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L'aide alimentaire monétisée quel impact sur le développement social et économique : Le cas du Niger

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par Aymar Michael MBENZE NZICOUD
Institut Universitaire de Technologie de Bordeaux 3 - DUT en Gestion du Développement et l'Action Humanitaire 2007
  

Disponible en mode multipage

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Sommaire

Introduction........................................................................1

PREMIERE PARTIE

I / - Le Niger : les facteurs aggravants en matière de sécurité alimentaire...6

1/ - Présentation des facteurs ......................................................6

a/ la pauvreté.........................................................................6

b/ le désert et la sècheresse.........................................................7

c-le climat ............................................................................8

d-La croissance démographique...................................................8

2/ -Les orientations politiques de la sécurité alimentaire au Niger...........9

a/ Les principales cultures vivrières du Niger..................................10

 

II/ -la place de l'aide alimentaire dans la politique de sécurité alimentaire au Niger..............................................................................10

1/ -L'aide alimentaire programmes (ou continue).............................11

a/ Mise en oeuvre de l'aide programme (ou la monétisation).................12

b/ Controverse au tour de la question de l'aide alimentaire monétisée......15

2/ L'aide en situation d'urgence (cas de la crise de 2005)................... 16

a/ La mise en oeuvre de l'aide d'urgence au Niger en 2005..................20

DEUXIEME PARTIE

III/ -Les pays donateurs et les conditions d'octroie de l'aide alimentaire..22

1/ Quels sont les pays donateurs et organisations internationales intervenant Niger ?........................................................................................................22

2/ -De quoi est constituée l'aide alimentaire apportée au Niger...........................................................................25

3/ -Dans quelles conditions l'aide alimentaire est elle acheminée ?.........................................................................................26

TROISIEME PARTIE

IV/ -TENTATIVE DE REPONSE AUX..................................28

HYPOTHESES........................... ..................................28

Hypothèse 1..................................................................28

Hypothèse 2 ..................................................................30

Hypothèse 3 ..................................................................31

DISCUSSION/CONCLUSION.............................................33

Annexe

Introduction

Le choix de ce sujet nous a été inspiré à la fois par l'actualité alarmante des désastres que cause la malnutrition dans le monde entier sous des formes diverses, mais aussi et surtout, pour me conformer à nos objectifs de formation et nos projets de fin de formation, c'est-à-dire, la conception, la coordination et le suivi des projets de développement en milieu rural, notamment en ce qui concerne l'autosuffisance alimentaire dans des sociétés où la famine à des caractères endémiques et épidémiques.

En effet, parti du principe qu'il n'y a et n'aura aucun développement conséquent dans une société sans le développement du secteur rural qui sert, dans la majorité des pays, de moteur à combustion interne, permettant le ravitaillement en vivres et de toutes sortes de produits de première nécessité garantissant la sécurité alimentaire. Ayant constaté les multiples crises de production que connaît ce secteur d'activité dans certains pays du tiers monde, ayant aussi pris en compte les difficultés d'ordre conflictuelles, stratégiques ou naturelles qui, sans doute, si elles n'étaient pas considérées fausseraient tout raisonnement. Nous sommes arrivés à nous interroger sur les facteurs externes favorisant l'équilibre de ce secteur sur lequel repose la sécurité alimentaire ou contraignant celui-ci à marcher de façon bancale en ayant pour seul repère l'aide alimentaire des pays dits développés. Il nous à paru clairement que la notion d'aide alimentaire était à la fois un enjeu important dans le développement des pays souffrants de malnutrition et de famine - puisqu'elle est très souvent présentée comme la solution pour venir en aide aux populations en crise et aussi une façon de favoriser le progrès économique de ces pays - ainsi qu'aux pays donateurs, touchant ainsi un système d'organisation plus large qu'est : le système d'aide humanitaire international.

L'encyclopédie Encarta donne la définition suivante de l'aide internationale :

« C'est l'ensemble des ressources, publiques ou privées, transférées à l'échelle internationale à des conditions plus favorables que celles du marché, dans le but de favoriser le progrès économique et social des pays qui en sont les destinataires ».

Si l'aide alimentaire apportée aux populations des pays qui sont dans le besoin peut se justifier, nous sommes cependant restés perplexe face à la présence de cette aide sur les marchés nationaux. Nous avons alors entrepris des recherches sur cette aide monétisée sur les marchés locaux. Quelle est sa pertinence, son impact, son efficacité sur les problèmes d'insécurité alimentaire qui prévalent dans certains pays du tiers monde ?

C'est de cette façon que nous avons été amené à choisir de traiter du thème de l'« aide alimentaire monétisé ».

Dans la question de l'aide alimentaire il y a la question sous-jacente de l'insécurité alimentaire, car, considère t-on à tord ou à raison qu'elle est le fondement même de cette idée de l'aide alimentaire.

Ici la sécurité alimentaire devrait s'entendre comme : « la possibilité pour tous de disposer en permanence d'une alimentation suffisante pour être en bonne santé et mener une vie active ». Nous nous pressons de préciser que cette définition donnée par la Banque mondiale en 1986, est loin d'être une définition univoque car, elle ne saurait refléter la complexité de la notion d'insécurité alimentaire dont les indices d'identification sont très discutables selon les circonstances et selon le niveau économique de certains pays du monde.

On peut distinguer deux formes d'insécurité alimentaire : l'insécurité alimentaire permanente et l'insécurité alimentaire temporaire. Le premier correspond à l'incapacité permanente pour un pays, une population ou une société à se nourrir de façon satisfaisante, et le second étant la conséquence d'une conjoncture inattendue et éventuellement passagère, causant l'incapacité d'une population à accéder à une alimentation suffisante.

Cette définition à deux niveaux (chronique et temporaire) nous à révélé une approche de l'aide alimentaire sur deux dimensions différentes : l'aide répondant à une situation d'insécurité alimentaire permanente (ou aide continue) et l'aide répondant à une situation d'insécurité alimentaire temporaire (ou l'aide d'urgence).

Devant la mutation de la notion de l'aide, il nous a semblé crucial de repérer un cas d'étude qui réunissait les deux facettes de l'aide. Un pays qui portait à la fois les germes d'une insécurité alimentaire permanente et temporaire, et, dont l'aide alimentaire monétisée serait pratique courante.

Le Niger nous a semblé être le cas type à la fois pour des raisons évoquées précédemment, et pour des raisons d'actualité récente, notamment la dernière crise alimentaire que le pays a connu en 2005.

Le Niger est un pays d'Afrique occidentale frontalier de la Libye et de l'Algérie au nord, du Nigeria et du Bénin au sud, du Burkina et du Mali à l'ouest et du Tchad à l'est. La partie nord du pays qui constitue plus de sa moitié est située en plein désert du Sahara1(*) où habitent les nomades Touaregs dont l'ultime activité économique reste l'élevage des moutons, chèvres et chameaux.

Le Sahel2(*) traverse le centre-sud du pays où la sècheresse est très intense, alors que le sud représente la seul zone fertile du pays avec des savanes et des pluies suffisamment abondantes pour des cultures vivrières diverses et variées. C'est dans cette région que se trouve le fleuve Niger, l'une des plus grandes étendues d'eau du continent.

Rappelons tout de même que le pays vit essentiellement d'agriculture et d'élevage, les entreprises industrielles - très petites - sont pour la plupart, implantées à Niamey la capitale et à Zinder la ville économique. En 2001 le produit intérieur brut était de 2 milliards de dollars, soit 170 dollars par habitant.

Ainsi donc, nous traiterons dans la première partie de notre étude des aspects de cette économie essentiellement agricole et de la façon dont s'articulent politique alimentaire locale, insécurité alimentaire et aide alimentaire dans ce pays qu'est le Niger. Il s'agit en fait de présenter les facteurs aggravants des problèmes agro pastoraux, les stratégies politiques et sociétales en la matière, puis le lien plus ou moins évident avec l'aide alimentaire.

La seconde partie consacré à l'aide alimentaire apportée au Niger nous permettra d'apprécier la nature de l'aide, les pays qui donnent, les conditions d'octroie dudit don, les conditions d'acheminement, les partenaires qui interviennent dans ce secteur, le rôles des ONG locales et internationales, puis le rôle des subventions dans la pratique de l'aide.

