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L'effectivité des droits politiques de la femme sous la Ve République au Niger

( Télécharger le fichier original )
par Hassane Hamadou Namary
Université de Nantes - Diplôme d'Université de 3e cycle en Droits Fondamentaux 2006
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE DE NANTES - UNIVERSITE PARIS II PANTHEON ASSAS - UNIVERSITE PARIS X NANTERRE -
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ANNEE UNIVERSITAIRE 2005-2006

L 'EFFECTI VITE DES DROITS POLITIQUE DE LA

FEMME SOUS LA Ve REP UBLIQ UE AU NIGER

MEMOIRE DE RECHERCHE
POUR L'OBTENTION DU DIPLÔME D'UNIVERSITÉ DE 3e CYCLE

"DROITS FONDAMENTAUX"

présenté par :
Hassane HAMADOU
Tuteur :

Claire CALLEJON
Université Paris II Panthéon-Assas

DEDICACE

A

Mon épouse Ramatoulaye

Mes enfants Mohamed et Aboubacar

Je dédie ce mémoire

Pour l'amour et le bonheur que vous m'offrez

A vos côtés, j'ai toujours la force et la motivation Pour entreprendre et réussir

Je suis fier de vous

Cette famille qui me rend si heureux

REMERCIEMENTS

La rédaction du présent mémoire me donne le privilège et l'opportunité de remercier très sincèrement l'ensemble du corps professoral du DUDF ayant assuré mon encadrement. Leur engagement et leur grande expertise juridique m'ont permis de m'initier et d'approfondir en même temps nos connaissances dans un domaine aussi complexe que celui des droits fondamentaux. Mes remerciements vont également au personnel administratif de l'Université de Nantes dont le professionnalisme m'a permis d'accéder aux cours et de préparer nos examens dans les meilleures conditions. Qu'il me soit permis ici de faire une motion spéciale à l'endroit de Mme Brigitte Gassie toujours à notre disposition pour apporter les réponses à nos multiples et diverses sollicitations.

Que Mme Claire Callejon de l'Université Paris II Panthéon-Assas, mon tuteur de mémoire, trouve ici l'expression de ma profonde gratitude. Elle a su me guider et m'orienter avec patience et un grand esprit d'ouverture. Mme Callejon a fait preuve de beaucoup de compréhension à mon endroit lorsqu'il s'était agi pour moi de redéfinir le thème du mémoire. Elle a également fait preuve de beaucoup de tolérance dans le suivi de l'avancement du travail en manifestant de l'empathie quant aux conditions dans lesquelles je travaille. Ses observations pertinentes m'ont permis d'améliorer la qualité de mon travail. Mme Callejon, je vous en suis très reconnaissant.

Je remercie le Pr Dominique Pennel et le personnel du Campus Numérique de l'AUF à Niamey dont la disponibilité nous a permis d'accéder aisément au matériel de la formation.

Ce travail a été surtout possible grâce à la compréhension et au soutien dont j'ai pu bénéficier au près de CARE International, mon employeur. Je voudrais saisir cette occasion pour remercier infiniment la direction de CARE International au Niger et en particulier mon superviseur Mme Hadjia Mariama Trapsida Diallo, Administrateur National, qui a été sensible à ma situation et m'a permis régulièrement d'aménager mon programme de travail et de prendre des jours de récupération pour mener à bien mes études et travaux de recherche.

Je voudrais aussi à travers CARE International au Niger, remercier Mme Moumine Hadj ara qui a assuré la mise en forme de ce document.

Je remercie également M. Soumana Hamadou qui m'a poussé vers cette formation et n'a cessé de m'encourager tout le long de l'année.

Je voudrais témoigner à travers ces lignes toute ma reconnaissance à M. Garba Lompo, Président de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDHLF) et Spécialiste en Droits Fondamentaux dont les sages conseils et

appuis techniques ont été pour moi à la fois une source de motivation et un soutien considérable dans la poursuite des études.

Je dois beaucoup à M. Saidou Waliyakoye, Conseiller juridique du Président de la CNDHLF qui a été mon mentor. Il m'a apporté un appui technique et méthodologique inestimable et m'a permis de mieux préparer mes examens. Cet expert en Droits de l'Homme a répondu à toutes mes sollicitations et m'a offert une riche documentation et des éclairages pertinents sur des questions variées en rapport avec ma formation.

Mme Barkiré Mariama Mabeye, Chef du Projet de mobilisation des ressources des femmes et Empowerment à CARE International au Niger m'a permis d'accéder à une documentation riche et particulièrement utile à mes travaux de recherche.

Je remercie très sincèrement Dr Halidou Moussa qui m' beaucoup appuyé dans la rédaction du mémoire tant du point de vue méthodologique que dans mes recherches.

M. Boubacar Seyni Gagara, historien, journaliste et homme de culture, m'a soutenu et a partagé avec moi sa connaissance de la société nigérienne. Il a accepté de relire mon travail en dépit de ses nombreuses occupations. Qu'il trouve ici l'expression de ma profonde gratitude.

Je tiens particulièrement à remercier Mme Moussa Satou, Magistrat et Présidente de l'Association des Femmes Juristes du Niger (AFJN), qui a mis gracieusement à ma disposition des informations essentielles et une documentation très riche sur les droits de la femme nigérienne.

Je voudrais aussi et surtout témoigner ma reconnaissance au Centre de Formation et de Documentation en Droits de l'Homme de l'ANDDH de Niamey qui m'a permis d'accéder à des ouvrages spécialisés. La disponibilité et le professionnalisme de M. Issaka Namaya, Responsable du centre et de son Assistant, M. Ahmed Tidjani, m'ont à tout point de vue rendu mes recherches agréables. Je vous en remercie.

Je ne saurai terminer sans adresser mes vifs remerciements aux Archives Nationales de la République du Niger qui m' ont permis d'exploiter une quantité importante de textes nationaux et internationaux.

Je remercie toutes celles et tous ceux qui m'ont apporté un soutien de près ou de loin dans le cadre de ce travail. Que ceux et celles que je n'ai pas pu citer nommément m'en excusent et qu'ils/elles sachent que je les estime beaucoup.

Je remercie les étudiantes et les étudiants de la 10e promotion DUDF avec qui j 'ai eu des échanges encourageants et enrichissants à travers le forum des étudiants.

AVANT PROPOS

Ce mémoire rentre dans le cadre de la préparation du Diplôme d'Etudes Universitaires de 3e cycle en Droits Fondamentaux auprès de l'Université de Nantes en France.

L'enseignement à distance est toujours un défi pour les étudiants. Ce défi se présente avec une difficulté particulière lorsqu'on a, comme c'est notre cas, des activités professionnelles.

Mais dans le contexte nigérien, un autre défi ; pour quiconque veut entreprendre des études de 3e cycle, est celui de la documentation. Les ressources bibliographiques sont rares et l'accès aux documents officiels n'est pas toujours aisé. En formulant notre thème de recherche, nous étions très loin d'imaginer qu'obtenir un texte de loi, les références d'un arrêt, une étude ou tout autre document officiel pouvait relever du parcours du combattant.

Etant donné que, par souci de rigueur, nous avons décidé de ne nous appuyer que sur des documents authentiques et de travailler directement sur les sources premières (loi, conventions, décrets, ordonnances, etc.), nous nous sommes vite retrouvé confronté à la dure réalité. Pour avancer plus rapidement dans le travail, il nous fallait soit nous contenter des entretiens et des journaux pour obtenir certaines informations, soit envisager la révision du thème pour réorienter nos recherches dans un autre sens. Aucune de ces options n'étant pour nous satisfaisante, nous les avons toutes rejetées. C'était un grand risque car nous devons fournir un produit dans un délai bien déterminé ; mais l'importance du thème et le niveau de la formation nous commandaient de travailler avec des sources sûres de manière à pouvoir établir la preuve de chaque information publiée.

Avec la persévérance et l'appui d'amis et de connaissances, nous avons finalement pu réunir les principaux documents essentiels pour traiter le sujet.

Loin de nous l'idée de tirer la moindre gloriole de cette situation. En évoquant ces difficultés nous avons simplement voulu expliquer les limites de notre travail qui n'a pas la prétention d'épuiser le sujet. Tant s'en faut ! Notre objectif est d'apporter une contribution à l'étude des droits politiques de la femme nigérienne.

Nous espérons fournir de la matière pour d'autres recherches et réflexions sur le même

sujet ou des domaines connexes.

LISTE DES SIGLES ABREVIATIONS

AFJN Association des Femmes Juristes du Niger

AFN Association des Femmes du Niger

ANDDH Association Nigérienne pour la Défense des Droits de l'Homme

CEDEF Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à

l'égard des femmes

CMS Conseil Militaire Suprême

CNDHLF Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés

Fondamentales

DPF Direction de la Promotion de la Femme

DSRP Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté

IPF Indicateur de la Participation de la Femme

JORN Journal Officiel de la République du Niger

MDS/P/PF/PE Ministère du Développement Social, de la Population, de la Promotion

de la Femme et de la Protection de l'Enfant

OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement

ONG Organisation Non Gouvernementale

ONPF Observatoire National de la Promotion de la femme

ONU Organisation des Nations Unies

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

PPN/RDA Parti Progressiste Nigérien, section nigérienne du Rassemblement

Démocratique Africain

RNDH Rapport National sur le Développement Humain

UNICEF Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

TABLE DES MA TIERES

DEDICACE .2

REMERCIEMENTS ..3

AVANT PROPOS 5

LISTE DES ABREVIATIONS 6

TABLE DES MATIERES 7

INTRODUCTION GENERALE 8

PREMIERE PARTIE : Cadre Juridique de la participation politique des femmes
sous la Ve République 19

· Chapitre 1 : L'Affirmation des droits politiques de la femme à travers les instruments internationaux et la constitution de la République du

Niger ..20

Section 1 : Les Conventions internationales 20

Section 2 : La constitution de la Ve République du Niger 26

· Chapitre 2 : La traduction des droits politiques de la femme à travers la

loi sous la Ve République 31

Section 1 : Le Code électoral 31

Section 2 : La loi N° 2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au

gouvernement et dans l'administration de l'Etat .36

DEUXIEME PARTIE : L'exercice des droits politiques de la femme au Niger .38

· Chapitre 1 : Garanties des droits politiques de la femme au Niger 39

Section 1 : Les garanties juridictionnelles... 39

Section 2 : Les garanties non juridictionnelles 45

· Chapitre 2 : La représentation des femmes dans las institutions publiques, les partis politiques et les associations 52
Section 1 : Les femmes dans les emplois publics, les partis

politiques et les associations.. 53

Section 2 : Défis et perspectives 62

CONCLUSION 69

ANNEXES 72

BIBLIOGRAPHIE GENERALE ..73

Introduction générale

L'étude de l'effectivité des droits politiques de la femme sous la Ve République au Niger nécessite un bref aperçu de l'histoire et de la définition des droits politiques mais également une présentation sommaire de leur lente évolution au Niger.

Les droits politiques ont depuis très longtemps été, aux côtés des droits civils, au centre des préoccupations sur les droits de l'homme. L'on retrouve déjà dans la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789, leur formulation sous une forme universelle. Cette déclaration énonce notamment que « la loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens, étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »1

Si la référence ici faite à la notion de citoyen renvoyait à une qualité, voire une catégorie, aujourd'hui « la distinction entre droits de l'homme et droits du citoyen peut être considérée comme une simple question de terminologie : sa solution est alors indifférente (...) Mais on peut également estimer que l'homme a droit à être citoyen et que par conséquent la seconde catégorie résorbe la première. »2

Avec la Déclaration Universelle des droits de l'Homme du 10 décembre 1948, les droits politiques sont affirmés comme des droits de l'homme purement et simplement.

Les droits politiques sont des droits subjectifs, c'est-à-dire des prérogatives et libertés appartenant ou censées appartenir à des individus. Selon J.M. Denquin, « il est hors de doute que le droit subjectif de chacun, ce sentiment simple mais intense d'avoir son mot à dire sur la marche des affaires publiques constitue le coeur des droits politiques3 Si la ligne de démarcation entre les droits civils et les droits politiques n'est pas toujours nette4, la Convention sur les droits politiques des femmes (ce qui nous intéresse précisément dans le cadre de cette étude) nous permet de délimiter, pour les besoins de notre thème de recherche, le contenu des droits politiques. Cette convention énumère au fil de ses articles le droit de

1 Article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789

2 Denquin J M, Les droits politiques, Paris, Montchrestien, 1996, P 13

3 Ibid. P 9

4 Comme d'ailleurs tous les droits de l'homme dont l'interdépendance et l'indivisibilité ont été soulignées par la Conférence mondiale des droits de l'homme réunie à Vienne en juin 1993

vote, le droit d'être éligible aux organismes publiquement élus, le droit d'occuper des postes publics et d'exercer des fonctions publiques. Pour élargir les bases de notre analyse, nous associerons dans une certaine mesure la liberté d'association aux droits ci-haut cités.

La définition et le contenu des droits politiques semblent poser moins de problème que leur acceptation comme des droits inaliénables et inhérents à la nature humaine par les Etats composant la communauté internationale. Ils ont été, avec les droits civils, au centre de vieilles querelles idéologiques entre partisans de la primauté des droits civils et politiques et partisans des droits économiques, sociaux et culturels.5 Un tel débat dont le but n'est manifestement pas d'assurer une meilleure garantie pour les droits de l'homme tranche avec l'engagement de la charte des Nations Unies de favoriser «le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion.»6 En plus du constat que l'on peut faire que les Etats qui réfutaient les droits civils et politiques formaient précisément la partie du monde où la démocratie avait le plus de difficultés à se développer, cette polémique est désormais révolue.

La déclaration de la Conférence mondiale des droits de l'homme réunie à Vienne en juin 1993 proclame en son point 5 que « tous les droits de l'homme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés. La communauté internationale doit traiter des droits de l'homme globalement, de manière équitable et équilibrée, sur un pied d'égalité et en leur donnant la même importance. »

En Afrique, l'exercice des droits politiques n'a pas toujours été aisé pour leurs bénéficiaires. La plupart des Etats africains qui accéderont à l'indépendance plus d'une décennie après l'adoption de la Déclaration adhéreront à la charte de l'ONU et ratifieront les principaux instruments des droits de l'homme7 sans toutefois traduire immédiatement dans les faits cette quête d'une société démocratique favorable à l'épanouissement et à la jouissance des droits fondamentaux. Comme le fait remarquer Kéba Mbaye, après les indépendances, la grande majorité des régimes installés aux commandes des jeunes Etats africains ont longtemps « prôné le monopartisme et l'autoritarisme sous prétexte de sauvegarder l'unité nationale, la sécurité et le développement. »8

Dans ce contexte où le coup d'Etat était le principal mode de conquête du pouvoir, où tous les citoyens sont, par cette qualité même, d'office membres du seul parti Etat là où il

5 voir notamment Perter Uvin, Human Right and development, éd. Kumarian Press, 2004

6 Article 55-c dela charte des Nations Unies

7 voir F. Ouguergouz, la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, Paris, PUF, 1993, p23

8 ibid., préface, pxx

existe, où la participation des citoyens à la vie publique était rigoureusement encadrée ; on peut se poser la question de savoir si les droits politiques avaient un sens.

Aujourd'hui avec l'ouverture démocratique et la fin de l'Apartheid en Afrique du Sud, nombre d'africains peuvent participer à la vie publique de leur pays. Mais force est de constater ici et là que les gouvernements, les Assemblées nationales, les principales institutions constitutionnelles sont investis par les hommes ; les femmes étant en général très faiblement représentées. Il faut convenir avec Danièle Lochak que « la citoyenneté politique peut (...) devenir une forme vide face à certaines formes d'exclusion qui font obstacle à l'exercice des droits rattachés à la citoyenneté. »9 L'on peut alors se demander si dans ces pays, les femmes jouissent pleinement de leurs droits de citoyennes. L'efficacité des droits politiques repose sur la capacité individuelle et l'existence d'un cadre institutionnel favorisant leur exercice. Ce qui nous conduit à mieux préciser le terme effectivité associé aux droits politiques dans le thème de cette étude. A ce niveau, la définition donnée par Jean Salmon nous paraît satisfaisante. Pour lui, l'effectivité est « le caractère de ce qui existe en fait. C'est la qualité d'une situation juridique qui correspond à la réalité, d'une compétence qui s'exerce réellement. »10

La participation politique des femmes est donc un des défis auxquels font actuellement face les jeunes démocraties africaines. Ce défi, le cinéaste engagé sud africain, Ramadan Suleman, l'exprime dans des termes qui lui sont propres lorsqu'il parle de son film « Fools » montrant le rôle joué par les femmes dans la lutte contre l'Apartheid : « J'ai voulu montrer que nous sommes, en Afrique du Sud, dans une phase de reconstruction où les hommes doivent impérativement considérer leurs relations avec les femmes. Si nous ne prenons pas les femmes en compte, on ne reconstruira pas. Parce que ce ne sont pas les femmes qui ont détruit l'Afrique. Ce sont les hommes.»11

Au cours de cette étude, nous allons nous appesantir sur l'effectivité des droits politiques des femmes sous la Ve République au Niger.

Ancienne colonie française d'Afrique de l'Ouest, le Niger accède à la souveraineté internationale le 03 août 1960. C'est un vaste pays qui couvre une superficie de 1 267 000 km2. Sa population est estimée, selon le recensement général de la population de 2001, à 11.060.291 habitants dont 50,13% de femmes. L'Islam est la religion pratiquée par plus de

9 Lochak D., « Les droits de l'homme » ,Paris, éd. La Découverte, 2004, P 76

10 SALMON J., Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp 411-412

11 cité par Hoffelt Sophie, « Les femmes réalisatrices en Afrique Subsaharienne » in l'Afrique politique : femme d'Afrique, Editions Kartala, 1998, P29

90 % des Nigériens. Le Christianisme et les cultes animistes ou religions traditionnelles africaines sont minoritaires par le nombre de leurs adeptes.

Un bref aperçu de l'histoire constitutionnelle et institutionnelle du Niger nous permettra de mieux cerner l'évolution des conditions d'exercice des droits politiques de la femme nigérienne de la Première République jusqu'à la Cinquième. Dans le cadre de cette étude, il ne nous a pas paru opportun de nous étendre sur la période pré-coloniale dont l'étude ne manquera pas de poser quelques problèmes d'ordre pratique et de recherche de cohérence. A cette époque, « les institutions politiques présentaient une grande variété à l'intérieur de l'espace nigérien. »12

Quant à la période coloniale (1898 - 1960), même si elle a profondément marquée l'histoire du Niger, son intérêt pour notre thème est bien modeste. Les droits de l'homme d'une manière générale et les droits politiques des femmes n'étaient pas au centre des préoccupations de l'administration coloniale. Ainsi comme le souligne Abdou Hamani, sous l'empire colonial, les femmes nigériennes étaient soumises à une double oppression : « La première qui touchait également le reste de la population, était le fait de l'administration coloniale(...) La seconde découlait de la situation d'inégalité des genres au sein de la famille(...) Le pouvoir colonial avait évidemment tout intérêt à maintenir à l'écart à peu près la moitié de la population assujettie. »13

Du point de vue de l'évolution des droits politiques des femmes au Niger, nous pouvons distinguer trois (3) grandes périodes ayant précédé la Ve République qui représente le cadre institutionnel de notre étude : de 1960 à 1989 ; de 1989 à 1992 et de 1992 à 1999

~ période de 1960 à 1989, une période riche pour la proclamation des droits

fondamentaux mais fruste quant à leur exercice effectif :

Cette période couvre la Première République fondée en 1960 et qui prendra fin avec le coup d'Etat du 14 avril 1974 marquant ainsi le début d'un régime d'exception qui se prolongera jusqu'en 1989.

Admis à l'ONU dès 1960, le Niger est donc lié par tous les engagements de la charte des Nations Unies notamment ceux relatifs à la sauvegarde des droits fondamentaux.

La constitution du 08 novembre 1960 est la première constitution du Niger indépendant. Jean Jacques Raynal décrit la Première République comme « un régime présidentiel à prépondérance du Président.»14 Le préambule de la constitution fait référence

12 Hamani Abdou, les femmes et la politique au Niger, Niamey, édition Démocratie 2000, 2000, p26

13 ibid, p 41-42

14 Raynal J J, Les institutions politiques du Niger, Sépia, Paris, 1993, p 20

aux principes de démocratie et des droits de l'homme définis dans les déclarations des droits de l'homme de 1789 et de 1948. Son article 6 garantit « à tous l'égalité devant la loi sans distinction d'origine, de race, de sexe ou de religion». L'article 7 de la constitution du 08 novembre 1960 affirme l'existence des partis politiques. Le 07 décembre 1964, notification est faite de la succession de la République du Niger à la convention sur les droits politiques des femmes entrée en vigueur dix (10) ans plus tôt.

Mais dans beaucoup de pays africains, le contraste entre les droits et libertés formellement proclamés et le sort qui leur est réservé est saisissant. Au Niger, malgré la Constitution qui permet le multipartisme ; le PPN/RDA15, parti contrôlé par le Président de la République, était un parti unique et « a investi tous les rouages de l 'Etat » .16 En réalité, le terrain avait été, pour ainsi dire, préparé pour le PPN/RDA un an avant la proclamation de l'Indépendance. L'ordonnance n° 59-101 du 4 juillet 1959 mettait en effet entre les mains du régime PPN/RDA un pouvoir redoutable : « tout parti politique, syndicat ou association dont les activités troublent gravement l'ordre public pourront être dissous par décret». En application de cette ordonnance, la dissolution du Sawaba, le seul parti d'opposition, sera prononcée le 12 octobre 195917.

Le parti était l'ascenseur social et le tremplin pour toute promotion politique, principalement pour les hommes. Manifester des idées politiques en dehors du cadre du parti unique était considéré comme une activité subversive et réprimée en conséquence18. Se présentant seuls face aux électrices et aux électeurs, le Président de la République et les candidats à la députation étaient assurés d'une victoire facile et certaine. On peut d'ailleurs se demander si le droit de vote ainsi exercé, sans choix possible, n'était pas aussi une forme d'oppression, les résultats connus d'avance ne reflétant pas toujours la volonté des citoyennes et des citoyens. Les femmes, même lorsqu'elles militent dans le parti n'ont pas l'occasion d'influencer le cours des choses ou de contribuer aux réflexions sur les orientations du pays.

En fait, le régime et le parti ne semblent même pas avoir pareilles attentes à l'endroit des femmes. Diori Hamani, Président de la République et Secrétaire Général du PPN/RDA, parti unique, nous donne des indications sur la place des femmes : « les méthodes éprouvées de lutte anti-colonialiste adaptées avec intelligence aux particularités de chaque pays mettent en lumière la part prise par les femmes dans les mouvements d'émancipation et de libération

15 Le Parti Progressiste Nigérien , section nigérienne du Rassemblement Démocratique Africain

16 Raynal JJ, op cit., p 21

17 Décret n°59-174 du 12 octobre 1959

18 Un grand procès politique organisé en mai 1965 prononcera cinq condamnations à mort et plus de quarante peines de prison. D'autres procès suivront jusqu'en 1969.

des peuples colonisés(...) Militantes infatigables, elles ont un sens de solidarité qui fait l'admiration de tous : mariages, naissances et baptêmes, décès, visites aux malades, réception des délégués étrangers à leur ville ; elles ne manquent aucune occasion pour cimenter les liens du parti, attirer d'autres militants. »19 Cette réflexion nous fait penser qu'en dépit d'un droit de vote formel et de l'adhésion du Niger à plusieurs instruments relatifs aux droits de l'homme, le sort de la femme nigérienne dans les années 60, sur le plan politique, est à peine meilleure que celui de la femme dans la cité de la Grèce antique décrite par Claude Mossé en ces termes : « mineures donc, marginales, exclues de ce « club d'hommes » qu'est la cité, à laquelle elles ne participent à la vie que par le biais des manifestations religieuses. »20 Sous la première République (1960 - 1974), les femmes resteront à l'écart des nominations aux postes politiques et ses différents gouvernements et parlements seront exclusivement animés par des hommes.

Le régime issu du coup d'Etat militaire du 15 avril 1974 dirigé par le Conseil Militaire Suprême (CMS) ne sera pas non plus un modèle en matière de respect des droits fondamentaux et conséquemment des droits politiques de la femme. L'Assemblée Nationale, le parti Etat de la première République dissous, la constitution de novembre 1960 suspendue21, le Niger rentre dans une nouvelle ère qui s'étendra jusqu'en 1989 et que Jean- Jacques Raynal appelle la « militarocratie »22, très en vogue en Afrique. Le Conseil Militaire Suprême (CMS) composé uniquement d'officiers (tous des hommes) réaffirme l'appartenance du Niger « à toutes les organisations internationales à l'échelle du continent africain et à celle de la Communauté Internationale, le respect de tous les engagements précédemment souscrits... »23

Un an après le coup d'Etat, le Chef de l'Etat, le Lieutenant-colonel Seyni Kountché reconnaît la marginalisation des femmes dans un discours prononcé le 16 mai 1975. Pour lui, « bien que dans les domaines politiques et juridiques la République prescrit pour tous ses enfants l'égalité devant la loi sans distinction d'origine, de race, de sexe ou de religion, on relève au niveau des institutions, plusieurs dispositions discriminatoires qui écartent les femmes de certaines prérogatives et fonctions, qui leur bouchent bien des issues modernes de

19 Cité par Hamani Abdou, op cit. P 44

20 Mossé Claude, La femme dans la Grèce antique, Paris, Albin Michel, 1983, p 90

21 En plus de la proclamation du Conseil Militaire Suprême en date du 15 avril 1974, l'Ordonnance n° 74-01 du 22 avril 1974 prononce formellement la suspension de la constitution.

22 Raynal JJ, op cit. P 24

23 Proclamation du Conseil Militaire Suprême en date du 15 avril 1974 prononcée par le Lieutenant-colonel Seyni Kountché

promotion et qui retardent d'autant l'avènement d'une élite féminine nigérienne. »24 Faut-il voir dans la création de l'Association des Femmes du Niger (AFN) en 1975 et celle d'une Direction de la promotion de la femme en 1981, une volonté de favoriser le respect des droits politiques des femmes ou un simple clin d'oeil face à l'éveil du féminisme et à la prise en compte des droits des femmes par les organisations internationales dans leurs agendas officiels ?

L'AFN tout comme la Samaria (mouvement des organisations de jeunesse) ne sont que des instruments de mobilisation au service du régime, dont l'influence est bien relative. Faisant partie du système qui les contrôle et les utilise à sa guise, ces structures ne peuvent d'ailleurs jouer un rôle décisif dans la garantie des droits politiques des femmes.

L'internationalisation du mouvement féministe paraît alors une piste intéressante dans la recherche d'une réponse à la question posée plus haut. L'influence politique du féminisme, on le sait, ne fut pas confinée dans les limites nationales. Les Nations Unies ont par exemple célébré la « Décennie de la femme » (1975 - 1985) avec une série de conférences internationales à Mexico, Copenhague et Nairobi. Ces conférences « ont mis en lumière l'ampleur de la mobilisation féministe, et son impact aussi bien dans les pays développés que dans les pays en voie de développement ».25

Le 7 mars 1986, le Niger ratifiera le pacte international relatif aux droits civils et politiques et le protocole facultatif s'y rapportant en même temps que le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.26 Au cours de la même année, la charte africaine des droits de l'homme sera ratifiée par la République du Niger. Ceci marque une avancée qui restera tout de même formelle car les conditions de garantie et d'exercice des droits proclamés n'ont pas suivi. Il n'y avait ni opposition, ni élections politiques et la situation des femmes au niveau des postes de responsabilité n'a connu aucune évolution significative. Ramené au précis du Niger, le constat suivant de Chaibou Maman conserve toute sa pertinence : « les femmes de plusieurs pays sont devenues juridiquement éligibles alors qu'elles n'avaient pas le pouvoir de voter : curieux paradoxe ».27

Il a fallu attendre 1988 pour voir la première femme siéger au Conseil des Ministres, en tant que Secrétaire d'Etat chargée des affaires sociales au Ministère de la Santé et des

24 Secrétariat de la Présidence de la République, Lieutenant- colonel Seyni Kountché : discours et messages (15 avril 1974 - 15 avril 1975), Niamey, INN, 1975, p91

25 Ergas Yasmine, « les luttes féministes des années 1970... » in Problèmes politiques et sociaux n° 835, mars 2000, p 46

26 Ordonnance n°86-17 du 24 avril 1986 publiée dans le Journal Officiel de la République du Niger n° 9 du 1er mai 1986, p 434

27 Maman Chaibou, Rerpertoire biographique, vol. 1 : les parlementaires, Niamey, Démocratie 2000, 1999 , p 422

affaires sociales. La création du Ministère des affaires sociales et de la condition féminine en mai 1989, confiée à une femme, annonce une nouvelle étape dans la promotion des droits des femmes.

~ La période de 1989 à 1992 : la gestation de la démocratie :

La IIe République est fondée par la constitution du 24 septembre 1989 dont le préambule se réfère aux principes de la démocratie et des droits de l'homme proclamés par les déclarations de 1789 et 1948 ainsi que par la charte africaine des droits de l'homme. Le titre III est consacré aux « droits et libertés du citoyen .»

La « décrispation » dont le Général Ali Saibou, Président de la République, a fait son mot d'ordre va commencer, timidement mais sûrement, à se traduire en changements qualitatifs tant sur le plan institutionnel que sur le plan des droits et libertés. Et cela, en dépit du monopartisme consacré par le titre V de la constitution. Le nombre de femmes passera à deux (2) au Gouvernement et à l'issue des élections législatives (liste unique du Mouvement National pour la Société de Développement, Parti Etat) du 10 décembre 1989, cinq femmes font, pour la première fois au Niger, leur entrée au parlement. Mais les nigériennes et les nigériens ne se contenteront pas de la « décrispation politique » et, les changements vont s'accélérer à partir de 1991.

De 1990 à 1991 les femmes participeront en tant que syndicalistes, scolaires et membres des structures de la société civile à toutes les luttes pour l'instauration d'une démocratie véritable. Ces efforts seront dans un premier temps simplement niés par les membres de la Commission Nationale Préparatoire de la Conférence Nationale (CNPCN) qui ont voulu limiter la participation des femmes à cette instance sous prétexte qu'elles représentaient le pouvoir en place. Comment les forces d'opposition au régime appelées communément « les forces vives de la nation » pouvaient-elles justifier l'absence des femmes dans la commission chargée de préparer la Conférence Nationale devant définir des nouvelles bases pour la construction du Niger ? Face à cette exclusion, les femmes se mobiliseront et descendront dans la rue le 13 mai 1991 pour exiger une participation significative aux travaux de la CNPCN. Cette marche mémorable interrompit les travaux de la « CNPCN qui est alors contrainte d'accepter l'entrée de six (6) femmes en son sein »28. La date du 13 mai sera instituée « Journée Nationale de la Femme Nigérienne » par le Décret n° 92-370 PM/MDS/P/PF du 25 novembre 1992.

28 Hamani Abdou, op cit. P 51


· La période de 1992 à 1999 : les femmes revendiquent plus de participation

Cette période sera riche en événements et le Niger connaîtra quatre régimes parmi lesquels régimes constitutionnels et régimes d'exception alterneront avec hélas la violence et les privations de liberté qui caractérisent ces derniers.

Après une courte période de transition (1991 -1992), le pays entre dans sa IIIe République avec la constitution du 26 décembre 1992. C'est le premier régime véritablement démocratique dans l'histoire moderne du pays. La constitution consacre un multipartisme intégral (article 10) et garantit les droits et libertés des citoyens (Titre II). Les femmes vont s'investir dans les partis politiques et se regrouperont en associations pour mieux s'émanciper. Le nombre de femmes au Gouvernement connaîtra une amélioration qui se maintiendra jusqu'à la IVe République (1996- 1999) tandis qu'au parlement, de cinq (5) au cours de la première législature, le nombre de femmes députées tombera à trois (3) sous la seconde et dernière législature de la IIIe République. L'Assemblée Nationale de la très mouvementée Quatrième République29 ne comptera qu'une seule femme en son sein.

Comme nous l'avons évoqué, l'émergence des associations féminines est concomitante à l'engagement massif des femmes dans les partis politique mais les deux phénomènes auront des impacts différents. D'un côté, le dynamisme et la visibilité des nouvelles associations féminines ne font aucun doute, et elle seront même appuyées par plusieurs Organisations Non Gouvernementales (ONG) et institutions internationales oeuvrant dans le domaine de l'émancipation de la femme. De l'autre côté, les femmes seront beaucoup plus des mobilisatrices d'électrices et d'électeurs que de véritables leaders dans les partis politiques pouvant modifier de façon significative la réalité leur participation politique qui restera faible en comparaison de celle des hommes. Cette analyse de Aminata Diaw Cissé sur l'expérience de la participation politique des femmes sénégalaises au cours de la même période est bien valable pour les nigériennes : « médiatrices dans le dispositif de patronage, elles continuent à participer à la théâtralisation du politique sans en être véritablement les initiatrices. »30

29 Pour se maintenir au pouvoir les militaires auteurs du coup d'Etat du 27 janvier 1996 vont doter le pays d'une constitution. Ils organisèrent des élections mais la commission électorale sera dissoute avant même la proclamation des résultats. Ce qui ouvrit la voie à de vives contestations dans tout le pays et les principaux partis politiques ne donneront pas de répit au régime jusqu'à sa chute tragique le 9 avril 1999 à la suite d'un coup d'Etat militaire qui coûta la vie au Président Ibrahim Baré Mainassara.

30 Diaw C. Aminata, Femme, Ethique et Politique, Dakar, Fondation Friedrich Ebert, 1998, P18

Toutefois, au regard de l'exclusion dont elles ont été victimes pendant si longtemps, les acquis capitalisés par les femmes dans la réalisation de leurs droits politique ne sont pas négligeables même s'ils demeurent insuffisants.

La constitution du 09 août 1999 marque l'avènement de la Ve République dont l'expérience se poursuit encore aujourd'hui. Avec des élections libres et pluralistes, une opposition politique reconnue, active et dotée d'un statut légal31, une presse indépendante et la garantie de la liberté d'association et de réunion, sans être dans la démocratie parfaite (s'il en existe !), les conditions juridiques et institutionnelles propices à la promotion des droits fondamentaux se mettent en place, au rythme du Niger qui n'échappe pas à l'influence de son contexte économique et culturel. La Ve République est le régime démocratique le plus stable, au moins du point de vue de la durée, qu'ait connu le Niger indépendant.

Dès lors, la problématique au centre de notre étude est la suivante : Les droits politiques de la femme sont-ils effectivement garantis sous la Ve République au Niger ? Cette question nous amènera à aborder à la fois l'affirmation des droits politiques de la femme et leur réalisation.

Notre hypothèse principale est que la stabilité démocratique de la Ve République et le contexte international ont favorisé le respect et l'exercice des droits politiques en général et en particulier ceux des femmes longtemps victimes d'exclusion sous les régimes précédents. Une hypothèse secondaire part du postulat que l'évolution amorcée au Niger dans les années 90, sur le plan des droits politiques de la femme, a été maintenue et renforcée.

Le thème de notre recherche a donc toute sa pertinence. Etudier l'effectivité des droits politiques de la femme sous la Ve République a un intérêt scientifique évident.

Cet intérêt suppose donc l'apport de la présente étude dans le monde de la science et de la recherche, en ce qui concerne la problématique de l'effectivité des droits politiques de la femme au Niger, pays sous développé en transition démocratique. Ainsi, notre travail est original dans la mesure où il s'intéresse à une catégorie de droits au coeur de la citoyenneté mais qui, en dépit d'une législation abondante, n'a pas toujours bénéficié d'un cadre institutionnel et politique favorable à son exercice sous les régimes précédents. Cette originalité est de surcroît renforcée par le fait que le thème cible une catégorie particulière de bénéficiaires longtemps privées de leurs droits à tous les niveaux, du ménage jusqu'à l'échelle de la communauté nationale. La construction d'un Etat moderne, la quête d'une démocratie

31 Ordonnance n° 99-60 du 20 décembre 1999

véritable et la nécessité de la promotion des droits de l'homme au Niger font de la réhabilitation des femmes dans leurs droits politiques une exigence fondamentale.

Il s'agira pour nous d'examiner les textes fondamentaux relatifs au sujet dans une démarche juridique et d'étudier les effets de Jure et de Facto qu'ils ont produits et qu'ils produisent réellement ou potentiellement. Ce qui permettra assurément de dégager d'autres pistes de recherche ou d'action pour approfondir la problématique de la démocratie et des droits politiques des femmes au Niger ou dans les pays sous développés en général.

Pour traiter de la question de l'effectivité des droits politiques de la femme sous la Ve République au Niger nous avons, à dessein, opté pour un plan en deux parties. La première, essentiellement analytique, s'articule autour de l'examen des textes fondamentaux en la matière et tentera de vérifier la cohérence technique du droit positif nigérien. Quant à la deuxième partie, elle est beaucoup plus critique car évaluant l'efficacité des mécanismes nationaux de garantie des droits politiques de la femme nigérienne. Evaluation de l'efficacité qui passera nécessairement par une lecture de la réalité de la participation politique des femmes sous l'éclairage des prérogatives reconnues et offertes par les textes pertinents.

Ainsi donc l'étude du cadre juridique de la participation politique des femmes sous la Ve République au Niger avec ses avancées (Partie 1) nous permettra de procéder à l'appréciation de la réalité de l'exercice des droits politiques de la femme nigérienne dans ses anachronismes (partie 2).

P R E M I E R E P A R T I E :

Cadre juridique de la participation politique des femmes

sous la Ve République : une évolution significative mais

insuffisante du droit positif

D'une manière générale, le statut juridique de la femme nigérienne est écartelé entre différentes logiques juridiques de source et de nature différentes et souvent plus concurrentes que complémentaires. Il y a d'abord la logique émancipatrice en tant qu'idéal d'une réorganisation sociale plus égalitaire dans l'approche d'une plus grande équité entre les genres. Cette logique est proclamée, encouragée et soutenue par les dispositions issues des conventions internationales, de la constitution nigérienne et dans une moindre mesure, de la loi. C'est le droit dit moderne. Ensuite la logique conservatrice en tant que modèle social proposé par les traditions nigériennes, et par conséquent, issue de la culture traditionnelle qui sert de fondement à la vision africaine du monde. Cette logique est soutenue par le droit coutumier nigérien avec ses variantes d'une communauté à l'autre.

Enfin la logique confessionnelle qui propose un modèle d'organisation sociale à travers les règles et ordres issus de la parole divine. En tant qu'ordre divin cette logique propose un statut juridique éternel et immuable de la femme. Cette logique est reflétée par les préceptes de l'Islam.

Dans l'ordonnancement juridique nigérien, les conventions internationales, la constitution et la loi ont prééminence sur toutes les autres sources de droit. Le droit moderne proclame les droits politiques de la femme mais il n'est pas affranchi des influences de la tradition et de la religion.

L'analyse du cadre juridique de la participation politique de la femme nigérienne s'articulera donc autour des conventions internationales ratifiées par la République du Niger et la constitution (Chapitre 1) ainsi que de la loi (Chapitre 2).

