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Le Rôle des Achats dans l'Offshore Outsourcing

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par Stéphane Houisse
ESSEC - MS Gestion des Achats Internationaux 2007
  

Disponible en mode multipage

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Stéphane HOUISSE

stephane.houisse@gmail.com

Assistant Acheteur - Mai à Octobre 2007

Mémoire de fin d'étude - MS GAI ESSEC - Année 2006/07

Rôle des achats dans l'offshore

outsourcing : l'exemple de la

Bancassu rance

SOMMAIRE

Executive Summary

Introduction

I. L'offshore outsourcing et le métier de la Bancassurance

3

4
6

 

1. Définition et contexte de l'offshore outsourcing

6

 

Définition de l'offshore outsourcing

 

6

Contexte de l'offshore outsourcing

 

10

2. Enjeux dans le secteur de la Bancassurance

11

 

Tendances et évolutions de la Bancassurance

 

11

Externalisation et délocalisation dans la Bancassurance

 

13

Causes de l'émergence de l'offshore outsourcing et limites dans la

 
 

Bancassurance

 

17

II. Modèle d'analyse achat d'un projet d'offshore outsourcing

22

 

Partie 1 - Qualification du besoin

22

 

1. Impacts Internes

22

 

2. Impacts Externes

24

 

3. Matrice de faisabilité

25

 

Partie 2 - Qualification de l'offre

27

 

1. Mode d'offshore outsourcing

28

 

2. Global Sourcing : analyse macro

31

 

3. Sélection du fournisseur : analyse micro

33

 
 

III. Place des Achats dans l'offshore outsourcing

38

 

1. Offshore outsourcing et maturité Achats

38

 

2. Rôle possible des achats

43

 

3. Approche développement de l'offshore outsourcing

45

 
 

Conclusion

49

 

Bibliographies

50

 

Executive Summary

L'offshore outsourcing est une tendance de plus en plus importante en France dans l'achat de prestation de service. Ce phénomène est particulièrement présent dans la Bancassurance, ce secteur étant un important consommateur de prestations de service (notamment informatique). Les directions des achats doivent donc être capable de mettre en place des outils, des méthodes et acquérir des compétences spécifiques pour être impliquées dans ce type d'achat complexe.

Ce Mémoire vise à apporter un éclairage sur l'offshore outsourcing en général, notamment dans la Bancassurance, et définir les pré-requis nécessaire à une direction des achats de prestation pour être crédible sur ce sujet.

Cette analyse se base à la fois sur mon expérience dans un grand groupe bancaire français, et les nombreuses rencontres avec les utilisateurs ou les prestataires, mais aussi sur un ensemble d'éléments bibliographiques dont vous trouverez une sélection à la fin de ce document.

Introduction

L'externalisation et la délocalisation des services pour les organisations a connu une croissance importante ces dernières années. Ce phénomène est apparu dans les années 90 aux Etats-Unis et tend à se développer aujourd'hui en France. Le recours accru des organisations à ce type de prestation a des conséquences en terme de coût, et donc de compétitivité, mais aussi en terme de risques (social, qualité de la prestation, propriété intellectuelle et confidentialité,...). Cette pratique a été notamment sujette à de vifs débats aux Etats-Unis au cours de l'élection présidentielle de 2004.

Il s'agit d'un sujet sensible, d'un point de vue économique et politique. D'un point de vue macro-économique ce sujet impacte de nombreuses composantes de l'économie des pays occidentaux : pertes d'emplois et de croissance, divulgation d'informations sensible dans des secteurs stratégiques,.... D'un point de vue micro-économique, les organisations peuvent y trouver de nouveaux viviers de gains tandis que les salariés doivent faire face à une concurrence supplémentaire.

Ce sujet est particulièrement présent dans le secteur de la bancassurance. Ainsi, en 2001, moins de 10% des institutions financières américaines et anglaises ont eu recours à l'offshore outsourcing, contre 75% en 2006.1

Bien que ce sujet soit de plus en plus présent dans les organisations, il n'est pas encore maitrisé par la plupart des Directions Achats. Il me semble intéressant d'en fournir une analyse du point de vue de la Direction des Achats. Cette analyse visera à définir ce phénomène, à fournir des éléments de compréhension aux acheteurs et à étudier leur rôle potentiel sur ces pratiques. Pour éclairer cette analyse, je prendrai l'exemple du secteur de la Bancassurance, secteur fortement impacté par l'offshore outsourcing.

La première partie de ce Mémoire visera à décrire le contexte de l'offshore outsourcing dans
la bancassurance, et notamment les caractéristiques de l'offshore outsourcing, les grandes

1 Etude Deloitte Touche

tendances de la bancassurance ainsi que l'émergence de l'offshore outsourcing dans ce secteur.

La deuxième partie proposera une méthodologie d'analyse d'un projet de sourcing en offshore outsourcing. Cette méthodologie sera expliquée étape par étape, et sera illustrée par des exemples de grille d'analyse.

Enfin la troisième partie a pour objectif de définir les rôles potentiels de la fonction achats dans l'offshore outsourcing. Il visera notamment à expliciter les niveaux de maturité possible de la fonction achats dans ce domaine, ainsi que les gains que peuvent apporter la Direction des achats dans ce type de projet.

I. L'offshore outsourcing et le métier de la Bancassurance

1. Définition et contexte de l'offshore outsourcing

Définition de l'offshore outsourcing

Avant tout, il me semble nécessaire de définir précisément le terme d'offshore outsourcing.

L'offshore outsourcing, ou externalisation délocalisée, consiste à confier à une organisation extérieure, située dans une zone géographique différente de celle du client, l'exécution d'une prestation.

EXTERNALISATION

DELOCALISATION

Par organisation extérieure, j'entends toute organisation ou entité qui n'aurait pas un lien hiérarchique commun avec l'organisation ou entité demandeuse. Par zone géographique différente, j'entends toute localisation qui ne permet pas un contact physique facile avec le personnel de l'organisation demandeuse. Par prestation, j'entends l'ensemble des activités, intellectuelles ou physiques, dont peut avoir besoin une organisation ou une entité.

OFFSHORE
O UTSOURCING

Cette définition permet de constater qu'il existe deux composantes différentes dans l'offshore outsourcing : une composante externalisation et une composante délocalisation. Le fait de bien séparer ces deux éléments dans l'analyse permet de bien comprendre les impacts de chacun.

Quand, par exemple, une prestation est stratégique, confidentielle ou à l'origine d'un avantage concurrentiel pour l'organisation, le risque de l'offshore outsourcing ne vient pas du risque de délocalisation mais d'externalisation. Ainsi, cette prestation doit être exécutée par l'organisation elle-même, dans la zone géographique la plus appropriée.

A l'inverse, Renault, par exemple, a rencontré des problèmes quand il a confié son assistance informatique de premier niveau à la société HP, en Tunisie. L'échec vient principalement du retard dans le transfert de connaissance vers le centre tunisien. Cette période de flottement pendant le démarrage de la prestation, associée à des problèmes de communication et de formation des équipes locales, a entraîné de nombreuses difficultés. Dans ce cas, la délocalisation est à l'origine du risque et non l'externalisation. Bien que la prestation soit auparavant confiée sans problème majeur à un prestataire extérieur, les critiques se sont portées sur l'externalisation.

Parfois enfin, et il s'agit du cas le plus critique, les deux phénomènes ont un impact négatif sur la prestation. Pour des prestations complexes, nécessitant de nombreux échanges, la communication est rendue difficile à la fois parce que la prestation est réalisée par une société extérieure qui ne connaît pas toujours bien le métier et les processus de son client ainsi que le contexte de l'organisation cliente (problème lié à l'externalisation), mais aussi parce que les prestataires ne sont pas sur site et ne peuvent pas toujours communiquer facilement sur des sujets complexes, parfois dans une langue différente (problème lié à la délocalisation).

Le deuxième point que soulève cette définition concerne les termes « organisation extérieure » et « zone géographique différente ». Ces deux expressions sont larges. En effet, les choix de délocalisation et d'externalisation ne sont pas des choix binaires (oui/non). Il existe de nombreuses alternatives formant un long continuum entre chacun des deux extrêmes pour chacun de ces éléments. Je présenterai, plus tard dans ce mémoire, les différentes configurations possibles pour chacun, car il s'agit d'un levier majeur de ce type de projet.

Le troisième point enfin que soulève cette définition est le terme prestation. En effet, il s'agit de toutes les activités dont peut avoir besoin une organisation. L'activité peut être une tâche, un processus, un projet ou même un pan entier d'activité. Ceci est valable pour la production d'un bien ou d'un service. Historiquement, l'externalisation et la délocalisation se sont développées des activités les plus simples aux plus complexes.

Grande
Distribution

BIENS SERVICES

Industrie FPO2 BPO2 KPO2

ITO2

< 80's 80's 90's 00's > 00's

La Grande Distribution a été le premier secteur à externaliser (vendre des produits fabriqués par d'autres sociétés) puis délocaliser la production (par exemple, fabriquer ou faire fabriquer des produits textiles dans le sud-est asiatique). L'Industrie a suivi cette tendance dans les années 80 et 90, pour des raisons de compétitivité et de recentrage sur le coeur de métier. La délocalisation de la production a notamment été favorisée par la levée de nombreuses barrières tarifaires, suite aux accords du GATT puis de l'OMC, ainsi que l'ouverture de nouveaux marchés, notamment en Europe de l'Est suite à la chute de l'URSS.

Les années 90 ont marqué le début de ce que j'appelle le FPO2 (Functional Process Outsourcing and Offshoring), c'est à dire l'externalisation et la délocalisation des processus fonctionnels comme la comptabilité ou les ressources humaines. Ce sont souvent des processus à faible valeur ajoutée, ne touchant pas au coeur de métier du client et nécessitant d'importantes capacités humaines.

Au début des années 2000, émerge le BPO2 (Business Process Outsourcing and Offshoring) qui consiste à externaliser et délocaliser certains processus métiers de l'entreprise, souvent les plus répétitifs, comme la construction d'un catalogue de vente par exemple. Le BPO2 touche aux processus liés au coeur du métier de l'organisation, avec donc un impact direct sur l'activité de l'entreprise. Ainsi, EDF, après avoir externalisé ses centres d'appel client, a mené une réflexion sur les possibilités de création de valeur lors de ce contact privilégié avec le client. Suite aux conclusions de l'étude, l'opérateur a dû évaluer l'impact de l'externalisation sur ce processus, qui était considéré comme pouvant apporter plus de valeur ajoutée.

Enfin, la dernière tendance est le KPO2 (Knowledge Process Outsourcing and Offshoring) consistant à externaliser et délocaliser les activités liées à la connaissance (Recherche et Développement, data mining, veille technologique, analyse industrielle, modélisation financière). Il s'agit du degré de complexité le plus important d'offshore outsourcing car il touche à l'origine même de la création de valeur. Des centres de recherche commencent à s'ouvrir en Inde, comme celui d'Alcatel pour le développement d'équipement télécom. Malgré tout, il s'agit des débuts de ce type de prestation.