En effet, pour des raisons de moyens très limités et des circonstances très particulières de la recherche - recherche effectuée en même temps que le déroulement des cours à l'IUT, - étant dans l'incapacité de faire un travail de recherche sur le terrain (au Niger), nous nous sommes contenté des lectures diverses sur la question de l'aide alimentaire monétisée. Comme nous l'avons montré plus haut, vu la façon dont ce sujet s'enchevêtre, s'articule avec d'autres notions (l'insécurité alimentaire, développement rural...), nous avons eu recours à plusieurs manuels scientifiques différents : ceux traitant de l'insécurité alimentaire pour étayer nos propos, ceux traitant du cas exclusif du Niger en matière de stratégie politiques et agricoles et ceux traitant du système d'aide alimentaire. Nos recherches nous ont conduit aussi à consulter sur Internet des oeuvres de recherches doctorales ou des rapports commandités par des institutions internationales ou locales. Les critères de sélection de ces documents étant la provenance des sources d'information utilisées par les auteurs, c'est-à-dire, la scientificité des informations recueillies (si elles proviennent bien des études faites sur le terrain ou pas ; si les chiffres indiqués ont fait l'objet d'une étude préalable ou pas...).

De ce fait, nous avons essayé de faire parlé nos manuels en se posant un nombre de question dont les réponses devraient sortir de nos lectures, comme si on avait devant nous nos interlocuteurs chercheurs ayant écrit sur la question. Ces questions se traduisent par :

- quel est l'impacte commercial de l'aide sur les populations aidées ?

- quels sont les pays donateurs et pourquoi donnent-ils ?

- y a-t-il un réel lien entre l'aide apportée aux pays sous développés et les exportations des aliments venant des pays développés ?

- quel rapport y a-t-il entre l'aide et le prix des aliments sur les marchés locaux des pays bénéficières ?

Autant de questions qui se sont résumées par une seule, que nous avons pris pour question de départ :

- L'aide alimentaire monétisée un atout ou une régression dans le système international d'aide Humanitaire?

Dans la mesure où ce qui nous intéresse dans cette recherche c'est la façon dont cette aide se pratique et son impacte sur les populations bénéficiaires, nous avons posé comme problématique la question suivante :

L'aide alimentaire monétisée quel impact sur le développement social et économique : Le cas du Niger.

Ainsi, nous avons émis des trois hypothèses que voici :

Hypothèse 1

L'aide alimentaire monétisée quel impact sur le développement social et économique :

Le cas du Niger.

Hypothèse 2

Les décisions politiques en matière de production agricole au Niger sont étroitement liées à l'aide alimentaire internationale.

Hypothèse 3

Le soutien aux exportations de l'aide alimentaire dans les pays donateurs profiterait plus à ces derniers qu'aux potentiels bénéficières.

I / - Le Niger : les facteurs aggravants en matière de sécurité alimentaire

Selon la définition que donnait la FAO au sommet mondiale de l'alimentation en 19963(*), « la sécurité alimentaire est assurée quand toute la population, à tout moment, bénéficie d'un accès physique et économique à une quantité suffisante de nourriture saine pour une vie active, en bonne santé. Quatre conditions sont donc requises : disponibilité suffisante en produits alimentaires ; stabilité de l'offre, sans fluctuations ou pénuries d'une saison ou d'une année à l'autre ; la nourriture doit être accessible sur le marché et à un prix raisonnable ; la qualité et la sécurité des aliments doit être assurée ».

Toutes ces conditions énoncées par la FAO ne semblent véritablement pas réunies dans le cas du Niger où, nous le verrons plus loin, les périodes de soudure semblent rester difficilement surmontable avec des signes de famines et de mal nutrition très prononcés au sein de la population touchant particulièrement les enfants, les femmes et les vieux.

Pour savoir s'il y a oui ou non une sécurité alimentaire dans un pays, il existe des indicateurs permettant d'apprécier les facteurs de disponibilité des produits alimentaires, leur accessibilité par les populations, l'utilisation de certains produits dits de première nécessité, la vulnérabilité des ménages et du pays.

Dans le cas du Niger, nous partons, en effet, du principe qu'il est clairement établi que les indicateurs ci-dessus cités sont accablants vu les multiples crises alimentaires connues par le pays ces dernières années. Ces indicateurs nous les présenterons dans la seconde partie de ce chapitre. Cependant, si la situation alimentaire du Niger est particulièrement déplorable, nous nous sommes posés la question de savoir s'il n'existait pas préalablement des facteurs favorisant ce qui peut se désigner désormais comme un déséquilibre du secteur rural.

1/ - Présentation des facteurs

a/ la pauvreté

Avant même de s'attarder sur la question des difficultés à se nourrir, il y a la question de la dégradation des conditions de vie au Niger. La pauvreté des familles, une situation économique globalement négative et une précarité grandissante. Cette situation implique une santé fragile des populations (Enfants, Jeunes et Vieux), et à son tour, l'état sanitaire révèle l'incapacité à atteindre la sécurité alimentaire, se crée ainsi un cercle vicieux.

La pauvreté au Niger se manifeste par :

- un accès difficile aux services de santé pour une bonne partie de la population (soit 49,53% de la population).

- Un accès difficile à une eau potable pour une bonne partie de la population (soit 27% de la population en 1997).

- Un faible taux du nombre d'enfants scolarisés (soit 20% en 1997).

- Un nombre important d'adultes analphabètes (soit 23,8% en 1997).

Ces manifestations de la pauvreté ne sont pas uniquement les conséquences d'une politique de développement national très faible, mais aussi, la suite logique d'une hiérarchisation sociale et juridique qui privilégie l'homme à la femme. Elle est en même temps celle qui accomplit la majorité des taches de la vie familiale (y compris l'éducation des enfants), mais elle est paradoxalement mise à l'écart des décisions importantes pour la simple raison que très peu d'entre elles sont éduquées. Le taux d'alphabétisation des femmes est de 5,8% contre 19,3% pour les hommes.

Cela nous permet de réaffirmer le fait que le cercle vicieux qui se créé en partant des questions élémentaires de l'accès à l'éducation, à l'eau, à la santé puis, subséquemment à la nourriture, est un facteur aggravant de l'insécurité alimentaire au Niger.

b/ le désert et la sècheresse

La partie du pays implantée dans le désert du Sahara au nord et du Sahel au centre est complètement dépourvue de végétation, même si on rencontre quelques rares oliviers, des petites graminées et des acacias qui assurent difficilement la subsistance des bovins et des chèvres. Avec des températures qui s'élèvent en moyenne à 29°C, le peu de savane qui existe est souvent sèche. La difficulté à abreuver ou à faire paître les troupeaux décime des familles d'animaux en peu de temps, amplifiant ainsi les difficultés que les populations rencontrent à se nourrir.

Le comité Permanent Inter-Etats de lutte contre la sècheresse dans le Sahel (CILSS) crée en 1973, regroupant 10 Etats4(*) sahéliens dont le Niger, a pour vocation d'anticiper sur les conséquences de la sècheresse que sont les famines, la dégradation des terres cultivables et promulgue une politique de développement durable.

Cette institution joue un rôle d'autant plus important qu'elle est au centre des politiques agricoles mises en place au Niger et dans le reste des pays, en soumettant des méthodes et techniques locales améliorées, peu coûteuses, simples et efficaces auprès des producteurs. Elle est aussi chargée de la mise en oeuvre de l'aide dans ces pays.

Ceci nous permet de mettre en relief l'importance du problème que cause le désert et, subséquemment, la sécheresse, mais aussi le dispositif qui est mis en place depuis 35 ans pour faire face aux nombreux problèmes climatiques que connaît le pays.

c-le climat

La rigueur du climat est particulièrement significative dans la situation agricole peu enviable du Niger, les pluies quasi inexistantes expliquent en partie la pauvreté des sols. En saison de pluie (de juillet à septembre), au nord du pays, la pluviométrie est à peine de 160 mm alors qu'au sud elle atteint les 600 mm, parfois même plus de 800mm. Sachant que le nord constitue plus des 2/3 du pays on évalue très bien les effets que cela peut avoir sur la production agricole locale.

L'année 2004 a été la plus pauvre en pluie des dix dernières années au Niger, les récoltes sont de plus en plus faibles.

d-La croissance démographique

La production agricole dans un pays est tout d'abord fonction des besoins et des habitudes alimentaires des populations vivant dans le pays. Elle vise dans un premier temps à répondre aux besoins alimentaire de base. La disparité des ressources humaines, financières et matérielles qui caractérise l'économie des états expliquerait (selon qu'ils soient industrialisés ou pas), une production au-delà des besoins immédiats ou de base d'une population. Dans le cas du Niger, le pays est en voie de développement et les industries agro alimentaires sont quasi inexistantes. Il s'agit donc de produire, dans un premier temps pour une suffisance alimentaire des populations. Or, le Niger est un pays où la vitesse de croissance de la population est très impressionnante. Aux désavantages du climat s'ajoute donc la croissance vertigineuse d'une population avec des besoins en nourriture de plus en plus importants.

Croissance de la population du Niger de 2001 à 2006

sexe

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Femmes

5 531 534

5 714 075

5 902 639

6 097 426

6 298 641

6 506 496

Hommes

5 558 722

5 742 160

5 931 651

6 127 396

6 329 600

6 538 477

Total

11 090 256

11 456 235

11 834 290

12 224 822

12 628 241

13 044 973

2- Les orientations politiques de la sécurité alimentaire au Niger

Au lendemain de l'indépendance du Niger (en Août 1960), le premier pouvoir qui accède à la tête du pays met en place une politique de contrôle des marchés céréaliers dans le but de garantir une suffisance alimentaire dans le pays. L'institution qui est créée pour opérer ces contrôles autoritaires des marchés c'est l'O.P.V.N, l'Office des Produits Vivriers du Niger. Entre 1960 et 1970 le bilan de cette stratégie semble porter ses fruits : « de 1960 à 1965 l'OPVN enregistre un excédent céréalier de 49kg par personne et par ans »5(*) . Cet élan va se poursuivre jusqu'à la première chute de la production vivrière en 1969, chute due aux dures conditions de production que rencontraient de plus en plus les cultivateurs. Les années qui suivront seront particulièrement éprouvantes pour l'état nigérien et sa population, notamment pendant la compagne dite de rupture de 1972 à 1973, où le déficit avait atteint un taux élevé de 400. 000 tonnes environ.

En 1984 le Niger connaît sa deuxième crise alimentaire avec des famines devenues endémiques, l'OPVN est pointé du doigt par les observateurs internationaux, ce qui remet en cause le contrôle qu'exerce l'état sur les marchés, leurs empêchant de se développer. Cette même année l'aide va constituer la bouée de sauvetage de la crise avec une compensation estimée à 535.000 tonnes de besoins, y compris les importations commerciales. L'idée de l'aide n'était plus que jamais entrée dans la politique alimentaire du Niger. D'ailleurs, à partir de cette année, pour les raisons du déséquilibre alimentaire que connaissait le pays, les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays ont tous eu pour priorité la mise en oeuvre des stratégies visant à résoudre le problème de l'insécurité alimentaire par des mécanismes de compensation que sont :

- la gestion des importations

- le recours à l'aide alimentaire

L'aide alimentaire, la production vivrière et les importations commerciales constituent les grandes lignes de la politique nationale de sécurité alimentaire au Niger.

Avec le soutien des experts internationaux, en 2000, le Niger s'est doté d'un instrument stratégique de sécurité alimentaire : la SOSA6(*). Il définit le cadre d'orientation des politiques de sécurité alimentaire au Niger à travers deux principaux objectifs :

-l'amélioration durable de la sécurité alimentaire supervisée par une forte prévention ;

-l'atténuation des crises alimentaires conjoncturelles.

a/ Les principales cultures vivrières du Niger 

Au Niger, "dans les zones agricoles, la saison des pluies ou hivernage s'étend essentiellement de mai à septembre. Les cultures pluviales vivrières sont semées de mai à juillet et les récoltes se font de septembre à novembre".

-Le poivron, le niébé, la tomate et l'oignon constitue les principales cultures maraîchères.

-L'arachide constitue la principale culture d'exportation

-Le mil, le sorgho, le manioc, les haricots et le riz, sont cultivés dans les zones de décrue du fleuve Niger et sont destinés à la consommation locale.

II-la place de l'aide alimentaire dans la politique de sécurité alimentaire au Niger

Dans la notion de l'aide il y a deux parties en présence, le donateur et le bénéficiaire, ce qui permet d'identifier et de nommer les parties c'est leurs statuts, car, la façon dont l'aide est octroyée et utilisée en dépend. Il y a donc l'aide alimentaire octroyée de gouvernement à gouvernement (l'aide bilatérale) ; et, l'aide alimentaire dont la charge revient aux organes subsidiaires de l'ONU que sont : la FAO, le PAM, UNICEF, etc ...

L'aide alimentaire est définie par la FAO comme « un transfert de produits d'un pays donateur à un pays bénéficiaire à titre de don pur et simple ou à des conditions de faveur exceptionnelle ».

Au Niger les regains d'excédents enregistrés en 1992, soit « un total de 183. 747 tonnes »7(*) ombrageaient une réalité plutôt difficile pour des villages totalisant 1.800.000 habitants dont le degré de déficit céréalier restait figé à 50% et ayant un besoin complémentaire de 200.000 tonnes. Autrement dit, il y avait malgré tout, des zones du pays où l'insécurité alimentaire restait irrésolue. Cela explique en partie la raison pour laquelle le pays demande de l'aide alimentaire tous les ans depuis les deux grandes crises alimentaires de 1973 et 1984 jusqu'aujourd'hui, puis certaines région du pays reste constamment en situation déficitaire.

Comme nous l'avant évoqué plus haut, les conditions d'une agriculture prospère s'étant détériorées avec les problèmes de climat, du désert, de la démographie, de la pauvreté, ect..., avec pour conséquences les difficultés à rééquilibrer une production agricole de plus en plus régressive, la dernière crise alimentaire de 2005 a fait du Niger le terrain d'expérimentation de l'efficacité de l'aide dans une situation d'urgence et/ou la capacité des pays donateurs à réagir dans les conditions d'extrême urgence.

En somme, nous avons retenu qu'il y a au Niger deux principales formes d'aide alimentaire : des programmes d'aide alimentaire octroyés au pays par des états donateurs tout au long de l'année ; puis, il y a l'aide apportée au pays en situation d'urgence causée par la crise alimentaire dont les manifestations sont souvent désastreuses au sein de la population (famines ; malnutrition...).

1-l'aide alimentaire programmes (ou continue)

Il faut tout d'abord remarquer que l'aide alimentaire apportée au Niger n'est pas automatique, elle n'est pas préétablie quantitativement ni octroyée de façon systématique, même si l'expérience nous montre que les besoins des populations au fil des années dépassent souvent la production locale attendue pour satisfaire lesdits besoins.

L'aide alimentaire internationale est de ce fait l'aboutissement d'un processus préalable d'identification et d'estimation des besoins alimentaires locaux.

En effet, chaque année le Ministère de l'agriculture dresse un bilan qui permet l'évaluation de la compagne alimentaire de l'année en cours afin de parer à tout éventualité lors de la période de soudure. Ce bilan prend en compte les « stocks et réserves des paysans, les stocks de l'Office des Produits Vivriers du Niger (l'OPVN), les importations commerciales programmées, mais aussi des rendements supposés de la compagne de culture contre saison »8(*).

L'estimation des besoins compte à elle se fait selon les bases suivantes (bases propres au Niger) :

Base : Mil et Sorgo

Population

Nomade/ Urbaine

200 kg/ habitant

Sédentaire

250 kg/ habitant

C'est donc après ce processus de bilan et d'estimation de besoins que l'appel à l'aide peut ou ne pas être lancé.

Notons cependant qu'il est souvent arrivé que le pays sollicite l'aide en période d'abondance pour des raisons de sécurité à long terme et de stabilité des prix. Ainsi de façon plus constante, il y est établi un programme d'aide sur l'année dont le but serait de soutenir la balance des paiements de l'Etat.

a/ Mise en oeuvre de l'aide programme (ou la monétisation)

L'aide programme est une aide qui transite par le marché international dans des conditions dites exceptionnelles. Cette pratique trouve un grand soutien juridique dans la convention relative à l'aide alimentaire de 1999, notamment dans son article 9 qui précise que :

« L'aide alimentaire en vertu de la présente Convention peut être fournie de l'une des façons : ...ventes de produits alimentaires contre monnaie du pays bénéficiaire, qui n'est ni transférable ni convertible en devises ou en marchandises et services susceptibles d'être utilisés par le membre donateur... ventes de produits alimentaires à crédit, le paiement devant être effectué par annuités raisonnables échelonnées sur vingt ans ou plus, moyennant un taux d'intérêt inférieur aux taux commerciaux en vigueur sur les marchés mondiaux... ».