Chapitre 1 : L'affirmation des droits politiques de la femme à travers les instruments internationaux et la constitution de la République du Niger

Les droits politiques sont des droits nécessaires au fonctionnement d'une démocratie. Selon Danièle Lochak, « Les droits politiques forment la substance même de la citoyenneté, puisque la prérogative par excellence du citoyen est de participer à l'exercice de la souveraineté. »32 Les principaux droits fondamentaux de la femme et donc ses droits politiques sont garantis par les conventions internationales ratifiées par la République du Niger et la constitution de la Ve République. De l'indépendance à nos jours, le Niger a fini, non sans une certaine hésitation, par ratifier les principaux instruments internationaux relatifs à l'émancipation de la femme. Il faut noter que tous ces instruments ont été ratifiés avant l'avènement de la Ve République (09 août 1999). Quant à la constitution du 09 août 1999, elle proclame à tout point de vue des droits égalitaires pour l'homme et la femme. Mais l'ensemble de ce dispositif supra-légal cohabite avec des normes coutumières souvent contradictoires voire paradoxalement dérogatoires. D'où la nécessité d'analyser les droits politiques de la femme dans les conventions internationales (section 1) d'une part et dans l'actuelle constitution nigérienne d'autre part.

Section 1 - Les conventions internationales : un environnement international

favorable

Selon l'article 132 de la constitution du 09 août 1999, « les traités ou accords régulièrement ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois. » Cela veut dire q'une fois publiés au Journal Officiel de la République du Niger, ces instruments acquièrent une autorité comparable à celle de la constitution et font partie intégrante du droit positif nigérien. Ils peuvent être invoqués devant les instances judiciaires ou les autorités administratives qui sont tenues de les appliquer. Seules les conventions ratifiées par le Niger seront au centre de notre réflexion. Si dans cette réflexion nous abordons une convention non applicable au Niger, ce ne serait qu'à titre de comparaison ou de plaidoyer pour une évolution du statu quo.

A côté des instrumentaux généraux relatifs aux droits de l'Homme (A) sur une base égalitaire, certaines conventions traitent spécifiquement des droits de la femme pour mettre définitivement et complètement hors la loi les discriminations dont elle fait l'objet (B).

32 Lochak D., op. cit., p 77

A - Les droits politiques de la femme comme droits de l'Homme

Les droits de l'Homme peuvent se définir comme un « ensemble de droits et des libertés fondamentales inhérents à la dignité de la personne humaine et qui concernent tous les êtres humains. »33 Nul besoin d'insister sur le fait que les droits proclamés par les textes internationaux sont des droits de tout être humain indifféremment du sexe. La Déclaration universelle des droits de l'homme précise en son article 2 que « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe... » Cette interdiction de toute discrimination basée sur le sexe est réaffirmée par le Pacte international relatif au droits civils et politique (article 2 § 1) ainsi que la charte africaine des droits de l'homme et des peuples (article 2).

En effet l'ensemble des droits politiques garantis par les conventions internationales sont également des droits politiques de la femme même lorsqu'en raison des influences des traditions séculaires ou simplement de l'ignorance, ils ne sont pas mis en oeuvre. Il s'agit notamment du droit de prendre part aux affaires publiques, de la liberté d'association et de réunion et de la liberté d'opinion.

a) Le droit de prendre part aux affaires publiques : Ce droit est garanti par la Déclaration Universelle des droits de l'homme (article 21), le Pacte internationale relatif aux droits civils et politiques (article 25) et la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (article 13) qui, faut-il le souligner, ne mentionne pas le droit de vote. A la différence des autres droits, ce droit est réservé aux citoyennes et citoyens. Le droit de prendre part aux affaires publiques recouvre :

· le droit de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ;

· Le droit de vote et d'être élu dans le cadre d'élection libre ;

· Le droit d'accéder aux fonctions politiques de son pays ;

b) La liberté d'association et de réunion : la réunion est la formation de groupe momentané soit dans des lieux privés (liberté de réunion) soit dans des lieux publiques (liberté de manifestation) tandis que l'association consiste en la formation de groupes permanents. Cette liberté est garantie par la déclaration universelle des droits de l'homme, le

33 Salmon J. (dir), Dictionnaire du droit international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, p 396

Pacte international relatif aux droits civiles et politiques et la Charte Africaine des droits de l'hommes et des peuples.

c) La liberté d'opinion et d'expression : Elle est énoncée dans l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme. L'article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques reprend l'affirmation de la Déclaration avec quelques nuances. Il indique et justifie certaines restrictions concernant:

- Le respect des droits d'autrui,

- L'ordre public,

- La moralité publique,

- La santé publique.

L'article 20 du Pacte ajoute que toute propagande en faveur de la guerre ainsi que tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse sont interdits. L'article 9 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples reconnaît aussi la liberté d'opinion et d'expression mais dans « le cadre des lois et règlements ».

En plus de ces conventions qui définissent des droits politiques pour tous les êtres humains sans distinction de sexe, la communauté internationale a reconnu de la situation particulière de la femme et a élaboré des textes spécifiques aux droits de la femmes en vue d'une plus grande équité dans la jouissance des droits.

B Les droits politiques comme droits de la femme

Trois grandes conventions spécifiques aux droits de la femme renforcent la garantie des droits politique de la femme. Il s'agit de la Convention sur les droits politiques de la femmes du 7 juillet 1954 à laquelle le Niger a fait acte de succession le 07 décembre 1964 34 ; de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) adoptée le 7 novembre 1967 par l'Assemblée générale des Nations unies et à laquelle le Niger adhère le 08 octobre 1999 35 ; et du Protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif aux droits de la femme entrée en vigueur le 25 novembre 2005. Signataire de ce protocole régional, le Niger ne l'a pas encore ratifié. Nous nous limiterons donc aux deux conventions ci-dessus citées. En ratifiant la CEDEF, le Niger a fait une déclaration et émis des réserves dont la portée est si considérable sur le plan des droits de la femme qu'il y a lieu de les examiner de près.

34 Archives Nationales du Niger, Répertoire des engagements internationaux de la République du Niger, p54 (notification de succession de la République du Niger)

35 JORN n° 19 du 1er octobre 1999, p 845 (Ordonnance n°99-30 du 13 août 1999)

1) La Convention sur les droits politiques de la femmes : Le but de cette convention est de mettre en oeuvre le principe d'égalité de droits des hommes et des femmes contenu dans la Charte des Nations Unies. La convention énonce dans son préambule que « toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis, et d'accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays, et désirant accorder aux hommes et aux femmes l'égalité dans la jouissance et l'exercice des droits politiques, conformément à la Charte des Nations Unies et aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l'homme ». Elle vise donc à réaffirmer sans équivoque que les droits politiques sont des droits de l'être humain, c'est-à-dire de la femme dans des conditions d'égalité avec les hommes.

En mettant surtout l'accent sur le droit de vote, le droit d'être éligible aux organismes publiquement élus, le droit d'occuper des postes publics et d'exercer des fonctions publiques, la convention a voulu renforcer le cadre juridique garantissant la participation des femmes à la prise de décision et à la gestion des affaires publiques dans les Etats parties. Cette convention bouscule donc les idées reçues et autres stéréotypes tendant à confiner la femme au foyer et que Xénophon, le philosophe grec, affirmait déjà en ces termes : « les dieux ont créé la femme pour les fonctions du dedans, l'homme pour les autres... Pour les femmes, il est honnête de rester dedans et malhonnête de traîner dehors. »36

2) La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) : constatant qu'en dépit de ces divers instruments internationaux garantissant les droits de l'homme, les femmes continuent de faire l'objet d'importantes discriminations, l'Assemblée Générale des Nations Unies adopte en 1979 la CEDEF. Le préambule de la convention rappelle notamment que « la discrimination à l'encontre des femmes viole les principes de l'égalité des droits et du respect de la dignité humaine, qu'elle entrave la participation des femmes, dans les mêmes conditions que les hommes, à la vie politique, sociale, économique et culturelle de leur pays, qu'elle fait obstacle à l'accroissement du bien-être de la société et de la famille et qu'elle empêche les femmes de servir leur pays et l'humanité dans toute la mesure de leurs possibilités ».

Elle fait obligation aux gouvernements de mettre fin à toute discrimination dans la vie publique, familiale, sociale, mais aussi dans la pratique coutumière. En devenant partie à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, un État contracte l'obligation d'aligner sa législation et sa pratique sur les dispositions de cet

36 Xénophon, cité par Hamani Abdou, op. cit. p 9

instrument. Les parties doivent observer de jure comme de facto ces dispositions qui concernent l'ensemble des droits - civils, culturels, économiques, politiques et sociaux - garantis aux femmes par la Convention. Ainsi, les États sont tenus d'assurer l'égalité entre hommes et femmes devant la loi, et dans les domaines suivants : participation à la vie politique, éducation, santé, droit de la famille.

Les articles 7 et 8 font expressément obligation aux Etats parties non seulement d'éliminer toute discrimination à l'égard des femmes dans la vie publique mais également de leur assurer dans des conditions d'égalité avec les hommes, la jouissance de l'ensemble de leurs droits politiques. Les États sont tenus de soumettre périodiquement au Comité des Nations unies sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes un rapport sur les mesures adoptées pour donner effet aux dispositions de la Convention. L'article 4 de la convention considère que « l'adoption par les Etats parties de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l'instauration d'une égalité de fait entre les hommes et les femmes n'est pas considérée comme un acte de discrimination ».

L'Assemblée Générale a, par la suite, adopté un Protocole facultatif à la Convention entrée en vigueur le 22 décembre 2000 et qui permet aux femmes victimes de discriminations fondées sur le sexe de soumettre des plaintes, individuellement ou collectivement, au Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Le Niger qui a émis d'importantes réserves à la Convention, ne ratifiera ce protocole qu'en 2004 à travers la loi n° 2004-09 du 30 mars 2004.

3) Les réserves de la République du Niger à la CEDEF : par l'ordonnance n° 99-30 du 13 août 1999 autorisant l'adhésion du Niger à la CEDEF, le Gouvernement de la République du Niger a émis cinq (5) réserves et fait une déclaration (cf. Annexe 1). A travers ces réserves, le Niger écarte l'application des dispositions suivantes de la CEDEF : article 2 - d, f ; article 5 -a ; article 15 - 4 ; article 16 -1-c, 1-e, et 1-g.

Ces réserves portent essentiellement sur le droit de la famille mais leur portée est générale. Examinons les trois (3) premières qui ont un lien direct avec l'objet de notre analyse.

· Réserve à l'article 2 alinéas d et f de la Convention : « Le gouvernement de la République du Niger émet des réserves à l'égard des alinéas d et f de l'article 2 relatifs à la prise de mesures appropriées pour abroger toute coutume et pratique qui constituent une discrimination à l'endroit de la femme ; en particulier en matière de succession ».

· Réserve à l'article 5-a de la Convention : « Le gouvernement de la République du Niger émet des réserves en ce qui concerne la modification des schémas et modèles de comportements socioculturels de l'homme et de la femme ».


· Réserves à l'article 15-4 de la Convention : « Le gouvernement de la République du Niger déclare qu'il ne pourrait être lié par les dispositions de ce paragraphe notamment qui concernent le droit de la femme de choisir sa résidence et son domicile, que dans la mesure où ces dispositions ne concernent que la femme célibataire ».

Par ces réserves le Niger exclut la possibilité de prendre aucune mesure législative pour abroger toute coutume et pratique qui constituent une discrimination à l'endroit de la femme. Le gouvernement de la République du Niger refuse de bousculer les traditions culturelles et les modèles de société qu'elles ont engendrés. Il maintient la persistance des traditions qui consacrent la prééminence de l'homme dans la détermination de la résidence ou du domicile conjugal.

Ces réserves sont manifestement contraires à l'objet même de la convention. Selon l'Association des Femmes Juristes du Niger (AFJN), « en excluant la possibilité de prendre des mesures législatives pour abroger toute coutume ou pratique qui constitue une discrimination à l'endroit des femmes, le Niger ampute la CEDEF de beaucoup de normes égalitaires et de ce fait, laisse persister des discriminations à l'égard des femmes. »37

Le gouvernement en est pleinement conscient car selon la Direction de la Promotion de la Femme au Ministère du Développement Social, de la Population, de la Promotion de la Femme et de la Protection de l'Enfant, « les réserves nigériennes vident la CEDEF d'une grande partie de sa substance normative et constituent une source de discriminations à l'égard de la femme. »38

Seule la France et le Royaume des Pays-Bas ont fait objection aux réserves du Niger sans toutefois s'opposer à l'application du traité entre l'une ou l'autre et le Niger. Mais la question de leur validité se pose d'autant plus que l'article 28 alinéa 2 de la CEDEF dispose qu' « aucune réserve incompatible avec l'objet et le but de la présente Convention n'est autorisée ». Selon la convention de Vienne sur le droit des traités, un Etat peut formuler une réserve mais il ne doit pas s'agir d'une réserve interdite par le traité ou incompatible avec l'objet et le but du traité39.

Du point de vue du droit interne nigérien, les réserves du Niger se fondent sur une logique qui ne ménage pas les principes égalitaires consacrés par la Constitution.

37 AFJN, rapport parallèle des organisations non gouvernementales nigériennes sur la conventions pour l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes, juillet 2002, p 87

38 DPF (MDS/P/PF/PE), Etude sur le statut juridique de la femme et la loi au Niger, Niamey, avril 2002, p 57

39 cf. Convention de Vienne du 13 mai 1969 sur le droit des traités, article 19 - alinéas a) et c)

Section 2 - La constitution de la Ve République du Niger : la consécration des

droits égalitaires

Adoptée par référendum le 18 juillet 1999, la constitution de la Ve République est entrée en vigueur le 09 août 1 99940. Elle institue un régime semi-présidentiel et consacre la séparation des pouvoirs entre l'Exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. Elu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq (5) ans, le Président de la République est le Chef de l'Etat, garant de l'indépendance nationale, de l'unité nationale, du respect de la constitution et des traités et accords internationaux. Il nomme le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, sur une liste de trois (3) personnalités proposées par la majorité parlementaire.

Le pouvoir Législatif est, selon les dispositions de l'article 66 de la Constitution, exercé par une chambre unique dénommée Assemblée Nationale dont les membres portent le titre de Député. L'Assemblée Nationale vote les lois, consent l'impôt et contrôle l'action du Gouvernement. Le pouvoir judiciaire, indépendant des deux autres, est exercé par la Cour Constitutionnelle, la Cour Suprême, les cours d'appel et les tribunaux créés conformément à la Constitution.

La Constitution consacre le principe égalitaire entre les hommes et les femmes dans la jouissance de leurs droits(A) même si la pratique est plus nuancée, car certaines normes discriminatoires évoluent aux côtés de la constitution (B).

A- Les droits politiques de la femme dans la Constitution

Il n'est pas redondant de rappeler que le préambule de la Constitution de la Ve République proclame l'attachement du Niger aux principes de la démocratie pluralistes et aux droits de l'Homme définis par la Déclaration universelle des droits de l'Homme et la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.

La Constitution « assure à tous l'égalité devant la loi sans distinction de sexe, d'origine sociale, raciale, ethnique ou religieuse .»41 Le principe de l'égalité a une base constitutionnelle et tous les droits reconnus aux hommes le sont également pour les femmes.

Les fonctions présidentielles sont ouvertes aux femmes dans des conditions d'égalité avec les hommes car l'article 36, alinéa 2 dispose : « est éligible à la présidence de la République toute nigérienne ou tout nigérien de nationalité d'origine âgé de quarante (40) ans au moins, jouissant de ses droits civils et politiques. » Les postes de ministres, députés

40 Décret n°99-320 / PCRN du 09 août 1999

41 Article 8 constitution du 09 août 1999.

etc. sont tout aussi ouverts de façon égalitaire aux femmes et aux hommes. Le droit de vote est également garanti dans les mêmes conditions d'égalité aux femmes et aux hommes.

Le titre II de la Constitution consacré aux droits et devoirs de la personne humaine emploie fréquemment le mot « personne » pour désigner les bénéficiaires des droits proclamés. Ce qui a l'avantage de lever toute équivoque quant au genre. L'article 23 par exemple est ainsi formulé « toute personne a droit à la liberté de pensée, d'opinion, d'expression, de conscience, de religion et de culte ». Les libertés d'association et de réunion sont reconnues dans les mêmes conditions, c'est-à-dire sans faire référence au genre.

L'article 10 dispose que « la personne humaine est sacrée. L 'Etat a l'obligation absolue de la respecter et de la protéger. Il lui garantit un plein épanouissement ». La constitution impose donc à l'Etat une obligation positive non seulement de respecter tous les êtres humains comme tels, mais également de les protéger contre toute atteintes à leur vie, à leur biens et à leurs droits. L'Etat doit par ailleurs garantir à la personne humaine (femme et homme) « un plein épanouissement ». L'iniquité, l'inégalité et l'injustice étant sources de frustration, de traumatisme et de souffrance, l'Etat a une forte obligation de les éliminer au nom du puissant but constitutionnel qui est de réaliser le plein épanouissement de toutes les citoyennes et de tous les citoyens dans des conditions d'égalité.

L'on peut donc affirmer que toute discrimination basée sur le sexe dans la jouissance des droits est contraire à la Constitution de la Ve République. Mais force est de constater que dans la réalité certaines pratiques et mesures sont soit discriminatoires, soit de nature à rompre l'équité entre les genres.

B - Les normes contraires à la constitution

Le poids des traditions et l'influence de la religion laissent cohabiter la Constitution avec des règles concurrentes à ses dispositions. Selon la Direction de la Promotion de la Femme, la force des traditions et des préceptes de l'islam « est tellement vive que les responsables politiques même les plus acquis à la nécessité de faire de la promotion de la femme une de leurs priorités, sont obligés d'agir de façon prudente afin de ménager un électorat encore attaché en majorité aux thèses inégalitaires»42. Si cette situation génératrice de discrimination est beaucoup plus marquée en droit de la famille, il n'en demeure pas moins qu'elle influence la jouissance des droits politiques des femmes. Certaines dispositions légales sont manifestement sources de discriminations à l'égard des femmes et donc contraires à la constitution du 9 août qui consacre sans ambiguïté le principe de l'égalité entre les genres

42 DPF (MDS/P/PF/PE), Op. cit., p 63

dans la jouissance des droits. Il est donc important d'examiner ces normes et de ressortir leur impact potentiel sur la condition politique des femmes.


· Accès des femmes aux emplois publics : Si le Statut général de la fonction

publique et le code du travail nigériens n'instituent aucune discrimination à l'égard des femmes, il y a lieu toutefois de relever l'existence d'une dérogation susceptible de conduire à des discriminations dans l'Ordonnance n°89-18 du 8 décembre 1989 portant approbation du Statut général de la fonction publique. L'article 2 de cette Ordonnance dispose « qu'en ce qui concerne certains corps et en raison de leur caractère technique ou des attributions et nécessités qui leur sont propres, les statuts particuliers peuvent déroger à certaines dispositions du présent statut incompatibles avec le fonctionnement normal desdits corps ».

En effet, cette dérogation peut légalement limiter ou interdire l'accès à certaines fonctions aux femmes non pas pour des raisons de protection de la femme ou de la maternité mais tout simplement en raison par exemple, de la technicité desdites fonctions. L'absence d'une définition précise des notions de « caractère technique » et de « nécessités » laisse la porte ouverte à d'éventuelles interprétations abusives.

Par ailleurs selon l'article 223 du Code Civil nigérien, la femme peut exercer une profession séparée de celle de son mari, à moins que ce dernier ne s'y oppose. Ce texte est discriminatoire car il octroie au mari un droit d'opposition au travail de la femme. Cela est d'autant plus grave que l'article 223 alinéa 2 ajoute que « les engagements pris par la femme dans l'exercice de cette profession sont nuls à l'égard du mari si les tiers avec lesquels elle contracte ont personnellement connaissance de l'opposition au moment où ils traitent avec l'épouse. »

La claustration pratiquée dans certains milieux musulmans et qui consiste à cloîtrer la femme mariée dans le domicile conjugal avec une restriction de ses déplacements et de ses contacts soumis à l'autorisation préalable de l'époux empêche à la femme soumise à ce régime d'exercer toute activité régulière externe au foyer. La participation à la vie associative, l'engagement politique et l'exercice d'un emploi salarié et de toute autre responsabilité au sein de la communauté deviennent difficile des ces conditions.

