hypothèses) étaient élaborées par Clifford le 30 Octobre 1914 à la demande du Colonial Office, au cas où la guerre en Europe aboutirait à la victoire des Alliés.

* 12 La lettre en question était datée du 7 Octobre 1916. En effet Gabriel Angoulvant assurait à cette époque l'intérim de Clozel au gouvernement général de l'AOF.

* 13 Concernant les différentes positions anglaise et française sur le Togo, se référer à : Gayibor 1997 : 105-108 et Gayibor 2005 :156-159.

* 14 Arrêté du 17 février 1921 portant classement du personnel indigène du cadre local du Service de Santé (J.O. du 1er mars 1921, p.21).

* 15 Rapport annuel à la SDN, 1932, 1944.

* 16 Interview réalisée par MARGUERAT et PELEI avec le Docteur Pierre Dosseh Nicoué MIKEM, l'un des doyens des médecins togolais.

* 17 Agence de distribution de presse : Guid'AOF : Afrique Occidentale Française cercle par cercle 1949, 1949 p.23

* 18 Rapport annuel à la SDN 1923 p37

* 19 Rapport annuel à la SDN, 1924 : 45

* 20 Idem

* 21 Rapport annuel à la SDN, 1924 : 44

* 22 Rapport annuel à la SDN, 1924 : 44.

* 23 ANT, 14 dossier 42. Instruction relative à la mobilisation sanitaire en temps de guerre.

* 24 A.N.T., 1H dossier 42.Instruction relative à la mobilisation sanitaire en temps de guerre.

* 25 Pedro Olympio avait obtenu le grade de docteur en médecine en Allemagne en 1925. Il avait, pour cela, été autorisé spécialement à exercer sa profession au Togo mais à titre privé puisqu'il n'était pas formé en France selon les lois en vigueur à cette époque. ANT, 1H dossier 45 consernant le docteur Pédro Olympio.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo