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Bis Repetita Placent : la collection comme mode de construction de la cinéphile

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par Stéphanie POURQUIER
Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Master Sciences de l'Information et de la Communication 2007
  

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Chapitre II :

Entre « regard spécialiste » et fascination

« La figure du collectionneur acquiert une aura culturelle équivalente à celle du
connaisseur81 ».
Jean-Marc Leveratto

Sans pour autant avoir un statut de spécialiste du cinéma, un collectionneur peut avoir un propos oblique, voire « critique », construit et surtout, nous apporter un bon nombre de connaissances sur l'objet. Ce propos critique s'appuie naturellement sur le sentiment d'accès au film qui habite le spectateur. La relation au film se construit de manière individuelle et chacun tente de montrer une conception différente, des émotions forcément autres que celles ressenties par tout autre spectateur.

A- l'opinion du collectionneur

Vingt ans après sa sortie en salles, Dirty Dancing alimente les propos, notamment ceux tenus sur Internet, dans des forums, sur des sites spécialisés. Les sites consacrés au cinéma offrent un lieu de « parole ouverte » : si le spectateur fréquente ce site, c'est qu'il a déjà une connaissance cinématographique. Il tient à la partager, à la faire connaître.

Aussi, certains commentaires, certaines critiques font preuve d'un lyrisme étonnant. Les commentaires laissés à propos de films comme Dirty Dancing sont particuliers. En effet, ce ne sont pas des commentaires d'actualité, ce ne sont pas des réactions à vif sur une nouveauté. À leur lecture, on voit qu'elle relève d'une analyse interne de l'individu. Cet individu qui s'est lui-même interrogé sur le pourquoi de son amour pour un film.

81 LEVERATTO, Jean-Marc, La Mesure de L'art : sociologie de la qualité artistique , La Dispute, Paris, 2000, p.319

Nous avons choisi d'extraire un commentaire du forum consacré à Dirty Dancing sur le site "Allociné82", afin d'illustrer notre propos.

« Le film fétiche, sacré comme un secret, comme un souvenir précieusement gardé et imprimé tendrement dans le coeur d'un nombre incalculable de filles, de jeunes filles, de femmes, laissant les garçons déroutés, incompréhensifs devant cet engouement féminin pour cet objet que d'aucun pourrait considérer, peut-être à juste titre d'ailleurs, comme une mièvrerie. Quelle fille n'est pas tombée amoureuse de Swayze, laquelle n'aurait pas voulue se retrouver un jour conduite par lui au milieu d'une piste de danse ? Mais quel garçon n'a pas secrètement rêvé d'avoir le déhanchement magnétique de Swayze ? Ce film est incroyable parce qu'il cristallise la jeunesse d'une manière éblouissante et naturelle, pure et intense, sans aucun cynisme et, miraculeusement, le film fonctionne et ce d'une manière absolument prodigieuse et dévastatrice. L'époque et la musique des 60s en adéquation complète avec le propos du film : l'illustration d'un Eden, d'un bouquet d'affection dont le parfum reste comme un souvenir de vacances et le film lui- même est comme une fontaine de jouvence, un espace idéal pour mettre de côté les soucis, le cynisme de la vie quotidienne en laissant place à la fraîcheur et à la nostalgie. La douce folie et la romance du couple candide sont communicatives. Les deux comédiens sont à ce titre prodigieux quand ils font ressortir simultanément toute leur sensualité et leur innocence : un exploit rare ! Alors on pourra bien sûr rire et pouffer sans honte devant ce spectacle, mais c'est tellement mieux de se laisser aller aux rythmes de la splendide B.O. en se faisant porter par le charme magique des pas de Bébé et de Johnny, les coeurs à l'unisson jusqu'au final, comme un feu d'artifice.

Commentaire de Omael, membre des forums « Allociné »

Entre commentaire lyrique et analyse cinématographique, il est intéressant de voir la manière dont propos peut perdurer autour d'une oeuvre de deux décennies. De plus, l'internaute utilise de son propre chef les termes « film fétiche » : cette terminologie est donc ancrée dans le lexique cinéphile de description d'une oeuvre, et c'est cette terminologie qu'il choisit pour analyser Dirty Dancing.

82 Allociné est un portail Internet : un site proposant des liens vers d'autres sites plus spécialisés, en particulier les sites officiels de films. Allociné propose des bandes-annonces, photos, fiches techniques de films mais également des critiques et des forums de spectateurs.

Cette critique est intéressante dans la mesure où elle n'occulte pas les facettes négatives du film, à savoir les lieux communs du cinéma américain et les stéréotypes adolescents. Elle offre un panel des sentiments ou des émotions ressenties à la réception du film. Cependant, la connaissance du collectionneur ne s'arrête pas à son introspection cinématographique ou au développement de son sens critique.

Si chacun a sa manière de raconter le film, un collectionneur peut même parfois aller jusqu'à la théâtralisation, ce qui peut témoigner de sa connaissance du film. C'est également pour l'individu le moyen de montrer sa capacité d'appréhension d'un film et à quel point il le connaît.

Est-ce que tu discutes des films que tu as aimé ou que tu aimes avec tes amis, ta famille, tes collègues ?

Heu... oui, oui, oui ! On refait des... des passages des films des fois !

C'est important pour toi de rejouer les passages des films?

Ouais, parce que c'est rigolo ! Genre le film La famille Adams (rires) L'arrivée du bébé sur son train (rires), quand il va ce faire éjecter du haut de, de, de leur maison par Mercredi... hein ou par Pugsley, je ne sais plus, et où on le voit arriver "tin tin tintin" habillé en, en petite fille... hein, celui là le je passais en boucle ce passage là ! (rires) Ah oui parce que c'est ça ! C'est Mercredi qui va le, l'installer à la guillotine et le petit va arrêter la lame avec ses deux doigts... (Rires) Alors d'autres films que j 'ai refais, euh..., bah dans Dirty Dancing justement le, le passage ou elle sort de, de son cours de danse, elle descend les escaliers et, ou alors quand elle y va, je ne sais plus... et ou elle... elle regarde à gauche, à droite, et puis elle fait un "uuit" (elle mime) avec sa jambe... J'adore ce passage là !

Marion, 20 ans

La théâtralisation tel que nous la raconte Marion nous montre que les apports du film ne s'arrêtent pas à une vision romanesque et romantique du film, ou du moins pas seulement. Ici, il est question de donner à voir des moments du film, de faire part de sa

représentation des choses. Le mode ludique dans lequel elle se situe est révélateur de son imaginaire, dans le sens ou il a été stimulé par les apports du premier visionnage du film. : « "L'imaginaire intervient dans tous les processus de la socialisation parce que les affects gouvernent les croyances et les désirs, stimule l'action des sujets, et déterminent un mouvement universel au sein duquel se combinent les caractères de base de l'existence dans sa totalité : la répétition et la différenciation83" à l'instar de Marion, théâtraliser une partie d'un film est un exemple de socialisation dans le sens où la jeune femme utilise sa connaissance du film pour en faire un lien social entre les individus. Même s'il ne connaît pas le film, l'interlocuteur sera interpellé par le mode ludique de la situation de communication :" on peut conclure que c'est seulement en jouant que la communication est possible84" selon D.W. Winnicott (1971-p.110) la théâtralisation, vécue comme un jeu, devient aussi un prétexte à communication à la fois autour du film mais également autour du propos du film.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984