Enfin, l'ITO2 (Information Technology Outsourcing and Offshoring) est un élément
transversal aux éléments cités plus haut. Il s'agit de l'externalisation et la délocalisation des

activités informatiques. L'émergence de l'ITO2 s'est faite dans les années 90 avec les projets de maintenances liées au passage à l'an 2000, à l'intégration de solutions ERP (Entreprise Ressource Planning ou Progiciel de Gestion Intégré) dans les entreprises et au passage à l'euro en Europe. Les technologies de l'information sont présentes dans la plupart des activités d'une organisation. Ainsi, l'externalisation et la délocalisation de activités liés aux systèmes d'information des entreprises touchent les trois éléments cités plus haut : le FPO2 (mise en place d'un outil de e-sourcing par exemple), le BPO2 (maintenance d'un site internet par exemple) et le KPO2 (développement d'un progiciel pour un éditeur, par exemple).

Les concepts d'ITO (Information Technology Outsourcing), de BPO (Business Process Outsourcing) et de KPO (Knowledge Process Outsourcing) sont couramment utilisés. Malgré tout, ils se limitent à l'externalisation. Or aujourd'hui, l'offshore outsourcing combine l'externalisation et la délocalisation. Ainsi, je mets en avant les concepts d'ITO2, de BPO2 et de KPO2, car ils recouvrent une problématique plus complexe.

Enfin, le concept de FPO2, que j'ai développé dans ce mémoire, aide selon moi à délimiter le périmètre du BPO2. Le BPO2, comme son nom l'indique, se limite à l'externalisation et à la délocalisation de processus métier (business). Les processus fonctionnels ne répondent ni à la même logique ni aux mêmes contraintes d'Offshore Outsourcing que les processus métier. Ceci justifie donc cette distinction.

Ce mémoire se limitera à la partie Services du schéma ci-dessus. Bien que le développement de l'offshore outsourcing soit important dans les activités liées aux biens ou aux services, le niveau de maturité ainsi que les logiques associées sont très différentes. Pour les activités physiques liées à la production, on parle de sourcing LCC (Low Cost Countries), ou sourçage en pays à bas coût, cette démarche étant très développée dans les organisations industrielles. Ainsi, l'équipementier automobile Valeo s'est fixé comme objectif de monter sa part d'achat en pays à bas coût à 70% d'ici à 2010. Les contraintes sont surtout des contraintes de qualité, de logistiques et de commerce international (douane, assurance,...).

Les achats de prestations de service externalisées et délocalisées sont à un niveau de maturité plus faible, car il s'agit d'une tendance plus récente. De plus, elles suscitent de nombreuses réticences de la part des populations touchées dans l'organisation cliente ou chez le prestataire. Ces populations ont souvent un niveau de formation plus élevé (ingénieur,

comptable,...) et ont suivi l'impact des délocalisations et des externalisations sur les métiers de production (licenciement, baisse des salaires,...). A cela s'ajoute le fait que les contraintes de l'offshore outsourcing de prestations de service sont très différentes puisque les activités de service sont basées sur des prestations intellectuelles, et non physiques. La production n'est pas transportée physiquement mais de manière numérique via les réseaux de télécommunication. Or, avec les avancées technologiques et le déploiement mondial de ces réseaux de télécommunication, ce transport est rendu plus facile. L'enjeu est plus lié à la communication, à la gestion de projet et au management d'équipe.

Enfin, il est important de distinguer l'offshore outsourcing de projets ou d'activités récurrentes. Cette distinction permet de bien comprendre les besoins et les enjeux pour chacun des deux cas. Pour un projet, le risque sur les délais, les coûts et la qualité sont très importants et ne peuvent pas, le plus souvent, être rattrapés ensuite. A l'inverse, une activité récurrente peut être améliorée au cours du temps mais les investissements au démarrage de la prestation étant plus importants, il est plus difficile de changer de stratégie ensuite (changement de fournisseur, de localisation ou ré-internalisation par exemple).

Le sourcing est différent dans les deux cas puisque dans un projet, on cherche un savoir-faire déjà existant et déjà appliqué dans des projets similaires. A l'inverse, dans des prestations récurrentes, on cherche un partenaire durable dont les prestations pourront s'améliorer avec le temps.

Contexte de l'offshore outsourcing

L'offshore outsourcing est une pratique en pleine croissance qui s'appuie sur différents éléments. Sur le plan macroéconomique, il s'inscrit dans la tendance de fond de la mondialisation, qui a entrainé deux mouvements dans les économies occidentales : les délocalisations dans les pays à bas coût et le recentrage sur le coeur de métier de l'entreprise. Sur le plan micro économique du marché de l'Offshore Outsourcing, la pénurie de main d'oeuvre pour certaines prestations dans les pays occidentaux, la nécessaire diminution des coûts, la création d'une offre de prestation informatique en Inde (les grandes sociétés de services informatiques indiennes ont été crée au début des années 80 : Infosys en 1981, Wipro en 1980) et le développement des Technologies de l'Information et de la Communication ont favorisé l'émergence de l'offshore outsourcing.

Le marché de l'offshore outsourcing est en pleine croissance et nombreuses sont les entreprises souhaitant y recourir dans les années qui viennent. Ainsi, 50% des grandes entreprises américaines (supérieur à 5 000 salariés) et 40% des entreprises en Europe ont l'intention de délocaliser et/ou externaliser une partie de leurs prestations d'ici 2010.

Que ce soit en terme d'offre ou de demande, il s'agit d'un marché fortement polarisé. Selon une étude Gartner (Juin 2005), 80% de la demande sur ce marché est représentée par les Etats- Unis. En Europe, 70% de la demande européenne est représentée par le Royaume-Uni. A l'inverse, l'Inde représente 80% des revenus de l'offshore outsourcing de service.

Généraliser les tendances de ce marché est donc difficile car il est limité à quelques pays, aussi bien en termes d'offre que de demande. Malgré tout, cette situation semble évoluer. Ainsi, l'offshore outsourcing ne représente que 2% des dépenses de prestations informatiques en France mais croit de 20% par an. De même, le nombre de pays fournisseurs de prestation ne cesse d'augmenter (Maroc, Ile Maurice, Roumanie).

L'offshore outsourcing est donc une réalité complexe, qui mérite d'être étudié de manière structurée.

2. Enjeux dans le secteur de la Bancassurance

Tendances et évolutions de la Bancassurance

Le métier de la Bancassurance doit faire face à deux tendances fortes : la mondialisation et la concentration sectorielle, ces deux tendances étant liées. En effet, les marchés financiers ont été les pionniers de la mondialisation dans les années 80, qui ont été les premiers marchés globaux. A l'inverse, la mondialisation entraine une compétition mondiale et oblige les Bancassurances à devenir des poids lourds mondiaux, et donc favorise la concentration sectorielle.

Aujourd'hui, les banques doivent absolument atteindre une taille critique pour pouvoir
évoluer sur le marché mondial, cette mondialisation ne se limitant plus aux marchés financiers

mais s'étendant à l'ensemble des métiers de la bancassurance (banque de détail ou assurance par exemple).

La banque globale, capable d'avoir une présence commerciale dans différents pays, est un enjeu supplémentaire pour les banques françaises car elles évoluent sur un marché intérieur saturé. La stratégie de banque universelle, qui consiste à offrir l'ensemble des produits bancaires, financiers et d'assurance, au sein d'un guichet unique atteint ses limites. Ainsi, dès les années 80, en plus de proposer les produits bancaires classiques (moyens de paiements, prêts, placements), les banques françaises se sont lancés sur le marché lucratif de l'assurance. Il s'agit du début de la bancassurance, qui consiste à offrir via un canal de distribution unique, des produits bancaires et d'assurance. Cette tendance a contraint les acteurs de l'assurance de développer une offre équivalente en proposant elles aussi des produits bancaires. Par exemple, Axa lance Axa Banque en 1991. Cette concurrence s'est encore accrue encore au cours des années 90, avec la Grande Distribution qui propose elle aussi des services financiers (carte de paiement, crédit à la consommation,...) et avec le renforcement du marché des courtiers (en assurance, prêts ou investissement boursier) grâce à Internet.

Cette concurrence importante sur le marché de la bancassurance entraine une très forte atomisation de l'offre. Pour exister, les banques ont été contraintes d'ouvrir un nombre conséquent d'agences entrainant une saturation du réseau de distribution. Enfin, les banques ont été contraintes de proposer une offre commerciale agressive qui a fait que le taux d'équipement des ménages français en produits de banque et d'assurance est très élevé. Tout ceci rend très difficile et très couteux le développement sur le marché français.

Ainsi, a été lancée l'idée de chercher des relais de croissance à l'étranger, en capitalisant sur le savoir-faire acquis sur le marché français pour équiper la clientèle étrangère. Ce développement a été d'abord mené en Europe de l'Ouest, notamment en Italie, où les marges étaient encore très supérieures à celles de la France au début des années 2000. Aujourd'hui, la nouvelle concurrence sur cette zone a considérablement réduit cet écart. Il est dorénavant nécessaire de se tourner vers les pays émergents, notamment l'Europe de l'Est, le Bassin Méditerranéen, et le groupe BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine).

La Société Générale, comme la plupart des banques françaises, suit cette tendance et possède
des filiales banque de détail à l'étranger, notamment en Roumanie (BRD), au Maroc (SGMB)

ou en République Tchèque (KB). L'axe de développement de la Société Générale se situe principalement en Europe de l'Est et dans le Bassin Méditerranéen, et ceci par croissance externe, c'est à dire en rachetant des banques locales déjà implantées dans le pays. Ce réseau de distribution est ensuite utilisé pour proposer l'ensemble des produits du Groupe.

Ces acquisitions en dehors des frontières françaises ont entrainé l'intégration de nombreux systèmes d'informations et processus métiers très différents d'une banque à une autre. De plus, dans certains cas, le système d'information de ces petites structures était presque inexistant et les processus étaient souvent mal définis et non respectés. L'enjeu est de pouvoir équiper ces filiales d'outils modernes en capitalisant le déploiement sur l'ensemble des filiales. Les achats ont alors un rôle important sur ce type de projet.

Dans ce contexte, les banques doivent être particulièrement rentables, d'une part pour permettre l'amortissement de leurs acquisitions, et d'autre part pour soutenir leur cours de Bourse et rendre difficile une OPA hostile de la part d'une banque concurrente. Il n'est donc pas étonnant que de grands plans d'économie soient lancés. Un des objectifs est bien sûr de rationnaliser les dépenses, notamment en mutualisant les moyens entre les différentes filiales. Ceci impacte particulièrement les achats informatiques, qui ont un poids important dans la banque2.

C'est dans ce cadre (mondialisation, plan d'économie,...) que la Direction des Achats d'une grande banque française doit évoluer et que s'inscrit l'émergence de l'offshore outsourcing

Externalisation et délocalisation dans la Bancassurance

Comme défini au début de ce mémoire, l'offshore outsourcing est constitué de deux éléments : l'externalisation et la délocalisation. Chacun de ces deux éléments connaît un développement important actuellement, dans tous les secteurs d'activités, et particulièrement dans celui de la Bancassurance.

L'externalisation, dans le secteur de la Bancassurance, est une nécessité. En effet, les banques
sont très concentrées verticalement. Selon une étude de la Deutsche Bank sur les banques

2 Je traiterai de ce sujet dans la suite de ce mémoire

allemandes, mais qui s'applique aussi aux banques françaises, 80% de leur revenu est produit en interne. Elle maîtrise la construction de leur offre (produits financiers, bancaire ou d'assurance) ainsi que sa distribution par un réseau d'agence très important dont ils sont propriétaires. Ce schéma est particulièrement vrai en France. Ainsi, plus cette intégration est importante plus les banques sont contraintes d'être centré uniquement sur leur coeur de métier.

Ainsi, dès la fin des années 70, les établissements de crédits décident, pour des raisons économiques, d'externaliser certaines activités administratives, comme l'imprimerie et le stockage de données. En effet, les banques se développent en terme de couverture géographique (ouverture d'agence sur tout le territoire) ainsi qu'en terme de métier (développement de l'offre financière).

L'outsourcing informatique dans le secteur de la Bancassurance ne débute que plus tard, dans les années 90. En effet, l'informatique est un domaine sensible pour les banques que ce soit en terme de sécurité ou de qualité. De plus, les banques sont des gros consommateurs de bien et de service informatiques, principalement parce que l'activité d'une banque consiste à gérer des flux informationnels et monétaires. Or, l'informatique a été justement une révolution dans le domaine de la gestion des flux et des données. Cette révolution a donc permis aux banques de diminuer leurs coûts de traitement et d'accéder plus rapidement à des informations à jour. Cette activité étant donc un facteur clé de succès pour les sociétés de Bancassurances, ces dernières ont d'abord développé leurs propres services d'ingénierie informatique.

La volonté de recentrer l'activité des banques sur leur coeur de métier, la complexification d'une partie de l'informatique ainsi que la banalisation de certaines tâches ont entrainé une nouvelle vague d'externalisation dans les banques. Entre 1990 et 2003, les prestations relatives à l'infrastructure informatique représentaient, en valeur, les deux tiers des contrats d'externalisation.3 A la Société Générale, comme dans la plupart des banques, les achats liés à l'informatique (prestations, progiciels et logiciels, matériels et consommables) représentent plus de la moitié du montant total des achats.

Cette externalisation a été effectué suivant deux axes. D'abord la cession des entités
spécialisées des banques dans le service informatique. Ainsi, Atos, une des plus grosses SSII

3 Etude Roland Berger (2004)

françaises, est issue de la fusion en 1997 de Axim et Sligos, fondées respectivement par le Crédit du Nord et le Crédit Lyonnais, dans les années 70. L'autre axe a été de confier l'exécution de nombreuses activités à des prestataires. Ainsi, à la Société Générale, la moitié du personnel informatique est composé de personnes appartenant à un prestataire extérieur. Ce cas n'a d'ailleurs rien d'exceptionnel, et est identique dans la plupart des banques françaises.

Aux Etats-Unis, le développement de l'externalisation de l'informatique est encore plus important. Au début des années 2000, des gros contrats ont été signés entre les sociétés de service et les banques. Ainsi, en 2002, JP Morgan, la deuxième banque du pays, a signé un contrat d'externalisation de 5 milliards de dollars avec I.B.M. pour 7 ans. Ce contrat est annulé par la banque, deux ans plus tard, et les 4 000 employés transférés à Big Blue sont réintégrés. Cet événement marque les esprits et signe la fin des gros contrats d'externalisation. Malgré tout, il convient d'expliquer les causes de ce revirement. Le choix de JP Morgan n'était pas motivé par les mauvaises performances d'I.B.M. mais faisait suite à la fusion avec Bank One, reconnu pour son savoir-faire dans la réduction de ses frais de structure. Ainsi, entre 2000 et 2003, Bank One a réduit ses frais de structure de 12% quand ses revenues augmentaient de 17%. Ainsi, JP Morgan a souhaité gérer l'intégralité de son infrastructure en interne pour pouvoir intégrer le savoir-faire de Bank One. Il s'agit donc plus d'une mauvaise publicité faite par les détracteurs de l'externalisation que d'un réel échec.

Depuis quelques années, le secteur de la Bancassurance se tourne vers le BPO et le KPO. Mais il s'agit d'une tendance très récente et en fort développement. En effet, ces externalisations touchent les processus métiers de l'entreprise. Les Bancassurances américaines commencent à développer le BPO pour certains processus métiers, comme pout la gestion des cartes de crédit. En France, des expériences commencent à se développer dans le traitement des chèques, avec malgré tout des risques très forts (respect des délais, confidentialité, protection des données personnelles).

Voici donc un panorama non exhaustif des différentes prestations propices à externalisation, mais aussi à la délocalisation, dans les banques et les assurances.

- traitement des chèques,

- gestion des demandes de crédit, - gestion des cartes de crédit.

F.P.O. B.P.O. K.P.O.

A S S U R

A
N

C
E

B A N Q U E

- comptabilité,

- gestion des ressources humaines.

- infogérance des postes de travail, - helpdesk

- maintenance des systèmes de production bancaire,

- mise en place d'outil CRM (Customer Relationship Management).

- traitement des indemnisations, - gestion des remboursements,

- gestion des transferts de dossier.

- mise en place d'outil CRM, - maintenance des systèmes de gestion des contrats d'assurance.

- modélisation financière, - analyse financière,

- étude de marché.

- offre à créer.

- évaluation des risques, - calcul des primes.

- offre à créer.

Prestation non I.T.

Prestation I.T.

Le développement de l'externalisation n'est donc pas un phénomène nouveau pour les Bancassurances. Par contre la délocalisation de ces prestations l'est beaucoup plus. Ainsi, BNP Paribas a ouvert deux filiales à Casashore, la zone franche située à Casablanca : Mediha Paribas et BDSI. Ces deux centres assurent le développement et la maintenance d'applications ainsi que diverses tâches informatiques pour le compte de la banque française. La Société Générale, quant à elle, a possède depuis 2000, un centre de développement à Bangalore, en Inde. Dans le secteur de l'assurance, Axa développe son centre de Casablanca. Le projet est porté par le Président du Directoire de l'assureur, Henri De Castries, qui en a fait une stratégie affichée.

La délocalisation des prestations I.T. ne semble pas être une possibilité, mais bien une nécessité à long terme, pour rester compétitif. Ainsi, Deloitte prévoit que d'ici 2010, 30% des dépenses informatiques mondiales seront délocalisées (contre 6% aujourd'hui). Pourtant les banques et les assureurs français sont très en retard par rapport à leurs homologues anglais et américains.

Aujourd'hui, le niveau d'offshore outsourcing des banques américaines, mais aussi anglaises, restent très élevé. Ainsi, HSBC externalise auprès de Cap Gemini en Inde, plus de 2 000 postes I.T. La délocalisation est aussi directement gérée par les banques, sur place. Selon une étude de Deloitte (2003), GE Capital employait 11 000 personnes en Inde, Citigroup 3 000 et HSBC 2 000. La même année, Axa, un des pionniers français, n'employait que 380 personnes en Inde.

Quant à la délocalisation de processus métier, il s'agit d'un sujet très sensible. Ainsi, trois grands assureurs n'ont pas souhaité répondre à l'enquête des Echos4. D'autres considérant cette pratique comme « pas stratégique » (Groupama) ou étant « peu concerné par le sujet » (La Mondiale). Seul Axa France semble donner des informations sur cette pratique. L'assureur compte ouvrir 1 500 postes de télé commerciaux au Maroc pour le compte de sa filiale Direct Assurance, pour des tâches de souscription et de gestion des contrats. Cette activité est donc en plein développement.

Causes de l'émergence de l'offshore outsourcing et limites dans la Bancassurance

Les raisons du développement de l'offshore outsourcing sont nombreuses. Pour bien en comprendre les avantages, il convient encore une fois de séparer l'analyse entre les éléments liés à l'externalisation et ceux liés à la délocalisation.

Le principal avantage de l'externalisation est de permettre à l'entreprise cliente de faire réaliser ses prestations par des entreprises spécialisées. Cela permet souvent une amélioration de la qualité, car le prestataire a souvent une grande expérience dans son domaine. L'informatique d'entreprise devenant de plus en plus complexe, il est difficile pour les organisations non spécialisées de suivre toutes les évolutions technologiques, ce que les spécialistes peuvent faire. De plus, c'est l'opportunité pour les banques ou les assureurs d'avoir accès à des technologies qu'elles ne pourraient pas avoir accès en interne.

Il est important de noter que l'amélioration de la qualité dans un projet d'offshore outsourcing
n'est pas due, comme souvent avancé à tort, à la délocalisation, mais à l'externalisation. Le

4 «Les assureurs restent prudents face aux délocalisations», Les Echos, 17 avril 2007.

fait que la prestation soit réalisée à l'étranger n'a pas d'impact sur le niveau de qualité. Au contraire, souvent cette délocalisation entraîne une diminution de la qualité car l'activité est souvent récente dans ces pays et nécessite donc un apprentissage. Enfin, le cas de l'Inde est particulier car le pays possède un savoir-faire et une forte expérience dans ce domaine. Ils ont su justement crée une offre spécialisée avec des prestataires de qualité. C'est donc bien le fait de confier des prestations à des experts du domaine qui fait la qualité de la prestation en Inde et non le simple fait de la délocaliser.

Le deuxième avantage qui en découle est que l'entreprise cliente peut se recentrer sur son coeur de métier, élément stratégique pour les banques, ces dernières étant fortement intégrées non seulement verticalement (création et distribution de produits), mais maintenant aussi horizontalement (concentration dans le secteur). L'externalisation permet de variabiliser les charges fixes, comme les salaires du personnel ou l'investissement en matériel, et donc de dégager des liquidités, qui peuvent être utilisées pour d'autres investissements. Cela permet aussi, suivant la même logique, de libérer des postes, souvent à faible valeur ajoutée (téléopérateur, développeur,...) et les réaffecter sur des postes apportant plus de valeur (conseiller clientèle par exemple).

Enfin, dernier point, comme les prestations sont effectuées par des spécialistes, le coût est inférieur, à périmètre identique. En effet, les entreprises ont un savoir-faire et un plus grand niveau d'expertise qui lui permettent d'avoir une productivité supérieure. De plus, les investissements en formation et les coûts de fonctionnement peuvent être mutualisés entre plusieurs clients.