Au niveau des institutions traditionnelles, les possibilités offertes aux femmes pour occuper certaines fonctions demeurent quasiment nulles. Les fonctions de sultans, chefs de provinces, chefs de cantons ou de groupements, chefs de villages ou de tribus, chefs de quartiers qui sont les instances coutumières de prise de décision, sont exclusivement réservées

aux hommes. Cette discrimination qui trouve son fondement dans le droit coutumier43, a été consacrée par l'article 7 de l'ordonnance n°93-23 du 30 mars 1993 portant statut de la chefferie traditionnelle du Niger qui dispose que « tout nigérien d'une collectivité traditionnelle ou coutumière donnée, peut être candidat à la chefferie de la collectivité considérée, s'il est en droit d'y prétendre selon la coutume ». L'emploi du masculin « tout nigérien » prouve que ces fonctions sont l'apanage des hommes. En tout état de cause, l'article 7 de l'ordonnance susvisée a fait un renvoi à la coutume nigérienne. Or selon les coutumes applicables au Niger, seuls les descendants mâles des chefs traditionnels peuvent être candidats à la chefferie d'une collectivité coutumière considérée.


· Les réserves du Niger à la CEDEF : Les réserves du Niger à la Convention

sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes heurtent à bien d'égards les dispositions de la Constitution du 9 août 1999, notamment l'article 8 qui consacre l'égalité de toutes les personnes devant la loi et le titre II traitant des droits et devoirs de la personne humaine.

Ces réserves se résument au refus :

- de prendre des mesures appropriées pour abroger toute coutume et pratique qui constituent une discrimination à l'endroit de la femme ;

- de modifier les schémas et modèles de comportement socioculturels de l'homme et de la femme en vue d'éliminer les préjugés et pratiques coutumières fondées sur l'idée de l'infériorité de la femme ;

- de reconnaître le droit de la femme de choisir sa résidence et son domicile ;

- d'accorder les mêmes droits et responsabilités au cours du mariage et lors de sa dissolution, les mêmes droits de décider librement et en connaissance de cause du nombre et de l'espacement des naissances.

Cela est tout d'abord contraire aux articles 2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples auxquels font précisément référence le préambule de la Constitution de la Ve République. Ces réserves sont également incompatibles avec les articles 8 et 10 de la Constitution qui garantissent l'égalité, le respect et la protection de la personne humaine ainsi que son plein épanouissement.

Toutes ces normes sont antérieures à la Constitution mais elles produisent ou sont potentiellement en mesure de produire encore des effets alors qu'elles doivent s'éteindre du fait même de la contrariété avec la loi fondamentale. Il faut néanmoins souligner que sous la

43 Il s'agit ici du droit coutumier nigérien

Ve République des réformes ont été entremise pour adapter l'environnement juridique d'une manière générale aux exigences d'un Etat moderne, d'un Etat de droit.

Chapitre 2 : La traduction des droits politiques de la femme à travers la loi sous la Ve République

C'est notamment à travers la transposition des engagements internationaux dans le droit interne et les lois d'application des principes et objectifs constitutionnels supérieurs qu'un Etat peut le mieux garantir le respect et la jouissance des droits de l'homme. Il ne suffit pas de ratifier les conventions internationales et d'adopter les principes de droits de l'homme comme normes constitutionnelles ; encore faudrait-il créer un cadre propice à la mise en oeuvre des droits reconnus. Les droits politiques sont nécessaires au fonctionnement de toute démocratie. C'est certainement ce qui explique l'évolution de l'encadrement législatif des droits politiques de la femme sous la Ve République, le plus long et stable régime démocratique du Niger moderne. Cette évolution est certes importante mais elle est loin d'être suffisante. Néanmoins, à ce niveau de la réflexion, nous allons nous contenter de mettre en lumière les textes majeurs relatifs aux droits politiques à savoir le code électoral d'une part (section 1) et la loi dite sur le quota d'autre part (section 2).

Section 1 - Le code électoral : des principes égalitaires pour une compétition inéquitable

L'Ordonnance n°99-37 du 04 septembre 1999 portant code électoral modifiée par la loi n°2003-32 du 17 juillet 2003 organise les modalités de préparation, de déroulement et de détermination des résultats des élections politiques et les règles applicables au référendum sous la Ve République au Niger.

L'ordonnance précitée précise à son article 6 que « sont électeurs, les nigériens des deux sexes de dix-huit (18) ans accomplis au jour du scrutin ou mineurs émancipés, jouissant de leurs droits civiques et politiques et n'étant dans aucun cas d'incapacité prévu par la loi. » Conformément à la Constitution, le droit d'être électeur est reconnu aux femmes dans des conditions d'égalité avec les hommes. Par rapport aux conditions d'éligibilité et à la composition des listes électorales, cette loi énonce des dispositions générales applicables indistinctement du sexe.

Autrement dit cette ordonnance, qui est pourtant postérieure à l'Ordonnance n°99-30 du 13 août 1999 par laquelle le Niger faisait acte d'adhésion à la CEDEF, n'a pas voulu modifier le statu quo dans les rapports déséquilibrés entre les genres. Aucune disposition de cette ordonnance n'envisage un traitement spécifique propre à prendre en compte la situation particulière des femmes qui « sont les plus vulnérables parce qu'elles sont les moins instruites et les moins capables de mobiliser les moyens leur permettant d'utiliser toutes leurs

potentialités »44. Dans les conditions que connaissent les femmes nigériennes, poser des principes généraux insensibles aux genres ne permet pas d'assurer l'équité ni dans les compétions électorales et encore moins dans la représentation nationale.

L'article 57 par exemple qui interdit les tracts et déclarations diffamatoires et injurieux ne mentionne nullement le harcèlement et les multiples formes d'agressions dont les femmes candidates peuvent être l'objet en raison uniquement de leur sexe. Une telle disposition aurait dû attirer l'attention des candidats adversaires ainsi que leurs sympathisants sur l'importance de la protection spécifique à laquelle les femmes ont droit particulièrement en période électorale.

La loi n°2003-32 du 17 juillet 2003, modifiant et complétant l'ordonnance du 04 septembre 1999 portant code électoral a amélioré la représentation des femmes au sein de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Cette loi intervenue après l'adoption de la loi sur le quota dans un contexte où les organisations féminines revendiquent activement leur place dans la conduite des affaires nationales, réserve le poste de Deuxième Vice- Président de la CENI à une représentante des collectifs des associations féminines. Elle prévoit également une place de membre de la CENI à une représentante des associations féminines et une place à une représentante la Direction de la Promotion de la Femme. La loi ne définit toutefois pas comment assurer la pérennité de cette dernière place face aux multiples réorganisations dont font l'objet les ministères et les services centraux.

La loi du 17 juillet 2003 a aussi ramené de cinq (5) à deux (2) kilomètres la distance maximale entre le lieu de résidence et le lieu d'implantation du bureau de vote. Ce qui est susceptible d'encourager le vote des femmes en particulier en milieu rural où elles sont accablées par une charge de travail journalière importante.

Mais cela ne va pas résoudre le problème des femmes vivant sous le régime de la claustration qui est une forme de réclusion imposée par le mari. Interdites de sortir, ces femmes sont représentées au bureau de vote par leur mari qui vote à leur place grâce au mécanisme du vote par procuration. Ce choix est-il véritablement libre au sens de l'article 63 du code électoral qui dispose que « le choix de l'électeur est libre. Nul ne peut être influencé dans son choix par la contrainte » ? L'analyse faite dans une étude de l'Unicef sur la situation des femmes au Niger à ce sujet en 1994 conserve toute sa pertinence et sa vigueur dans le contexte de la Ve République. Le droit de vote, « bien que reconnu explicitement aux femmes (...) n'est pas exercé par celles soumises à la claustration. Celles-ci se retrouvent

44 Cabinet du Premier Ministre de la République du Niger, Stratégie de réduction de la pauvreté, Niamey, janvier 2002, p 45

littéralement privées de leur droit de vote du fait d'un recours abusif au vote par procuration bénéficiant très largement à leurs conjoints. Malheureusement avec le vote par procuration, les femmes soumises à la claustration, et même de très nombreuses autres qui ne le sont pourtant pas, demeurent d'éternelles muettes, car force sociale recluse, sans voix ni opinion politiquement efficiente.»45 Cette situation ignorée par le code électoral représente, à n'en point douter, un véritable défi aux libertés et à la démocratie.

En élevant de dix (10) millions à quinze (15) millions de francs CFA la participation aux frais électoraux pour les élections présidentielles, la loi modifiant le code électoral est susceptible de retarder encore l'émergence d'une candidature féminine à la fonction suprême. Si par cette nouvelle disposition, le législateur a voulu limiter les risques de candidatures pléthoriques voire fantaisistes pour l'élection du Président de la République, l'on ne peut objectivement ignorer que dans la société nigérienne, les femmes ont plus de difficulté à remplir cette condition que les hommes.

En effet selon le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP), « la pauvreté au Niger a un visage féminin ».46 Et le DRSP explique que les discriminations dont sont victimes les femmes « sont relevées aussi bien dans les secteurs formels que dans les secteurs informels et se rapportent aux taux d'occupation des femmes par rapport à ceux des hommes, aux écarts entre les deux genres en ce qui concerne les revenus, à la surcharge de travail des femmes, à leur statut juridique inadéquat, à la persistance des pesanteurs socioculturelles qui influencent d'une façon ou d'une autre tous les domaines de la vie économique et sociale des femmes ; elles sont marginalisées dans le partage des moyens et des bénéfices du développement. »47 On ne peut être plus clair que le Cabinet du Premier Ministre lui-même ! La conséquence logique de cette analyse pertinente publiée en 2002, c'est-à-dire un an avant la révision du code électoral, aurait été le réaménagement des conditions financières de la participation des femmes à toutes les élections ; qu'elles se présentent sous la bannière d'un parti politique ou comme candidates indépendantes.

Même la loi n°2002-0 12 du 11 juin 2002 portant principes fondamentaux de la libre administration des régions, des départements et des communes et leurs ressources, adoptée trois (3) ans après l'adhésion du Niger à la CEDEF, n'a rien prévu pour donner aux femmes un rôle accru dans la conduite des affaires locales. A côté des membres élus des conseils dont la désignation par voix d'élection obéit à la loi sur le quota, il y a les membres de droit qui ont

45 UNICEF, Analyse de la situation des femmes et des enfants au Niger, Gubler SA, Lengnau (Suisse), 1994, p 58

46 Cabinet du Premier Ministre de la République du Niger, Op. cit., p 42

47 Ibid. p43

une voix consultative. Elle fait des députés et des chefs traditionnels des membres de droit des conseils mais ne prévoie aucune place pour les structures féminines. Quand on sait que tous les chefs traditionnels sont des hommes, il y a manifestement une rupture dans l'équité de la représentation des genres au niveau des institutions traditionnelles. Le législateur a-t-il pensé que la loi sur le quota était suffisante pour résoudre le problème de la représentation des genres et de la participation de la femme ?

Section 2 - La loi n°2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au gouvernement et dans l'administration de l'État

Cette loi marque un changement de taille dans l'encadrement juridique des droits politiques de la femme nigérienne maintenue pendant longtemps dans une position moins favorable dans l'accès aux responsabilités les plus élevées. L'adoption de cette loi doit beaucoup à l'action des associations féminines qui, déçues des réserves émises par le Niger vidant la CEDEF de sa substance, ont exigé l'application des dispositions de la Convention que l'Etat nigérien a librement acceptées. Il faut noter qu'au Niger, dans le débat sur le statut de la femme, le Gouvernement est dans une position délicate qui l'a souvent contraint à plus de réalisme politique et donc à moins d'audace. Conscient de la nécessité d'évoluer avec la modernité propulsée par le contexte international et soutenue de l'intérieur par les associations féminines laïques revendiquant plus d'émancipation pour la femme, il ne peut ignorer les puissantes organisations musulmanes qui ne se retrouvent pas dans les nouvelles idées et valeurs véhiculées par le mouvement féministe. De ce point de vue l'adhésion du Niger à la CEDEF et la loi sur le quota peuvent être considérées comme un pas décisif vers l'équité entre les genres dans l'exercice des responsabilités et la gestion des affaires publiques tant au niveau national qu'à l'échelle locale.

Communément appelée loi sur le quota, la n°2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au gouvernement et dans l'administration de l'État découle d'une volonté de mettre en oeuvre les engagements de l'Etat du Niger dans le sens d'éliminer certaines discriminations basées sur le sexe. En effet la loi sur le quota vise la Constitution, la déclaration universelle des droits de l'homme, la convention sur les droits politiques de la femme48 et la CEDEF. Bien que cette loi ne cible pas spécifiquement les

48 Dans ses visas, la loi fait plutôt référence à la convention sur les droits Publics de la femme de 1952. Nos recherches ne nous ont pas permis de confirmer l'existence d'une telle convention. Nous en avions déduit qu'il s'agissait probablement de la Convention sur les droits politiques de la femmes ouverte à la signature et à la ratification par l'Assemblée générale de l'ONU dans sa résolution 640 (VII) du 20 décembre 1952 et à laquelle le Niger fait acte de succession le 07 décembre 1964.

femmes, elle a en réalité été adoptée en leur faveur. Son article 1er précise qu'elle est instituée à titre transitoire. Ce qui est d'ailleurs conforme à l'article 4-1 de la CEDEF qui prévoit que « l'adoption par les Etats parties de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l'instauration d'une égalité de fait entre les hommes et les femmes n'est pas considérée comme un acte de discrimination tel qu'il est défini dans la présente Convention, mais ne doit en aucune façon avoir pour conséquence le maintien de normes inégales ou distinctes; ces mesures doivent être abrogées dès que les objectifs en matière d'égalité de chances et de traitement ont été atteints. »

Aux termes de l'article 2 de la loi n.2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au gouvernement et dans l'administration de l'Etat : « le quota est une mesure d'action positive visant à permettre à chaque citoyen sans distinction aucune :

- de prendre part à la direction des affaires publiques soit directement soit par l'intermédiaire de représentants élus ;

- d'accéder dans les conditions d'équité, aux fonctions publiques. »

Après avoir défini la notion de quota, la loi fixe le pourcentage minimum de représentation des genres exigé pendant les élections législatives ou locales, ou lors de la nomination des membres du gouvernement et la promotion aux emplois supérieurs de l'Etat.

L'article 3 dispose que lors des élections législatives ou locales, les listes des partis politiques, groupements de partis politiques ou regroupements de candidats indépendants, doivent comporter des candidats titulaires de l'un et l'autre sexe. L'alinéa 2 de cet article stipule que « lors de la proclamation des résultats définitifs, la proportion des candidats élus de l'un ou de l'autre sexe ne doit pas être inférieure à 10 %. » Ainsi la loi fait obligation aux partis et regroupements de candidats indépendants d'assurer une représentation minimale des genres.

Le Décret n°2001-056/PRN/MDSP/PF/PE du 28 février 2001 portant application de la loi sur le quota précise que les partis politiques et regroupements de candidats indépendants doivent « inclure obligatoirement des candidats de l'un et de l'autre sexe de manière à obtenir lors de la proclamation des résultats définitifs une proportion supérieure ou égale à 10 % des candidats de l'un et de l'autre sexe. » Il ajoute que toute proclamation de résultats faite en violation du principe du quota de 10 % peut être attaquée devant la Cour Constitutionnelle. Cette disposition permettra de bannir la situation de déséquilibre aberrant connu au niveau de la première Assemblée Nationale de la Ve République où seule une femme siégeait parmi 83 députés.

Les enjeux politiques des élections législatives et locales mais aussi leurs coûts font que les partis politiques sont enclins à observer rigoureusement ces dispositions. Aucun parti ne prendra le risque insensé de voir ses listes rejetées ou ses résultats invalidés pour défaut ou insuffisance de la représentation des genres. Dans la pratique le système de quota a bien fonctionné et a permis d'améliorer nettement la représentation des femmes à l'Assemblée Nationale et dans les conseils municipaux.

Quant à l'article 4 de la loi sur le quota, il énonce que « lors de la nomination des membres du gouvernement et de la promotion aux emplois supérieurs de l'État, la proposition des personnes de l'un et de l'autre sexe ne doit pas être inférieure à 25 % ». Cela signifie que le seuil minimal de représentation des genres exigé dans le Gouvernement et les emplois supérieurs de l'Etat est de 25 % contre 75 %. A contrario, aucun sexe ne doit par conséquent dépasser le plafond de 75 % de représentation dans les emplois supérieurs de l'Etat et au Gouvernement.

L'Ordonnance n°99-57 du 22 novembre 1999, déterminant la classification des emplois supérieurs de l'Etat et les conditions de nomination de leurs titulaires, distingue les emplois à caractère politique pourvus à la discrétion des autorités compétentes et les emplois dits techniques dont les nominations obéissent à des critères techniques et doivent être motivées. Mais la formule de l'article 6 de cette ordonnance est suffisamment vague pour tempérer les critères techniques et maintenir le statu quo. Selon cette disposition, « le pouvoir de nomination aux emplois techniques visés aux articles 4, 5 et 6 de la présente ordonnance s'exerce sans discrimination de sexe et sans préjudices de méthodes de recrutements et autres dispositions relatives à l'organisation de la carrière contenues dans les statuts régissant les cadres et corps des agents de l 'Etat et ou ses démembrements. » 49

Quelles que soient les « méthodes de recrutement », la loi sur le quota impose le quota à tous les emplois supérieurs, qu'ils soient à caractère politique ou technique. Les méthodes de recrutements (concours, promotions directes, etc.) doivent être sensibles au quota de manière à rendre conformes à la loi toute décision de nomination.

L'article 6 du décret d'application de la loi sur le quota (n°2001-056/PRN/MDSP/PF/PE), dispose que toute nomination faite en violation du seuil de 25 % de représentation de l'un ou l'autre sexe lors de la nomination des membres du Gouvernement et aux emplois supérieurs de l'Etat peut être attaquée devant la Chambre administrative de la Cour Suprême. Cependant nous verrons plus loin que, contrairement au recours dans le cadre du contentieux électoral

49 Article 6 Ordonnance n°99-57 du 22 novembre 1999

(devant la Cour Constitutionnel), le contentieux administratif relatif aux actes de nomination des membres du gouvernement est assez délicat et complexe. Dans la réalité le quota de 25 % de représentation au Gouvernement et dans les emplois supérieurs de l'Etat n'est toujours pas respecté même si l'on peut constater que le nombre de places acquises par les femmes s'est accru.

Si la loi sur le quota a eu pour effet d'améliorer la représentation des femmes, il faut souligner qu'elle n'a rien prévu pour garantir la participation des femmes. Les femmes peuvent être à l'Assemblée ou siéger dans les conseils municipaux sans grande influence dans la prise de décision. Le système de quota peut finalement faire des femmes un groupe minoritaire dans des assemblées d'hommes où la domination de ces derniers renforcée par les prédispositions culturelles et les préjugés sociologiques, n'aura pas beaucoup de peine à s'imposer.

L'on est par ailleurs contraint de compter sur la bonne volonté des hommes leaders des partis pour ne pas limiter les femmes à la proportion de 10 % dans les fonctions électives qui constituent, selon la loi sur le quota, un minimum et non un plafond. A défaut de la parité qui est le meilleur gage d'une représentation et d'une participation équilibrées des deux sexes, la loi aurait dû aller plus loin en exigeant plus d'équité entre les genres dans la mise en place des bureaux des conseils, Assemblée et commissions. La limitation du quota aux élections législatives et locales, fait échapper un grand nombre d'institution de la République au critère minimum de représentation des genres car leur mode de désignation ne rentre ni dans le champs des élections au sens du code électoral ni dans celui de la nomination aux emplois supérieurs de l'Etat.

Le cadre légal ne peut ignorer le poids des traditions et les survivances d'une répartition inégalitaire des rôles dans une société qui a tendance a réserver les rôles clefs aux hommes. Les femmes continuent certes à se battre pour avancer et protéger chaque parcelle de responsabilité acquise mais elles sont après tout les produits de cette société que la loi sur le quota vise à réformer. Il y a donc lieu d'envisager de meilleures garanties pour la représentation et la participation politiques des femmes.

DEUXIEM E P A R T I E :

L'exercice des droits politiques de la femme au Niger : les garanties dans le partage des responsabilités et leurs limites

Selon Frédéric Sudre, « la proclamation internationale des droits de l'Homme est une chose, la garantie internationale du respect de ces droits en est une autre. »50 Cette analyse peut également être transposée dans un contexte national comme celui du Niger.

L'affirmation des droits politiques de la femme est importante mais elle ne suffit pas à en garantir la jouissance. Les droits politiques examinés plus haut doivent produire des effets. Il faut convenir avec Emmanuel Decaux que « les droits de l'homme ne sont pas seulement un idéal abstrait, ils constituent des droits réels »51. L'exercice et la jouissance des droits politiques de la femme garantis par les lois et les conventions internationales ratifiées par le Niger peuvent se mesurer à la représentation des genres dans les institutions et l'Administration de l'Etat. Elle se mesure également à la participation des femmes dans la vie des partis politiques et les mouvements de la société civile.

Le contexte d'une démocratie jeune et dynamique qui est celui de la Ve République offre un cadre idéal à l'engagement politique au sens large. Comme tous les droits de l'homme, les droits politiques de la femme ont besoin de garantie, c'est-à-dire l'existence de mécanismes de protection qui constituent l'ultime recours des victimes des violations face à l'arbitraire et aux abus.

Cette partie sera donc consacrée à l'examen des garanties des droits politiques de la femme (Chapitre 1) et à l'analyse de la représentation politique de la femme sous la Ve République (chapitre 2).

50 Sudre Frédéric, « les mécanismes et les techniques de garanties internationale des droits : les mécanismes quasi-juridictionnels et juridictionnels », ressources en ligne du chapitre 11 du programme DUDF, site web de la formation

51 Decaux Emmanuel, « Justice et droits de l'Homme », Revue Droits fondamentaux, N°2, janvier-décembre 2003, p 78

Chapitre 1 : Garanties des droits politiques de la femme au Niger

L'efficacité d'un droit peut être mesurée par l'adéquation entre capacités individuelles exprimant la dignité humaine et capacités institutionnelles à protéger cette dignité de toute atteinte. Autrement dit, « un système de protection des droits de l'homme n'est crédible que s 'il offre aux individus des garanties efficaces pour la protection de leurs droits. »52

Les droits politiques de la femme bénéficient de garanties comme tous les droits de l'homme. L'essentiel des garanties sont d'ailleurs communes à tous les droits de l'homme même s'il existe des organisations et des institutions spécialisées visant à la promotion de la femme.

Le thème de l'étude nous impose d'éviter de verser dans des généralités dont la valeur ajoutée n'est pas évidente pour notre argumentation. La précision que nous devons apporter à ce stade est que dans ce chapitre il ne s'agira pas de faire l'exégèse des juridictions, institutions, organisations et mécanismes mis en place pour assurer la protection des droits de l'homme. Nous ne perdrons pas de vue la spécificité du sujet (les droits politiques de la femme) ainsi que son cadre institutionnel et temporel (la Ve République). Ce chapitre sera consacré plus exactement aux mécanismes de garantie des droits politiques ayant connu une évolution dans un sens ou dans un autre ou susceptible d'être mis en oeuvre sous la Ve République.

Nous pouvons distinguer les mécanismes juridictionnels (Section 1) des mécanismes non juridictionnels (Section 2) de protection des droits politiques de la femme.

Section 1 : les garanties juridictionnelles

Les garanties juridictionnelles, précisons-le, ne sont pas spécifiques aux droits politiques de la femme. Mais la loi sur le quota en instituant le quota dans la proclamation des résultats des élections et en imposant la représentation des genres dans les nominations aux emplois supérieurs de l'Etat a conséquemment étendu le domaine de contrôle du juge électoral (A) et du juge administratif (B).

A. La Cour Constitutionnelle, juge électoral :

La Cour Constitutionnelle tient de la constitution du 09 août 1999, compétence exclusive sur le contrôle de régularité des élections présidentielles, législatives et locales. En outre « elle est juge du contentieux électoral et proclame les résultats définitifs des

52 Sudre Frédéric, Op. cit

élections. »53 Le recours pour excès de pouvoir en matière électorale est également portée devant la Cour Constitutionnelle, sans recours administratif préalable.

La Cour Constitutionnelle joue un rôle majeur dans la garantie du droit de vote et de celui d'être éligible. Aux termes de l'article 89 du code électoral, « le contrôle de la régularité des opérations électorales lors des élections présidentielles, législatives, locales et du référendum est assuré par la Cour Constitutionnelle qui statue également sur l'éligibilité des candidats et sur les réclamations. » La saisine de la cour en matière de contentieux électoral est ouverte à tout candidat, parti politique ou liste de candidats. Cette possibilité de saisine individuelle en matière électorale permet à tous les candidats, hommes et femmes, de mieux protéger leur droit contre tout abus de l'autorité administrative ou même à l'intérieur des partis politiques.

Le contrôle de l'éligibilité des candidats et la proclamation des résultats permettent véritablement à la cour de veiller au respect de la loi n°2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au gouvernement et dans l'administration de l'État. Le principal élément de garantie à ce niveau porte sur un critère de contrôle préalable des listes de candidats basé sur les genres et le critère fondamental à la proclamation des résultats qui est le quota. Le critère basé sur les genres est institué par l'article 3 de la loi sur les quota qui exige que les listes présentées par les partis ou regroupements de candidats indépendants « doivent comporter des candidats titulaires de l'un et de l'autre sexe ».

Ainsi la cour constitutionnelle peut rejeter une liste qui n'est pas mixte du point de vue des genres. Aucun parti politique ou regroupement de candidats se présentant aux élections législatives et locales ne peut soumettre une liste de candidats d'un seul sexe, sous peine de voir sa liste rejetée par la haute juridiction. Quant au système de quota, il permet, lors de la proclamation des résultats, de sanctionner un parti politique, un groupement de partis ou un regroupement de candidats indépendants dont la liste des élues ne permet pas d'assurer une représentation des genres sur la base du critère minimum de 10 % pour l'un ou l'autre sexe.

Depuis la publication de la loi sur le quota en 2000, la cour constitutionnelle qui vise cette loi dans ses arrêts relatifs aux élections législatives et locales, n'a pas eu l'occasion de se prononcer sur un cas de violation des dispositions de cette loi. Les élections législatives et locales de 2004 ont été l'occasion de mettre en oeuvre le système de quota au niveau des postes électifs concernés. En réalité le formidable travail de sensibilisation menée par les associations et Organisations Non Gouvernementales (ONG) sur la loi sur le quota a éveillé

53 Constitution du 09 août 1999, article 103, alinéa 2

les consciences. En plus les partis politiques ont respecté les quota. S'agit-il d'une franche adhésion au principe du quota ou plutôt de la crainte de la sanction ? Il y en a probablement des deux raisons mais la dissuasion de la cour est la meilleure garantie car elle est indépendante de toute contingence. Le contrôle de la cour et la possibilité de recours individuel font que les partis prennent leurs précautions pour assurer qu'un ou des sièges potentiellement gagnés dans les urnes ne leur échappent pour non conformité des listes au principe du quota. La garantie juridictionnelle de la Cour a, à ce niveau, pleinement fonctionné.

Mais le phénomène de révisions intempestives de la loi constitue une menace qui risque d'atténuer la force de la garantie du juge électoral. Le 29 avril 2004, la Cour Constitutionnelle rend huit (8) arrêts relatifs à l'éligibilité des candidats aux élections municipales. A travers ces arrêts, la Cour invalide plusieurs candidatures et rejette conséquemment un grand nombre de listes présentées par les partis politiques dans plusieurs circonscriptions. Les motifs de ces rejets portent essentiellement sur la constitution incomplète des dossiers, l'âge des candidats et des cas de double candidature pour une même personne se présentant à la fois sur deux listes différentes. Les élections municipales ont lieu au scrutin de liste et l'inéligibilité d'un seul candidat ou d'une candidate, entraîne ipso facto le rejet la liste sur laquelle il/elle se présente car selon l'article 136 du code électoral, « toute liste doit comprendre un nombre de candidats égal au nombre de sièges attribués à la circonscription. »

Pour faire échec à l'exécution des arrêts n° 05-2004 à 12-2004 du 29 avril 2004 rejetant un grand nombre de listes de candidats aux élections municipales, les partis politiques s'entendent pour repousser la date des élections et réviser le code électoral de manière à faire valider leur listes plus facilement. Les élections seront reportées, ce qui va donner plus de temps aux partis pour corriger les manquements constatés par la Cour Constitutionnelle.

En dépit des vigoureuses protestations de la société civile, les partis politiques, maîtres du jeu parlementaire, réussiront à faire voter une série de révisions du code électoral avec des dispositions plus souples quant aux formalités de dépôt des candidatures et aux délais. La loi n° 2004-014 du 13 mai 2004 modifiant le code électoral impose un contrôle préalable à l'autorité administrative qui reçoit les déclarations de candidature. Selon l'article 46 nouveau, « S'il est constaté des pièces manquantes dans les dossiers, il est donné la possibilité aux déposants de régulariser ceux-ci. » En outre l'alinéa 8 du même article dispose que « dans le cas où les pièces reçues ne sont pas conformes à la liste des documents énumérés, le parti

politique, groupements de partis politiques ou les candidats indépendants concernés sont aussitôt saisis [par l'autorité administrative] aux fins de régularisation. »

Ainsi les partis politiques refusent de subir les conséquences de leur négligence et de l'impréparation de leurs candidats et font désormais obligation à l'administration de contrôler leurs listes et de les inviter à apporter les corrections nécessaires. Aussi ont-ils utilisé, pour ne pas dire manipuler la loi pour rendre caduque la sanction de la plus haute juridiction de la Ve République. Cette pratique altère la garantie juridictionnelle car si dans le cas vécu, les principaux acteurs étaient tous consentants, rien n'empêche à une majorité forte à l'Assemblée Nationale de recourir à la méthode de la rectification de la loi, en matière électorale voire administrative, pour rendre sans objet un arrêt défavorable ou atténuer ses effets.

B - La Chambre administrative de la Cour Suprême, juge administratif :

Il faut préciser que la loi n° 2004-15 du 13 mai 2004 portant révision de la Constitution du 09 août 1999 érige la Chambre administrative de la Cour Suprême en Conseil d'Etat.

Selon l'article 116 bis de la constitution « le Conseil d'État est juge de l'excès du pouvoir des autorités administratives en premier et dernier ressort, des recours en interprétation et en appréciation de la légalité des actes administratifs ». Mais les dispositions transitoires de la loi citée ci-haut précise qu'en attendant la mise en place du Conseil d'Etat la chambre administrative de la Cour suprême demeure compétente pour les affaires pendantes devant elles et relevant de la compétence dévolue au Conseil d'Etat.

Le Conseil d'Etat n'étant pas encore en place, la Chambre administrative demeure donc le juge des recours pour excès de pouvoir formés contre les décisions émanant des autorités administratives. C'est pourquoi, dans le cadre de cette étude, nous considérons plutôt la chambre administrative comme le juge administratif effectif, qui protège les droits individuels des abus de l'autorité administrative.

Mais cette garantie de la chambre administrative est générale et n'est pas spécifique aux droits politiques et a fortiori ceux de la femme. Toutefois le décret d'application de la loi sur le quota offre un recours individuel contre les nominations au Gouvernement et aux emplois supérieurs de l'Etat faites en violation de la proportion minimale de 25 % pour l'un ou l'autre genre.

L'article 6 du décret n°2001-056/PRN/MDSP/PF/PE du 28 février 2001 portant modalités d'application de la loi sur le quota, dispose que « toute nomination faite en violation des dispositions de l'article 5 ci-dessus [relatif à la nomination des membres du

Gouvernement] peut être attaquée par tout intéressé devant la Chambre administrative de la Cour Suprême ».

Les décrets n° 2002-263 du 08 novembre 2002, n° 2003-284 du 24 octobre 2003 et n°2004-404 du 30 décembre 2004 portant nomination des membres du Gouvernement violent tous la loi sur le quota car le nombre de femmes dans ces différents Gouvernements est en dessous du nombre qui découlerait d'une application du quota minimum de 25 %. Le premier Gouvernement mis en place après la publication de la loi sur le quota, celui du 08 novembre 2002, comporte quatre (4) femmes sur vingt-huit (28) Ministres et Secrétaires d'Etat soit 14, 29 % de femmes contre 85,71 % d'hommes alors qu'aucun des genres ne doit être représenté en dessous du seuil de 25 % ni au-delà du plafond de 75 %.

Conformément à la loi sur le quota, le nombre minimum de femmes dans ce Gouvernement devrait être de sept (7). Le remaniement intervenu le 24 octobre 2003, n'a pas eu pour but de rendre la composition du Gouvernement plus conforme à la loi. Il n'a fait que remplacer deux hommes par des hommes, maintenant ainsi le déséquilibre dans la représentation des genres en violation de la loi sur le quota. L'actuel Gouvernement, en place depuis le 30 décembre 2004, se rapproche davantage du quota sans pour autant réaliser le but fixé par la loi. Il compte six (6) femmes Ministres représentant 23, 08 % des membres du Gouvernement.

La violation des dispositions de la loi sur la quota est encore plus critique au niveau des nominations aux emplois supérieurs de l'Etat. Cinq (5) récents décrets de nomination de cadres de commandement illustrent parfaitement cette illégalité :

- Décret n° 2006-144/PRN/MI/D du 05 avril 2006 portant nomination de

Gouverneurs des Régions : tous les quatre (4) Gouverneurs de Région nommés sont des hommes. Aucune femme ne figure parmi les huit (8) Gouverneurs de Région actuellement en fonction dans le pays, soit 100 % d'hommes

- Décret n° 2006-145/PRN/MI/D du 05 avril 2006 portant nomination des

Secrétaires Généraux des Gouvernorats : aucune femme ne figure parmi les quatre (4) hauts fonctionnaires nommés à ces postes, c'est-à-dire 0 % de femmes.

- Décret n°2006-146/ PRN/MI/D du 05 avril 2006 portant nomination des

Secrétaires Généraux Adjoints des Gouvernorats : Les cinq (5) Secrétaires Généraux Adjoints nommés sont tous des hommes, soit encore 100 % du sexe masculin.

- Décret n°2006-147 PRN/MI/D du 05 avril 2006 portant nomination des Préfets

de Département : sur une liste de vingt et deux (22) Préfets de Département nommés, l'on ne dénombre aucune femme : 0% de femmes.

- Décret n°2006-147 PRN/MI/D du 05 avril 2006 portant nomination des Chefs

de Postes Administratifs : aucune femme ne figure parmi les deux (2) personnes nommées à la tête des Postes Administratifs.

Ainsi au total trente et sept (37) cadres de commandement ont été nommés le 05 avril 2006 dont 100 % d'hommes et 0 % de femmes. L'on est donc très loin du minimum de 25 % « de l'un ou l'autre sexe » requis par l'article 4 de la loi n°2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au Gouvernement et dans l'administration de l'Etat.

En dépit du fait que toutes les nominations au Gouvernement et la plupart des nominations aux emplois supérieurs de l'Etat ne respectent pas cette disposition, aucun recours n'a encore été porté devant la Chambre administre de la Cour Suprême. La réalité est que les conditions de recours proposées par la loi sur le quota ne sont pas aussi simples que l'on pourrait l'imager à première vue. A défaut d'une jurisprudence da la Chambre, un examen de ce recours mène à une impasse au moins pour deux raisons dont l'une tenant à la forme, c'est-à-dire à la recevabilité du recours et l'autre au fond même de la matière.

D'abord il se pose la question de savoir qui a intérêt à agir. La loi dispose que toute nomination au Gouvernement et aux emplois supérieurs de l'Etat qui ne respecte pas le quota de 25 % peut être attaquée par « tout intéressé ». S'agit-il des associations de promotion de l'équité entre les genres comme les associations féminines, des autres organisations de la société civile ou des Partis politiques ? S'agit-il de tout individu ayant un intérêt particulier à une nomination ? Dans les deux cas l'intérêt à agir n'est pas aisé à établir. Il ne suffit pas par exemple pour une femme ou un homme d'avoir les qualifications requises pour être fondé à exiger l'annulation ou la réformation d'un décret de nomination de Gouverneurs ou d'Ambassadeurs.

Il y a ensuite un problème de fond lorsqu'on considère la notion d'actes de gouvernement qui sont des actes politiques pris dans les domaines qualifiés de « matières de gouvernement ». Ces actes bénéficient d'une immunité juridictionnelle qui les place en dehors de la compétence des juridictions administratives et judiciaires. Ils ne peuvent par conséquent être l'objet d'un recours en annulation.

A défaut d'une jurisprudence établie, une partie de la doctrine soutient qu'il existe une catégorie d'acte de gouvernement relatifs à l'exercice de la fonction gouvernementale et donc distincte de la fonction administrative. René Chapus considère la nomination des membres du

gouvernement comme un acte de gouvernement54 au même titre que les actes accomplis par le gouvernement dans ses rapports avec le parlement et ceux d'ordre international.

Concrètement, le décret de nominations des membres du gouvernement n'est pas susceptible de recours pour excès de pouvoir et ne peut par conséquent être attaquée devant la Chambre administrative de la Cour Suprême ni même devant le futur Conseil d'Etat. C'est sans doute ce qui a conduit la Direction de la Promotion de la femme à tirer une conclusion aussi nette que pertinente : « en ce qui concerne les nominations des membres du Gouvernement la femme et les associations féminines ne disposent d'aucun instrument juridique pour faire respecter leur droit à y être représentées suivant le quota déterminé par la loi du 07 juin 2000. »55

La garantie du recours contre les décrets de nomination des membres du gouvernement est donc une garantie plutôt déclaratoire et difficilement réalisable, en raison des problèmes de forme et de fond que poserait sa mise en oeuvre. Les droits affirmés par la loi sur le quota sont certes des droits collectifs des citoyens mais il faut bien convenir avec Frédéric Sudre que la clé de voûte de la garantie des droits de l'homme demeure la garantie de recours individuel56 qui semble bien faire défaut, du moins en pratique, dans le cas d'espèce.

Section 1 : les garanties non juridictionnelles

Le recours contentieux n'est pas la seule méthode de garantie des droits de l'homme. Les garanties non juridictionnelles concernent tous les mécanismes de réparation ou de dissuasion des violations des droits de l'homme. Au Niger, il existe toute une constellation de mécanismes, opérationnels ou non, destinés à assurer la jouissance des droits reconnus à l'homme et à la femme. Toutefois, il ne nous paraît pas d'un grand intérêt d'en faire l'inventaire car la spécificité de notre étude nous commande de recentrer la réflexion sur les droits politiques et en particulier ceux de la femme. L'analyse des mécanismes de garantie non juridictionnelle des droits politiques de la femme nous amène à distinguer les mécanismes institutionnels (A) et les mécanismes non institutionnels (B).

A - Les mécanismes institutionnels de protection des droits politiques de la femme

Par mécanisme institutionnel, il faut entendre les possibilités offertes par des institutions nationales ou internationales ayant mission ou compétence pour garantir les droits politiques de la femme nigérienne. La pratique qui a tendance à se généraliser et qui consiste

54 Chapus R., Droit administratif général, Tome 1, 9e édition, Paris, Montchrestien, 1995, pp 834-835

55 DPF (MDS/P/PF/PE), Op. cit., pp 66 - 67

56 Frédéric Sudre, Op. cit.

au niveau des institutions et de certaines autorités à nommer des conseillère en genre est certes à encourager. Mais, tout en reconnaissant l'importance du rôle de ces conseillères dans la promotion de la femme, l'on peut objectivement les considérer comme ayant vocation à garantir les droits politiques de la femme. Si de part leur expertise elles peuvent éclairer voire influencer les décideurs, elles ne jouissent d'aucune indépendance dans leur action.

C'est pourquoi nous mettons plutôt l'accent au plan national sur le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l'Enfant et la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (C.N.D.L.F) et au plan international sur le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes.


· Le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l'Enfant : Le Ministère de la Promotion de la Femme est probablement l'un des

Ministères dont la structure est la plus instable d'un Gouvernement à un autre. Mais il a, depuis 1981, toujours gardé une Direction de la promotion de la femme. Cette Direction joue un rôle important dans la conception et la mise en oeuvre des politiques du gouvernement dans le domaine de la promotion de la femme. Les études, séances de formation et de sensibilisation menées par cette Direction sur la loi sur le quota et les questions de genre contribuent à une meilleure connaissance des droits politiques de la femme. A travers cette Direction, le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l'Enfant contribue à faire évoluer les textes et les politiques dans un sens favorable à l'émancipation de la femme.

A côté de la Direction de la Promotion de la femme qui est avant tout une administration, donc une entité soumise au gouvernement, il existe un observatoire national de la promotion de la femme. Créé par le Décret n° 99-545/PCRN/MDS/P/PF/PE du 21 décembre 1999, l'Observatoire National de la Promotion de la Femme (ONPF) est chargé en réalité de coordonner et d'impulser la mise en oeuvre du plan d'action relatif à la politique nationale de la promotion de la femme. Un des objectifs de cette politique est de respecter les droits de la citoyenne dans le cadre de la démocratie. Un des résultats attendus de cet objectif est précisément : « le nombre de femmes au niveau des instances décisionnelles de l'administration et dans les structures politiques est augmentée ». L'Observatoire (ONPF) pourrait bien se servir de la loi sur le quota pour faire du plaidoyer auprès des plus hautes autorités pour une meilleure représentation de la femme au gouvernement et aux emplois supérieurs de l'Etat.

Placé sous la présidence du Ministre chargé de la promotion de la femme, L'ONPF est essentiellement composé de fonctionnaires représentants de l'administration. Les associations

et ONG de la société civile y sont sous représentées. Rattaché au Ministère de la promotion de la femme, sa composition est imprécise et il compte trois Ministres en son sein dont son Président. Comme on peut le constater, l'ONPF n'a ni le statut et le niveau d'autonomie nécessaires à son bon fonctionnement, ni la composition et la structure pour être efficace.

Cette structure qui aurait bien pu profiter du dynamisme des organisations féminines pour faire avancer le plan d'action de la promotion de la femme et faire du coup évoluer la représentation des femmes à tous les niveaux sombrent aujourd'hui dans la léthargie. L'ONPF doit être reformé pour donner plus de poids aux associations et ONG de développement et sa mission doit dépasser le cadre étroit du plan d'action pour lui permettre de surveiller et de mieux suivre l'effectivité des droits de la femme.

Comme on peut le constater, le Ministère de la promotion de la femme conçois des politiques qu'elle exécute et à ce titre contribue à l'évolution et à la connaissance des droits politiques de la femme. Mais il est moins outillé pour contrôler l'effectivité des droits politiques de la femme.


· La Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (C.N.D.H.L.F) : Créée pour la première fois au Niger sous la IV République, la CNDHLF a été prévue par la Constitution du 09 août 1999 en son article 33. Selon la loi n°98-55 du 29 décembre 1998 fixant ses attributions, la CNDHLF a le statut d'autorité administrative indépendante. Cette indépendance se reflète dans la composition de ses membres qui sont pour la plupart désignés par les organisations de la société civile à l'issue d'élections organisées en leur sein.

La CNDHLF a un mandat étendu en matière de protection des droits de l'homme en général. Sa mission est « d'assurer la promotion et la protection des Droits de l'Homme sur le territoire du Niger ; de promouvoir par tous les moyens appropriés, notamment d'examiner et de recommander aux pouvoirs publics toutes dispositions de textes ayant trait aux Droits de l'Homme en vue de leur adoption ; d'émettre des avis dans le domaine des Droits de l'Homme ; (...) de procéder à la vérification des cas de violation des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales sur le territoire de la République du Niger».57

La CNDHLF a par ailleurs des pouvoirs quasi-juridictionnels. Elle est habilitée à recevoir et à examiner des plaintes individuelles concernant des cas de violation des droits de l'homme et dispose du pouvoir d'investigation et d'enquête. Ce qui fait dire à son Président

57 Article 2 Loi n° 98-55 du 29 décembre 1998 fixant les attributions, la composition et le fonctionnement de la CNDHLF

M. Garba Lompo que « sans avoir la puissance de juger, la CNDHLF dispose de l'arme tout aussi redoutable de dissuasion et de persuasion. »58

La Commission qui s'est beaucoup illustrée sur le terrain des droits sociaux grâce notamment au recours que font les organisations syndicales constitue une voie de recours possible dans le domaine de la protection des droits politiques de la femme. Les organisations féminines ont la possibilité de recourir à la CNDHLF pour surveiller l'effectivité des droits politiques de la femme. En effet la Commission est bien placée pour faire des investigations sur la mise en oeuvre effective de la loi sur le quota surtout en ce qui concerne la représentation de la femme dans les emplois supérieurs de l'Etat.

En plus de la dissuasion que constituerait le recours à la commission, celle-ci peut, selon l'article 2 alinéa b de la loi n°98-55 du 29 décembre 1998, « donner aux pouvoirs exécutifs et judiciaires des avis sur toutes les questions relatives aux droits de l'homme », y compris donc les droits politiques reconnus aux femmes.

Le nombre et la variété des plaintes individuelles et collectives59 que reçoit la CNDHLF attestent de la confiance qu'elle gagne de plus en plus auprès des citoyens. Etant donné qu'elle dispose du pouvoir d'auto saisine, la Commission peut davantage élargir son champ d'action en s'intéressant à la représentation des femmes aux emplois supérieurs de l'Etat en s'appuyant sur les dispositions de la loi sur le quota. Cela pourrait constituer un domaine de partenariat efficace avec les organisations féminines.


· Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes : Institué par l'article 17 de la CEDEF, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine les progrès réalisés par les Etats parties dans la mise en oeuvre de la Convention. L'article 18 de la CEDEF fait obligation aux Etats parties de « présenter au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, pour examen par le Comité, un rapport sur les mesures d'ordre législatif, judiciaire, administratif ou autre qu'ils ont adoptées pour donner effet aux dispositions de la présente Convention et sur les progrès réalisés à cet égard ». Le Comité formule des recommandations générales sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, à l'intention de tous les Etats parties. Il a en outre la possibilité d'inviter les institutions spécialisées du système des Nations unies à présenter des rapports et les organisations non gouvernementales peuvent lui fournir des informations sur

58 Lompo Garba, « Communication du Président de la CNDHLF à Kinshasa », Revue semestrielle de la CNDHLF, n° 001, sans date, p11

59 Selon la revue semestrielle de la CNDHLF, plus de 30 plaintes sont enregistrées par mois.

les faits dans un pays donné soit lors des réunions du Groupe de travail pré-session ou même en séance plénière.

Le protocole facultatif qui a été ajouté à la Convention, permet aux femmes ou à des groupes d'individus victimes de discrimination fondée sur le sexe de soumettre des plaintes au Comité. En devenant parties au Protocole, les Etats reconnaissent les compétences du Comité pour recevoir et examiner ces plaintes une fois que tous les recours nationaux ont été épuisés. Entrée en vigueur le 22 décembre 2000, ce protocole a été ratifié par la République du Niger à travers la loi n° 2004-09 du 30 mars 2004.

Ainsi les femmes nigériennes, les associations et ONG disposent d'une voie de recours à travers le mécanisme de plainte individuelle auprès du comité. Mais il faut souligner que les voie de recours internes ne sont encore que très faiblement utilisées. Ce qui rend en l'état actuel des choses, difficile le recours au comité. L'utilisation optimale des voies de recours nationales et internationales ne peut s'améliorer qu'avec un engagement plus fort de la société civile et des partis politiques.

B - Les moyens de protection non institutionnels

Le rôle que jouent les partis politiques et la société civile dans la garantie des droits politiques de la femme n'est pas négligeable même s'il est loin d'être satisfaisant.


· Les associations et ONG : Depuis la marche historique des organisations féminines du 13 mai 1991 qui a forcé la participation des femmes aux travaux de la Commission Nationale Préparatoire de la Conférence Nationale, la composante féminine de la société civile nigérienne a, pour ainsi dire, marqué son territoire. Le nombre des associations et la variété de leurs domaines d'intervention est un gage pour les femmes de jouir pleinement de leur liberté d'association et de se donner les moyens de s'exprimer et d'aborder les problèmes d'intérêt général ainsi que ceux qui leurs sont spécifiques.

Il existe au Niger plusieurs associations et ONG de défense et de promotion des droits de la femme. Le nombre de ces associations offre aux femmes une opportunité de s'engager davantage dans le mouvement et de faire entendre leur voie sur leurs préoccupations ainsi que les politiques nationales. En raison certainement des problèmes que posent la satisfaction des besoins pratiques ou primaires de la majorités des femmes, les ONG et associations se sont surtout attaquées aux questions relatives à l'allègement des tâches domestiques, aux activités génératrices de revenus, aux actions de salubrité, à l'octroi de crédits, etc.

D'autres ONG s'inscrivent plutôt dans le renforcement des capacités d'organisations à la base dans le sens d'une plus grande responsabilisation des femmes dans leurs ménages et à l'échelle de la communauté.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, dans le contexte nigérien, la participation politique effective des femmes est tributaire de la satisfaction de ces besoins pratiques. Plusieurs études montrent que les tâches domestiques occupent une très grande partie de la journée de la femme. Ce qui lui laisse très peu de temps pour des activités associatives ou politiques. Le défi de la conciliation des activités politiques et le rôle de mère ne semble pas d'ailleurs être une spécificité nigérienne même s'il se pose ailleurs en des termes bien différents. Selon Mme Elisabeth Guigou, Ancienne Ministre française, « même lorsque leur compagnon prend sa part du fardeau, c'est quand même sur les femmes que repose la responsabilité principale de la vie de tous les jours. Or le quotidien est particulièrement difficile pour une femme en politique, car c'est l'une des activités qui respectent le moins les rythmes du temps privé. »60

Certaines ONG et associations comme l'AFJNmettent un accent particulier sur la sensibilisation et la formation pour favoriser une plus grande prise de conscience des droits et devoir de la femme.

Il faut noter également le rôle que joue la société civile dans le plaidoyer pour influencer une plus grande prise en compte des droits de la femme ou pour faire écho à une initiative internationale. L'adoption de la loi sur le quota considérée comme un pas de géant vers une plus grande équité dans la représentation des genres est aussi à mettre à l'actif des associations et ONG de promotion des droits de la femme.

A l'heure actuelle par exemple, les ONG et associations féminines ont déjà engagé plusieurs initiatives et mènent des actions de plaidoyer auprès des décideurs politiques en faveur de la ratification par la République du Niger du Protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatif aux droits des femmes. Ce protocole qui reprend certaines dispositions de la CEDEF pourrait rendre caduques une partie des réserves du Niger à la CEDEF.

Le dynamisme de la société civile nigérienne dans la conquête des droits de la femme ne signifie pas que le mouvement associatif ne connaît pas de limites. Tant s'en faut. Outre le problème de la faiblesse des moyens financiers qui limite leurs initiatives, il y la duplication des actions, un manque de concertation entre les regroupements qui vivent une sorte de rivalité nuisible aux actions de plaidoyer. Le contexte socioculturel peu favorable, la faiblesse des compétences techniques des membres dans certains cas et le contrôle que les pouvoirs publics ont tendance à exercer dans le fonctionnement des organisations limitent l'action de

60 Guigou Elisabeth, citée par Mariette Sineau, « l'obstacle familial », Problèmes politiques et sociaux, n° 835, mars 2000, p 62

ces dernières. L'entrée en scène des partis politiques, créant des associations pour infiltrer le milieu, demeure aussi un sujet de préoccupation.


· Les partis politiques : Le rôle des partis politiques dans la garantie des droits politiques de la femme est plus équivoque. D'une part ils consacrent tous une place importante à la promotion de la femme dans leurs programmes et discours mais d'autre part au moment de prendre les décisions, les responsables sont moins magnanimes.

L'action la plus remarquable des partis politiques en faveur des droits politiques de la femme se situe au niveau de la protection du droit de vote. Ils consacrent une énergie et des moyens considérables pour mobiliser les femmes à s'inscrire sur les listes électorales et à se servir de leurs droits de vote. Selon l'article 9 de la constitution du 09 août 1999, « les partis et groupements de partis politiques concourent à l'expression des suffrages. » Il s'agit donc là d'une mission constitutionnelle, non dénuée d'intérêts particularistes, dont les partis politiques s'acquittent plutôt bien.

Les partis jouent également un rôle considérable dans la mise en oeuvre de la loi sur le quota notamment au moment de la préparation des listes de candidatures pour les postes électifs. Ce rôle a surtout été bien joué en raison de l'effet dissuasif du contrôle des listes par la Cour constitutionnelle. L'on peut d'ailleurs aisément remarquer que les partis se sont limités au minimum requis. Les cas où les partis sont allés au delà de ce que prévoit la loi pour favoriser une meilleure représentation des femmes sont plutôt rares.

En réalité il faudrait examiner de près le fonctionnement des partis politiques essentiellement animés par les hommes, pour comprendre pourquoi ils se contentent du minimum dans la protection des droits politiques de la femme quand ils ne contribuent pas, à travers leurs propositions de nominations, à limiter la représentation des femmes au gouvernement et aux emplois supérieurs de l'Etat.

Chapitre 2 : La représentation des femmes dans les institutions publiques, les partis politiques et les associations

Les femmes constituent 50.13 % de la

population nigérienne mais elles ne

représentent que 26 % des effectifs de la fonction publique.

La représentation des femmes est essentielle pour atteindre un plus grand respect de la dignité humaine et un meilleur équilibre social. Le Préambule de la CEDEF rappelle à juste titre que « la discrimination à l'encontre des femmes viole les principes de l'égalité des droits et du respect de la dignité humaine, qu'elle entrave la participation des femmes, dans les mêmes conditions que les hommes, à la vie politique, sociale, économique et culturelle de leur pays, qu'elle fait obstacle à l'accroissement du bien- être de la société et de la famille et qu'elle empêche les femmes de servir leur pays et l'humanité dans toute la mesure de leurs possibilités

Selon l'article 21, paragraphe 1 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, « Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis. » Et le paragraphe 2 du même article d'ajouter : « toute personne a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays. » Si la représentation est une nécessité sociale, elle s'appuie donc sur des droits fondamentaux reconnus aux femmes. Ces droits sont déclinés par l'article 7 de la CEDEF : « Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans la vie politique et publique du pays et, en particulier, leur assurent, dans des conditions d'égalité avec les hommes, le droit :

a) de voter à toutes les élections et dans tous les référendums publics et être éligibles à tous les organismes publiquement élus;

b) de prendre part à l'élaboration de la politique de l'Etat et à son exécution, occuper des emplois publics et exercer toutes les fonctions publiques à tous les échelons du gouvernement;

c) de participer aux organisations et associations non gouvernementales s'occupant de la vie publique et politique du pays. »

La représentation des femmes dans la société nigérienne d'une manière générale est un indicateur pertinent du niveau d'équité entre les genres dans le partage des rôles et responsabilités.

Il est particulièrement intéressant à ce stade de notre étude de jeter un regard sur la représentation des genres qui nous aidera à mieux appréhender les résultats concrets, les effets réels des droits politiques reconnus aux femmes surtout en matière de participation à la gestion des affaires publiques. Cela permet non seulement d'évaluer la mise en oeuvre des lois consacrant ces droits politiques mais également d'identifier et d'apprécier les facteurs d'équité ou de discrimination à l'endroit des femmes.

Cette analyse nous permettra par la suite de mettre un accent sur les obstacles majeurs à une représentation plus équilibrée des genres dans les institutions et les emplois publics, les partis politiques et associations. Ce qui facilitera la mise en perspective de quelques pistes d'amélioration sous forme de recommandations.

Ainsi pour examiner la représentation des femmes du point de vue de leurs droits politiques, nous mettrons en lumière leur représentativité au sein de l'administration publique, les institutions de la République, dans les partis politiques et les associations d'une part (Section1) et les défis et perspectives d'amélioration d'autres part (Section 2)

Section - 1 Les femmes dans les emplois publics, les partis politiques et les associations

Le troisième des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) est de promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes. Selon le Rapport sur les OMD, « donner aux femmes un pouvoir égal d'intervention dans les décisions qui influent sur leur vie, du sein de la famille aux instances les plus élevées du gouvernement, c'est leur donner la clef de leur autonomie. Or, bien que leur représentation dans les parlements nationaux augmente régulièrement depuis 1990, elles n'occupent encore que 16 % des sièges parlementaires dans le monde. »61

Au Niger, sous la Ve République, la représentation des femmes a connu une progression dans certains domaines grâce notamment à la loi sur le quota et à une culture démocratique qui se renforce de plus en plus en faisant de l'espace aux associations et ONG de promotion des droits de la femme. Mais cette progression est encore insuffisante car le rapport entre hommes et femmes, du point de vue de la participation à la prise de décision,

61 Nations Unies, Objectifs du Millénaire pour le Développement Rapport 2005, New York 2005, p 14

tant à l'échelle locale qu'au niveau national, demeure inéquitable. Les hommes étant largement plus représentés dans les principaux centres décisionnels.

La faible représentation des femmes se remarque aussi bien au niveau de l'administration et des institutions publiques (A) que dans les partis politiques et associations (B)

A- Les femmes dans l'administration et les institutions de la République

Selon les résultats du dernier Recensement Général de la Population et de l'Habitat 2001, les femmes représentent 50,13% de la population nigérienne. « Si le taux actuel de croissance démographique de 3,1% l'an se maintient, la population féminine atteindrait 8 503 937 en 2015 sur une population projetée de 16 544 625 habitants. »62 La représentation des femmes dans les emplois publics ne reflète pas du tout leur poids démographique dans le pays. Cela influence, du coup, négativement leur participation à la prise des décisions et à l'élaboration des politiques même lorsque celles-ci les concernent comme le montre l'Indicateur de la Participation de la Femme (IPF) qui mesure la maîtrise que les hommes et les femmes peuvent exercer sur leur destinée dans les domaines politique et économique .

Selon le cinquième Rapport National sur le Développement Humain, Niger 2004 du système de Nations Unies (RNDH), « l'Indicateur de la Participation des Femmes (IPF), qui traduit les inégalités entre les hommes et les femmes, est estimé à 0,157 dans le [Rapport National sur le Développement Humain 2003] (...) L'indice de parfaite égalité est égal à un. »63

Pour mieux cerner cette réalité, nous allons examiner la représentation des femmes dans l'administration générale, les emplois supérieurs de l'Etat, les collectivités décentralisées et les institutions de la République.

1) Les femmes dans l'administration publique et les collectivités locales :

Les femmes représentent 26 % des effectifs de la fonction publique et 21.7 % des travailleurs du secteur privé et para-public.64 Mais comme on peut le constater dans le tableau ci-dessous, elles sont plus représentées dans les fonctions d'exécution. Selon une étude du Ministère du Développement Social, de la Population, de la Promotion de la Femme et de la Protection de l'Enfant (MDS/P/PF/PE), « la "masculinisation" des responsabilités de l'administration nigérienne est l'expression du caractère très élevé de l'analphabétisme des femmes ».65

62 Système des Nations Unies au Niger, 5ème Rapport National sur le Développement Humain, Niger 2004, p45

63 Ibid.

64 Ibid. p 46

65 MDS/P/PF/PE, Rapport de l'analyse approfondie des principaux indicateurs de la base de données désagrégée par sexe, CIERPA-Le Pharaon, Niamey, 2003, p21

Proportion des femmes selon la catégorie dans la fonction publique

Catégorie

% femmes

% hommes

Observations

Cadres A1

12,7

87,3

Cadres supérieurs

Cadres A2

21,7

78,3

Cadres A3

18,8

81,2

Cadres B1

21,5

78,5

Agents d'exécution

Cadres B2

37,8

62,2

Cadres C1

33,3

66,7

Cadres C2

34,9

65,1

Cadres D1

30,4

69,6

Cadres D2

22,7

77,3

Auxiliaires

21,3

78,7

 

Source : MDS/P/PF/PE, Rapport de l'analyse approfondie des principaux indicateurs de la base de données désagrégée par sexe, janvier-février 2003

L'on remarque aisément que la proportion des femmes est beaucoup plus importante dans les catégories B2 à D1 correspondant à la majorité des agents d'exécution sans formation de niveau supérieur. Les femmes sont moins présentes dans les catégories les plus élevées. Elles ne représentent que 12 % des A1, la catégorie la plus élevée, la mieux rémunérée avec plus d'opportunités d'accéder aux plus hautes responsabilités et donc les centres de décision de conception et d'élaboration des politiques.

La loi sur le quota a permis d'assurer une certaine proportion de femmes dans les conseils municipaux. Le taux de 10 % exigé par la loi demeure largement insuffisant. Au niveau des emplois supérieurs de l'Etat, le quota de 25 % n'est pas toujours réalisé. Le tableau suivant nous donne une idée des écarts par rapport à la loi sur le quota.

Proportion de femmes dans certains emplois supérieurs et les collectivités locales

Postes

Effectifs

Femmes

Quota exigé par la loi

Sources

 

Nombre

Pourcentage

Ambassadeurs

21

3

14,29%

25%

5ème RNDH, Niger 2004

Secrétaires Généraux de

Ministère

26

1

7.69 %

25%

5ème RNDH, Niger 2004

Directeurs centraux

189

35

18,52%

25%

5ème RNDH, Niger 2004

Conseillers à la Présidence de la République

19

1

5,26%

25%

5ème RNDH, Niger 2004

Conseillers des Ministères

39

6

15,38%

25%

MDS/P/PF/PE, 2003

Inspecteurs des Ministères

46

6

13,04%

25%

MDS/P/PF/PE, 2003

Gouverneurs de Région

8

0

0,00%

25%

5ème RNDH, Niger 2004 et Décret 2006-144 du 05/04/2006

Préfets de Département

36

0

0,00%

25%

5ème RNDH, Niger 2004 et Décret 2006-147 du 05/04/2006

Chefs de Postes Administratifs

24

0

0,00%

25%

5ème RNDH, Niger 2004 et Décret 2006-148 du 05/04/2006

Conseillers municipaux

3748

661

17,64%

10%

CARE International au

Niger, Stratégie d'accompagnement des femmes élues, 2005

Maires

265

6

2,26%

Non déterminé

CARE International au

Niger, Stratégie d'accompagnement des femmes élues, 2005

Ce tableau nous donne une idée de la proportion de femmes dans les emplois supérieurs de l'Etat. La représentation des femmes y est faible voire trop faible en violation de la loi sur le quota. L'administration territoriale (Gouverneurs de région, Préfets de département et Chefs de postes administratifs) est complètement masculinisée. Sous la Ve République une seule femme a brièvement occupé le poste de Préfet de Région (actuellement appelé Gouverneur de Région). Elle sera remplacée par un homme. Depuis, la branche moderne de l'Administration territoriale ne fait pas mieux que la chefferie traditionnelle, qui elle, est entièrement contrôlée par les hommes.

Dans un grand nombre de profession, la dispersion géographique des postes de responsabilité limite leur accès aux femmes. En effet, « Lorsqu'elles sont mariées, les femmes ne peuvent plus librement choisir leur domicile ou résidence. Ce choix revient au mari. »66

66 Ibid. p 63

L'article 15 paragraphe 4 de la CEDEF qui reconnaît à l'homme et à la femme le droit de « choisir leur résidence ou domicile » a d'ailleurs fait l'objet d'une réserve du Gouvernement de la République du Niger qui « déclare qu'il ne pourrait être lié par les dispositions de ce paragraphe [article 15 paragraphe 4] notamment qui concernent le droit de la femme de choisir sa résidence et son domicile, que dans la mesure où ces dispositions ne concernent que la femme célibataire. »67 Par cette réserve, le Niger maintient non seulement les conditions défavorables à l'accession des femmes à certains postes de responsabilités géographiquement dispersés, mais il institue une discrimination entre la femme mariée et la femme célibataire qui seule, peut décider de changer de résidence pour par exemple occuper un poste de responsabilité.

L'on constate que le quota est respecté au niveau des conseillers municipaux mais avec seulement 2.26 % de femmes au poste de maire, il est donc aisé de comprendre que les femmes ne disposent pas d'un poids réel dans la gestion des commune. Cela constitue une des grandes faiblesses de la loi sur le quota qui n'a pas créé les conditions d'une plus grande équité entre les genres au niveau des organes exécutifs des communes. D'ailleurs même au niveau de l'organe délibérant où le quota est exigé, la proportion des femmes demeure insuffisante pour influer de façon significative les choix des conseils qui prennent leur décision à la majorité, c'est-à-dire avec l'accord des hommes.

L'Analyse du Professeur Abdou Hamani au sujet de la capacité réelle des femmes ministres à influencer les décisions du Gouvernement est tout aussi valable au niveau des Conseils municipaux : « Le nombre est décisif et une petite minorité de femmes se heurte souvent à de grandes difficultés dès qu'elle veut se faire entendre »68.

2) Les femmes dans les institutions de la République :

Il faut rappeler que la loi sur le quota impose un seuil minimal de représentation des genres au niveau du Gouvernement (25%) et de l'Assemblée nationale (10%). Les autres institutions ne sont pas concernées par le quota. Le mode de désignation des membres de ces institutions obéit souvent à des critères d'ordre professionnel (Cour Suprême) ou le plus souvent des critères complexes comportant une phase d'élections à l'intérieur de structures associatives et professionnelles en dehors du contrôle de l'autorité de nomination (Conseil Supérieur de la Communication, Conseil Economique et Social, etc.).

Cela rendrait difficile l'application d'un quota. Néanmoins, pour garantir une meilleure représentation des femmes, il est tout à fait concevable de réserver des places aux

67 JORN n°19 du 1er octobre 1999, p 845

68 Hamani Abdou, Op. cit. p 61

organisations féminines ou d'autres structures représentant les intérêts de la femme comme c'est le cas de la composition de la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales.

- Représentation des femmes au Gouvernement

Périodes

nombres de Ministres

Femmes

Sources

Nombre

Pourcentage

1999- 2002

23

2

8,70%

MDS/P/PF/PE, 2003

2002- 2004

28

4

14,29%

Décrets n°2002- 263 /PRN du 08/11/2002 et n°2003- 284/PRN du 24/10/2003

2004 - avril 2006

26

6

23,08%

Décret n °2004- 404/PRN du

30/12/2004

L'on note une progression constante de la représentation des femmes dans les différents Gouvernements successifs de la Ve République qui passe de 8, 7 % en 1999 à 23,08% à partir de la deuxième législature. Il n'en demeure pas moins que la proportion des femmes ministres est toujours en dessous du quota légal de 25 %.

En outre, cette progression de la représentation des femmes au Gouvernement en nombre et en valeur relative ne doit pas cacher la réalité plus nuancée dans le partage du pouvoir au sein même du Gouvernement. Il faut constater avec Abdou Hamani que « les hommes occupent généralement des portefeuilles relatifs à la production (Finances, Commerce, Transport, Industrie, Mines...) et les femmes des portefeuilles relevant de la reproduction sociale (éducation, santé, affaires sociales). Nouvelles venues, elles sont soumises à des fortes pressions pour accepter les priorités et les points de vue de la majorité masculine. »69 Le poste de Premier Ministre n'a jusqu'ici été occupé par une femme.

Sous la Ve République, la présence prolongée et remarquable d'une femme au portefeuille stratégique des Affaires Etrangères et de la Coopération mérite d'être relevée comme une avancée dans la confiance placée aux femmes.

Les femmes au Gouvernement sont généralement plus qualifiées que la moyenne des nigériens et ont toujours au moins une formation ou une expérience pertinente dans leur domaine d'activité. L'on ne peut en dire pareillement pour les hommes ministres dont l'accès au Gouvernement semble plus facile et échappe en tout cas aux exigences (non écrites) de qualification et d'aptitude auxquelles les femmes sont apparemment soumises. En l'absence d'une évaluation des performances ou de mécanismes de sanction de

69 Hamani Abdou, Op. cit. pp 60 - 61

la performance nos ministres (comme dans les grandes démocraties) il est difficile d'avancer plus loin dans la comparaison.

- Les femmes au parlement :

Périodes

nombre
députés

femmes

nombre

Pourcentage

Première législature de la Ve République : 1999 - 2004

83

1

1,20%

Deuxième législature de la Ve République : 2004 - 2009

113

14

12,39%

Les femmes sont 50, 13 % de la population mais

12.39 % seulement de la

représentation nationale Au parlement également la présence des femmes a

nettement tendance à s'améliorer. La première assemblée de la Ve République installée avant l'adoption de la loi sur le quota ne laissait qu'une seule place aux femmes. Grâce à la loi sur le quota la proportion de femmes députées passe de 1,2 % à 12,39 %. Même si ce rapport est conforme à loi sur le quota, le Niger se situe en dessous de la moyenne en Afrique Subsaharienne qui est de 14 % de femmes parlementaires en 2005 et de la moyenne mondiale de 16 %70 . La loi sur le quota est ici respecté mais les résultats ne sont pas satisfaisants. En effet il y a un vrai problème d'équité lorsque 50.13 % de la population ne représente que 12.39 % des députés à l'Assemblée nationale, haut lieu de représentation du peuple.

La répartition des pouvoirs au sein du parlement montre une fois de plus que les femmes ne contrôlent pas les décisions même lorsque le quota légal est réalisé. Le Président et les Vice-présidents de l'Assemblée ainsi que les Présidents des groupes parlementaires sont actuellement tous des hommes. Toutefois deux (2) des sept (7) commissions permanentes de l'Assemblée sont présidées par des femmes. Il s'agit de la Commission des Affaires Sociales et Culturelles (CAS/C) et la Commission des Affaires Générales et Institutionnelles (CAG/I). La Commission des Affaires sociales et Culturelles comprend à elle seule six (6) femmes et aucun homme ne siège en son bureau. Cela confirme une certaine tendance à confiner les femmes dans les activités de reproduction.

B - Les femmes dans les associations et les partis politiques

L'ouverture démocratique consolidée par la Ve République a fortement favorisé l'engagement des citoyennes et des citoyens dans les partis politiques et associations. Les

70 Voir notamment, Nations Unies, Objectifs du Millénaire pour le Développement Rapport 2005, New York 2005, p 16

femmes, compte tenu de leur capacité de mobilisation et d'animation sont beaucoup sollicitées par les organisations politiques et de la société civile. Il faut, à ce niveau, noter une grande évolution de la position des femmes dans la société civile où elles contrôlent un grand nombre d'association alors que dans les partis politiques elles sont plus des mobilisatrices d'électeurs que des leaders capables d'influencer significativement les décisions stratégiques. L'analyse de la position des femmes dans les organes dirigeants des différentes structures nous permet ainsi d'apprécier le niveau d'équité entre les genres dans la société civile et la classe politique.

1) Représentation des femmes dans les bureaux des ONG et associations

Fonctions

effectifs

Femmes

nombre

pourcentage

Président

229

45

19,65%

Vice-président

110

22

20,00%

Secrétaire Général

160

28

17,50%

Secrétaire Général Adjoint

90

21

23,33%

Trésorier Général

169

59

34,91%

Trésorier Général Adjoint

93

29

31,18%

Secrétaire chargé des relations extérieures

34

7

20,59%

Secrétaires Adjoints chargés des relations

extérieures

15

4

26,67%

Source : MDS/P/PF/PE, Rapport de l'analyse approfondie des principaux indicateurs de la base de données désagrégée par sexe, janvier -février 2003

L'on remarque que selon les données disponibles, les femmes sont moins représentées que les hommes dans les postes les plus importants. Cela se traduit par le nombre important d'organisations contrôlées par les hommes. Toutefois le nombre important d'associations et ONG féminines a eu pour effet de donner plus de visibilité aux femmes au sein de la société civile. Ces associations sont essentiellement constituées de femmes et se préoccupent surtout de la promotion de la femme. Cette concentration des femmes dans la promotion de leurs droits et intérêts leur permet de se faire entendre mais elle a l'inconvénient de les isoler du reste de la société civile qui a tendance à reléguer les droits de la femme au second plan de leurs préoccupations.

Les organisations dites féminines « sont essentiellement tournées vers la promotion de la femme, qu'elles considèrent comme un objectif qu'elles ne peuvent réaliser que dans le cadre d'organisations regroupant des personnes proches d'un point de vue biologique c'est-à-dire

des femmes. Cette concentration des femmes dans des organisations féminines s'est faite au détriment de la participation des femmes aux activités des autres associations et ONG. »71

2) Représentation des femmes dans les bureaux de cinq (5) partis politiques représentés à l'Assemblée Nationale

Fonctions

effectifs

Femmes

nombre

pourcentage

Membres des bureaux politiques

712

99

13,90%

Présidents

5

0

0,00%

Vice-présidents

39

2

5,13%

Secrétaires Généraux et Secrétaires aux élections

18

0

0,00%

Trésoriers Généraux et Adjoints

19

2

10,53%

Secrétaires à l'organisation

24

1

4,17%

Source : MDS/P/PF/PE, Rapport de l'analyse approfondie des principaux indicateurs de la base de données désagrégée par sexe, janvier -février 2003

La sous représentation des femmes dans les instances dirigeantes des partis politiques les plus influents est criarde. Minoritaires dans les bureaux politiques, leur proportion baisse encore au fur et à mesure que l'on monte dans la hiérarchie. Comme au Gouvernement, les femmes occupent essentiellement des fonctions considérées comme féminines (affaires sociales, promotion de la femme, santé, éducation, etc.). Pour mieux détourner les femmes de la conduite des orientations et décisions stratégiques, certains partis ont créé des organisations des femmes dont la présidente est généralement Secrétaire à la promotion de la femme dans le bureau politique.

Structures de masse, ces organisations qui sont plus actives en période électorale et à l'occasion des congrès sont surtout des structures d'animation et de mobilisation d'électeurs. Loin de la conception des programmes, elles excellent dans l'organisation des manifestations folkloriques et récréatives (soirées culturelles, concerts, tam-tam, etc.) destinées à accroître la visibilité du parti à travers danses, chants, exhibition d'habits aux couleurs du parti et souvent à l'effigie de son leader, etc. Les organisations de femmes de partis s'appuient presque toujours sur les réseaux sociaux des femmes et leurs familles pour mobiliser des électrices et électeurs pour les partis.

71 MDS/P/PF/PE, Op. Cit. p 19

Ainsi, « en investissant l'espace public par le code vestimentaire (boubou avec effigie), par le bruit (musique, chants, ...), [la femme] participe à la théâtralisation de la politique, à son inscription symbolique dans le réalité du terroir en activant comme toujours les leviers de la solidarité, de la parenté, du voisinage. Mais cette forme de transaction qui relève de l'initiative des hommes (...) montre que la théâtralisation que nous avons mentionnée tient beaucoup plus du jeu de marionnette. »72

Les femmes aident les partis à remplir les salles de congrès et les bureaux de vote mais c'est aux hommes qu'il appartient de décider du partage des responsabilités et de l'attribution des postes acquis grâce à l'effort collectif.

La sous représentation des femmes dans les bureaux politiques participe du même processus plus général qui a pour résultat la limitation de l'accès des femmes aux instances de prise de décision dans la société. Ce processus est culturel et mental avant d'être politique et social. C'est le principal défi à relever pour tendre vers une meilleure participation politique de la femme nigérienne.

Section 2 - Défi et perspectives

Un faisceau de facteurs intimement imbriqués bloque le plein exercice des droits politique de la femme au Niger. Toutefois, à la faveur du processus démocratique et surtout de l'évolution du contexte international depuis quelques décennies, ces obstacles ne sont plus insurmontables. Quels sont les obstacles à l'effectivité des droits politiques de la femme nigérienne ? Quelles sont alors les possibilités d'améliorer la situation actuelle ? Voilà deux (2) questions auxquelles cette dernière section de l'étude tentera de répondre.

A- les défis à relever :

Selon Abdou Hamani, « La sous-représentation des femmes dans les sphères du pouvoir politique est un problème mondial. »73 Au Niger, les facteurs qui freinent la participation politique des femmes sont de plusieurs ordres et se situent dans certains cas en dehors du champ politique ou du moins en amont des manifestions du politique. L'on distingue des facteurs sociaux, culturels, économiques et juridiques qui se conjuguent et influent sur l'exercice des droits politiques des femmes au Niger.


· Au plan culturel, le faible taux de scolarisation et donc l'accès limité des femmes à l'instruction constitue un handicap majeur à la jouissance effective des droits politiques des femmes. En effet le taux de scolarisation au Niger est l'un des plus faibles de la

72 Diaw C. Aminata, Op. Cit. p 20

73 Hamani Abdou, Op. Cit., p 171

Sous région ouest africaine. Mais il a connu une évolution sensible au cours des dernières années. Le tableau ci-dessous nous renseigne sur le taux brut de scolarisation.

Taux brut de scolarisation au Niger (les chiffres dans le corps tableau sont des pourcentages)

 

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

2003-2004

2004-2005

ENSEMBLE

34

37

42

45

50

52

FILLES

27

30

33

37

40

43

GARCONS

39

45

50

54

60

63

Sources : Ministère de l'Education de Base et de l'Alphabétisation (MEBA), annuaire statistique 2004 - 2005

L'évolution du taux de scolarisation est beaucoup plus marquée chez les garçons que chez les filles où ce taux est de 43 % en 2005 alors que la moyenne nationale est de 52%. Cette disparité dans l'égalité des chances dans l'accès à l'école se traduit à long terme par une inégalité dans l'accès aux emplois publics et bien d'autres opportunités. L'analphabétisme qui frappe plus les femmes que les hommes, leur empêche d'exploiter toutes leurs potentialités dans la vie. Le Niger est loin de réaliser l'objectif de « garantir à tous une éducation primaire » et de la cible d'«éliminer la disparité entre les sexes dans les enseignements primaires et secondaires d'ici 2005 si possible et, à tous les niveaux de l'enseignement en 2015 au plus tard ».74

Le volume des tâches ménagères a une influence négative à la fois sur le taux de scolarisation et à la survie scolaire des jeunes filles gardées auprès de leurs mères qu'elles aident dans les travaux domestiques. Selon le Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP), « le faible niveau d'éducation de la jeune fille et d'alphabétisation de la femme s'explique également par la persistance des pesanteurs socioculturelles (notamment les mariages forcés, la claustration, etc.) l'interprétation erronée des préceptes de l'islam qui régissent la vie de la société et la méconnaissance de leurs droits par les femmes. »75


· Sur le plan social, les modèles et stéréotypes basés sur l'infériorité de la femme conduisent à la masculinisation de certaines responsabilités et activités auxquelles les femmes ont plus de peine à accéder (postes de cadres de commandement par exemple). Certaines pratiques sociales fondées sur la religion ou les coutumes (la claustration par exemple) font échec aux principes égalitaires dont sont porteurs les textes consacrant les droits politiques de la femme, y compris la constitution. Ce que confirme le RNDH 2004 qui souligne que « les

74 Voir Objectifs du Millénaire pour le développement.

75 Cabinet du Premier Ministre de la République du Niger, Op. cit., p 44

résistances socio-culturelles à l'égalité des hommes et femmes et à l'autonomisation des femmes constituent l'un des principaux obstacles à surmonter pour introduire des réformes en faveur des femmes. Les mariages précoces, la division sexuelle du travail, les mariages forcés et la persistance de pratiques néfastes comme les mutilations génitales des femmes dans certaines zones, constituent autant d'obstacles à la promotion des femmes. »76

· Du point de vue économique, la pauvreté généralisée du pays, qui frappe les femmes en particulier, est un handicap sérieux à leur plein épanouissement. Le DSRP du Niger révèle que 63 % des nigériens (soit deux nigériens sur trois) vivent en dessous du seuil de la pauvreté et 34 % (une personne sur trois) vivent en dessous du seuil de l'extrême pauvreté. Selon le RNDH Niger 2004, «beaucoup plus marquée en milieu rural, la pauvreté affecte moins les hommes que les femmes, notamment les femmes au foyer et les inactifs à hauteur de 75%. »77

Victimes de discriminations dans l'accès aux emplois les plus rémunérateurs, elles ont un accès très limité aux moyens de production. Dans ces conditions le combat quotidien des femmes pour la satisfaction des besoins pratiques (trouver de l'eau, se nourrir, soigner ses enfants, se vêtir, etc.) a tendance à prendre le pas sur la défense de leurs intérêts stratégiques. Le contexte socio-économique actuel du Niger ne permettra pas, à court et moyen terme, d'éliminer l'inégalité des sexes ainsi que les disparités entre les sexes.

· Sur le plan juridique et institutionnel, il se pose un problème de garantie des droits affirmés par les conventions internationales et les normes nationales. L'exemple le plus récent se rapporte aux dispositions de la loi sur le quota qui ont permis une amélioration de la représentation des femmes dans les fonctions électives mais peinent à s'imposer dans les mesures nominatives. La garantie du recours à la Chambre administrative est difficile à mettre en oeuvre comme nous l'avons vu plus haut. Ce qui fait dire à la Direction de la Promotion de la femme que « dans les faits, la loi sur le quota n'est pas aisée à mettre en oeuvre. »78

Par ailleurs, avec le poids des traditions et de l'influence de la religion, l'écrasante majorité des femmes nigériennes ignorent jusqu'à l'existence des lois et conventions qui leur accordent des droits égalitaires. Les réserves du Niger à la CEDEF, qui selon certains Etats parties à la convention, «vident l'engagement de la République du Niger de tout contenu »79, s'expliquent en grande partie par la reconnaissance de cette réalité sociologique.

76 Système des Nations Unies au Niger, Op. Cit. p 78

77 Ibid. p 32

78 MDS/P/PF/PE, Op. Cit. p 22

79 Voir RJDH, recueils des instruments juridiques internationaux et régionaux africains relatifs aux droits humains ratifiés par le Niger, Niamey, NIN, 2003, p 75

Il faut souligner la cohabitation entre les normes coutumières et le droit moderne qui lui- même a ses propres contradictions internes. Certaines dispositions de la loi sont par exemple contraires aux principes généraux énoncés par la constitution. Le cas typique est celui de l'article 223 du code civil qui reconnaît à l'époux un droit d'opposition au travail de la femme en violation de l'article 25 de la Constitution qui reconnaît « à tous les citoyens le droit au travail» ainsi que des conventions internationales relatives aux droits de l'homme ratifiées par le Niger.

Le statu quo qui correspond à la sous représentation des femmes dans les institutions devient difficile à réformer car les principales personnes concernées, les femmes, ne sont pas toujours suffisamment associées aux réflexions et à l'élaboration des politiques. Cela est d'autant plus vrai que le niveau d'organisation et de coordination des organisations de promotion des droits de la femme n'est pas de nature à ébranler le rapport de forces ou à jouer un rôle de persuasion et de dissuasion en faveur des droits politiques de la femme auprès des décideurs.

B - Perspectives d'amélioration des conditions d'exercices des droits politiques de la femme

Au Niger, pas plus qu'ailleurs, la réforme des questions liées aux habitudes, aux comportements sociaux n'est jamais aisée. La vision égalitaire du droit issue des conventions internationales et de la constitution se heurte aux résistances socioculturelles et religieuses. Mais aujourd'hui la réforme s'impose car le Niger a souscrit à des engagements et il est de plus en plus évident pour tout le monde qu'un Etat démocratique ne peut se construire sur la base de la discrimination entre les citoyens. En effet «l'inégalité entre les sexes est un gaspillages de ressources et de potentialités précieuses et ne s'accorde pas aux valeurs déclarées d'une démocratie pluraliste. »80

L'élimination des disparités entre les sexes en matière de droits est un impératif de développement auquel le Niger ne saurait se soustraire. Pour améliorer l'exercice effectif des droits politiques de la femme, quelques pistes de réflexion et peut-être d'action peuvent être judicieusement envisagées. Il s'agira avant tout de moderniser le droit en la matière, d'apporter plus de garantie aux droits politiques de la femme et de faire en sorte que le Niger puisse respecter ses engagements internationaux.

80 Hamani Abdou, Op. Cit. p183


· Réformer les normes coutumières et modernes en ce qu'elles ont de discriminatoire : La Constitution et les conventions internationales régulièrement ratifiées par le Niger se trouvent au sommet de la hiérarchie des normes. Il est donc impératif d'engager un travail d'harmonisation des normes inférieures (lois, règlements et coutumes). Il s'agira là d'un travail qui doit s'inscrire dans le moyen et long terme avec une forte implication des parties prenantes dans un processus de négociation et d'information. Il faudrait informer les citoyens et leur donner déjà l'occasion de mettre en oeuvre l'article 113 de la Constitution selon lequel « toute personne partie à un procès peut soulever l'inconstitutionnalité d'une loi devant toute juridiction par voie d'exception. » Un Observatoire national de la promotion de la femme opérationnel travaillant en collaboration avec la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales pourrait apporter cet éclairage soit directement soit à travers les organisations de la société civile.

· Lever les réserves du Niger à la CEDEF : La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, est considérer comme une véritable charte des droits de la femmes. La levée des réserves émises par la république du Niger permettra de faire bénéficier aux femmes nigériennes de l'ensemble des droits affirmés par la convention. Cela permettra surtout d'ôter toute base juridique aux nombreuses discriminations dont les femmes sont victimes.

· Améliorer l'accès des femmes à l'éducation : Une meilleure jouissance des droits

politiques de la femme passe nécessairement par l'amélioration de leur accès à l'instruction. Les efforts de l'Etat pour améliorer le taux de scolarisation et celui de la jeune fille en particulier doivent se poursuivre à tous les niveaux de l'enseignement. Mais l'amélioration du taux de scolarisation ne suffit pas. Encore faudrait-il mettre l'accent sur la qualité même des programmes et du cadre de l'école pour augmenter les chances de réussite des élèves et étudiants. L'école doit surtout contribuer à éliminer toutes les formes de discriminations dont sont victimes les femmes et combattre les stéréotypes fondés sur l'infériorité de la femme. L'école doit former tous les enfants du pays et en faire des citoyens égaux.

· Ratifier le protocole à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples relatifs aux droits des femmes, sans réserve : ce protocole régional vise à assurer la promotion, la réalisation et la protection des droits de la femme afin de lui permettre de jouir pleinement de tous les doits humains comme le précise bien son préambule. Les Etats parties se déclarent « préoccupés par le fait qu'en dépit de la ratification par la majorité des États Parties à la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et de tous les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, et de l'engagement solennel pris par ces États d'éliminer toutes les formes de discrimination et de pratiques néfastes à l'égard des femmes, la femme en Afrique continue d'être l'objet de discriminations et de pratiques

néfastes ». Aux termes de l'article 2 du protocole, ils s'engagent par conséquent à combattre « la discrimination à l'égard des femmes, sous toutes ses formes, en adoptant les mesures appropriées aux plans législatif, institutionnel et autre. »

La ratification de ce protocole permettra de combler les lacunes nées des réserves du Niger à la CEDEF. Les organisations féminines ont fait de la ratification intégrale de ce texte leur cheval de bataille. L'incorporation de ce protocole dans le droit nigérien rendra hors la loi plusieurs pratiques discriminatoires à l'égard des femmes.

· Réviser la loi sur le quota : Initiative louable pour améliorer la participation des femmes à l'Assemblée, dans les conseils locaux, au Gouvernement et dans les emplois supérieurs de l'Etat, la loi sur le quota a permis l'entrée d'un nombre plus élevé de femmes au parlement et dans les conseils municipaux. Mais comme l'affirme si bien Jacqueline de Groote « il ne suffit pas que quelques femmes accèdent à de hautes fonctions. Isolées des autres femmes, elles y deviennent rapidement des otages du pouvoir en place. Il faut un nombre suffisant de femmes au pouvoir pour apporter une vision nouvelle des relations entre les hommes et les femmes dans la société et faire évoluer les institutions. »81

Avec 12 % de femmes à l'Assemblée Nationale, la loi sur le quota n'a toutefois pas permis au Niger de réaliser la moyenne africaine de représentation des femmes au parlement qui est de 14 % alors que la moyenne mondiale est de16 % selon le rapport 2005 des Nations Unies sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Une révision plus ambitieuse de ce quota à la hausse s'impose pour permettre au Niger de s'inscrire parmi les nations qui cherchent à établir la plus grande équité entre les genres au sein de la représentation nationale.

Par ailleurs les effets attendus de la loi sur le quota tardent à se produire au niveau des nominations au niveau du Gouvernement et des emplois supérieurs de l'Etat et la garantie de recours offerte par son décret d'application s'avèrent difficile à mettre en oeuvre. Pour avoir plus d'impact, il faut étendre le système de quota à toutes les institutions de la République en réservant des places aux femmes. La révision du code électoral dans le sens d'introduire la discrimination positive au regard de la caution à verser et de la répression du harcèlement basé sur le sexe paraît salutaire pour donner plus de chance à celles qui en ont le moins dans la préparation et le déroulement des compétions électorales.

· Offrir plus de garanties aux droits politiques de la femme : L'Observatoire Nationale de la Promotion de la femme créé par le Décret n°99-545/PCRN/MDS/P/PF/PE du

81 De Groote J., « pourquoi, partout, la question de la place de la femme dans le processus de décision et de la responsabilité publique se pose-t-elle ? », La place de la femme dans la vie publique et dans la prise de décision, Paris, L'Harmattan, 1997, p 24

21 décembre 1999 doit être redynamisé pour lui permettre de jouer un rôle actif dans la promotion et la protection des droits politiques de la femme. Sa composition doit être revue pour faire plus de place aux organisations de la société civile (associations et ONG). Le nombre de fonctionnaires et la présidence confiée à un ministre ne permettent pas à l'Observatoire d'avoir l'indépendance ou du moins l'autonomie nécessaire à la bonne exécution d'une telle mission. Les membres de l'Observatoire doivent élire leur président et les autres membres du bureau. Ce mécanisme est plus conforme à l'esprit de la démocratie et plus approprié à la recherche de l'efficacité. Cet Observatoire peut travailler étroitement avec la Commission Nationale des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (CNDHLF) dont nous avons examiné la mission plus haut, pour assurer une meilleure protection des droits politiques de la femme. En effet le pouvoir de recevoir des plaintes, de s'auto-saisir, de mener des enquêtes et les compétences de médiation reconnus à la CNDHLF sont autant de mécanismes qui, mis au service de l'exercice des droits politiques de la femme, permettent de mieux en garantir la protection. Il suffit finalement de quelques ajustements législatifs et institutionnels pour garantir une plus grande effectivité des droits politiques de la femme au Niger.

CONCLUSION

De son accession à la souveraineté internationale (en 1960) à nos jours, la République du Niger a adhéré ou ratifié la plupart des conventions internationales affirmant les droits de l'homme y compris les droits politiques de la femme. Si, en raison de la nature moins démocratique des tous premiers régimes politiques, les droits politiques n'ont pas bénéficié de conditions favorables à leur exercice, avec l'éveil du mouvement féministe international et l'avènement de la démocratie pluraliste au Niger, le débat sur les droits de la femme et sa place dans la vie publique prend forme et vitalité.

Capitalisant les acquis des conventions internationales, la constitution de la Ve République consacre l'égalité entre les hommes et les femmes dans la jouissance de leurs droits sur tous les plans. Sur la plan législatif, la Ve République va reconnaître et poser très clairement la nécessité d'assurer une plus grande équité dans la représentation des genres aux haute fonctions de l'Etat. Pour améliorer l'équité entre les genres la loi n° 2000-008 du 07 juin 2000 plus connue sous l'appellation de « Loi sur le quota », fixe pour certaines fonctions publiques, un minimum de représentation exigé pour l'un ou l'autre des sexes.

Le caractère démocratique de la Ve République et la stabilité institutionnelle (au moins du point de vue de la durée) qui la caractérise ont favorisé l'émergence et le dynamisme d'une société civile dont une importante partie se consacre à la promotion de la femme.

Ce cadre juridique et institutionnel a permis d'améliorer de manière sensible la représentation politique des nigériennes et leur engagement dans les associations et les organisations politiques. Sur ce plan la Ve république a fait assurément mieux que ses devancières.

Toutefois ce jugement peut-être nuancée lorsqu'on aborde la question en termes de possibilité offerte aux femmes de jouir de l'ensemble de leurs droits en tant qu'être humain, indépendamment de l'histoire politique du Niger. Aujourd'hui encore , l'on est loin de réaliser la participation équitable des hommes et des femmes à la prise de décision. Plusieurs facteurs concourent à cela.

A côté d'un droit égalitaire consacré par les conventions internationales et la Constitution nigérienne, évoluent des normes modernes et coutumières discriminatoires à l'égard des femmes. Cela révèle le poids des traditions et des pratiques sociales solidement ancrées dans les mentalités et qu'aucun régime n'a encore osé réformer profondément. Les réserves formulées par la République du Niger à la Convention sur l'Elimination de toutes les

formes de Discrimination à l'Egard des Femmes (CEDEF) en sont la plus parfaite illustration. A l'article 5 de la CEDEF par exemple, qui rend hors la loi les idées fondées sur l'infériorité ou la supériorité d'un sexe, « le gouvernement de la République du Niger émet des réserves en ce qui concerne la modification des schémas et modèles de comportement socioculturels de l'homme et de la femme »82. Or comme nous l'avons vu plus haut, une pratique comme la claustration des femmes mariées les prive de la possibilité d'exercer une activité ou d'occuper une responsabilité en dehors du foyer. Cette pratique empêche même à une femme d'aller voter sans l'autorisation de son mari.

L'analphabétisme et la pauvreté généralisés dans le pays sont aussi des handicaps à la participation politique des femmes, car celles-ci sont plus frappées par ces deux phénomènes que les hommes. L'inégalité dans l'accès à l'éducation et à l'alphabétisation et le manque d'égalité des chances dans l'accès et le contrôle des sources de revenus (emploi, moyens de production, etc.) dans la société contribuent lourdement à la marginalisation des femmes et leur empêchent de jouir de certains de leurs droits.

Par ailleurs, en dépit d'un contexte démocratique plus favorable et de l'émergence d'une société civile à laquelle prennent activement part les femmes, les mécanismes de garantie des droits politiques de la femme restent perfectibles. D'une part certains mécanismes de garantie politique ne sont pas toujours opérationnels et d'autre part les garanties juridictionnelles se révèlent souvent difficiles à mettre en oeuvre. La loi sur le quota par exemple prévoit un recours contentieux contre les décisions de nomination au Gouvernement qui n'assureraient pas le quota de 25 % de représentation de l'un ou l'autre des sexes. Mais cette garantie n'est en réalité qu'une fausse sécurité car difficile à mettre en oeuvre sur un plan pratique et techniquement inopérante. En effet, en plus de la difficulté de savoir qui a intérêt à attaquer une décision de nomination, il se pose un problème de savoir si la juridiction administrative peut connaître des actes relatifs à la nomination des membres du gouvernement considérés par une partie de la doctrine comme des actes de gouvernement donc, insusceptibles de recours contentieux. L'absence au Niger d'une jurisprudence établie en la matière rend le problème entier. Le résultat est que le quota n'est pas encore réalisé au niveau des mesures de nomination.

Au delà des difficultés techniques, l'on peut se poser la question de la volonté politique de faire changer plus profondément le statu quo qui est du reste largement défavorable aux femmes. En dépit des discours et des promesses, les partis politiques,

82 JORN, n° 19 du 1er octobre 1999, p 845

l'administration et les institutions de la République sont très largement dominés par les hommes. En dehors de l'Assemblée nationale et des conseils municipaux où le quota légal est assuré, la représentation des femmes aux emplois supérieurs de l'Etat et dans les institutions de la République (ces institutions sont hors quota) est largement en deçà du minimum fixé par la loi. Les nominations de cadres supérieurs pris en conseil de Ministres, violent régulièrement le principe du quota. Par ailleurs il n'y a pas une stratégie claire de discrimination positive dans la vie publique et les instances de prise de décision de manière à améliorer la participation politique de la femme.

Par ailleurs, l'absence d'un cadre de concertation sur les droits de la femme au sein de la société civile ne permet pas à cette dernière d'opérer en synergie et de jouer un rôle majeur d'influence sur les décisions et les politiques du Gouvernement.

La participation équitable des genres n'est pas et ne peut être un discours. C'est « une exigence en termes de droits de l'homme et de justice sociale, en termes de contribution au développement à visage humain, ainsi qu'à la paix et à la résolution pacifique des conflits. »83

En définitive, les acquis du point de vue du cadre juridique doivent être sauvegardés et d'importants efforts restent à faire pour réformer les normes et usages internes discriminatoires. Plus de six (6) ans après l'adoption de la loi sur le quota qui est déjà un bon début dans la recherche de l'équité des genres dans la jouissance des privilèges et libertés, il est temps de réviser ce texte pour tendre vers une meilleure représentation des femmes et une participation plus équitable dans la vie publique et dans la prise de décision.

Les droits fondamentaux, dont font partie les droits politiques, sont des droits inhérents à la personne humaine indépendamment de toute considération de sexe. L'égalité de tous les citoyens dans la jouissance de leur droits politiques est à la fois une exigence de développement et un facteur de paix sociale. Le Niger ne peut espérer raisonnablement atteindre le progrès en maintenant plus de la moitié de sa population à l'écart de la conduite des affaires publiques et des processus politiques.

Il faut bien convenir avec M. Koffi Annan, Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies, que « l'inégalité dont souffrent les femmes et les violations de leurs droits fondamentaux demeurent des obstacles majeurs au développement, à la démocratie et à la paix » 84.

83 Ould Daddah Turkia, « Exposé introductif », La place de la femme dans la vie publique et dans la prise de décision, Paris, L'Harmattan, 1997, p 7

84 Annan, A. Koffi, Rapport annuel du Secrétaire Général de l'ONU sur les activités de l'organisation, New York, Nations Unies, 1998, p 32

ANNEXES

- Annexe 1 : les réserves de la République du Niger à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDEF)

"Réserves
nigériennes à la CIDI

- Annexe 2 : loi n° 2000-008 du 07 juin 2000 instituant le système de quota dans les fonctions électives, au gouvernement et dans l'administration de l'Etat (Loi sur le quota)

"Loi sur le quota.pd~"

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- http://www.pnud.ne/

- http://www.assemblee.ne/






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