Au niveau local, l'aide est commercialisée aux populations, souvent dans les conditions autres de celles du marché, conditions dont les autorités politiques ont un contrôle relatif. Là encore, cette pratique est tout à fait légale lorsqu'elle s'effectue selon les conditions posées par la convention CEE/ ACP 9(*) (les accords de Lomé) dont l'article 35 du Titre I définit les conditions d'octroie de cette aide :

« Le produit doit être vendu à un prix qui ne doit pas concurrencer la production locale, les fonds doivent servir à financer des projets de développement, l'aide distribuée gratuitement doit aller aux groupes vulnérables, l'aide doit s'insérer dans un programme de développement national, les produits doivent être adaptés aux besoins des pays bénéficiaires... ».

C'est ainsi que l'aide accordée au Niger est vendue sur les marchés locaux, les dividendes obtenues sont, en principe, utilisées pour le financement des projets de développement. Pour se faire un compte commun est crée aux noms des deux parties (donateur et bénéficiaire, souvent dans un cadre de relation bilatérale) pour constituer le fond de contrepartie. C'est ce que nous appellerons ici la monétisation de l'aide alimentaire.

Là encore le principal acteur de la mise en oeuvre de l'aide alimentaire programme au Niger c'est l'OPVN qui officie à coté de l'UNCC (l'Union Nationale de Crédits et de Coopération). Une partie des fonds obtenus par la monétisation est utilisée par l'OPVN pour constituer des stocks d'aliments susceptibles de servir en période de vache maigre. L'UNCC en collaboration avec les chefs traditionnels des villages achètent le mil et le sorgho aux producteurs locaux et aux villageois pour le compte de l'OPVN qui ramasse ensuite la production dans les centres de collecte, de Décembre à Mars.

Les coopératives elles, achètent aux paysans leurs productions au nom de l'Etat, elles sont officiellement investies de ce rôle par les autorités.

Entre tous ces intermédiaires, il est tout à fais prévisible que des dérives puissent échappent à l'ordre établi : « il n'est un secret pour personne que les autorités traditionnelles et les dirigeants des coopératives contraignent les paysans à commercialiser leurs produits par le biais des circuits officiels »10(*). Aussi faut-il craindre des détournements ?

Dans les périodes de soudure, lorsque la famine commence à se faire ressentir et que les prix de céréales sur les marchés sont élevés, l'OPVN organise des centres de distributions gratuites pour les populations les plus démunies et les ventes pour ceux qui peuvent, sans jamais dépasser les 10 kg par jours. De ce qui ressort des enquêtes rapportées par Olivier Meunier dans son ouvrage « Education, diversité culturelles et stratégies politiques en Afrique subsaharienne », il y auraient des limites considérables en ce qui concerne la distribution des vivres en période de soudure : « D'un coté, il y a le tapage médiatique sur l'importance du volume d'aide alimentaire octroyé par les ONG, Institutions internationales et pays amis, de l'autre, les quantités dérisoires, voire ridicules, qui parviennent effectivement sur le terrain ».

Les limites de ce système stockage-vente-distribution révèlent aussi les limites du système d'aide alimentaire monétisée. Le constat qu'en fait Olivier meunier est encore plus poignant lorsqu'il dit : « La vente des produits aux populations nécessiteuses dans les centres ruraux s'effectue exclusivement pendant la période de soudure entre Avril et Août. Mais dans les gros centres urbains comme Niamey, la vente s'effectue toute l'année afin d'assurer l'approvisionnement permanent des services administratifs, les services privés, les établissements publics de l'Etat, de l'armée et des corps paramilitaires...l'essentiel des activités et des interventions de l'OPVN s'effectue au bénéfice des centres urbains...la ville de Niamey absorbe à elle seule les 9/10eme des stocks régionaux...le ravitaillement des centres urbains au détriment des populations rurales est l'un des effets pervers de l'aide alimentaire... ».

A cela s'ajoute la dilapidation des fonds, la disparition des stocks et une mauvaise gestion de ceux-ci, selon ce dernier.

L'aide alimentaire programme du Niger, c'est aussi tous les objectifs sanitaires poursuivis par les organisations internationales comme l'UNICEF dans le cadre des programmes de lutte contre la malnutrition infantile, le PNUD dans le cadre des programmes de développement rural, la FAO dans le cadre des programmes d'aide alimentaire dans les cantines d'école, l'OMS à travers ses programmes de soutien à la santé et aux populations vulnérables. Dans la majorité des cas cette aide alimentaire (multilatérale) est distribuée de façon gratuite.

Tout au long de nos recherches, il nous ait apparu clairement que l'aide alimentaire monétisée faisait l'objet de controverses à la fois d'ordre idéologique et pratique.

b/ Controverse au tour de la question de l'aide alimentaire monétisée

Après un constat clair de la façon dont l'aide est mise en oeuvre au Niger, nous pouvons dire que l'aide alimentaire programme est principalement caractérisée par la monétisation de l'aide alimentaire sur les marchés locaux.

C'est ainsi que la FAO dans sont Rapport de Janvier 2007 pointait du doigt sur cette aide alimentaire de gouvernement à gouvernement qui, selon elle, ne cible pas toujours les bénéficiaires potentiels, ceux qui ont le plus besoin. Le Rapport met en avant le fait que une tonne sur quatre est revendue sur les marchés locaux des pays bénéficiaires pour constituer des fonds pour le développement.

Certaines ONG, à l'image de CARE (une ONG Américaine, spécialisée dans le domaine de l'aide alimentaire), pensent que " la monétisation risque de déséquilibrer les marchés des pays en voie de développement et a globalement un effet négatif. Elle engendre non seulement des coûts d'approvisionnement, d'expédition et de manutention des denrées alimentaires, mais aussi les coûts de marketing et de vente de ces denrées dans les pays bénéficiaires".

Tandis que d'autres soutiennent l'idée de la vente des produits alimentaires venant de l'aide, dans le but de constituer un fond permettant de régler d'autres aspects du problème de l'insécurité alimentaire, ce passage édifiant de l'une des conférences de Rony Brauman (l'un des fondateurs de MSF, médecin sans frontière) sur la situation alimentaire au Niger révèle une double position face à la question d'aide monétisée :

« ...le Niger dépend, en grande partie de l'aide internationale...cette aide n'est pas destinée à être donnée mais à être vendu...on trouve sur les marchés des sacs de grains...la présence de ces sacs sur les marchés est interprétée comme le signe du détournement de l'aide...non, cette interprétation est fausse : ces dons sont effectivement gratuits, dans la mesure où le pays ne les achète pas. Leur objectif n'est pas d'être distribués gratuitement mais d'être commercialisées pour faire baisser les prix et servir à ce que l'on appelle le stock de régulation : plus on met les céréales sur le marché et plus les prix baissent...le problème est que cette aide, cette nourriture qui était accessible aux familles n'est pas appropriée aux enfants. Les enfants de moins de trois ans ont besoin d'aliments un peu spécialisés...le problème vient donc de ce système d'aide, qui restait commerciale... ».

Même si ce point de vu reste discutable, il est néanmoins vrai que les aliments en nature octroyés aux pays demandeurs ne sont pas toujours adaptés pour toute sorte de population, notamment celles des femmes et des enfants à bas âges, et, la monétisation de l'aide, dans le cas du Niger aurait permis de couvrir des frais de transformation ou ravitaillement en produits adaptés.

Nous pouvons donc dire que l'aide alimentaire programme est principalement caractérisée par la monétisation, et l'impact de cette monétisation est considérable sur la sécurité alimentaire des populations, puis sur la vie socio économique et sanitaire du pays.

Cependant, la question saurait-elle se poser de la même façon concernant l'aide alimentaire dans une situation d'urgence ?

2/ L'aide en situation d'urgence (cas de la crise de 2005)

La difficulté que rencontre les acteurs de l'humanitaire à définir la notion d'urgence ou plutôt d'évaluer sa pertinence, - dans quel cas une intervention serait nécessaire ou pas - la récente crise alimentaire (en 2005) au Niger en a fait les frais. C'est en occurrence ce qui a rendu plus "meurtrière"11(*) cette famine, bien plus qu'elle ne devait l'être : Une politique de sécurité alimentaire qui se veut préventive à travers un dispositif mettant en avant un diagnostique basé sur l'évaluation de la production agricole et de sa disponibilité, occultant le nombre des populations vulnérables touchées par la malnutrition et la famine dont les sources ne sont pas uniquement celles visées par ledit dispositif (se référer au schéma I, p. suivant).