L'émergence des centres de service s'appuie sur ce constat. Un centre de service est le rassemblement, dans une seule entité, physique ou virtuelle, d'activités identiques antérieurement réparties entre plusieurs sites d'un même groupe. Les ressources ainsi que les coûts de structure et de formation sont partagés entre les différents clients du centre. Cela nécessite une standardisation des processus pour que les tâches puissent être effectuées par l'ensemble des ressources du centre de service. Le centre de service est enfin la possibilité de profiter des meilleures pratiques du marché.

J'insiste sur le fait que les prix ne doivent être comparés que pour un périmètre identique. En
effet, l'externalisation entraine souvent une redéfinition de la prestation. De plus, la prestation

est parfois enrichi car le prestataire dispose de compétences supplémentaires et peut répondre à un besoin plus large. Ainsi, l'externalisation de la paie peut être enrichie en fournissant des indicateurs de benchmarks, qui n'était pas présente dans la prestation auparavant.

La délocalisation, quant à elle, permet en premier lieu de réduire les coûts, grâce au différentiel de salaire et de coût de structure entre le pays d'origine et le pays d'accueil. Le cabinet NeoIT dans son étude5 avance un différentiel de salaire de 85 à 90% entre les Etats- Unis et l'Inde. De même, les loyers des locaux professionnels à Casashore (zone franche marocaine spécialisée dans l'I.T.) sont de 90 dirham/m2 (environ 8€) contre 15 à 20€/m2 à Sophia Antipolis, dans le sud de la France. Ces gains ont un impact fort sur le coût final de la prestation mais certains coûts additionnels doivent être pris en compte comme les coûts de télécommunication, de gestion de projet, de productivité,... Aujourd'hui il est très difficile de mesurer les gains en terme de coût complet dans un projet de délocalisation.

De plus, s'approvisionner à l'étranger permet d'obtenir des compétences qui sont en pénurie dans le pays d'origine. En effet, délocaliser l'exécution de la prestation permet d'avoir accès à un nouveau réservoir de compétence plus important. Ainsi, les compétences en Java J2E ou en .Net sont peu nombreuses en France, tandis qu'il existe un pool de compétence plus important en Inde. Attention, le marché de l'offshore outsourcing étant en plein boom, certains pays deviennent eux aussi en pénurie. L'Inde et le Maroc sont aujourd'hui des marchés qui sont devenus tendus dans ce domaine.

Le dernier avantage est qu'il est possible pour certaines prestations, d'obtenir une couverture mondiale en continue, en jouant avec les décalages horaires des différents sites. Par exemple, faire réaliser le développement d'une application en Inde pendant la nuit du client, pour que le client situé à New York travaille sur ses remarques pendant la nuit en Inde. Ainsi, le développement est assuré 24h/24.

Les avantages sont donc différents pour l'externalisation et la délocalisation. Même si le gain
financier est un avantage pour chacun des éléments, il n'a pas la même source. Dans le cas de
l'externalisation, il s'agit d'un savoir-faire qui fait progresser l'organisation sur la courbe

5 Offshore and Nearshore ITO and BPO Salary Report, NeoIT, Juin 2006

d'apprentissage. Pour la délocalisation, il s'agit d'un différentiel de coût sur les facteurs de production. L'Inde combine ces deux éléments, mais ce n'est pas le cas dans tous les pays.

Malgré ces avantages, de nombreuses limites ralentissent le développement de l'offshore outsourcing, particulièrement dans la Bancassurance. Le premier risque vient de l'image qui est associée à ce type de projet, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur de l'entreprise. En externe, il s'agit d'un risque commercial, les délocalisations étant souvent mal perçus, en particulier par les consommateurs français qui sont très sensibles à ce sujet. Aujourd'hui, bien que la plupart des consommateurs soient informée que les centres d'appel sont localisés en dehors du territoire français, ceci est souvent perçu de manière négative. En cas de problème, l'erreur est mise sur le compte de la situation géographique du centre et de la supposée non- qualification du personnel délocalisé. De plus, les clients des banques ne sont pas forcement prêts à accepter que d'autres activités soient exécutées hors de France, notamment des prestations touchant à leurs données financières.

En interne, le risque en termes d'image est aussi fort. L'externalisation peut entrainer la suppression d'un poste en interne seulement, souvent transférer au prestataire. La délocalisation est plus grave car elle supprime complètement des emplois sur le territoire français. Au delà du problème macro-économique du positionnement de la France en termes d'emploi sur le marché mondial, cela diminue le besoin en profil technique (comptables, développeurs,...), dans l'entreprise. Ainsi, les profils les plus recherchés actuellement en France sont ceux techniques, avec des compétences managériales.

Comment trouver à terme ce type de profil en France, par exemple, s'ils ne peuvent pas auparavant commencer par des projets exclusivement techniques. Les projets les plus techniques permettent le plus souvent de former, puis d'acquérir les compétences managériales. Enfin, sur ce point, il est fortement probable que les pays comme l'Inde, le Maroc ou la Roumanie ne se limiteront pas à la fourniture de prestations purement techniques mais proposeront aussi de plus en plus de prestation de gestion de projet, avec des profils de chef de projet ou de conduite du changement. La concurrence risque donc de se faire sur tous les profils.

La deuxième difficulté est de mettre en place et de gérer ce type de projet. Il est délicat de
gérer les projets en offshore outsourcing et il est nécessaire pour les entreprises de gagner en

maturité et en expérience. Cela nécessite des compétences achats, juridique, de management de projet, de conduite du changement, d'analyse des risques,...De plus, les entreprises ont souvent une mauvaise vision de leur projet en interne. Ainsi, peu connaissent le coût en interne de leurs prestations, peu suivent et connaissent le coût total de ces prestations effectuées ensuite par un prestataire. Sans ces données, il est très difficile d'évaluer un projet passé en offshore outsourcing.

Enfin la troisième difficulté concerne la politique interne de l'entreprise. En effet, les Directions Générales ont limité le recours à l'Offshore Outsourcing à cause de la mauvaise image perçue. De plus, les sociétés françaises, et particulièrement les banques, ne souhaitent pas que l'on sache qu'ils participaient à ce type d'opération. Jusqu'à peu de temps, il s'agissait donc principalement d'actions tests, en province ou dans les pays proches de la France (Maroc, Espagne,...). Il est à noter que cette situation change, et que même si peu de communication est faite autour de ces projets, le recours à l'Offshore Outsourcing est de plus en plus poussé par les Directions Générales.

II. Modèle d'analyse achat d'un projet d'offshore outsourcing

Dans cette partie je vais tenter de définir une méthode d'analyse de la faisabilité d'un projet offshore outsourcing. L'originalité de la méthodologie proposée est d'être orientée vers les achats et non vers la gestion de projet. Cette méthodologie ne vise donc pas à définir les bonnes pratiques en terme de management de projet. Il vise plutôt à donner des outils pour les personnes en charge du sourcing en offshore outsourcing. Cette méthodologie est basée sur mon expérience dans un grand groupe bancaire français ainsi que divers témoignages recueillis auprès de personnes ayant une expérience de ce type de projet (prestataire, acheteur,...). J'appliquerai, à la fin de ce chapitre, cette méthode à un projet réellement rencontré dans le cadre de mon stage de fin d'étude.

Partie 1 - Qualification du besoin

La qualification du besoin est la première phase d'analyse mais est aussi la phase la plus souvent oubliée dans un projet d'offshore outsourcing. C'est elle pourtant qui doit être le point de départ de l'analyse et qui doit permettre d'étudier à la fois les caractéristiques de l'organisation cliente et de la prestation, puis de les mettre en phase. La fonction achats a un rôle central à jouer dans cette étape car, en tant que fonction transversale, elle est capable de faire la synthèse des éléments et des échanges avec les autres fonctions de l'organisation.

1. Impacts Internes

PROJET

ORGANISATION
CLIENTE

EXTERNALISATION

DELOCALISATION
OFFSHORE OUTSOURCING

Dans un premier temps, l'analyse a pour objectif d'étudier l'impact que peut avoir
l'organisation sur un projet d'offshore outsourcing. En effet, toutes les organisations ne sont
pas prêtes pour ce type de pratique. L'offshore outsourcing se divise en deux sous-parties :

l'externalisation et la délocalisation de la prestation. Il convient donc d'étudier l'adaptabilité de l'organisation pour chacun de ces deux éléments.

Pour mener cette étude, j'ai développé une grille d'analyse permettant d'évaluer la capacité d'une organisation a mené un projet ou effectué une prestation en offshore outsourcing. Vous trouverez ci-dessous les premiers éléments de cette grille, pour illustration.

Externalisation

Niveau 0

Niveau 1

Niveau 2

Niveau 3

Pratique de l'externalisation

 
 
 
 

L'organisation a-t-elle l'habitude de travailler avec des prestataires qui ne

Aucune experience

Quelques experiences

Nombreuses experiences

Pratique courante de

sont pas présents sur site?

récente et équivalente

récentes et équivalentes

récentes et équivalentes

l'externalisation

...

Délocalisation

Expérience en management interculturel

L'organisation a-t-elle l'habitude de travailler avec des partenaires étrangers?

Entreprise franco-
française (client,
fournisseur, filiale,...)

Quelques experiences à
l'international

Groupe multinational Travail courant avec des

partenaires étrangers dans
l'ensemble de
l'organisation

...

Cette grille permet de placer la contrainte sur une matrice et de mesurer la capacité de l'organisation pour mener des prestations en offshore outsourcing :

Externalisation

3
2
1

 

0 1 2 3 Délocalisation

Chaque organisation est unique et la réussite d'un projet, quel qu'il soit, dépend de son niveau de maturité pour ce type de projet. Il est donc nécessaire d'appliquer une stratégie cohérente avec la maturité de son organisation en termes d'externalisation et de délocalisation.

2. Impacts Externes
PROJET

EXTERNALISATION

DELOCALISATION
OFFSHORE OUTSOURCING

TYPE DE
PRESTATION

Après avoir effectué une analyse de l'organisation cliente, l'acheteur doit, de la même manière analyser l'impact de la prestation sur le projet. Ce type d'analyse est assez courant pour l'externalisation6 mais est plus rare pour les délocalisations. Il est reconnu que certaines prestations sont très adaptées à l'offshore comme le développement ou les télé opérations, et que d'autres le sont beaucoup moins, comme l'assistance à maîtrise d'ouvrage. Comme pour l'analyse interne, je vous propose ci-dessous les premiers éléments de la grille développé à cet effet.

Externalisation Niveau 0 Niveau 1 Niveau 2 Niveau 3

Environnement instable

L'environnement de la prestation (technique, légal, sécuritaire) est-il instable?

...

Délocalisation

Standardisation de la demande

Existe-t-il des contraintes locales provenant du pays du client? (connaissance local, accent, règle ou norme spécifique au pays, vocabulaire métier dans une langue différente, etc.)

Environnement stable,
rendant possible les
investissements internes

Nombreuses contraintes
locales

Environnement stable, mais
l'organisation n'a pas les
moyens d'investir

Quelques contraintes
locales, entrainant des coûts
importants d'adaptation

Environnement en
mouvement rendant
économiquement plus
avantageux
l'externalisation

Quelques contraintes
locales, mais adaptation
facile

Environnement trop
instable pour permettre des
investissements suffisants
en interne

Aucune contrainte local,
prestation standard

...

Cette grille permet de placer la contrainte sur une matrice et de mesurer l'adaptation de la prestation à l'offshore outsourcing :

6 Voir notamment les recherches de J.Barthelemy

3
2
1

 

0 1 2 3 Délocalisation

Externalisation

3. Matrice de faisabilité

Une fois les impacts interne et externe étudiés, il convient de les mettre en rapport dans une matrice, que j'appelle « matrice de faisabilité ». Cette matrice a pour objectif de montrer en fonction du niveau des deux impacts, l'adaptabilité d'une prestation à l'offshore outsourcing. Il s'agit d'un outil d'aide à la décision dont les résultats doivent ensuite analysés.

PROJET

0

1 2 3

Impacts Internes

ORGANISATION
CLIENTE

EXTERNALISATION

DELOCALISATION
OFFSHORE OUTSOURCING

TYPE DE
PRESTATION

Impacts Externes

3

2

1

RISQUE FORT

RISQUE VS
COUT

PEU DE RISQUE

Externalisation Délocalisation

La grille se lit ainsi : plus le cercle est vers le haut à droite, plus la délocalisation et/ou l'externalisation est un choix pertinent. La zone rouge correspond à une situation de risque forte dans laquelle l'offshore outsourcing classique (complètement externalisé / complètement délocalisé) engendre un risque important d'échec du projet.

La zone orange correspond à une situation où l'offshore outsourcing classique conduira à un trade-off entre coût et risque. En effet, dans cette zone, l'organisation peut choisir entre payer des coûts supplémentaires pour s'assurer la réussite du projet ou accepter un risque supplémentaire d'échec. Les coûts correspondent à des coûts de formation, de consulting, de

conduite du changement ou de gestion de projet supplémentaire. Le risque correspond aux coûts de non-qualité, de retard, juridique, d'image, social, etc. L'entreprise doit évaluer a priori ces coûts et les intégrer dans l'analyse.

Enfin, la zone verte correspond à une situation avec peu de risque, dans laquelle l'organisation a une bonne maitrise de ces pratiques et où la prestation est bien adaptée à ce type de projet.

La position des cercles sur la matrice est mobile. Le rôle des achats est de pouvoir donner les clés pour faire évoluer cette position. L'organisation doit jouer sur les impacts internes et externes pour faire glisser les cercles vers la zone verte. Ainsi, il est possible de découper la prestation pour qu'une partie soit bien adaptée à l'externalisation et à la délocalisation. Des formations peuvent être mises en place pour améliorer les processus. Une bonne communication vers les salariés peut permettre de diminuer le risque social. Les achats doivent être force de proposition dans ce domaine.

Une fois cette première analyse effectuée, les achats doivent se baser sur ces résultats pour proposer la solution et le type de sourcing le mieux adapté. La suite de l'étude en donne les clés.

Partie 2 - Qualification de l'offre

Le schéma que je propose se veut pratique. En effet, l'acheteur a étudié dans la partie précédente, les contraintes dont son organisation devait faire face dans un projet d'offshore outsourcing. En étudiant les contraintes internes et externes, l'acheteur a une vision globale de la situation. L'objectif est alors de trouver la solution qui sera le plus adapté aux contraintes exprimées. Ce choix se fera par élimination successive, pour aboutir à la solution la plus adaptée. Voici ci-dessous un schéma permettant d'illustrer la marche à suivre.

ENSEMBLE
DES
POSSIBILITE

Mode d'offshore
outsourcing

Global Sourcing

Solution
retenue

CRITERES

CRITERES

Sélection du fournisseur

1. Mode d'offshore outsourcing

Ce que j'appelle le « mode d'offshore outsourcing » correspond au mécanisme d'Offshore Outsourcing choisi. Trois modes différents pour l'externalisation et pour la délocalisation cohabitent.

Externalisation :

Sur site (Niveau 1).

Il s'agit du degré le plus faible d'externalisation. L'équipe est détachée dans les locaux du client. Les gains associés sont donc réduits à cause des frais de déplacement, d'hébergement,...

Front / Back Office(Niveau 2).

Une partie de la prestation est effectuée sur le site du Client et le reste dans les locaux du prestataire. Ce mode d'externalisation permet d'assurer des gains financiers tout en ayant des contacts directs avec le client.

Le Centre de service (Niveau 3).

La prestation est effectuée par un prestataire externe, dans les locaux de ce prestataire. Il s'agit du degré le plus important d'externalisation puisque le prestataire a la charge complète de la prestation. Le prestataire peut ainsi mutualiser les compétences entre différents clients, la prestation n'étant plus facturée par jour mais en fonction des besoins.

Délocalisation :

Les définitions des termes peuvent varier d'un auteur à l'autre. Les écarts de définitions ont peu d'importance sur l'analyse, seule la cohérence des éléments est importante. Malgré tout, comme définit dans la première partie, une prestation est considérée comme délocalisée dès qu'elle est effectuée en dehors de la zone géographique du client.

Near-nearshore (Niveau 1).

Il s'agit d'une délocalisation très proche du client, le plus souvent les délocalisations en province, dans le même pays que le client. La langue y est identique, mais le client profite des salaires et des coûts de structure réduits.

Nearshore (Niveau 2).

Il s'agit d'une délocalisation proche du client. Pour un client français, cela veut dire en Europe du Sud (Espagne, Portugal), Afrique du Nord (Maroc) et Europe de l'Est (Roumanie, Bulgarie, Pologne). La communication est facilitée car la culture est proche, et les distances sont faibles.

Offshore (Niveau 3).

Il s'agit d'une délocalisation lointaine. Les exemples sont nombreux et il y a peu de points communs entre ces pays. La langue peut être identique ou différente de celle du client, comme la culture ou la distance. Dans ce type de délocalisation, pour un client français, les pays les plus couramment cités sont l'Inde bien sûr, l'Ile Maurice, le Vietnam, le Sénégal, le Brésil ou la Chine.

Cette étude est basée sur une vision centrée sur l'Europe. Ainsi le concept de délocalisation est relatif au pays du client. Ainsi, le Nearshore pour les Etats-Unis correspond au Mexique et au Canada. Pour l'Inde, certains prestataires locaux délocalisent en Nearshore au Vietnam, en Chine ou à Singapour. Ainsi, l'analyse doit être adaptée en fonction de la situation géographique de l'organisation, dans le cas contraire.

Le lient entre l'éloignement géographique et la diminution des coûts ou la disponibilité de ressources supplémentaires n'est pas automatique. Plus un pays est proche d'une zone développée et plus les coûts y sont élevés, car ce pays profite des échanges entre les deux pays et le jeu de l'offre et de la demande a tendance à égaliser les prix relatifs entre les pays7.

7 Voir Modèle Heckscher - Ohlin - Samuelson

Ainsi, les pays les plus proches de l'Europe de l'Ouest sont plus cher que les pays plus éloignés, qui ne profitent pas des échanges avec l'Europe. La réalité est bien sûr beaucoup plus complexe et intègre une multitude d'autres facteurs (niveau d'éducation, instabilité politique, économique et sociale, lien diplomatique, barrière commerciale,...) qui font que deux pays, même proche, n'acquière pas forcement le même niveau de vie.

Le second impact est l'offre et la demande. La distance a un léger impact sur ce point puisque plus le centre est loin et moins le nombre d'entreprise capable de gérer ce type de projet est important, et donc plus la demande est faible. Ainsi, certaines zones encore bon marché car les sociétés capables de s'y implanter sont encore peu nombreuses. A l'inverse, d'autres pays, comme le Maroc, font face à une inflation très importante des coûts de production, car la demande y est très forte, puisque le pays est facile d'accès, avec peu de décalage horaire et une population jeune parlant arabe, français et espagnol. L'Inde est une exception puisque la demande y est très forte alors que ses clients sont situés loin, principalement aux Etats-Unis et en Europe de l'Ouest.

Une fois définis les différents modes de délocalisation et d'externalisation, il convient de l'appliquer à la matrice de faisabilité. La matrice améliorée présentée ci-dessous intègre le mode d'externalisation, dans la partie supérieure de la case et le mode de délocalisation, dans la partie inférieure de la case. En fonction de la position du cercle « Délocalisation » et « Externalisation », la matrice donne la meilleure combinaison concernant le projet à mettre en place.

 

Délocalisation

Externalisation

Niveau 1

Near-nearshore

Front Office

Niveau 2

Nearshore

Front / Back Office

Niveau 3

Offshore

Centre de service

2

1

Impacts Externes

3

Front Office

Front/Back Office

Centre de service

Near-nearshore

Nearshore

Offshore

Front Office

Front/Back Office

Front/Back Office

Near-nearshore

Nearshore

Nearshore

Front Office

Front Office

Front Office

Near-nearshore

Near-nearshore

Near-nearshore

1 2 3

Impacts Internes

Externalisation

Délocalisation

Cette phase de l'étude est importante car les résultats de celle-ci conditionnent le pays de localisation ainsi que les éléments pour le choix du prestataire. Ce type d'étude est souvent réalisé par l'équipe en charge du projet de sourcing mais de façon informelle et non structurée. Par exemple, l'acheteur imagine facilement qu'une prestation nécessitant beaucoup de communication (spécification vague,...) sera difficile à mener dans un centre de service en Inde. Cet outil permet de systématiser cette analyse et de la baser sur des éléments concrets.

L'ensemble de ces modes d'offshore outsourcing décrit ci-dessus se combinent. Ainsi, il est possible d'avoir à l'extrême un centre de service en near-nearshore (un centre de service en province) ou à l'inverse d'avoir des équipes offshore sur site (« équipe volante »).

2. Global Sourcing : analyse macro

Le Global Sourcing consiste à exploiter l'offre mondiale des facteurs de production. Cette
stratégie peut être adaptée à la production de service. Concrètement, le Global Sourcing
consiste à faire des arbitrages entre les pays basés sur un certains nombres de critères

(disponibilité des ressources, coûts et évolution du marché, stabilité,...). Ces arbitrages doivent fournir des éléments pour la localisation du sourcing.

Dans la démarche présentée, cette analyse est conditionnée par les résultats du choix du mode d'offshore outsourcing, et particulièrement du mode de délocalisation retenu. En effet, si l'analyse conseille de faire le sourçage de la prestation en near-nearshore, il est inutile d'étudier les capacités disponibles en Afrique du Sud.

Je propose une grille d'analyse permettant, quelle que soit la zone ou le mode de délocalisation, de juger de la bonne localisation de la prestation. Ainsi, cette analyse est adaptée pour le choix d'une région, d'un pays ou même d'une ville.

J'ai pu distinguer quatre macro-critères que permettant d'évaluer une zone géographique : l'impact sur le coût, l'impact sur la qualité, l'impact sur la pratique du business et la connaissance de la zone par le client.

Voici quelques exemples de critères tirés de la grille d'analyse développée.

Impact Coût :

Différentiel de salaire et de frais de structure. Coût des télécommunications.

Fiscalité.

Evolution de l'offre et de la demande.

Impact Qualité :

Spécialisation dans le type de prestation souhaité.

Qualité de la main d'oeuvre et de la formation.

Certification.

Nombre de ressource qualifiée dans le pays et potentiel de développement. Qualité des infrastructures (aéroports, routes, télécommunication).

Impact pratique du business :

Facilité de communication et différences culturelles. Stabilité politique et économique.

Volonté de la zone (rôle moteur du gouvernement régional, national ou local,...). Législation, bureaucratie et corruption.

Connaissance du pays :

Présence du client. Expérience du client.

3. Sélection du fournisseur : analyse micro

Une fois définit le mode d'offshore outsourcing puis la zone de localisation, il est nécessaire de choisir le bon prestataire.

Critères de choix :

Il existe de nombreuses sociétés de service capables de gérer des projets en Offshore Outsourcing. Il convient de bien évaluer les sociétés ainsi que leur capacité à faire. De nombreux éléments sont à prendre en compte mais voici ceux le plus couramment rencontrés.

D'abord, le prestataire doit bien avoir compris le besoin du client. Ainsi, la compréhension du besoin client exprimée dans la réponse au cahier des charges est cruciale dans un projet d'Offshore Outsourcing, car il sera difficile et couteux de réexpliquer ou redéfinir le besoin ensuite. Le fait que le prestataire pose des questions pendant la phase de consultation et identifie les points pouvant sembler obscure est un élément très positif.

Une fois le besoin compris, le prestataire doit être capable de s'engager. D'abord en terme de coût, notamment pour les missions de conseil ou de prestation informatique, l'acheteur doit favoriser au maximum l'engagement au forfait. Cela permet de cadrer la prestation en terme de volume et de délai, et cela entraine un engagement de résultat de la part du prestataire. Même si toute la prestation ne peut pas être au forfait, l'acheteur doit identifier les parties du projet qui peuvent l'être.

L'engagement doit aussi se faire sur la qualité, en mettant en place des indicateurs comme des
indicateurs de niveau de service (ou Service Level Agreement) pour suivre la prestation. Ces
indicateurs doivent être négociés et acceptés par les deux parties avant le démarrage de la

prestation. Ces indicateurs peuvent être associés à des pénalités et doivent pouvoir permettre au client de sortir du contrat.

La phase de réversibilité doit, elle aussi, être discutée en amont de la prestation et prévoir, au moins dans les grandes lignes, les actions du prestataire et du client au moment de la fin du contrat.

L'acheteur doit vérifier la capacité de production du prestataire. Il convient d'abord de vérifier l'existence même du prestataire, ainsi que sa présence dans le pays en question. Cela peut être une visite sur site, la remise de documents officiels attestant de l'activité de la société, les états comptables de la société, des renseignements fournis par des partenaires locaux,... Cette étape est très importante car l'offshore outsourcing est très à la mode et attire des sociétés plus ou moins sérieuses.

L'acheteur doit aussi vérifier la capacité de production des sociétés reconnues. Les sociétés occidentales commencent à s'internationaliser et ouvrir des centres dans les pays à bas coût. Certains sites sont pourtant en construction, et peuvent ne pas être complètement opérationnels. Quant aux prestataires locaux, ils peuvent ne pas avoir les compétences pointues requises (compétences techniques, fonctionnelles, linguistique,...) particulièrement dans les pays avec un turn-over important.

La vérification de la qualité pressentie de la prestation peut être validée en demandant des références sur des projets équivalents, avec des coordonnées de clients à contacter. Il peut aussi être opportun d'interviewer des ressources du prestataire pour s'assurer de leurs compétences et leur savoir-faire, en direct ou en visioconférence. Les implantations locales du client peuvent aussi fournir des éléments sur l'existence d'un prestataire. Enfin, dans le cas de prestations informatiques liées à un progiciel, l'éditeur de la solution est souvent une bonne source d'information.

La santé financière, l'historique ainsi que la stratégie de développement de la société doivent être pris en compte, pour s'assurer que la prestation pourra être effectuée jusqu'à son terme.

Les certifications sont des éléments souvent mis en avant par les prestataires. Il s'agit
évidemment d'un point important à prendre en compte mais il s'agit souvent d'un argument

de communication pour les prestataires. L'acheteur doit donc savoir ce qui se cache derrière ces certifications. Ainsi, la norme ISO 9001-2000 permet de vérifier l'existence de procédure chez le prestataire ainsi que leur bonne application. Elle ne juge en aucun cas de la qualité de ces procédures. De même, la norme CMMI (Capability Maturity Model Integration) ne s'applique qu'au projet de développement et d'intégration de projet informatique. Inutile donc pour d'autres types de prestation. Il s'agit encore d'une vérification des processus. Enfin, ITIL (Information Technology Infrastructure Library) est un ensemble de recommandations pour la gestion du système d'information d'une organisation. De plus, la certification ITIL se fait au niveau de l'individu, et non au niveau d'une organisation, comme pour l'ISO ou le CMMI.

Points importants à négocier :

De nombreux points sont à négocier avec le prestataire. En terme de coût, l'effet prix lié au différentiel de salaire et de frais de structure ne doit pas faire oublier que le gain se fait sur le coût total de la prestation. Ainsi, deux fois plus de volume de prestation payés deux fois moins cher n'a aucun impact sur le coût de la prestation. Une attention particulière doit donc être donnée sur la productivité des équipes locales.

Il est important de raisonner en coût complet, pour assurer une comparaison juste entre différents prestataires présents dans des zones différentes. De plus, c'est cette base qui permet de calculer les gains par rapport à l'existant. Ne pas prendre tous ces éléments en compte risque de décrédibiliser les gains affichés par les projets en offshore outsourcing. Voici une liste non-exhaustive des éléments à prendre en compte pour calculer le coût complet d'une prestation.

Optimisations possibles

1. Coûts du prestataire

1.1 Frais d'initialisation

Formation des équipes locales Investissement pris en partie en charge par le prestataire.

Constitution des équipes Négociation sur le profil de la personne en charge de cette phase.

Inclus une quote-part de frais

généraux.

1.2 Frais en opération

Taux journalier moyen personnes productives

Benchmark des coûts (salaires, structures,...), négociation du tarif et suivi de la productivité.

Frais d'encadrement

Déplacement / Hébergement Favoriser la videoconférence, négociation d'une grille plafonnée de remboursement.

Ecart de productivité Mise en place d'indicateurs

1.3 Risques

Risques financiers (Frais de change) Facturation en euros sans clause de réevaluation liée au taux de change

Risques de non-qualité (Bugs,...) Mise en place d'indicateurs qualité

Risques sur les délais Mise en place d'indicateurs délai

2. Surcoûts du client

2.1 Coûts de pré projet

Etude d'opportunité Développement d'une base de connaissance pour ce type de projet.

Processus Achats Amélioration du processus achats, Professionnalisation des pratiques

Offshore Outsourcing.

Contractualisation Amélioration du processus contractuelle, Utilisation du droit du client.

2.2 Frais d'initialisation

Formation des équipes clientes Développement d'une base de connaissance pour ce type de projet.

Frais installation télécom Stratégie télécom globale.

2.3 Frais récurrent

Frais télécom récurrents Stratégie télécom globale.

Coordination à distance Utilisation d'outil (groupware,...).

Frais de déplacement client Favoriser la videoconf.

2.4 Moyen mis à disposition pour le prestataire

Local Externalisation

Téléphone / Messagerie Externalisation

Le turn-over des équipes locales est un élément qui doit être discuté au préalable. Ainsi, le Niveau de Service peut contenir un indicateur du niveau de turn-over. De plus, en cas de turnover important, un plan d'action doit être proposé par le prestataire. Un turn-over important est un élément le plus souvent subi, mais dont le prestataire est souvent à l'origine. Ainsi, certaines sociétés bien qu'évoluant dans une zone à fort turn-over (en Inde par exemple)

parviennent à le limiter grâce à une politique de ressource humaine active, l'utilisation de la renommée de la société ou le fait de proposer des avantages supplémentaires aux salariés.

De plus, certains éléments sont à prendre en compte au niveau contractuel dans ce type de prestation, notamment la sécurité des données (clients ou salariés), la propriété intellectuelle ou la continuité de service (résilience).

La méthodologie présentée dans ce mémoire permet de fournir une réponse à un acheteur confronté à un projet d'achat en offshore outsourcing. Elle doit être améliorée avec la pratique, et doit être adaptée et enrichie en fonction du type de prestation concernée. Malgré tout, elle permet de sensibiliser l'acheteur sur un certains nombres de points clés, tout au long du projet. Une fois le prestataire choisi et la prestation démarrée, l'acheteur doit pouvoir suivre le déroulement de la prestation et ainsi voir les points d'amélioration pour les projets futurs.

Dans cette partie, j'ai pris comme hypothèse que le projet d'achat en offshore outsourcing était pris en charge par les achats. Mais cela est-il naturel ? Quel est la place des achats dans les projets d'achat en offshore outsourcing ?

III. Place des Achats dans l'offshore outsourcing

1. Offshore outsourcing et maturité Achats

Le niveau de maturité du service achats a un rôle central dans la réussite d'un projet de sourcing offshore outsourcing. Elle doit avoir les compétences requises pour ce type de projet. Ces compétences comprennent, en premier lieu, les bases nécessaires à l'exécution de tous projets achats (maîtrise du processus achat, connaissance en droit des contrats, compétence de négociateur,...) mais aussi la maîtrise de certaines compétences spécifiques à ce type de projet.

Voici une liste des compétences que la fonction achats doit acquérir pour pouvoir mener un projet de sourcing en offshore outsourcing.

Connaissance de l'offshore outsourcing.

La capitalisation des expériences de dossier d'offshore outsourcing est une première étape dans l'acquisition d'un savoir-faire dans ce domaine. Les acheteurs ont souvent une expérience dans l'externalisation. La partie délocalisation est souvent plus difficile à intégrer et requière des compétences spécifiques. Cela implique de posséder des outils, comme des bases de données pour les tarifs, des benchmarks, une cartographie des prestations,...

Compétences spécifiques - Externalisation :

Connaissance métier :

Le fait de bien connaître la prestation est un pré-requis quand il s'agit de traiter un dossier d'externalisation, et donc d'offshore outsourcing. Il ne s'agit pas d'avoir des acheteurs spécialistes mais ils doivent connaître suffisamment la prestation pour pouvoir apporter de la valeur lors des rencontres avec les clients internes et les fournisseurs.

Connaissance du marché :

Il est important que l'acheteur connaisse son marché fournisseur, l'offre disponible et les spécificités de chaque prestataire, l'évolution du marché, les impacts réglementaires,...

Compétences spécifiques - Délocalisation :

Langue et travail en milieu multi culturel :

Le Sourcing mondial est aujourd'hui une réalité. Les distributeurs et les industriels n'hésitent plus à s'approvisionner en Chine ou en Turquie. Dans le cas de l'offshore outsourcing, maitriser plusieurs langues et pouvoir s'adapter aux autres cultures est une nécessité. Bien que l'anglais soit devenu obligatoire pour intégrer une société importante, la réalité est que de nombreuses personnes sont incapables de communiquer en anglais.

De plus, l'acheteur d'offshore outsourcing doit pouvoir comprendre la culture ainsi que le contexte économique et politique d'un pays ou d'une région, pour être efficace dans son sourcing et la négociation.

Connaissance en commerce international :

L'acheteur doit être capable de comprendre les problématiques liées au commerce international comme les risques de change, les éléments influençant l'offre et la demande, le droit international,...

Rôle des achats dans l'organisation :

Il s'agit d'un point dont l'acheteur n'est souvent pas maître, en tant qu'individu. Mais le rôle des achats, comme la vision qu'en ont les autres services, sont des éléments importants. Ce rôle ne s'appuie pas forcement sur les points précédents, car la fonction achat est prise ici dans son ensemble. Ainsi, même si la maturité dans l'offshore outsourcing est moyenne, le reste de l'organisation aura confiance dans une direction des achats de qualité.

Différents modes de Sourcing existent. Le mode de Sourcing utilisé par l'acheteur responsable d'un projet d'achat en offshore outsourcing dépend de sa maturité achats pour ce type de projet. Ces différents modes sont différents niveaux d'externalisation, non pas de la prestation d'offshore outsourcing, mais du Sourcing en lui-même.

Gains potentiels

 

Prestataire « nationale »

Intermédiaire (cabinet
spécialisé,...)

Prestataire local (SSII
indienne,...)

I.P.O. (International
Purchasing Offices)

Complexité du schéma de Sourcing

Prestataire « nationale » : il s'agit du schéma le plus souvent mis en place aujourd'hui et aussi le plus facile à gérer. Les prestataires « nationaux » proposent d'ailleurs souvent dans leur offre d'exécuter une partie de la prestation en offshore outsourcing. Depuis peu, les clients demandent parfois qu'une partie ou la totalité de la prestation soit exécutée en offshore outsourcing, et intègre cette demande dans le cahier des charges.

L'interlocuteur, que ce soit pendant l'appel d'offre, la phase de négociation, la phase de contractualisation ou durant la vie du projet est français. Il n'y a donc pas de risque d'incompréhension liée à la langue ou la culture. De plus, la négociation se fait le plus souvent dans la monnaie du client et avec un contrat basé sur le droit du pays du client. Cela facilite les transactions, et limite le besoin en compétences supplémentaires (connaissance en finance ou en droit international). Enfin pendant la vie du projet, l'interlocuteur est le prestataire basé dans le pays du client.

Malgré tout, le gain financier associé est assez limité. D'abord parce que le prestataire
supporte la plupart des risques de l'offshore outsourcing, et que cette prise de risque se
monnaye. Mais aussi, parce que le manque de connaissance du marché de l'offshore

outsourcing de la part du client, ne permet pas une comparaison efficace des offres (peu de données disponibles sur les salaires locaux,...).

Intermédiaire : ce schéma consiste à utiliser un intermédiaire spécialisé (cabinet de conseil, freelance,...) qui possède les connaissances du marché ainsi que les compétences manquantes à la Direction des Achats.

Ainsi, le client mène ses premiers projets d'offshore outsourcing avec une société locale, en profitant des compétences externes pour diminuer le risque. Les intermédiaires sont souvent neutres et sont payés soit au forfait, soit en fonction des gains. Ils ont donc intérêt, contrairement à la solution précédente, à faire diminuer le coût de la prestation. Le cabinet peut ensuite épauler le client pendant l'exécution de la prestation.

Cette solution est souvent coûteuse et doit être considérée comme un investissement de la Direction des Achats pour acquérir les compétences manquantes.

Prestataire local : Il s'agit de directement contractualiser avec un prestataire local.

Ce schéma est souvent risqué, le client supportant tous les risques de l'offshore outsourcing. L'acheteur doit donc avoir une maitrise parfaite des différentes composantes de l'offshore outsourcing en terme d'achat car les risques sont de natures diverses : évaluation de la société, risque de change, risque juridique,...

Enfin, un investissement des Achats relativement conséquent est nécessaire pour ce type de projet, que ce soit en temps mais aussi en moyens (déplacement, communication,...). Cela s'adresse donc à des projets ayant une taille significative justifiant ce type d'investissement.

Les gains financiers sont assez importants, puisque ce schéma limite le nombre d'intermédiaire. De plus, elle permet d'obtenir des informations stratégiques, comme les niveaux de salaire sur place réellement appliqué par les prestataires, leur évolution, etc.

International Purchasing Offices : A l'image de l'industrie, quand le client possède un volume suffisant de prestations en offshore outsourcing, il devient intéressant pour lui de disposer d'une structure spécialisée spécifique à ce type d'achats.

Les acheteurs de l'I.P.O. doivent avoir un profil très international (maitrise de plusieurs langues, expérience réussie à l'international,...), pouvoir suivre les tendances du marché et les besoins internes, et être très mobile. Enfin, ils doivent maitriser l'ensemble des problématiques liées à l'offshore outsourcing.

Les avantages d'un I.P.O. sont nombreux et ce schéma permet des gains financiers importants puisque le client passe directement par le prestataire local. De plus, les risques sont limités puisque la structure maitrise ce type de problématique.

La limite est que compte tenu de l'investissement (nombreux frais de déplacement, de structure, spécialisation de l'acheteur, nature des profils, frais de formation,...), il convient à des entreprises ayant un fort besoin dans ce domaine.

A noter que, les certaines sociétés indiennes ont un statut particulier. En plus, d'être des SSII implantées en Inde et donc ayant un réel savoir-faire dans ce pays, certaines s'implantent de plus en plus dans les pays des clients. Aujourd'hui certains acteurs indiens rivalisent avec les SSII occidentales. L'exemple de Wipro qui a récemment acheté la SSII américaine Infocrossing pour environ 600 millions de dollars montrent bien l'émergence de ces sociétés. TCS est par exemple présent en Uruguay, au Brésil, en Chine, au Chili, en Australie, au Royaume Unis, au Japon et en République Tchèque. Il s'agit d'un double développement pour à la fois se rapprocher de ses clients mais aussi développer des centres de service en dehors de leur frontière. Infosys, autre poids lourd indien, emploie un cinquième de son effectif hors d'Inde.

Ainsi, ces trois sociétés peuvent être à la fois consultées en tant que prestataires nationaux, compte tenu de leurs implantations dans les pays du client, mais aussi en tant que prestataires locaux. L'exemple d'ABN Amro, qui a choisi trois sociétés indiennes (TKS, Patni et Infosys) pour la gestion de son informatique, marque d'ailleurs bien l'émergence d'une véritable offre indienne, en dehors de l'Offshore Outsourcing et deviennent des vrais concurrents des SSII européennes ou américaines.

2. Rôle possible des achats

Compte tenu des éléments discutés dans ce mémoire, il semble opportun de définir le rôle de la Direction des achats dans un projet de Sourcing offshore outsourcing.

Tout d'abord, il convient de rappeler que la Direction des Achats est une fonction transversale, et une fonction support. Cela a deux conséquences dans un projet de Sourcing, quel qu'il soit. D'abord, la Direction des Achats n'agit pas seule, et c'est d'ailleurs une de ses forces car elle est capable de travailler avec les autres fonctions. De plus, elle travaille pour un client interne, pour qui elle doit trouver l'offre la plus en adéquation avec le besoin exprimé, en terme de coût, de qualité ou de délai.

Ce rôle des achats en général, s'inscrit dans la tendance de fond des organisations à travailler en groupe de travail. Dorénavant, les fonctions ne travaillent plus seules, mais de façon coordonnée au sein de « cross fonctionnal team ». Ces équipes sont constituées d'individus provenant de différents domaines et sont rassemblés pour atteindre un objectif qui ne pourrait être atteint sans cette équipe.

Ainsi, dans un projet d'offshore outsourcing, les achats possèdent certaines compétences qui peuvent être mise en avant. Ces compétences concernent surtout la maîtrise du processus achats (définition du besoin, appel d'offre, négociation, contractualisation) et la connaissance du marché (tendances du marché, coût ou expérience sur d'autres projets, notation de fournisseur...).

La fonction achat doit aussi maîtriser d'autres compétences spécifiques au projet en offshore outsourcing. Ces compétences peuvent soit être partagées par l'ensemble des acheteurs d'une catégorie d'achat (ex : formation de tous les acheteurs de prestations informatiques à l'achat en offshore outsourcing), soit par un petit nombre d'expert (ex : identification de plusieurs experts achat offshore outsourcing, intervenant en support de l'acheteur en charge d'un projet).

Malgré tout, les acheteurs ont besoin des autres fonctions, qui apportent leur expertise dans ce
type de projet. Ainsi, le contrôle de gestion peut fournir des éléments de coûts internes,
comme le coût actuel de la prestation ; la direction financière peut fournir des éléments sur les

risques de change et les couvertures possibles ; la direction juridique peut fournir des éléments de droit international et national pour ce type de projet ; les filiales dans les pays peuvent fournir des informations sur l'état du marché et le droit local ; la Direction en charge du développement durable pour identifier les impacts du projet pour l'entreprise dans ce domaine.

De plus, le client interne a un rôle central dans le projet d'achat, d'abord parce qu'il connait son besoin, mais aussi parce qu'il peut être une source d'informations concernant le marché. Enfin, c'est lui qui va vivre la prestation au jour le jour, son jugement est donc à prendre en compte.

Ainsi, dans un projet d'offshore outsourcing, la Direction des Achats peut avoir plusieurs rôles, suivant son niveau de maturité, la taille et l'enjeu du projet ou la volonté de la direction.

Impact des achats sur le projet

F A C I L I T A

T
E

U
R

SUPPORT / INFORMATION

MANAGER DU PROJET

LEADER DU PROJET

Support / Information : Parfois, il peut simplement être demandé à la Direction des Achats de fournir des informations, soit dont elle dispose dans le cadre de projets équivalents, soit tirées de la connaissance du marché. Cela peut être des tarifs négociés pour d'autres projets ou des informations sur des fournisseurs.

Manager du projet : Le rôle des achats est alors de conduire le projet, en suivant le processus achats. La décision de pratiquer l'offshore outsourcing sur un projet est décidée par le client interne, mais l'exécution est assurée par l'intermédiaire des achats.

Leader du projet : Dans ce cas, la Direction des Achats a un rôle stratégique dans la conduite du projet. La Direction des Achats doit alors trouver les moyens pour rendre l'organisation plus compétitive par l'intermédiaire de l'offshore outsourcing. Les achats participent au choix du mode d'offshore outsourcing, du pays d'accueil, ainsi que du mode de Sourcing.