En effet, le système d'alerte précoce (SAP) et la cellule de concertation (CC), deux entités du dispositif dont le rôle est de veiller à ce que les crises comme celles de 1973 et 1984 ne se reproduisent pas avaient faussé leur diagnostique uniquement centré sur la production céréalière et la dynamique des prix, tandis que le taux de malnutris augmentait au sein de la population des femmes, vieux et enfants. Le danger était d'autant plus imminent que le dispositif à aussi la responsabilité de lancer l'appel à l'aide d'urgence en fonction des informations dont il dispose.

Il nous semble important de remarquer que dans les cas des crises majeures, les médias, bien plus que les politiques jouent un rôle important sur la crédibilité des infos et sur la dimension d'urgence ou pas de la crise. Et dans le cas du Niger les débats suscités par eux ont été déterminants pour la prise de conscience de la situation par les gouvernants, les ONG et les organisations internationales.

La même année une enquête réalisée par le PAM (le programme alimentaire mondial) révélait une réalité moins optimiste que celle du DNPGCA12(*), estimant la prévalence de l'insécurité alimentaire des ménages à :

- 45% les ménages en sécurité alimentaire

- 13% les ménages en insécurité alimentaire sévère

- 22% les ménages en insécurité alimentaire modérée

- 20% les ménages à risque pour leurs moyens de subsistance.

Commission Mixte de concertation Etat-Donateur

Coordonne le dispositif

Programme Alimentaire Mondial

Allemagne, France, Etats-Unis,

Suisse, Union européenne REPUBLIQUE DU NIGER

Fonds de contrepartie des aides

Alimentaires bilatérales

Gestion bilatérale

Fonds commun des fondateurs

Géré par le CMC

Fonds

D'intervention

Atténuer les crises alimentaire localisées

OPVN

Contrat plan

Cellule crises alimentaires

(CCA)

Secrétariat exécutif du dispositif

CABINET DU PREMIER MINISTRE OUTILS

SAP

Système d'information

Fonds de sécurité alimentaire

Valeur équivalente à 40 000 tonnes de céréales

Stock national de sécurité

40 000 tonnes de céréales

Opérateurs de suivi et d'évaluation

Réseau SPA

ONG

Consultants

Opérateurs d'exécution des mesures

Services techniques ONG

Stock National de

Réserve

Répondre à une crise majeure d'ampleur nationale

Ces enquêtes vont permettre d'estimer les besoins réels des populations, la vulnérabilité des familles en prenant comme indicateurs la disponibilité alimentaire, l'accès aux aliments, les moyens de subsistance, les stratégies de résilience, fréquence de consommation de certains aliments, etc...

Etant donné que le pays est constamment dans une situation d'« insécurité alimentaire », il n'a pas été facile à la fois pour les autorités locales (suite aux limites du dispositif DNPGCA), pour les organisations internationales et pour les ONG implantées dans le pays de pouvoir faire la différence entre la situation « habituelle » de l'insécurité alimentaire et le caractère urgentiste de la crise qui se profilait.

Là encore l'enquête s'est basée sur la vie des ménages pour évaluer les différences de consommation de ceux-ci entre 2004 et 2005, pour mettre en évidence la particularité de la crise que traversait le pays. Pour se faire 7 indicateurs ont été mis au point :

1- durée de stocks de mil et de sorgho (par rapport à l'année 2004)

2- mode de migration de membres des ménages

3- sources principales de revenus des ménages

4- endettement

5- possession de biens productifs

6- possession de petits ruminants

7- difficulté pour l'alimentation

Ces indicateurs ont permis de révéler :

- les ménages en situation d'insécurité alimentaire sévère : 70% chroniques (ou habituel) et 30% transitoires (ou d'urgence).

- les ménages en situation d'insécurité alimentaire modérée : 42% chroniques et 58%

transitoires (ou d'urgence).

Ces résultats ont permis de mettre en évidence une situation de transition entre un état décrit par le PAM comme étant chronique - état habituel de l'insécurité alimentaire au Niger dont la réponse apportée est l'aide alimentaire programme - et, un état transitoire qui nécessitait des réponses d'aide urgentes aux ménages meurtris par une insécurité alimentaire sévère.

a/ La mise en oeuvre de l'aide d'urgence au Niger en 2005

Selon l'enquête sur la sécurité alimentaire en situation d'urgence au Niger réalisé par le PAM en octobre 2005 (P. 15, Chapitre 7.1), l'aide alimentaire déployée au Niger à cette période, pendant cette crise, répondait à des besoins spécifiques des ménages en matière d'alimentation comme le montre cette extrait :

« 
· Environ 68% des villages visités ont bénéficié d'un programme d'aide alimentaire

au cours des 6 mois précédant l'enquête (distributions générales ou ciblées, ou

ventes de céréales à prix modéré, ou cantines scolaires, ou vivres-contre-travail) ;


· La proportion de villages n'ayant reçu aucune assistance alimentaire est plus forte

dans la région d'Agadez (43% des villages) ;


· 60% des ménages ont bénéficié d'une aide alimentaire quelconque au cours des

6 mois précédant l'enquête (40% à Agadez, 50% à Maradi contre presque 80% à

Tillabéri) ;


· Dans les villages où des distributions générales gratuites ont été effectuées, 20% des

ménages n'en ont pas bénéficié ;


· Lors de la dernière assistance alimentaire précédant l'enquête, les quantités

moyennes reçues par les ménages étaient : 94 kg de céréales, 2 kg de légumineuses

et 1 litre d'huile ;


· Toutes les catégories de ménages ont reçu de l'aide alimentaire, quelle que soit leur

situation de sécurité alimentaire ; mais en termes de quantités, les ménages en

situation d'insécurité alimentaire ont reçu légèrement moins que les

autres ménages ;


· Pour 70% des ménages en situation d'insécurité alimentaire sévère et pour la moitié

de ceux en insécurité alimentaire modérée, la part de l'aide alimentaire représentait

plus de 20% de tous les aliments consommés au cours de la semaine précédant

l'enquête;


· Il n'y a pas de relations claires entre l'insécurité alimentaire et la consommation

d'aide alimentaire; par contre, la proportion de ménages ayant une très pauvre

consommation alimentaire est plus faible parmi ceux qui ont consommé l'aide. »

Ce passage qui nous permet de se faire une idée sur l'impact de l'aide alimentaire en situation d'urgence met aussi en exergue ses limites.

La situation au Niger en 2005 avait fait réagir plusieurs institutions et acteurs du développement, de la sécurité alimentaire et de la santé publique internationale. Dans la mesure où notre travail ne saurait rendre fait par fait le processus de mise en oeuvre de l'aide par ces acteurs et institutions, nous avons jugé plausible de présenter le déploiement de l'aide en situation d'urgence d'après une seule institution dont les actions et prise de décisions pendant la crise nous a semblé capitales et illustratives : Médecins sans frontière (MSF).

C'est en effet à partir du mois d'avril que la crise Nigérienne de 2005 prend une dimension internationale, avec l'intervention de plusieurs organisations dont MSF. Elle est l'une des premières organisations à contredire le système d'alerte précoce du pays, en dénonçant le nombre trop important des enfants dénutris qui se présentaient dans les centres mis en place par l'ONG au sud Niger (plus précisément à Maradi) et au Nord dans la région de Tahoua. MSF avait développé dans l'urgence un système de réhabilitation nutritionnelle ambulatoire dans l'objectif d'atteindre efficacement le plus grand nombre de malnutris.

On peut lire à travers ces quelques lignes écrit par Xavier Crombé, l'un des responsables de MSF pendant la crise au Niger, les motivations et différentes étapes qui ont conduit à cette mise en oeuvre :

« Dès le mois d'avril...la spéculation pratiquée sur le mil présent en quantité sur le territoire et l'inefficacité du système mis en place par le gouvernement pour répondre à la crise (vente de mil à prix modérés, peu accessibles à la population et de quantité réduite) sont identifiés comme des facteurs vraisemblables de la crise de 2005. En juin...de nouveaux éléments explicatifs, tels la création d'une pénurie artificielle, la paupérisation des familles paysannes ainsi que les choix politiques qui ont conduit à refuser jusqu'en dernière extrémité les distributions de nourriture...alors que nous critiquons vivement la forte réticence des bailleurs de fonds, des agences des Nations unies et du gouvernement du Niger à mettre en place des distributions de nourritures gratuites, ce qui est, selon nous, la seule mesure capable d'éviter une aggravation de la situation et de très nombreux décès...des distributions ciblées de nourriture (25 kg de farine enrichie et 5 litres d'huile sont distribués pour une période d'un mois aux enfants âgés de six à cinquante-neuf mois ayant un périmètre brachial inférieur à 125 mm ainsi qu'aux enfants de moins de six mois)...le mois de juillet ...le Niger adopte un protocole reposant sur une prise en charge ambulatoire et l'utilisation des aliments prêt à l'emploi. De plus, à ce moment, les autorités décident de distribuer gratuitement l'aide alimentaire... »13(*).

DEUXIEME PARTIE

III-les pays donateurs et les conditions d'octroie de l'aide alimentaire

L'aide alimentaire en provenance des pays développés vers le Niger a commencé depuis les années 50 et s'est poursuivie durant l'époque post indépendance au moment où l'autorité coloniale faisait place aux autochtones pour une autogestion des affaires de l'Etat. Cette aide était principalement organisée entre Etats amis dans le but d'augmenter la disponibilité de nourriture dans le pays bénéficiaire tout en écoulant des excédents alimentaires du pays donateur.

Les changements observés au cours des années ont laissé naître plusieurs autres formes d'aide que nous avons déjà évoqué dans la première partie de notre travail. Cependant, les enjeux actuels du commerce des produits vivriers au niveau international fait peser une responsabilité non négligeable sur les pays donateurs dans la façon dont l'aide est octroyée, transportée, et dans la qualité et la quantité des produits susceptibles de constituer une aide alimentaire. Bref, aujourd'hui l'opinion internationale est beaucoup plus soucieuse de veiller à ce que l'aide alimentaire fasse progresser la sécurité alimentaire que d'augmenter la disponibilité de l'aide, même si ça y contribue bien.

1/ Quels sont les pays donateurs et organisations internationales intervenant au Niger ?

Pendant longtemps les États-Unis ont été le seul pays donateur d'aide alimentaire dans le monde (jusqu'en 1960). La constitution de l'Europe et de ces pays membres vont donner un grand coup de pousse supplémentaire à l'aide alimentaire au Niveau des pays en voie de développement et, au Niger en occurrence. En 2003 plus de 80% de l'aide alimentaire totale accordée au Monde proviennent de l'Union européenne et des Etats-Unis.

La convention internationale relative à l'aide de 1999 consacre dans sont article 3 les quantités et la qualité de l'aide en désignant les pays membres, - donc donateurs ayant signé la convention - nous citons :

« Les membres sont convenus de fournir aux pays en développement une aide alimentaire ou l'équivalent en espèces à hauteur du montant annuel minimal spécifié au paragraphe e) ci-dessous (ci-après dénommé «l'engagement»).

b) L'engagement de chaque membre est exprimé soit en tonnes d'équivalent blé ou en valeur, ou une combinaison de tonnage et de valeur. Les membres qui expriment leur engagement en valeur sont également tenus de spécifier un tonnage annuel garanti.

c) Dans le cas des membres exprimant leur engagement en valeur ou en une combinaison de tonnage et de valeur, la valeur pourra comprendre les coûts de transport et autres coûts opérationnels associés aux opérations d'aide alimentaire.

d) Que leur engagement soit exprimé en tonnage, en valeur ou en une combinaison de

tonnage et de valeur, les membres peuvent également inclure une valeur indicative qui représente son coût estimatif total, y compris les coûts de transport et autres coûts opérationnels associés aux opérations d'aide alimentaire.

e) Sous réserve des dispositions de l'article VI, l'engagement de chaque membre sera

le suivant :

Membres Tonnage (équivalent blé)

Argentine 35.000

Australie 250.000

Canada 420.000

Communauté européenne

et ses Etats membres 1.320.000

Etats-Unis d'Amérique 2.500.000

Japon 300.000

Norvège 30.000

Suisse 40.000 ... »

En somme, l'aide alimentaire à trois catégories de donateurs, les Etats membres signataires de la convention relative à l'aide cité ci-dessus, les organisations internationales (organes subsidiaires de l'ONU ; FAO, PAM, UNICEF,...), les Organisations non gouvernementales (ONG ; CARE, OXFAM,...) et les organisations interétatiques ( Union européenne, Union africaine,...).

L'aide fournie par les organisations internationales est très souvent gérée par les ONG et associations locales ou internationales, à défaut elle est donnée au gouvernement du pays bénéficière. Dans les situations de crise les pays et institutions donateurs passent soit directement par le gouvernement soit par des ONG locales et internationales. Les pays peuvent aussi fournir leurs aides alimentaires auprès des organisations internationales comme le PAM ou la FAO.

En 2004, 51% de l'aide alimentaire mondiale a été acheminée via les relations multilatérales. La quasi-totalité de ces livraisons a transité par le PAM, soit 98%.

La même année la part de l'aide alimentaire transitant par les organisations non

gouvernementales a représenté 28% des livraisons globales d'aide alimentaire.

Par contre, l'aide alimentaire bilatérale (généralement fournie directement de

gouvernement à gouvernement) a représenté 21%.

Dans le cas bien précis du Niger, les donateurs habituels qui interviennent dans ce pays sont communs à l'ensemble des pays du CILSS (Comité Permanent Inter-Etats de lutte contre la Sècheresse dans le Sahel). Ainsi pendant la compagne 2004/2005, selon le relevé de conclusions du DNPGCA du Niger, les pays donateurs étaient constitués :

-des Etats-Unis, ils ont livré une aide alimentaire constituant les 35% de l'ensemble de l'aide alimentaire reçu dans les pays du CILSS dont les principaux bénéficiaires de l'aide alimentaire d'urgence ont été le Niger ;

-le Japon qui a livré les 11%

-la Communauté européenne a livré 6%

-le Canada a livré 5%

-l'Italie 5%

-la France 1%

-la Belgique 0,7%

Ces donateurs peuvent être considérés comme étant des partenaires habituels de l'aide alimentaire dans les pays du CILSS. D'autres donateurs non habituels ont fourni leur aide alimentaire directement auprès du PAM, c'est le cas du Luxembourg qui a donné 2% de l'aide apportée aux pays du CILSS, la Chine et l'Inde 1,5% chacun et le Nigeria 1%.

Notons cependant que le Niger est toutefois le principal bénéficiaire de l'aide alimentaire livrée aux pays du CILSS pendant la campagne 2004/2005, avec 25% du total livré à la sous région.

2/ De quoi est constituée l'aide alimentaire apportée au Niger

L'article 3 de la convention relative à l'aide alimentaire cité précédemment fixe les quantités et les qualités de l'aide apportée aux pays nécessiteux. Dans son article 4 la convention présente aussi les produits susceptibles de constituer une aide alimentaire (se référer à l'annexe 1).

En effet, l'aide alimentaire au niveau mondiale est normalisée en quantité et en nature des produits qui la constitue. C'est ainsi qu'en 2004, l'aide apportée aux pays du CILSS, dont le Niger fait parti, était essentiellement constituée de céréales à hauteur de 88%, ainsi que d'autres produits non céréaliers.

Les céréales secondaires (mil, sorgho, maïs) et le riz constituaient près de 60% de l'ensemble de céréale reçu dans la sous région, tandis que le blé et la farine de blé ont couvert les 22%.

Les produits non céréaliers étaient essentiellement constitués de légumineuses, d'huile végétale, de graisse et de lait. Le schéma suivant nous montre ce que constitue cette aide non céréalier en quantité :

3-Dans quelles conditions l'aide alimentaire est elle acheminée ?

La question de transport des produits alimentaires est essentielle dans l'efficacité de la réponse à apportée aux pays bénéficiaires surtout lorsqu'il s'agit d'une crise alimentaire aigue, avec des taux de morbidité et de mortalité soudainement élevés. La question de transport et des conditions de transport est aussi liée au rapport coût-priorité-temporalité. C'est-à-dire que les moyens de transport choisis sont en rapport avec la priorité que constitue l'expédition des produits (si elle répond à une urgence ou pas) et le temps où l'aide arrive doit coïncider avec le moment où les besoins se font ressentir (surtout en cas d'urgence).

Conformément à la convention relative à l'aide alimentaire, "le coût de transport et de livraison doivent être assumé, dans la mesure du possible, par les donateurs, notamment dans les situations d'urgence". « Les coûts de transport et autres coûts opérationnels doivent être encourus dans le cadre d'une opération d'aide alimentaire elle-même autorisée à être prise en compte dans la contribution d'un membre ».

L'aide alimentaire apportée aux pays bénéficières provient, dans la majorité des cas, des excédents alimentaires venant des pays donateurs ou, des produits achetés sur les marchés intérieurs des pays donateurs ou sur les marchés internationaux et expédiés gratuitement aux pays bénéficiaires. L'aide alimentaire peut également provenir du pays bénéficiaire lui-même, lorsque le donateur achète les produits directement aux cultivateurs du pays bénéficiaire. Dans ce dernier cas de figure, les coûts de transports éventuels sont directement convertis en produits constitutifs du don et le temps de livraison est minime.

S'agissant des aides alimentaires provenant des excédents alimentaires des pays développés, certaines associations, les ONG et même des entreprises privées reçoivent de leurs Etats des subventions à l'exportation des produits alimentaires constituant l'aide alimentaire apportée aux pays nécessiteux. Le fait que ces subventions soient accordées aux entreprises et ONG qui font transférer l'aide alimentaire liée à d'autres produits alimentaires voués à l'exportation a un effet de concurrence déloyale au Niveaux du commerce international.

En effet, l'article neuf de la convention relative à l'aide est claire à ce sujet, il dit : « ...les membres feront en sorte que : L'octroi de l'aide alimentaire ne soit pas lié directement ou indirectement, officiellement ou officieusement, de manière expresse ou tacite, à des exportations commerciales de produits agricoles ou autres marchandises et services à destination des pays bénéficiaires... ».

A partir des sources de l'OCDE en 2001, nous avons conçu une courbe permettant de voir la différence des subventions qu'apportent les pays donateurs.

TROISIEME PARTIE

IV-TENTATIVE DE REPONSE AUX HYPOTHESES

Hypothèse 1

L'insécurité alimentaire permanente ou temporaire justifie la monétisation de l'aide alimentaire apportée au Niger.

L'insécurité alimentaire au Niger, nous l'avons vu, n'est que la résultante de plusieurs facteurs naturels et organisationnels qui jusqu'aujourd'hui n'a trouvé de solution qu'a travers l'aide alimentaire internationale distribuée de façon gratuite dans les situations d'urgence et vendue sur les marchés locaux dans les situations moins urgentes mais qui nécessite souvent une assistante dans la durée.

Ceci nous amène à dire que notre hypothèse n'est pas validée, car, elle comporte deux types de réponses qui semblent se permuter tout en étant complémentaire : l'aide d'urgence pour répondre à l'insécurité alimentaire temporaire avec des distributions gratuites et l'aide alimentaire programme (ou continue) pour répondre à l'insécurité alimentaire chronique qui gangrène le pays.

Cas d'urgence :

En effet, l'exemple du Niger nous montre que le caractère urgent de la crise nécessitait de distribuer l'aide, et non de la vendre sur les marchés. La pauvreté des ménages ajoutée au contexte de la pénurie alimentaire favoriserait la croissance des taux de morbidité et de mortalité. A ce sujet le consensus est quasi-total entre les différents acteurs de l'humanitaire sur la gratuité des denrées en situation de grise aigue. La position de la FAO par exemple sur la question est sans appel :

« L'aide alimentaire fournie pendant les périodes d'urgence...la majeure partie des produits alimentaires livrés aboutit à une consommation additionnelle et il n'y a guère de fuites de produits vers les marchés. Ces livraisons d'aide alimentaire n'ont guère d'effet sur les prix marchands, la production nationale ou les importations commerciales mais servent un important objectif humanitaire... »14(*)

Il nous apparaît clairement que, en situation de crise alimentaire aigue, comme celle connue par le Niger en 2005, l'insécurité alimentaire temporaire ne saurait justifier la monétisation de l'aide alimentaire apportée au Niger.

Cas chronique :

L'insécurité alimentaire chronique au Niger, nous l'avons vu, date des années 70, cette situation provenant de causes naturelles et humaines déstabilise l'organisation paysanne et touche le poumon de l'économie Nigérienne : l'agriculture. Avec une population qui croît à une vitesse exponentielle, les moyens de base de production alimentaire ne suffisent plus à nourrir les ménages. L'aide alimentaire programme est la solution principale pour remédier à cette situation.

Comme nous l'avons évoqué plus haut, au Niger, l'aide alimentaire programme est une aide qui transite à la fois sur le marché international - fusse t-elle dans les condition autres que celles du marché - et, cette aide est revendue dans les marchés locaux dans le but de stabiliser les prix des céréales et les rendre accessible aux ménages dans le besoin. Ici l'aide n'est pas distribuée gratuitement pour ne pas créer de dépendance au sein de la population, car, distribuer gratuitement l'aide pour répondre à une situation chronique c'est distribuer gratuitement la nourriture aux populations tous les mois de l'année et tous les ans. Non seulement les moyens ne s'y prêtent, mais aussi, cela ne favoriserait pas le développement du pays et serait un frein à l'épanouissement des zones rurales.

D'un autre point de vue, l'argument qui consiste à créer un fond de contrepartie susceptible d'être utilisé dans les projets de développement - même s'il est discutable - peut être un élément important pour justifier la monétisation de l'aide alimentaire. Vu sous cet angle, en effet, nous pouvons confirmer que l'insécurité alimentaire permanente justifie la monétisation de l'aide alimentaire apportée au Niger.

Hypothèse 2

Les décisions d'orientation politiques en matière de production agricole au Niger sont étroitement liées à l'aide alimentaire internationale.

Cette hypothèse est validée pour la simple raison que la place de l'aide alimentaire dans la politique alimentaire du Niger est considérable.

En effet, le pays étant dans une situation quasi constante de déficit alimentaire, le rôle que joue l'aide pour dénouer la situation pèse sur les décisions politiques de production agricole de façon directe et indirecte.

Pendant les crises alimentaires, certains fermiers nigériens dans le tourment de la faim vendent leurs terres et leurs semences puis se dirigent vers les grands centres urbains comme Niamey pour espérer y trouver du travail. Dans la majorité des cas les terres revendues ne sont pas utilisées exclusivement pour l'agriculture mais bien pour des constructions habitables par manque de moyens pour acheter des semences. Les orientations politiques du pays en faveur de l'aide permettent de fournir aux cultivateurs des nouvelles semences afin de garantir leurs productions au cours de l'année. C'est en cela que les décisions d'orientation politique de production agricole du Niger sont étroitement liées à l'aide alimentaire internationale.

Hypothèse 3

Le soutien aux exportations de l'aide alimentaire dans les pays donateurs profite plus à ces derniers qu'aux potentiels bénéficiaires.

A cette hypothèse nous tenteront de donner deux réponses, car, il nous a semblé qu'elle pouvait être perçu de différente manière, donc, ce serait impertinent de répondre de façon absolue. Même si les solutions apportées par l'aide alimentaire internationale sont importantes pour les populations souffrantes d'une crise alimentaire quelle qu'elle soit, les soutiens aux exportations pourrait cependant être sujet à controverse. Il s'agit de savoir si l'aide apportée est liée ou pas.

Aide alimentaire liée :

Dans les cas où les sociétés d'Etat ou des ONG qui reçoivent de leurs pays des subventions pour le transport de l'aide alimentaire, lient à cette aide d'autres produits destinés à être vendu sur les marchés locaux des pays bénéficiaires, de tout évidence cette activité semble aller en leur faveur. D'abord le fait de se débarrasser des excédents qui, autrement auront un coût s'il fallait le détruire sur place, ensuite le fait d'écouler une partie de ces excédents vers des marchés locaux des pays bénéficiaires à des prix défiants toutes concurrence avec le risque de déséquilibrer lesdits marchés. Autrement dit on résout un problème en apportant d'autres problèmes : on apporte l'aide d'une main et on marchande avec l'autre. Dans ce cas bien précis, nous ne voyons de bénéfices pour les populations que de façon aléatoire. Celui qui est l'heureux gagnant c'est en fait le donateur.

C'est en cela que nous pouvons soutenir l'idée selon laquelle le soutien aux exportations de l'aide alimentaire dans les pays donateurs profite plus à ces derniers qu'aux bénéficiaires potentiels.

Aide non liée :

Lorsque l'aide n'est liée à aucun autre produit, les effets des subventions apportées aux sociétés d'Etat pour le transport des produits peut être considérés comme étant positifs et bénéfiques, d'abord pour les bénéficiaires et ensuite pour le pays donateur. De ce fait, nous ne pouvons pas valider cette hypothèse qui s'oppose à cette réalité.

DISCUSSION/CONCLUSION

Les points de vue sur la nature, la quantité, les effets pervers de l'aide alimentaire ou plutôt son efficacité à combattre l'insécurité alimentaire sont autant de question que soulève de façon sous jacente le contenu de notre recherche.

Ainsi sur l'ensemble des hypothèses auxquelles nous avons essayé de répondre, une seule a été validée. Cela montre combien le sujet de l'aide alimentaire est loin de faire consensus à la fois sur des approches idéologiques et pratiques, et sur des approches purement économiques liées aux commerces des produits alimentaires à l'échelon mondial. Il y a de façon générale, d'un coté ceux qui soutiennent l'idée de l'aide en tant que réponse à apporter aux problèmes d'insécurité alimentaire et ceux qui défendent le contraire.

En ce qui concerne le cas du Niger, de façon générale, l'aide alimentaire a été - et est - un moyen très efficace de redonner un souffle nouveau aux populations qui souffraient de famine et de malnutrition et grâce à cette aide des milliers d'enfants ont été sauvés. Ce qui corrobore la pertinence de l'intervention des organisations humanitaires qui agissent au Niger comme dans le reste des pays sous développés. Cependant, il nous ait apparu que, même si le caractère chronique de l'insécurité alimentaire justifierait une prise en charge dans le temps avec des programmes d'aide continu, dans le cas du Niger, nous l'avons vu, la passivité des gouvernants peut faire place à une léthargie complaisante qui aboutirait à une dépendance totale de l'aide alimentaire. Ce qui fragiliserait davantage l'économie du pays qui est basée à plus de 80% sur l'agriculture.

Puisque la question que nous nous sommes posées au départ était de comprendre et de peser l'impact de la monétisation de l'aide alimentaire sur l'économie du Niger et la population du pays, là encore il nous a semble très simpliste d'y répondre de façon brute tellement les enjeux sociaux et économiques sont importants, aussi bien sur le plan national qu'international.

- Au niveau nation, l'hypothèses posées sur la justification de la monétisation comme réponse à apportée en situation d'insécurité alimentaire temporaire ou permanente, nous a permis de confirmer la pertinence de la monétisation en situation d'insécurité alimentaire chronique et à infirmer sa pertinence en situation d'urgence.

De façon plus globale, la monétisation de l'aide alimentaire est un danger économique pour le Niger dans la mesure où les produits alimentaires qui transitent sur les marchés locaux peuvent avoir pour effet la déstabilisation de ceux-ci. Les agriculteurs locaux qui ont déjà du mal à écouler leurs produits à prix raisonnables se trouvent en concurrence (déloyale) avec des produits venant d'ailleurs transférés dans les conditions exceptionnelles du marché. Cette pratique influence d'autant plus l'économie du pays que le cultivateur qui représente, symboliquement, le "premier agent" de l'économie Nigérienne est mis en difficulté de produire. Les conséquences de cette pratique ne sont pas seulement économiques mais sociales ; nous citerons sans être exhaustif :

- l'exode rural, étant donné que l'activité champêtre ne permet plus de survivre les habitants des villages se délocalisent

- paupérisation des ménages vivant à la compagne, lorsque les récoltes ne sont pas vendues à bon prix, les cultivateurs n'ont plus de moyens de produire l'année qui suit,

- Changement des habitudes alimentaires, cela peut sources de plusieurs mots, mais surtout crée une dépendance alimentaire tacite...

Même s'il apparaît quelques points objectifs sur la monétisation, notamment le fait de constituer des fonds de contrepartie permettant de financer d'autres projets visant le même but, le danger reste imminent dans le cas du Niger, puisque cela constitue une forte pression pour l'épanouissement sociale et économique du pays.

C'est n'est donc pas si curieux d'entendre certaines ONG, à l'image de CARE, prendre leurs responsabilités face à une pratique qui devient monnaie courante au sein des pays bénéficiaire de l'aide alimentaire, en refusant l'aide accordée par le gouvernement des Etats-Unis en vue de vendre des produits alimentaires américains dans les pays en voie de développement.

Dans son rapport 2006 intitulé « situation mondiale de l'alimentation et de l'agriculture 2006 », la FAO pointe du doigt sur la question de la monétisation en étant critique sur la cette pratique, je cite :

« ...Si elle n'est pas gérée correctement, l'aide alimentaire peut déstabiliser les marchés locaux et mettre en danger les moyens d'existence des producteurs et des commerçants locaux dont dépend la sécurité alimentaire durable... ».

-Au niveau international, la responsabilité des effets de la monétisation au niveau local doit être partagé entre les gouvernements des pays bénéficiaires et les gouvernements des pays donateurs qui subventionnent le transport de l'aide alimentaire dans les pays en voie de développement.

En fait le problème n'est pas tant le fait de subventionner le transport de l'aide - même si cela ne répond pas aux normes du marché mondial - mais bien le fait d'utiliser les subventions obtenues pour transférer une aide alimentaire qui est revendue sur les marchés locaux à vil prix. Là encore, le fait pervers c'est la vente des produits d'aide alimentaire sur le marché. S'il y a subvention à la base, les produits d'aide devraient être gratuits.

Comme nous l'avons dit en réponse à l'hypothèse 3, il y a une dimension plus perverse de la subvention au transport de l'aide c'est le fait de lier l'aide à d'autres produits revendus sur place dans le pays bénéficiaire. Cela à pour conséquence d'annihiler l'aide qui est apportée au même moment, puisque, entre la vente des produits destinés à l'aide et ceux destinés à être commercialisés, les commerçant locaux ne peuvent plus vivre de leurs activités d'autant plus que les produits venant de l'extérieur sont vendus dix fois moins chers.

Nos recherches sur la monétisation de l'aide alimentaire nous ont conduit à nous positionner sur ce mode de fonctionnement et, il nous a semblé que cette aide alimentaire monétisée ne devrait être utilisée que, dans les cas que nous qualifieront pour la circonstance de « crise alimentaire disparate ».

En effet, dans les situations de crise alimentaire d'urgence dans un pays, il peut y avoir en même temps une urgence à deux niveaux, lorsqu'une ou plusieurs régions du pays sont touchées de façon inégalitaire. C'est-à-dire qu'il y aurait des régions qui nécessiteraient une intervention d'urgence avec la gratuité de l'aide alimentaire selon les critères d'insuffisance sur les marchés de produits alimentaires ou leur inaccessibilité du fait des moyens de survis limités, et du nombres d'enfants ou d'adultes malnutris dans la même région. Et, il y aurait dans le même pays et au même moment des région où l'urgence se confond avec le caractère chronique de l'insécurité alimentaire ne justifiant aucune distribution gratuite mais bien la vente de l'aide sur les marché pour atténuer l'impact des prix très élevés dans une telle situation.

A notre avis, cette description correspondrait le mieux à l'utilisation de l'aide alimentaire monétisée, si bien sûr, elle ne s'étant pas dans le temps au risque créer d'autres problèmes.

BIBLIOGRAPHIE

Livre

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Articles

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*L'aide alimentaire ne peut pas être l'objet de marchandages à l'O.M.C

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Enquêtes

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*Rapport spécial, mission FAO/PAM d'évaluation des récoltes et disponibilités alimentaires au Niger : 21 décembre 2004.

* 1 Grand désert du nord de l'Afrique, qui s'étend de l'océan Atlantique à la mer Rouge, le plus grand désert du monde. D'une largeur de 1 500 km et d'une longueur de 5 200 km d'est en ouest, le Sahara couvre près de 9 millions de km2 (soit plus de quinze fois la superficie de la France), dont 200 000 km2 sont occupés par des oasis plus ou moins fertiles.

* 2 Zone de transition entre la partie aride du Sahara au nord et les régions tropicales plus humides au sud. La ceinture du Sahel s'étend de l'Atlantique à l'océan Indien, en passant par la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Tchad et le Soudan.

* 3 Plan d'action, paragraphe 1

* 4 Cap vert, Gambie, Guinée Bissau, Sénégal, Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Tchad et Niger.

* 5 Niger, définition d'une politique nationale en sécurité alimentaire et nutritionnelle, p. 7.

* 6 Stratégie Opérationnelle de Sécurité Alimentaire

* 7 Niger évaluation de la compagne agropastorale 1992, p.12

* 8 Bulletin de SAP du 26 février 1996

* 9 CEE : Communauté Economique Européenne

ACP: Afrique Caraïbe Pacifique

* 10 Educations, diversité culturelles et stratégies politiques en Afrique subsaharienne, p. 234

* 11 100.000 enfant, selon les nations unies (OCHA, 2007 : 8), Niger 2005 : une catastrophe si naturelle, p.32

* 12 Dispositif National de Prévention et de Gestion des Crises Alimentaires

* 13 Niger 2005 une catastrophe si naturelle, de Xavier Crombé, p.241 et p.242

* 14 Dossier politique commerciale de la FAO, N°8 L'aide alimentaire dans le contexte des marchés internationaux et nationaux et du cycle de Doha






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