Facilitateur du projet : Dans tous les cas, la Direction des Achats doit jouer le rôle de facilitateur entre les différents acteurs du projet (prescripteur, utilisateurs, fournisseurs, directions fonctionnelles,...). Parfois, cela peut être d'ailleurs le seul rôle de la fonction achats, qui est alors neutre par rapport aux autres parties prenantes.

La Direction des Achats doit donc bien identifier son rôle dans le projet. Vouloir avoir un rôle de leader quand il lui est demandé un rôle de support ne peut que conduire à un échec dans un projet et discréditer la Direction des Achats.

3. Approche développement de l'offshore outsourcing

Aujourd'hui, il est demandé à la Directions des Achats de créer de la valeur et pas simplement réduire les coûts. Cette tendance, à l'initiative des Directions Générales, est très délicate pour les fonctions achats, d'abord parce qu'il s'agit d'une mission supplémentaire qui lui est confiée, mais surtout car il oblige à repenser complètement les habitudes et les stratégies achats. Le simple fait de mettre en concurrence ne permet pas d'apporter de la valeur.

Dans le même temps, l'émergence de l'Offshore Outsourcing est considérée comme une opportunité pour réduire les coûts, mais aussi comme une pratique risquée. Cette image s'appuie sur les grands projets ré-internalisés, comme celui de JP Morgan, décrit plus haut. Il s'appuie aussi sur les grandes crises liées aux délocalisations de la production, comme le cas Nike dans les années 90, qui avait subi une campagne médiatique très forte sur les conditions de travail dans les usines de ses sous-traitants en Asie du Sud-Est.

Enfin, troisième tendance, l'innovation est reconnue comme un élément fondamental dans la création de valeur d'une organisation. Plus un secteur d'activité est concurrentiel, comme la Bancassurance en France, plus l'innovation a un rôle central dans la création de valeur. Ainsi, le développement des cartes de crédit sans contact, du paiement par téléphones mobiles sont

parmi les exemples les plus novateurs de l'impact de l'innovation, et des technologies, sur la création de valeur dans ce secteur.

Le cas de la WingspanBank.com8 est très intéressant puisque les dirigeants ont réussi à créer une banque en ligne de toute pièce en moins de 3 mois. Cela a été possible grâce à l'utilisation du savoir-faire des prestataires intégrés au projet. Cet exemple montre bien l'impact des prestataires dans l'innovation. Ainsi, l'Offshore Outsourcing doit s'inscrire dans cette tendance et doit pouvoir créer de la valeur pour la société.

Une première approche est de favoriser le développement d'acteurs majeurs, spécialisé dans le domaine bancaire. En Inde, ce type de prestataire existe principalement parce que les Banques sont les précurseurs ainsi que les plus gros consommateurs d'Offshore Outsourcing. Ainsi, le rachat de Kanbay, spécialiste de l'outsourcing bancaire, a permis à Cap Gemini d'être un acteur majeur dans ce domaine. La création de spécialiste permet de profiter d'un savoir-faire spécifique pour un coût parfois inabordable en France.

Le deuxième point est que le faible coût des prestations en offshore outsourcing doit permettre le lancement de projet ou l'exécution de processus qui ne serait pas envisageable dans le pays d'origine du client, compte tenu des coûts associés. Ainsi, British Airways a délocalisé son centre de réconciliation de facture. Avant cette délocalisation, le seuil de validation des transactions s'élevait à 50€ contre 20€ maintenant, grâce au salaire plus bas des opérateurs. Ainsi, les coûts de traitement ont diminué tandis que les revenus associés ont pu être augmentés.

Au-delà de la prestation, l'Offshore Outsourcing peut permettre de favoriser le business dans les pays d'implantations du client. Ainsi, cette connaissance par les achats de l'état de certains marchés peut favoriser l'implantation de nouvelles filiales. Les achats doivent profiter de ce savoir pour aider l'organisation à se développer. Attention, ceci ne vise pas les contrats de compensation, c'est à dire de mêler les obligations en tant que client et fournisseur (demander que le prestataire soit client de la banque pour obtenir un marché). Cette pratique est souvent interdite par les Directions des Achats et ceci quel que soit le pays.

8 Cas Harvard Business School (2002), « WingspanBank.com », Juillet.

Enfin, un domaine où l'Offshore Outsourcing a un impact très fort et sur lequel les achats peuvent participer est le développement durable. Le développement durable a un impact fort dans les Banques. Les risques dont doivent faire face les établissements financiers sont nombreux : blanchiment d'argent, accès au crédit, stabilité monétaire...

La Direction des Achats est impliquée dans ce processus, notamment à la Société Générale où a été mis en place depuis 2006 un plan Ethical Sourcing Program (ESP). Ce plan suit trois axes : intégrer les critères environnementaux et sociaux dans l'exercice des métiers, gérer dynamiquement et responsablement les collaborateurs, maitriser et optimiser l'impact direct des activités de la banque sur l'environnement de la société.

Sur chacun de ces points, l'offshore outsourcing a un impact. D'abord, sur le premier point, la Direction des Achats Groupe a mis en place des questionnaires RSE, que les soumissionnaires des appels d'offre doivent remplir. La note tirée de ce questionnaire doit compter au moins 3% dans la note globale lors du dépouillement. Des questionnaires spécifiques ont été crées pour les typologies d'achat à risque pour la banque, comme la restauration. Un questionnaire de ce type existe déjà pour les prestations informatiques, mais elles doivent dorénavant intégrer le risque lié à une prestation délocalisé.

Mais les organisations doivent aller plus loin et ne pas se limiter à ce type de questionnaire qui ne fait que contrôler certains points. Ainsi, l'organisation doit prévoir en amont la reconversion des personnes, en cas d'offshore outsourcing. En effet, en cas d'externalisation, le personnel est repris par le prestataire. L'entreprise cliente doit donc non seulement respecter la réglementation en matière de droit social, mais aussi prendre en compte la dimension humaine de ses décisions. L'organisation doit notamment proposer les formations adéquates aux personnes susceptibles d'être externaliser, pour ainsi leur permettre de monter en compétence.

Sur le deuxième point, la Direction des Achats doit assurer une formation adéquate à ses acheteurs pour qu'ils puissent traiter des dossiers d'Offshore Outsourcing. Comme décrit dans la partie précédente, ce type de projet nécessite des compétences spécifiques de la part des acheteurs. L'acheteur qui traite ce type de projet doit être capable de la faire.

Enfin, sur le troisième point, les acheteurs de prestation en Offshore Outsourcing doivent pouvoir connaître les impacts qu'on leur prestation sur l'environnement de la société. Voici quelques-uns uns des impacts à prendre en compte :

Economie

- Favoriser le développement local (stabilité et rentabilité des contrats, ...),

- Refuser les pratiques non éthiques (corruption,...).

Social

- Assurer des conditions de travail « juste » (respect des consignes de l'OMT,...),

- Prévoir les conséquences de l'Offshore Outsourcing dans le pays d'origine (formation, changement de poste,...).

Environnement

- Assurer un développement qui respecte l'environnement (construction « vert »,...),

- Limiter les déplacements et favoriser les vidéo/télé conférences.

Le Projet MOOS (Making Offshore Outsourcing Sustainable) a été lancé en 2004 pour assurer un développement socialement responsable de l'Offshore Outsourcing. Ce programme est financé par l'Union Européenne. Bien que ce projet soit mené par différents syndicats européens et qu'il soit donc destiné aux salariés, il est fondamental que les organisations participent, comme le fait Axa, à ce type de démarche, à la fois pour comprendre l'impact de leurs décisions sur leur environnement, et pour afficher leur bonne volonté.

Car finalement, les organisations ayant recours à ce type de prestation ne doivent pas tomber dans les mêmes pièges que certains industrielles (cas Nike, comme évoqué plus haut). Au contraire, l'objectif est de s'appuyer sur ce type de projet pour montrer la prise en compte des éléments de développement durable et ainsi améliorer l'image de l'organisation dans le pays du client et celui du prestataire.

Conclusion

Comme discuté tout au long de ce mémoire, l'Offshore Outsourcing est en pleine explosion, particulièrement dans le secteur de la bancassurance. Les besoins de compétitivité des acteurs financiers, ainsi que leur développement à l'international font augmenter le besoin pour ce type de prestation.

La pratique de l'offshore outsourcing devenant de plus en plus courante, l'enjeu est de savoir comment la fonction achat peut s'y inscrire. La méthodologie proposé n'est qu'une approche simple de l'offshore outsourcing par les achats, et doit être poussée. Malgré tout, cette analyse permet de se poser la question du rôle de la fonction achat dans le sourcing de ce type de prestation.

Les gains proposés par la Direction des Achats pour ce type de prestation ne doivent pas se limiter aux gains financiers liés à l'arbitrage entre les différents niveaux de salaire. Il est important de prendre en compte l'ensemble des leviers d'achats possibles, tel que l'amélioration de la qualité et des délais, l'accès à des compétences absentes sur le marché du client,...

Une étude du DTT GFSI (Deloitte Touche Tohmatsu Global Financial Services Industry) a défini trois phases dans l'offshore outsourcing : Build (Construire), Optimize (Optimiser) et Release (Libérer). Une fois les premiers projets de sourcing en offshore outsourcing effectués, les directions achats devront faire face à la deuxième étape et devront optimiser, à la fois les pratiques achats ainsi que les prestations. Cette optimisation ne pourra pas seulement se limiter aux gains financiers liés au différentiel de niveau de salaire.

Cette deuxième phase nécessitera une connaissance complète des projets de sourcing en offshore outsourcing. Compte tenu de l'augmentation très forte de la demande, des difficultés dans le sourcing peuvent être anticipées, le sourcing devenant de plus en plus complexe. Les projets de sourcing nécessiteront des compétences de plus en plus importantes, pour tirer le meilleur des pratiques d'offshore outsourcing. C'est à ce prix que les organisations pourront tirer de l'offshore outsourcing le maximum de sa valeur.

Bibliographies

Deloitte (2007) : »Global Financial Services Offshoring Report 2007 : Optimizing offshore operations».

ESSEC-ISIS (2006) : »Délocalisation des services et innovation : le dessous des cartes», Les Matins de l'Innovation, Mars.

Gartner (2003) : »A Look at India for Offshore Sourcing Options», Juillet.

Joint Forum (2005) : «Outsourcing in Financial Services», Basel Committee on Banking Supervision, Février.

Mazzucco F. (2004) : »Progrès des entreprises offshore», Livre Blanc Compass.

NeoIT (2008) : »Service Globalization Trends 2008», Janvier.

Montaigne C. (2007) : «Les assureurs restent prudents face aux délocalisations», Les Echos, Avril.

OFCE (2005) : «Offshore Outsourcing in the EU Financial Services Industry», n°2005-09, Juin.






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry